Assemblée générale: multiplication des appels à lever les obstacles à une victoire totale contre le VIH/sida
« L’élimination du VIH/sida est à notre portée », a affirmé, ce matin, la Présidente de l’Assemblée générale, Mme Maria Fernanda Espinosa Garcés, au cours de la séance consacrée à l’examen de la mise en œuvre de la Déclaration d’engagement sur le VIH/sida de 2001 et des Déclarations politiques qui ont suivi, dont la dernière remonte à 2016.
Le rapport du Secrétaire général intitulé « Stimuler les ambitions mondiales de mettre fin à l’épidémie de sida après une décennie de progrès » est clair: « la détermination de la communauté internationale à vaincre l’une des plus grandes crises sanitaires de l’histoire a permis de réaliser des progrès remarquables ». En 2017, 21,7 millions de personnes dans le monde recevaient des traitements antirétroviraux, soit 5,5 fois plus qu’il y a 10 ans. Les programmes de communication sur le changement des attitudes et de distribution de préservatifs ont permis de réduire l’incidence de l’infection à VIH dans divers milieux et de plus en plus de pays ont éliminé la transmission mère-enfant du VIH.
À l’échelle mondiale, les décès causés par des maladies associées au sida dans toutes les tranches d’âge et les cas d’infection d’enfants par le VIH ont été réduits de presque la moitié, et les nouveaux cas d’infection chez les adultes ont diminué de 19%. Ces progrès, a tempéré le Brésil, doivent être perçus comme un encouragement et non comme un accomplissement, puisque de nombreux défis restent à relever.
La Chef de Cabinet du Secrétaire général, Mme Maria Luiza Ribeiro Viotti, a en effet reconnu le caractère inégal des progrès. Depuis 2010, par exemple, l’Europe de l’Est et l’Asie centrale ont enregistré une augmentation de 30% des infections. Quelque 25 000 à 30 000 nouvelles infections sont signalées chaque année dans l’Union européenne. En 2018, 14% des 800 000 personnes vivant avec le VIH/sida n’avaient pas été diagnostiquées. En Afrique subsaharienne, a alerté, à son tour, le Groupe des États d’Afrique, les connaissances qu’ont les jeunes de l’épidémie stagnent depuis 20 ans, d’où le taux élevé des infections parmi les adolescents et les jeunes femmes dont de nombreuses mères. Il est regrettable, s’est impatientée la Norvège, qu’un grand nombre de ces questions continuent de faire l’objet de controverses à l’ONU. Pourquoi est-il si difficile de parvenir à un consensus sur les droits à la santé reproductive? se sont impatientés le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande (CANZ). Or, l’avenir de la riposte au VIH nécessitera que nous regardions au-delà de la prestation des soins et que nous veillions à ce que ces droits soient intégrés à la couverture sanitaire universelle, a martelé la Norvège. La réponse complète au VIH/sida ne peut seulement reposer sur des politiques de santé publique. Il faut tenir compte de la dimension de droits de l’homme et des mesures sociétales proactives pour combattre la stigmatisation et l’exclusion, a renchéri le Liechtenstein.
Le sida reste la quatrième cause de mortalité dans les pays à bas revenu et la deuxième en Afrique subsaharienne, a souligné le Groupe des États d’Afrique. Comme il s’agit d’un continent en proie aux conflits, aux troubles sociaux et aux catastrophes induites par les changements climatiques, lesquels sont autant de facteurs qui poussent les gens à partir, il faut faire attention au risque que le nombre de personnes vivant avec le VIH augmente.
Devant ce constat, les 25 délégations qui se sont exprimées aujourd’hui ont toutes salué les six recommandations du Secrétaire général pour « stimuler les ambitions mondiales ». M. António Guterres recommande d’abord de redynamiser la prévention primaire du VIH puis de diversifier le dépistage et de différencier la prestation des soins de santé pour atteindre la cible 90-90-90 tendant à ce que 90% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut VIH, que 90% d’entre elles suivent un traitement et enfin que 90% de ces dernières atteignent un niveau de charge virale indétectable.
Le Secrétaire général recommande aussi de mettre en place un environnement juridique et politique favorable afin d’atteindre les populations marginalisées et vulnérables, dont les populations à risque. Les États devraient en outre mobiliser des ressources additionnelles et les affecter là où elles sont le plus nécessaires. La somme de 14 milliards de dollars étant demandée au titre du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme pour la période 2020-2022, la France, qui accueillera la sixième conférence de reconstitution du Fonds le 10 octobre prochain à Lyon, a dit attendre des engagements concrets pour la hausse des budgets nationaux de la santé et la gratuité des soins. L’Union européenne a promis de maintenir son engagement financier au même niveau, voire plus, elle qui a déjà versé au Fonds 2 milliards de dollars depuis 2002, soit 50%.
Dans ses recommandations, le Secrétaire général parle également de soutenir les populations afin qu’elles puissent jouer leur rôle essentiel car la mobilisation « exceptionnelle » de la société civile a permis de mener une lutte tout aussi « exceptionnelle » contre le VIH à l’échelle mondiale. Il plaide enfin pour l’intégration du programme global de lutte contre le VIH dans la couverture sanitaire universelle, arguant que la réunion de haut niveau que l’Assemblée générale tiendra sur cette question en septembre 2019 sera l’occasion idoine. « Nous le devons aux millions de personnes que nous n’avons pas pu sauver », a conclu la Présidente de l’Assemblée générale.
MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION D’ENGAGEMENT SUR LE VIH/SIDA ET DES DÉCLARATIONS POLITIQUES SUR LE VIH/SIDA (A/73/824)
Déclarations liminaires
L’élimination du VIH/sida est désormais à notre portée, a déclaré Mme MARÍA FERNANDA ESPINOSA GARCÉS, Présidente de l’Assemblée générale. Elle a rappelé la Déclaration d’engagement, ce document « remarquable » que l’Assemblée générale a adopté pour maintenir au cœur de l’agenda international et traduire l’engagement à lutter contre le VIH/sida dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Les avancées considérables faites, sous le leadership d’ONUSIDA, sont un des meilleurs exemples de l’efficacité du multilatéralisme, a estimé la Présidente. Ce qui était il y a peu une sentence de mort, est devenu une maladie chronique pour autant que la personne ait accès à la thérapie antirétrovirale. En 2017, un nombre record de 21,7 millions de personnes séropositives avaient accès à cette thérapie, soit cinq fois plus qu’il y a 10 ans.
De plus en plus de pays ont éliminé la transmission de la mère à l’enfant, a-t-elle poursuivi, mais nous ne pouvons pas baisser les bras. Il faut intensifier nos efforts collectifs étant donné que les progrès n’ont pas été égaux partout. Pour remporter la bataille, a prévenu la Présidente de l’Assemblée, il faut réaliser la cible 90-90-90, à savoir lancer des initiatives concrètes pour que les gens aient accès à des services intégraux de prévention, de dépistage et de traitement. Il sera impossible, a-t-elle aussi prévenu, de stopper l’épidémie si les personnes atteintes sont stigmatisées. Dans ce contexte, la Présidente a attiré l’attention sur la vulnérabilité particulière des populations autochtones et des réfugiés. L’accès de tous aux traitements est crucial, a-t-elle martelé.
Pour cela, a-t-elle reconnu, il faudra combler le manque de financement. Elle a donc insisté sur un engagement plus significatif des donateurs et sur une meilleure mobilisation des ressources nationales. La prochaine conférence du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, prévue en octobre 2019 à Lyon, sera un rendez-vous « décisif » tout comme la réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur la couverture sanitaire universelle qui devrait veiller à ce que la lutte contre le VIH/sida soit incluse dans les prestations sanitaires. Nous le devons aux millions de personnes que nous n’avons pas pu sauver, a conclu la Présidente.
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI, Chef de Cabinet du Secrétaire général, a relevé qu’il y a 30 ans, quand débutait l’épidémie du VIH/sida, la souffrance et la mort semblaient imparables et la stigmatisation sévissait dans le monde entier. Avec la mobilisation de la communauté internationale, les choses ont changé. Huit millions de décès ont été évités depuis 2000 et les trois quarts des personnes vivant avec le virus connaissent désormais leur statut sérologique. De même, certains pays ont même éliminé la transmission de la mère à l’enfant et certains des succès ont été possible grâce à l’effort des communautés. La fin du « VIH/sida pédiatrique » est donc à notre portée, s’est réjouie la Chef de Cabinet, avant de souligner que la lutte contre le sida passe par la lutte contre la stigmatisation et l’éducation des citoyens afin de leur permettre de choisir librement leur vie.
Mme Viotti a noté qu’ONUSIDA a été à l’avant-garde des succès. Mais, a-t-elle reconnu, les progrès restent inégaux. Depuis 2010, l’Europe de l’Est et l’Asie centrale ont enregistré une augmentation de 30% des infections. Entre temps, quelque 15 millions de personnes vivant avec le virus n’ont toujours pas accès au traitement, souvent à cause de la honte ou de la stigmatisation. « Quand les gens cachent leur état ou l’ignore, ils peuvent rater un traitement », a dit la Chef de Cabinet qui s’est insurgée contre les politiques criminalisant les travailleurs du sexe et les malades. Les États, a-t-elle estimé, doivent redoubler d’efforts pour que personne ne se sente stigmatisée ou discriminée, soulignant la nécessité d’élargir l’accès aux soins de santé, y compris aux groupes marginalisés comme les travailleurs du sexe et les migrants.
Mme Viotti a rappelé que les maladies liées au sida restent la principale cause de décès chez les femmes âgées de 15 à 49 ans. Il faut donc lutter contre les inégalités entre les sexes et les stéréotypes sexistes. Il faut « réparer les déséquilibres du pouvoir » et lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles. Elle a souhaité qu’en septembre prochain, les États renouvellent leur engagement en faveur des cibles du VIH/sida contenues dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030. « Nous devons redoubler d’efforts si nous voulons respecter la promesse d’éradiquer le VIH/sida d’ici à 2030 », a-t-elle martelé en soulignant que « les progrès remarquables que nous avons accomplis jusqu’à présent montrent que c’est possible ».
Débat général
Au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), Mme GILLIAN BIRD (Australie) a considéré que, malgré les progrès accomplis, l’épidémie de VIH demeure un défi de taille, comme le montrent les statistiques d’ONUSIDA indiquant que 36,9 millions de personnes dans le monde sont séropositives. Chaque semaine, près de 7 000 jeunes femmes de plus sont infectées et, en 2017, le nombre de morts causés par la maladie a atteint le chiffre de 940 000 personnes. Le déclin des nouvelles infections est trop lent, et certains pays font l’expérience d’une hausse de la prévalence, s’est alarmée la représentante. Elle s’est déclarée aussi profondément préoccupée des difficultés à parvenir à un consensus s’agissant des droits à la santé sexuelle et reproductive et de mettre fin à la stigmatisation et à la discrimination des populations marginalisées, des questions qui figurent, selon elles, au cœur même d’une réponse efficace contre la pandémie. Or, la Déclaration d’engagement de 2016 a mis l’accent sur les droits humains et la levée des obstacles aux traitements et aux soins adéquats. Pour l’Australie, il est donc essentiel que les efforts en vue de réaliser la couverture sanitaire universelle comprenne une réponse globale au VIH et un engagement vigoureux au niveau communautaire, ancré dans la prévention.
Au nom de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), M. MABHONGO (Afrique du Sud) a rappelé que sa région est la plus touchée de toutes les régions au monde. Chaque gouvernement met en place des programmes adaptés à ses priorités nationales, fondés sur la stratégie sous-régionale et sur la Déclaration politique de 2016. Le délégué s’est félicité du fait que des pays comme la Namibie et l’Afrique du Sud ont des taux « très élevés » de prise en charge des malades et avec l’aide de la communauté internationale, la SADC a créé des cliniques transfrontalières pour traiter les populations particulièrement mobiles.
La couverture sanitaire universelle est une priorité de la région, a affirmé le représentant, en mettant l’accent sur les investissements faits dans les infrastructures de santé. Il a dit attendre avec intérêt la déclaration politique que l’Assemblée générale devrait adopter au mois de septembre. Il a souhaité un texte fort sur la couverture sanitaire universelle qui contienne des dispositions sur les moyens de financement.
En sa capacité nationale, le représentant a fait part de l’optimisme de son pays à l’aune de la cible 90-90-90: la transmission de la mère à l’enfant a été considérablement réduite, la distribution de préservatifs s’est effectivement élargie et les nouvelles infections sont en baisse, même si les jeunes restent particulièrement affectés. C’est, a reconnu le représentant, la violence sexiste et les obstacles socioculturels qui expliquent cet état de fait. En conséquence, le Gouvernement a lancé un nouveau programme qui cible précisément les adolescentes et les jeunes femmes. Le représentant a plaidé pour un soutien accru de la communauté internationale aux pays de la SADC.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. VITAVAS SRIVIHOK (Thaïlande) a souligné que les efforts de l’ASEAN sont guidés par la Déclaration d’engagement de 2016 et estimé que la réalisation de la cible 90-90-90 est « à portée de main ». Il a en effet noté les progrès significatifs réalisés par les États membres de l’ASEAN et a attribué ce succès à une approche axée sur les communautés et la personne. Il a cité le projet « ASEAN Cities Getting to Zeros » qui, a-t-il expliqué, fait participer les communautés. L’ASEAN reconnaît également la nécessité d’opérer une transition vers un financement durable à partir des ressources domestiques et en adaptant ces ressources et les investissements aux besoins. L’ASEAN est prête à établir des partenariats avec d’autres régions et sous-régions pour amplifier les progrès déjà réalisés.
Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), M. SAM TERENCE CONDOR (Saint-Kitts-et-Nevis) a souligné que depuis l’adoption de la Déclaration politique des Nations Unies sur le VIH/sida, les gouvernements de la CARICOM et la société civile sont parvenus à faire de leur région la première au monde à mettre fin à la contamination des enfants. Sept pays ont éliminé la transmission de la mère à l’enfant et le nombre annuel des nouvelles infections chez les adultes a baissé de 18% entre 2010 et 2017. Durant la même période, le nombre de décès dus au sida a diminué de 23%. À 0,05% en 2017, le taux de prévalence se rapproche du seuil de transition épidémique de 0,03. Malgré ces acquis remarquables, nous sommes toujours confrontés aux statistiques régionales et mondiales qui montrent qu’il reste encore beaucoup à faire, a reconnu le représentant.
Ainsi, les efforts doivent être réorientés pour assurer le diagnostic précoce, le dépistage et le traitement pour atteindre la cible 90-90-90, accélérer les efforts visant à maintenir la suppression virale, améliorer les services liés au VIH lors de catastrophes naturelles et d’urgences humanitaires, et intensifier les efforts contre les préjugés, la violence, les traumatismes, la stigmatisation et la discrimination, notamment à l’égard des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, des professionnels du sexe et les toxicomanes. Nous continuerons à susciter l’ambition de nos dirigeants et des responsables de la santé et à maintenir notre partenariat avec la société civile et d’autres acteurs importants dans les Caraïbes, a promis le représentant. Nous avons maintenant une nouvelle occasion de stimuler les ambitions mondiales et la couverture sanitaire universelle est devenue notre priorité, a conclu le représentant.
Pour M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne, le rapport du Secrétaire général montre les avancées remarquables mais aussi les défis restants. Il montre clairement que l’effort conjoint et durable de toutes les parties prenantes a fait ses preuves. Mais cela ne suffit pas. Le rapport, a estimé le représentant, appelle à une réponse plus soutenue et plus rapide et fait des recommandations concrètes pour stimuler les ambitions mondiales. Le VIH/sida est une maladie grave mais désormais évitable et traitable. Il est donc impératif de réduire le nombre des nouvelles infections tout en élargissant l’accès aux traitements antirétroviraux. Pour ne laisser personne sur le côté, il faut une expansion rapide des services de prévention, de dépistage et de traitement. Le sida, a souligné le représentant, reste la plus grande cause de décès chez les femmes en âge de procréer, et en conséquence, il faut accorder un intérêt particulier à la question de la transmission de la mère à l’enfant. Il faut également promouvoir l’éducation sexuelle complète pour que les jeunes soient informés et lutter contre la stigmatisation.
La cible 90-90-90 est ambitieuse mais grâce à un effort soutenu et conjoint, l’UE est sur le point de l’atteindre puisqu’à ce jour 86% des personnes atteintes par le VIH ont été diagnostiquées; 91% d’entre elles ont accès au traitement et 92% de toutes les personnes diagnostiquées sont sous traitement avec une charge virale supprimée.
Toutefois, le combat est loin d’être gagné puisque tous les ans, 25 000 à 30 000 nouvelles infections sont signalées dans l’espace européen. En 2018, l’espace comptait 800 000 personnes vivant avec le VIH/sida dont 14% n’avaient pas été diagnostiquées. Compte tenu de ces statistiques « alarmantes », l’UE est consciente qu’il faut axer les efforts sur les personnes qui n’ont pas été dépistées et cibler les groupes les plus vulnérables comme les travailleurs du sexe, les migrants clandestins, les drogués, les prisonniers, les homosexuels ou encore les transgenres. Les systèmes de santé publique doivent être renforcés tout comme les stratégies nationales. Le représentant a insisté sur la couverture sanitaire universelle et a conclu en rappelant que l’UE finance à hauteur de 50% le Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, soit 2 milliards de dollars depuis 2002. Ce soutien sera maintenu voire augmenter, a indiqué le représentant en réservant la primeur à la sixième conférence de reconstitution des ressources du Fonds, prévue à Lyon le 10 octobre prochain.
M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a parlé du succès du programme de son gouvernement qui prendra fin en 2020. Aujourd’hui, le quart de la population a été dépisté de même les deux millions d’étrangers qui vivent dans le pays. Le nombre de personnes dépistées a augmenté de 2 millions chaque année. La Fédération de Russie renforce aussi sa collaboration internationale, notamment avec ONUSIDA. En 2018, une manifestation coorganisée avec l’agence onusienne à Moscou a rassemblé les pays d’Europe de l’Est. La Fédération de Russie a d’ailleurs versé à ONUSIDA une somme de 17 millions de dollars pour 2019-2020. Depuis 2012, l’enveloppe russe s’élève à 50 millions de dollars. Le représentant a reproché au Secrétaire général de faire valoir, dans son rapport, des positions qui ne font pas l’unanimité, épinglant les passages critiquant certains programmes nationaux de lutte contre les stupéfiants.
Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. LAZARUS OMBAI AMAYO (Kenya) a applaudi les progrès enregistrés au cours de cette dernière décennie mais s’est dit préoccupé par le fait qu’en Afrique subsaharienne l’« explosion de la jeunesse » ne soit pas toujours sensible aux efforts de prévention. Les connaissances qu’ont les jeunes de l’épidémie stagnent depuis 20 ans, d’où le taux élevé des infections parmi les adolescents et les jeunes femmes dont de nombreuses mères. Le représentant s’est réjoui de ce que la recherche d’un vaccin et d’un traitement demeure une priorité. Il a pris note du fait que dans son rapport, le Secrétaire général indique que deux candidats vaccins sont actuellement expérimentés dans le cadre de vastes essais de phase 3 en Afrique, les premiers essais d’envergure depuis l’étude sur les vaccins menée en Thaïlande il y a une décennie. En 2019, la confirmation de la rémission à long terme d’une deuxième personne vivant avec le VIH qui a reçu une greffe de moelle osseuse redonne l’espoir de la possibilité de trouver un remède. Toutefois, a fait observer le représentant, cette procédure difficile et dangereuse n’est pas facilement extensible, et les techniques expérimentales dites « kick-and-kill » pour éliminer les réservoirs de VIH dans le corps humain n’ont pas encore porté leurs fruits. Les techniques d’édition de gènes s’avèrent toutefois prometteuses chez les modèles animaux.
Le représentant a poursuivi en appelant les pays à ouvrir leurs frontières et à mettre en œuvre le partenariat mondial contre la stigmatisation et la discrimination. La vulnérabilité des migrants peut s’aggraver dans des pays où des restrictions de voyage sont appliquées aux personnes vivant avec le VIH. Ces dernières peuvent en effet hésiter à se faire dépister et soigner. Comme l’Afrique est en proie aux conflits, aux troubles sociaux, aux catastrophes induites par les changements climatiques, lesquels sont autant de facteurs qui poussent les gens à partir, il faut, a estimé le représentant, faire attention au risque que le nombre de personnes vivant avec le VIH augmente. Le sida est la quatrième cause de mortalité dans les pays à bas revenu et la deuxième en Afrique subsaharienne. Ne laisser personne sur le côté, c’est mettre à la disposition de tous des services de soins contre le VHI/sida et des services de protection sociale. Pour cela, il faut des gouvernements dévoués à la cause, des donateurs soucieux de mobiliser les fonds et des changements structurels pour que les populations les plus vulnérables aient accès aux traitements. Le représentant s’est félicité du mouvement de plus en plus intense en faveur de la couverture sanitaire universelle.
S’exprimant ensuite en sa capacité nationale, il a fait état des progrès notables du Kenya, en expliquant qu’1,2 million de Kényans reçoivent un traitement antirétroviral pris en charge par l’État à vie. Le Kenya a mis au point une feuille de route ambitieuse axée sur les communautés, laquelle doit permettre d’accélérer la prévention du VIH/sida, dont la prévalence est tombée à 1,8%. La gratuité des soins de santé maternelle a permis de réduire la transmission mère-enfant, a-t-il encore précisé. Le Kenya a adopté une riposte multisectorielle avec 30% des services dirigés par les communautés et s’est doté d’un tribunal chargé d’assurer la protection contre les discriminations à l’égard des séropositifs, alors que les budgets sanitaires ont augmenté de plus de 30%.
M. MHER MARGARYAN (Arménie) a fait valoir les progrès accomplis par son pays pour mettre fin à la pandémie de VIH/sida. Au cours des cinq dernières années, la prévalence dans chacun des groupes à risques identifiés a été inférieure à 5%, et bien en-dessous du seuil de 1% parmi les femmes enceintes. L’Arménie figure parmi les cinq pays vérifiés par l’OMS à avoir éliminé la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Alors que l’importance des diagnostics et des traitements précoces ne saurait être sous-estimée, l’Arménie est en train de revoir ses stratégies et protocoles de dépistage conformément aux directives de l’OMS, en mettant l’accent sur les interventions communautaires qui se sont multipliées, dans l’objectif d’atteindre les 60% fixés par le programme national. Pour le représentant, une des exigences préalables les plus importantes dans le combat contre le VIH est un cadre juridique favorable et des normes sociétales porteuses de changement, afin de réduire la stigmatisation et la discrimination et d’améliorer l’accès aux services, en particulier pour les groupes vulnérables. Le bilan de l’Arménie inspire confiance dans la poursuite d’une réponse multisectorielle efficace à l’épidémie, ainsi qu’en matière de prévention et de traitement, a estimé la délégation.
Saluant le rapport « clair et exhaustif » du Secrétaire général, M. DOMINIQUE MICHEL FAVRE (Suisse) a constaté que d’après le document, la stratégie de la « voie rapide » porte ses fruits. Il s’est dit toutefois certain que pour réaliser les objectifs ambitieux de mettre fin à l’épidémie d’ici à 2030, il convient non seulement de renforcer cette approche accélérée mais aussi de combler systématiquement, au moyen d’interventions ciblées, les lacunes identifiées. Le représentant a évoqué trois exemples de la contribution de la Suisse à l’engagement contenu dans la Déclaration politique tant au niveau international que national. Au niveau international, la Suisse s’est jointe aux efforts de la Société internationale sur le sida afin de mettre les évidences scientifiques les plus récentes à la disposition des pays et les adapter en fonction du contexte national. La Suisse apporte aussi son soutien à la SADC pour prévenir de nouvelles infections chez les jeunes, améliorer le traitement des jeunes séropositifs et les inciter à se soigner davantage. Au niveau national, la Commission fédérale pour la santé sexuelle a remis le mois dernier sa feuille de route pour l’élimination du VIH/sida d’ici à 2030. Elle recommande également que les efforts nécessaires à cette fin soient fondés sur le respect des droits de l’homme et axés sur des populations concernées, à savoir les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les migrants. La mise en œuvre du programme doit débuter en 2022.
M. DEE-MAXWELL SAAH KEMAYAH, SR (Libéria) a affirmé que son pays a fait des progrès significatifs s’agissant de la réduction des nouvelles infections, du taux de mortalité et de la transmission de la mère à l’enfant. Le pays a aussi connu une augmentation substantielle du nombre de personnes sous traitement. La stratégie, c’est le renforcement de la collaboration avec les partenaires locaux et internationaux et la mobilisation des ressources nationales. Quelque 433 centres de conseil aux femmes enceintes ont été implantés dans le pays alors que les hommes qui ont des rapports sexuels avec les hommes et les travailleuses du sexe ont accès à des soins gratuits. Des programmes de prévention sont également mis en œuvre dont des campagnes de sensibilisation des jeunes. Le représentant n’a pas caché les obstacles dont le manque de fonds, la pauvreté, la discrimination et la stigmatisation.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a dit que son pays s’est engagé à mettre en œuvre la cible 90-90-90. L’Indonésie se concentre surtout sur la prévention de la transmission mère-enfant et sur les groupes à risque. Le Gouvernement fournit gratuitement des antirétroviraux, en ne négligeant pas pour autant les programmes de prévention du sida, de dépistage et de conseils auprès des communautés. Chaque municipalité doit avoir des centres de santé adaptés aux jeunes. Quelque 450 hôpitaux ont été désignés pour offrir des services spécifiques liés au VIH/sida. Vaincre ce fléau nécessite un comportement responsable et sensé. Il faut donc miser sur les conseils, l’éducation et la lutte contre les comportements à risque. Pour l’Indonésie, un comportement sexuel responsable comprend l’abstinence, la fidélité et l’utilisation correcte et constante du préservatif.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a constaté que même si les objectifs “ambitieux » 90-90-90 ont permis de réaliser de nombreux progrès pour combattre le VIH/sida, ils n’ont toujours pas été mis en œuvre dans leur intégralité. Elle a attiré l’attention sur les 10% de personnes qui vivent avec le VIH sans le savoir. Elle a plaidé pour des services de santé intégraux et à des systèmes de santé et de protection sociale réactifs aux plus vulnérables et aux plus marginalisés. La représentante a relevé que la Commission mondiale sur le VIH et le droit a illustré le « potentiel énorme » que recèle l’environnement juridique pour améliorer la vie des personnes vivant avec le VIH/sida. Elle a salué les 89 états qui ont abrogé ou réformé, depuis 2012, des lois qui pénalisent le VIH, les relations sexuelles entre personnes du même sexe et la possession de drogues. La représentante a aussi salué ceux qui ont adopté des lois sur les droits reproductifs, l’éducation sexuelle et les droits de l’homme des personnes vivant avec le VIH/sida. Elle s’est, cependant, inquiétée du fait que la discrimination juridique et de facto rendent invisibles, dans certains pays, les personnes vivant avec le VIH ou des personnes à risque. Elle a parlé des jeunes, des femmes, des consommateurs de drogues par injection, des travailleurs du sexe, des transgenres, des prisonniers, des hommes qui ont des rapports sexuels avec d’autres hommes, des autochtones, des migrants et des réfugiés qui doivent tous avoir accès à des services de santé de qualité.
Mme Oehri s’est également inquiétée de la persistance des inégalités entre les sexes et de normes sexistes néfastes qui augmentent le risque d’infection chez les femmes, notamment en Afrique sub-saharienne. Elle a cité, entre autres, le manque d’accès aux services de prévention du VIH et de santé sexuelle et reproductive et la violence sexuelle. Il est particulièrement consternant de savoir que les femmes qui subissent la violence d’un partenaire intime ont 50% plus de chances de contracter le VIH, s’est-elle indignée. Elle a souligné qu’une réponse complète au VIH/sida ne peut seulement reposer sur des politiques de santé publique. Il faut tenir compte de la dimension de droits de l’homme et des mesures sociétales proactives pour combattre la stigmatisation et l’exclusion.
Mme DIEDRE NICHOLE MILLS (Jamaïque) a indiqué que son pays compte 32 000 personnes vivant avec le VIH. En 2016, 1 700 nouvelles infections et 1 300 morts ont été enregistrées. En 2017, une enquête a révélé que le nombre des personnes âgées de 15 à 24 ans ayant des partenaires sexuels multiples est passé de 58% en 2012 à 65,3% en 2017, pendant que les connaissances sur la transmission ont diminué. Ces chiffres sont préoccupants, a reconnu le représentant dont le Gouvernement poursuit les efforts pour atteindre la cible 90-90-90. La Jamaïque était à 78-49-57 en mars 2019 et différentes initiatives ont été lancées y compris par les médias sociaux, l’engagement communautaire et une approche multi-agences. Une attention particulière est accordée à la prévention de la transmission mère-enfant. Par ailleurs un centre pour les jeunes a été créé en 2017 dans l’un des grands hôpitaux de la capitale pour prévenir les comportements négatifs tels que la violence, l’absentéisme et les comportements sexuels à risque. Près de 4 800 jeunes ont eu accès à ce centre entre janvier et septembre 2018. Le Gouvernement améliore aussi les cadres législatifs et politiques.
M. ALEJANDRO GUILLERMO VERDIER (Argentine) a salué les progrès importants accomplis depuis 2016 pour réaliser les engagements pris dans la Déclaration politique en matière d’accès au traitement approprié et de réduction de la mortalité liée au VIH/sida. Il a rappelé que le troisième objectif de développement durable du Programme 2030 repose, comme les autres, sur le principe de « ne laisser personne de côté ». Il est dès lors essentiel, pour mettre fin au sida comme menace de santé publique, de se baser sur les droits de l’homme et sur l’égalité de genre, afin notamment de respecter la dignité des personnes atteintes de la maladie, a plaidé le représentant.
Les politiques de santé doivent, selon lui, reconnaître les vulnérabilités des groupes particuliers de population face aux VIH/sida. Il a recommandé de prendre en compte la situation particulière des femmes et des filles, et notamment leurs droits sexuels et reproductifs. C’est pour cela que l’Argentine mène des politiques visant les groupes vulnérables selon une approche basée sur les droits de l’homme, en favorisant l’accès à l’information sur les ressources existantes et en incitant les personnes porteuses à participer activement aux prises de décisions, tout en réaffirmant les principes d’égalité et de non-discrimination. Le représentant a parlé de ce que fait le Ministère de la santé et du développement social qui, par exemple, promeut la création de centres de prévention, d’évaluation et de dépistage. Sur le plan international, il a salué la réunion de haut niveau prévue en septembre sur la question de la couverture santé universelle. Il a aussi réitéré son soutien à la Stratégie 2016-2021 d’ONUSIDA et à la cible de traitement 90-90-90 pour l’an 2020.
Mme LAHYA ITEDHIMBWA SHIKONGO (Namibie) a affirmé que son pays a réalisé des progrès remarquables ces cinq dernières années, se félicitant notamment de ce que 77% des adultes séropositifs n’avaient plus de charge virale, ce qui dépasse l’objectif de 73% d’ici à 2020 établi par ONUSIDA. La Namibie, qui est à 86-96-91, est sur le point d’atteindre l’objectif 90-90-90. La représentante a expliqué que ces avancées ont pu être réalisées grâce à l’élargissement des services de prévention et de traitement qui mettent l’accent sur la suppression de la charge virale et des politiques « progressives ». Le pays a compris l’importance de fonder la prévention et les soins sur les données.
Parmi les défis qui persistent, la représentante a noté le taux élevé des nouvelles infections parmi les jeunes femmes de 15 à 24 ans. Il faut donc des stratégies qui mettent l’accent sur l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive et des politiques d’autonomisation des femmes. Il faut aussi redoubler d’efforts pour que davantage d’hommes se fassent dépister et promouvoir la prévention parmi cette population qui est d’ailleurs sensibilisée aux bienfaits de la circoncision. La représentante a insisté sur un financement adéquat des programmes. La Namibie assume d’ailleurs 64% du coût de ses programme et la totalité de celui des antirétroviraux.
M. FREDERICO SALOMÃO DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) a regretté d’emblée que la salle de l’Assemblée générale soit quasiment vide alors même que l’on discute d’une question aussi importante. Les progrès enregistrés dans la lutte contre le VIH/sida doivent être perçus comme un encouragement et non comme un accomplissement puisque de nombreux défis restent à relever. Appuyant les six recommandations du Secrétaire général, le représentant les a jugées « fondamentales » pour la réalisation des cibles sur le VIH/sida contenues dans le Programme 2030. Il a insisté sur l’accès aux soins de santé des groupes les plus marginalisés et vulnérables et sur le rôle de la société civile.
La réponse coordonnée du Brésil, qui garantit un accès universel au traitement et au diagnostic, a été internationalement reconnue, a soutenu le représentant. Depuis 1996, date à la laquelle la première législation a été adoptée sur la gratuité des soins, le Brésil n’a cessé de renforcer et d’élargir son système de santé publique et de veiller à une allocation des ressources la plus efficace possible.
Nous avons été le premier pays, s’est enorgueilli le représentant, à adopter dès 2013 l’approche « traitement en tant que prévention » qui consiste à recommander la thérapie antirétrovirale à toute personne infectée par le virus, quelle que soit sa charge virale. En 2014, le Ministère de la santé a diversifié son approche du dépistage et de l’accès aux soins en créant de programmes communautaires qui ont permis aux organisations de la société civile de mener des actions de dépistage rapide. De plus, le budget de la lutte contre le VIH/sida a augmenté de 30% en 2019 par rapport à l’année précédente.
Le représentant a conclu en soulignant que l’accès universel à la santé est l’une des pierres angulaires et un aspect fondamental du développement durable. Il a donc exhorté tous les États Membres à opter pour une approche multisectorielle et intégrée de la lutte contre le VIH/sida et ses principales « co-infections » que sont l’hépatite et la tuberculose.
« Un monde sans sida est non seulement possible, mais à portée de main ».
M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a dit que son gouvernement a adopté des mesures en s’appuyant sur l’approche 90/90/90. Aujourd’hui 81% de la population nationale infectée est consciente de son statut sérologique. Le Bélarus produit ses propres antirétroviraux à un prix abordable. Parant 75,1% des patients traités ont une charge virale nulle. Avec l’aide du Fonds mondial, les programmes ont été élargis à tout le pays, avec comme ambition affichée de mettre fin à l’épidémie en 2023. La prochaine grande campagne nationale de prévention sera mise en œuvre au cours des Jeux européens qui auront lieu du 21 au 30 juin prochain 2019 à Minsk, a annoncé le délégué.
Mme PAULOMI TRIPATHI (Inde) a affirmé que son pays contribue à l’effort international, un engagement reflété par le fait que plus de 70% des traitements antirétroviraux sont mis au point par l’industrie pharmaceutique indienne. Elle s’est félicitée de constater que, dans son pays, les nouvelles infections ont décliné de plus de 80% depuis le point culminant de 1995. De même, les morts imputables au sida ont décliné de 71% depuis le point culminant de 2005, a ajouté la représentante, qui a également mentionné le recul de 84% des morts provoquées par la tuberculose en 2017. Pour booster sa réponse aux cibles fixées pour 2030, l’Inde a reconfiguré sa stratégie à l’aune d’un renforcement de ses activités de sensibilisation, de gestion des déchets biomédicaux et de dépistage au niveau communautaire. Le Gouvernement indien a, en outre, fourni des soins et des traitements gratuits à 1,3 million de patients et adopté une loi de prévention et de contrôle contre le VIH/sida qui est entrée en vigueur en septembre dernier. La loi a été qualifiée de « jalon » par la déléguée, dans la mesure où elle autonomise le patient et lui permet de signaler toute discrimination liée au VIH dans les domaines de l’emploi, des soins de santé, de l’éducation, du droit à la propriété, du droit à exercer des responsabilités publiques et du droit à bénéficier d’une assurance maladie
Mme HAYET ZEGGAR (France) a confirmé que la ville de Lyon accueillera la sixième conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme le 10 octobre 2019, un évènement qui sera le « point d’orgue » de la présidence française du G7 en matière de santé mondiale. Il est indispensable que cette sixième conférence soit un succès, car les progrès réalisés sont fragiles, les décès se poursuivent, les nouvelles infections sont en hausse dans plus de 50 pays, et les résistances menacent. Dans ce contexte, chaque partenaire a un rôle clef à jouer pour accélérer le mouvement. C’est pourquoi la France en appelle à la mobilisation générale des donateurs, nouveaux et historiques, afin d’atteindre la cible d’au moins 14 milliards de dollars pour la période 2020-2022 et à des engagements concrets pour la hausse des budgets nationaux de la santé et de la gratuité des soins. « Rendez-vous est pris à Lyon le 10 octobre 2019 pour réaffirmer notre capacité collective à assurer le redressement de la trajectoire d’élimination du VIH/sida et des pandémies », a conclu la représentante.
M. ISSA KONFOUROU (Mali) a expliqué que depuis le premier cas de VIH/sida dans son pays en 1985, la lutte contre l’épidémie est devenue une priorité nationale, ce qui a permis de réaliser des résultats « importants » en termes de prévention, de traitement et de protection des droits humains, permettant d’inverser la courbe de la propagation et de ramener le taux national de prévalence à 1,1%. Cependant, des défis majeurs ont influencé le système de santé et la lutte contre le VIH/sida dans son ensemble, à commencer par la crise sécuritaire dans les régions du Nord, laquelle a provoqué l’interruption des services, la dispersion du personnel de santé, la rupture de traitement et le dysfonctionnement de l’accès au traitement. « N’eut été cette crise que mon pays connaît depuis janvier 2012, le Mali serait aujourd’hui en dessous de la barre de 1% de taux de prévalence », a-t-il affirmé.
Le deuxième défi majeur concerne la ruée des populations vers les activités d’orpaillage dans les régions du Sud et dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, ce qui engendre le développement d’activités connexes entretenues majoritairement par des jeunes. Pour atteindre les objectifs de zéro infection, zéro discrimination et zéro décès lié au VIH à l’horizon 2030, le Mali met l’accent sur cinq grands axes stratégiques qui sont l’élimination de la transmission mère-enfant; la protection des populations fortement précarisées dans les zones de conflit; la réponse dans les zones d’orpaillage; l’accélération de la réponse dans les zones de pauvreté des grandes villes où le faible accès des populations aux services essentiels de base favorise la propagation rapide du virus; et la protection des droits humains des personnes vivant avec le VIH contre la stigmatisation, la discrimination et l’exclusion.
Pour aider à relever ces défis, le Mali s’est doté d’un centre de traitement du sida et d’une déclaration de politique d’élimination du VIH pour les 15 prochaines années, y compris la mise en œuvre de cadres stratégiques nationaux quinquennaux. Le Gouvernement a également mis en place un fonds national de lutte contre le sida financé par des ressources internes et externes. Avant de conclure, le représentant a mis en garde contre le phénomène de l’orpaillage qui « ne connaît pas de frontières » et qui peut, selon lui, changer « dangereusement » l’épidémiologie du VIH dans la région, si rien n’est fait. Il a également encouragé la Mission des Nations Unies dans son pays (MINUSMA) à continuer de veiller à la formation de son personnel, avant et après son déploiement.
Mme KIRA CHRISTIANNE DANGANAN AZUCENA (Philippines) a relevé que depuis la personne infectée aux Philippines en 1984, le pays compte désormais 65 467 cas confirmés, dont 80% ces 7 dernières années. Les autorités sont inquiètes d’une tendance qui montre que les infections sont désormais plus fortes dans la tranche d’âges des 25-34 ans depuis 2006, alors qu’entre 2001 et 2005, c’était la tranche des 35-49 ans. Plus inquiétant encore, le nombre des infections a pratiquement doublé ces 10 dernières années dans le groupe des 15-24 ans. Le Gouvernement philippin entend inverser la tendance d’ici à 2022. Depuis l’an dernier, une loi prévoit que tous les centres de soins et leurs personnels intègrent la sensibilisation et les soins liés au VIH/sida dans leurs activités. En mars dernier, la couverture sanitaire universelle a été adoptée dans le pays et les autorités entendent également prendre soin de la santé des Philippins de l’étranger. La représentante a conclu en plaidant pour plus de fonds afin d’aider les pays en développement à lutter contre le VIH/sida.
Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a félicité ONUSIDA pour les progrès significatifs enregistrés dans la mise en œuvre de la Déclaration politique. Les États-Unis, a-t-elle rappelé, collabore avec de multiples partenaires, y compris la société civile. Pour atteindre la cible 90-90-90, un programme d’urgence a été mis en place et se concentre sur certaines zones géographiques et certaines populations cibles aux États-Unis. À cette fin, la base de données « la plus importante » au monde a été créé pour pouvoir diriger de façon efficace les ressources et mettre au point des actions ciblées. L’« Administration Trump » s’engage à mettre fin à cette pandémie, a assuré la représentante, en expliquant que pour ce faire, il faut axer les efforts sur les personnes les plus vulnérables.
M. DANIEL FERNAN GIMENEZ (Norvège) a déclaré que pour que la riposte au VIH réussisse, elle doit viser particulièrement les jeunes femmes et les filles. Garder les filles à l’école réduit le risque de VIH. L’éducation des filles est l’une des priorités de la coopération norvégienne, a poursuivi le représentant. Nous avons aussi besoin de dispositions sur des services de santé non discriminatoires et adaptés aux jeunes, y compris les adolescents et les personnes handicapées. Il est regrettable, s’est-il impatienté, qu’un grand nombre de ces questions continuent de faire l’objet de controverses à l’ONU. L’avenir de la riposte au VIH nécessitera que nous regardions au-delà de la prestation des soins et que nous veillons à ce que la santé et les droits sexuels et reproductifs ainsi qu’une riposte efficace au VIH/sida soient intégrés à la couverture sanitaire universelle. Dans l’évolution de l’architecture sanitaire mondiale, nous devons garantir la participation des groupes marginalisés et vulnérables, y compris des populations à haut risque, a martelé le représentant qui a terminé en disant que son pays vient d’augmenter son financement au « Robert Carr Civil Society Network Fund » qui soutient les réseaux répondant aux besoins et aux droits fondamentaux des populations insuffisamment desservies.
Mme HELENA DEL CARMEN YÁNEZ LOZA (Équateur) a partagé l’expérience de son pays dans la lutte contre le VIH/sida, à commencer par ce que fait le Ministère de la santé publique par le biais de sa Direction nationale de stratégies de prévention et de contrôle et de la Stratégie nationale de VIH/sida: des mesures sont prises pour le dépistage de nouveaux cas, ainsi que pour le suivi et le traitement des patients et la prévention. La majorité des femmes enceintes sont surveillées, a-t-elle ajouté, avant de parler d’un système d’information et d’estimation qui recueille des données sur les contrôles médicaux et les traitements. En outre, le système d’information appelé « historique clinique unique » permet de suivre toute la population, avec en particulier un module spécifique pour les patients atteints du VIH/sida.
L’Équateur a aussi investi près de 7 millions de dollars pour l’achat des médicaments antirétroviraux, augmentant ainsi de 39% le budget alloué antérieurement. Comme autre mesure, la représentante a parlé du plan national de santé sexuelle et reproductive 2017-2021 qui permet d’offrir des services inclusifs. Quant à l’accès universel à la prévention, l’Équateur s’aligne avec les engagements internationaux pour éliminer la transmission mère-enfant, l’objectif étant de faire baisser cette transmission jusqu’à 2% fin 2019. La représentante a enfin évoqué le cours en ligne sur les droits de l’homme et les bonnes pratiques dans les procédures relatives au VIH.
M. JORGE LUIS CEPERO AGUILAR (Cuba) a déclaré que les progrès dans les objectifs sur le VIH/sida nécessiteraient une réforme de l’ordre international et la promotion d’un véritable esprit de coopération solidaire. À Cuba, a-t-il poursuivi, depuis le lancement du Programme national de prévention et de contrôle du VIH/sida, il y a plus de 30 ans, la prévention, le diagnostic et le traitement sont efficaces et sont régulièrement mis à jour en suivant les recommandations de l’OMS et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida. Le représentant a également fait valoir la stratégie cubaine de réponse au VIH/sida qui part du principe que le droit à la santé est un droit de l’homme essentiel. Ce droit repose sur trois piliers: une approche intégrale de cette question, la capacité biotechnologique pour la recherche et le développement de médicaments, et le haut niveau d’éducation des citoyens qui ont confiance dans le système de santé publique. Pour compléter cela, la stratégie contient un vaste programme d’éducation sexuelle.
Le traitement par antirétroviraux est gratuit à Cuba, a ajouté le délégué avant de souligner la participation active de la société civile dans les actions de prévention et celle des personnes atteintes de VIH dans l’élaboration et l’application de programmes. Grâce à ces efforts, l’OMS a certifié en 2015 que Cuba était le premier pays au monde à avoir éliminé la transmission mère-enfant du VIH/sida, tandis que la prévalence dans la population âgée de 15 à 49 ans est bien en-dessous de 1%. Avant de conclure, le représentant s’est plaint des effets négatifs de l’embargo économique imposé par les États-Unis, qui provoque des carences considérables dans le secteur de la santé publique.