En cours au Siège de l'ONU

8416e séance - matin
CS/13614

Le Conseil de sécurité tire un bilan d’étape contraste du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux

Le Conseil de sécurité a pris connaissance, aujourd’hui, du sixième rapport annuel du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux internationaux, l’occasion pour ses membres d’entendre pour la dernière fois le juge Theodor Meron, Président de cette institution provisoire, depuis sa création dans la résolution 1966 (2010).

L’hommage rendu au travail accompli par le juge américain au cours de son mandat n’a toutefois pas éclipsé les critiques de plusieurs délégations à l’égard du Mécanisme, à commencer par la Serbie et la Fédération de Russie.

M. Meron a noté qu’au cours des six derniers mois, le Mécanisme a poursuivi sa marche en avant dans l’achèvement du mandat que lui a confié le Conseil, en dépit des difficultés liées à la décision de l’Assemblée générale de ne pas approuver son budget pour la période 2018-2019.  Qu’il s’agisse de la fourniture d’une assistance aux juridictions nationales, de la conservation des documents dans les archives, de la protection durable des victimes et des témoins vulnérables ou encore de l’exécution des peines sur deux continents, le Mécanisme a continué à mener à bien des fonctions résiduelles clefs héritées des Tribunaux qui l’ont précédé, a-t-il fait valoir, évoquant notamment l’adoption du Règlement sur la détention et la tenue de la première audience judiciaire dans la nouvelle salle conçue spécialement pour la division d’Arusha.

S’agissant des affaires pendantes, M. Meron a regretté de ne pouvoir personnellement mener l’affaire concernant Radovan Karadžić à son terme.  Il a toutefois assuré que, malgré les changements intervenus dans la composition de la formation, l’arrêt devrait être rendu au premier trimestre de 2019.  Parallèlement, a-t-il précisé, la phase du dépôt des mémoires a récemment pris fin dans l’affaire concernant Ratko Mladić, ce qui devrait permettre un prononcé de l’arrêt comme prévu à la fin de 2020.  Il a, d’autre part, indiqué que la procédure en révision dans l’affaire concernant Augustin Ngirabatware, reportée à la demande de ce dernier, a été récemment reprogrammée.

Intervenant à son tour, le Procureur du Mécanisme, M. Serge Brammertz, a mis l’accent sur la fonction du Mécanisme, consistant à assurer la protection des victimes et des témoins.  À la suite d’une enquête approfondie et confidentielle menée l’année dernière, son Bureau a ainsi déposé le 14 juin dernier, à titre confidentiel, un acte d’accusation mettant en cause cinq suspects qui doivent répondre de trois chefs d’outrage et d’incitation à commettre un outrage, a-t-il dit, ajoutant que les mandats d’arrêt délivrés par le Mécanisme ont été exécutés le 3 septembre par la police rwandaise.

« Nous sommes fermement déterminés à défendre l’intégrité des procédures conduites par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Mécanisme », a souligné le Procureur, non sans assurer que son Bureau s’opposera au déni du génocide sous toutes ses formes.  M. Brammertz a ainsi fait état du renforcement de son action concernant la recherche des huit personnes mises en accusation par le TPIR encore en fuite.  Il a, en revanche, déploré que la coopération régionale entre les pays issus de la Yougoslavie soit à son plus bas niveau depuis des années, appelant les États concernés à y remédier, notamment en mettant fin aux ingérences politiques dans le processus judiciaire.

Alors que plus de 10 000 familles ignorent toujours ce qu’il est advenu de leurs proches dans l’ex-Yougoslavie, le Procureur a également indiqué que son Bureau avait pris des mesures importantes dans le but de renforcer l’appui apporté à la recherche des personnes disparues et signé un mémorandum d’accord avec le Comité international de la Croix-Rouge pour promouvoir leur coopération à cette fin.  À ses yeux, « accomplir de nouveaux progrès est un impératif humanitaire, c’est fondamental pour la réconciliation dans les pays issus de la Yougoslavie ».

Ces réalisations et déclarations d’intention n’ont pas eu l’heur de convaincre la Serbie, représentée par sa Ministre de la justice.  Mme Nela Kuburović a d’emblée regretté que le TPIY n’ait pas réalisé le mandat pour lequel il avait été créé alors même que son pays a rempli ses obligations, à l’égard du Tribunal puis du Mécanisme, satisfaisant aux demandes, y compris en donnant accès aux archives, aux témoins et même à des documents confidentiels et militaires.  Elle a, d’autre part, signalé la « situation particulièrement difficile » des Serbes Milan Martić et Dragomir Milošević, incarcérés en Estonie, rappelant que la Serbie avait lancé, il y a 10 ans, une initiative visant à ce que les Serbes condamnés par le TPIY effectuent leur peine en Serbie. 

En réponse au constat de M. Brammertz sur le piètre niveau de la coopération régionale judiciaire, la Ministre a assuré que la Serbie a pris toutes les mesures en faveur de cette coopération, tout en déplorant que ce ne soit pas la position de tous les pays de la région, à l’exception de la Bosnie-Herzégovine.  Elle a, d’autre part, critiqué les accusations de glorification de criminels de guerre, accusant le Mécanisme d’exercer des pressions politiques sur la Serbie en se servant des conditions d’adhésion de la Serbie à l’Union européenne.

Tout aussi critique, la Fédération de Russie a regretté que les activités du Mécanisme se soient « grippées » depuis son entrée en fonctions.  Ce « chaos » a, selon elle, des racines qui remontent loin, et notamment dans le recrutement des juges pour des affaires comme celle concernant Radovan Karadžić.  La délégation a aussi dénoncé la longueur de la procédure dans l’affaire Karadžić et le fait que les nouveaux juges du Mécanisme continuent de faire intervenir dans les procès des personnes qui travaillaient déjà au TPIY. 

Pour sa part, le Rwanda a remercié le Procureur pour la coopération entre son Bureau et celui du Procureur général du Rwanda, notamment dans de récentes affaires d’outrage et d’incitation à l’outrage.  S’inquiétant du traitement des libérations précoces de condamnés pour génocide, il a néanmoins souhaité que le prochain Président du Mécanisme, M. Carmel Agius, en améliore les méthodes de travail, de façon à les rendre plus transparentes, responsables et inclusives.  Il a enfin soutenu qu’envoyer les condamnés pour génocide terminer leur peine au Rwanda permettrait de soulager le budget du Mécanisme et accélérerait la réhabilitation.

MÉCANISME INTERNATIONAL APPELÉ À EXERCER LES FONCTIONS RÉSIDUELLES DES TRIBUNAUX PÉNAUX

Déclarations

M. THEODOR MERON, Président du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a présenté le sixième rapport annuel sur cette institution créée par le Conseil de sécurité dans sa résolution 1966 (2010).  À cette occasion, il a prononcé son dernier discours devant le Conseil de sécurité sur l’avancement des travaux du Mécanisme qu’il préside depuis sa création.

M. Meron a noté qu’en dépit d’une situation budgétaire difficile, le Mécanisme a continué, ces six derniers mois, à faire des progrès significatifs dans l’exécution et l’achèvement du mandat que lui a confié le Conseil.  Qu’il s’agisse de la fourniture d’une assistance aux juridictions nationales, de la conservation des documents dans les archives, de la protection durable des victimes et des témoins vulnérables ou encore de l’« exécution des peines sur deux continents », le Mécanisme a continué à mener à bien des fonctions résiduelles clefs héritées des Tribunaux qui l’ont précédé, a-t-il fait valoir.

Au cours de la période considérée, le Mécanisme a adopté le Règlement sur la détention, lequel régit les questions liées à la détention tant à Arusha qu’à La Haye, a précisé M. Meron, indiquant que ce règlement et les autres règlements y relatifs sont entrés en vigueur la semaine dernière.  Leur adoption illustre l’attention soutenue avec laquelle le Mécanisme s’emploie à trouver des moyens d’améliorer ses méthodes et ses travaux et à servir de modèle aux tribunaux dans d’autres juridictions, a-t-il dit, ajoutant que les activités du Mécanisme ont, à cet égard, grandement profité des recommandations du Bureau des services de contrôle interne au cours de l’évaluation qui s’est achevée au printemps.

Autre étape importante signalée par M. Meron: la première audience judiciaire tenue par le Mécanisme dans la toute nouvelle salle d’audience conçue spécialement pour la division d’Arusha.  Cette audience s’est très bien déroulée, ce qui témoigne tant des efforts exceptionnels du Greffier Olufemi Elias et de son équipe que de la précieuse coopération du Gouvernement du Rwanda, s’est-il félicité, ajoutant que le Mécanisme sera prêt lorsque les derniers fugitifs mis en accusation par le TPIR seront appréhendés.

Le Président du Mécanisme a reconnu qu’il aurait souhaité annoncer une autre étape marquante, cette fois dans l’affaire concernant Radovan Karadžić, dont l’arrêt devait être rendu en décembre, soit bien avant la date initialement prévue.  Or des changements ont été apportés à la composition de la Chambre d’appel saisie des affaires concernant Radovan Karadžić et Ratko Mladić, suite à des demandes de dessaisissement de certains juges, dont lui-même.  Il regrette par conséquent de ne pouvoir mener l’affaire Karadžić à son terme.

M. Meron a toutefois informé le Conseil que, malgré les changements dans la composition de la formation, il est prévu que l’arrêt dans cette affaire soit rendu au premier trimestre de 2019.  Parallèlement, dans l’affaire Mladić, la phase du dépôt des mémoires a récemment pris fin, a-t-il poursuivi.  Selon lui, les changements dans la composition de la formation ne devraient pas retarder le prononcé de l’arrêt, prévu à la fin de 2020.

Par ailleurs, la procédure en révision dans l’affaire concernant Augustin Ngirabatware a pris une tournure inattendue après le report de l’audience qui devait avoir lieu en septembre, a expliqué M. Meron.  L’audience a été reportée à la demande d’Augustin Ngirabatware, au vu des documents communiqués après l’arrestation des cinq accusés dans l’affaire Turina et consorts et a été récemment reprogrammée, a-t-il affirmé.

Faisant état du rejet du renvoi de plusieurs affaires d’outrage, le Président du Mécanisme a indiqué que, pendant ce temps, le nouveau procès se poursuit dans l’affaire concernant Jovica Stanisić et Franko Simatović, tout comme les travaux qu’accomplissent les juges du Mécanisme concernant diverses demandes ponctuelles, allant de la protection des victimes et des témoins vulnérables à la consultation des pièces confidentielles.  Dans ce contexte, M. Meron a souhaité exprimer sa gratitude envers les autres juges du Mécanisme pour leur dévouement.  Il a aussi remercié le Conseil pour les efforts qu’il déploie afin que les postes actuellement vacants soient pourvus rapidement.

Revenant sur ses presque sept années à la tête du Mécanisme, M. Meron a dit regretter que l’arrêt Karadžić n’ait pas été rendu au cours de son mandat de Président et que la décision portant dessaisissement dans l’affaire Mladić se soit écartée de la jurisprudence constante.  Il a aussi déploré qu’une solution convenable et durable pour la réinstallation des personnes acquittées et libérées à Arusha n’ait pas été trouvée, malgré les efforts par lui-même et les autres juges du Mécanisme.  Il a enfin déploré qu’il reste encore à atteindre pleinement l’harmonisation des pratiques et des procédures entre les deux divisions du Mécanisme et que certaines de ses décisions portant sur des questions comme la libération anticipée aient causé de la douleur ou des inquiétudes aux victimes et à leur communauté.

« Cependant, malgré tous ces regrets, je suis extrêmement fier de ce qui a été accompli au Mécanisme et par celui-ci ces près de sept années », a déclaré M. Meron, rappelant que c’est au cours de son mandat que le Mécanisme a vu le jour, que le Règlement de procédure et de preuve a été adopté pour la première fois, que les juges ont prêté serment et les divisions d’Arusha et de La Haye ont ouvert leurs portes.

De plus, un cadre juridique et réglementaire plus large a été établi pour le Mécanisme, qui continue d’être affiné et renforcé.  Par ailleurs, en étroite coopération avec les juges du TPIR et du TPIY, la responsabilité des activités judiciaires a été transférée de ces Tribunaux et a été assumée sans heurts par le Mécanisme et dans le respect des normes les plus strictes de ce dernier.

Il a conclu son exposé en estimant, en tant que survivant de l’Holocauste, que le Mécanisme rappelle aujourd’hui à toutes les générations –que ce soit dans la Pologne de mon enfance, en ex-Yougoslavie, au Rwanda ou dans tant d’autres endroits de par le monde– qui, face à des atrocités effroyables, ont proclamé en chœur: jamais plus.

M. SERGE BRAMMERTZ, Procureur du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux, a indiqué que son Bureau continue de travailler à l’achèvement rapide du petit nombre de procédures, en première instance et en appel, héritées du TPIY.  Ainsi, dans le cadre du nouveau procès dans l’affaire Stanišić et Simatović, le Bureau a terminé la présentation de tous les témoignages à charge sauf un, dont l’audition est prévue en janvier.

En ce qui concerne la procédure en appel dans l’affaire Karadžić, le Bureau a continué de se pencher sur un grand nombre de questions, y compris des requêtes de dernière minute aux fins du dessaisissement de juges.  Dans l’affaire Mladić, le Bureau a mené à bien la préparation de ses arguments écrits en appel et s’est également penché sur des requêtes en dessaisissement.

L’une des autres fonctions du Mécanisme consiste à assurer la protection des victimes et des témoins, a continué le Procureur.  À la suite d’une enquête approfondie et confidentielle menée l’année dernière, son Bureau a déposé le 14 juin 2018, à titre confidentiel, un acte d’accusation mettant en cause cinq suspects qui doivent répondre de trois chefs d’outrage et d’incitation à commettre un outrage, a pu annoncer M. Brammertz.  Cet acte d’accusation a été confirmé le 24 août et les mandats d’arrêt délivrés par le Mécanisme ont été exécutés le 3 septembre par la police rwandaise.

Cette affaire d’outrage, Le Procureur c. Turinabo et consorts, est en lien avec la procédure en révision dans l’affaire Ngirabatware.  Le Bureau allègue que quatre des accusés ont, directement et par l’intermédiaire d’autres personnes, fait pression sur des témoins qui avaient déposé au procès d’Augustin Ngirabatware et sur des témoins dans la procédure en révision qui est en cours.  Il allègue en outre que deux des accusés ont violé des décisions judiciaires ordonnant des mesures de protection en faveur des témoins.  Les faits reprochés avaient pour objectif de faire infirmer les déclarations de culpabilité définitives prononcées contre Augustin Ngirabatware et, par là même, de remettre en cause les faits du génocide.

« Nous sommes fermement déterminés à défendre l’intégrité des procédures conduites par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme », a fait savoir le Procureur.  Il a souhaité envoyer le message clair que les victimes et les témoins seront protégés et qu’il s’opposera au déni du génocide sous toutes ses formes.

En ce qui concerne les huit personnes mises en accusation par le TPIR encore en fuite, le Bureau a pris un certain nombre de mesures importantes pour renforcer son action.  Il a ainsi restructuré l’équipe de recherche et adopté une approche plus dynamique dans ses travaux.  Le Procureur s’est rendu à Harare au cours de l’année et un groupe de travail conjoint chargé de coordonner les activités d’enquête a été établi en vue de retrouver un fugitif au Zimbabwe.  Dans le même temps, il a présenté une demande d’assistance urgente aux autorités sud-africaines, qui est malheureusement restée sans réponse.

En ce qui concerne les pays issus de la Yougoslavie, le Bureau regrette profondément qu’y persistent « la glorification des criminels de guerre et le déni des crimes, notamment celui du génocide de Srebrenica ».  Certains dirigeants politiques de la région travaillent à surmonter l’héritage du passé récent, a expliqué M. Brammertz, mais ces initiatives positives sont minées par les « propos irresponsables d’autres représentants officiels qui nient ce qui a été établi au-delà de tout doute raisonnable par les Tribunaux internationaux ».  Au Rwanda et dans les pays issus de la Yougoslavie, le Bureau reste résolu à encourager l’éducation et la culture mémorielle comme instruments clefs dans le combat contre les idéologies de la discrimination, de la division et de la haine.

Le Procureur a par ailleurs déploré que la coopération régionale entre les pays issus de la Yougoslavie soit à son plus bas niveau depuis des années, alors qu’elle est essentielle pour que justice soit rendue aux victimes de toutes les communautés.  Il a appelé les autorités nationales à prendre des mesures concrètes pour remédier à la situation, notamment en mettant fin aux ingérences politiques dans le processus judiciaire.

Enfin, le Procureur a souhaité évoquer la recherche des personnes disparues dans l’ex-Yougoslavie, pour déplorer que plus de 10 000 familles ignorent toujours ce qu’il est advenu de leurs proches.  Son Bureau a pris des mesures importantes dans le but de renforcer l’appui apporté à la recherche des personnes disparues et a signé un mémorandum d’accord avec le Comité international de la Croix-Rouge pour promouvoir leur coopération.  « Accomplir de nouveaux progrès est un impératif humanitaire, c’est fondamental pour la réconciliation dans les pays issus de la Yougoslavie. »

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a souligné combien le Mécanisme international contribue à la justice et l’importance qu’il représente en termes de dissuasion et de prévention de crimes atroces.  Au sujet de l’élection de nouveaux magistrats d’ici à la fin de l’année, le représentant a souhaité que les États Membres proposent des candidates.

Rappelant également que le succès du Bureau dépend de la coopération des États pour exécuter les sentences et répondre aux demandes d’assistance, M. Meza-Cuadra a jugé nécessaire de répondre aux préoccupations que suscite la libération anticipée de personnes condamnées par le TPIR, dont certaines n’ont fait preuve d’aucune repentance pour leurs crimes.

Mme SUSAN JANE DICKSON (Royaume-Uni) a noté que cela fait maintenant 12 mois que le Mécanisme assume ses responsabilités, notamment un certain nombre de fonctions essentielles du Tribunal pénal international pour le Rwanda et du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, aujourd’hui fermés.  Pendant cette période, a souligné la représentante, il a été confronté à des défis importants, à commencer par la réduction du budget général pour la période 2018-2019, laquelle a affecté ses activités.  Il s’est malgré tout adapté pour exercer son mandat, a-t-elle relevé, jugeant toutefois urgent de réduire ces contraintes budgétaires.

Le Royaume-Uni continuera d’appuyer le Mécanisme pour la suite de son mandat, a-t-elle assuré, saluant l’action de l’institution dans des affaires d’outrage et dans l’achèvement d’affaires importantes comme celles concernant Radovan Karadžić et Ratko Mladić.  À ses yeux, l’absence de coopération judiciaire régionale dans l’ex-Yougoslavie est source de préoccupation.  « Nous exhortons les pays à œuvrer étroitement avec le Mécanisme, en particulier avec le Bureau du Procureur », a-t-elle lancé, souhaitant que cette coopération permette de faire reculer les dénis et la glorification de crimes de guerre.

Enfin, elle a saisi l’occasion de cette réunion pour rendre hommage au juge Meron et le remercier pour son travail précieux au cours des deux dernières décennies, en particulier pour le renforcement du droit international.

Mme IRINA SCHOULGIN NYONI (Suède) a salué la mise en œuvre par le Mécanisme des recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI), en particulier la recommandation relative à la question du genre.  La déléguée a en effet salué la parité entre les sexes dans la composition du personnel du Mécanisme, tout en regrettant que cette parité ne soit pas de mise parmi les juges.  Ce manque est regrettable et nous déplorons l’absence de candidates femmes pour la prochaine élection des juges, a-t-elle dit.  « Nous devons faire mieux. »  La déléguée s’est en outre dite préoccupée par la situation budgétaire difficile du Mécanisme, qui risque de contribuer à une perte de la « mémoire institutionnelle » du Mécanisme.  Ce dernier doit être doté des ressources nécessaires, a-t-elle insisté.

Elle a ensuite rappelé les pressions accrues qui pèsent sur la justice pénale internationale et s’est demandé dans quelle mesure, au regard de la « rhétorique hostile » qui la vise, les progrès accomplis par le TPIR, le TPIY et le Mécanisme ces huit dernières années auraient été possibles aujourd’hui.  La situation actuelle, aussi regrettable soit-elle, nous montre que les cours et tribunaux font leur travail, a-t-il déclaré.  Enfin, la déléguée de la Suède a tenu à saluer le professionnalisme du personnel du Mécanisme.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a noté avec satisfaction les progrès significatifs enregistrés par le Mécanisme et ses efforts pour protéger les victimes et les témoins.  Elle a appelé les États à coopérer pleinement avec le Mécanisme, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité, et à lui fournir l’assistance qu’il demande, en particulier, en ce qui concerne la localisation, l’arrestation et la remise de tous les fugitifs mis en cause par le TPIR.

En conclusion, la représentante a fait valoir que les institutions de justice pénale internationale ont un rôle important à jouer pour faire appliquer le principe de responsabilité et lutter contre l’impunité, ce qui peut contribuer à la prévention de crimes atroces.

Mme SHERAZ GASRI (France) a relevé que cinq accusés ont été arrêtés dans une nouvelle affaire d’outrage, l’affaire Turinabo, et que ces accusés ont fait l’objet d’une comparution immédiate deux jours après leur transfert de Kigali vers Arusha.  « Nous saluons la coopération des autorités rwandaises dans cette affaire et continuerons de suivre les développements. »  Elle a ensuite pris note du glissement de calendrier dans l’affaire Karadžić et dit « compter sur le professionnalisme de tous pour achever l’ensemble des procès en cours dans le respect des délais prévus ».  « La France rappelle par ailleurs que les États sont tenus de coopérer avec le Mécanisme aux fins de recherche et d’arrestation des huit fugitifs mis en accusation par le Tribunal pénal international pour le Rwanda », a-t-elle poursuivi.  « Leurs mandats d’arrêt ne disparaîtront pas, leurs crimes ne sauraient rester impunis. » 

Mme Gasri a ensuite évoqué les derniers développements dans les deux affaires renvoyées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda devant les juridictions françaises.  La Cour d’appel de Paris a en effet confirmé, le 21 juin 2018, l’ordonnance de non-lieu ordonnée en 2015 dans l’affaire Munyeshyaka, a-t-elle dit, ajoutant que l’affaire est désormais devant la Cour de cassation.  Dans l’affaire Bucyibaruta, le parquet a demandé un non-lieu partiel et un renvoi devant la Cour d’assise.  Elle a assuré que la France continuera à traiter ces affaires avec toute la diligence et la rigueur nécessaires.

Enfin, la déléguée a jugé essentielle la pleine coopération des pays issus de l’ex-Yougoslavie avec le Mécanisme et la lutte contre l’impunité des crimes commis dans l’ex-Yougoslavie.  « Les décisions judiciaires relatives aux crimes de guerre, aux crimes de génocide et crimes contre l’humanité commis dans l’ex-Yougoslavie et au Rwanda reposent sur des faits et responsabilités rigoureusement établis et s’imposent à tous. »

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a jugé cruciale la protection des quelque 3 100 témoins et exhorté le Mécanisme à poursuivre ceux qui cherchent à les intimider ou à les influencer.  Le délégué a souhaité que les États Membres dotent le Mécanisme de ressources suffisantes pour faire face à sa charge de travail, que la protection des témoins n’a fait qu’accroître.  Il a ensuite exhorté la Croatie, la Serbie et la Bosnie-Herzégovine à renforcer leur coopération de « manière significative » afin que les présumés criminels de guerre encore en liberté soient traduits en justice. 

Le délégué s’est dit « profondément perturbé » par le déni et même par la glorification des crimes de guerre commis au Rwanda et en ex-Yougoslavie.  Le déni du génocide de Srebrenica par les parlementaires de la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine et des acteurs politiques de premier plan en Serbie atteste d’un manque de respect pour les victimes et les jugements rendus par le TPIY, a-t-il dit.  « Nous rejetons fermement cette idéologie de discrimination, de division et de haine. »

Enfin, le représentant a estimé que le Mécanisme a accompli nombre des tâches assignées par le Conseil et est prêt à relever les défis futurs.

M. TAREQ M. A. M. ALBANAI (Koweït) a remercié le juge Theodor Meron pour ses efforts inlassables tout au long de son mandat à la tête du Mécanisme.  Il a rappelé qu’il y a seulement 12 mois, le Conseil était le témoin de l’achèvement du TPIY.  Depuis, le travail des deux Tribunaux pénaux internationaux est parvenu à son terme et la responsabilité des affaires pendantes a été renvoyée au Mécanisme afin de défendre le droit international et lutter contre l’impunité, a-t-il résumé.  Notant que la paix consiste aussi à poursuivre les auteurs de crimes internationaux, le représentant a souhaité que l’on étudie et analyse l’expérience de ces Tribunaux pénaux de sorte d’en tirer des enseignements et d’évaluer les points forts et les points faibles afin que cela serve de fondement pour l’avenir.

Il a aussi salué les efforts visant à améliorer l’action du Mécanisme en adoptant le Code de conduite des juges.  Il a, en revanche, noté l’intense activité judiciaire du Mécanisme ainsi que le fait que l’Assemblée générale n’ait pas adopté le budget proposé pour 2018-2019, ce qui a amené le Mécanisme à congédier du personnel.  Le représentant s’est par ailleurs félicité des procédures rapides dans les affaires pendantes, lesquelles permettent de rendre des décisions avant les dates butoirs.  Il a enfin rendu hommage au travail du Mécanisme, « petite structure temporaire », comme le prévoit la résolution du Conseil qui l’a créé.       

M. LIU YANG (Chine) s’est félicité du travail accompli au cours de la période écoulée par le Mécanisme.  Il a espéré qu’il prendra d’autres mesures afin d’accélérer les poursuites et de respecter les attentes du Conseil pour qu’il soit petit et efficace.  Il a pris bonne note des efforts du Bureau pour mettre en œuvre les recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) et améliorer son action.

M. JONATHAN R. COHEN (États–Unis) a tout d’abord salué le juge Theodor Meron pour ses services qui ont permis de faire en sorte que justice soit rendue aux victimes d’atrocités examinées par le TPIY et le TPIR.  Il a ensuite constaté que le volume de travail du Mécanisme est impressionnant, avec 244 affaires judiciaires à l’examen. 

Pour le représentant, le transfert de cinq Rwandais pendant la période considérée est un exemple de la nécessité de rester vigilant face à la menace d’interférences extérieures dans les affaires.  Cela montre aussi l’importance qu’a le Mécanisme pour protéger des milliers de témoins.  La communauté internationale leur doit respect et protection, a-t-il insisté.  Le délégué a par ailleurs salué l’action du Procureur Serge Brammertz, notamment l’utilisation innovante de son Bureau pour appuyer les recherches de disparus.  Il a dit partager la préoccupation que les libérations anticipées puissent aller à l’encontre de la lutte contre l’impunité.

Il s’est d’autre part félicité du partenariat avec la Comité internationale de la Croix-Rouge (CICR) pour rechercher des disparus.  Il a en revanche mis en garde contre la politisation de la question, laquelle fait, selon lui, fi des souffrances des victimes.  Il a insisté sur le fait que, souvent, la responsabilité des atrocités doit encore être établie, saluant à cet égard le Bureau du Procureur en Bosnie-Herzégovine afin de procéder à des accusations dans des cas compliqués.  De fait, le représentant a demandé à tous les gouvernements de la région de coopérer afin de régler les affaires pendantes.  S’agissant, enfin, des fugitifs du génocide du Rwanda, il a rappelé que les États-Unis maintenaient leur récompense de 5 millions de dollars pour toute information permettant leur arrestation.      

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a noté les nombreux travaux effectués par le Bureau au cours de la période écoulée, qui se sont traduits par 244 décisions et ordonnances, et s’est félicité de ses efforts pour améliorer ses règles et procédures.  Il a notamment bien pris note de la révision de procédures concernant la détermination des demandes de grâce, de commutation de peines et de remise en liberté anticipée de personnes condamnées par le TPIY et le TPIR qui avaient suscité l’inquiétude de plusieurs pays, dont la Guinée équatoriale. 

Le représentant a espéré que les mesures concrètes, telles que la consultation des juges et les conditions préalables à la remise en liberté, seront la conséquence réelle de la reconnaissance et du repentir pour les crimes commis.

Conscient que le succès des diverses fonctions du Mécanisme dépend de la coopération avec les États, M. Ndong Mba a exhorté les États à renforcer leur collaboration avec le Mécanisme et les États concernés dans l’arrestation et le transfert des fugitifs, à accepter la réinstallation des personnes libérées et à coopérer dans l’exécution des sentences.  Pour appliquer le principe de responsabilité et pour que le Mécanisme honore son mandat, il faudra également renforcer les capacités des institutions des pays touchés, comme cela a été le cas dans la région des Grands Lacs, en Afrique de l’Est et dans l’ex-Yougoslavie.

M. RICARDO JOSÉ MIRANDA RIVERO (Bolivie) a souligné que le Mécanisme doit pouvoir exécuter son mandat conformément aux résolutions pertinentes du Conseil mais également en accompagnant le renforcement des juridictions nationales, avec une structure plus petite, temporaire et efficace.  Il a relevé et s’est félicité de la tenue d’audiences à distance, initiative jugée novatrice et efficace.  M. Miranda Rivero a également salué la capacité du Mécanisme à assurer des fonctions simultanées en traitant les affaires issues du TPIY et du TPIR et l’a encouragé à renforcer l’harmonisation de ses tâches en évitant que les différences dans les cultures de travail entre Arusha et La Haye n’affectent son travail.

Malgré les progrès réalisés, le représentant s’est néanmoins dit préoccupé par le nombre de fugitifs qui n’ont pu être traduits devant le Tribunal et a rappelé que la coopération des États est indispensable.  En outre, il a voulu rappeler que la responsabilité pénale est individuelle et qu’aucun État ou communauté n’est responsable de crimes commis par un individu.  M. Miranda Rivero s’est aussi inquiété des libérations anticipées et des problèmes que de telles décisions peuvent poser, étant donné qu’il existe des vides concernant les critères applicables. 

Aussi, a-t-il appelé le Mécanisme à prendre les mesures nécessaires pour y remédier et ainsi éviter que la libération de certains individus ne vienne saper le travail des ex-Tribunaux internationaux.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a dit suivre de très près les activités du Mécanisme international, s’agissant notamment des affaires en cours.  Il a toutefois regretté que les activités du Mécanisme se soient « grippées » et rappellent aujourd’hui celles du TPIY au pire moment de son histoire.  Le représentant a déploré en particulier le « chassé-croisé » des juges des cours d’appel, jugeant que ce « chaos » a des racines qui remontent loin et notamment dans le recrutement des juges pour des affaires comme celle concernant Radovan Karadžić.

Le représentant a aussi dénoncé le fait que les nouveaux juges continuent de faire intervenir dans les procès des personnes qui travaillaient déjà au TPIY.  Les dirigeants du Mécanisme ont oublié qu’ils ont charge du destin de personnes qui attendent qu’on leur rende justice, a-t-il martelé.  S’agissant de l’affaire Karadžić, il a espéré que la procédure d’appel prendra moins de temps que celle dans la procédure Šešelj.

Il a par ailleurs fait valoir que la question de la fourniture de soins adéquats reste à l’ordre du jour.  La Fédération de Russie reste ainsi inquiète de l’état de santé de Ratko Maldić.  S’il ne peut être soigné en détention, il aurait fallu le libérer afin qu’il reçoive des soins en Serbie ou en Russie, a soutenu le représentant.

Avant de conclure, il a appelé le Mécanisme à ne pas se disperser sur des activités non prévues par la Charte des Nations Unies et à se concentrer, au contraire, sur l’achèvement des activités qui lui ont été conférées.

M. BOTAGOZ TEMENOVA (Kazakhstan) a salué les progrès accomplis par le Mécanisme pour renforcer son efficacité dans un contexte budgétaire difficile, ainsi que ses efforts en vue de la bonne mise en œuvre des recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI). 

Estimant toutefois qu’une amélioration est encore possible, le délégué a exhorté le Mécanisme à prendre toutes les mesures nécessaires pour forger « des partenariats transparents » avec toutes les parties prenantes.  Il a ensuite appelé les États Membres à coopérer avec le Mécanisme et jugé cruciale l’unité du Conseil dans son appui audit Mécanisme.

Enfin, le délégué a souhaité l’arrestation des huit fugitifs recherchés par le Mécanisme et salué, à cette fin, le renforcement de la coopération de son Procureur avec les autorités rwandaises.

Mme YANIT ABERA HABTEMARIAM (Éthiopie) s’est félicitée des mesures prises par le Mécanisme, y compris le Bureau du Procureur, pour améliorer son efficacité et rationaliser ses procédures internes, malgré ses effectifs limités et ses petites ressources.  Elle a pris acte avec satisfaction du travail accompli par le Mécanisme depuis qu’il assume les fonctions résiduelles du TPIY et du TPIR.  Notant que la décision de l’Assemblée générale de ne pas approuver le budget biannuel du Mécanisme a constitué un défi pour ce dernier, la représentante a salué les mesures prises pour limiter les effets de ces contraintes budgétaires. 

Elle a toutefois estimé que cette question mériterait un examen approfondi afin qu’il soit garanti que le Mécanisme peut assumer ses fonctions de manière effective et que la protection des victimes et des témoins est assurée.  Elle s’est, d’autre part, déclarée préoccupée par le fait que huit fugitifs mis en accusation par le TPIR restent introuvables.  Elle a salué, à cet égard, les mesures prises par le Bureau du Procureur pour les rechercher et les arrêter, notamment via une coopération avec l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL).

À cette fin, la déléguée a jugé important que les États continuent de fournir l’assistance nécessaire au Bureau du Procureur du Mécanisme.  Elle a aussi émis des inquiétudes quant aux effets de libérations anticipées de personnes condamnées par le TPIR ou par le Mécanisme. 

Elle a conclu son propos en réitérant le soutien de l’Éthiopie à l’accomplissement des fonctions résiduelles du Mécanisme, notamment pour la recherche des fugitifs et le transfert des personnes acquittées ou libérées.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) s’est félicité de l’état d’avancement des travaux du Mécanisme et l’a encouragé à achever la mise en œuvre des recommandations du Bureau des services de contrôle interne (BSCI) afin de réaliser les objectifs fixés par la résolution 1966 (2010).  « Nonobstant les progrès accomplis par le Mécanisme, la Côte d’Ivoire est préoccupée par la persistance des défis à relever, notamment en matière de coopération des États Membres avec l’institution et de la coopération judiciaire entre les pays issus de l’ex-Yougoslavie. »

À cette aune, le délégué a dit apprécier la contribution des pays qui apportent au Mécanisme des « appuis multiformes » et jugé primordiale la coopération judiciaire entre les pays de l’ex-Yougoslavie en vue de l’arrestation des auteurs de crimes de guerre qui ne sont plus sur le territoire où ils sont présumés avoir commis des crimes.

Mme NELA KUBUROVIĆ, Ministre de la justice de la Serbie, a d’emblée fait valoir les 25 ans de coopération de la Serbie avec le TPIY, puis le Mécanisme, pour regretter que le TPIY n’ait pas réalisé le mandat pour lequel il avait été créé.  La Ministre a assuré que la Serbie a rempli ses obligations, satisfaisant aux demandes, y compris en donnant accès aux archives, aux témoins et même à des documents confidentiels et militaires. 

S’agissant de l’affaire d’outrage Jojic-Radeta, la Ministre a fait savoir que la Serbie veut juger cette affaire conformément aux normes les plus élevées d’indépendance judiciaire et d’état de droit.  Peu d’affaires restent du ressort du Mécanisme et l’héritage du TPIY inclut des questions importantes qui n’ont toujours pas reçu de réponse et qu’il faut traiter, a-t-elle continué.

Par ailleurs, Mme Kuburović a rappelé que la Serbie a lancé, il y a 10 ans, une initiative visant à ce que les Serbes condamnés par le Tribunal effectuent leur peine en Serbie.  La resocialisation de personnes condamnées dans des pays dont elles ne comprennent pas la langue et sans contact avec des proches semble difficile, a-t-elle fait observer.  À cet égard, elle a voulu mettre en avant la situation particulièrement difficile des Serbes Milan Martić et Dragomir Milošević, incarcérés en Estonie. 

Le postulat d’une incarcération à l’étranger doit être reconsidéré, a insisté la Ministre, précisant que la Serbie est prête à accepter une stricte surveillance internationale et à fournir des garanties que les personnes incarcérées ne seront pas libérées sans une décision du Mécanisme.  En 2016, la Serbie a adopté une stratégie nationale pour la poursuite des crimes de guerre sur la période 2016-2020 qui a fait l’objet d’éloges de la part du Procureur du Mécanisme, a-t-elle encore ajouté pour illustrer les efforts du pays.

En venant aux éléments du rapport du Procureur signalant que la coopération régionale judiciaire entre les pays de l’ex-Yougoslavie est à son niveau le plus bas, la Ministre a assuré que la Serbie a pris toutes les mesures en faveur de cette coopération tout en déplorant que ce ne soit pas la position de tous les pays de la région, même si la situation est satisfaisante avec la Bosnie-Herzégovine. 

Quant à la coopération avec le Kosovo, elle a lieu à travers la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), dont les compétences en matière judiciaire ont été définies en 2001.  La Ministre a voulu ajouter que les récentes décisions de Pristina pourraient avoir les conséquences les plus graves et provoquer une catastrophe humanitaire pour le peuple serbe au Kosovo.  Elle a appelé la communauté internationale à ne pas rester silencieuse sur cette violation flagrante des droits humains fondamentaux.

Enfin, la Ministre a critiqué les accusations de glorification de criminels de guerre.  Elle a également accusé le Mécanisme de faire pression sur la Serbie en se servant des conditions d’adhésion de la Serbie à l’Union européenne, ce qui, selon elle, montre son caractère politique, ce qui est son principal défaut depuis sa création.

M. IVICA DRONJIC (Bosnie-Herzégovine) a souligné l’engagement de son pays en vue de contribuer activement aux efforts du Mécanisme, tout en enjoignant ce dernier à améliorer son efficacité.  Le délégué a dit son appréciation de l’appui apporté par le Bureau du Procureur à son pays en vue de la poursuite des criminels de guerre présumés.  « Nous sommes pleinement conscients que cette tâche nous incombe principalement », a-t-il déclaré, soulignant la détermination de son pays à lutter contre l’impunité.

Le délégué a ainsi qualifié de « productive » la coopération entre les autorités judiciaires de son pays et celles de la Serbie.  Une véritable réconciliation réside dans nos efforts communs visant à rendre justice pour les nombreuses victimes que compte la région, a déclaré le représentant. 

Il a par ailleurs rappelé les progrès significatifs accomplis par son pays dans ce domaine, 16 condamnations ayant été prononcées lors de la période à l’examen, y compris dans des affaires complexes. 

Enfin, le représentant a insisté sur la détermination de son pays à faire triompher la justice, « sans hésitation ni sélectivité ».

Après avoir rendu hommage à l’action du juge Meron à la tête du TPIY et du Mécanisme résiduel, M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie) a félicité le juge Carmel Agius pour sa nomination à la présidence du Mécanisme à compter du 19 janvier 2019.  La Croatie, a souligné le représentant, appuie le Mécanisme qui s’efforce de traduire en justice les auteurs des pires atrocités perpétrées dans les années 1990 dans l’ex-Yougoslavie.

Déplorant qu’un grand nombre de victimes n’aient toujours pas obtenu justice, il a souhaité que les travaux du Mécanisme y contribuent et que la mise en œuvre de son mandat n’enregistre pas de nouveaux retards.  Dans ce contexte, a-t-il poursuivi, la Croatie s’engage à enquêter et à poursuivre les auteurs de crimes de guerre commis sur son territoire après 1991.  Elle suit également avec attention les affaires pendantes qui revêtent une extrême importance en termes de redevabilité pour les agressions contre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine.  « Nous attendons que ces affaires s’achèvent dans des délais raisonnables », a affirmé le représentant, notant qu’en matière d’efficacité et de gestion du temps, l’exemple du TPIY n’est pas forcément à suivre.  Selon lui, des leçons doivent être tirées des insuffisances de ce Tribunal pénal international.

Les fonctions du Mécanisme sont clairement définies: rechercher et juger les fugitifs restants, procéder à des appels, à des procès en révision, à des procès pour outrages et faux témoignages, contrôler les affaires renvoyées à des juridictions nationales, protéger les victimes et les témoins, s’assurer de l’exécution des sentences, fournir une assistance aux juridictions nationales qui en font la demande et gérer les archives.  Il s’agit là de tâches importantes et la Croatie appuie les activités allant dans ce sens, a-t-il indiqué.  Il a cependant déclaré attendre du Procureur qu’il se concentre sur les tâches prévues en vertu du mandat du Mécanisme.

La Croatie accorde également une grande importance à la poursuite d’une coopération constructive avec les États de la région.  Toutefois, a-t-il fait valoir, la coopération régionale n’est pas à sens unique.  Elle implique que les États concernés travaillent en confiance et agissent main dans la main pour juger les crimes de guerre, sans recourir au « deux poids, deux mesures » ou à des exceptions concernant des individus ou des groupes nationaux.  À cet égard, il s’est dit vivement préoccupé par le révisionnisme, qui est indissociable de la glorification des crimes de guerre et a un effet catastrophique sur la stabilité de la région.

S’agissant des personnes disparues, de « petites mesures » ont été prises par le Mécanisme mais beaucoup reste à faire et il n’y a pas de raison valable pour reporter la recherche d’une solution complète à cette question, a plaidé le représentant, regrettant à cet égard que la Serbie ne semble pas encore prête à ouvrir ses archives, ce qui constituerait une étape cruciale.

Il a conclu son intervention en assurant que son pays reste attaché au développement de bonnes relations avec les États voisins et appuie leur aspiration à rejoindre l’Union européenne dans le respect des critères d’adhésion. 

Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a remercié le Procureur pour la coopération entre le Bureau et celui du Procureur général du Rwanda, particulièrement en ce qui concerne les récentes affaires d’outrage et d’incitation à l’outrage dans lesquelles cinq Rwandais ont été accusés d’avoir fait pression sur des témoins qui avaient déposé au procès d’Augustin Ngirabatware.  La recherche de la justice pour les crimes de génocide demande un engagement à long terme et exige d’en finir avec la culture de l’impunité, a dit la représentante.

Elle a souhaité que le prochain président du Mécanisme en améliore les méthodes de travail, de façon à les rendre plus transparentes, responsables et inclusives.  Le manque de transparence ouvre la voie à la partialité, a-t-elle insisté, s’inquiétant du traitement des libérations précoces de condamnés pour génocide. 

Elle a également recommandé de combattre l’idéologie génocidaire, y compris la négation du génocide par d’anciens condamnés pour génocide, de renforcer la collaboration entre États pour appréhender les fugitifs et d’envoyer les condamnés pour génocide terminer leur peine au Rwanda.  Sur ce point, elle a précisé que cela soulagerait le budget du Mécanisme et que cela accélérerait la réhabilitation.  S’agissant des libérations anticipées, elle a exhorté le Mécanisme à mettre en place des dispositions rigoureuses et basées sur des conditions d’éligibilité clairement établies, renvoyant à l’exemple de bonnes pratiques de la Sierra Leone.

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