8376e séance – matin
CS/13546

Mali: la sécurité dans le nord et le centre reste préoccupante, souligne le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix

Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Pierre Lacroix, s’est félicité, devant le Conseil de sécurité, de la situation au Mali depuis la dernière élection présidentielle, qui a « démontré la maturité politique du peuple malien, mais aussi l’adhésion de la classe politique au processus démocratique ».

Mais en dépit de ces progrès, soulignés par le rapport du Secrétaire général, la situation reste également marquée par une situation sécuritaire préoccupante dans le centre et le nord du Mali.  Selon le rapport, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans a lancé des attaques contre la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), les Forces de défense et de sécurité maliennes et les forces internationales dans le centre et le nord du Mali, et mené des actions d’intimidation, d’enlèvements et des assassinats ciblés.  Le bilan de 287 personnes tuées, rien que ces derniers mois est le plus lord depuis la création de la MINUSMA en 2013, note le rapport.

Sur le plan politique, on note un manque de progrès dans la mise en œuvre des réformes institutionnelles clefs, comme celle du secteur de la sécurité ou du processus de démobilisation, désarmement et réintégration.

On constate aussi une « stagnation de certaines initiatives cruciales » pour renforcer le dialogue politique, avec pour conséquence un déficit de cohésion nationale et des divergences politiques, portant notamment sur la loi électorale et le registre électoral » pour les prochaines élections législatives prévues les 25 novembre et 16 décembre.

À la décharge de son pays, le représentant du Mali a dit comprendre les « impatiences » des membres du Conseil.  Mais a-t-il insisté, « force est de reconnaître que la mise en œuvre de certaines dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation requiert d’importants engagements financiers, hors de portée du seul Mali », a-t-il dit, avant de demander que les « ressources promises » lors de la conférence des donateurs qui s’est tenue à Paris le 22 octobre 2015 soient mobilisées. 

S’agissant de la question sécuritaire et après l’aveu de la délégation malienne elle-même, la France qui dispose de 3 000 hommes au Sahel dans le cadre de l’opération Barkhane, a reconnu que l’État malien a en effet besoin de disposer de plus de moyens pour reconquérir le centre.  Il en a besoin d’autant que de graves menaces pèsent toujours sur cette partie du Mali.  La stabilisation du Mali et de sa région ne peut passer que par une action complémentaire et coordonnée sur place, plaidant pour une approche partenariale, notamment entre et les Forces armées maliennes dans la lutte antiterroriste.

Son homologue de la Côte d’Ivoire a partagé le même sentiment, estimant aussi que la mise en œuvre du plan de sécurisation intégré des régions du centre devrait, selon lui, s’accompagner d’initiatives multiformes visant à renforcer la gouvernance, le développement et surtout la réconciliation entre communautés. 

Dans ce contexte, plusieurs délégations comme celles de la Fédération de Russie, de la Chine, du Kazakhstan ou du Pérou ont estimé que la Force conjointe du G5-Sahel devait être opérationnalisée à cette fin et au plus vite.

Toutes les délégations se sont par ailleurs réjouies du bon déroulement de l’élection présidentielle au Mali, considérée comme un pas dans la mise en œuvre de l’accord de paix. 

Cela dit, comme l’a noté la Guinée équatoriale, les élections législatives à venir seront considérées comme un autre moyen de le mettre en œuvre, dans un contexte politique tendu par les divergences politiques entre le Gouvernement et l’opposition.  « Il est indispensable que les réformes attendues avancent.  La décentralisation est un impératif et le système électoral doit être radicalement revu », ont même prévenu les Pays-Bas.

LA SITUATION AU MALI (S/2018/866)

Déclarations

M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, présentant le rapport du Secrétaire général sur la situation au Mali, a déclaré que les trois mois qui se sont écoulés ont été marqués par la tenue de l’élection présidentielle, reconnue par l’ensemble des observateurs électoraux, comme s’étant déroulée dans un climat globalement paisible.  « Le bon déroulement de l’élection a démontré la maturité politique du peuple malien, mais aussi l’adhésion de la classe politique au processus démocratique.  Cette élection a également mis en exergue un acquis important de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, à savoir que le consensus établi entre les parties signataires est l’élément central qui a permis à l’élection de se tenir en accord avec le calendrier électoral et sans incident sécuritaire majeur, malgré les troubles rapportés dans le centre du pays », a-t-il dit. 

Cependant, la tenue de ces élections aurait dû être sous-tendue par de plus amples progrès, en particulier dans la mise en œuvre de réformes institutionnelles clefs, notamment l’opérationnalisation des autorités intérimaires, la réforme constitutionnelle, celle du secteur de la sécurité ou encore le processus de démobilisation, désarmement et réintégration.  Ces retards dans la mise en œuvre de l’Accord, combinés à la stagnation de certaines initiatives cruciales pour renforcer le dialogue politique, telles que la Charte pour la réconciliation nationale, ont aussi eu pour conséquence un déficit de cohésion nationale manifesté par des divergences politiques.  Ces divergences portent sur la loi électorale et le registre électoral, a poursuivi M. Lacroix, avant d’appeler le Gouvernement et l’opposition à engager un « dialogue politique constructif, basé sur l’inclusivité et gardant à l’esprit l’intérêt national ».

M. Lacroix a également déclaré que le pacte pour la paix demandé par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2423 (2018), et signé le 15 octobre dernier, constitue un outil essentiel pour catalyser les efforts des parties maliennes pour accélérer la mise en œuvre de l’Accord et apporter un nouvel élan au processus de paix en mettant l’accent sur l’inclusivité.  « Le pacte ne remplace pas l’Accord de paix.  Il souligne l’importance de la mise en œuvre des dispositions principales de l’Accord », a-t-il insisté.

Abordant la question sécuritaire au Mali, le Secrétaire général adjoint a dit être préoccupé par la situation qui prévaut en particulier dans le centre du pays, une région qui, lors des deux tours de l’élection présidentielle, a concentré près de 80% des centres de vote affectés par l’insécurité.  Ces trois derniers mois ont été les plus meurtriers depuis la mise en place de la MINUSMA en 2013, a-t-il dit, indiquant qu’au cours de cette période, 287 civils ont été tués dans des attaques ciblées, y compris à l’engin explosif improvisé ou à la mine.  Des conflits intercommunautaires entre groupes armés d’autodéfense ou groupes extrémistes violents ont en outre éclaté. 

Cette situation restreint l’accès des acteurs humanitaires aux personnes les plus vulnérables, et limite le champ d’action des interventions de développement.  Elle risque également de perpétuer un sentiment de frustration au sein d’une population malienne qui peine à voir se matérialiser les retombées concrètes de la mise en œuvre de l’Accord de paix, a-t-il prévenu, avant d’insister sur la nécessité de rétablir l’autorité de l’État et d’en faire une priorité. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a salué l’élection du Président Ibrahim Boubacar Keïta comme un moment important de la vie démocratique malienne et remercié la MINUSMA pour son rôle décisif, dont le soutien logistique et sécuritaire apporté au scrutin qui s’est déroulé dans des « conditions satisfaisantes », a-t-il estimé.  La mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali doit cependant demeurer « la priorité des priorités », a-t-il insisté.  La signature du pacte pour la paix quelques mois après l’adoption de la résolution 2423 (2018) est une bonne nouvelle qui acte notamment le réengagement de l’ensemble des parties maliennes et des acteurs internationaux. 

Le représentant a souhaité que le Comité des sanctions poursuive son travail dès les prochaines semaines et demandé, à cet égard, qu’il effectue un déplacement sur le terrain afin de contacter toutes les parties maliennes et les acteurs de la médiation internationale. 

De nombreux progrès restent à réaliser et ils sont urgents, a insisté le représentant.  La résolution 2423 (2018) a posé un cadre clair en définissant une liste de mesures prioritaires, dont la mise en œuvre sera examinée dans un rapport du Secrétaire général six mois après l’investiture du Président malien: « ce délai a commencé à courir et nous engage tous », a-t-il rappelé.

Il a relevé « un début de dynamique positive », mentionnant le lancement imminent d’un processus de désarmement, démobilisation et réintégration accéléré pour les combattants du Mécanisme opérationnel de coordination; et la finalisation en cours des contours de la zone de développement des régions du nord, ainsi que l’octroi d’une plus grande place aux femmes au sein du nouveau gouvernement.  D’autres progrès sont encore nécessaires, a-t-il cependant poursuivi, citant le volet institutionnel, la justice et la réconciliation.

En revanche, la dégradation de la situation dans le centre reste « vivement » préoccupante et de graves menaces pèsent toujours sur cette partie du Mali, comme l’ont montré les attaques récentes: aussi a-t-il appelé la communauté internationale à appuyer pleinement les efforts engagés par le Premier Ministre sur ce dossier.  Il importe que l’État malien dispose de plus de moyens pour reconquérir le centre, a-t-il affirmé, tandis que la MINUSMA doit continuer d’œuvrer pour protéger les civils. 

La stabilisation du Mali et de sa région ne peut passer que par une action complémentaire et coordonnée des différentes présences de sécurité sur place, a conclu le représentant en saluant cette approche partenariale, notamment entre l’opération Barkhane et les Forces armées maliennes dans la lutte antiterroriste.  « Chacun doit rester dans les limites de son mandat, mais tous doivent se coordonner dans ce contexte difficile. »

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a rappelé que les élections maliennes auront démontré l’aspiration profonde du peuple malien à la paix ainsi que la maturité de la classe politique tout au long du processus électoral.  En vue de maintenir la dynamique positive actuelle, il a exhorté celle-ci et le Gouvernement malien à œuvrer davantage, au-delà de leurs divergences, à la préservation de la paix et de la stabilité au Mali. 

Aussi a-t-il salué la signature, le 15 octobre 2018, du pacte pour la paix, entre le Gouvernement et l’ONU, conformément à la résolution 2423 (2018).  Le paragraphe 7 confère un caractère exécutoire aux décisions de la médiation internationale, renforçant ainsi le rôle des acteurs internationaux, y compris l’ONU, a pris note le représentant. 

Il a ensuite salué les efforts déployés par le Gouvernement malien, notamment le redéploiement de l’Administration malienne, qui s’est matérialisé par la nomination des autorités intérimaires dans 21 districts des cinq régions du nord; l’opérationnalisation progressive des unités mixtes du Mécanisme de coordination opérationnel dans les régions de Kidal et de Tombouctou, et l’adoption de la stratégie nationale de réforme du secteur de la sécurité. 

La délégation ivoirienne a par ailleurs appelé à la finalisation de la vision d’une nouvelle armée reconstituée ainsi que de la police territoriale, en vue d’assurer une meilleure protection des populations civiles dans le nord et le centre du Mali. 

M. Ipo a par ailleurs exprimé sa préoccupation devant la persistance des atteintes à la sécurité dans le centre du pays, faisant état de violences intercommunautaires et d’allégations d’exactions imputables à des éléments des Forces armées maliennes.  À cet effet, la mise en œuvre du plan de sécurisation intégré des régions du centre devrait, selon lui, s’accompagner d’initiatives multiformes visant à renforcer la gouvernance, le développement et surtout la réconciliation entre communautés. 

Compte tenu de l’extension des attaques terroristes dans certains pays voisins, la Côte d’Ivoire a également salué l’unité du Conseil de sécurité et le niveau constant de mobilisation de la communauté internationale autour de la MINUSMA et son appui à la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel. 

M. JONATHAN A. COHEN (États-Unis) a déclaré qu’il ne faut pas seulement se satisfaire du climat dans lequel s’est déroulée l’élection présidentielle au Mali.  Il faut également exiger que la feuille de route issue de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali soit respectée et mise en œuvre, en particulier dans le contexte où la situation sécuritaire reste précaire dans le centre du pays, et où les auteurs de graves crimes ne sont pas encore tenus responsables de leurs actes, a dit le représentant. 

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a reconnu les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, et salué la signature du pacte pour la paix à Bamako plus tôt cette semaine.  Il est maintenant crucial que les parties redoublent d’efforts pour mettre en œuvre les réformes prévues par le pacte et la résolution 2423 (2018), avec le soutien du Conseil de sécurité. 

Le représentant s’est toutefois dit préoccupé de la détérioration continue de la situation sécuritaire, en particulier dans le centre du Mali, qui a provoqué des pertes civiles, dont le nombre au cours de la période à l’examen est le plus élevé depuis le déploiement de la MINUSMA, sans compter les débordements constatés sur les pays limitrophes, notamment le Burkina Faso. 

La stabilité et la prospérité de long terme du Mali, dont la Suède est un partenaire de premier plan, a rappelé la délégation, ne seront atteintes qu’au travers d’une combinaison de mesures de sécurité et de développement, dans le cadre d’une coordination stratégique avec la MINUSMA et l’ONU, ainsi qu’avec l’Union africaine, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et d’autres partenaires.

M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a déclaré qu’en tant qu’observateur à l’Union africaine, son pays se félicite des progrès réalisés au Mali, notamment par son gouvernement pour la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali signé avec les groupes armés.  Cependant, le Kazakhstan reste préoccupé par le cycle de violence au nord et au centre du pays, ayant conduit à une détérioration de la situation humanitaire dans ces zones. 

À ce sujet, la délégation estime que pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme violent qui frappent au Mali, comme dans d’autres pays d’Afrique, il faut une approche incluant sécurité et développement.  Or la plupart des opérations de maintien de la paix n’intègrent pas cette approche dans leurs mandats, alors que c’est l’approche qu’il faut, a déploré le représentant. 

Pour cette raison la délégation soutient l’opérationnalisation de la Force conjointe G5-Sahel, afin de coordonner les efforts en ce sens dans la région, a conclu le représentant. 

Si elle a salué la tenue réussie de l’élection présidentielle malienne cet été, ainsi que la signature du pacte pour la paix il y a quelques jours, Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a toutefois constaté que la situation des droits de l’homme dans le pays demeure préoccupante.  Elle a donc appelé les autorités à prévenir les violations, y compris celles qui auraient été commises par les forces gouvernementales dans le cadre de leurs opérations antiterroristes, et à ouvrir des enquêtes sur l’ensemble des allégations. 

La représentante s’est ensuite félicitée des résultats obtenus jusqu’à présent dans la stabilisation du Mali, grâce à la contribution de la MINUSMA, mais aussi celle de la Force conjointe du G-5 Sahel, dont la composante de police permettra d’assurer la continuité entre les opérations conduites par la Force et les systèmes judiciaires, dans le respect de l’état de droit et des droits de l’homme.

M. ALEXANDER A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a déclaré que « les efforts de Bamako sont louables », notamment dans le nord du pays, où l’autorité de l’État se reconstruit petit à petit et le tissu économique reprend.  Mais on constate aussi que dans d’autres régions où la présence de l’État est faible, notamment le centre du pays, les conflits interethniques reprennent, a dit le représentant, observant aussi qu’une partie de la jeunesse, en particulier celle qui ne voit pas d’horizon à sa vie, est facilement attirée par les groupes armés terroristes de la région. 

Dans ce contexte, la Fédération de Russie est convaincue que pour régler la situation eu Mali, il faut régler la situation dans la région.  Car celle qui prévaut en Libye a des conséquences au Mali, a dit le représentant, plaidant pour une opérationnalisation de la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel. 

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a noté que le Gouvernement malien est en train de concevoir une stratégie nationale de réforme de l’appareil de sécurité, qui définit un projet fondé sur les principes d’inclusion et de représentativité.  Il a ensuite salué les efforts déployés par le Président réélu Ibrahim Boubacar Keïta, qui s’est rendu dans le centre du Mali. 

Sa délégation s’est félicitée de la signature du pacte pour la paix, qui vise à accélérer l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, appuyer les efforts de paix actuels et adopter des objectifs à plus long terme.  Mais le représentant s’est dit vivement préoccupé par la menace terroriste qui pèse sur les populations civiles, victimes d’engins explosifs improvisés.  À cet égard, il a salué les efforts déployés par la MINUSMA et la Force conjointe du G-5 Sahel pour inverser ces tendances sur le terrain.  « Nous devons désormais faire porter ses efforts sur la mise en œuvre de l’Accord et à faire fond sur les progrès déjà accomplis », a encouragé en conclusion M. Alotaibi.

M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a déclaré qu’en dépit de la bonne tenue de l’élection présidentielle, les tensions entre le Gouvernement et l’opposition perdurent.  Il est « indispensable que les réformes attendues avancent.  La décentralisation est un impératif et le système électoral doit être radicalement revu », a-t-il dit.  Il a également déclaré que « les citoyens maliens méritent d’avoir un Gouvernement auquel ils puissent faire confiance et qui leur fasse confiance », a-t-il dit ajoutant « que le fait que les forces armées maliennes soient directement liées à 18 cas de violations des droits de l’homme suscite des préoccupations ».  Dans ce contexte, le représentant a appelé le Gouvernement à ouvrir des enquêtes et traduire en justice les auteurs de ces actes.

Le délégué a également estimé que les répercussions de l’instabilité que connaît le Mali se font sentir au-delà de ses frontières, dans le Sahel et jusqu’en Europe.  La stabilité de l’ensemble de cette région est donc cruciale pour combattre des menaces telles que le trafic d’êtres humains, l’immigration clandestine, le terrorisme et la criminalité organisée.  Pour cette raison, les Pays-Bas, comme d’autres appellent à l’opérationnalisation de la Force conjointe G5-Sahel, et assurent de leur ferme engagement la stabilité au Sahel, a-t-il conclu. 

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) a estimé que des progrès avaient été accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, nommément la nomination des autorités intérimaires au niveau des districts, la création de municipalités pour les régions de Ménaka et de Taoudenni, et l’adoption d’une stratégie de réforme du secteur de la sécurité.  Il a toutefois regretté l’incapacité des parties signataires de l’Accord de s’accorder sur les questions des quotas d’intégration pour l’armée reconstituée et d’autres services en tenue, qui a continué de retarder le processus de désarmement, démobilisation et réintégration. 

Le représentant a ensuite émis l’espoir que la signature du pacte pour la paix faciliterait l’application des volets en suspens de l’Accord.  En outre, l’adoption d’une loi d’entente nationale par le Conseil des ministres permettra la réinsertion des personnes qui, bien que reconnues coupables de crimes commis dans le contexte des événements liés à la crise ayant débuté en 2012, ont fait acte de contrition.  « Une telle initiative devrait faciliter la tenue des élections parlementaires dans les prochains mois », s’est-il félicité. 

Considérant comme important le rôle de la Force conjointe du G-5 Sahel dans le rétablissement de la paix et de la sécurité au Mali et dans la région, la délégation éthiopienne a cependant souligné la nécessité d’un financement prévisible comme l’a noté le Mécanisme tripartite, qui comprend la Force conjointe, l’ONU et l’Union européenne. 

M. ZHANG DIANBIN (Chine) a déclaré que le Gouvernement malien a une responsabilité en ce qui concerne la paix et la sécurité dans son pays.  La communauté internationale doit donc appuyer ses efforts en ce sens.  Pour ce faire, il faut adopter une approche intégrée, notamment en opérationnalisant la Force conjointe G5-Sahel. 

À ce titre, la Chine apprécie les efforts de la MINUSMA pour aider cette force et assister le Gouvernement malien dans ses missions de sécurité.  La Chine assure de sa disponibilité à continuer d’aider le Mali, et les autres pays africains en général, dans ces domaines de la paix et de la sécurité, a conclu son représentant. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a espéré que la signature du pacte pour la paix permettrait d’imprimer un nouvel élan à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Il a rappelé que les parties signataires doivent œuvrer sans délai à la réforme du secteur de la sécurité et au redéploiement de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire, sans négliger pour autant la lutte contre l’impunité, y compris pour les crimes commis par les Forces armées maliennes, ni l’examen des causes profondes de la crise actuelle. 

Le délégué a par ailleurs salué la contribution de la Force conjointe du G-5 Sahel dans le cadre des efforts de lutte contre le terrorisme déployés au Mali, ainsi que celle de la MINUSMA, dans un environnement sécuritaire et opérationnel particulièrement dangereux. 

Mme AMPARO MELE-COLIFA (Guinée équatoriale) a déclaré que la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali doit demeurer la priorité du nouveau Gouvernement.  « C’est le document idoine pour parvenir à la paix », a dit la représentante, se félicitant des initiatives qui ont déjà été prises dans ce sens, notamment la reprise des patrouilles conjointes à Tombouctou et les opérations de désarmement.  On ne pourra parler de paix, si l’Accord n’est pleinement mis en œuvre, a-t-elle ajouté. 

La déléguée a également estimé qu’après l’élection présidentielle, les législatives seront une autre occasion de mettre cet accord en œuvre.  Cependant, la délégation estime, comme le Secrétaire général adjoint, que le Pacte pour la paix signé entre les parties maliennes et les Nations Unies ne remplace pas l’Accord de paix de 2014.

M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) s’est félicité du déroulement réussi cet été de l’élection présidentielle, en dépit des tentatives de groupes terroristes de la perturber, ainsi que de la signature récente du pacte pour la paix.  Préoccupé par le bilan de 287 morts parmi la population civile en l’espace de trois mois –soit le bilan le plus élevé depuis le déploiement de la MINUSMA–, le représentant a estimé que la réforme du secteur de la sécurité revêt aujourd’hui un caractère d’urgence. 

Il s’est félicité que la Mission recentre son action sur les tâches prioritaires stipulées par son mandat, lequel sera réexaminé en février dernier.  En conclusion, M. Allen a souligné que la mise en œuvre de l’Accord demeure aujourd’hui le principal enjeu au Mali. 

Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a dit partager le point de vue de nombre de délégations qui ont estimé que la bonne tenue de l’élection présidentielle est un climat propice à revitaliser le processus de paix.  La Bolivie est également de l’avis du Secrétaire général adjoint lorsqu’il dit que le pacte pour la paix n’est pas destiné à remplacer l’accord de paix de 2014.  C’est un outil appelé à aider les efforts déployés par le Mali, les Nations Unies et la communauté internationale afin de dissiper les désaccords. 

Cinq ans après la création de la MINUSMA et trois ans après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le Conseil de sécurité doit continuer de se pencher sur la situation dans ce pays, qui subit le contrecoup des « politiques interventionnistes et de changement de régime qui ont atteint la Libye », a dit la représentante, estimant que cet appui doit viser au rétablissement de l’autorité de l’État malien sur tout son territoire. 

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a commencé par se réjouir de la reconnaissance, par le Secrétaire général dans son rapport, des nouveaux progrès substantiels accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, en particulier l’organisation réussie de l’élection présidentielle les 29 juillet et 12 août 2018.  Il a dit comprendre les « impatiences » des membres du Conseil, tout en cherchant à les rassurer sur la volonté commune des parties signataires maliennes d’honorer les engagements souscrits dans l’Accord.  « L’illustration parfaite vient d’en être donnée, à nouveau, avec la signature, le lundi 15 octobre, du pacte pour la paix au Mali entre le Gouvernement et l’ONU.  Aux termes de ce pacte, les parties maliennes réaffirment leur engagement ferme à accélérer la mise en œuvre diligente et intégrale de l’Accord, conformément au paragraphe 5 de la résolution 2423 (2018) », a déclaré le délégué. 

Il est vrai, a ajouté M. Konfourou, que la concrétisation de ces engagements a longtemps souffert de l’instauration tardive de relations de réelle confiance entre les différents protagonistes.  Aujourd’hui, ce préalable est désormais satisfait et les effets positifs qui en découlent sont des plus éloquents, a-t-il constaté: « […] l’installation des autorités intérimaires et l’opérationnalisation en cours des patrouilles mixtes, combinées avec le redéploiement progressif des Forces armées maliennes, autorisent le retour tant attendu de l’administration et des services sociaux de base dans de nombreuses localités autrefois soumises à l’emprise des terroristes et des bandes armées ». 

Il a également cité en exemple l’absence de belligérance et d’affrontements entre les Forces armées maliennes et les mouvements signataires.  En outre, 63 collectivités territoriales ont été créées dans les nouvelles régions de Ménaka et Taoudéni, a poursuivi le représentant, en se réjouissant aussi de la poursuite de la campagne de pré-enregistrement des combattants, une étape décisive du processus de désarmement, démobilisation et réintégration, « pierre angulaire de la stratégie nationale de stabilisation du pays ».  Force est de reconnaître que la mise en œuvre de certaines dispositions de l’Accord requiert d’importants engagements financiers, « hélas hors de portée du seul Mali », a souligné M. Konfourou, qui a donc demandé aux partenaires internationaux de mobiliser les « ressources promises » lors de la conférence des donateurs qui s’est tenue à Paris le 22 octobre 2015.

Alors que les régions du centre continuent de subir des attaques terroristes aveugles autant de nombreuses pertes en vies humaines, il est nécessaire de maintenir aussi les programmes d’aide des agences de l’ONU et les autres organismes présents sur le terrain.  « Nous sommes préoccupés face au gap de financement du plan d’aide pour 2018 qui s’élève à 330 millions de dollars, dont 32% seulement ont été mobilisés », s’est alarmé le représentant. 

Abordant ensuite la question des droits de l’homme, il a assuré le Conseil de sécurité que « tous les cas de violation signalés font systématiquement l’objet d’enquêtes par les structures nationales compétentes » et que, d’ores et déjà, des mesures disciplinaires ont été prises à l’encontre des présumés responsables d’atteintes. 

Le délégué a toutefois observé que la plupart des abus sont imputables à des groupes extrémistes violents.  Par ailleurs, le Gouvernement malien a-t-il dit, est d’avis avec le Secrétaire général que toute stratégie de sortie de crise doit prendre en compte la dimension régionale marquée par une augmentation exponentielle de la criminalité transnational organisée.  Aussi a-t-il demandé en conclusion que la Force conjointe du G-5 Sahel soit dotée d’un mandat adéquat et de ressources pérennes afin de lui permettre d’accomplir sa mission.

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