Soudan du Sud: l’Accord revitalisé pour résoudre le conflit suscite de l’espoir au Conseil de sécurité en dépit de certaines préoccupations
Moins d’une semaine après la signature, le 12 septembre, de l’accord revitalisé pour résoudre le conflit au Soudan du Sud, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix a invité, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, à en faire la base d’une paix durable en dépit des « préoccupations légitimes » qui persistent en ce qui concerne l’engagement des parties.
Alors que la crise que connaît le pays entre dans sa cinquième année, M. Jean-Pierre Lacroix a déclaré que « la nécessité d’établir la paix au Soudan du Sud est tellement urgente » qu’il faut se saisir de l’occasion que représente la signature de l’accord, sous l’égide de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), et en faire le socle d’une paix durable.
Tout en reconnaissant qu’il existe un certain nombre de lacunes, ainsi que des questions dont la finalisation reste inachevée, l’Envoyé spécial des Nations Unies pour le Soudan du Sud a, lui aussi, estimé que « même défectueux », cet accord reste une plateforme utile pour la paix, « si les parties démontrent la volonté politique de le mettre en œuvre et de résister à l’impulsion d’y chercher un avantage politique, tribal ou régional égoïste ».
« Grâce à cet accord, l’écart a été réduit entre les parties sur un certain nombre de questions de gouvernance et de sécurité qui, jusque-là, semblaient insurmontables », s’est félicité M. Nicholas Haysom.
Renchérissant, l’Envoyé spécial de l’IGAD a appelé à ne « pas faire de la perfection l’ennemi du bien ». M. Ismail Wais a toutefois noté que la mise en œuvre de cet accord nécessitera la mobilisation de tous les acteurs sud-soudanais et des ressources financières nécessaires.
M. Lacroix a en outre souligné qu’il sera essentiel, pour le Gouvernement du Soudan du Sud et le Mouvement/l’Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition), d’établir la confiance et de faire preuve de volonté politique pour œuvrer ensemble à la création d’un environnement qui permette à l’ensemble des parties sud-soudanaises, y compris les femmes, de participer à la mise en œuvre de l’accord.
« Le premier pas impératif » est le cessez-le-feu complet et immédiat, selon le Secrétaire général adjoint. À cet égard, il a jugé gravement préoccupants les accrochages signalés dans les États d’Équatoria-Central et d’Unité dans les jours qui ont suivi la signature de l’accord. « Nous devons donc envoyer un message fort aux parties pour souligner qu’avec la conclusion de cet accord politique revitalisé, rien ne peut justifier la poursuite de la violence », a martelé M. Lacroix.
Également convaincu qu’aucun accord ne peut durer face à des violations persistantes s’il n’y a pas la moindre sanction, l’Envoyé spécial a en outre appelé la région à se montrer déterminée à faire fonctionner l’accord, y compris en s’en prenant aux violateurs, « même s’il s’agit du Gouvernement du Soudan du Sud ».
Si les membres du Conseil se sont, dans une large mesure, félicités de la signature de l’accord revitalisé, nombre d’entre eux ont toutefois estimé, à l’instar de la Pologne, que les échecs du passé appellent à faire preuve d’un « optimisme prudent ».
Mettant en garde contre « une paix de papier », la France a notamment appelé à rester vigilants sur le respect du cessez-le-feu et la protection des civils, « qui est au cœur du mandat de la MINUSS », ainsi que sur l’accès humanitaire et la protection du personnel humanitaire.
Un changement d’attitude s’impose, et les dirigeants sud-soudanais doivent démontrer que leurs engagements ne resteront pas lettre morte, ont exigé les États-Unis qui ont notamment exhorté le Gouvernement de Salva Kiir à assurer un partage plus équitable des pouvoirs.
Conscient des préoccupations de la communauté internationale, le Soudan du Sud a reconnu que cet accord est « difficile et compliqué », mais il a jugé important de ne pas le remettre en cause et a appelé la communauté internationale à le soutenir.
Pour l’Éthiopie, cet accord représente une chance « historique » de mettre fin au conflit au Soudan du Sud. À la différence des accords précédents, toutes les parties l’ont signé, même s’il existe des divergences au sein de l’alliance de l’opposition sud-soudanaise, a remarqué la délégation.
La Fédération de Russie a, elle aussi, appelé à ne pas douter de « la percée » que représente la signature de l’accord revitalisé, ajoutant que les efforts persistants de l’IGAD représentent un exemple édifiant d’une « solution africaine apportée à un problème africain ».
La délégation russe a également averti que les appels lancés en faveur de l’élargissement des régimes de sanctions risquent de durcir les positions des parties et de compliquer toute résolution pacifique du conflit.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD (S/2018/831)
Déclarations
M. JEAN-PIERRE LACROIX, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a parlé de la signature, le 12 septembre, d’un accord revitalisé pour la résolution du conflit au Soudan du Sud, « fruit d’un récent engagement intensif des dirigeants des régions immédiates à résoudre la crise dans le pays ». Il s’est aussi félicité des efforts déployés continuellement par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), avec l’appui de l’Union africaine (UA) et des partenaires internationaux, pour rétablir la paix dans le pays. Selon lui, la signature de l’accord de paix revitalisé marque un jalon important dans cette crise qui entre dans sa cinquième année.
M. Lacroix a expliqué que, tout comme l’accord rédigé en 2015, ce nouveau texte établit une feuille de route pour la paix en mettant l’accent sur les réformes, la transformation politique, la sécurité, le développement socioéconomique et la réconciliation nationale. Cependant, des préoccupations légitimes persistent en ce qui concerne l’engagement des parties, tandis que de nombreux aspects pratiques liés à la mise en œuvre de l’accord exigent des éclaircissements. Mais malgré ces préoccupations, a-t-il ajouté, la nécessité d’établir la paix au Soudan du Sud est tellement urgente qu’il faut se saisir de cette occasion et œuvrer ensemble pour faire de cet accord la base d’une paix durable.
M. Lacroix a affirmé qu’il sera essentiel, pour le Gouvernement du Soudan du Mud et le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition), d’établir la confiance et de faire preuve de suffisamment de volonté politique pour œuvrer ensemble à la création d’un environnement qui permette à l’ensemble des parties sud-soudanaises, y compris les femmes, de participer pleinement à la mise en œuvre de l’accord. Un cessez-le-feu complet et immédiat en est le premier pas impératif, a-t-il ajouté.
Le Sous-Secrétaire général a ensuite qualifié de gravement préoccupant le fait que dans les jours qui ont suivi la signature de l’accord, des accrochages ont été signalés dans deux États: Équatoria-Central et Unité. Les deux parties semblent avoir mobilisé des renforts pour appuyer des opérations permettant de mettre la main sur des territoires, a-t-il indiqué, se disant préoccupé du risque que d’autres accrochages aient lieu dans les zones où les forces du Gouvernement et de l’opposition sont à proximité, notamment dans certaines régions des États d’Équatoria-Central, d’Équatoria-Occidental, d’Unité et dans l’ouest du Bahr el-Ghazal. Des rassemblements de combattants, y compris d’enfants, auraient également eu lieu à l’approche de l’intégration des forces de Taban Deng Gai dans l’Armée populaire de libération du Soudan.
M. Lacroix a signalé que la poursuite des combats avait aggravé une situation humanitaire déjà dramatique ainsi que la situation des droits de l’homme dans le pays. Il a précisé que 1,8 million de personnes sont déplacées et 2,5 millions réfugiées dans des pays voisins. Le conflit est toujours caractérisé par le niveau extrême de violence infligé aux civils, y compris des cas de violence sexuelle. « Nous devons donc envoyer un message fort aux parties pour souligner qu’avec la conclusion de cet accord politique revitalisé, rien ne peut justifier la poursuite de la violence. » Il faut les appeler une fois de plus à faire preuve de leadership pour taire leurs fusils, désengager les forces, assurer la liberté de mouvement de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et des partenaires humanitaires et inverser le lourd tribut humanitaire du conflit.
Le Sous-Secrétaire général a par ailleurs salué le verdict rendu par un tribunal militaire qui a conclu que 10 soldats s’étaient rendus coupables d’avoir commis, en juin 2016, des actes de violence contre des civils dans l’hôtel Terrain à Djouba. C’est là un premier pas pour rendre justice aux victimes et réduire la culture de l’impunité, s’est-il félicité.
Revenant à la signature de l’accord revitalisé, il a affirmé que celui-ci donne aux Sud-Soudanais l’occasion de tourner une nouvelle page. Il a reconnu que le chemin qui reste à parcourir sera difficile et a insisté sur le rôle critique que l’IGAD doit continuer de jouer pour inciter les parties à honorer leurs engagements, notamment en veillant à ce que les responsables de toute violation de l’accord soient promptement identifiés et tenus pour responsables.
M. Lacroix a par ailleurs indiqué que si le Conseil de sécurité estimait nécessaire de modifier le mandat de la Mission, certaines considérations devraient guider les délibérations, à commencer par la nécessité de continuer à faire de la protection des civils une priorité clef du mandat, ainsi que le besoin de maintenir une seule force unifiée dotée d’une structure de commandement et de contrôle elle aussi unifiée. De plus, tout rôle supplémentaire que la MINUSS serait amené à jouer pour appuyer les dispositifs sécuritaires prévus doit se faire dans le respect des principes du maintien de la paix de l’ONU. Dans un même temps, il faut aussi veiller à ce que toute tâche supplémentaire bénéficie de l’accord « clair et détaillé » des parties au conflit ainsi que des Nations Unies.
M. NICHOLAS HAYSOM, l’Envoyé spécial de l’ONU pour le Soudan du Sud, a informé le Conseil de sécurité de l’état de mise en œuvre de l’accord revitalisé pour résoudre le conflit au Soudan du Sud (R-ARCISS), qui a été signé par plusieurs partis politiques le 12 septembre 2018 à Addis-Abeba, en Éthiopie. « Lorsque j’ai pris mes fonctions actuelles, il y a deux ans, le Soudan du Sud tentait de mettre en œuvre l’accord de paix. Il se prépare maintenant à mettre en œuvre une version revitalisée de cet accord, mais après une guerre civile de deux ans et un conflit dévastateur. La question importante à laquelle nous sommes confrontés est de savoir comment la communauté internationale, et notamment l’ONU, devrait évaluer, soutenir ou répondre à cet important développement », a-t-il expliqué.
Grâce à cet accord, l’écart a été réduit entre les parties sur un certain nombre de questions de gouvernance et de sécurité qui, jusque-là, semblaient insurmontables, s’est félicité l’Envoyé spécial. Leur effet de levier, la présence d’un protagoniste absent jusque-là, Dr Riek Machar, et une diplomatie vigoureuse, ont permis la signature d’un accord qui envisage une transition préalable de huit mois et une feuille de route transitoire de trois ans. Il existe néanmoins un certain nombre de lacunes, ainsi que des questions dont la finalisation reste inachevée, et d’autres raisons encore pour affirmer que ce processus nécessitera l’attention constante de la région et de la communauté internationale. Mais même défectueux, cet accord pourrait encore être une efficace plateforme pour la paix, si les parties démontrent la volonté politique de le mettre en œuvre et de résister à l’impulsion d’y chercher un avantage politique, tribal ou régional égoïste. « Fondamentalement, nos préoccupations concernent les questions suivantes: inclusivité, force exécutoire, transparence financière, responsabilité politique, faibles niveaux de confiance et arrangements sécuritaires. »
Malgré les efforts de l’équipe de facilitation de l’IGAD, quelques-unes des parties continuent à exprimer des réserves sur le texte. L’autre problème concerne la manière dont les Soudanais feront de leur Constitution leur nouveau contrat social, a poursuivi l’Envoyé spécial. « Nous avons déjà noté que les nombreux accords de cessation des hostilités ont été violés dans les heures qui ont suivi le retour des parties à la paix. » Or, a-t-il fait remarquer, aucun accord ne peut durer face à des violations persistantes s’il n’y a pas la moindre sanction. Dans ce cas précis, a ajouté l’Envoyé, « nous pensons que la région doit se montrer déterminée à faire fonctionner l’accord, y compris en s’en prenant aux violateurs, même s’il s’agit du Gouvernement du Soudan du Sud ».
La troisième exigence de viabilité de l’accord, ce sont des ressources financières adéquates, en particulier pour veiller au cantonnement immédiat des différentes forces. Or, a noté l’Envoyé, aucun des donateurs potentiels n’a démontré une volonté de financer ce processus, sauf si l’on prévoit une disposition claire visant à garantir la transparence et la régularité des transactions financières, y compris la responsabilité dans les cas de détournements de fonds publics antérieurs.
L’un des obstacles à la mise en œuvre de l’accord, c’est aussi le faible niveau de confiance entre les parties, a-t-il poursuivi en craignant cet esprit de rivalité au sein du Gouvernement, en vertu du fait que les parties et leurs dirigeants s’affronteront probablement lors des élections à la fin de la transition. « Ce Conseil devrait exhorter les parties à prendre des mesures de confiance mutuelles pour restaurer la crédibilité du processus de paix et remédier à l’amertume et aux hostilités qui sont l’héritage des quatre dernières années de violences intercommunautaires horrible. » Ces mesures ne nécessitent, du reste, aucune ressource financière.
Enfin, l’Envoyé a prôné des arrangements de sécurité détaillés. En ce qui concerne les sites de cantonnement, il n’y a pas d’accord sur le lieu où ils seront situés, ni sur leur nombre. On ne sait pas non plus qui sera éligible pour s’y rendre et qui sera responsable de leur maintenance, a encore relevé le haut fonctionnaire.
Par ailleurs, jusqu’au tout dernier moment, les documents produits au cours des négociations n’avaient pas mentionné le sort de la MINUSS, ni les modifications éventuelles à son mandat. Dans les derniers jours, une proposition qui consistait à ce que le Soudan et l’Ouganda comblent cette lacune a été élargie: ce serait maintenant l’Ouganda, le Soudan, Djibouti et la Somalie qui rejoindraient la force de protection régionale de la MINUSS. Seul ce Conseil de sécurité peut déterminer la taille et la composition des forces de maintien de la paix des Nations Unies, a noté l’Envoyé spécial en soulignant l’intérêt d’un tel engagement qui lui permettrait de s’impliquer dans l’architecture de sécurité. Cela créerait un environnement plus propice à une intervention de maintien de la paix, selon lui.
Ces problèmes n’empêchent pas l’accord R-ARCISS d’être accueilli comme un véritable pas en avant, a conclu l’Envoyé en plaidant pour que les parties montrent un réel engagement en faveur de la paix au Soudan du Sud. « Ce qui est clair, c’est que la communauté internationale et l’ONU en particulier devront surveiller de près le Sud-Soudan et la mise en œuvre de son dernier accord de paix. »
M. ISMAIL WAIS, Envoyé spécial de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) pour le Soudan du Sud, s’exprimant depuis Addis-Abeba, a souligné le caractère historique de l’accord revitalisé sur la résolution du conflit au Soudan du Sud, signé le 12 septembre entre le Président sud-soudanais, Salva Kiir, et son ancien Vice-Président, Riek Machar, sous l’égide de l’IGAD et de l’Éthiopie, mettant fin à cinq années de conflit au Soudan du Sud. « Cet accord est un jalon important. » La mise en œuvre de cet accord va nécessiter la mobilisation de tous les acteurs sud-soudanais et des ressources financières nécessaires, en vue de faire advenir un nouveau Soudan du Sud, a-t-il dit. L’IGAD a par ailleurs décidé que M. Riek Machar pourrait décider de résider dans le pays de son choix parmi les membres de l’IGAD, a expliqué M. Wais. Enfin, il a déclaré que l’IGAD continuera de dialoguer avec le Conseil de sécurité pour le plein déploiement de la force de protection régionale et pour un éventuel élargissement de son mandat.
Mme GRACE JOHN, Responsable de la Gouvernance et de la paix à Community Empowerment for Progress Organization (CEPO-Soudan du Sud), a déclaré que le Conseil de sécurité devrait appeler l’IGAD à fournir un soutien soutenu et à rester en contact avec les groupes signataires de l’accord revitalisé, qui est « si fragile ». Elle l’a ensuite exhorté à demander l’établissement, dans les meilleurs délais, du tribunal mixte pour le Soudan du Sud et à appuyer les efforts visant à renforcer le système de justice pénale. Son organisation a également demandé avec insistance au Conseil de sécurité d’appeler à un soutien renforcé aux initiatives locales de consolidation de la paix, ainsi qu’à la création d’une commission « Vérité, Réconciliation et Apaisement », telle que prévu dans l’accord de paix
En outre, les pays voisins du Soudan du Sud doivent respecter l’embargo sur les armes, a exigé Mme John. La représentante a aussi recommandé que toutes les parties au conflit mettent en œuvre leur engagement en faveur d’une participation pleine et entière des femmes dans la mise en œuvre de l’accord. De plus, les parties signataires de l’accord doivent respecter le cessez-le-feu et le mettre en œuvre dans les délais demandés, a poursuivi Mme John. Enfin, a-t-elle ajouté, l’accès humanitaire et la sûreté des travailleurs humanitaires demeurent une priorité.
M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) s’est félicité de l’engagement de la région en faveur de l’établissement d’une paix pérenne au Soudan du Sud. Il a salué la signature de l’accord revitalisé, estimant toutefois que les échecs précédents sont une source de préoccupation. Il a notamment parlé des nombreuses violations du cessez-le-feu constatées par le passé, le blocus imposé à l’acheminement de l’aide humanitaire, de la mort de 13 travailleurs humanitaires, ainsi que de la situation des prisonniers politiques. Un changement d’attitude s’impose, a exigé le représentant. Ce dernier a ensuite appelé à mettre fin aux combats et a exhorté le Gouvernement de Salva Kiir à assurer un partage plus équitable des pouvoirs.
Le délégué a aussi appelé l’IGAD et l’Union africaine à accélérer leurs efforts pour assurer la pleine mise en œuvre de l’accord. Il faut aussi démontrer que nous sommes prêts à prendre des mesures à l’encontre des individus qui violent les accords, et les États-Unis sont prêts à agir dans ce sens, a–t-il fait savoir.
Le représentant a aussi appelé l’Union africaine à concrétiser la création d’un tribunal hybride. Il a estimé que le mandat de la MINUSS doit continuer de se concentrer sur la protection des civils. Le représentant a ensuite noté avec beaucoup de préoccupation la situation humanitaire déplorable du pays, avec 7 millions de personnes, dont 4 millions d’enfants, actuellement dans le besoin. Il a aussi dénoncé le fait que le Soudan du Sud est l’un des pays les plus dangereux pour les humanitaires. Pour conclure, le délégué a appuyé les aspirations des Sud-Soudanais en faveur de la paix et a appelé les dirigeants à démontrer que leurs engagements ne resteront pas lettre morte.
M. TAYE ATSKE SELASSIE (Éthiopie) a indiqué qu’il existe désormais une chance historique de mettre fin au conflit au Soudan du Sud depuis la signature de l’accord du 12 septembre sous l’égide de l’IGAD. Ce qui différencie cet accord des précédents est le fait que toutes les parties l’ont signé, jetant ainsi les bases pour sa bonne mise en œuvre, a-t-il noté. Conscient des divergences qui existent au sein de l’alliance de l’opposition sud-soudanaise s’agissant de cet accord, le délégué a espéré que les acteurs encore réfractaires s’y rallieront. Il a dit comprendre les préoccupations de certains membres du Conseil s’agissant de la mise en œuvre de l’accord, au regard des expériences passées. Mais nous ne devons pas perdre de vue l’importance de cet accord pour le Soudan du Sud et la région entière, a-t-il poursuivi.
Il a ajouté que les parties, qui connaissent ces préoccupations, devraient œuvrer pour une pleine application de l’accord. Insistant sur le rôle de ce Conseil pour une telle mise en œuvre, le délégué a espéré qu’il répondra positivement à la demande de l’IGAD d’un plein déploiement de la Force de protection régionale et d’une révision de son mandat. Enfin, le délégué de l’Éthiopie a rappelé que le plan de réponse humanitaire pour le Soudan du Sud n’est financé qu’à hauteur de 50%.
M. KAREL J.G. VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a souligné l’importance d’un véritable processus politique et inclusif, la nécessité d’assurer la responsabilité de tous les acteurs dans le conflit, en mettant aussi l’accent sur le rôle de la MINUSS. Sur le premier point, le représentant a estimé qu’obtenir un accord sur le partage du pouvoir et la sécurité ne conduira pas automatiquement à une paix durable. Pour arriver à cette paix, il faut traiter les racines du conflit et obtenir l’engagement et l’inclusion de tous les acteurs. Le rôle que la région joue est important pour la réussite du processus politique et aussi pour la mise en œuvre des sanctions ciblées et de l’embargo sur les armes imposés par le Conseil, a-t-il ajouté.
Concernant la nécessité d’assurer la responsabilité de tous les acteurs dans le conflit, le représentant a appelé le Gouvernement du Soudan du Sud à mener des enquêtes sur tous les crimes et à traduire tous les auteurs de violence devant la justice, en particulier les responsables de violence sexuelle à l’encontre des femmes et des filles. Il a estimé que le tribunal mixte pour le Soudan du Sud est un élément clef pour assurer la responsabilité des auteurs et a appelé le Gouvernement à signer le mémorandum d’accord avec l’Union africaine afin de créer ce tribunal.
Concernant la MINUSS, le délégué a dit qu’afin de protéger les civils, la Mission, le personnel de l’ONU et les travailleurs humanitaires doivent avoir un accès sans entrave à toutes les régions du pays. La liberté de circulation de la Mission et du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu est absolument impérative. Après la signature du nouvel accord de paix, le maintien et la mise en œuvre du Mécanisme sont essentiels, a-t-il précisé. Il a souhaité que le Conseil de sécurité condamne fermement toutes les violations de l’accord d’engagement des forces et assure qu’elles soient traitées adéquatement.
Mme ANNE GUEGUEN (France) a souhaité que l’accord conclu permette d’avancer vers une paix durable au Soudan du Sud. Mais, a-t-elle tempéré, « nous savons que les espoirs ont souvent été déçus dans ce pays ». Elle a donc appelé à la vigilance et à la détermination. « Vigilance, car c’est sur les actes que nous jugerons les progrès accomplis », a continué Mme Gueguen. Elle a souhaité que l’accord conclu soit effectivement mis en œuvre sur le terrain car les Sud-Soudanais et la communauté internationale ne veulent pas d’une paix de papier. « Nous serons donc vigilants sur le respect du cessez-le-feu et vigilants sur la protection des civils qui au cœur du mandat de la MINUSS et des préoccupations du Conseil. »
« Nous serons également extrêmement vigilants sur l’accès humanitaire et sur la protection des personnels humanitaires. » Le défi humanitaire est immense, a-t-elle dit en citant le rapport du Secrétaire général: 1,8 million de personnes déplacées; 2,5 millions de personnes réfugiées dans les pays voisins; 60% de la population en situation d’insécurité alimentaire sévère; et 2,4 millions d’enfants privés d’école. Mais, a poursuivi la représentante, la France reste mobilisée aux côtés de ses partenaires internationaux et régionaux pour accompagner le Soudan du Sud sur le chemin de la paix.
Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) s’est félicitée de l’évolution positive du processus de paix au Soudan du Sud tout en soulignant qu’un optimisme prudent reste de mise. Elle a noté que l’impact de l’accord doit encore se faire ressentir sur le terrain, et s’est aussi inquiétée de la gravité de la situation humanitaire dans le pays ainsi que des souffrances qu’endure la population civile. Le moment est venu pour les dirigeants du Soudan du Sud de régler leurs différends et de faire de leur peuple la priorité, a-t-elle exhorté. La représentante a ensuite insisté sur l’importance de la participation des femmes aux processus politiques dans le pays, en soulignant leur rôle en matière de renforcement des efforts de paix. La déléguée a en outre appelé à faire traduire en justice les auteurs des attaques dont la MINUSS a été la cible.
M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a salué la finalisation de l’accord de paix revitalisé le 12 septembre dernier, lequel accord est un bon exemple de cette approche pertinente consistant à apporter « des solutions africaines à des défis africains ». Pour instaurer une paix durable au Soudan du Sud, le Conseil de sécurité doit demeurer uni dans son appui à l’IGAD, à l’Union africaine et aux parties sud-soudanaises, en vue de les aider à une bonne mise en œuvre de l’accord précité, a-t-il dit. Le délégué a par ailleurs exhorté les parties sud-soudanaises à faire montre d’une volonté politique véritable dans cette mise en œuvre, à cesser toute violence et à se conformer au droit international humanitaire. Enfin, il a condamné la récente attaque perpétrée contre la MINUSS à Yei.
M. BADER ABDULLAH N. M. ALMUNAYEKH (Koweït) a salué la signature de l’accord revitalisé et espéré que les groupes non signataires se joindront à l’effort. Il a pris note du rôle joué par l’IGAD et espéré que cette signature permettrait d’écrire une nouvelle page de l’histoire du pays. Le représentant s’est ensuite inquiété du sort de millions de Sud-Soudanais qui demeurent déplacés ou réfugiés, notant que la vaste majorité d’entre eux souffrent de grave insécurité alimentaire. Il a espéré que la signature de l’accord permette de créer des sites d’accueil pour les réfugiés. Le délégué a aussi dénoncé les attaques perpétrées contre les travailleurs humanitaires. Le représentant a ensuite salué la décision de justice rendue contre 10 membres des forces armées, avant de dénoncer l’attaque dont a été victime la MINUSS dans l’État d’Équatoria. Le Koweït s’est enfin préoccupé des violations du cessez-le-feu dans l’État de l’Équatoria-Central
M. FRANCISCO TENYA (Pérou) a salué l’accord revitalisé en félicitant l’IGAD et les gouvernements de la sous-région pour leurs bons offices. Il a en même temps rappelé les violations du cessez-le-feu et le fait que le Soudan du Sud soit le pays le plus violent pour les humanitaires. Il faut que les parties sud-soudanaises restent engagées à mettre en œuvre le nouvel accord de paix, a-t-il demandé. Il s’est dit inquiet du nombre élevé de victimes civiles à cause des conflits entre les communautés, s’alarmant aussi du nombre important de déplacements forcés et d’attaques contre les civils. Le représentant a apprécié à cet égard les initiatives de la MINUSS pour promouvoir la cohésion sociale, le dialogue et la réconciliation, ainsi que ses efforts pour protéger la population. Le Soudan du Sud doit développer ses capacités d’enquête pour pouvoir sanctionner les graves violations et abus de droits de l’homme, a-t-il ajouté. Il a enfin appelé le Conseil de sécurité à rester uni dans l’appui au processus de paix sud-soudanais.
M. DÉSIRÉ WULFRAN G. IPO (Côte d’Ivoire) a dit que les autorités du Soudan du Sud devaient s’engager en faveur d’une mise en œuvre intégrale et inclusive de l’accord revitalisé afin que les populations puissent jouir des dividendes de la paix et de la stabilité auxquelles elles aspirent depuis plus de cinq ans. Pour y parvenir, il apparaît indispensable que les autorités bénéficient de l’accompagnement technique et financier de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), de l’Union africaine, de l’ONU et des autres partenaires et instaurent un climat favorable à des échanges constructifs, condition sine qua non pour une mise en œuvre effective et efficiente de l’accord.
Sur le plan sécuritaire, la Côte d’Ivoire a noté avec une vive consternation la persistance des conflits intercommunautaires et des actes de criminalité dans le pays. Face à cette situation, le délégué a exhorté le Gouvernement à œuvrer davantage à la protection de la population civile. Il a aussi appelé les parties sud-soudanaises à mettre fin aux affrontements à travers le pays pour donner une chance de succès à la mise en œuvre efficace de l’accord de paix et à l’opérationnalisation des arrangements sécuritaires, conformément aux engagements auxquels elles ont librement souscrit.
Concernant la situation des droits de l’homme, M. Ipo s’est dit vivement préoccupé de la persistance des violences sexuelles, des violences à l’encontre des enfants ainsi que de la destruction des biens et des moyens de subsistance des populations. Il est donc impérieux, a-t-il dit, de veiller à la mise en œuvre du principe de reddition de comptes afin que les auteurs de violations des droits de l’homme répondent de leurs actes devant les juridictions internationales compétentes. S’agissant enfin de l’environnement opérationnel, la présence de la MINUSS au Soudan du Sud s’avère nécessaire pour la protection des populations sud-soudanaises et des travailleurs humanitaires, a recommandé la délégation ivoirienne. Le représentant a appelé en conclusion les autorités à veiller au strict respect de l’accord sur le statut des forces et à mettre fin à toutes les entraves à la mise en œuvre du mandat de la Mission.
M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a noté l’espoir soulevé par l’accord signé la semaine dernière, même si le chemin reste encore long pour une paix durable au Soudan du Sud. Il est désormais crucial de le mettre en œuvre, a-t-il dit, en exhortant les parties à traduire leurs engagements en actes. Il a exhorté le Conseil à tirer les leçons de la situation en Libye où la signature d’un accord politique n’a pas empêché une résurgence de la violence. Dans ce droit fil, il a déploré la poursuite des attaques contre des travailleurs humanitaires et a regretté les entraves apportées aux déplacements des soldats de la MINUSS. Les sanctions sont importantes et permettent d’accroître la pression sur les parties pour la bonne mise en œuvre de l’accord, a-t-il déclaré. « Le processus de paix est à la croisée des chemins ». En conclusion, le délégué a appelé à la mobilisation de tous les acteurs, en particulier régionaux, et des parties sud-soudanaises pour une paix durable dans le pays.
Pour M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède), l’accord de paix est seulement un premier pas. « Une volonté politique claire de toutes les parties est maintenant nécessaire pour le mettre en œuvre de manière inclusive et participer dans des activités de consolidation de la paix et de réconciliation », a-t-il dit. Le représentant s’est déclaré profondément préoccupé des informations au sujet d’opérations militaires. L’arrêt total des hostilités par toutes les parties, le Gouvernement et les groupes armés doit être sans conditions, a-t-il affirmé. Il doit y avoir des conséquences pour les violations de l’accord de cessation des hostilités, a-t-il poursuivi, avant d’encourager la région à maintenir sa participation et à continuer de jouer un rôle positif en surveillant la mise en œuvre de l’accord et en tenant les parties pour responsables de leurs actes.
Le représentant a ensuite remercié Mme John de son témoignage qui montre non seulement que ceux qui portent le fardeau du conflit sont les civils, en particulier les femmes et les filles. Il souligne également l’importance d’assurer la transparence et l’inclusion dans la construction des fondamentaux de la paix. Celle-ci ne sera viable que si elle inclut toutes les parties prenantes. Dans ce contexte, a ajouté la Suède, nous devons continuer d’assurer la participation effective des jeunes, des femmes et de la société civile. Les mécanismes de responsabilité et de justice transitionnelle sont tout aussi importants, dont la création du tribunal mixte sans délai, a-t-elle encore plaidé. L’impunité pour les violations et les abus du droit international humanitaire ne peut être acceptée. La Suède, a indiqué son représentant, est vivement préoccupée de la situation humanitaire provoquée directement par le conflit. La livraison rapide, sûre et sans entrave de l’aide humanitaire doit être assurée à travers tout le Soudan du Sud, a-t-il ajouté.
M. WU HAITAO (Chine) a relevé que le processus de paix au Soudan du Sud a sensiblement avancé, grâce à la signature de l’accord revitalisé et à la souplesse affichée par les différentes parties concernées. Il a noté que la situation demeure toutefois précaire, appelant à inciter les différentes parties à mettre en œuvre les accords de paix et à respecter les cessez-le-feu déjà conclus. Le représentant a aussi appelé la communauté internationale à continuer d’appuyer les missions de bons offices des organisations régionales pertinentes et à accorder dans ce contexte un rôle de premier plan à l’IGAD. Partisan d’un renforcement de l’aide socioéconomique apportée au pays, il s’est dit préoccupé de constater que seule la moitié du plan d’aide humanitaire pour le Soudan du Sud a été financée jusqu’à présent. Soucieux de privilégier des « solutions africaines aux problèmes africains », le délégué a assuré que son gouvernement ne ménagerait aucun effort pour appuyer le rétablissement d’une paix pérenne au Soudan du Sud.
M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a salué la signature de l’accord de paix du 12 septembre, même si la situation au Soudan du Sud, en particulier humanitaire, demeure grave. Le délégué a exhorté les parties sud-soudanaises à faire montre d’une ferme volonté politique en vue de la bonne mise en œuvre de l’accord, qui est la phase la plus difficile de ce processus de paix. Il a ensuite rappelé que six millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire et que quatre millions de personnes sont déplacées, avant de se dire vivement préoccupé par les violences sexuelles qui continuent d’être perpétrées au Soudan du Sud. Dans ce droit fil et en conclusion, le délégué bolivien s’est félicité de la condamnation de 10 soldats sud-soudanais coupables du meurtre et du viol de travailleurs humanitaires.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a estimé que le gage de la stabilité au Soudan du Sud est l’établissement d’un cessez-le-feu durable et le lancement d’un processus de réconciliation nationale. Il a salué la signature de l’accord revitalisé et a appelé à ne pas douter de la percée que cela représente. Ce qui importe, c’est la volonté manifestée par les parties de faire preuve de compromis, a-t-il souligné. Il a aussi salué les efforts persistants de l’IGAD « alors que beaucoup, ici même dans cette salle, perdaient espoir ». Le représentant y a vu un exemple édifiant d’une solution africaine apportée à un problème africain.
Le délégué a ensuite pris note des appels lancés en faveur de l’élargissement des régimes de sanctions et a averti que toute action dans ce sens risque de durcir les positions des parties et de produire un résultat contraire à celui escompté. Cela compliquerait, à son avis, toute résolution pacifique du conflit. Il a rejeté toute tentative de politiser le régime de sanctions.
M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a salué la signature de l’accord de paix du 12 septembre. Le délégué s’est néanmoins dit préoccupé par la poursuite de la violence au Soudan du Sud et a rappelé la nécessité de respecter le droit international humanitaire, les travailleurs humanitaires étant exposés à de graves menaces dans l’exécution de leur mission. Le délégué a estimé que l’accord précité ouvre un nouvel horizon, celui d’une paix durable, pour autant qu’il soit pleinement mis en œuvre. La signature de cet accord ne signifie pas la fin du travail de l’ONU et des acteurs régionaux, a-t-il déclaré. La MINUSS devra notamment apporter un « appui adapté ». Enfin, il s’est félicité de la condamnation à la perpétuité de 10 soldats sud-soudanais en raison des « faits très graves » qu’ils avaient commis.
M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a estimé que « les vents de la paix et de l’espoir » soufflaient sur la région. « Le peuple du Soudan du Sud est enthousiaste à l’idée que les dirigeants du Gouvernement et de l’opposition aient signé l’accord revitalisé pour résoudre le conflit au Soudan du Sud (R-ARCISS) ». De plus, la déclaration du Président Salva Kiir en date du 15 septembre dans laquelle il s’engage à ce que son gouvernement mette en œuvre l’accord en toute bonne foi et lance un plaidoyer en faveur du pardon et de la réconciliation au peuple sud-soudanais est un appel à l’unité, et ce, « après des années de guerre et de divisions insensées », a noté le représentant. Nous savons, a-t-il dit, que cet accord est difficile et compliqué, et que la communauté internationale a émis des préoccupations à son sujet. Toutefois, il est important que ces préoccupations ne le remettent pas en cause, a souhaité M. Malwal, en appelant la communauté internationale à le soutenir.