La Sixième Commission termine les travaux de fond de sa soixante-treizième session en adoptant sans vote 14 projets de texte
Au terme de sa soixante-treizième session, entamée le 3 octobre dernier, la Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a adopté ce matin, sans vote, 13 projets de résolution et un projet de décision*. Elle a approuvé le programme de travail provisoire de sa prochaine session, qui devrait se tenir du 7 octobre au 20 novembre 2019.
Après six semaines de débats, et comme il est de coutume, la Commission, présidée par M. Michel Xavier Biang, du Gabon, recommande à l’Assemblée générale de prendre note du rapport de la Commission du droit international (CDI) à sa soixante-dixième session. Elle lui transmet aussi une série de textes portant sur des questions aussi complexes et variées que le renforcement et la promotion du régime conventionnel international; l’état des protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés; la protection des personnes en cas de catastrophe; ou encore les mesures visant à éliminer le terrorisme international.
Trois projets de résolution ont été préparés cette année au titre du rapport de la CDI. Par le premier, l’Assemblée générale noterait que la CDI a achevé l’examen en seconde lecture des projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités; l’examen en seconde lecture des projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier; l’examen en première lecture des projets de directives sur la protection de l’atmosphère; et l’examen en première lecture du projet de guide sur l’application provisoire des traités. Une déclaration sur les incidences de ce texte sur le budget-programme a été publiée dans un document séparé. Les deux autres projets de résolution présentent en annexe le texte des conclusions sur le rôle des accords et de la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, d’une part, et sur la détermination du droit international coutumier, d’autre part.
Aux termes d’un nouveau projet de résolution intitulé « Renforcement et promotion du régime conventionnel international », l’Assemblée rappellerait l’Article 102 de la Charte des Nations Unies, réaffirmait qu’il importe d’enregistrer et de publier les traités et de les rendre accessibles, et soulignerait que ce règlement doit être « utile et adapté aux États Membres » et qu’il convient de le tenir à jour pour aider ceux-ci à s’acquitter des obligations qui en découlent. En particulier, l’Assemblée apporterait au règlement les modifications précisées dans l’annexe de la résolution, étant entendu que le règlement s’appliquera dans sa version modifiée à compter du 1er février 2019.
Par le projet de résolution biennale sur les protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949, l’Assemblée affirmerait notamment « la nécessité de progresser dans l’application effective du droit international humanitaire ». Le Soudan s’est dissocié des paragraphes de son préambule qui mentionnent le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), au motif qu’il n’existe pas de lien direct entre la CPI et la résolution. Ce projet de résolution ne fait pas la distinction entre les États parties et non parties au Statut de Rome établissant la CPI, a renchéri le représentant des États-Unis, qui s’est toutefois félicité de l’introduction de libellés supplémentaires concernant l’aide humanitaire.
En vertu d’un autre projet de résolution biennale sur la protection des personnes en cas de catastrophe, l’Assemblée porterait à l’attention des États la recommandation de la Commission du droit international d’élaborer une convention sur la base du projet d’articles sur cette question.
Une fois de plus, la Commission a adopté un projet de résolution sur les mesures visant à éliminer le terrorisme international, par lequel l’Assemblée lui recommanderait de créer, à sa prochaine session, un groupe de travail chargé d’achever l’élaboration du projet de convention générale sur le terrorisme international.
Jugeant « discriminatoire » l’approche des États-Unis à l’égard de certaines délégations, la Fédération de Russie et la Syrie ont tenu à se dissocier du consensus de la Commission sur un paragraphe du projet de résolution consacré au rapport du Comité des relations avec le pays hôte, selon lequel l’Assemblée compterait « que les problèmes signalés aux réunions du Comité seront réglés dans un esprit de coopération et conformément à l’Accord de Siège ».
Parmi les autres textes adoptés par la Commission figurent la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies; l’examen de mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires; l’état de droit aux niveaux national et international; la portée et l’application du principe de compétence universelle; le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.
S’agissant de l’administration de la justice à l’ONU, la Commission a autorisé son Président à faire suivre à la Présidente de l’Assemblée générale une lettre par laquelle il attire l’attention sur certaines questions relatives aux aspects juridiques de rapports soumis au titre de ce point.
En fin de séance, la Commission a adopté, au titre de la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale, et sous forme de projet de décision, le programme de travail provisoire de sa soixante-quatorzième session. Suite aux interventions d’Israël et de l’Inde sur la tenue de réunions officielles lors de jours fériés flottants, notamment Yom Kippour, Diwali et Gurpurab, le Président a déclaré que le projet de programme de travail avait été élaboré sur un « principe d’égalité » entre les trois jours fériés flottants prévus au cours de cette période.
« Nous avons pu préserver l’esprit de consensus qui a toujours régné dans cette Commission », s’est félicité M. Biang avant de clore les travaux de la Commission. « Au-delà de nos intérêts respectifs, nous avons su garder allumée la flamme d’une communauté juridique internationale au service des Nations Unies et des peuples du monde. »
*A/C.6/73/L.15, A/C.6/73/L.25, A/C.6/73/L.22, A/C.6/73/L.29, A/C.6/73/L.23, A/C.6/73/L.24, A/C.6/73/L.21, A/C.6/73/L.20, A/C.6/73/L.19, A/C.6/73/L.16, A/C.6/73/L.26, A/C.6/73/L.28, A/C.6/73/L.17, A/C.6/73/L.18 et A/C.6/73/L.27
EXPLICATIONS DE POSITION SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION
Projet de résolution A/C.6/73/L.21 intitulé « État des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés »
Le représentant du Togo a indiqué que son pays a signé et ratifié les Conventions de Genève et appelé à leur universalisation. Il a appuyé le projet de résolution sur l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés, avant de noter que certains amendements ont été rejetés. Le Togo adhérera au consensus en vue de l’adoption de ce texte, a-t-il dit. Il a néanmoins indiqué que ce consensus doit prendre en compte les « positions renouvelées » de toutes les délégations.
Le représentant du Soudan s’est dissocié du texte des paragraphes 27 et 28 du préambule du projet de résolution au motif qu’il n’existe pas de lien direct entre la Cour pénale internationale (CPI) et la résolution. Il a dénoncé « les tentatives de politisation de la justice internationale », qui ne sont pas dignes des efforts de la communauté internationale visant à promouvoir le droit international, constituent une violation des règles établies du droit international et exacerbent les tensions. Il a réaffirmé son « rejet très ferme de la Cour et de ses principes », qui ciblent les dirigeants africains et menacent la paix et la stabilité des pays, notamment africains. Il s’est insurgé contre les tentatives répétées de faire de l’Assemblée générale une enceinte dédiée à l’universalisation de la compétence de la Cour.
Le représentant des États-Unis s’est félicité des libellés supplémentaires sur l’aide humanitaire contenus dans le projet de résolution. Il a toutefois déploré que la résolution ne fasse pas la distinction entre les États parties et les États non parties au Statut de Rome établissant la CPI. Il a réitéré la position de son pays selon laquelle la CPI ne peut être saisie d’une affaire qu’en cas de transfert par le Conseil de sécurité et avec l’accord des États. Il a rappelé son opposition à l’enquête ouverte, il y a un an, par le Procureur de la CPI, sur des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité qui auraient été commis en Afghanistan depuis le 1er mai 2003 en lien avec le conflit armé qui s’y déroule.
Projet de résolution A/C.6/73/L.19 intitulé « L’état de droit aux niveaux national et international »
Le représentant de la République arabe syrienne s’est dissocié du consensus s’agissant du paragraphe 3 du projet de résolution relatif à l’état de droit aux niveaux national et international par lequel l’Assemblée générale prendrait acte du rapport annuel du Secrétaire général sur le renforcement et la coordination de l’action des Nations Unies dans le domaine de l’état de droit. Il a dénoncé la référence faite dans ce rapport au Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d’aider à juger les personnes qui en sont responsables. Ce Mécanisme est « illégitime, scandaleux, et constitue une violation des méthodes de travail de l’ONU », a-t-il déclaré. Enfin, le représentant syrien a de nouveau exhorté le Secrétariat à cesser de faire référence, dans ses rapports, à ce Mécanisme.
Projet de résolution A/C.6/73/L.18 intitulé « Rapport du Comité des relations avec le pays hôte »
Le représentant de la Fédération de Russie a émis des réserves sur le paragraphe 12 du projet de résolution relatif au rapport du Comité des relations avec le pays hôte, par lequel l’Assemblée générale se féliciterait des efforts qu’a faits le pays hôte et compterait que les problèmes signalés aux réunions du Comité seront réglés dans un esprit de coopération et conformément au droit international, notamment à l’Accord de Siège. Si le représentant a reconnu les efforts des États-Unis, notamment pour ce qui est des questions de sécurité, il a toutefois reproché aux autorités américaines de faire fi de leurs engagements en vertu de l’Accord de Siège et de leurs obligations en tant que pays hôte. Il a dénoncé l’approche « discriminatoire » du pays hôte à l’égard de certaines délégations, notamment en ce qui concerne l’accès à certains locaux, l’octroi de visas et les restrictions de mouvement. Il s’agit là d’un comportement « illégal », a insisté le représentant, en se dissociant du consensus sur le paragraphe susmentionné.
Le représentant de la Syrie a dénoncé les décisions restrictives imposées par la capitale américaine à certaines missions permanentes des Nations Unies situées à New York. Exprimant, à son tour, des réserves sur le paragraphe 12 du projet de résolution, il s’est dissocié du consensus de la Commission.