En cours au Siège de l'ONU

Soixante-treizième session,
20e séance – matin
AG/J/3579

Les délégations entament l’examen du rapport annuel de la Commission du droit international, sans ménager leurs critiques

Les délégations ont entamé ce matin, devant la Sixième Commission (questions juridiques), l’examen des premiers chapitres thématiques du rapport* de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa soixante-dixième session, en ne ménageant pas leurs critiques à l’endroit de celle-ci.  La Commission a en effet été, tour à tour, appelée « à rénover ses méthodes », à mieux « servir les États » ou encore à sortir de « l’ambiguïté juridique ».  Traditionnellement, ce débat coïncide avec le début de la semaine du droit international. 

En début de séance, le Président de la Commission du droit international, M. Eduardo Valencia-Ospina, venu présenter ce rapport de plus de 300 pages, a vanté « la tradition d’interaction et de collaboration » entre la CDI et la Sixième Commission dans le développement progressif du droit international et sa codification, une coopération que la déléguée de Singapour a, elle, qualifié de « symbiotique ».

Faisant le point sur un premier groupe de chapitres du rapport de la Commission sur les travaux de sa soixante-dixième session, le Président s’est félicité de l’adoption de deux ensembles de projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.

Les 13 projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités représentent « le point culminant de 10 ans de travaux », a-t-il dit.  M. Valencia-Ospina a précisé que ces projets visent à faciliter le travail de ceux qui sont amenés à interpréter les traités, en particulier les États, les organisations internationales et les tribunaux.

Les 16 projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier cherchent, quant à eux, à apporter une aide pratique dans la détermination de ce droit.  Enfin, le Président a déclaré que la Commission a décidé d’inscrire les sujets « Principes généraux du droit », ainsi que « La compétence pénale universelle » et « L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international » à son programme de travail de long terme.  Cette décision ne veut pas dire que ces deux derniers sujets font d’ores et déjà partie du programme actif de la Commission, a précisé M. Valencia-Ospina.  « Une décision sera prise plus avant lorsque les États auront l’occasion de commenter la pertinence d’inclure ces sujets dans le programme de travail de la Commission », a conclu le Président.

Avant d’entrer dans les détails de ce rapport, certaines délégations ont émis des critiques sur le travail et le fonctionnement de la Commission.  Le délégué de la Gambie, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Afrique, aurait ainsi souhaité un rapport « plus informatif et clair » et a demandé des méthodes de travail rénovées, tandis que son homologue des Bahamas, a invité la Commission, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), à éviter de « restreindre » la pertinence des sujets à l’étude.

« La CDI devrait se pencher sur les inquiétudes les plus pressantes de la communauté internationale, par exemple la compétence des États dans le cyberespace », a indiqué le délégué de la Pologne, appuyé par son homologue du Japon.  Ce dernier a suggéré plus de transparence dans la sélection des sujets, alors que la représentante de Singapour a demandé des éclaircissements sur les modalités selon lesquelles un sujet inscrit au programme de travail de long terme « passe » à son programme actuel.

Même son de cloche du côté de la délégation de la France qui a indiqué que la nature même des travaux de la CDI peut soulever des interrogations.  « Le risque est que la Commission produise dans certains cas des projets empreints d’une dimension idéologique ou symbolique sans rapport avec les besoins de la pratique internationale. »  Le délégué français a également indiqué que « prendre simplement note des travaux de la Sixième Commission dans une résolution de l’Assemblée générale peut conduire à un statut juridiquement ambigu des projets de la Commission ». 

La délégation de la Chine a, quant à elle, tenu à rappeler que la Commission doit avant tout « servir les États » et prôné la prudence en ce qui concerne l’adoption de nouvelles normes, notamment sur des sujets « sensibles ».  La Commission a tout de même reçu des satisfecit de la part des délégations, celle de Singapour louant la « rigueur » et la « méticulosité » des travaux de la Commission ayant abouti aux projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier.

« Bravo à la CDI », a également lancé le délégué chinois pour l’adoption des deux ensembles de projets de conclusion, salués pour leur valeur pratique.  « Une certaine flexibilité s’impose néanmoins dans l’utilisation des projets de conclusion qui ne constituent pas des articles appelant une application stricte », a nuancé le délégué de la France.  Le représentant de l’Union européenne s’est, lui, félicité que la spécificité du droit de l’Union, « ordre juridique autonome », ait été reconnue.

Enfin, commentant l’inscription des deux nouveaux sujets au programme de travail de long terme, le représentant chinois a estimé que le moment n’est pas opportun pour la Commission de discuter de la compétence pénale universelle, compte tenu des divergences entre États et des incertitudes de ce concept.  Les délégués du Danemark, au nom des pays nordiques, et du Pérou, se sont, eux, félicités de cette inscription.

Les délégations ont, en revanche, été unanimes à saluer l’inscription de la question de l’élévation de la mer au regard du droit international, comme proposé par la Micronésie.  Ce point, particulièrement important pour les petits États insulaires du Pacifique, comme l’a rappelé la représentante des Îles Marshall, aura des conséquences directes sur le tiers des États Membres des Nations Unies et affectera indirectement l’ensemble des pays, a expliqué son homologue des Bahamas, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).

La Sixième Commission poursuivra son examen du rapport annuel de la Commission du droit international mardi 23 octobre, à partir de 10 heures.

*A/73/10

 

RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE -DIXIÈME SESSION

Déclarations

M. EDUARDO VALENCIA-OSPINA, Président de la Commission du droit international, a présenté le premier groupe de chapitres du rapport de la Commission sur les travaux de sa soixante-dixième session à l’étude.  « La Commission chérit la tradition d’interaction et de collaboration entre la Commission du droit international (CDI) et la Sixième Commission dans le développement progressif du droit international et sa codification », a déclaré le Président.

Pointant les progrès substantiels accomplis durant cette session, le Président a indiqué que la Commission a adopté, en seconde lecture, deux ensembles de projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.  Elle a poursuivi sa considération des quatre autres sujets suivants: normes impératives du droit international général (jus cogens); protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés; succession d’États en matière de responsabilité de l’État; et immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État.

La Commission a par ailleurs décidé d’inscrire le sujet « principes généraux du droit » à son programme de travail.  Les sujets suivants: a) compétence pénale universelle et b) l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ont été inscrits à son programme de travail à long terme.  Le Président a précisé que cette décision ne veut pas dire que ces sujets font d’ores et déjà partie du programme actif de la Commission.  « Une décision sera prise plus avant lorsque les États auront l’occasion de commenter la pertinence d’inclure ces sujets dans le programme de travail de la Commission. »

Commentant le Chapitre IV du Rapport, M. Valencia-Ospina a indiqué que l’ensemble de 13 projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités représente « le point culminant de 10 ans de travaux ».  Ces projets ont pour visée de faciliter le travail de ceux qui sont amenés à interpréter les traités, en particulier les États, les organisations internationales et les tribunaux.

Enfin, abordant la détermination du droit international coutumier, thème du Chapitre V, le Président s’est félicité de l’adoption des 16 projets de conclusion, assortis de commentaires, qui ne sont pas éloignés des textes provisoirement adoptés en première lecture.  Ces projets visent à apporter une aide pratique dans la détermination du droit international coutumier, a-t-il conclu.

Mme CARLA ESPERANZA RIVERA SÁNCHEZ (El Salvador), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a réitéré l’importance des travaux de la Commission du droit international (CDI) dans le développement progressif et la codification de l’ordre juridique international.  Au cours des 70 années écoulées, a-t-elle rappelé, la CDI a produit un certain nombre d’instruments sur plusieurs thèmes du droit international, depuis la rédaction initiale des principes de Nuremberg à l’élaboration actuelle de projets d’articles sur les crimes contre l’humanité et autres questions dans le cadre général du droit international.

La représentante salvadorienne s’est en outre réjouie que la CDI ait tenu sa soixante-dixième session à New York et à Genève, la partie qui s’est déroulée à New York ayant été un exercice positif dans le renforcement de l’interaction avec la Sixième Commission et la CDI.  Elle a encouragé à poursuivre cette expérience.  Elle a également pris note des projets de conclusion adoptés en deuxième lecture par la CDI sur les thèmes « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités » et « Détermination du droit international coutumier ».

Mme Rivera a ensuite pris note du texte des projets de directives sur la protection de l’atmosphère et du texte du projet de Guide de l’application à titre provisoire des traités, adoptés par la Commission en première lecture.  Elle a aussi pris note des questions spécifiques identifiées dans le rapport qui requièrent des informations des gouvernements pour être en mesure d’approfondir l’analyse sur la législation nationale, les décisions judiciaires, les traités ou la correspondance diplomatique. 

M. AMADOU JAITEH (Gambie), au nom du Groupe des États d’Afrique, a loué la bonne qualité du rapport, tout en souhaitant que ce rapport soit plus simple et informatif sans être indument rallongé.  Il a salué la tenue de la soixante-dixième session de la Commission à New York et à Genève et émis le vœu que ses travaux fassent l’objet d’une attention accrue.  Il a noté l’inscription du sujet « principes généraux du droit » à son programme de travail, ainsi que l’achèvement des travaux de la Commission sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.

Le délégué a rappelé que la compétence pénale universelle et l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ont été inscrites à son programme de travail à long terme.  Il a souhaité que le sujet de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international, thème des plus importants, soit inscrit au programme de travail de la Commission.

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme SHEILA GWENETH CAREY (Bahamas) a appuyé l’inscription de la question de l’élévation de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la CDI, tel que proposé par la Micronésie.  Cette question aura des conséquences directes sur le tiers des États Membres des Nations Unies, et affectera indirectement l’ensemble des pays, a expliqué la représentante.  Elle a fait part de sa préoccupation devant la portée limitée du chapitre 6 du rapport de la CDI sur la protection de l’atmosphère, et encouragé la Commission à éviter de « restreindre » la pertinence des sujets à l’étude.  S’agissant de la compétence pénale universelle, la représentante a prévenu que l’application extraterritoriale de la compétence nationale d’un État est contraire au principe de compétence universelle au regard du droit international.

Mme Carey s’est félicitée de l’adoption de projets de conclusion relatifs aux normes impératives du droit international général (jus cogens), en ajoutant que les Conventions de Vienne sur le droit des traités de 1969 constituent un point de départ pertinent pour les discussions.  En outre, elle a invité la CDI à examiner la mise en œuvre des projets de principes relatifs à la protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés dans les conflits non internationaux.  De plus, la CARICOM considère, comme le Rapporteur spécial de la Commission, que la codification de la succession d’États en matière de responsabilité de l’État permettrait de combler les lacunes qui subsistent dans le droit international.  De même, l’immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État devrait faire l’objet d’une exploration approfondie, a-t-elle considéré.

Mme AMATLAIN ELIZABETH KABUA (Îles Marshall), au nom du Forum des îles du Pacifique, a salué la décision de la CDI d’inscrire l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international à son programme de travail à long terme, une question particulièrement importante pour les petits États insulaires du Pacifique, qui craignent notamment les catastrophes naturelles et la salinisation des terres.  Elle a attiré l’attention de la Commission sur les accords internationaux existants en matière de coopération internationale, de réduction des risques de catastrophe et des changements climatiques, tout en appelant à l’adoption de mesures d’urgence. 

Réunis à Nauru en septembre, les chefs d’État et de gouvernement de la région ont discuté de la délimitation des frontières maritimes.  Le Forum compte étudier la pratique des États en la matière et en informer la CDI, a expliqué la représentante.  Mme Kabua a demandé, en terminant, à la CDI d’ajouter ce thème à son programme de travail actuel.

M. LUCIO GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, a salué l’adoption de l’ensemble de 13 projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Il a noté que ces projets se fondent sur la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités et ne traitent pas de la pertinence des accords passés entre les États et les organisations internationales ou entre organisations internationales.  S’agissant du projet de conclusion 12 sur les actes constitutifs d’organisations internationales, le délégué a rappelé que les articles 31 et 32 de la Convention précitée s’appliquent à l’interprétation de tout traité qui est l’acte constitutif d’une organisation internationale sous réserve de toute règle pertinente de l’organisation.  « Comme nous l’avons dit en d’autres occasions, le droit de l’Union européenne constitue un ordre juridique autonome, ses traités constitutifs n’étant pas des traités internationaux ordinaires. »  À ce titre, il a apprécié l’inclusion de cette spécificité dans les commentaires des projets de conclusion.

Le délégué a évoqué le commentaire 13) sur ce projet de conclusion 12 qui indique qu’il est parfois difficile de savoir si les « États membres réunis au sein » de l’organe plénier d’une organisation internationale entendent agir en leur qualité de membres de cet organe.  Nous voulons clarifier le fait qu’il n’y a pas une telle incertitude au sein de l’ordre juridique de l’Union, a-t-il dit.

M. Gussetti s’est ensuite félicité de l’adoption des 16 projets de conclusion et commentaires y relatifs sur la détermination du droit international coutumier.  Il a salué le projet de conclusion 4, intitulé « Exigence d’une pratique » qui dispose que « dans certains cas, la pratique des organisations internationales contribue également à la formation, ou à l’expression, de règles de droit international coutumier ».  Il a également souligné l’apport de la Cour de justice de l’Union européenne à la formation du droit international coutumier, en mentionnant notamment l’arrêt « Conseil contre Front Polisario ».  Dans le même sens, le délégué a salué le commentaire 6) sur le projet de conclusion 4 sur la pratique des organisations internationales s’agissant de la conclusion des traités, « comme moyen pour ces organisations de contribuer à la formation, ou à l’expression, de règles de droit international coutumier ».

M. MICHAEL BRAAD (Danemark), au nom du Groupe des pays nordiques, s’est félicité des projets de conclusion adoptés par la CDI, qui comprennent une définition des accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.  Les pays nordiques ont exprimé leur accord avec le projet de conclusion 13 portant sur les prononcés d’organes conventionnels, ajoutant que le prononcé d’un expert ne peut contredire la pratique à moins qu’il n’ait été accepté par l’ensemble des parties. 

Le représentant a félicité la CDI pour l’adoption de projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier, complément utile aux travaux antérieurs de la Commission sur les sources de droit international, appelé à devenir un guide utile à l’intention des professionnels.  Il a également salué l’adoption du projet de conclusion sur les organisations internationales, notamment le commentaire relatif aux résolutions de l’Assemblée générale. 

M. Braad a félicité la CDI sur les célébrations entourant son soixante-dixième anniversaire, estimant qu’elles ont permis des échanges fructueux.  Enfin, il a salué l’inclusion de la compétence pénale universelle et de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international dans son programme de travail à long terme.

M. HELMUT TICHY (Autriche) a salué les travaux du Rapporteur spécial sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, qui s’inscrivent dans le cadre de la Convention de Vienne sur le droit des traités.  En ce qui concerne le paragraphe 1 du projet de conclusion 5 qui a été amendé afin d’y inclure les fonctions judiciaires, le représentant a dit que son pays aurait souhaité que ce paragraphe contienne des informations sur les décisions des juridictions nationales, comme l’avait, du reste, suggéré le Rapporteur spécial.  Ce dernier avait en effet souligné que les décisions des juridictions nationales peuvent constituer une pratique des États pertinente pour l’interprétation d’un traité. 

S’agissant de la détermination du droit international coutumier, M. Tichy a noté que le projet de conclusion 3 fait encore la distinction entre les décisions des juridictions internationales et celles des juridictions nationales.  Rappelant que sa délégation s’est opposée en 2016 à une telle distinction de principe, il a relevé que l’Article 38 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ) n’établit pas de distinction.  Pour l’Autriche, les décisions des juridictions internationales ou nationales doivent être appréciées en tenant compte de leur force de persuasion et de la qualité de leur raisonnement les soutenant. 

En ce qui concerne la compétence pénale universelle, l’Autriche, qui a toujours estimé que la Commission devait pouvoir discuter de cette question, salue son inscription au programme de travail à long terme de la Sixième Commission.  Le délégué a toutefois suggéré de définir au préalable ce concept et d’en préciser la portée.  D’après lui, il faut faire clairement la distinction entre compétence pénale universelle et compétence des cours et tribunaux internationaux tels que la Cour pénale internationale (CPI); il faut aussi examiner séparément la question de l’immunité. 

M. XU HONG (Chine) a loué le travail remarquable abattu par la Commission.  Elle doit garder à l’esprit, s’agissant notamment de l’inscription de nouveaux sujets à son programme de travail, qu’elle doit avant tout servir les États, a-t-il dit.  Le délégué a appelé à la prudence en ce qui concerne l’adoption de nouvelles normes, notamment sur des sujets « sensibles ».  La Commission doit répondre aux besoins des États et viser au consensus.  Il a noté que la Commission a adopté, en seconde lecture, deux ensembles de projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.  « Bravo à la CDI », a-t-il lancé.

Le délégué a déclaré que la détermination du droit international coutumier est un sujet d’importance pour la Chine.  Cette détermination doit se faire de manière rigoureuse, en se basant sur la pratique prioritaire des États et en évitant « toute sélectivité », ainsi que « l’abaissement de ce seuil de détermination » en vue de satisfaire la volonté de certains États.  S’agissant des accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, il a estimé que seule une pratique exprimant une intention claire des États peut servir à l’interprétation des traités.

Quant à l’inscription de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail à long terme de la Commission, il a appelé la CDI à prendre pleinement en compte la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer pour garantir la sécurité juridique dans ce domaine.  En ce qui concerne la compétence pénale universelle, également inscrite au programme de travail à long terme, il a noté que ce concept fait l’objet de divergences entre États et d’incertitudes sur sa portée.  Le moment n’est pas venu pour la Commission de se saisir de ce point, a conclu le délégué de la Chine.

M. FRANCOIS ALABRUNE, Directeur des affaires juridiques au Ministère de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a remercié les rapporteurs spéciaux pour leurs travaux sur les « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités » et la « Détermination du droit international coutumier ».  Il a indiqué que le projet de conclusion sur le second thème pourra utilement servir à aider les praticiens, notamment les juges nationaux qui sont confrontés à la question du caractère coutumier d’une norme internationale.  Selon lui, « une certaine flexibilité s’impose néanmoins dans l’utilisation des projets de conclusion, qui ne constituent pas des articles appelant une application stricte ». 

M. Alabrune a ensuite présenté ses observations sur le travail de la CDI.  Il a relevé que les résultats limités obtenus par la Commission au cours de la période récente peuvent s’expliquer en partie par les défis que rencontre la relation entre la CDI et les États Membres des Nations Unies.  Il a par exemple noté que les États ont des moyens limités pour suivre et participer aux travaux de la Commission.  De plus, l’inscription d’un nouveau sujet consacré aux principes généraux du droit au programme de travail de la Commission allonge la liste déjà longue des sujets à l’étude.  Ensuite, la Commission a des moyens limités pour appréhender la diversité des pratiques, des cultures, des opinions des États. 

« Le plus grand risque de la Commission est de n’être inspiré que par une seule vision doctrinale, produit d’une seule culture juridique et véhiculée par une seule langue », a averti M. Alabrune.  Il faut donc faire des efforts pour permettre aux rapporteurs spéciaux de recevoir des informations utiles sur l’évolution des différents systèmes juridiques.  Au-delà du nombre, le choix des sujets peut également soulever des interrogations.  Pour le délégué, le succès des travaux de la CDI dépend en effet du choix de sujets présentant un intérêt concret pour les États, ne faisant pas l’objet de trop fortes oppositions entre eux et sur lesquels ils ressentent le besoin d’un accord international sur un domaine donné et soient disposés à le conclure. 

M. Alabrune a ajouté que le choix des sujets n’ayant plus pour ambition de servir de base à l’élaboration d’instruments internationaux soulève une interrogation sur la nature des travaux de la CDI.  « Le risque est que la Commission produise dans certains cas des projets empreints d’une dimension idéologique ou symbolique sans rapport avec les besoins de la pratique internationale. »  Il a aussi noté que la volonté de la Commission, et des rapporteurs spéciaux, de faire de ses travaux une base pour la conclusion d’une convention internationale implique de parvenir à un résultat suffisamment consensuel.  Et un dialogue avec la Sixième Commission et la prise en compte des attentes des États sont certainement le meilleur moyen d’y parvenir. 

Pour la France, « décider de prendre simplement note des travaux de la Sixième Commission dans une résolution de l’Assemblée générale peut conduire à un statut juridiquement ambigu des projets de la Commission ».  De plus, une telle situation n’est pas favorable à la sécurité juridique et à la prévisibilité des situations.  Il serait utile, a proposé son représentant, que les projets de la CDI fassent l’objet d’une publication des Nations Unies accompagnée d’une synthèse des réactions des États Membres en Sixième Commission.

M. ANDREA TIRITICCO (Italie) a dit approuver la proposition de soumettre à l’Assemblée générale, pour qu’elle en prenne note, le projet de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et les commentaires y afférant.  Sa délégation regrette cependant la décision de la Commission de ne pas inclure la nouvelle proposition du Rapporteur spécial concernant les déclarations des experts des organes de traités.  L’Italie pense que ces organes, en particulier ceux relatifs aux droits de l’homme, jouent un rôle majeur dans l’interprétation des traités.

Abordant le sujet de la détermination du droit international coutumier, il a vu dans le projet de conclusion un outil très utile.  L’Italie est d’avis qu’une marge de manœuvre doit être reconnue et laissée à l’interprétation, dans le contexte de la multiplicité de la pratique des États en ce sens.  Elle soutient donc la recommandation de la Commission visant à ce que l’Assemblée générale se limite à prendre note de ce projet de conclusion.

M ANGEL HORNA (Pérou) a insisté sur l’importance du travail de la CDI pour la diffusion de l’état de droit aux niveaux national et international afin de favoriser la réalisation du Programme 2030.  Il a jugé pertinents le projet de conclusion adopté par le CDI sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités, estimant qu’il devrait faire l’objet d’une résolution de l’Assemblée générale, tout comme les projets de conclusion portant sur la détermination du droit international coutumier. 

L’organisation, cette année, d’une session de la CDI à New York a permis une participation plus large des États aux travaux de la Commission, a poursuivi le représentant, tout en renforçant la cohésion de la CDI avec la Sixième Commission.  Il s’est félicité de l’inscription du sujet « Principes généraux du droit » au programme de travail de la CDI; et des sujets « Compétence pénale universelle » et « élévation du niveau de la mer au regard du droit international », un phénomène grave qui menace de nombreux États, à son programme de travail à long terme.

Dans le cadre de la détermination du droit international coutumier, Mme ALINA JULIA ARGÜELLO GONZÁLEZ (Nicaragua) a fait valoir que le vocabulaire utilisé pour décrire les organisations internationales pourrait être affiné afin de mieux refléter leur rôle et leurs différences.  Elle a toutefois noté à cet effet que les commentaires n’ont pas le même statut juridique que les conclusions présentées dans le rapport.  La représentante a invité la CDI à poursuivre son examen de l’inaction en tant que pratique des États.  S’agissant du projet de conclusion 15 intitulé « Objecteur persistant », elle a indiqué que cette pratique n’est pas acceptée de manière générale par les États ni par les organismes scientifiques s’intéressant au droit international. 

En ce qui concerne l’ajout de la compétence pénale universelle au programme de travail de la CDI, elle a appelé à la prudence.  Elle a toutefois considéré que le sujet de l’élévation du niveau de la mer est devenu d’une importance « vitale » pour les États.

Mme DAPHNE HONG (Singapour) a loué la « relation symbiotique » qui existe entre la CDI et l’Assemblée générale, par le biais de la Sixième Commission.  La déléguée s’est félicitée de l’adoption de deux ensembles de projets de conclusion, assortis de commentaires, sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et sur la détermination du droit international coutumier.

Elle a insisté sur la valeur pratique des projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités. La déléguée a ensuite loué la « rigueur » et la « méticulosité » des travaux de la Commission ayant abouti aux projets de conclusion sur la détermination du droit international coutumier.  La Commission a par ailleurs décidé d’inscrire le sujet « Principes généraux du droit » à son programme de travail, a-t-elle salué.

La déléguée a rappelé qu’il faut du temps pour examiner les différents sujets, qui peuvent être « disparates ».  Enfin, elle a demandé des éclaircissements sur la capacité des États à proposer de nouveaux sujets et sur les modalités selon lesquelles un sujet inscrit au programme de travail à long terme « passe » à son programme actuel.

M. PIOTR RYCHLIK (Pologne) s’est félicité des travaux de la CDI sur des questions aussi diverses que le droit des traités, le droit pénal international, la fragmentation du droit international et les sources particulières du droit international.  En tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, assurer le respect du droit international est l’une des priorités de la Pologne.  Le représentant a salué l’adoption de 16 projets de conclusion et commentaires sur la détermination du droit international coutumier et de 13 projets de conclusion sur l’interprétation des traités, ajoutant que ces textes peuvent jouer un rôle utile pour les tribunaux. 

Le représentant a réitéré la suggestion de son pays d’examiner le devoir de non reconnaissance lorsqu’un État a enfreint une obligation découlant du droit international général.  À son avis, « la CDI ne devrait pas se limiter aux sujets traditionnels mais aussi se pencher sur les inquiétudes les plus pressantes de la communauté internationale, par exemple la compétence des États dans le cyberespace ».  M. Rychlik s’est dit favorable à l’inscription de la question de l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international au programme de travail de la Commission. 

M. YUSUKE NAKAYAMA (Japon) a indiqué que la CDI a un rôle unique à jouer, malgré les propos de certaines délégations qui insistent sur l’importance d’autres enceintes.  La Commission doit veiller à la cohérence de l’ordre en dissipant les incertitudes, a-t-il dit.  Son choix de sujets doit refléter néanmoins les préoccupations internationales, c’est pourquoi les États doivent guider la Commission, a poursuivi le délégué.  Il a suggéré plus de transparence dans la sélection des sujets, avant de se féliciter que l’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ait été inscrit à son programme de travail de long terme.  « Cela est de nature à satisfaire les besoins des États. »

M. Nakayama a plaidé pour une interprétation des projets de conclusion sur les accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités à la lumière de « l’importance fondamentale » desdits traités.  Il s’est félicité de l’équilibre auquel est parvenu le projet de conclusion 13 sur les prononcés d’organes conventionnels d’experts.  Les projets de conclusion, assortis de commentaires, sur la détermination du droit international coutumier, apporteront une aide pratique dans la détermination du droit international coutumier, a-t-il assuré.  Certaines questions sur l’objecteur persistant n’ont néanmoins pas été réglées, a regretté en conclusion le délégué.

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