Bosnie-Herzégovine: le Conseil de sécurité autorise la reconduction pour un an de l’opération EUFOR ALTHEA et demande l’accélération des réformes
Le Conseil de sécurité a, ce matin, autorisé les États Membres « à créer pour une nouvelle période de 12 mois » la force multinationale de stabilisation de l’Union européenne, EUFOR ALTHEA, reconduisant ainsi le mandat d’une opération qui joue, depuis 2004, « le rôle principal dans la stabilisation de la paix s’agissant des aspects militaires de l’Accord de paix » en Bosnie-Herzégovine.
Par la résolution 2384 (2017), adoptée à l’unanimité de ses 15 membres, le Conseil exhorte en outre les parties à l’Accord de paix à accélérer la mise en œuvre de réformes globales, « au bénéfice de tous les citoyens » et conformément à la perspective européenne en faveur de laquelle le pays s’est engagé. À cet égard, elles sont invitées à « s’abstenir de toute politique, toute action ou tout discours qui polarise ».
Ces mots ont été repris à son compte par le Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, M. Valentin Inzko, qui a regretté qu’à l’approche des élections générales de 2018, de nombreux dirigeants politiques bosniens aient déjà commencé à se focaliser sur la « rhétorique préélectorale », parfois en allant jusqu’à admettre que les prochaines élections seraient « trop proches » pour entreprendre les réformes attendues.
Dénonçant l’absence de compromis de part et d’autre, M. Inzko a notamment blâmé les responsables de la Republika Srpska, une des trois entités de la Bosnie-Herzégovine, qui continuent de faire fi des arrêts de la Cour de Bosnie-Herzégovine et de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine concernant « l’enregistrement des biens pouvant servir à la défense ».
Parallèlement, note le rapport du Haut-Représentant au Secrétaire général, « les parties de la Fédération ne manifestent aucune volonté de parvenir à un accord politique sur la promulgation des amendements à la loi électorale de Bosnie-Herzégovine […], ce qui entrave potentiellement la mise en œuvre des élections générales de 2018 et continue de laisser la ville de Mostar privée de tout système permettant de tenir les élections locales ».
Mettant en avant ses réussites sur le plan économique, le représentant de la Bosnie-Herzégovine a assuré que son pays avait, au cours des six derniers mois, continué de mettre en œuvre le Programme de réforme de la Bosnie-Herzégovine pour 2015-2018 en vue de son intégration dans l’Union européenne (UE), tout en continuant de compiler les réponses au questionnaire soumis par la Commission européenne.
Il s’est félicité de pouvoir annoncer qu’en septembre 2017, son pays avait signé un traité instituant la communauté de transport avec l’Union européenne et cinq autres pays des Balkans occidentaux, lequel, a souligné le Haut-Représentant, « ouvre la porte à des avancées et des améliorations concernant les infrastructures dans le secteur des transports, et permet aux signataires d’harmoniser leurs lois en matière de transport avec l’UE ».
Si la représentante de l’Union européenne a souligné les progrès significatifs accomplis par la Bosnie-Herzégovine dans la mise en œuvre du Programme de réforme, elle l’a encouragée à transcrire les réformes en engagements concrets pour se placer sur la voie de l’intégration européenne. Ces réformes, a-t-elle ajouté, doivent viser à « progressivement relever les défis structurels » qui se posent au pays. Un appel auquel a fait écho la Croatie, pour qui la Bosnie-Herzégovine a besoin de « plus de réformes et de moins de déclarations incendiaires », de « moins de passé et plus d’avenir ».
Alors que le Japon a jugé inacceptables les actions des dirigeants de la Republika Srpska pour saper l’autorité du Haut-Représentant, la Fédération de Russie a considéré de son côté que le rapport présenté aujourd’hui était « le moins objectif » des 18 rapports soumis au Conseil depuis 2009, arguant qu’il se bornerait à une « série d’accusations » contre la Republika Srpska.
À lire ce document, les Serbes de Bosnie seraient responsables de tous les maux en Bosnie-Herzégovine, a déclaré le représentant russe, en affirmant que « l’auteur du rapport », qu’il a taxé de « serbophobie », aurait « perdu tout contact avec la réalité ». Le mandat du Haut-Représentant est « dépassé » et le Conseil devrait se pencher sur la fermeture de son bureau, a-t-il recommandé, qualifiant celui-ci de « protectorat ».
Le représentant de la Serbie a affirmé, quant à lui, que Belgrade s’efforçait de promouvoir la coopération et de renforcer la confiance mutuelle avec la Bosnie-Herzégovine et ses différentes entités, d’autant plus qu’un nombre significatif de Serbes vivent dans ce pays, en particulier en Republika Srpska. Il a encouragé la communauté internationale à ne pas faire la « sourde oreille » face aux voix discordantes qui risquent de compromettre les relations entre les différentes entités et qui pourraient avoir un impact négatif sur toute la région.
Le délégué de la Croatie a, pour sa part, dénoncé les visées sécessionnistes des dirigeants de la Republika Srpska, qui contrastent, selon lui, avec les efforts des Croates pour obtenir une « véritable égalité » avec les deux autres composantes du pays.
LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE
Lettre datée du 1er novembre 2017, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général (S/2017/922)
Texte du projet de résolution (S/2017/928)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant toutes ses résolutions antérieures relatives aux conflits dans l’ex‑Yougoslavie et les déclarations de son président sur la question, y compris ses résolutions 1031 (1995) du 15 décembre 1995, 1088 (1996) du 12 décembre 1996, 1423 (2002) du 12 juillet 2002, 1491 (2003) du 11 juillet 2003, 1551 (2004) du 9 juillet 2004, 1575 (2004) du 22 novembre 2004, 1639 (2005) du 21 novembre 2005, 1722 (2006) du 21 novembre 2006, 1764 (2007) du 29 juin 2007, 1785 (2007) du 21 novembre 2007, 1845 (2008) du 20 novembre 2008, 1869 (2009) du 25 mars 2009, 1895 (2009) du 18 novembre 2009, 1948 (2010) du 18 novembre 2010, 2019 (2011) du 16 novembre 2011, 2074 (2012) du 14 novembre 2012, 2123 (2013) du 12 novembre 2013, 2183 (2014) du 11 novembre 2014, 2247 (2015) du 10 novembre 2015 et 2315 (2016) du 8 novembre 2016,
Réaffirmant son attachement à un règlement politique des conflits dans l’ex‑Yougoslavie qui sauvegarderait la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les États à l’intérieur de leurs frontières internationalement reconnues,
Se déclarant résolu à appuyer l’application de l’Accord-cadre général pour la paix en Bosnie-Herzégovine et de ses annexes (appelés collectivement Accord de paix, S/1995/999, annexe) ainsi que des décisions correspondantes du Conseil de mise en œuvre de la paix,
Prenant note des rapports du Haut-Représentant, dont le plus récent date du 24 octobre 2017,
Notant avec satisfaction que la mise en œuvre initiale du programme de réforme, adopté par la Bosnie-Herzégovine en juillet 2015, a fourni les premières mesures d’ajustement structurel à l’économie du pays,
Encourageant les autorités de la Bosnie-Herzégovine à intensifier, avec l’aide de la communauté internationale, les efforts qu’elles accomplissent en vue d’éliminer les munitions excédentaires,
Rappelant tous les accords sur le statut des forces visés à l’appendice B de l’annexe 1-A de l’Accord de paix et rappelant aux parties l’obligation qui leur est faite de continuer d’en appliquer les dispositions,
Rappelant également les dispositions de sa résolution 1551 (2004) concernant l’application à titre provisoire des accords sur le statut des forces figurant à l’appendice B de l’annexe 1-A de l’Accord de paix,
Se félicitant du maintien de la présence de la force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA), qui centre avec succès son action sur le renforcement des capacités et la formation, tout en gardant les moyens nécessaires pour contribuer à la capacité de dissuasion des autorités de la Bosnie-Herzégovine si la situation l’exige,
Demandant une nouvelle fois aux autorités compétentes de la Bosnie-Herzégovine de prendre les mesures nécessaires pour mener à bien le programme « 5 plus 2 », qui demeure nécessaire pour la fermeture du Bureau du Haut-Représentant, comme l’a confirmé le Comité directeur du Conseil de mise en œuvre de la paix dans ses communiqués,
Réaffirmant les dispositions relatives au Haut-Représentant énoncées dans ses résolutions antérieures, et réaffirmant également l’article V de l’annexe 10 de l’Accord de paix en ce qui concerne le pouvoir du Haut-Représentant, sur le théâtre des opérations, d’interpréter en dernier ressort la mise en œuvre du volet civil (de l’Accord de paix),
Prenant note de l’engagement de la direction de la Bosnie-Herzégovine en faveur d’une perspective européenne, sur la base de l’Accord de paix, notamment grâce à la présentation de la demande d’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne en février 2016 et grâce au travail accompli pour répondre au questionnaire de l’Opinion de la Commission européenne par le biais du mécanisme de coordination sur les questions de l’UE,
Réitérant ses appels à tous les dirigeants politiques de la Bosnie-Herzégovine pour promouvoir la réconciliation et la compréhension mutuelle et à s’abstenir de polariser les politiques, les mesures et les discours,
Notant que le rythme de la mise en œuvre du programme de réforme s’est ralenti au cours des derniers mois et soulignant qu’il est urgent d’accélérer la mise en œuvre des réformes globales, de manière inclusive, au bénéfice de tous les citoyens,
Soulignant qu’il faut que la Bosnie-Herzégovine redouble d’efforts en ce qui concerne le fonctionnement et l’indépendance de la magistrature, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée ainsi que la lutte contre le terrorisme et la prévention de la radicalisation,
Soulignant qu’il est urgent de répondre aux recommandations laissées sans suite du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) visant à améliorer le cadre électoral ainsi qu’aux arrêts de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine et de la Cour européenne des droits de l’homme et soulignant que les réformes électorales devraient être abordées dans un esprit de consensus et de dialogue et faire avancer le pays vers des normes démocratiques modernes,
Encourageant les parties à mettre en œuvre le Plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité de la Bosnie-Herzégovine de manière inclusive et attendant avec intérêt sa poursuite,
Prenant note également de l’examen stratégique que l’Union européenne a prévu de mener à l’automne 2017,
Constatant que la situation est restée calme et stable sur le plan de la sécurité et notant que les autorités de la Bosnie-Herzégovine se sont jusqu’ici montrées capables de faire face aux menaces qui pèsent sur la sûreté et la sécurité,
Constatant que la situation dans la région continue de menacer la paix et la sécurité internationales,
Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
1. Souligne à nouveau que c’est à l’ensemble des autorités de la Bosnie-Herzégovine qu’il incombe au premier chef de continuer à assurer l’application efficace de l’Accord de paix, constate que la communauté internationale et les principaux donateurs sont toujours disposés à les y aider, et demande à l’ensemble des autorités de la Bosnie-Herzégovine de coopérer pleinement avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, ainsi qu’avec le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux, pour que le Tribunal puisse achever ses travaux et pour faire en sorte qu’il ferme le plus rapidement possible;
2. Se félicite de l’intention manifestée par l’Union européenne de poursuivre son opération militaire (EUFOR ALTHEA) en Bosnie-Herzégovine après novembre 2017;
3. Autorise les États Membres, agissant par l’intermédiaire de l’Union européenne ou en coopération avec elle, à créer pour une nouvelle période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution une force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA) succédant juridiquement à la SFOR avec une structure de commandement et de direction des opérations unifiée, qui remplira ses missions liées à la mise en œuvre des dispositions des annexes 1-A et 2 de l’Accord de paix en coopération avec le quartier général de l’OTAN sur place, conformément aux arrangements conclus entre l’OTAN et l’Union européenne, tels qu’ils ont été communiqués par ces deux institutions au Conseil de sécurité dans leurs lettres du 19 novembre 2004, par lesquelles elles conviennent que l’EUFOR ALTHEA jouera le rôle principal dans la stabilisation de la paix s’agissant des aspects militaires de l’Accord de paix;
4. Décide de renouveler l’autorisation qu’il a accordée au paragraphe 11 de sa résolution 2183 (2014) pour une période de douze mois à compter de la date d’adoption de la présente résolution;
5. Autorise les États Membres à prendre, en vertu des paragraphes 3 et 4 ci-dessus, toutes les mesures nécessaires pour faire appliquer et respecter les annexes 1-A et 2 de l’Accord de paix, souligne que les parties continueront d’être tenues responsables à égalité du respect des dispositions de ces annexes et qu’elles encourront à égalité les mesures coercitives que l’EUFOR ALTHEA et la présence de l’OTAN pourraient juger nécessaires pour assurer l’application des annexes en question et leur propre protection;
6. Autorise également les États Membres à prendre, à la demande de l’EUFOR ALTHEA ou du quartier général de l’OTAN, toute mesure nécessaire pour défendre l’EUFOR ALTHEA ou la présence de l’OTAN et pour aider ces deux institutions à remplir leurs missions, et reconnaît à l’EUFOR ALTHEA comme à la présence de l’OTAN le droit de prendre toute mesure de protection nécessaire en cas d’attaque ou de menace;
7. Autorise en outre les États Membres, agissant en vertu des paragraphes 3 et 4 ci-dessus et conformément à l’annexe 1-A de l’Accord de paix, à prendre toute mesure nécessaire afin de faire respecter les règles et procédures organisant la maîtrise de l’espace aérien de la Bosnie-Herzégovine pour l’aviation civile et militaire;
8. Exhorte les parties à accélérer la mise en œuvre de réformes globales, de manière inclusive, au bénéfice de tous les citoyens et conformément à la perspective européenne en faveur de laquelle le pays s’est engagé, et, à cet égard, les invite à s’abstenir de toute politique, toute action ou tout discours qui polarise;
9. Demande instamment aux parties, conformément à l’Accord de paix, de respecter leur engagement de coopérer pleinement avec toutes les institutions participant à la mise en œuvre des mesures de paix établies, tel que prévu dans l’Accord de paix, y compris l’annexe 4;
10. Réaffirme que selon l’Accord de paix, la Bosnie-Herzégovine se compose de deux entités, dont l’existence est reconnue juridiquement par sa Constitution, et réaffirme également que toute modification de la Constitution doit être effectuée conformément à la procédure qui y est prévue;
11. Décide de rester saisi de la question.
Déclarations
M. VALENTIN INZKO, Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine, a déclaré que le pays avait fait des progrès remarquables depuis son entrée à l’ONU il y a 25 ans, avec notamment la mise en place des institutions de l’État et de la Constitution, telles que prévues par l’annexe 4 de l’Accord-cadre général pour la paix en Bosnie-Herzégovine. Les trois armées qui s’étaient autrefois livrées à la guerre, se sont unifiées en une seule, tandis qu’un système fiscal « moderne et efficace » a été établi. Le Haut-Représentant a en outre fait remarquer que le pays se trouvait aujourd’hui à un moment crucial de son histoire, dans la mesure où tous les dirigeants « de toutes affiliations ethniques » aspirent à rejoindre l’Union européenne (UE) et s’efforcent de remplir les exigences nécessaires pour cela. « Toutefois, en dépit de ces avancées prometteuses, la Bosnie-Herzégovine a toujours besoin de l’attention de la communauté internationale, a-t-il noté. Alors que les progrès sur les plans économique et social se sont ralentis ces 10 dernières années, un nationalisme clivant et des défis persistants à la mise en œuvre de l’Accord de paix et des arrangements institutionnels prévus par l’Accord risquent de ramener le pays en arrière.
Ainsi, a noté le Haut-Représentant, au cours des six derniers mois, la plupart des acteurs politiques ont maintenu leurs positions extrêmes sur les problèmes qui se posent au pays, sans chercher à faire les compromis nécessaires pour mener des réformes. Certes, le pays a pris des mesures pour mettre en œuvre le Programme de réforme de la Bosnie-Herzégovine pour 2015-2018 et a signé en septembre un Traité de transport avec l’UE et cinq autres pays des Balkans, qui ouvrira la voie au développement d’infrastructures. Mais à l’approche des élections générales, a regretté le Haut-Représentant, de nombreux dirigeants politiques ont déjà commencé à se focaliser sur la rhétorique préélectorale, parfois en allant jusqu’à admettre que les prochaines élections sont trop proches pour entreprendre un véritable travail. Pour reprendre la formule des ministres des affaires étrangères de l’UE, « une rhétorique clivante enracinée dans le passé et un ordre du jour électoral ont ralenti le rythme des réformes et perturbé le climat politique ». À ce climat, s’ajoute le risque d’une crise politique plus grave, en raison d’un désaccord sur les règles gouvernant l’élection indirecte de délégués à l’une des chambres du Parlement de la Fédération, a prévenu M. Inzko.
Il a aussi relevé les actions de responsables de la Republika Srpska qui défient l’autorité des institutions étatiques, y compris les décisions des tribunaux. Ainsi, le Président de la Republika Srpska a lancé un appel aux juges serbes pour qu’ils se retirent des institutions judiciaires étatiques et a été très clair quant au fait que les institutions de l’entité ne mettraient pas en œuvre les décisions de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine. Par ailleurs, en octobre, l’Assemblée nationale de la Republika Srpska a adopté une résolution sur la protection de l’ordre constitutionnel et la façon d’assurer la neutralité militaire de la Republika Srpska. Dans ce texte, elle affirme la neutralité de l’entité vis-à-vis de l’intégration à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et cherche à redéfinir la position et les obligations de l’entité en vertu de l’Accord-cadre et, en particulier, de la Constitution, telles qu’énoncées dans son annexe 4. « En réponse, j’ai indiqué clairement que l’Accord-cadre, y compris la Constitution, prévalait sur toute loi adoptée par l’Assemblée nationale de la Republika Srpska et que la politique étrangère relevait de la responsabilité exclusive des institutions de l’État », a précisé le Haut-Représentant aux membres du Conseil.
De plus, l’incapacité persistante des autorités à mettre en œuvre les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire « Sejdić et Finci » et les affaires connexes témoignent également d’un « mépris général pour l’état de droit », a dénoncé le haut fonctionnaire. « En conséquence, dans le cadre du système actuel, certains groupes ont été victimes de discrimination pendant plus de 20 ans en ce qui concerne leur droit d’exercer des fonctions politiques », a-t-il dit.
Dans sa conclusion, M. Inzko a tenu à souligner un aspect positif. À la suite de manifestations d’étudiants, de parents d’élèves et d’enseignants bosniaques et croates en juin, les autorités du canton de Bosnie centrale ont renoncé au projet de créer, dans la municipalité de Jajce, un établissement d’enseignement secondaire dans lequel les élèves –qui jusqu’à présent étaient regroupés dans les mêmes classes– auraient suivi des cours distincts en fonction de leur programme d’enseignement national, c’est-à-dire de leur appartenance ethnique. Les manifestants de Jajce ont réclamé que tous les établissements abritant « deux écoles en une », dont il existe encore plus d’une cinquantaine sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, soient fermés dans tout le pays. Cela démontre pour le Haut-Représentant qu’il existe une volonté résolue parmi les citoyens du pays pour parvenir à une intégration institutionnelle et pour que les normes européennes soient appliquées dans la sphère publique.
Trois défis continuent de se poser selon le Haut-Représentant: mettre en œuvre les prochaines mesures préalables à l’intégration euro-atlantique; veiller au bon déroulement des élections de 2018; et respecter l’état de droit, notamment en appliquant les décisions de justice.
Mme ANNE GUEGUEN (France) a souligné que l’adoption à l’unanimité l’année dernière de la résolution 2315 (2016) avait permis de souligner que l’ensemble des membres du Conseil de sécurité partagent les mêmes principes cardinaux à l’égard de ce pays. Elle a cité à cet égard la nécessité impérieuse de respecter les principes et les institutions mises en place par les accords de Dayton-Paris, le respect des aspirations de l’ensemble des composantes du pays en faveur d’une perspective européenne, ainsi que le soutien à la présence de l’opération européenne EUFOR ALTHEA, dotée d’un mandat exécutif.
Cette unité du Conseil rappelle que la communauté internationale s’accorde à soutenir l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine -qui ne saurait être remise en cause par l’une de ses entités- ainsi qu’à respecter les choix de ce pays, pourvu qu’ils s’inscrivent dans le respect du droit international et du cadre fixé par les accords de paix, a-t-elle précisé. « La France appelle toutes les forces politiques bosniennes à respecter les institutions centrales de la Bosnie-Herzégovine et à s’abstenir de toute initiative, telle que des projets de référendums, susceptibles de fragiliser ces institutions. » « La construction d’un État de droit est un préalable indispensable à un débat politique serein », a estimé la représentante.
La représentante a appelé tous les acteurs à « abandonner les rhétoriques surannées de division et les jeux politiques », souhaitant plutôt la mise en œuvre des réformes économiques et sociales et un dialogue sérieux entre partis politiques, faute de quoi le cadre juridique des élections risque d’être « lacunaire ». Se félicitant que la perspective européenne constitue aujourd’hui le principal moteur de développement et de consolidation du pays, Mme Gueguen a assuré que l’Union européenne (UE) continuerait plus que jamais à accompagner les autorités du pays dans la mise en œuvre des réformes socio-économiques, tandis que l’opération militaire EUFOR ALTHEA continuerait son action en s’adaptant au mieux à l’évolution de la situation sécuritaire, le but étant de permettre aux forces de sécurité bosniennes d’opérer de manière autonome. Cette opération fera l’objet dans les prochaines semaines d’une revue stratégique menée par l’UE afin d’orienter son action pour les années à venir.
M. CARL SKAU (Suède) a mis l’accent sur la perspective de l’intégration européenne de la Bosnie-Herzégovine, une aspiration, a-t-il rappelé, qui a été soutenue par le Président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker, lorsqu’il a déclaré, en septembre dernier, que l’intégration des pays des Balkans occidentaux dans l’UE restait une priorité de premier ordre pour l’Union. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire, a noté le représentant qui a encouragé la mise en œuvre de l’agenda de réformes en Bosnie-Herzégovine, constatant avec préoccupation la lenteur des progrès dans ce domaine cette année. Il a souhaité que les autorités bosniennes relancent ce processus en donnant la priorité aux réformes socioéconomiques, à la lutte contre la corruption et le crime organisé, ainsi qu’à la réforme électorale. Les élections de l’année prochaine ne sauraient servir de prétexte pour repousser des décisions essentielles, de l’avis du représentant qui a prôné un esprit de dialogue et de consensus pour guider la réforme électorale. Il a également appelé à la mise en œuvre des jugements pertinents de la Cour constitutionnelle pour éviter un vide juridique au lendemain des élections.
La Suède encourage en outre tout effort en vue de la réconciliation en Bosnie-Herzégovine, soulignant au passage que l’impunité menace la stabilité et la cohésion sociale du pays et rend la réconciliation plus difficile. Avant de conclure, le représentant a salué l’adoption unanime de la résolution qui renouvelle le mandat de la force EUFOR ALTHEA en Bosnie-Herzégovine. La Suède reconnaît néanmoins la nécessité de mener des discussions sur la reconfiguration de la présence internationale en Bosnie-Herzégovine et reste favorable à l’idée d’un retrait progressif dès que la situation sur le terrain le permet.
M. AMR ABDELATTIF ABOULATTA (Égypte) a souligné l’importance du mandat du Haut-Représentant pour la Bosnie-Herzégovine. La résolution adoptée aujourd’hui est un signal fort envoyé par la communauté internationale au peuple bosnien, a-t-il déclaré. Il s’est dit préoccupé par les discours haineux qui sèment la division en Bosnie-Herzégovine et a appelé les dirigeants bosniens à placer l’intérêt du pays au-dessus de toute autre considération. Il a appelé le Haut-Représentant à intensifier les efforts de paix, avant d’exprimer l’appui de l’Égypte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. M. Aboulatta a ensuite salué les évolutions positives récentes, notamment l’amélioration des relations avec les pays voisins. En conclusion, le délégué a invité le peuple bosnien à faire son possible pour parvenir à un consensus politique lui permettant d’aller de l’avant sur la voie de la paix, avant d’exhorter la communauté internationale à continuer d’appuyer le pays.
M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni) a regretté de constater que les promesses faites en 2016 en Bosnie-Herzégovine ne se sont pas concrétisées, confirmant une tendance négative à 10 mois des élections. Il a ainsi regretté que la deuxième tranche de financement au titre du mécanisme élargi de crédit du Fonds monétaire international (FMI) n’ait pas été versée, du fait que les autorités de Bosnie-Herzégovine ont manqué de prendre plusieurs mesures au niveau de l’État et de la Fédération. Le représentant a ensuite appelé toutes les parties à cesser de regarder en arrière et à bâtir ensemble un avenir commun. Considérant que l’état de droit dépend du bon fonctionnement du système judiciaire, il a appelé tous les dirigeants à s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de porter atteinte à celui-ci. Le délégué britannique a par ailleurs estimé qu’il était temps de trouver une solution pour sortir de l’impasse concernant Mostar, dont les citoyens sont privés de tout système permettant de tenir les élections locales.
M. YASUHISA KAWAMURA (Japon) a soutenu les efforts du Gouvernement de la Bosnie-Herzégovine pour accéder à l’Union européenne (UE) et à l’OTAN. Il a salué les progrès réalisés en matière de coopération régionale tels que la signature d’un traité sur les transports communautaires. Le représentant a cependant déploré les efforts insuffisants du Gouvernement pour mener les réformes économiques. Il a émis l’espoir de voir s’accomplir des progrès avec des lois visant à répondre au chômage des jeunes, ainsi que des mesures permettant de créer un environnement de relance des investissements étrangers. Pour M. Kawamura, les élections d’octobre prochain et la campagne d’ici là devraient fournir l’occasion de solidifier l’unité de la nation dans ses différentes composantes ethniques.
Le représentant a réitéré sa profonde déception concernant les nombreuses divisions ethniques en Bosnie-Herzégovine. À cet égard, il a craint que les mesures de l’Assemblée nationale de la Republika Srpska aient un impact négatif sur la souveraineté et l’intégrité du territoire de la Bosnie-Herzégovine. Il a aussi estimé que les actions des dirigeants de la Republika Srpska pour saper l’autorité du Haut-Représentant non seulement étaient politiquement inacceptables, mais constituaient aussi des violations de l’Accord de Dayton. « La communauté internationale doit continuer à convaincre les dirigeants de la Republika Srpska qu’il est crucial, pour la paix et la prospérité des peuples, de contenir le nationalisme et le séparatisme. » Depuis la fin du conflit, le Japon a fourni plus de 500 millions de dollars pour soutenir la Bosnie-Herzégovine, a ensuite déclaré le représentant en précisant que cet argent avait permis de financer les récents efforts de déminage, de développement de l’agriculture, de dépollution et de développement de l’éducation physique parmi tous les groupes ethniques.
M. WU HAITAO (Chine) a appelé la communauté internationale à entendre les points de vue de tous les acteurs bosniens. Il a appuyé la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine, avant d’appeler le Haut-Représentant à jouer un rôle constructif pour favoriser la mise en œuvre de l’Accord de paix. En conclusion, le représentant de la Chine a appelé les forces de l’Union européenne à travailler en étroite collaboration avec les autorités bosniennes.
Mme MAHLET HAILU GUADEY (Éthiopie) a réaffirmé son appui à la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. Elle s’est dite préoccupée par la rhétorique incendiaire constatée en Bosnie-Herzégovine, ainsi que par les tentatives visant à porter atteinte au système judiciaire et à l’ordre constitutionnel bosniens. Les décisions de la Cour constitutionnelle doivent être respectées, a affirmé la déléguée de l’Éthiopie. Elle a en outre appuyé le mandat du Haut-Représentant et appelé les parties à en faire de même. Le Haut-Représentant a en effet besoin de ce soutien pour s’acquitter de son mandat, a-t-elle observé. Enfin, la représentante a souligné l’importance du rôle de la force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA).
Après s’être félicité de l’adoption à l’unanimité de la résolution, M. GORGUI CISS (Sénégal) a estimé qu’en dépit de la persistance de quelques écueils en Bosnie-Herzégovine, des progrès avaient été accomplis sur les plans politique et économique au cours de la période considérée. Il a cependant affirmé que l’Accord de Dayton était fragilisé par la détermination de l’Assemblée nationale de la Republika Srpska à organiser un référendum sur l’appareil judiciaire de Bosnie-Herzégovine et l’autorité du Haut-Représentant. Le représentant a ensuite salué les progrès accomplis sur le plan économique, qui gagneraient cependant à être consolidés pour garantir le bien-être de la population. Aussi a-t-il engagé les trois communautés du pays à cultiver le « vivre ensemble », invitant les parties prenantes à coopérer avec le Haut-Représentant. La présence dans le pays d’une force militaire multinationale et d’un bureau doté du pouvoir exécutif est de nature à rassurer la population, a estimé la délégation, en encourageant la communauté internationale à maintenir son soutien à la Bosnie-Herzégovine pour l’aider à rester dans une dynamique positive.
M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a indiqué qu’il s’agissait, à son avis, du rapport le moins objectif du Haut-Représentant sur les 18 présentés depuis 2009. Ce rapport est une série d’accusations contre la Republika Srpska, a-t-il affirmé. Selon le Haut-Représentant, les Serbes de Bosnie seraient responsables de tous les maux en Bosnie-Herzégovine, a-t-il accusé. « L’auteur du rapport a perdu tout contact avec la réalité. » Le délégué a dénoncé la « serbophobie » du Haut-Représentant, avant de lui rappeler qu’il est le représentant de la communauté internationale, et pas de certaines parties. Le Haut-Représentant doit s’abstenir d’agir selon des « haines personnelles », a-t-il ajouté.
Le représentant russe a qualifié la situation en Bosnie-Herzégovine de crise politique, dont la source est l’absence d’un dialogue sur un pied d’égalité entre les trois peuples de la Bosnie-Herzégovine. Il a mis en garde contre toute ingérence dans les affaires intérieures du pays et rappelé l’importance d’un traitement égal des trois composantes bosniennes. Le délégué a rejeté les accusations du Haut-Représentant selon lesquelles la Republika Srpska saperait la mise en œuvre de l’Accord de Dayton. Il a ensuite recommandé au Conseil de lire le rapport alternatif soumis par les autorités de la Republika Srpska, avant de demander qu’un sujet aussi sensible que le rapprochement de la Bosnie-Herzégovine avec l’OTAN soit pleinement discuté. Le mandat du Haut-Représentant est dépassé et le Conseil devrait se pencher sur la fermeture de son bureau, a-t-il dit, qualifiant celui-ci de « protectorat ». Il a en outre rappelé que la Cour constitutionnelle bosnienne comptait en son sein trois juges internationaux, « ce qui constitue une atteinte à la souveraineté du pays » selon lui. Enfin, le délégué russe a souligné les liens étroits entre son pays et la Bosnie-Herzégovine.
M. PEDRO LUIS INCHAUSTE JORDÁN (Bolivie) a émis l’espoir que la force multinationale de stabilisation (EUFOR ALTHEA) continuerait sa coopération avec les parties prenantes en Bosnie-Herzégovine. Après avoir pris note des progrès accomplis au cours des derniers mois, notamment la signature en septembre par la Bosnie-Herzégovine d’un traité instituant une communauté de transport avec l’Union européenne et cinq autres pays des Balkans occidentaux, il a condamné les discours incendiaires tenus par certains dirigeants politiques. Il a lancé un appel à ces derniers pour qu’ils agissent dans le meilleur intérêt du peuple bosnien.
M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a appelé la communauté internationale à appuyer la consolidation de la paix en Bosnie-Herzégovine. Il a réitéré son appui à la souveraineté et à l’intégrité territoriale du pays. Les acteurs politiques bosniens doivent s’engager dans un dialogue constructif, a souhaité le délégué. Dans le droit fil du rapport, M. Bermúdez a souligné les progrès limités accomplis en vue de la fermeture du Bureau du Haut-Représentant. Néanmoins, et en conclusion, le délégué de l’Uruguay a insisté sur les avancées accomplies dans la mise en œuvre des réformes économiques dans le pays.
M. KANAT TUMYSH (Kazakhstan) a relevé que de nombreux progrès ont été accomplis dans la mise en place d’institutions et de procédures démocratiques en Bosnie-Herzégovine, et en termes de confiance dans un système judiciaire impartial. L’attention doit être portée sur l’économie, qui est essentielle pour faire venir des investisseurs étrangers et pour créer des emplois, a-t-il estimé. Il est également important, à son avis, d’élaborer des stratégies dans les secteurs de l’énergie, l’agriculture et l’emploi. Le représentant a salué la signature entre la Bosnie-Herzégovine, l’Union européenne et cinq autres États des Balkans du traité instituant une communauté de transports, avant de souligner que la mise en œuvre des réformes socioéconomiques dépend du climat politique et des garanties de paix et de stabilité. La souveraineté et l’intégrité du territoire de la Bosnie-Herzégovine ne devraient jamais être menacées, a-t-il lancé.
Alors que le pays se prépare pour les élections d’octobre 2018, le représentant a appelé les dirigeants des deux entités à mettre en œuvre les accords de paix et à respecter les dispositions et procédures qui sont parties intégrantes de cet accord, y compris les règles de la Cour constitutionnelle. Des efforts doivent être faits pour la transformation des biens liés à la défense en structures étatiques et civiles, a-t-il ajouté avant de plaider en faveur de l’engagement de la société civile dans le mouvement qui tend à l’harmonie sociale et à la confiance.
M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a dit attendre avec impatience le jour où la Bosnie-Herzégovine deviendra un membre à part entière de l’Union européenne. Il s’est félicité que l’idée de tenir un référendum sur le statut de la Republika Srpska ait été repoussée. Il a réitéré l’appui de son pays à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine et dénié à ses entités le droit de faire sécession. L’année prochaine sera une année de défis pour la Bosnie-Herzégovine, a-t-il dit, en mentionnant la tenue des élections générales de 2018. Le délégué a ajouté qu’un autre défi était le rejet de l’autorité de la Cour de Bosnie-Herzégovine et du Bureau du Procureur de Bosnie-Herzégovine en Republika Srpska, ainsi que les tentatives de la Cour de prendre des décisions en matière de politique étrangère. Si ces défis ne sont pas réglés, avec la participation de toutes les parties, alors les avancées politiques depuis l’Accord de Dayton seront menacées, a-t-il déclaré. Enfin, M. Yelchenko a appelé le Conseil de sécurité à fournir un plein soutien politique à la Bosnie-Herzégovine.
Mme AMY NOEL TACHCO (États-Unis) s’est félicitée du renouvellement des mandats du Haut-Représentant et de l’EUFOR ALTHEA, « dont nous saluons les efforts ». Il faut maintenant que les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine honorent les engagements qui ont été pris, notamment pour l’enregistrement des biens militaires du pays comme biens de l’État, a-t-elle souhaité. Elle a appelé le Gouvernement à mener ses réformes « maintenant », « avant les élections », et à respecter les différentes décisions de justice, notamment celles de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire « Sejdić et Finci » et les affaires connexes. La déléguée d’est dite préoccupée par les mesures visant à saper l’autorité du Haut-Représentant. Elle a déclaré qu’elle attendait avec impatience le jour où la Bosnie-Herzégovine aurait pleinement mis en œuvre l’Accord de paix et deviendrait un État intégré dans l’Union européenne. Jusque-là, la communauté internationale doit se montrer à la hauteur de ses responsabilités et continuer de lui apporter son soutien, a conclu la représentante.
M. SEBASTIANO CARDI (Italie) a appuyé le rapprochement de la Bosnie-Herzégovine et de l’Union européenne. Il a déploré le ralentissement du rythme des réformes nationales, ainsi que le prononcé de discours politiques incendiaires dans le pays. Ces réformes sont cruciales pour le rapprochement avec l’Union européenne et l’amélioration des conditions de vie de tous les Bosniens, a-t-il dit. M. Cardi a ensuite appelé à la bonne tenue des élections de 2018 et demandé le plein respect des décisions de la Cour constitutionnelle bosnienne. Le délégué a souligné la nécessité de renforcer la confiance au sein de la population bosnienne, avant d’exhorter les pays des Balkans à renforcer la coopération entre eux. Avant de conclure, M. Cardi a redit l’appui de l’Italie à l’unité et à la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine. « Nous sommes prêts à discuter d’une reconfiguration de la présence internationale Bosnie-Herzégovine », a-t-il indiqué.
M. MILOŠ VUKAŠINOVIĆ (Bosnie-Herzégovine) a assuré que son pays avait, au cours de la période considérée, continué de mettre en œuvre les réformes socioéconomiques nécessaires à son intégration dans l’Union européenne (UE), telles que prévues dans le Programme de réforme de la Bosnie-Herzégovine pour 2015-2018, et continué de compiler les réponses au questionnaire de la Commission européenne. Il s’est félicité de pouvoir annoncer qu’en septembre 2017, son pays avait signé un traité instituant la communauté de transport avec l’Union européenne et cinq autres pays des Balkans occidentaux. Par ailleurs, a ajouté M. Vukašinović, nous avons redoublé d’efforts pour renforcer l’état de droit dans plusieurs domaines d’importance.
Au cours des derniers mois, la Bosnie-Herzégovine a continué de remplir ses obligations internationales en matière de lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent et le phénomène des combattants terroristes étrangers. Ainsi, les institutions judiciaires et sécuritaires ont mis en œuvre la Stratégie de prévention et de lutte contre le terrorisme, laquelle prévoit des programmes de déradicalisation mis en œuvre par les communautés religieuses, les institutions éducatives, les organisations de la société civile et les médias, a précisé le délégué.
Au cours de la période considérée, la Bosnie-Herzégovine a également fait des progrès dans la lutte contre la criminalité organisée, la corruption et le blanchiment d’argent, avec l’appui de l’UE auprès de l’Agence nationale pour la prévention de la corruption. Le pays, a poursuivi le représentant, a continué de mettre en œuvre sa Stratégie dans le domaine des migrations et du droit d’asile et son Plan d’action pour la période 2016-2020, qui est conforme aux normes européennes et internationales les plus élevées. En ce qui concerne les crimes de guerre jugés par des juridictions nationales, la délégation a réitéré que la lutte contre l’impunité au niveau local est vitale pour son pays. Dans ce contexte, la mise en œuvre de la Stratégie nationale relative aux crimes de guerre, « indépendamment de l’affiliation religieuse ou de la nationalité des victimes », est essentielle pour la réconciliation et la stabilité durable. M. Vukašinović a ajouté en conclusion que l’économie de la Bosnie-Herzégovine avait connu une solide croissance, avec un taux de 2,7% entre janvier 2016 et janvier 2017, et un taux d’inflation de 0,2%.
Mme JOANNE ADAMSON, de l’Union européenne, a rappelé que 2016 avait été une année importante, le Conseil de l’Union européenne ayant décidé de demander l’opinion de la Commission suite à la demande d’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union et au vu des décisions politiques difficiles prises par ce pays en vue de son adhésion. Elle a souligné notamment les progrès significatifs accomplis dans la mise en œuvre du Programme de réforme. « Avec nos partenaires internationaux, y compris les institutions financières, nous avons fourni des indications claires sur les réformes nécessaires dont le but est de progressivement relever les défis structurels », a-t-elle déclaré.
La représentante a cependant condamné la rhétorique de division exprimée à l’occasion des élections à venir, qui trouve ses racines dans le passé, craignant qu’elle ralentisse le processus de paix et affecte négativement le climat politique. Elle a encouragé les autorités de Bosnie-Herzégovine, à tous les niveaux de gouvernance, y compris les entités, à transcrire en engagements concrets les réformes qui permettront au pays de se mettre sur la voie de l’intégration européenne. À un an des élections, l’Union européenne exhorte donc les autorités à mette en œuvre les réformes globales, de façon inclusive, pour le bénéfice de tous les citoyens. De même, les autorités politiques doivent se refréner de saper les insistions judiciaires de Bosnie-Herzégovine, a-t-elle ajouté avant de réitérer son appel pour que, à tous les niveaux de gouvernement, la Bosnie-Herzégovine s’assure de l’effectivité des mécanismes de coordination. À cet égard, l’Union européenne a souligné qu’aucune loi ne devrait être adoptée qui puisse rendre plus difficile la mise en œuvre de l’arrêt Sejdić-Finci.
L’Union européenne a réitéré son soutien sans équivoque au respect de l’intégrité du territoire de la Bosnie-Herzégovine en tant que pays uni et souverain. L’Union continuera d’utiliser tous les instruments à sa disposition pour soutenir la stabilité en Bosnie-Herzégovine, a affirmé la représentante, qui a salué la présence de l’opération ALTHEA. Elle a d’ailleurs mentionné la préparation opérationnelle de l’UE pour pouvoir continuer à assurer son rôle militaire dans cette opération, afin de soutenir les autorités de Bosnie-Herzégovine. Enfin, la représentante a mis en garde que l’immigration significative qui continue à affecter le pays risquait de saper son futur. Elle a aussi tenu à rappeler que les citoyens demandent plus de changements dans leur vie quotidienne. La représentante a conclu son intervention en demandant instamment aux autorités de Bosnie-Herzégovine de promouvoir la réconciliation.
M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie) a réitéré l’appui de son pays à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. L’intégration de ce pays au sein de l’OTAN et de l’UE demeure notre objectif stratégique, a-t-il déclaré. « Une Bosnie-Herzégovine stable, pacifique et unie, pratiquant une véritable égalité institutionnelle de ses trois peuples constitutifs, est un élément générateur de stabilité. » Le délégué croate a indiqué que la Bosnie-Herzégovine avait besoin de « plus de réformes et de moins de déclarations incendiaires ». « Moins de passé et plus d’avenir. »
Le délégué a souligné l’urgence d’une amélioration du cadre électoral, afin de garantir le traitement égal des trois peuples constitutifs du pays: les Bosniaques, les Croates et les Serbes. C’est à ses yeux la condition préalable pour des progrès plus rapides en vue d’aboutir à un pays pleinement fonctionnel, davantage concentré sur son avenir que sur son passé.
Le délégué a dénoncé les visées sécessionnistes des dirigeants de la Republika Srpska. D’un autre côté, il est tout à fait faux de comparer ces visées avec les efforts des Croates qui tendent à une véritable égalité avec les deux autres composantes du pays, a-t-il affirmé. Le délégué s’est étonné que le Haut-Représentant ait choisi d’illustrer la section de son rapport consacrée à la « glorification des criminels de guerre » avec une situation particulière à Mostar. Enfin, M. Drobnjak a appuyé la mission EUFOR ALTHEA tout en déclarant que celle-ci ne pouvait durer indéfiniment.
M. MILAN MILANOVIĆ (Serbie) a salué la volonté marquée de l’Union européenne de poursuivre l’intégration européenne des pays des Balkans occidentaux, ce qui devrait se faire d’ici à 2025. La Serbie mènera les réformes nécessaires en ce sens et fera tout pour promouvoir la coopération bilatérale avec la Bosnie-Herzégovine, « qui est un partenaire naturel et essentiel dans ce processus », a-t-il affirmé. Pour la Serbie, l’Accord de Dayton reste la clef de voûte de la paix et la stabilité en Bosnie-Herzégovine ainsi que de la réconciliation. Son représentant a encouragé la communauté internationale à ne pas faire la sourde oreille face aux voix discordantes qui risquent de compromettre les relations entre les différentes entités en Bosnie-Herzégovine et qui pourraient avoir un effet négatif sur toute la région.
Appelant les gouvernements de la région à la vigilance, le représentant a estimé qu’il fallait créer les conditions nécessaires pour la réconciliation, faute de quoi les progrès ne profiteraient pas à tous. C’est là une autre raison pour la Serbie de promouvoir la coopération et de renforcer la confiance mutuelle avec la Bosnie-Herzégovine et ses différentes entités, d’autant plus qu’un nombre significatif de Serbes vivent dans ce pays, y compris dans la République Srpska.
M. Milanović a réaffirmé l’attachement de la Serbie à la souveraineté et à l’intégrité territoriales de la Bosnie-Herzégovine, avant d’encourager le dialogue pour répondre à toutes les questions en instance entre ses entités et ses peuples constitutifs. À ce titre, il a estimé que les questions relatives à la réforme électorale et à l’organisation du système judiciaire étaient des questions internes nécessitant un dialogue au sein même de la Bosnie-Herzégovine, et ce, pour trouver des solutions acceptables par tous. À défaut, sa délégation craint des actes unilatéraux et des messages négatifs. Le représentant a donc recommandé à toutes les parties de miser sur le renforcement de la confiance mutuelle et de la transparence pour permettre le bon déroulement des élections l’année prochaine en Bosnie-Herzégovine. Pour sa part, la Serbie s’investit dans le renforcement de sa coopération, notamment économique, avec la Bosnie-Herzégovine. Ces relations bilatérales sont le fruit de dialogues et réunions de haut niveau entre les deux pays dont les échanges commerciaux sont en hausse, a indiqué le représentant en faisant valoir que la Serbie était aussi l’un des plus grands investisseurs en Bosnie-Herzégovine.