Le Secrétaire général exhorte le Conseil de sécurité à faire preuve « d’ambition » dans son soutien à la Force conjointe du G5 Sahel
Parce que « le temps joue contre nous » au Sahel, le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, a exhorté, ce matin, le Conseil de sécurité à se montrer ambitieux et à doter la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (G5 Sahel) d’un soutien matériel et opérationnel « à la mesure des défis ». Si cet appel a été pleinement relayé par l’Union africaine et les cinq pays concernés, d’autres se sont montrés plus circonspects, la représentante des États-Unis exprimant ses « sérieuses réserves » face « à l’utilisation de ressources onusiennes ».
La Force conjointe a été créée par les États du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) en vue de lutter contre le terrorisme et les réseaux criminels transnationaux et pour ramener la paix et la sécurité dans la région. Son déploiement actuel sur le territoire des pays qui y participent, avec des effectifs en personnel militaire et personnel de police pouvant aller jusqu’à 5 000 personnes, a été salué par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2359 (2017).
Le Secrétaire général présentait, au cours de cette réunion présidée par le Ministre français de l’Europe et des affaires étrangères, M. Jean-Yves Le Drian, son rapport sur ladite Force conjointe, contenant les quatre options proposées pour définir le soutien que fournirait l’ONU. Les deux premières options prévoient un dispositif d’appui mandaté par le Conseil ou un dispositif d’« appui logistique souple » mandaté par le Conseil. Les deux dernières options seraient un appui de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) nécessitant une modification du mandat de cette dernière ou bien un appui de la Mission mais dans le cadre de son mandat actuel.
« Les Nations Unies pourraient mobiliser rapidement un soutien essentiel en complément de l’action des partenaires bilatéraux », a affirmé M. Guterres. Il a noté qu’un tel soutien non seulement renforcerait la Force conjointe du G5 Sahel mais contribuerait aussi à atténuer les menaces qui affectent la MINUSMA. « Tout comme la MINUSMA, la Force conjointe opérera en soutien au processus de paix malien », a poursuivi le Secrétaire général, en notant la profonde complémentarité des deux forces.
« Lors de ma dernière rencontre informelle avec le Conseil, j’ai eu l’occasion de vous transmettre mes opinions et préférences », a rappelé M. Guterres en assurant que, quelle que soit la décision, le Secrétariat ferait de son mieux pour appuyer le G5 Sahel dans le cadre défini par le Conseil. Il a loué les progrès remarquables accomplis par les pays du G5 Sahel, notamment pour l’élaboration du concept des opérations et la mise à disposition de moyens nationaux, tout en estimant que certains aspects devraient être précisés et consolidés.
Le Secrétaire général, qui a présenté des recommandations pour renforcer la direction politique de la Force conjointe et son insertion dans l’Architecture africaine de paix et de sécurité, a notamment jugé indispensable d’établir des mécanismes de contrôle pour assurer le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, dans le cadre des opérations militaires. Il a aussi souhaité la définition des modalités des poursuites transfrontalières, des arrestations, détentions et actions judiciaires, ainsi que de la protection des civils.
« Préserver nos pays, c’est aussi protéger vos concitoyens », a déclaré le Ministre des affaires étrangères, de la coopération et des Burkinabé de l’extérieur du Burkina Faso, M. Alpha Barry, en indiquant que les pays du G5 Sahel « comptent » sur le Conseil pour « agir vite ». Le Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali, M. Abdoulaye Diop, qui s’exprimait en sa qualité de Président du G5 Sahel, n’a pas dit autre chose en demandant des « ressources pérennes et prévisibles » pour la Force conjointe.
Il a rappelé à cette occasion qu’un budget de 423 millions d’euros avait été établi « sur la base d’une évaluation réaliste et objective des besoins de la Force », dont un quart seulement est financé, selon le rapport. Le Ministre malien a donc encouragé tous ses partenaires à participer à la Conférence internationale sur la sécurité et le développement au Sahel, prévue le 14 décembre 2017, à Bruxelles.
Le Président de la Commission de l’Union africaine, M. Moussa Faki Mahamat, a plaidé pour la mise en place d’un module de soutien financier par le biais de contributions au budget ordinaire de l’ONU. « Face au danger du terrorisme, nous ne saurons nous satisfaire de demi-mesures », a-t-il prévenu. « L’Union européenne et ses États membres, premiers bailleurs en Afrique, sont déjà engagés dans le soutien de la Force conjointe et ils continueront à l’être », a assuré M. Ángel Losada Fernández, Représentant spécial de l’Union européenne (UE) pour le Sahel.
Tout en annonçant, pour sa part, une contribution de 60 millions de dollars d’aide bilatérale pour le Sahel, la déléguée des États-Unis a tenu à mettre en garde contre « l’utilisation de ressources onusiennes pour appuyer l’exécution de tâches non onusiennes ». « Nous avons également des réserves s’agissant de la proposition consistant à confier à la MINUSMA des tâches nouvelles, alors que celle-ci fait face à des défis de taille dans l’exécution de son mandat », a affirmé la déléguée américaine.
Dans cette veine, le Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni, M. Tariq Ahmad, a souligné la nécessité que la MINUSMA, qui a perdu plus de 140 Casques bleus jusqu’à présent sur le champ de bataille, puisse s’acquitter de son mandat. Partisan d’une « intensification progressive » du rôle de l’ONU, le délégué de la Fédération de Russie a, lui, appuyé la quatrième option du rapport.
« Je suis convaincu que le soutien logistique de la Force, telle qu’elle est aujourd’hui conçue, par la MINUSMA peut être mis en œuvre sans altérer en rien la capacité de l’opération de maintien de la paix à assumer pleinement son mandat », a appuyé M. Le Drian. L’essentiel, pour le Ministre de la France, pays qui a déployé 4 000 militaires dans le Sahel au sein de l’opération Barkhane, c’est d’accompagner la montée en puissance initiale de la Force conjointe, avant de procéder à un bilan d’étape. « Ne manquons pas cette première étape, celle où l’histoire qui s’écrit avec le G5 nous donne rendez-vous dès aujourd’hui », a-t-il conclu.
PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE
Rapport du Secrétaire général sur la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel (S/2017/869)
Déclarations
« La situation dans le Sahel nous interpelle tous », a lancé M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU. « La pauvreté, le sous-développement et les changements climatiques ont contribué aux crises humanitaires et sécuritaires. » Le Secrétaire général a indiqué que la faiblesse des institutions, l’exclusion et la marginalisation de certains groupes étaient exploitées par les extrémistes et les terroristes, tandis que les frontières poreuses facilitent la traite des êtres humains, les trafics de drogues et d’armes. « Les récentes attaques mortelles contre les gendarmes nigériens et les soldats américains et les attaques incessantes contre les Forces de défense et de sécurité maliennes, les Casques bleus de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et les soldats de l’opération Barkhane illustrent l’ampleur de la menace sécuritaire », a-t-il dit avant de souligner l’aggravation de la crise humanitaire, près de 5 millions de personnes étant déplacées et 24 millions de personnes ayant besoin de l’aide humanitaire.
« Face à l’urgence de la situation, il faut réfléchir à des actions innovantes en soutien aux efforts du G5 Sahel dans le domaine sécuritaire, mais aussi dans les domaines du développement et de la gouvernance. » « Le temps joue contre nous », a poursuivi M. Guterres, en soulignant l’urgence d’aligner les efforts afin de juguler les causes profondes de l’instabilité dans la région. Il a estimé que la création de la Force conjointe démontrait la volonté des pays du G5 Sahel de coopérer étroitement afin de faire face, ensemble, à la menace. « Nous avons l’opportunité aujourd’hui de les soutenir et ensemble d’inverser le cours des évènements. » Le Secrétaire général a rappelé qu’il avait soutenu l’appel des États du G5 Sahel pour doter la Force d’un mandat à la hauteur des menaces et d’un financement pérenne. Ne pas agir pourrait avoir de graves conséquences pour la région et au-delà, a-t-il poursuivi. « J’invite donc ce Conseil à faire preuve d’ambition dans le choix qu’il doit faire. » Le Secrétaire général a souligné la nécessité d’un soutien politique fort au G5 Sahel et un soutien matériel et opérationnel à la mesure des défis.
M. Guterres a indiqué que le Conseil était saisi de quatre options contenues dans son rapport. « Les Nations Unies pourraient mobiliser rapidement un soutien essentiel en complément de l’action des partenaires bilatéraux », a-t-il dit. Il a noté qu’un tel soutien renforcerait la Force conjointe du G5 Sahel mais contribuerait aussi à atténuer les menaces qui affectent la MINUSMA. « Tout comme la MINUSMA, la Force conjointe opérera en soutien au processus de paix malien », a-t-il dit, notant la profonde complémentarité des deux forces. Le Secrétaire général a par ailleurs appelé à la pleine mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, afin de rétablir la stabilité.
« Pendant ma dernière rencontre informelle avec le Conseil, j’ai eu l’occasion de vous transmettre mes opinions et préférences. Naturellement quelle que soit votre décision, le Secrétariat fera de son mieux pour appuyer le G5 Sahel dans le cadre défini par le Conseil. »
M. Guterres a précisé que ce soutien à la Force conjointe s’inscrirait dans le cadre du partenariat stratégique en vue de renforcer les réponses africaines aux crises affectant le continent. « Qui dit partenariat stratégique dit engagement mutuel, accompagné de garanties, de critères et d’indicateurs de succès convenus entre les pays du G5 Sahel et les partenaires internationaux. »
S’il a loué les progrès remarquables accomplis par les pays du G5 Sahel, notamment l’élaboration du concept des opérations et la mise à disposition de moyens nationaux, le Secrétaire général a néanmoins estimé que certains aspects mériteraient d’être précisés et consolidés. « C’est dans cette optique que j’ai présenté des recommandations pour renforcer la direction politique de la Force conjointe et son insertion dans l’Architecture africaine de paix et de sécurité », a-t-il expliqué. Il a aussi suggéré d’introduire des mécanismes de suivi et d’accompagnement transparents et crédibles susceptibles de renforcer la légitimité et le cadre politique de la Force conjointe, ainsi que l’adhésion de la région et de ses partenaires. Le Secrétaire général a en outre jugé indispensable d’établir des mécanismes de contrôle pour assurer le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, dans le cadre des opérations militaires. « L’Union africaine et l’ONU peuvent appuyer le G5 Sahel dans la mise en place de systèmes adéquats, avec le concours de partenaires, notamment l’Union européenne. » M. Guterres a donc demandé que soient définies les modalités des poursuites transfrontalières; les arrestations, détentions et actions judiciaires; la réduction des risques; et la plus large protection des civils. « J’encourage les membres du G5 Sahel à travailler à la finalisation du concept des opérations, clarifiant les objectifs et le calendrier de montée en puissance de la Force conjointe. »
S’il a souligné le caractère essentiel de la coopération sécuritaire dans le Sahel, le Secrétaire général a noté que seule une réponse multidimensionnelle pourrait mettre un terme à l’instabilité. « J’ai chargé la Vice-Secrétaire générale de cordonner et de redynamiser la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel », a-t-il poursuivi. Il a en outre annoncé la présentation, en décembre, à Bruxelles, d’une stratégie d’investissements pour la région, avant de plaider pour une cohérence renforcée entre les différentes initiatives nationales, régionales et internationales. En conclusion, rappelant qu’il a fait de la prévention sa « priorité absolue », le Secrétaire général a souligné la nécessité d’empêcher que le Sahel ne sombre dans le chaos. « J’appelle donc à un partenariat gagnant-gagnant: un cadre de responsabilité partagée qui formaliserait nos obligations mutuelles, en vue de remédier aux causes profondes de la crise. »
M. ABDOULAYE DIOP, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali, qui s’exprimait en sa qualité de Président du G5 Sahel, a salué l’analyse et les recommandations contenues dans le rapport sur l’opérationnalisation et les activités de la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S). Il a souligné l’urgence du soutien à cette force compte tenu de la menace sécuritaire qui continue de peser sur les cinq États du Sahel (Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Niger et Tchad), « un défi commun » qu’ils partagent avec le reste du monde, du fait de ses causes, de ses manifestations et de ses incidences indirectes sur la paix et la sécurité internationales, en invitant à y apporter une réponse collective.
La Force conjointe du G5 Sahel est endossée par l’Union africaine et bénéficie du soutien du Conseil de sécurité, a-t-il souligné en rappelant que ses actions ont pour vocation d’être complémentaires de celles des autres forces déjà présentes dans la région, notamment la MINUSMA et l’opération française Barkhane. Estimant que la montée en puissance de la Force conjointe permettra de faciliter la mise en œuvre du mandat de la MINUSMA, il a expliqué que le concept stratégique des opérations de la Force prévoit des mécanismes de coordination et d’articulation entre la Mission des Nations Unies et cette opération africaine de paix.
M. Diop a fait état de progrès considérables réalisés par les États du G5 Sahel dans le processus de déploiement de la Force conjointe, avec l’accompagnement de l’Union africaine et le soutien de ses partenaires, et cela malgré plusieurs défis. À ce titre, il a indiqué que le quartier général de la Force, qui se trouve à Sévaré, a été inauguré le 9 septembre 2017, ce que les membres du Conseil de sécurité ont pu constater de visu lors de leur récente visite au Mali. Le poste de commandement (PC) du secteur centre de la Force est également prêt à Niamey, au Niger, et les dispositions sont en cours pour l’établissement des PC du secteur est à Wour, au Tchad, et du secteur ouest à N’beiket, en Mauritanie. Le Ministre a également souligné la mobilisation des troupes nécessaires aux bataillons et leur équipement sur fonds propres au Mali, au Burkina Faso et au Niger.
« Cependant, pour atteindre sa pleine capacité opérationnelle, d’ici à mars 2018, la Force conjointe aura besoin d’un soutien bilatéral et multilatéral conséquent en vue de la mobilisation des ressources pérennes et prévisibles », a-t-il poursuivi en expliquant que « c’est tout le sens de notre demande en faveur du soutien multilatéral, y compris à travers les Nations Unies ». Il a rappelé à cette occasion qu’un budget de 423 millions d’euros avait été établi « sur la base d’une évaluation réaliste et objective des besoins de la Force », avant d’encourager tous ses partenaires à participer à la Conférence internationale sur la sécurité et le développement au Sahel, prévue le 14 décembre 2017, à Bruxelles.
« En plus de la question du financement, la Force aura également besoin d’appui dans les domaines de la réalisation d’infrastructures, de moyens d’information et de communication, de matériel de lutte contre les engins explosifs, de formation, de capacités médicales et d’évacuation sanitaire ainsi que les transports aériens et terrestres », a encore précisé M. Diop. Les membres du G5, a-t-il dit, saluent les options proposées par le Secrétaire général dans le cadre du soutien des Nations Unies à la Force conjointe, estimant qu’il s’agit « d’une bonne base pour la prise en charge des besoins pressants actuels de la Force, en particulier l’option 1 ».
Se félicitant de l’engagement du Secrétaire général à contribuer à la mobilisation des ressources et de l’appui à la Force conjointe, le Président du G5 Sahel a appelé le Conseil de sécurité à en faire de même dans les meilleurs délais. Il est disposé à mettre en place un mécanisme de gestion transparente des moyens et des ressources, en restant ouvert à toute proposition visant à renforcer l’architecture institutionnelle et la consolidation des capacités de planification et de coordination de la FC-G5S, y compris l’affectation d’experts de l’ONU auprès du Secrétariat permanent du G5 Sahel.
M. Diop a également salué le soutien du Secrétaire général en faveur de la mise en place d’un groupe de soutien au G5 Sahel pour encourager la coordination et l’appui international, conformément au concept stratégique des opérations de la Force. Il a ajouté que les États membres du G5 Sahel s’associent pleinement au Secrétaire général pour appeler le Conseil de sécurité à adopter « un mandat robuste proportionné au degré de la menace dans lequel évolue la Force conjointe ». Ils s’engagent à ce que les opérations de la Force soient conduites dans le strict respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.
Le Président du G5 Sahel a également expliqué qu’à côté du volet sécuritaire, le G5 Sahel accorde une priorité importante aux questions de développement, de bonne gouvernance et de résilience des populations. Le déploiement de la Force vise tout simplement à créer les conditions du développement, de la sécurité et de la paix durables dans la région, a-t-il affirmé. C’est tout le sens du Programme d’investissements prioritaires (PIP) du G5 Sahel et de l’Alliance pour le Sahel, a précisé M. Diop.
S’exprimant ensuite à titre national, le Ministre a renouvelé l’engagement du Gouvernement malien à diligenter la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. Il a salué à cet égard l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2374 (2017) établissant un régime de sanctions au Mali.
Pour M. MOUSSA FAKI MAHAMAT, Président de la Commission de l’Union africaine, la réunion d’aujourd’hui atteste de l’attention croissante que la communauté internationale accorde à la zone sahélo-saharienne. Après s’être félicité de l’opérationnalisation de la Force conjointe, un cadre qui légitime les efforts de pays de la région, il a souhaité qu’elle bénéficie du soutien des partenaires bilatéraux et multilatéraux, notamment de la part de l’Union européenne. Le Président a exprimé à nouveau « l’attente qui est la nôtre », à savoir la mise en place d’un module de soutien financier par le biais de contributions au budget ordinaire de l’ONU. « Face au danger du terrorisme, nous ne saurons nous satisfaire de demi-mesures », a-t-il prévenu, en affirmant que « seul un soutien financier pérenne » permettra à la Force conjointe de s’acquitter de son mandat.
Pour sa part, l’Union africaine, a assuré le haut fonctionnaire, continuera de travailler avec le G5 Sahel. Elle compte notamment lui prêter une assistance technique, réactiver le processus de Nouakchott, et mener une action de plaidoyer soutenue en vue d’obtenir les ressources nécessaires. Mais en finir avec les terroristes suppose aussi une action soutenue en matière de développement et de gouvernance, dans laquelle sont également engagés les pays de la région, a-t-il souligné. À cet égard, M. Mahamat s’est félicité de l’annonce faite par le Secrétaire général de réexaminer la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, sous la houlette de la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed.
M. ÁNGEL LOSADA FERNÁNDEZ, Représentant spécial de l’Union européenne (UE) pour le Sahel, a jugé doublement importantes les discussions en cours sur la Force conjointe du G5 Sahel au sein du Conseil de sécurité. Elles permettent en effet de maintenir le Sahel en haut des priorités de l’agenda international et constituent une étape importante dans la montée de la puissance de cette force africaine qu’il est urgent de soutenir, a-t-elle plaidé. Le représentant a cependant averti qu’il n’y aura pas de stabilité durable au Sahel sans la mise en œuvre totale, effective et inclusive des dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.
Après avoir rendu hommage aux chefs d’État du G5 Sahel, à l’ONU et aux différents acteurs de la sécurité sur le terrain, ainsi qu’au Secrétaire général, notamment pour son implication personnelle, le Représentant spécial s’est réjoui des options proposées et a recommandé une mise en œuvre progressive de la solution qui sera adoptée. Il a jugé important notamment de chercher par ce biais à éradiquer la menace terroriste, régler la crise libyenne, contenir la violence dans le bassin du lac Tchad et dans le nord du Mali, faire face aux dépenses croissantes des États du G5 Sahel pour la sécurité, assurer un meilleur contrôle aux frontières et contribuer au développement socioéconomique de la région.
L’Union européenne et ses États membres, premiers bailleurs en Afrique, sont déjà engagés dans le soutien de la Force conjointe du G5 Sahel et ils continueront à l’être, a assuré le représentant. Le noyau « sécurité-développement » est primordial pour garantir la sécurité de la région, a-t-il déclaré avant de rappeler l’annonce de Federica Mogherini, Haut Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, en juin 2017, d’une première aide de 50 millions d’euros prélevée sur la Facilité de paix pour l’Afrique, et de la mobilisation de l’appui des missions de politique de sécurité et de défense commune de l’UE présentes dans la région. Grâce à l’appui de la mission de formation de l’UE au Mali (EUTM Mali), les premières requêtes de l’état-major du G5 sont en cours de traitement. Les formations dispensées par EUTM Mali et dont bénéficient les forces armées maliennes sont réalisées dans le cadre des normes internationales en matière de droits de l’homme, a-t-il précisé.
Le représentant a annoncé l’organisation, le 14 décembre prochain, à Bruxelles, d’une conférence de chefs d’État et de gouvernement sur la sécurité et le développement, qui réunira une grande partie de la communauté internationale. « Ce sera l’occasion de mobiliser des contributions permettant la montée en puissance de la Force conjointe et sa pleine opérationnalisation, y compris dans sa composante civile, en réponse à l’engagement pris par le G5 Sahel et la résolution 2359 du Conseil de sécurité. » L’UE a mis en place un dispositif opérationnel pour soutenir directement les demandes de la Force conjointe, ouvert à des contributions de la communauté internationale, a-t-il également signalé.
M. JEAN-YVES LE DRIAN, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a fait part d’un constat limpide: les groupes terroristes au Sahel représentent aujourd’hui une menace globale, non seulement pour la stabilité de la région mais aussi pour la sécurité internationale. Une situation qui appelle une réaction claire, forte et coordonnée de l’ONU, « mais également de chacun d’entre nous ». « La Force conjointe du G5 Sahel, c’est la bonne à réponse à ce défi », a-t-il estimé. Elle doit permettre à la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et à la force Barkhane de se concentrer sur le cœur de leurs missions respectives, à la demande du Gouvernement malien, afin de gagner encore en efficacité. C’est pourquoi la Force conjointe, a poursuivi le chef de la diplomatie française, doit pouvoir progresser rapidement dans sa capacité de lutte contre le terrorisme et les trafics.
« La récente visite du Conseil de sécurité au Sahel a permis de constater la réalité de cette force, qui est aujourd’hui opérationnelle sur son fuseau central, dans la région du Liptako Gourma, où elle commence sa première opération », a indiqué le Ministre, qui a souligné l’importance pour ses troupes de répondre aux exigences en matière de respect des droits de l’homme, sans lesquelles la lutte contre le terrorisme ne saurait être efficace.
Dans ce contexte, les soutiens bilatéraux demeurent cruciaux pour aider la Force conjointe à atteindre sa pleine capacité, a souligné M. Le Drian en appelant à cet effet les partenaires à prendre part à la conférence de planification qui se tiendra à Bruxelles le 14 décembre. Cette aide bilatérale devra être complétée par une aide multilatérale, sous la forme d’un appui opérationnel et logistique pérenne à la Force conjointe, a-t-il souligné. Les options de soutien logistique de la Force telle qu’elle est conçue aujourd’hui, par la MINUSMA, doivent pouvoir être étudiées à court terme, comme le propose le rapport du Secrétaire général, a estimé M. Le Drian. « Je suis convaincu que ce soutien peut être mis en œuvre sans rien altérer de la capacité de l’opération de maintien de la paix à assumer pleinement son mandat », a-t-il déclaré.
Bien entendu, a ajouté le Ministre, il ne peut y avoir de paix durable sans développement durable. « Un effort supplémentaire dans ce domaine doit donc être entrepris pour stabiliser la région et la France en a pleinement conscience. » C’est pourquoi, avec l’Allemagne, l’Union européenne, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Paris porte le projet d’une Alliance pour le Sahel, qui doit permettre d’atteindre des résultats significatifs dans les domaines clefs que sont l’emploi des jeunes, l’agriculture, l’énergie ou encore la gouvernance et la sécurité.
Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a rappelé que la Force conjointe du G5 Sahel était « un des instruments parmi tant d’autres » d’une approche régionale « intégrée et durable » dans le Sahel, une approche qui doit se baser sur le primat du politique. Il est donc essentiel à ses yeux de veiller à la mise en place d’un cadre politique global pour le Sahel, ce qui nécessite le maintien de l’unité actuelle entre, d’un côté, les pays du G5 Sahel et, de l’autre, la communauté internationale. Mme Wallström a également appelé l’Union africaine à jouer un rôle majeur de coordination entre la Force conjointe et les autres initiatives et cadres régionaux, afin de les intégrer encore davantage au sein de l’Architecture africaine de paix et de sécurité de l’UA.
La Ministre a estimé que le succès de la Force dépendrait en grande partie du soutien des populations locales, en faisant remarquer que des groupes armés terroristes enracinés dans la population exploitent l’absence d’autorité de l’État. Pour s’assurer du soutien des civils, Mme Wallström a recommandé à la Force de respecter les droits de l’homme. Elle a aussi appelé la communauté internationale à apporter un appui à l’initiative du G5 Sahel, via un financement « prévisible et durable » de la part de l’ONU à la Force conjointe, dans le cadre notamment de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. En plus de ce soutien, Mme Wallström a annoncé que son pays envisageait de soutenir la Force de façon bilatérale.
Par ailleurs, la Ministre a appelé les autorités maliennes à faire preuve de davantage d’ouverture politique, notamment pour mieux intégrer les femmes à la mise en œuvre de l’Accord pour la paix de 2015. « La représentation des femmes n’est pas seulement une question d’équité, mais d’efficacité et d’augmentation des chances de parvenir à une paix durable », a-t-elle déclaré.
Mme NIKKI R. HALEY (États-Unis) a affirmé que les États-Unis appuyaient les pays du G5 Sahel dans l’établissement de la Force conjointe. Mon pays, pleinement engagé en faveur de la stabilité du Sahel, poursuivra son soutien bilatéral, a-t-elle dit. Elle a ainsi annoncé une contribution de 60 millions de dollars au titre de cette aide bilatérale. « Nous comprenons que ladite force aura besoin d’un appui continu. » La déléguée a néanmoins souligné l’importance et la nécessité de la pleine appropriation de la Force conjointe par les pays du G5 Sahel. « Nous avons des réserves concernant la proposition consistant à confier à la MINUSMA des tâches nouvelles, alors que celle-ci fait déjà face à des défis de taille dans l’exécution de son mandat », a-t-elle indiqué. La déléguée américaine a également dit nourrir des « réserves sérieuses » s’agissant de l’utilisation de ressources onusiennes pour appuyer l’exécution de tâches non onusiennes. « Parce que la communauté internationale ne peut pas abandonner les populations sahéliennes à leur sort », Mme Haley a par ailleurs souligné la nécessité de consolider les gains sécuritaires par des efforts visant à promouvoir une bonne gouvernance. « Mon pays continuera d’œuvrer avec le G5 Sahel pour identifier les besoins de la Force conjointe et calibrer notre appui », a-t-elle affirmé en faisant observer que « le sort du Sahel est entre les mains des pays de la région ».
M. SERGIY KYSLYTSYA, Ministre adjoint des affaires étrangères de l’Ukraine, a salué les « progrès impressionnants » réalisés par les pays du G5 Sahel dans le déploiement de leur Force conjointe, compte tenu des « ressources limitées » à leur disposition, y compris l’inauguration en septembre dernier du poste de commandement de la Force, et la définition du concept général des opérations. « Beaucoup reste cependant à accomplir », a toutefois reconnu le représentant, appelant les États du G5 Sahel à rester mobilisés pour mener à bien leur initiative et à travailler de concert avec leurs partenaires bilatéraux, le Conseil de sécurité et la communauté internationale. Soulignant le caractère primordial de l’appui des partenaires internationaux à l’initiative du G5 Sahel, il a jugé importante la conférence des promesses de contributions qui sera organisée en décembre prochain à Bruxelles.
Le représentant a également appelé l’ONU à jouer un rôle de premier plan dans l’appui à la Force. Il a notamment estimé que la MINUSMA pouvait lui apporter une « aide ciblée précieuse ». Cela supposerait, a-t-il précisé, que le mandat de la Mission soit modifié en conséquence. « Toutefois, l’élargissement du champ d’opérations de la MINUSMA ne devrait pas se faire au détriment de sa capacité à mettre en œuvre son principal mandat », a mis en garde M. Kyslytsya. « Nous ne devrions pas non plus oublier que le manque de capacités, qui empêche actuellement la Mission de réaliser pleinement son potentiel, demeure important », a-t-il ajouté.
En dernier lieu, le représentant ukrainien a appelé à s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité dans la région. « Nous sommes convaincus que la Force conjointe, une fois opérationnelle, ne constituerait qu’un élément parmi d’autres de la stratégie appropriée de gestion des frontières », a-t-il dit. À ses yeux, la pleine mise en œuvre de l’Accord pour la paix au Mali est un autre élément clef pour ramener la stabilité dans le pays et la région. Il a par conséquent appelé les signataires de l’Accord à finaliser l’opérationnalisation des administrations par intérim dans le nord du Mali et à s’engager dans un processus national de consultations ouvertes, dans la perspective de la future réforme constitutionnelle.
M. TARIQ AHMAD, Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni, a rappelé que son pays appuyait des projets au Sahel et au-delà. Il a mentionné la formation dispensée à 22 000 soldats, jusqu’à présent, dans la lutte antiterroriste, et souligné le fait que son gouvernement avait dépensé 6 millions de dollars contre l’esclavage moderne. Le Royaume-Uni a ainsi démantelé deux réseaux de trafiquants d’êtres humains dans la région cette année. Il a également fait état d’un total de plus de 225 millions de dollars consacrés à des projets humanitaires dans la région.
Conscient que le financement de la Force conjointe est un élément important, le Ministre a soutenu l’engagement de l’UE auprès de la Force conjointe. Il a cependant estimé que cet appui devait s’accompagner de prestations de services. Pour la délégation britannique, il faut par ailleurs veiller à ce que la MINUSMA, qui a perdu plus de 140 Casques bleus jusqu’à présent sur le champ de bataille, soit en mesure de s’acquitter de son mandat. Le Ministre a en conclusion souligné l’importance d’un processus de paix couronné de succès, un élément qui doit figurer à son avis au cœur de toute stratégie.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a estimé que la récente visite du Conseil avait permis à ses membres de bien saisir l’importance de l’opérationnalisation rapide de la Force conjointe. Il a dit son accord avec la déclaration du Président de la Commission africaine. Les pays du G5 Sahel se heurtent à des défis colossaux dans le déploiement de la Force, a-t-il dit, soulignant l’urgence qui s’attache à leur fournir un appui fort. Il a pris acte des engagements bilatéraux pris pour financer la Force conjointe. Ces annonces sont néanmoins loin d’être suffisantes pour assurer le financement de ladite force, a-t-il dit, avant de se féliciter de la prochaine tenue de la Conférence des donateurs de Bruxelles pour y remédier.
Le délégué a espéré que le Conseil étudiera sérieusement les options proposées par le Secrétaire général et se montrera ambitieux dans l’appui à apporter à la Force conjointe. M. Alemu a insisté sur la complémentarité entre la MINUSMA et la Force conjointe. La coopération entre les pays du G5 Sahel, l’Union africaine et l’ONU, ainsi que l’appui des partenaires bilatéraux, sont essentiels pour assurer le succès de la Force conjointe, a-t-il dit. En conclusion, le délégué a demandé la pleine mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.
M. SEBASTIANO CARDI (Italie) s’est félicité du soutien dont bénéficie la Force conjointe du G5 Sahel, comme l’illustre la mission du Conseil de sécurité qui s’est rendue ce mois-ci dans la région. Cependant, la valeur ajoutée du soutien multilatéral ne doit pas occulter l’importance des contributions bilatérales qui pourraient être faites à la Force lors de la Conférence des donateurs qui se tiendra en décembre à Bruxelles, a estimé le représentant. Selon lui, il est indispensable d’aborder les causes profondes des problèmes de la région, le Sahel représentant non seulement un défi, mais aussi une opportunité pour élaborer des stratégies de développement cohérentes, dans le respect de l’appropriation africaine des priorités. Le délégué a enfin annoncé que son pays, lors de sa présidence des travaux du Conseil de sécurité au mois de novembre, organiserait un débat public sur les défis sécuritaires en mer Méditerranée, « un sujet étroitement lié aux dynamiques sahéliennes ».
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a souligné l’ampleur de la menace terroriste au Sahel. La situation met en évidence les conséquences destructrices des interventions irréfléchies dans les affaires intérieures d’États souverains, a-t-il dit, en dénonçant l’intervention en Libye. Celle-ci a été l’élément catalyseur de la situation actuelle au Sahel, a accusé le délégué. Il a estimé que la Force conjointe était une bonne réponse aux défis, « dans le cadre de solutions africaines aux problèmes africains ». Il a demandé une opérationnalisation rapide de la Force, avant de prendre note des retards pris par les pays du G5 dans l’affectation de leurs contingents.
Le délégué russe a souligné l’importance d’une bonne coordination des efforts des pays du G5 Sahel, « sans exception », avant de plaider pour une « intensification progressive » du rôle de l’ONU. Le délégué a appuyé la quatrième option proposée par le Secrétaire général en soulignant la parité des objectifs de la MINUSMA et de la Force conjointe. « Ne nous précipitons pas », a-t-il cependant déclaré. En conclusion, le délégué a demandé la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et plaidé pour un front commun de la communauté internationale face au terrorisme.
M. FODÉ SECK (Sénégal) a fait part d’une « situation explosive » au Sahel. Compte tenu du caractère transfrontalier de la menace qui pèse sur la région, seuls le renforcement de la coopération régionale et l’alignement des initiatives permettront de venir à bout des organisations terroristes et des groupes armés qui sévissent sur place et contrarient tous les efforts de développement à l’œuvre, a estimé le représentant. Selon lui également, il ne fait pas de doute que les opérations de la Force conjointe seront complémentaires des efforts déployés par la MINUSMA, de l’opération Barkhane et des autres initiatives en cours dans la région. Il a souhaité à cet égard que l’Union africaine continue à jouer son rôle central de coordination. Pour ce qui est de la communauté internationale dans son ensemble, il a espéré un soutien « multiforme » de sa part. S’il est vrai que les pays du G5 Sahel sont principalement responsables de l’équipement de la Force, a-t-il ajouté, l’appui des partenaires bilatéraux et multilatéraux devra lui permettre d’atteindre sa pleine opérationnalisation.
M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a estimé que la situation au Sahel était la conséquence directe des changements récents dans la région et de l’intervention en Libye. Le délégué a affirmé que la Force conjointe était la bonne réponse face aux défis sécuritaires de la région. C’est, de plus, la réponse la moins coûteuse, a-t-il affirmé. L’appropriation régionale de la Force conjointe n’empêche en rien l’apport d’un appui logistique onusien et bilatéral, a poursuivi M. Aboulatta. Le délégué a ensuite demandé la fourniture d’une aide au développement au G5 Sahel et la pleine mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel. Il a dit attendre avec impatience la fin des travaux cartographiques en cours de l’ONU dans la région dans le cadre de ladite stratégie. Mon pays n’épargnera aucun effort pour soutenir les pays frères du G5 Sahel, a conclu le délégué de l’Égypte.
M. YERLIK ALI (Kazakhstan) s’est dit convaincu que le déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel renforcerait les propres efforts de la MINUSMA, des forces de sécurité maliennes et l’opération française Barkhane. Son efficacité dépendra toutefois de la mise à disposition, en temps opportun, de ressources adéquates et du soutien politique nécessaire, a noté le représentant. À cet égard, il a dit attendre avec impatience la tenue de la Conférence des donateurs, prévue en décembre à Bruxelles, pour combler le fossé de 300 millions d’euros. À la suite d’autres membres du Conseil, le représentant a fait observer qu’une approche strictement militaire serait insuffisante à répondre aux causes profondes de l’instabilité, qui résulte d’une véritable « sédimentation de problèmes dont l’extrémisme n’est que le plus récent ». Après avoir plaidé pour la mise en œuvre efficace de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, il a souhaité plein succès au Forum pour l’investissement international au Mali, qui se tiendra le 7 décembre prochain.
M. WU HAITAO (Chine) a demandé un appui efficace pour la Force conjointe, comme « contribution importante à la paix au Sahel ». Il a souligné l’importance de l’appropriation régionale de ladite force, avant de demander le plein respect de la souveraineté des pays de la région. Le délégué a souligné l’importance de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix au Mali, avant d’inviter la communauté internationale à renforcer les capacités des pays de la région face au terrorisme. Le terrorisme est l’ennemi commun de la communauté internationale, a-t-il affirmé. En conclusion, le représentant de la Chine a souligné l’importance d’une bonne coopération régionale et demandé la pleine mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.
M. KORO BESSHO (Japon) a rappelé que le Sahel fait face à une menace croissante, soulignant cependant que des mesures de court terme, centrées sur la sécurité ne seront pas sources de stabilité durable, comme l’a conclu la délégation du Conseil qui s’est rendue dans la région plus tôt ce mois-ci. Aussi, il faut porter davantage l’accent sur les causes profondes du conflit qui sévit dans les pays du Sahel, qu’il s’agisse de l’insuffisance du développement, du manque de gouvernance et de l’absence d’institutions étatiques, comme des lacunes dans les domaines de l’éducation et de la création d’emplois, en particulier pour les jeunes. « Il n’y a pas de raccourcis », a assuré le représentant en plaidant pour que le déploiement de la Force conjointe s’accompagne d’une réflexion approfondie sur le développement et les institutions. Depuis 2013, son pays, a-t-il rappelé, a fourni environ 1,3 milliard de dollars sous la forme d’aide au développement et d’assistance humanitaire au Sahel, dans le cadre de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique.
Pour M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay), la formation de la Force conjointe du G5 Sahel constitue une « démonstration claire de l’appropriation nationale » et permet de confronter les multiples défis qui menacent la région, notamment le terrorisme. Réaffirmant, comme le Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix, que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ne devraient pas avoir pour mandat de lutter contre le terrorisme, il a considéré que le G5 Sahel était un outil important à cet égard. La Force conjointe permettra en outre à la MINUSMA de remplir son mandat de façon efficace, ce qui s’est révélé impossible jusqu’à maintenant en raison de la multiplication des défis opérationnels sur le terrain, a-t-il relevé. Pour ce faire, il a jugé essentiel que les troupes de MINUSMA soient mieux entraînées et équipées.
En contrepartie des efforts des pays de la région et de la création du G5 Sahel, le représentant a invité la communauté internationale à soutenir de façon adéquate la Force conjointe. Comme le Secrétaire général, il a demandé au Conseil de sécurité de fournir un « soutien ambitieux » à la Force conjointe afin de parvenir à des résultats « positifs et durables » le plus rapidement possible. M. Rosselli a par ailleurs appelé à la mise sur pied d’un mécanisme de surveillance, de vigilance et de responsabilité en matière de respect des normes internationales des droits de l’homme et du droit international humanitaire dans le cadre des activités de sécurité. Enfin, afin d’éviter une analyse « simpliste » de la situation sécuritaire dans la région, il a jugé nécessaire d’œuvrer en faveur du développement, du renforcement des capacités et de l’état de droit ainsi que de la résilience des communautés.
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a condamné les récentes attaques terroristes qui ont coûté la vie à trois militaires tchadiens de la MINUSMA, avant de saluer la création de la Force conjointe du G5 Sahel qui constitue, à son avis, un exemple du travail « conjoint et coordonné » des Nations Unies et du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. Pour lui, le G5 Sahel représente l’instrument approprié pour accompagner le déploiement de la MINUSMA. Il a également salué les efforts de Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) dans la mise en œuvre de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, en coopération avec le processus de Nouakchott de l’Union africaine.
Face aux quatre options de soutien des Nations Unies à la Force conjointe, il a recommandé de prendre en compte les recommandations de l’Union africaine afin de contribuer de façon « active et conséquente » aux initiatives africaines.
Soulignant l’importance d’analyser les causes profondes du conflit, M. Llorentty Solíz a dénoncé l’interventionnisme et les politiques de changement de régime qui ont eu cours en 2011 en Libye, estimant qu’ils ont eu pour effet de déstabiliser l’ensemble du Sahel. Selon lui, c’est par la gestion adéquate des ressources naturelles et le strict respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États que pourront être établis les fondements de la paix dans la région. Il faut se pencher avec soin sur la situation humanitaire, a-t-il poursuivi, rappelant que 30 millions de personnes de la région courent le risque de souffrir d’insécurité alimentaire en raison des conflits, de la sécheresse, des changements climatiques et du manque de services de base.
M. ALPHA BARRY, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et des Burkinabé de l’extérieur du Burkina Faso, a rappelé qu’au moment même où il s’adresse au Conseil de sécurité, plus de 2 000 écoliers de la province de Soum, située à la frontière avec le Mali, étaient privés de cours. « La raison: les attaques et les menaces terroristes », a-t-il indiqué, rappelant la peur qui s’est emparée de la population et la « psychose » qui a saisi les enseignants, après avoir vu des terroristes « débarquer dans un des villages en mars dernier » et assassiner « en pleine cour d’école » l’un des enseignants. Il a insisté sur la réalité des menaces, avec « des écoles et des mairies incendiées, des maires et des conseillers municipaux enlevés et tués ». « Les symboles de l’État sont attaqués avec pour objectifs de faire disparaître l’administration publique et de prendre le contrôle de la zone », afin d’assurer « la liberté du grand banditisme et des trafics qui nourrissent les terroristes: armes, drogues, cigarettes, êtres humains ou bétail », a-t-il souligné.
Le Ministre a rappelé qu’en 18 mois, ces attaques contre les symboles de l’État, qui impliquent aussi la pose de mines antipersonnel et visent « les camps militaires, les convois, les postes de police, de gendarmerie ou de douanes », ont fait 133 morts. Éradiquer la menace terroriste, c’est non seulement « préserver nos pays, les autres pays », mais « c’est aussi protéger vos concitoyens », a-t-il déclaré aux membres du Conseil de sécurité, soulignant que parmi ces victimes figuraient aussi des ressortissants de leurs pays. Dans ce contexte, M. Barry a souligné la détermination des États du G5 Sahel, prouvée par la montée en puissance de la Force conjointe du G5 Sahel et sa coopération avec le Conseil de sécurité. « Protéger le Burkina Faso, c’est protéger le reste des pays d’Afrique de l’Ouest: Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin », a-t-il insisté en soulignant que ces groupes terroristes opèrent à une moyenne de 500 kilomètres de ces pays.
M. Barry a poursuivi en mettant en avant le lien démontré entre les attentats de Grand-Bassam en Côte d’Ivoire, ceux de Ouagadougou et les groupes terroristes qui harcèlent la zone frontalière de son pays avec le Mali, où « les assaillants s’enfuient ». « La crise malienne déborde au-delà des frontières de ce pays », a-t-il martelé, appelant à une solution régionale, qui est le « fondement du G5 Sahel et de sa Force conjointe », en complément de la MINUSMA.
Saluant le rapport du Secrétaire général qui rend compte de la dimension régionale de la crise et donc, de sa solution, il a insisté sur « la lutte acharnée menée, avec peu de moyens », par les forces burkinabé et « dans le respect des droits humains, notamment des 32 000 réfugiés maliens établis » sur le territoire du Burkina Faso. Rappelant encore que « sans sécurité, pas de développement, et sans développement, pas de sécurité », il a souligné le Programme d’urgence pour le Sahel d’un montant de 750 millions de dollars sur quatre ans lancé pour développer la zone.
Le Ministre a finalement insisté sur la nécessité « d’agir vite » pour ne pas « tomber dans un cercle vicieux ». « Nous en appelons à votre soutien: multilatéral, bilatéral, les deux à la fois, à l’occasion de la Conférence des donateurs qui se tiendra le 14 décembre prochain à Bruxelles ». « Plus que jamais, le Burkina Faso compte sur vous, plus que jamais le G5 Sahel compte sur vous », a-t-il conclu.
M. BRAHIM HISSEINE TAHA, Ministre des affaires étrangères, de l’intégration africaine et de la coopération internationale du Tchad, a estimé que la résolution 2359 (2017) du Conseil de sécurité et l’adoption du concept des opérations avaient marqué un tournant décisif dans la mise en place de la Force conjointe du G5 Sahel. « Mais il est tout aussi évident que nous ne sommes pas encore arrivés au bout de nos attentes, tant les questions essentielles du mandat robuste demandé par la région et des moyens nécessaires à l’opérationnalisation de la Force se posent avec acuité », a constaté M. Taha. Selon le Ministre, la situation actuelle dans la région exige l’engagement immédiat de la communauté internationale en vue de doter la Force conjointe de réelles capacités d’intervention. « Toute hésitation ne fera que nourrir les desseins de groupes criminels », affaiblissant la résilience des populations locales ainsi que la capacité de réaction des États de la région, a-t-il prévenu.
C’est dans ce contexte que le Ministre s’est félicité de la mise en œuvre de la première phase du concept général d’opérations, « notamment la montée en puissance des forces au niveau des trois fuseaux », telle que le Secrétaire général l’a présentée dans son rapport. À son avis, seule la mise à disposition de ressources prévisibles et pérennes permettra d’anticiper sur les stratégies funestes des terroristes et de redonner au Sahel les moyens de prendre en charge les immenses besoins des populations. M. Taha a lancé en conclusion un appel en faveur d’une forte mobilisation afin d’aboutir à des engagements concrets lors de la prochaine Conférence des donateurs prévue le 14 décembre prochain.
M. DIALLO MAMADOU BATHIA, Ministre de la défense de la Mauritanie, a souligné la détermination totale de son pays à lutter contre les « forces du mal » du terrorisme. La région du Sahel est affectée par de nombreuses menaces qui, si elles ne sont pas endiguées vigoureusement, pourraient déstabiliser le monde entier, a mis en garde le Ministre. Il a noté le bon avancement de la Force conjointe et souligné l’importance que celle-ci dispose d’un soutien international et des Nations Unies. Nous avons demandé l’appui du Conseil de sécurité pour la création d’une base juridique de cette force, afin de veiller à ce que celle-ci agisse dans le cadre de la légalité internationale, a-t-il rappelé. Le Ministre a donc demandé une résolution « vigoureuse » du Conseil de sécurité pour autoriser la Force à mener la lutte nécessaire contre le terrorisme. Le Ministre a en outre plaidé pour un accompagnement du Conseil en vue de la mobilisation des ressources nécessaires à cette force. Sans un tel appui, les chances de réussite de cette force seront réduites, a-t-il averti.
Pour garantir la paix, la sécurité et la stabilité au Mali, M. IBRAHIM YACOUBOU, Ministre des affaires étrangères, de la coopération, de l’intégration africaine et des Nigériens à l’extérieur du Niger, a estimé qu’il fallait éradiquer les groupes narcoterroristes, assurer la présence et l’autorité de l’État malien sur l’ensemble du territoire, et appliquer les accords politiques. « Nous devons nous dire la vérité », a demandé le Ministre en affirmant que les terroristes ont un territoire dans le nord du Mali. « Oui, ils ont un territoire à partir duquel ils ont causé la mort de 149 Casques bleus de la MINUSMA. À partir duquel ils ont conçu et planifié l’attaque de Grand Bassam. À partir duquel ils continuent de faire prospérer la drogue et le trafic d’armes et de migrants qui leur permettent de poursuivre leurs attaques au Sahel et dans tous les pays du monde », a déclaré le chef de la diplomatie nigérienne.
« Nos multiples réunions, a-t-il poursuivi, ne doivent pas nous donner l’impression d’agir. » Pour lui, « tout a déjà été dit ». La seule action véritable, c’est de contribuer à l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel, a tranché M. Yacoubou. Pour cela, il faut une nouvelle résolution du Conseil de sécurité avec un mandat clair et robuste et surtout une garantie de financement multilatéral prévisible, pérenne et adéquat, a-t-il estimé. Pour le Ministre, « nous n’avons pas d’autre choix que d’attaquer en leur cœur, au nord du Mali donc, les groupes terroristes ».