8066e séance – matin
CS/13021

Yémen: le Conseil de sécurité est appelé à faire pression sur les parties pour qu’elles s’engagent sur la voie de la paix

L’Envoyé spécial du Secrétaire général au Yémen a exhorté, ce matin, le Conseil de sécurité à utiliser tous les instruments politiques et économiques à sa disposition pour faire pression sur les parties afin qu’elles s’engagent en faveur d’une solution de paix, seule à même de mettre fin à l’injustifiable « bain de sang » qui se déroule dans ce pays. 

Lors de cette séance, le Coordonnateur des secours d’urgence a détaillé le « coût humain dévastateur » de la crise au Yémen, tandis que le délégué de ce pays a exhorté le Conseil à mettre fin à l’ingérence de l’Iran, condition, selon lui, du retour d’une paix durable au Yémen. 

« Au Yémen, personne n’est gagnant sur le champ de bataille et le grand perdant est le peuple yéménite », a averti l’Envoyé spécial du Secrétaire général.  M. Ismail Ould Cheikh Ahmed a déploré la poursuite des combats à l’arme lourde le long des principales lignes de front, la nette augmentation du nombre des victimes civiles et la menace formulée par les Houthistes de tirer des missiles balistiques contre d’autres pays du Golfe que l’Arabie saoudite.

L’Envoyé spécial a exhorté les parties à cesser les hostilités et à entamer des discussions sur un accord de paix global.  Un terrain d’entente doit être trouvé pour atténuer les effets du conflit et restaurer la confiance entre les parties, a affirmé l’Envoyé spécial. 

M. Ould Cheikh Ahmed a souligné l’importance d’un tel accord pour acheminer les biens humanitaires et commerciaux via le port d’Hodeïda, rouvrir l’aéroport de Sanaa et verser des salaires plus substantiels aux fonctionnaires.  Les recettes de l’État sont en effet utilisées pour financer l’effort de guerre, a-t-il dit. 

« Cependant, ces mesures ne pourront pas se substituer à une solution plus large à laquelle nous essayons de parvenir. »  L’Envoyé spécial a indiqué, à ce titre, qu’il discutait avec les parties d’une proposition comprenant « des initiatives humanitaires » et des mesures visant à restaurer la confiance et à favoriser le retour des parties à la table des négociations. 

« Nous discuterons des détails de cette proposition avec le Gouvernement du Yémen et l’alliance des Houthistes et du Congrès général du peuple, qui s’est engagée à en discuter plus avant », a affirmé l’Envoyé spécial, avant de former le vœu que cet engagement se traduise par des mesures concrètes. 

« Les propositions que j’ai avancées répondent aux aspirations des parties et leur mise en œuvre aurait des bénéfices tangibles pour le peuple yéménite », a-t-il assuré.  Il a exhorté les parties à faire preuve de flexibilité et à écouter la population yéménite qui veut la paix, contrairement à certains dirigeants influents qui tirent profit de la guerre.  En conclusion, l’Envoyé spécial a souligné l’urgence d’un règlement négocié, sous peine d’aggraver les fractures de la société yéménite et de faire le lit du terrorisme. 

Un tel règlement est d’autant plus nécessaire que le Yémen, comme l’a rappelé le Directeur des opérations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), fait face à la pire crise humanitaire de son histoire.  « Environ 15 millions de personnes manquent d’un accès adéquat à l’eau potable, à l’assainissement, à l’hygiène, à la santé tandis que sept millions font face à un risque de famine », a alerté M. John Ging. 

Le Directeur des opérations a indiqué que le Yémen était également aux prises avec la « pire épidémie de choléra jamais enregistrée sur une période d’un an ».  Près de 800 000 personnes en seraient atteintes dans un pays où à peine 45% des établissements de santé sont en état de fonctionner, a-t-il déploré. 

M. Ging par ailleurs a estimé à deux millions le nombre de personnes déplacées à travers le pays, tandis que 460 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë.  « Même si le conflit prenait fin aujourd’hui, une génération entière accuserait des retards de croissance et de développement cognitif. » 

Le Directeur des opérations a pointé les obstacles « inacceptables » qui entravent l’accès humanitaire, à commencer par les restrictions imposées par les autorités de Sanaa ou le refus par celles d’Aden de délivrer des visas aux ONG.  L’interruption, à intervalles réguliers, du versement des salaires aux 1 250 000 fonctionnaires yéménites ne fait qu’exacerber la crise humanitaire, a-t-il dit. 

De plus, les retards accusés par la bureaucratie yéménite pour autoriser l’importation de biens dans le pays empêchent l’accès aux vivres et au carburant, a-t-il relevé.  En conclusion, le Directeur des opérations a réitéré l’appel de l’ONU visant la protection du port d’Hodeïda et la réouverture de l’aéroport de Sanaa. 

La réouverture de l’aéroport est conditionnée au départ des milices qui en ont le contrôle, a tranché le représentant du Yémen.  M. Khaled Hussein Mohamed Alyemany s’est livré à une attaque en règle contre l’alliance des Houthistes et des partisans de l’ancien Président Saleh.  Cette alliance rejette les efforts de paix de l’Envoyé spécial, instrumentalise les souffrances de la population civile et privilégie une « stratégie du bord du gouffre », a–t-il expliqué. 

Il a par ailleurs indiqué que cette alliance, qui pourrait jouer le même rôle que le Hezbollah au Liban, est le jouet de « forces extérieures qui ne veulent pas de la paix au Yémen ».  L’Iran, a-t-il précisé, cherche à nourrir les tensions et à déstabiliser toute la région. 

Le délégué a en outre affirmé que les roquettes que les Houthistes menacent désormais d’utiliser contre les Émirats arabes unis sont de fabrication iranienne.  « La communauté internationale doit tout faire pour endiguer les ambitions de l’Iran », a-t-il conclu.

Le délégué de l’Uruguay, M. Luis Bermúdez, a également pris la parole pour se féliciter, à l’instar de l’Envoyé spécial, de l’adoption, le 29 septembre, par le Conseil des droits de l’homme, d’une résolution demandant l’établissement d’un groupe d’experts chargé de procéder à un examen des violations des droits de l’homme commises par toutes les parties au conflit depuis septembre 2014.  « Il ne saurait y avoir d’impunité pour les crimes commis dans le cadre de ce conflit », a appuyé son homologue de la Bolivie, M. Sacha Sergio Llorentty Solíz. 

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