En cours au Siège de l'ONU

7906e séance – après-midi
CS/12761

Soudan du Sud: le Conseil de sécurité exprime sa « profonde inquiétude » face au non-respect de l’Accord de paix et à la famine qui affecte le pays

Le Conseil de sécurité a exprimé, cet après-midi, sa « profonde inquiétude » face à la situation politique et humanitaire qui règne au Soudan du Sud, notamment l’« incapacité des parties » à respecter pleinement leurs engagements en faveur de la mise en œuvre de l’Accord de paix et la famine qui touche plusieurs régions du pays. 

La famine affecte 100 000 personnes et menace un million d’autres, a affirmé le Secrétaire général, M. António Guterres, qui présentait son rapport* devant le Conseil de sécurité.  De plus, quelque 5,5 millions de Sud-Soudanais risquent d’être touchés par l’insécurité alimentaire d’ici à l’été, tandis que 7,5 millions de personnes, soit près des deux tiers de la population, ont besoin d’une aide humanitaire. 

Le Conseil de sécurité, dans une déclaration lue par son président, le Ministre des affaires étrangères du Royaume-Uni, M. Boris Johnson, demande, entre autres, le respect immédiat du cessez-le-feu permanent par toutes les parties au conflit et tous les autres groupes armés, ainsi que la levée urgente des obstacles que rencontrent les agents humanitaires dans l’acheminement de l’aide humanitaire dans tout le Soudan du Sud et en particulier dans les zones touchées par la famine.

Il appuie en outre sans réserve toutes les parties aux efforts que déploient l’ONU, l’Union africaine et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) pour assurer la mise en œuvre de l’Accord et le caractère inclusif du dialogue national.

Devant les délégations du Conseil, dont quatre étaient également représentées au niveau ministériel, le Secrétaire général s’est dit inquiet de voir que le processus de paix demeurait au point mort. 

M. Guterres a jugé peu convaincantes les déclarations du Président Salva Kiir sur son intention d’organiser un dialogue national, notamment en l’absence de consultation avec les principales parties prenantes, de la limitation systématique des libertés politiques de base et des restrictions de l’accès humanitaire.

Le Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation, M. Festus Mogae, a, de son côté, fait part de sa préoccupation face à une situation qui est, selon lui, en train de devenir hors de contrôle.  Il a invité la communauté internationale à condamner la violence, les tueries et les abus des droits de l’homme dans le pays. 

Témoignant de ces abus, la Coordonnatrice du Forum mensuel des femmes sur le processus de paix, une organisation non gouvernementale, Mme Betty Sunday, a expliqué que si l’Accord de paix était appliqué, les femmes pourraient vivre leur vie sans crainte, leurs enfants pourraient aller à l’école et elles pourraient s’occuper de leurs jardins.   

Dans ce contexte de désespoir ambiant, « il faut dire au Gouvernement ce que nous attendons de lui et décider que le Conseil de sécurité envisagera d’autres mesures, y compris un embargo sur les armes et des sanctions ciblées », a averti M. Johnson.  Un avis soutenu par la délégation de la France, qui a estimé que la mise en place d’un tel embargo pourrait contribuer à une baisse du niveau de la violence tout en favorisant la recherche d’une solution politique.  

La déléguée des États-Unis a, pour sa part, fait observer que la famine qui frappait le pays n’était pas le résultat de la sécheresse, mais plutôt de l’égoïsme des dirigeants du pays. 

En revanche, le représentant de la Fédération de Russie a répété son opposition à de nouvelles sanctions du Conseil de sécurité, plaidant pour des mesures ciblées pour désarmer la population.  

Dans son rapport, le Secrétaire général écrit que « pour sortir le pays de l’abysse et de la famine », il faut centrer les énergies sur trois objectifs immédiats: réaliser la cessation immédiate des hostilités, restaurer le processus de paix et garantir un accès humanitaire illimité, y compris la liberté de mouvement de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) et d’une future force de protection régionale.

La présence d’une telle force a été invoquée par plusieurs orateurs, notamment dans un contexte sécuritaire marqué par des signes précurseurs de génocide. 

Le représentant du Soudan du Sud a, lui, rejeté ces allégations, faisant valoir que le conflit dans le pays était purement politique et s’expliquait par le fait que des groupes armés voulaient s’emparer du pouvoir par la force.  Mettre en avant des préoccupations ethniques ne vise qu’à justifier des sanctions contre les autorités du pays, a-t-il argué.

Il faut aider activement le Soudan du Sud à remédier à la famine, a lancé le représentant de la Chine, en écho à l’appel du Secrétaire général, tandis que son homologue du Japon a déclaré qu’en plus des 22 millions de dollars que son pays avait annoncés en janvier dernier, une somme additionnelle de six millions serait débloquée. 

Nombre de délégués ont invité les autorités à supprimer tous les obstacles qui empêchent l’aide d’atteindre les populations dans le besoin.  Le délégué du Soudan du Sud a promis des améliorations, comme celle de la création récente d’un guichet unique pour éliminer les obstacles bureaucratiques. 

Concernant les crimes atroces commis en toute impunité, le Secrétaire général de même que de nombreuses délégations ont appelé à la création d’un tribunal mixte pour le Soudan du Sud et d’un mécanisme pour la poursuite des auteurs d’atrocités et d’abus des droits de l’homme. 

* S/2017/224

RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD

Rapport du Secrétaire général sur le Soudan du Sud (période du 16 décembre 2016 au 1er mars 2017) (S/2017/224)

Texte de la déclaration du Président du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité exprime sa profonde inquiétude face à la situation qui règne au Soudan du Sud.  Il souligne une fois encore qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit, et condamne de nouveau la poursuite des combats dans tout le pays.  Il appelle de nouveau toutes les parties à respecter immédiatement le cessez-le-feu permanent, comme prévu dans l’Accord sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud (« l’Accord »), et leur rappelle que la mise en œuvre d’un cessez-le-feu est essentielle au succès de tout processus politique inclusif véritable.

Le Conseil est profondément alarmé par le fait que certaines régions du Soudan du Sud ont été déclarées en situation de famine, que de nombreux Sud-Soudanais souffrent d’insécurité alimentaire grave, et constate avec la plus grande préoccupation que les activités menées par toutes les parties au conflit perpétuent la crise humanitaire.  À cet égard, il condamne toutes activités de nature à mettre en péril le cessez-le-feu, toutes restrictions et attaques contre le personnel humanitaire et les locaux qu’ils occupent, ainsi que contre la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) pour ce qui est de l’acheminement de l’aide humanitaire, en particulier vers les zones touchées par la famine, et demande la cessation immédiate de telles activités et un accès immédiat et sans entrave de l’aide humanitaire à tous ceux qui en ont besoin.  Il demande en outre à toutes les parties de prendre les mesures voulues pour protéger les locaux et le personnel des Nations Unies et des missions étrangères, ainsi que d’autres civils au Soudan du Sud.  Il rend hommage aux pays de la région qui continuent de recevoir et d’accueillir des réfugiés.

Le Conseil condamne les exactions et violations des droits de l’homme et, le cas échéant, du droit international humanitaire qui lui ont été signalées, et exprime sa profonde inquiétude face aux nombreuses informations faisant état de violences sexuelles et sexistes, ainsi que du recrutement et de l’utilisation d’enfants en violation du droit international au Soudan du Sud.  Il souligne qu’il faut veiller d’urgence à ce que les auteurs de toutes exactions et violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire répondent de leurs actes.  Il demande l’application rapide du chapitre V de l’Accord, et compte sur toutes les parties concernées qui y sont mentionnées pour prendre toutes les mesures voulues en vue de la création du tribunal mixte pour le Soudan du Sud.  Il souligne en outre que la Commission vérité, réconciliation et apaisement a un rôle primordial à jouer dans la consolidation de la paix au Soudan du Sud, comme indiqué dans l’Accord.

Le Conseil se dit convaincu que la solution du conflit doit être politique, et réaffirme son appui aux efforts menés aux niveaux régional et international pour parvenir à une telle solution et faire progresser la mise en œuvre de l’Accord.  Il appuie la déclaration commune faite à la presse le 29 janvier 2017 par l’Union africaine (UA), l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et l’Organisation des Nations Unies, qui rend hommage à l’action du Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation, Festus Mogae, et encourage le Haut-Représentant de l’UA pour le Soudan du Sud, Alpha Oumar Konaré, à entreprendre une navette diplomatique active en vue d’assurer la mise en œuvre de l’Accord et le caractère inclusif du dialogue national en consultation étroite avec le Président de la Commission mixte, l’IGAD et l’ONU.  Il demande à toutes les parties de coopérer pleinement avec les Présidents Konaré et Mogae et l’Organisation des Nations Unies dans les efforts qu’ils déploient pour faire progresser la paix en Soudan du Sud.

Le Conseil note que, le 14 décembre 2016, le Président Kiir a annoncé le lancement d’un dialogue national.  Il note que l’application d’un cessez-le-feu immédiat par toutes les parties est essentielle à tout dialogue national crédible et rappelle les déclarations des Présidents Mogae et Konaré, selon lesquelles tout processus politique inclusif doit également être authentique, autonome, impartial et conduit par un facilitateur crédible accepté par le peuple sud-soudanais, et il doit venir en appoint à l’Accord.  Le Conseil convient que, pour améliorer et maintenir la sécurité dans le pays, un processus politique inclusif s’impose.  Il souligne que tout processus politique inclusif devrait associer des représentants de toutes les principales parties au conflit, assurer la participation pleine et effective des femmes, ainsi que des représentants de divers groupes d’intérêt et parties prenantes.

Le Conseil exprime sa profonde préoccupation devant l’incapacité des parties de respecter pleinement les engagements auxquels elles ont souscrit de mettre en œuvre l’Accord, et, à cet égard, il demande que les mesures suivantes soient prises:

1.    Respect immédiat du cessez-le-feu permanent par toutes les forces des parties au conflit et tous les autres groupes armés;

2.    Levée urgente des obstacles que rencontrent les agents humanitaires dans l’acheminement de l’aide humanitaire dans tout le Soudan du Sud et en particulier dans les zones touchées par la famine, notamment dans le cadre des réunions du Comité de haut niveau chargé de superviser les activités humanitaires et application urgente de ses décisions;

3.    Appui sans réserve de toutes les parties aux efforts que déploient l’ONU, l’UA et l’IGAD pour assurer la mise en œuvre de l’Accord et le caractère inclusif du dialogue national, conformément à la déclaration du 29 janvier 2017;

4.    Levée immédiate des obstacles aux opérations de la MINUSS et du Mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et du suivi de l’application des dispositions transitoires de sécurité, notamment des obstacles au déploiement de la force de protection régionale, cessation immédiate des attaques contre les personnels de la MINUSS et du Mécanisme;

5.    Cessation immédiate de tous les actes d’obstruction et d’agression perpétrés contre les agents humanitaires nationaux et internationaux qui s’emploient de toutes leurs forces à apporter une aide nécessaire pour la survie aux populations de tout le Soudan du Sud, ainsi que des attaques contre leurs installations.

Le Conseil a l’intention d’examiner la suite qui aura été donnée aux mesures susvisées le 30 avril 2017 au plus tard.

Le Conseil de sécurité se dit préoccupé que le Gouvernement du Soudan du Sud n’ait pas respecté tous les engagements qu’il a pris de mettre en œuvre les dispositions du communiqué conjoint du 4 septembre 2016, et il l’invite de nouveau à le tenir informé de l’application dudit communiqué.

Le Conseil de sécurité rappelle avec insistance que les activités qui font peser une menace sur la paix, la sécurité ou la stabilité du Soudan du Sud peuvent faire l’objet de sanctions en application des résolutions 2206 (2015) et 2290 (2016).  Le Conseil réaffirme son appui indéfectible au peuple du Soudan du Sud.

Déclarations

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a commencé par présenter ses sincères condoléances au peuple et au Gouvernement britanniques après l’attentat terroriste perpétré hier à Londres.

Le conflit au Soudan du Sud continue de générer de grandes souffrances, a déclaré le Secrétaire général.

L’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et l’opposition mènent des opérations militaires dans plusieurs zones, avec des conséquences dévastatrices pour les civils, qui sont confrontés à une violence apparemment sans fin et forcés de fuir leur foyer, a-t-il expliqué.

La situation est particulièrement alarmante dans la région du Haut-Nil, tandis que l’Équatoria occidental reste le théâtre d’opérations entre l’APLS et des groupes rebelles.

Les civils font l’objet d’attaques épouvantables, comme des viols et le recrutement d’enfants.  Sur 1,9 million de personnes déplacées, plus de 220 000 se sont réfugiées dans les sites de protection de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), a poursuivi le Secrétaire général.  Environ 1,6 million de personnes ont cherché refuge dans les pays voisins.

« La crise humanitaire s’aggrave », a insisté M. Guterres.  La famine affecte 100 000 personnes et menace un million de personnes.  Quelque 5,5 millions de personnes risquent d’être gravement touchées par l’insécurité alimentaire d’ici à cet été.  En outre, 7,5 millions de personnes à travers le pays, soit près des deux tiers de la population, ont besoin d’une aide humanitaire.

« Malgré le cri d’alarme lancé par les Nations Unies et la communauté internationale, le Gouvernement n’a pas encore exprimé de préoccupation véritable ni pris de mesures réelles pour faire face à la situation difficile de son peuple », a déploré le Secrétaire général.

Le processus de paix reste au point mort, a-t-il poursuivi.  Il a jugé que les déclarations du Président Salva Kiir sur son intention d’organiser un dialogue national n’étaient « pas convaincantes » dans le contexte des hostilités continues, de l’absence de consultation avec les principales parties prenantes, de la limitation systématique des libertés politiques de base et des restrictions de l’accès humanitaire.

M. Guterres a indiqué que le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous, était rentré hier d’une visite au Soudan du Sud.  M. Ladsous a rencontré le Président, le Vice-Président et les membres du Cabinet, et souligné l’importance d’un processus politique inclusif pour assurer le bien-être de la population.

« Il ne peut y avoir de dialogue crédible sous la menace d’un revolver », a résumé le Secrétaire général.

L’ONU travaille avec l’Union africaine et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) pour relancer le processus politique et résoudre les différends intercommunautaires de longue date au Soudan du Sud et dans la sous-région, a-t-il assuré.

La MINUSS et l’équipe de pays des Nations Unies appuient les dialogues intercommunaux et les conférences de paix locales, a précisé M. Guterres.  « Nous continuons aussi d’œuvrer pour le déploiement d’une force de protection régionale, malgré les obstacles continus imposés par le Gouvernement du Soudan du Sud », a-t-il ajouté.

Toutefois, a-t-il averti, aucune force, aucun effort diplomatique, ne peuvent remplacer le manque de volonté politique de la part de ceux qui gouvernent le pays.  Il est largement admis que les dirigeants sud-soudanais doivent faire plus pour montrer leur engagement vis-à-vis du bien-être de la population, qui compte parmi les plus pauvres du monde.

Recommandant davantage de pression, le Secrétaire général a souhaité que le Conseil de sécurité parle « d’une seule voix ».  « Ne sous-estimons pas les dangers de la trajectoire du Soudan du Sud », a-t-il lancé.  Évoquant les crimes atroces commis avec impunité, il a demandé des mécanismes de responsabilisation crédibles.

Le Secrétaire général a conclu que « pour sortir le pays de l’abysse et de la famine », il fallait centrer les énergies sur trois objectifs immédiats: réaliser la cessation immédiate des hostilités, restaurer le processus de paix et garantir un accès humanitaire illimité, y compris la liberté de mouvement de la MINUSS et d’une future force de protection régionale.  

M. FESTUS MOGAE, Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation, a indiqué que le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan (M/APLS), le Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition (M/APLS dans l’opposition), ainsi que d’autres nouveaux groupes armés étaient engagés dans la destruction des vies et des communautés, en violation totale du cessez-le-feu. 

Il s’est alarmé du fait que la situation fût en train de devenir hors de contrôle, invitant la communauté internationale à condamner, maintenant, et dans les termes les plus forts, la violence, les tueries, les abus des droits de l’homme et la destruction des habitations. 

Comment faire cesser les hostilités, a demandé le Président de la Commission mixte de suivi et d’évaluation, qui a relevé que la situation de famine actuelle était le résultat direct de la violence armée perpétrée par les parties signataires de l’Accord de paix.  Il a expliqué que l’insécurité et la violence armée étaient le résultat direct de la réalité du caractère non inclusif du processus de paix. 

Il a donc estimé que ce n’est que lorsque toutes les communautés du Soudan du Sud verront que leurs intérêts et leurs préoccupations sont pris en compte que la paix pourra revenir dans le pays, et que les gens reprendront une vie normale.

Il ne peut y avoir de solution politique au Soudan du Sud, a martelé M. Mogae en ajoutant qu’un régime politique ou militaire ne saurait être imposé à l’une ou à l’autre des parties.  Par conséquent, pour parvenir à une paix durable, les dirigeants du pays se doivent d’écouter, de s’accommoder et d’être ouverts au compromis. 

En attendant, il a souhaité que la communauté internationale mette en place toutes les mesures pratiques possibles afin d’alléger les souffrances de millions de gens, notamment les femmes qui ont vécu les pires injustices. 

Il a en outre noté que depuis la scission du M/APLS dans l’opposition en juillet 2016, deux factions ont vu le jour, l’une loyale à M. Riek Machar, qui se bat toujours et a été exclue de toutes les institutions de l’Accord de paix, et l’autre fidèle au général Taban Deng Gai, qui coopère avec le Gouvernement. 

Le Président de la Commission a déclaré avoir discuté avec le Président du Soudan du Sud, M. Salva Kiir, à qui il a dit que le dialogue national devait être authentique, autonome et impartial afin d’être crédible.  Il a également réaffirmé son soutien à l’Accord de paix, seul cadre viable pouvant mener au retour de la paix au Soudan du Sud. 

Précisément, il a noté que la mise en œuvre de l’Accord restait modeste.  Il a par exemple relevé qu’hormis l’établissement du Comité technique pour le processus national consultatif d’établissement de la Commission vérité, réconciliation et guérison, aucun autre mécanisme prévu par le chapitre V de l’Accord de paix n’avait été mis en place.  Ce qui est aussi le cas du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud, que la Commission de l’Union africaine est censée mettre sur pied.

Le Président de la Commission a en outre demandé le déploiement immédiat de la force de protection régionale, ainsi que l’inclusion de toutes les parties au processus de paix.  Il a invité le Gouvernement provisoire d’union nationale à mener un dialogue nationale inclusif et impartial. 

M. Mogae a enfin appelé à l’amélioration des conditions de fourniture de l’aide humanitaire et à l’établissement du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud et d’un mécanisme pour la poursuite des auteurs d’atrocités et d’abus des droits de l’homme. 

Mme BETTY SUNDAY, Coordonnatrice du Forum mensuel des femmes sur le processus de paix, représentante de la société civile, a expliqué que son organisation, fondée en 2014, comprenait des femmes de tous les horizons de la société sud-soudanaise qui plaident pour leur inclusion dans le processus de paix. 

Les menaces sécuritaires auxquelles les femmes font face sont extrêmes, a-t-elle expliqué en évoquant des viols persistants et d’autres violences.  « Nous ne pouvons pas nous déplacer librement pour aller chercher de l’eau ou de la nourriture », a-t-elle déploré.

Si l’Accord de paix était appliqué, les femmes pourraient vivre leur vie sans crainte; leurs enfants pourraient aller à l’école et elles pourraient s’occuper de leurs jardins.  « On ne peut pas laisser mourir le processus de paix », a insisté Mme Sunday. 

Toutes les parties au Soudan du Sud et la communauté internationale, y compris le Conseil de sécurité, doivent faire preuve de volonté politique.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité et le Gouvernement à coopérer pour trouver une solution durable à la crise politique dans son pays.  En particulier, elle leur a demandé de mettre l’accent sur la question de la violence sexuelle et sexiste.

Préoccupée par la situation humanitaire, Mme Sunday a encore prié le Conseil de fournir une aide humanitaire d’urgence à ceux qui sont dans le besoin et le Gouvernement de tout faire pour permettre l’accès de cette aide et la protection des travailleurs humanitaires.

Enfin, elle a souhaité que le nouveau mandat de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) lui permette d’appuyer le Gouvernement dans la protection des droits de l’homme, l’état de droit et la professionnalisation des services de police.

« Alors que nous sommes réunis ici en toute sécurité, des villages au Soudan du Sud sont vandalisés et pillés, et des milliers de femmes et d’enfants sont contraints de quitter leur foyer », a rappelé M. BORIS JOHNSON, Ministre des affaires étrangères du Royaume-Uni.  « La souffrance au Soudan du Sud ne cesse de s’accroître. »

La première famine dans le monde depuis six ans a été déclarée, a poursuivi M. Johnson.  Or la nature et la géographie ne peuvent pas expliquer cette famine; seule la folie de l’être humain peut être accusée, a-t-il souligné. 

D’après lui, aucun membre du Conseil de sécurité ne peut échapper à une réponse face à cette situation.  Le Conseil doit redoubler d’efforts et faire montre d’unité quant à la marche à suivre.  Il faut redynamiser l’Accord de paix de 2015 pour entamer la réconciliation et la guérison.

Toutefois, il ne saurait y avoir de vrai dialogue tant que les combats se poursuivent au Soudan du Sud, a déclaré le Ministre.  Le Président Salva Kiir est tenu de prendre les premières mesures et les autres parties doivent lui emboîter le pas, de manière impartiale et de façon à ce que tous les Sud-Soudanais soient représentés.

M. Johnson a salué tous ceux, dont le Secrétaire général de l’ONU, qui sont déterminés à aller de l’avant.  En tant que Conseil de sécurité, a-t-il insisté, nous devons leur montrer notre soutien.  En revanche, ceux qui sont coupables d’atrocités devront être traduits en justice, a-t-il ajouté. 

Soulignant qu’il fallait autoriser l’acheminement de l’aide humanitaire dans tout le pays, notamment dans l’État de l’Unité, il a lancé à l’intention du Gouvernement: « refuser de la nourriture à des personnes qui meurent de faim est inacceptable »!

Il faut dire au Gouvernement ce que nous attendons de lui et décider que le Conseil de sécurité envisagera d’autres mesures, y compris un embargo sur les armes et des sanctions ciblées, si les efforts n’aboutissent pas, a averti M. Johnson.  

Le Royaume-Uni, a-t-il rappelé, est l’un des garants de l’Accord de paix de 2015 et le deuxième donateur bilatéral au Soudan du Sud.  Les Casques bleus britanniques aideront la MINUSS à s’acquitter de ses tâches, dont la protection des civils, a-t-il assuré.

Le Ministre a ajouté qu’il fallait prendre des mesures collectives pour aider les pays de la région qui accueillent plus d’un million de réfugiés.  « Nous sommes tenus d’agir, nous ne pouvons pas sortir de cette salle en pensant que le travail est fait », a-t-il conclu.  Il a recommandé d’exercer des pressions à tous les niveaux sur les dirigeants du Soudan du Sud et sur l’opposition.

M. SAMEH SHOUKRY, Ministre des affaires étrangères de l’Égypte, a dit que la crise sud-soudanaise pourrait avoir des répercussions sur les pays de la région si elle n’était pas endiguée de manière durable.  Il a appelé à la mise en œuvre véritable de l’Accord de paix qui contient tous les ingrédients pour une paix durable. 

M. Shoukhry a estimé que l’appel au dialogue national du Président Salva Kiir pouvait être capitalisé, invitant ainsi la communauté internationale à apporter un soutien politique à cette initiative.  Il a indiqué que l’Égypte était prête à assurer la facilitation de ce dialogue national. 

Le Ministre a aussi plaidé pour mettre un terme aux souffrances des civils en éliminant les obstacles à l’aide humanitaire.  Il a enfin appelé à un règlement global du conflit au Soudan du Sud, mettant en garde contre les risques de l’effondrement de l’État sud-soudanais, lequel conduirait à l’essor de groupes terroristes dans la région.

Mme MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a déclaré que le plus urgent, c’était de mettre fin aux combats et de protéger la population.  La responsabilité première à cet égard impute au Gouvernement et aux parties au conflit, la communauté internationale devant, par l’entremise de l’ONU, de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), travailler en étroite coopération pour trouver une solution politique au conflit. 

L’Accord sur le règlement du conflit d’août 2015 doit rester la pierre angulaire de nos efforts, et sa mise en œuvre doit s’accompagner d’un processus politique inclusif, a poursuivi la Ministre.  Dans ce contexte, a relevé Mme Wallström, la proposition de lancer un dialogue national pourrait offrir une possibilité d’avancer.

Toutefois, la légitimité et l’efficacité de ce dialogue pourront être garanties seulement si des représentants de tous les belligérants et des autres parties prenantes de la société sud-soudanaise peuvent y prendre part. 

« Ces dernières années, la Suède, en coopération avec ONU-Femmes, a travaillé avec le Caucus des femmes parlementaires du Soudan du Sud », a indiqué la Ministre, en soulignant l’importance de représenter les femmes de la société civile et de formuler de nouvelles idées à l’appui du processus de paix. 

La chef de la diplomatie suédoise en estimé en conclusion que le projet de cour hybride pour le Soudan du Sud constituerait un instrument de premier plan pour lutter contre l’impunité.

Mme HIRUT ZEMENE, Ministre d’État des affaires étrangères de l’Éthiopie, s’est dite extrêmement préoccupée par les combats qui se poursuivraient entre le Gouvernement et les forces de l’opposition dans plusieurs zones du pays.  Elle a appelé à une revitalisation du processus de paix et estimé que l’initiative sur le dialogue national du Président Salva Kiir pouvait faciliter la concrétisation de cet objectif.  La poursuite de l’engagement de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), de l’Union africaine et des Nations Unies pour une paix durable au Soudan du Sud est d’une impérieuse nécessité, a affirmé la Ministre.

Elle a exhorté le Conseil à appuyer ces efforts et à envoyer un message fort et uni à toutes les parties sud-soudanaises.  « Si l’unité prévaut au sein de ce Conseil, nous pensons que les progrès vers la paix ne sont pas impossibles. »

Mme Zemene a noté les progrès, certes lents, enregistrés dans le déploiement de la force de protection régionale, avant d’appeler le Gouvernement à le faciliter.  L’IGAD a réaffirmé son soutien à une telle force, a poursuivi la Ministre.  Elle a précisé que les préparatifs étaient en bonne voie pour le déploiement d’un contingent éthiopien en son sein.

« Nous espérons que les parties sud-soudanaises se montreront à la hauteur des enjeux et œuvreront à la restauration de la paix par le biais du dialogue et de la réconciliation », a conclu Mme Zemene.

« Le temps presse », a dit M. VINCENZO AMENDOLA, Secrétaire général adjoint aux affaires étrangères et à la coopération internationale de l’Italie, en appuyant le plan d’action du Secrétaire général.  Préoccupé par la situation sécuritaire, politique et humanitaire au Soudan du Sud, et par les violations des droits de l’homme, il a estimé que le Conseil de sécurité devait mener une stratégie conforme à la déclaration présidentielle publiée aujourd’hui. 

Pour un dialogue crédible et efficace au Soudan du Sud, a averti le Ministre, il faut remplir deux conditions préalables: un cessez-le-feu et un processus inclusif.  Pour mettre un terme au conflit et remédier à la crise humanitaire, il est bon de renforcer l’engagement du Conseil avec l’Union africaine et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). 

Demandant des garanties de sécurité sur le terrain, il a appelé les parties à coopérer de manière constructive avec l’ONU et à s’abstenir de faire obstacle à ses activités.

L’Accord de paix doit être appliqué, a répété M. Amendola, notamment en ce qui concerne le tribunal hybride pour le processus de réconciliation.  L’Italie continue de fournir un appui humanitaire à la population affectée par cette crise qui, a-t-il rappelé, est avant tout provoquée par l’homme.  Il est temps d’agir de façon conjointe, a-t-il conclu.     

M. YERLIK ALI (Kazakhstan) a souligné l’importance de renforcer les capacités du Gouvernement du Soudan du Sud à relever les défis politiques, économiques et humanitaires.  Le représentant a ensuite mis en exergue l’importance du travail de la Commission mixte de suivi et d’évaluation dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Pour que le travail de la Commission soit plus efficace, toutes les parties du Soudan du Sud devraient mettre en œuvre leurs engagements.

« Nous devons chercher tous les moyens possibles pour soutenir la diplomatie de la navette du Haut-Représentant de l’Union africaine dans la promotion du dialogue et de la mise en œuvre de l’Accord », a ajouté M. Ali.  L’objectif de mettre fin au conflit par des moyens politiques et la médiation sera renforcé par une étroite collaboration entre l’Union africaine, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), les Nations Unies et d’autres partenaires.

La famine grave dans certaines régions du Soudan du Sud exige l’attention urgente de la communauté internationale pour atténuer les souffrances humaines.  Les effets de la famine peuvent être sensiblement atténués si le Gouvernement du Soudan du Sud coopère positivement avec l’ONU et les acteurs humanitaires en facilitant l’accès aux zones de conflit et en fournissant la libre circulation à la MINUSS. 

« Nous sommes également préoccupés par le recrutement et l’utilisation d’enfants en violation du droit international et par la violence sexuelle et sexiste, qui ont tous deux atteint des proportions alarmantes », a dit le représentant. 

Les recommandations de la Commission d’enquête de l’Union africaine de mettre en place des mécanismes de justice transitionnelle, y compris un tribunal mixte devraient être rapidement mises en œuvre avec l’assistance technique du Secrétariat de l’ONU. 

Le mandat de la MINUSS a été entravé depuis plusieurs mois en raison de l’imposition de nouvelles conditions d’immigration et cette procédure doit être réglée.  De même, le déploiement rapide de la force de protection régionale est essentiel pour renforcer la sécurité globale dans le pays. 

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a accusé les dirigeants sud-soudanais d’avoir placé leurs intérêts au-dessus de ceux du peuple.  Elle a rappelé que des sanctions ciblées avaient été envisagées par le Conseil de sécurité, mais que certains de ses membres s’y étaient malheureusement opposés, estimant qu’une telle mesure serait contre-productive. 

La famine qui frappe le pays n’est pas le résultat de la sécheresse, a-t-elle argué, affirmant qu’elle résultait plutôt de l’égoïsme des dirigeants du pays.  Elle a même parlé de la tactique gouvernementale tendant à affamer le peuple, assurant aussi que ce n’est pas la première fois que les forces gouvernementales utilisent la technique de la terre brûlée pour détruire les biens des populations. 

La représentante a invité les parties en conflit à cesser les hostilités et à s’engager dans un dialogue franc.  Elle a aussi plaidé pour un processus politique inclusif, précisant que le dialogue devait venir en complément à la mise en œuvre de l’Accord de paix, lequel stipule, entre autres, un partage du pouvoir.

Elle a par ailleurs émis le vœu de voir les efforts diplomatiques du Haut-Représentant de l’Union africaine pour le Soudan du Sud, M. Alpha Omar Konaré, et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) couronnés de succès.  Elle a déploré les retards pris dans le déploiement de la force de protection régionale. 

Elle a indiqué qu’un embargo sur les armes et des sanctions ciblées pourraient permettre de faire baisser le niveau de la violence, notamment en ciblant ceux qui entravent l’action humanitaire et ciblent les civils. 

Elle a enfin plaidé pour l’établissement rapide du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud.

M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a indiqué que la priorité devait être l’arrêt des hostilités et l’accès aux populations vulnérables.  Cet arrêt des hostilités doit s’accompagner de la cessation immédiate des entraves apportées à la MINUSS et aux acteurs humanitaires, a-t-il dit.  Il a invité le Conseil à se tenir prêt à adopter des sanctions contre les responsables d’atteintes à l’encontre des Casques bleus et des acteurs humanitaires.  

S’agissant de l’Accord de paix d’août 2015, « feuille de route à la fois globale et détaillée », il a souhaité que le Conseil rappelle ses attentes concernant la mise en œuvre des mesures prévues par cet Accord de paix, en particulier dans le domaine sécuritaire.  Tout dialogue national serait vain s’il affaiblissait la mise en œuvre de l’Accord de paix et s’il n’était pas pleinement inclusif, a déclaré M. Delattre.

Il a estimé que la mise en place d’un embargo sur les armes, en contribuant à une baisse du niveau de la violence, favoriserait la recherche d’une solution politique.

Enfin, face aux insuffisances actuelles de la lutte contre l’impunité au Soudan du Sud, le représentant de la France a rappelé aux auteurs de crimes qu’ils devront rendre des comptes.  « Nous pouvons participer à la prévention de tels crimes en envisageant la mise sous sanctions des individus qui les commettent ou les ordonnent », a conclu M. Delattre.

M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie), encouragé par le leadership du Secrétaire général, a jugé indispensable l’unité du Conseil de sécurité à l’appui d’une solution politique, « la seule possible » pour résoudre le conflit dramatique au Soudan du Sud.  À son tour, il a appuyé les trois objectifs prioritaires suivants: cessation des hostilités, reprise du processus de paix et accès humanitaire sans entraves.  Il s’est référé à la déclaration de presse conjointe de l’ONU, de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) en appui au dialogue national faite en janvier dernier. 

Le représentant a appelé au respect de l’accord de cessez-le-feu entre les parties, la situation sécuritaire affectant tout particulièrement les femmes et les enfants.  Il s’est dit préoccupé par la situation des droits de l’homme, la violence sexuelle et le recrutement des enfants.  Il a également souhaité que l’Union africaine mette en place un tribunal mixte impartial pour le Soudan du Sud et considéré que la force de protection régionale pourrait contribuer à freiner l’insécurité.

Face à la famine localisée dans plusieurs parties du pays et à l’insécurité alimentaire, la communauté internationale doit prendre des mesures immédiates conjointes, a insisté le représentant.  Les Sud-Soudanais ont un rôle à jouer dans la résolution du conflit, a-t-il rappelé, en demandant le respect des principes de la Chatre des Nations Unies. 

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie), préoccupé par la situation humanitaire catastrophique dans le pays, s’est félicité de la déclaration présidentielle.  Il a noté « l’aide apportée par Khartoum » au Soudan du Sud.  Dans certaines régions, a-t-il fait valoir, la faim n’est pas provoquée uniquement par des conditions sécuritaires, mais aussi « par des conditions météorologiques négatives, par des problèmes de commandement et de contrôle et par la faible discipline dans les rangs des forces gouvernementales et de l’opposition ».

Le représentant a salué la tenue d’un dialogue national que la Russie appuie activement.  Il a escompté que l’amnistie que prévoit ce dialogue permettra de réaliser des progrès dans le processus politique.  Certes il faut respecter un régime de cessez-le-feu, a-t-il dit, mais « il n’est pas juste de faire incomber toutes les violences au gouvernement provisoire ».

D’après lui, l’augmentation des tensions ethniques est provoquée par des groupes criminels.  « On ne peut pas parler d’une politique systématique et délibérée des autorités », a-t-il ajouté.

Le représentant a répété son opposition à de nouvelles sanctions du Conseil de sécurité.  Selon lui, il ne faut pas un embargo sur les armes mais des mesures ciblées pour désarmer la population.  

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a déclaré que pratiquement toutes les peurs concernant le Soudan du Sud se sont concrétisées, estimant que le pays était au bord du chaos.  « Des millions de personnes sont déplacées, l’économie est en lambeaux, la faim et la pauvreté sont omniprésentes », a constaté le représentant, en dénonçant la solution militaire dans laquelle se sont engagées les parties au conflit.

« Rien que dans le comté de Leer, dans l’État de l’Unité, l’un des épicentres de la famine, plus de 100 000 personnes sont menacées de famine.  Les villages ont été désertés.  Des hommes armés des deux camps incendient les produits de la récolte et chassent les agriculteurs de chez eux.  Les gens se cachent dans les marais.  Ils mangent des racines de nénuphars et occasionnellement les poissons qu’ils parviennent à attraper.  Pas d’écoles.  Pas de services de santé.  Rien d’autre que la peur de perdre la seule chose qu’il leur reste –leur vie. »

Pour mettre fin aux combats, le délégué a estimé qu’il fallait imposer un embargo sur les armes et des sanctions ciblées.  Ce n’est pas la panacée, a-t-il dit, mais de telles mesures contribueront à réduire la capacité des parties à continuer d’alimenter le conflit. 

Si elle a salué l’initiative du Gouvernement sud-soudanais de lancer un dialogue national visant à promouvoir la réconciliation et l’« harmonie intercommunautaire » entre tous les composantes de la société, l’Ukraine a cependant souligné la nécessité de mettre d’abord fin aux hostilités.

M. GORGUI CISS (Sénégal) a appelé à agir dans l’urgence afin d’empêcher que les populations déjà exposées aux maladies ne succombassent en masse à la faim.  Seule une solution politique, a-t-il argué, permettra de remédier de façon durable à cette situation humanitaire catastrophique.  Il a de ce fait invité les différentes parties au conflit à reprendre le dialogue et à mettre en œuvre l’Accord sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud. 

Il a aussi estimé que le processus de dialogue national, lancé en décembre dernier par le Président Salva Kiir, s’il s’avère inclusif, libre et transparent, pourrait aider à créer les conditions d’un retour de la paix dans le pays. 

Le délégué a en outre déploré et condamné les incursions armées et les menaces contre le personnel humanitaire et la MINUSS, ainsi que les violations de l’accord sur le statut des forces. 

Il a enfin appelé à la création du Tribunal mixte pour le Soudan du Sud, afin de juger les auteurs des crimes et autres exactions sur les populations civiles, et a encouragé les autorités sud-soudanaises à prendre toutes les mesures nécessaires pour le déploiement immédiat de la force de protection régionale.

M. KORO BESSHO (Japon) a déclaré qu’en plus des 22 millions de dollars que son pays avait annoncés en janvier dernier en faveur du Soudan du Sud, une somme additionnelle de six millions serait débloquée pour répondre à l’appel lancé par le Secrétaire général de l’ONU pour faire face à la famine dans le pays. 

Il a averti que pour que cette aide soit efficace, il faudrait qu’elle atteigne ceux qui sont dans le besoin.  Il a de ce fait déploré les nombreuses entraves à l’action humanitaire au Soudan du Sud, appelant le Président Salva Kiir à prendre des mesures pour y remédier.  

Le représentant a par ailleurs souhaité que le dialogue national, annoncé par le Président, soit véritablement inclusif et transparent.  Il a aussi annoncé que le Japon envisageait de fournir un appui aux initiatives de paix venant de la base par le biais du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). 

Il a enfin appelé à des progrès dans le déploiement de la force de protection régionale au Soudan du Sud.

La situation au Soudan du Sud est pire que jamais, a reconnu M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) en évoquant la crise politique, sécuritaire, humanitaire et économique que traverse le pays.  Il a condamné les affrontements continus et a répété qu’il ne pouvait pas y avoir de solution militaire au conflit.  Il faut par conséquent avancer vers une solution politique, à travers un dialogue véritable, transparent et inclusif, dont l’objectif principal doit être la pleine mise en œuvre de l’Accord de paix d’août 2015.

S’agissant de la situation humanitaire, le représentant a jugé « inacceptable » l’obstruction du travail de la MINUSS et exhorté le Gouvernement du Soudan du Sud à collaborer pleinement à la mise en œuvre de la résolution 2327 (2016), y compris le déploiement de la force de protection régionale.  

Se référant à la déclaration présidentielle adoptée en début de séance, il a appelé les membres du Conseil à rester attentifs et à appliquer les mesures envisagées.

Jugeant la situation au Soudan du Sud « compliquée », M. WU HAITO (Chine) a relevé que le Président avait présenté une initiative visant à promouvoir un dialogue national.

Il a espéré que la communauté internationale fournirait à ce pays une assistance dans quatre domaines: promouvoir un règlement politique et la participation de tous au dialogue; renforcer le rôle des organisations régionales, car l’ONU doit utiliser les avantages particuliers de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD); renforcer les capacités de la MINUSS afin qu’elle applique son mandat, notamment en ce qui concerne l’application de l’Accord de paix, la protection des civils et l’accès humanitaire; aider activement le Soudan du Sud à remédier à la famine, en encourageant toutes les parties à agir dans l’intérêt de la population et à faciliter l’acheminement de l’aide, et en renforçant les capacités du Gouvernement pour le développement socioéconomique.

Le représentant a expliqué que le Gouvernement chinois avait participé activement au processus de paix au Soudan du Sud.

M. JOSEPH MOUM MAJAK NGOR MALOK (Soudan du Sud) a dit que son gouvernement n’était pas informé de quelque réserve que ce soit dans la mise en œuvre du chapitre V de l’Accord de paix, hormis sur les questions concernant le manque de fonds.  Il a assuré que les autorités de son pays s’étaient engagées à mettre en œuvre l’Accord, comme le démontre les nombreuses institutions créées conformément aux dispositions du texte. 

Le Gouvernement provisoire d’union nationale a également mis en place un plan de réconciliation nationale et invite toutes les parties prenantes à rejoindre cet élan.  Il a précisé que la mise en œuvre de l’Accord devrait s’appuyer sur des structures et non sur des individus. 

Il a en outre dit que le Gouvernement avait accepté le déploiement de la force de protection régionale sans aucune condition préalable, ayant même offert un terrain pour son installation.  Il a aussi créé un guichet unique pour éliminer les obstacles bureaucratiques liés aux activités humanitaires.  

Il a estimé qu’ayant toujours collaboré avec l’ONU et les instances régionales, le Soudan du Sud ne s’attendait pas à de tels rapports pour le moins négatifs le concernant.  Il a rejeté les insinuations de génocide, faisant valoir que le conflit dans le pays était purement politique et s’expliquait par le fait que des groupes armés voulaient s’emparer du pouvoir par la force.  Mettre en avant des préoccupations ethniques ne vise qu’à justifier des sanctions contre les autorités du pays, a-t-il argué. 

Il a ensuite déclaré que son gouvernement rejetait catégoriquement les informations faisant état du ciblage des civils par les forces gouvernementales, ou encore l’utilisation du viol comme tactique de guerre.

Le représentant a lancé un appel à l’ONU et à la communauté internationale afin qu’elles soutiennent les efforts du Gouvernement visant à mettre en œuvre l’Accord.  Le Gouvernement est prêt à prendre sa part, mais la question est de savoir comment gérer les groupes armés.  Le représentant a ainsi évoqué de nouveaux groupes armés rebelles qui n’avaient pas d’affiliation politique et dont l’action ne visait que la déstabilisation du Gouvernement. 

Il a aussi promis que son gouvernement n’épargnerait aucun effort pour faire face à la famine qui sévit dans le pays.  Les sanctions ciblées ne feront qu’aggraver la situation dans le pays, a-t-il expliqué.

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