Sixième Commission: les sanctions imposées par le Conseil de sécurité doivent reposer sur des objectifs clairs et un calendrier précis
La Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, a examiné cet après-midi le rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation sur fond de divisions quant à la légitimité des sanctions imposées par le Conseil de sécurité et la répartition des pouvoirs entre les organes.
En début de séance, le Président du Comité spécial, M. Ruslan Varankov, a présenté le rapport annuel, fruit des réunions tenues par le Comité en février et mars de cette année, à New York.
Rappelant que le maintien de la paix et de la sécurité internationales est l’une des responsabilités fondamentales des Nations Unies, de nombreux pays ont fait part de leurs préoccupations devant le caractère jugé arbitraire des régimes de sanctions adoptés par le Conseil de sécurité.
Pour le représentant de l’Iran, s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, les sanctions ciblant un pays ne peuvent être imposées qu’en cas de menace ou d’agression, et non de façon préventive ni en violation du droit international. Selon lui, elles devraient être assorties d’objectifs clairs, pour une durée précise, et elles devraient être levées dès que ces objectifs sont atteints. En revanche, l’Union européenne a estimé que les sanctions ciblées représentent un outil vital afin d’assurer le maintien et la restauration de la paix et de la sécurité internationales.
« L’application des sanctions soulève des questions éthiques », a insisté l’Iran, ajoutant qu’elles devaient éviter de toucher les populations civiles ou des États tiers et d’entraver l’acheminement de l’aide humanitaire. Pour sa part, le représentant de l’Union européenne a rappelé que l’Assemblée générale avait, par la résolution A/71/146, endossé la recommandation du Comité spécial sur la mise en œuvre des dispositions de la Charte concernant l’aide aux États tiers touchés par les sanctions.
À cet égard, la décision de procéder à un examen biennal de la question des effets des sanctions sur les pays tiers reflète, selon les États-Unis, un meilleur, bien qu’imparfait, équilibre entre ceux qui pensent que la question n’est plus du ressort du Comité, et ceux qui, à l’inverse, estiment qu’elle doit continuer de figurer à son ordre du jour.
Par la voix de l’Algérie, le Groupe des États d’Afrique, suivi par de nombreuses délégations, a dit que le Conseil de sécurité doit devenir plus représentatif et s’attaquer au problème de ses méthodes de travail. « Le maintien du statu quo ne contribue qu’à éroder encore davantage sa crédibilité et sa légitimité, ce qui entraînera un affaiblissement de l’Organisation », a-t-il déploré.
Dénonçant par ailleurs « l’empiètement constant » du Conseil de sécurité sur les prérogatives de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC), le Mouvement des pays non alignés a plaidé pour la démocratisation des organes des Nations Unies et la promotion et le respect des décisions de l’Assemblée générale, qui demeure le principal organe démocratique visant à promouvoir les buts et principes de la Charte.
Cuba a appelé à cet effet à renforcer le rôle de premier plan de l’Assemblée, en sa qualité de « principal organe normatif, de délibération, d’adoption de politiques et de représentation des Nations Unies ».
S’agissant du règlement pacifique des différends, de nombreux membres de la Commission ont exprimé leur appui à la décision du Comité spécial, sur la proposition du Mouvement des pays non alignés, de tenir un débat thématique annuel à ce sujet. Pour les Philippines, où a été signée en 1982 la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux, ces rencontres contribueront à renforcer l’activité de l’ONU en la matière.
Par ailleurs, les membres de la Commission ont approuvé à l’unanimité la proposition du Ghana portant sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends, ce qui pourrait combler des lacunes dans les activités de l’Organisation, ont estimé les Philippines et le Bélarus.
Se penchant sur les méthodes de travail du Comité spécial, plusieurs délégations, dont celles de l’Union européenne et des États-Unis, ont souligné que certaines questions font l’objet de discussions depuis des années sans que des progrès notables aient été enregistrés, ou sont déjà traitées par d’autres organes de l’ONU.
La Sixième Commission terminera son examen du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement de l’Organisation demain, mercredi 11 octobre, à partir de 10 heures, avant d’aborder le thème de la portée et de l’application du principe de compétence universelle.
RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES ET DU RAFFERMISSEMENT DU RÔLE DE L’ORGANISATION (A/72/33)
M. RUSLAN VARANKOV (Bélarus), Président du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, a présenté le rapport du Comité spécial, qui s’est réuni du 21 février au 1er mars 2017 à New York. Le Comité spécial a tenu compte des recommandations adoptées au cours de sa session de 2016.
M. Varankov a décrit les principales sections du rapport, portant notamment, au chapitre II, sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, y compris l’adoption et l’application des sanctions imposées par l’ONU ainsi que l’examen de la version révisée de la proposition faite par la Libye aux fins de renforcement du rôle de l’ONU dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Le chapitre III porte sur le règlement pacifique des différends, notamment la proposition de la Fédération de Russie concernant la mise en ligne par le Secrétariat d’un site Web sur le règlement pacifique des différends et la mise à jour du Manuel sur le règlement pacifique des différends entre États. La question de la mise à jour du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies ainsi que le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité est également traitée au chapitre IV.
Le rapport, a expliqué M. Varankov, fait aussi état de la recommandation concernant la tenue d’un débat thématique annuel portant sur le règlement pacifique des différends. Enfin, au chapitre V, il présente les méthodes de travail du Comité spécial et la définition de nouveaux sujets. La proposition révisée du Mouvement des pays non alignés concernant le règlement pacifique des différends et son incidence sur la paix figure en annexe.
Mme YVETTE BLANCO, Chef du Service de la recherche sur la pratique du Conseil de sécurité et sur la Charte des Nations Unies, s’exprimant sur le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, a souligné que les suppléments du répertoire portant sur la période 1993 à 2013 sont disponibles sur le site Internet du Répertoire. Elle a invité les délégués à explorer le Répertoire qui est disponible dans toutes les langues officielles. Les moteurs de recherche ont été améliorés et incluent à présent des synonymes et des recherches phonétiques. Le site Internet offre une vaste source d’information, y compris des graphiques et des statistiques sur les pratiques du Conseil de sécurité, et sur les mandats confiés aux opérations de maintien de la paix et les missions politiques spéciales, a-t-elle précisé.
« Nous allons faire en sorte d’être ouverts à un plus large public », a-t-elle promis, mais les progrès à venir dépendront du versement de contributions volontaires au Fonds d’affectation spéciale pour la mise à jour du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité établi par la résolution de l’Assemblée générale 54/106. Elle a rappelé que le Service de la recherche sur la pratique du Conseil de sécurité est à la disposition des délégations.
M. HUW LLEWELLYN, Directeur de la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques, a présenté l’état d’avancement du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies en précisant que certaines études auraient un peu de retard. M. Llewellyn a souligné que les études sont disponibles sur Internet en trois langues, anglais, espagnol et français, et qu’elles utilisent des graphiques en trois couleurs,
M. Llewellyn a fait part de la collaboration avec les universités, notamment la faculté de droit d’Ottawa, et de l’emploi des stagiaires. « Le Secrétariat continuera à faire appel à des stagiaires qui font un excellent travail », a-t-il assuré. Il a en outre abordé la question de la prise en charge d’experts associés qui participent à la mise à jour de la publication.
S’agissant des moyens financiers, il a rappelé que la Division de la codification est tributaire des contributions volontaires au fonds d’affectation spéciale pour la résorption de l’arriéré de travail relatif au Répertoire. Il a remercié la Turquie pour sa contribution de 10 000 dollars. Nous avions, à la mi-septembre, 45 288 US dollars disponibles, a-t-il ajouté.
M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé que le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’ONU a un rôle important à jouer dans le raffermissement du droit international et peut être considéré comme une enceinte de promotion du droit international et des dispositions de la Charte, notamment en matière de paix et de dialogue. Il a plaidé pour la démocratisation des organes des Nations Unies et la promotion et le respect des décisions de l’Assemblée générale, qui demeure le principal organe démocratique visant à promouvoir les buts et principes de la Charte.
Le représentant s’est dit préoccupé par l’empiètement constant du Conseil de sécurité sur les prérogatives de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC), ajoutant que le Mouvement des pays non alignés considère que la réforme de l’ONU doit se faire dans le respect des prérogatives des différents organes. Le Comité spécial peut contribuer à l’examen des dispositions du Chapitre IV de la Charte portant sur les fonctions et pouvoirs de l’Assemblée générale, a-t-il noté.
Les sanctions imposées par le Conseil de sécurité sont une question qui importe aux pays membres du Mouvement, a poursuivi M. Habib. Selon lui, des sanctions ciblées ne peuvent être imposées qu’en cas de menace ou d’agression, et non de façon préventive ni en violation du droit international. L’application des sanctions soulève des questions éthiques, a-t-il estimé, ajoutant qu’elles devraient éviter de toucher les populations civiles ou des États tiers et d’empêcher l’acheminement de l’aide alimentaire aux populations locales. L’imposition de régimes de sanctions doit reposer sur des objectifs clairs et un calendrier précis, et doivent être levées dès que ces objectifs sont atteints, a-t-il insisté.
Le représentant s’est élevé contre l’imposition de lois et de mesures économiques coercitives contre les pays en développement qui foulent au pied les règles de la Charte et de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il s’est par ailleurs félicité du succès des dernières réunions du Comité spécial et de la recommandation d’organiser un débat thématique sur le règlement pacifique des différends. Enfin, le représentant a dénoncé la réticence de certains membres qui hésitent à participer aux discussions sur certaines questions qui intéressent le Comité spécial.
Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. SABRI BOUKADOUM (Algérie) s’est dit convaincu du rôle « extrêmement important » que doit pouvoir jouer le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation. Cependant, a-t-il regretté, ce Comité n’a pas été en mesure de répondre aux attentes le concernant, principalement, a-t-il estimé, en raison de « nos méthodes de travail et de notre tendance à laisser des batailles idéologiques nous empêcher d’accomplir notre fonction ».
De l’avis du représentant, le Comité devrait avant tout faire en sorte que l’ONU se montre à la hauteur de ses objectifs en matière d’état de droit et de justice. Pour que l’Organisation puisse continuer à demander à ses États Membres de respecter l’état de droit, a-t-il ajouté, il faut qu’elle-même soit le reflet de ce principe. « La tâche du Comité devrait donc être d’éviter à l’Organisation d’être taxée d’hypocrisie », a-t-il insisté.
En tant que principal organe mandaté pour garantir la paix et la sécurité dans le monde, a par ailleurs déclaré M. Boukadoum, le Conseil de sécurité devrait devenir plus représentatif et s’attaquer au problème de ses méthodes de travail. « Le maintien du statu quo ne contribue qu’à éroder encore davantage sa crédibilité et sa légitimité, ce qui entraînera un affaiblissement de l’Organisation », a-t-il déploré, soulignant qu’un tel résultat allait bien évidemment à l’encontre de la raison d’être du Comité.
Le représentant a enfin appuyé, au nom de son Groupe, le document de travail présenté par le Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends.
M. HECTOR ENRIQUE CELARIE LANDAVERDE (El Salvador), s’exprimant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a déclaré attacher une importance particulière au travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation. Les Membres de la CELAC soulignent que pour parvenir à l’accomplissement du mandat du Comité, ils dépendent de la volonté des États Membres. Il est impératif que ceux-ci redoublent d’efforts en préparant un programme thématique solide reposant sur de nouveaux thèmes afin de pouvoir en faire une utilisation optimale, a-t-il déclaré. Il a réitéré l’importance de l’obligation de règlement pacifique des différends selon le choix de chaque État Membre, conformément à la Charte.
Par ailleurs, la CELAC considère qu’étudier les sanctions imposées par le Conseil de sécurité va dans l’intérêt de tous les membres. Il convient, a insisté le représentant, que les sanctions soient appliquées dans le respect de la Charte, notamment quand les droits de l'homme sont en jeu. Il a en outre recommandé, à titre préventif, de prévoir une assistance pour les États tiers affectés par l’application des sanctions, même si aucun État n’a encore demandé de recevoir ce type d’assistance.
M. ERIC CHABOUREAU, Union européenne, a jugé équilibrées les recommandations contenues au Chapitre V du rapport sur les méthodes de travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’ONU et la définition de nouveaux sujets. Il a rappelé que l’Assemblée générale a, par la résolution A/71/146, endossé la recommandation du Comité spécial sur la mise en œuvre des dispositions de la Charte concernant l’aide aux États tiers touchés par les sanctions. Il a salué les informations fournies par le secrétariat du Comité spécial sur la mise en application des sanctions, ajoutant qu’elles permettent une meilleure compréhension des sanctions ciblées en tant qu’outil vital afin d’assurer le maintien et la restauration de la paix et de la sécurité internationales, dans le respect de la Charte.
Par ailleurs, M. Chaboureau a appuyé la recommandation du Comité spécial, sur la proposition du Mouvement des pays non alignés, prévoyant la tenue d’un débat sur le règlement pacifique des différends, conformément au Chapitre VI de la Charte. Il a estimé que l’esprit positif qui en a permis la recommandation devrait se poursuivre afin de réaliser des progrès sur cette question. Il a par ailleurs noté que plusieurs questions soulevées par le Comité spécial font l’objet de discussions depuis des années sans que des progrès notables aient été enregistrés, par exemple la question du raffermissement du rôle de l’ONU dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, faisant doublon avec des sujets déjà traités par d’autres organes de l’ONU.
M. ELSADIG ALI SAYED AHMED (Soudan), s’associant au Mouvement des pays non alignés et au Groupe des États d’Afrique a estimé que la nature démocratique et intergouvernementale de l’Assemblée générale en faisait l’organe le plus qualifié à l’ONU. Malheureusement, a-t-il déploré, le Conseil de sécurité empiète sur les pouvoirs de l’Assemblée et du Conseil économique et social. Appelant à une restauration de l’ordre et de l’équilibre, il a prié le Comité spécial de continuer d’étudier les fonctions de l’Assemblée générale conformément au Chapitre IV de la Charte.
Le représentant a aussi estimé que les régimes de sanctions imposés par le Conseil de sécurité soulevaient des questions éthiques, comme le fait de savoir si les sanctions sont utilisées pour punir des populations, ou si elles causent un préjudice à des pays tiers. Leurs objectifs doivent donc être clairement définis. Saluant par ailleurs le rôle de l’Union africaine pour trouver des solutions africaines aux problèmes africains, il a appelé l’ONU à encourager le rôle des mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends.
Rappelant que le but premier des Nations Unies est de maintenir la paix et la sécurité internationales, Mme ANIKA APALISOK FERNANDEZ (Philippines) a estimé que le règlement pacifique des différends est une condition préalable au maintien de la paix dans le monde. Elle a souligné que le Comité spécial a appuyé les États Membres dans la réalisation de ces objectifs. Elle s’est en outre félicitée de la tenue prochaine d’un débat thématique sur le règlement pacifique des différends afin de contribuer à une utilisation plus efficace des mécanismes internationaux prévus à cet effet.
S’agissant de la proposition de Cuba, la représentante a convenu qu’il serait nécessaire de réaffirmer la relation symbiotique entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité. Selon elle, le Comité spécial devrait renvoyer la question à la Commission du droit international. Mme FERNANDEZ a approuvé la proposition du Ghana portant sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends, qui pourrait combler les lacunes des activités de l’ONU. Elle a salué la Déclaration de Manille en tant que premier plan global du règlement pacifique des différends, en vertu de la Charte et de la Déclaration, qui a conduit à l’établissement de relations internationales amicales. Elle a souhaité que de nombreux accords régionaux du même type soient conclus afin de jouer un rôle complémentaire à cette déclaration.
M. ESSA ALI AL-MOHANNADI (Qatar) a déclaré appuyer tous les efforts permettant de renforcer le rôle de l’Organisation et le mandat des organes des Nations Unies, clairement défini par la Charte. L’ONU est basée sur le principe de l’égalité des États Membres, ce qui lui confère une légitimité pour résoudre les crises, y compris l’imposition de sanctions en vertu de l’Article VII de la Charte, a-t-il rappelé.
Les débats du Comité Spécial ont permis de souligner qu’imposer des sanctions peut servir des intérêts étroits et parfois aller jusqu’à une violation des principes de souveraineté des pays, a reconnu le représentant. Le Qatar subit des mesures unilatérales de la part de certains pays, a-t-il déploré. Ces mesures sapent la promotion de l’état de droit ainsi que les efforts pour lutter contre le terrorisme. C’est une source d’instabilité pour le monde. Le représentant a dit que son pays a connu de grandes réussites dans la promotion des droits de l’homme et qu’il œuvre de concert pour maintenir la paix internationale.
Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’ONU est l’un des principaux organismes qui se penchent sur le fonctionnement des différents organes des Nations Unies, a estimé M. MOHAMMED NFATI (Libye). Il a souligné les progrès réalisés dans le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, ajoutant toutefois que ces deux documents devraient être publiés dans les six langues officielles des Nations Unies, notamment en arabe.
Le représentant a souhaité que le Comité spécial joue un rôle plus important dans la réforme de l’ONU et de ses principaux organes. « Il faut se centrer sur le rôle de l’Assemblée générale, principal pouvoir délibérant, afin de favoriser le règlement pacifique des différends », a-t-il ajouté.
Mme ELENA A. MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a noté que le mandat du Comité spécial est important pour assurer la primauté du droit international, car c’est une plateforme de dialogue. À cet égard, elle a rappelé la proposition de mettre à jour le Manuel sur le règlement pacifique des différends entre Etats. Lors de débats, il a été question de modifier les méthodes de travail du Comité spécial, or il ne faut pas risquer de mettre en danger son potentiel, a-t-elle prévenu. Par ailleurs, elle a dit apprécier les efforts des Nations Unies sur les deux répertoires.
Mme ALINA JULIA ARGÜELLO GONZÁLEZ (Nicaragua) a qualifié l’Assemblée générale d’« organe démocratique et universel par excellence », au sein duquel tous les thèmes devaient pouvoir faire l’objet de discussions, dans les limites définies par la Charte des Nations Unies. Dans ce cadre, la représentante s’est dite fortement préoccupée par le fait que le Conseil de sécurité s’arroge le droit de discuter de thèmes ne relevant pas de sa compétence, comme par exemple les changements climatiques.
Eu égard, par ailleurs, à la charge de travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, la représentante a regretté la tendance des dernières années à réduire les sessions de travail du Comité, voire même à en faire des séances biennales. Elle s’est enfin dite confiante dans la capacité du Comité à renforcer efficacement la mise en œuvre de la Charte, notamment par l’entremise de nouvelles propositions.
S’agissant du respect des dispositions de la Charte de l’ONU, Mme INDIRA GUARDIA GONZALEZ (Cuba) a appelé à préserver et renforcer le rôle de premier plan de l’Assemblée générale, en sa qualité de « principal organe normatif, de délibération, d’adoption de politiques et de représentation des Nations Unies ». Estimant que le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation offrait un cadre adapté pour négocier des amendements à la Charte dans la perspective de la réforme en cours de l’Organisation, elle a appelé le Comité à être une instance de débat sur toutes les propositions de résolutions ou décisions adoptées par d’autres organes de l’ONU ayant des implications en matière de respect et de mise en œuvre de la Charte.
En dépit, selon elle, des tentatives visant à faire obstacle aux travaux du Comité, la représentante a noté certaines avancées, comme l’accord visant à organiser une session intermédiaire pour discuter de la proposition du Mouvement des pays non alignés concernant le règlement pacifique des différends et son incidence sur le maintien de la paix. Tout en regrettant le fait que « certaines délégations » tentent de supprimer ou de réduire les sessions de travail du Comité, elle a estimé que le nombre de propositions présentées cette année démontrait l’importance et la nécessité de cet organe. Selon elle, ceux qui ne souhaitent pas le maintien du Comité, sous prétexte que ce dernier ne parvient pas à obtenir des résultats concrets, omettent de préciser que ce sont précisément eux qui s’opposent systématiquement à toute décision sur les propositions à son ordre du jour.
Dans ce cadre, la représentante s’est opposée à toute tentative visant à réduire les sessions de travail du Comité ou à les transformer en sessions biennales. Tout en appelant tous les pays à participer aux débats du Comité de manière constructive, elle a appuyé les propositions actuellement au programme du Comité, formulées par le Venezuela, le Bélarus, la Fédération de Russie, le Ghana et le Mouvement des pays non-alignés.
M. MOHAMMAD HUMAYUN KABIR (Bangladesh) a souligné le rôle du Comité spécial dans l’adoption de la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends. Il s’est félicité de la décision du Comité spécial de tenir un débat thématique annuel sur le règlement pacifique des différends, ce qui augure bien pour les efforts de revitalisation en cours, selon lui. Il a appelé le Comité à travailler de façon cohérente à la réforme des Nations Unies sur les questions qui le concernent. Il a rappelé que certaines questions débattues au Comité spécial sont aussi traitées dans d’autres forums des Nations Unies.
S’agissant des relations entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, incluant les allégations d’empiètement par le Conseil, le représentant a estimé que le Comité spécial traite de ces questions en vertu des dispositions de la Charte. Selon lui, le Comité pourrait contribuer de façon constructive à la question des régimes de sanctions, notamment dans les cas où ils affectent les populations civiles. Il a souligné l’importance du dialogue dans l’imposition de sanctions objectives, qui ne devraient être imposées qu’en cas de menace à la paix et à la sécurité.
Sur la question de l’adoption et de l’application des sanctions imposées par l’ONU, M. ZHANG PENG (Chine) a rappelé que sa délégation a toujours maintenu que le Conseil de sécurité devait faire preuve de prudence en imposant des sanctions. Celles-ci devraient être le dernier recours après que tous les moyens non coercitifs aient été épuisés. Elles devraient aussi être conformes à la Charte et d’autres règles du droit international.
Les conséquences des sanctions devraient être évaluées avec soin et tout impact négatif sur les gens ordinaires et des États tiers minimisé. En outre, les résolutions du Conseil de sécurité sur les sanctions doivent être strictement respectées et mises en œuvre. La Chine, a ajouté M. Peng, s’oppose à l’imposition de sanctions unilatérales supplémentaires qui ne sont pas conformes à la Charte, tout comme aux mesures qui sapent l’efficacité et l’autorité des sanctions de l’ONU.
Saluant au passage l’examen par le Comité spécial d’un projet présenté par le Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends, le représentant a indiqué qu’ils doivent respecter les dispositions de la Charte, y compris respecter la responsabilité première du Conseil de sécurité pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, et informer le Conseil des actions qu’ils pensent entreprendre à cette fin.
Mme EMILY PIERCE (États-Unis), a souligné les évolutions positives dans le travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation, et ciblé les domaines où il faut accroître les efforts. Elle a salué l’approche constructive adoptée par ceux qui ont participé à la discussion informelle du 2 février dernier sur les propositions du Mouvement des pays non alignés et du Ghana, et la décision de tenir un débat thématique annuel sur le règlement pacifique des différends. Les États-Unis attendent impatiemment le premier débat sur les pratiques des États concernant le recours à la négociation et à l’enquête.
En outre, la décision de procéder à un examen biennal de la question des effets des sanctions sur les pays tiers, reflète, selon la représentante, un meilleur, bien qu’imparfait, équilibre entre ceux qui pensent que la question n’est plus du ressort du Comité, et ceux qui, à l’inverse, estiment qu’elle doit continuer de figurer à son ordre du jour.
Sur le chapitre du maintien de la paix et de la sécurité internationales, les États-Unis considèrent que le Comité ne doit pas mener d’activités qui font double emploi ou contredisent les rôles des principaux organes de l’ONU tels que définis dans la Charte. Ils notent les développements positifs permettant d’assurer que le système de sanctions ciblées puisse rester un outil solide pour combattre les menaces à la paix et à la sécurité.
Mme Pierce s’est par contre opposée à la possibilité que l’Assemblée générale demande un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur l’usage de la force. Elle a également considéré avec prudence la proposition de définir de nouveaux sujets, précisant que ces derniers doivent être « pratiques, non politiques et ne pas répéter les efforts fournis ailleurs au sein des Nations Unies ».
Compte tenu des ressources limitées du Secrétariat, elle a douté de l’intérêt de créer un site Internet dédié au règlement pacifique des différends. Enfin, elle a déclaré que si une proposition telle que celle du Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends pouvait contribuer à combler des lacunes, elle devait être sérieusement prise en compte par le Comité.
M. SANDEEP KUMAR BAYYAPU (Inde) a indiqué que les États sont obligés de résoudre leurs différends par des moyens pacifiques. C’est l’un des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies, consacré dans son Article 33. Les États peuvent choisir librement les moyens de régler pacifiquement leurs différends. À cet égard, la Cour internationale de Justice (CIJ) joue un rôle important, a-t-il rappelé.
Le représentant a ajouté que l’Article 50 de la Charte confère à un État tiers confronté à des difficultés économiques particulières dues à l’exécution de sanctions décidées par le Conseil de sécurité, le droit de consulter celui-ci pour trouver une solution. « Ceci oblige le Conseil à trouver une solution définitive aux problèmes de l’État tiers touché », a-t-il estimé.
M. KIM IN RYONG (République populaire démocratique de Corée RPDC) a jugé fondamental que les États Membres respectent les principes de la Charte des Nations Unies s’ils souhaitent renforcer l’Organisation. Les Nations Unies se fondent sur le principe de l’égalité souveraine de tous les États Membres, a-t-il rappelé. Tous doivent se conformer aux principes de la Charte, quelle que soit leur taille.
De même, a poursuivi le représentant, le Conseil de sécurité doit se conformer pleinement aux buts et principes de la Charte. « Or, la façon dont le Conseil de sécurité agit est loin de ce qui est autorisé par la Charte. On peut même dire que le Conseil de sécurité viole les principes de la Charte », a-t-il lancé. Il a considéré que les États-Unis représentent une menace nucléaire pour son pays depuis plus d’un demi-siècle. « Le Conseil de sécurité, qui laisse faire, a totalement tort », a-t-il ajouté.
Le représentant a rappelé qu’à sa trentième session, en 1975, l’Assemblée générale avait voté pour la dispersion des troupes américaines présentes dans la péninsule coréenne. « Mais les États-Unis continuent de refuser d’appliquer les résolutions de l’Assemblée et les forces déployées se présentent comme faisant soi-disant partie des Nations Unies. Les troupes des États-Unis portent le casque bleu mais ne font pas rapport à l’ONU », a-t-il martelé.
Mme ANNA BAGDASAROVA (Bélarus) a estimé que le Comité spécial devrait améliorer ses méthodes de travail, dans le respect du règlement intérieur de l’Assemblée générale. Elle a dénoncé l’abus des questions de consensus pour modifier les méthodes de travail du Comité spécial. D’après elle, le Conseil de sécurité ne peut imposer des sanctions « pour des raisons farfelues », qui ont pour effet de saper l’autorité morale de l’organisation.
La représentante a salué la proposition de la Russie concernant la mise en ligne par le Secrétariat d’un site Web sur le règlement pacifique des différends et la mise à jour du Manuel sur le règlement pacifique des différends entre États. De plus, un débat thématique sur cette question contribuera à raffermir le rôle de l’ONU. Elle a appelé au renforcement du rôle du Comité spécial pour la réforme et la revitalisation de l’ONU et de l’Assemblée générale. Elle a aussi appuyé la proposition du Ghana sur le renforcement des relations et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends.
Mme LIYANA MUHAMMAD FUAD (Malaisie) s’est dite préoccupée par le nombre de points à l’ordre du jour du Comité spécial. La Malaisie, a assuré la représentante, attend avec intérêt de trouver les bonnes méthodes pour renforcer ses activités.
Mme Fuad a également noté que dans la première partie du rapport sur « le maintien de la paix et de la sécurité internationales », le Comité spécial est appelé à examiner au moins six propositions. Des chevauchements considérables pourraient être évités en fusionnant certaines de ces propositions, a-t-elle noté, recommandant au Comité de se pencher sur cette question.
Le Comité spécial est le seul mécanisme des Nations Unies qui permette de discuter de questions relatives à la Charte, a noté M. ABBAS BAGHERPOUR ARDEKANI (République islamique d’Iran). Il a appuyé l’idée de demander à la Cour internationale de Justice (CIJ) son avis consultatif sur les conséquences juridiques du recours à la force sans l’autorisation du Conseil de sécurité. Soulignant que le Conseil de sécurité ne doit imposer des sanctions qu’en dernier ressort, il a jugé que les sanctions imposées pour des raisons politiques étaient illégales et illégitimes.
Certains pays en développement sont injustement ciblés par des mesures unilatérales arbitraires, a déploré le représentant. « Il est regrettable que de telles mesures soient le plus souvent initiées par le même État », a-t-il ajouté.
M. SOLOMON KOIRBIEH (Ghana) a informé le Comité que sa délégation sera en mesure de soumettre une proposition révisée du document de travail sur le renforcement de la relation et de la coopération entre l’ONU et les mécanismes ou organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends. Il sera présenté lors de la prochaine session du Comité spécial de la Charte, en se fondant sur les textes suivants: la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends internationaux; la Déclaration sur la prévention et l’élimination des différends et des situations qui peuvent menacer la paix et la sécurité internationales et sur le rôle de l’ONU dans ce domaine; la Déclaration sur le renforcement de la coopération entre l'ONU et les accords ou organismes régionaux dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales; les conclusions du Comité spécial sur la Charte des Nations Unies et sur le raffermissement du rôle de l’Organisation; et le règlement type de conciliation des Nations Unies applicable aux différends entre États.
M. ALI NASEER MOHAMED (Maldives) a rappelé que depuis 70 ans, l’ONU a été « le chef de la paix, du développement durable et de la gouvernance démocratique ». L’Article 41 de la Charte des Nations Unies est clair et explicite en ce qui concerne l’utilisation des embargos et des sanctions, qui ne peuvent être employés comme des mesures punitives mais plutôt comme des mesures incitatives pour soutenir et encourager les pays à prendre de difficiles décisions pour désamorcer des situations qui seraient une menace à la paix et sécurité internationales, a-t-il déclaré.
Le rapport du Comité spécial a réitéré les points de vue de nombreux États Membres sur la nécessité de trouver le bon équilibre entre les fonctions et les activités des principaux organes des Nations Unies, a relevé le représentant. « Nous devons être vigilants pour protéger les fonctions et compétences de l’organe qui est le plus universel et le plus représentatif, l’Assemblée générale. Cette position privilégiée doit être en conséquence respectée par tous », a-t-il insisté.
La Charte a mis en place une organisation qui doit travailler avec et pour tous les États Membres qui sont politiquement indépendants et souverains. Or, « nous avons vu que la souveraineté et l’indépendance politique des petits États peuvent être compromises », a souligné M. Mohamed. « Il faut donc intensifier nos efforts pour s’assurer que la sécurité des petits États soit protégée et améliorée. En tant que petits Etats, la Charte est la garante de notre indépendance », a-t-il conclu.
M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a salué les propositions relatives à un renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales dans le règlement pacifique des différends. Il a plaidé pour la mise en œuvre des décisions prises au sujet des méthodes de travail du Comité spécial et de l’organisation de ses travaux. Par ailleurs, le représentant a réaffirmé son appui au réaménagement structurel du Conseil de sécurité afin d’élargir sa composition, conformément à la proposition faite par l’Union africaine de réserver deux sièges à des pays africains. En outre, il a proposé d’utiliser les fonds d’affectation spéciale pour réduire le fardeau financier du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité.
Rappelant que l'Assemblée générale est l’organe le plus large de l’ONU, M. AHMED ABDULMUWEEM (Iraq) a recommandé d’éviter tout chevauchement des organes pour mieux atteindre les nombreux objectifs de l’Organisation, y compris le règlement pacifique des différends. Il s’est félicité des efforts du Comité spécial pour réaliser les objectifs pour lesquels il a été constitué.
Droits de réponse
Le représentant de la République de Corée a déclaré qu’il ne faut pas remettre en question le fonctionnement du Comité spécial. La validité des allégations de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a été clairement contestée au sein de différents forums des Nations Unies et nous n’avons nullement l’intention de le répéter ici, a-t-il dit.
À son tour, le représentant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a rejeté les « provocations » de la République de Corée. Il a rappelé qu’il est important que le Comité spécial respecte les buts et principes de la Charte, qui stipule que les États Membres doivent s’abstenir de menaces. Dire que le Commandement des Nations Unies en Corée n’est pas un point pertinent de l’ordre du jour n’est pas valable. Le Commandement des Nations Unies est en Corée du Sud depuis 60 ans, et c’est sous ses ordres que les États-Unis prétendent mettre en place des exercices communs, a-t-il argué. Cela montre la grande patience dont fait preuve mon pays, a-t-il déclaré.
Le représentant a demandé une réponse claire: « Qui a commencé la guerre en Corée? Ce sont les États-Unis qui ont voulu mener une politique agressive contre le Nord pour s’assurer de leur suprématie dans la région asiatique, a-t-il dit. Le Commandement des Nations Unies en Corée est illicite sous tous les plans. Il viole les principes de la Charte ».