L’ECOSOC et la Deuxième Commission examinent le potentiel énorme des avancées technologiques pour le développement malgré les risques de dérives
La traditionnelle séance conjointe du Conseil économique et social (ECOSOC) et de la Deuxième Commission (questions économiques et sociales) s’est penchée, ce matin, sur les avantages et les risques que présentent les avancées technologiques rapides dans un monde qui tend au développement durable, en présence d’experts, d’innovateurs et avec la participation inédite d’un robot humanoïde. La Deuxième Commission a ensuite poursuivi ses travaux, dans l’après-midi, en abordant le point intitulé « Élimination de la pauvreté et autres questions liées au développement ».
Au rythme actuel des changements technologiques, le monde aura traversé d’ici à 2030 une période de transformation profonde en termes d’interactions entre les personnes et avec l’environnement, a présagé la Présidente de l’ECOSOC, Mme Marie Chatardová qui coprésidait cette séance avec son homologue de la Deuxième Commission, M. Sven Jürgenson.
Une réalité qu’a confirmée le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Liu Zhenmin, en rappelant qu’historiquement les avancées technologiques avaient toujours été les catalyseurs des transformations de nos sociétés et de nos économies. Il ne fait pas de doute à ses yeux que les avancées rapides dans le domaine de l’intelligence artificielle placent aujourd’hui le monde à un tournant crucial, à l’aube de la « quatrième révolution industrielle ».
En effet, les preuves sont bien là: smartphones, voitures sans chauffeur, services de traduction numériques, robots de service… La présence de Sophia, un robot « humanoïde » venu accompagner M. David Hanson, fondateur et Directeur général de Hanson Robotics, était d’ailleurs le centre de tous les regards dans la salle de l’ECOSOC.
L’animatrice du débat, Mme Jennifer Strong, journaliste au Wall Street Journal, a tenté de faire passer le courant entre Sophia et les participants en l’intégrant à la séance de questions-réponses qui a suivi les exposés.
La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, a elle-même pu échanger quelques mots avec ce robot pourvu de capacités humaines, donnant ainsi un aperçu concret de ce que permet déjà l’intelligence artificielle.
Face à cette évidence, M. Zhenmin a présenté la seule voie à suivre: « si nous ne pouvons pas arrêter le cours de l’avenir, nous pouvons le façonner ». Un point de vue largement partagé par les experts et les intervenants à ce débat. Si tous ont entrevu le potentiel énorme de la technologie, la science et l’innovation, qui sont appelés à être les moteurs du développement durable, de nombreuses questions ont néanmoins été soulevées quant aux risques et dérives possibles.
De ces observations a découlé une exigence: il faut, pour le XXIe siècle, un cadre de gouvernance technologique mondiale. Selon l’avis de plusieurs intervenants, en l’absence d’un organisme multilatéral dédié à cette question, les Nations Unies devraient assumer un rôle de chef de file. Définir un code de conduite et une règlementation tout en veillant à ce que personne ne reste de côté dans cette course effrénée des avancées technologiques, voilà les impératifs d’aujourd’hui pour préparer demain.
Pour le représentant de Global Pulse, l’initiative phare sur l'innovation des mégadonnées lancée par le Secrétaire général des Nations Unies, cette notion de gouvernance technologique doit avoir pour point de départ les droits de l’homme. Il a d’ailleurs rappelé que la Silicon Valley avait demandé l’aide de l’ONU pour mettre en place un cadre règlementant « l’intelligence artificielle pour le bien ». Prenant le contrepied de l’opinion dominante dans la salle, il a remis en cause cette notion de la technologie comme moteur du développement, en rappelant qu’au cours des 10 dernières années, l’intelligence artificielle et l’Internet avaient été les plus grands accélérateurs des inégalités dans le monde.
Une préoccupation partagée par des représentants de pays africains qui ont craint de voir le fossé numérique se creuser. Comme l’a fait remarquer le représentant de Maurice, si un smartphone coûte jusqu’à 1 000 dollars à New York, on peut imaginer ce que cela représente en Afrique.
Cherchant à rassurer quelque peu, M. Stephen Ibaraki, « entrepreneur en série », investisseur, futuriste et partenaire fondateur de REDDS, a affirmé que cette question était prioritaire dans tous les programmes actuels et que des puces informatiques à moindre coût étaient actuellement mises au point pour justement faciliter l’accessibilité en Afrique.
Le débat s’est ensuite déplacé sur le plan philosophique, avec l’idée qu’il faut inculquer aux robots le meilleur de l’être humain. Ce sujet a soulevé des questions d’ordre éthique, certaines délégations s’inquiétant des risques de voir les robots acquérir les pires valeurs humaines ou causer des discriminations culturelles. La valeur ultime à leur inculquer est l’amour, a répondu le directeur d’Hanson Robotics en reconnaissant la nécessité d’humaniser les algorithmes pour éviter les scénarios catastrophes.
Dans l’après-midi, les délégations ont examiné les efforts faits ou à faire pour parvenir à éliminer la pauvreté dans le monde, en abordant la question de manière multidimensionnelle, un sujet dont elles débattront encore demain, jeudi 12 octobre, à 10 heures
SÉANCE CONJOINTE SUR LE THÈME « L’AVENIR DE TOUT – LE DÉVELOPPEMENT DURABLE À L’ÈRE DE L’ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE RAPIDE »
Observations liminaires des Coprésidents
Le Président de la Deuxième Commission, M. SVEN JÜRGENSON, a souligné que son pays, l’Estonie, est un petit État ayant fait le pari de la société de l’information il y a 20 ans, alors que le pays comptait peu d’ordinateurs. Néanmoins, les secteurs public et privé ont vite compris le besoin d’investir dans cette voie et aujourd’hui, l’accès à Internet est un droit social en Estonie.
Ainsi, tout résident du pays a une identité électronique. De plus, de nombreux services sont disponibles en ligne, notamment les services électoraux. L’Estonie a déjà partagé son expérience en matière de gouvernance électronique avec plus de 60 gouvernements, s’est félicité M. Jürgenson, tout en s’inquiétant des questions de sécurité qui se posent, notamment en ce qui concerne la protection de la vie privée. Les gens n’adopteront des solutions électroniques que si elles sont sûres, a-t-il avancé.
Dans ses remarques d’ouverture, Mme MARIE CHATARDOVÁ, Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a noté que l’échelle et le rythme des changements technologiques s’intensifient. « D’ici à 2030, le monde aura traversé une période de transformation profonde dans la manière avec laquelle nous interagissons les uns avec les autres et avec l’environnement. » La Présidente a rappelé que, jusqu’à aujourd’hui, le terme intelligence artificielle (IA) faisait référence aux cas où une machine imite le mode de penser que les humains associent avec l’intelligence humaine, comme l’apprentissage, la parole ou encore la recherche de solutions aux problèmes. Si l’IA est devenue indispensable aujourd’hui et si elle se trouve au cœur des recherches, « nous n’en connaissons cependant pas l’impact mondial à terme », a-t-elle prévenu.
En présence du robot « humanoïde » Sophia, venu accompagner M. David Hanson, fondateur et Directeur général de Hanson Robotics, Mme Chatardová s’est dite ravie de voir aujourd’hui à l’ONU, pour la toute première fois, un aperçu de ce que sera l’intelligence artificielle.
Poursuivant sur ce qu’il faut attendre de ce genre d’outil, elle a rappelé que les conséquences, sur le long terme, des transformations technologiques sont encore inconnues. On ne fait que commencer à voir les retombées positives des applications de l’intelligence artificielle (IA), a-t-elle souligné. Ces technologies représentent des défis complexes d’ordre éthique et sécuritaire sur le plan des droits de l’homme, mais elles offrent aussi un potentiel considérable pour le développement durable, a-t-elle estimé, « à condition qu’elles puissent bénéficier à tous ». Elle a souligné que les réponses à ces questions doivent venir des niveaux mondial et national, mais noté, à ce stade, que les gouvernements et les Nations Unies ne sont pas en phase avec les progrès technologiques. Il faut mieux comprendre les implications de ces avancées scientifiques et technologiques, a-t-elle lancé.
En même temps, Mme Chatardová a invité à ne pas perdre de vue que de nombreuses régions du monde n’offrent toujours pas d’accès à l’électricité à toute la population. Dans ces zones, en a-t-elle déduit, l’intelligence artificielle (IA) semble hors d’atteinte. Pour savoir si l’IA peut représenter un outil du développement durable inclusif, il faut examiner la manière avec laquelle elle peut contribuer à créer des opportunités pour les peuples et comment on peut répondre aux problèmes qu’elle soulève, a dit Mme Chatardová avant de conclure en lançant l’invitation suivante: « Essayons de repousser les frontières de notre propre imagination. »
Déclaration de la Vice-Secrétaire générale
Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a insisté sur le fait qu’avec le développement des technologies telles que la robotique et alors qu’on est dans l’ère de la société de l’information, « personne ne doit être laissé de côté ». Les universités, la société civile, les scientifiques et d’autres acteurs doivent ainsi agir main dans la main dans ce cadre pour éviter les obstacles au développement humain. Rappelant que ces nouvelles technologies peuvent aider les économies à se développer, elle a signalé quelques applications dans le secteur de l’agriculture. Elle a aussi noté qu’en utilisant des logiciels adéquats, des gouvernements pourraient faire des économies dans la mise en œuvre d’infrastructures.
Mme Mohammed a en outre déclaré que, dans ce contexte, l’imagination de la jeunesse pourrait permettre de régler des problèmes du passé. Elle a appelé à « combler le fossé technologique entre les pays en développement et les pays développés, entre les pauvres et les riches, et entre hommes et femmes ». De même, a-t-elle continué, les enseignants doivent être formés et les programmes scolaires adaptés à cette nouvelle donne. Pour leur part, les Nations Unies se tiennent prêtes à servir de plateforme d’apprentissage et d’échanges sur l’intelligence artificielle.
La Vice-Secrétaire générale a ensuite pu échanger quelques mots avec Sophia, le robot pourvu de capacités humaines qui était le centre de tous les regards dans la salle de l’ECOSOC. Sophia lui a ainsi indiqué être « un robot social, capable d’avoir une conversation complète », en assurant être là « pour aider l’humanité à forger son avenir ».
Exposés suivis d’une discussion interactive
M. DAVID HANSON, fondateur et Directeur général de Hanson Robotics, a expliqué que sa société fabrique des robots à vocation sociale, comme c’est le cas de Sophia. Le but ultime de cette entreprise est de passer de la technologie à la biotechnologie en donnant vie aux robots, a-t-il précisé. Son souhait est que lorsque les machines deviendront des organismes vivants, les robots puissent acquérir le meilleur des êtres humains. C’est dans cette optique que M. Hanson a parlé d’autres créatures intelligentes mises au point par son entreprise, notamment un robot au visage du physicien Albert Einstein, qui aide les enfants dans leur apprentissage de la science. Pour M. Hanson, il est crucial d’avoir des machines dotées de qualités éthiques et non pas des machines esclaves. Il faut en effet s’assurer que les machines soient programmées pour suivre les objectifs de l’amour et de la sécurité dans l’éventualité où elles prendraient vie.
Le deuxième panéliste, M. STEPHEN IBARKI, entrepreneur invétéré, investisseur et futuriste, et dirigeant de REDDS, a voulu que l’intelligence artificielle (IA) soit au cœur de la réalisation des objectifs de développement durable, dans la mesure où elle permet de tirer parti de quantités de données sans précédent qui sont produites actuellement. Pour cela, il est important que toutes les parties prenantes travaillent ensemble pour s’assurer que l’IA profite à tous, a-t-il recommandé. Il a cependant averti que l’IA était à la fois un atout et potentiellement une source de perturbations pour certains objectifs de développement durable.
En tant qu’investisseur de capital-risque, il a présenté un ensemble de projets et d’initiatives auxquels il a participé et qui concernent l’IA, l’apprentissage par les machines et l’innovation. Il a expliqué que la quatrième révolution industrielle représente une automatisation exponentielle et permet une hyperconnectivité au niveau mondial, affirmant que « nous nous trouvons aujourd’hui à un point d’inflexion dans l’histoire », un point qu’il a appelé « CASAL » (classique, augmenté, synthétique, artificiel). Il a même anticipé l’apparition de génomes humains d’ici à 10 ans.
Revenant sur les avantages de l’IA, il a affirmé que les études actuelles prévoyaient une augmentation de 55% du PIB d’ici à 2030 du fait de ces nouvelles possibilités, assurant que toutes les régions du monde devraient en tirer parti. « L’impact de l’IA sera culturel, économique et social. » Néanmoins, 55% des emplois peuvent être automatisés dès maintenant, ce qui représente potentiellement une menace existentielle selon Elon Musk, a cité le panéliste.
« Dans tous les cas de figure, le monde est déjà engagé sur cette voie », a-t-il constaté en soulignant que « les éléments de preuve sont là, tout autour de nous ». Il a donné l’exemple des premiers taxis sans chauffeur à Singapour, des services de traduction automatique ou encore des applications relatives à la santé et au transport. Il a anticipé des applications possibles de l’IA à certains objectifs de développement durable, en particulier les objectifs 3, 4, 8, 11, 13 et 17, prédisant que, à terme, tous les secteurs seraient touchés par la montée en puissance de l’IA. C’est la raison pour laquelle il faudra élaborer des codes de conduite et des règlementations spécifiques pour notamment encadrer l’impact des robots sur l’équilibre de la main-d’œuvre. Pour cela, il va falloir compter sur la coopération mondiale, a-t-il souhaité en désignant l’ONU comme l’organisation idoine pour le faire.
Mme RITA KIMANI, cofondatrice de FarmDrive, s’est demandée si les robots allaient jouer un rôle prépondérant pour les agriculteurs du monde en développement. « Comment faire pour ne laisser personne à la traîne dans un monde où l’intelligence artificielle (IA) se développe de manière rapide ? » Pour elle, les technologies devraient avant tout être un outil qui réponde aux besoins et aux difficultés des gens. Lorsqu’elle a fondé l’organisation FarmDrive au Kenya, sa démarche était dans un premier temps de comprendre et d’évaluer les difficultés que rencontrent les petits exploitants agricoles en Afrique, et, dans un deuxième temps, d’envisager des moyens pour y répondre. En examinant le problème de l’accès aux crédits de ces exploitants, son projet a permis de collecter des données et d’utiliser des modèles d’apprentissage par les machines pour les mettre à leur service en faisant des outils à leur portée.
Mme Kimani a insisté sur la nécessité de sensibiliser à l’état et à la culture des différentes communautés. Notant par exemple que les petits agriculteurs n’avaient pas accès aux smartphones, elle a appelé à réfléchir aux moyens de faire en sorte que le fossé numérique ne s’élargisse pas davantage. À son avis, un téléphone portable de base suffit souvent pour bénéficier des retombées technologiques.
La course à la nouveauté technologique ne permet pas forcément d’atteindre plus vite les objectifs de développement durable, a mis en garde la panéliste avant de recommander de développer des technologies qui répondent véritablement à des besoins. Il faut également que ces technologies soient suffisamment simples pour être à la portée de tous, a-t-elle ajouté. Pour résumer son point de vue elle a encouragé les chercheurs à se demander « que peuvent faire les technologies pour nous » avant de les développer. Mme Kimani a conclu en se demandant qui serait à la barre à l’avenir. « Comment sera-t-il possible de suivre ces avancées technologiques et de les rendre accessibles à tous? »
M. JEFFREY SCHNAPP, créateur et Directeur de faculté à l’Université de Harvard, a expliqué être à la tête du laboratoire metaLAB de l’Université de Harvard et en même temps d’une entreprise privée de fabrication de robots. Pour lui, les recherches en robotique doivent être orientées par la question suivante: « quel monde voulons-nous et comment y parvenir? »
Parlant de l’application pratique de l’intelligence artificielle dans la vie quotidienne, il a expliqué avoir créé des robots qui gèrent la circulation sur les trottoirs de grandes villes. Selon lui, c’est la capacité de l’homme à se mouvoir dans l’espace qui va déterminer l’impact qu’auront les applications de l’intelligence artificielle.
M. Schnapp a aussi plaidé pour une vulgarisation des données et des connaissances algorithmiques, arguant que le public a le droit d’en être informé puisque ces technologies vont jouer un rôle clef dans l’avenir. À ce propos, il va falloir repenser l’éducation, a-t-il prévenu, arguant que l’apprentissage devrait de plus en plus se faire en continu, pour se former tout au long de la vie. Il a conclu en appelant à adapter l’intelligence artificielle aux besoins des êtres humains.
M. DICKSON DESPOMMIER, Professeur émérite de santé publique et environnementale à l’Université de Columbia, a appelé le monde à s’unir autour de causes communes qui auront des répercussions sur l’avenir de l’humanité. Constatant qu’« il n’y a pas une personne qui n’ait pas besoin de manger et de boire », il a soulevé la question de la sécurité alimentaire dans le monde, un problème qui est en partie lié aux réserves en eau potable ou agricoles.
Les systèmes de production alimentaire actuels ne permettent pas d’éradiquer la faim et la pauvreté, a-t-il constaté en soulignant que ce sont pourtant là deux objectifs fondamentaux du développement durable. Qui plus est, tous les ans la situation des maladies dans le monde ne s’améliore pas, et l’impact des changements climatiques est de plus en plus violent, a ajouté le Professeur qui travaille, avec ses étudiants, sur les réponses à apporter à ces questions.
« Plus nous avons de gens à nourrir dans le monde, moins nous y arrivons ». Il propose par conséquent de transformer l’agriculture pour passer de l’extérieur vers l’intérieur: les fermes verticales. Un concept qui, grâce aux avancées technologiques, est aujourd’hui pleinement possible, a-t-il assuré. Il s’agit de serres installées sur plusieurs étages, souvent en milieu urbain. Ce système permet de produire directement ce dont on a besoin, y compris en plein milieu urbain, sachant que, d’ici à 20 ans, la plus grande partie de la population mondiale vivra dans des villes.
« Pourquoi ne pas embrasser ce nouveau paradigme et s’y adapter », a-t-il lancé avant de signaler que le Japon et Singapour avaient déjà fait ce choix. De même, un Centre de recherche a été mis en place à Shanghai pour rechercher des solutions de production alimentaire dans les villes. Il ne s’agit pas d’agriculture saisonnière et le système de ferme verticale est réalisable partout dans le monde, a encore précisé le professeur. Il a même suggéré de convertir les nombreux entrepôts vides des villes industrielles en fermes verticales, ce qui répondrait par la même occasion au problème du chômage.
Discussion
La discussion lancée entre les experts, les délégations de l’ECOSOC et de la Deuxième Commission a permis de débattre des applications pratiques et des risques inhérents aux innovations technologiques, notamment l’intelligence artificielle, en cette période de mise en œuvre des objectifs de développement durable où l’on cherche à utiliser toutes les techniques utiles.
« L’accès à la technologie passe d’abord par un accès universel à l’Internet », a déclaré d’emblée le représentant de l’Union internationale des télécommunications (UIT) en s’inquiétant que cela ne semble pas être le cas à l’heure actuelle. Cela est possible, a suggéré le dirigeant de REDDS, en mettant en place des partenariats public-privé dédiés à cette cause. La fondatrice de FarmDrive a aussi proposé de bâtir des infrastructures à cet effet, tandis que le panéliste de l’Université de Harvard a visé avant tout, comme on est au XXIe siècle, l’accès au haut débit.
Plus largement, le représentant de Maurice s’est interrogé sur les moyens de faire bénéficier tous les peuples des inventions, en soulignant que le prix d’un téléphone portable peut atteindre 1 000 dollars aux États-Unis, ce qui est très onéreux pour les populations d’Afrique. Le dirigeant de REDDS lui a répondu que de nombreuses compagnies veillaient à adapter les prix à ce continent.
« Avec tous ces robots, que vont devenir ces millions de jeunes qui aspirent à un emploi? » a enchaîné la déléguée du Nigéria qui exprimait son inquiétude. Le directeur de Hanson Robotics s’est montré rassurant en indiquant que les entreprises technologiques emploient des centaines de jeunes, lui faisant conclure que la robotisation ne fait pas que perdre des emplois mais en crée aussi. Son entreprise, par exemple, a créé des emplois en Éthiopie. Pour s’assurer que les emplois ne soient pas perdus, la cofondatrice de FarmDrive a suggéré aux États d’adapter leurs systèmes éducatifs désuets et de les mettre à jour.
Le professeur d’Harvard a rappelé que les mêmes inquiétudes avaient prévalues au moment de la robotisation de l’industrie automobile. Par la suite, on a plutôt vu la naissance de nouveaux postes de travail. Il a prédit que les compétences techniques et les capacités nécessaires pour trouver un emploi seraient différentes pour les travailleurs de demain, notamment dans un environnement qui sera dominé désormais par la robotique et l’intelligence artificielle.
Abondant dans le même sens, le délégué de la Zambie a voulu savoir si ces emplois détenus par les robots devraient être taxés au même titre que ceux des humains. La question de la fiscalité de l’intelligence artificielle reste en discussion, a expliqué le dirigeant de REDDS.
« Quelles sont les mesures prises pour empêcher que le robot Sophia n’acquière les pires valeurs humaines ? » s’est ensuite inquiété le représentant de la Sierra Leone. Il faut permettre aux machines de comprendre les conséquences de leurs actes et de choisir les voies qui conduisent aux avantages maximaux, a répondu le créateur de Sophia, le directeur de Hanson Robotics qui a plaidé pour la création d’une « super intelligence qui soit super bienveillante ». Un double défi technologique et philosophique, a—t-il souligné. En outre, pour sacrifier à l’exigence de la pluralité culturelle, M. Hanson a expliqué avoir créé un « bébé robot mexicain » prénommé Diego, un robot femme noire américaine, et un autre robot au physique perse. Il a précisé que le visage de Sophia avait été conçu à partir d’une statue de la reine Néfertiti de l’Égypte antique.
« Il faut faire attention aux applications néfastes de l’intelligence artificielle », a quand même insisté la déléguée du Brésil en parlant des robots qui pourraient servir de soldats. C’est face à ce danger que l’IUT a établi des valeurs éthiques, a commenté le dirigeant de REDDS qui a ensuite plaidé pour le partage des innovations selon le modèle « open source » ou libre d’accès.
« Face à toutes ces questions, y a-t-il lieu de s’inquiéter de la montée de la robotique? » a lancé Mme Jennifer Strong, l’animatrice du débat.
Pour lui répondre, le Président de la Commission de la science et de la technique au service du développement des Nations Unies a suggéré que les États renforcent leurs capacités d’adaptation aux nouvelles technologies. Son homologue de Global Pulse, une initiative des Nations Unies de gestion des données, a rappelé que la technologie pouvait être utilisée pour le bien comme pour le mal, et qu’il faudrait veiller au respect des droits de l’homme dans le cadre de l’intelligence artificielle. Il a aussi relevé que les premières applications de l’intelligence artificielle avaient conduit à faire grandir les inégalités, avertissant même que cette nouvelle réalité pouvait être aussi dangereuse que la technologie nucléaire s’il n’y avait pas de garde-fou.
D’accord pour appliquer le principe de précaution, le professeur de l’Université de Columbia a relevé que la plupart des inventions partaient d’idées positives sans tenir compte des conséquences négatives éventuelles. Il a par exemple rappelé que l’invention de l’avion avait conduit au largage à grande échelle de bombes. C’est pourquoi l’ONU est le lieu idoine pour débattre des questions éthiques relatives à l’intelligence artificielle, ont souligné délégations et panélistes.
Dans ses remarques de clôture, M. LIU ZHENMIN, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a estimé que le monde se trouvait à un tournant crucial, faisant face à des défis sans précédent et devant des opportunités à saisir. Les avancées technologiques ont modifié l’histoire en transformant les sociétés et les économies, a-t-il rappelé, estimant que l’intelligence artificielle (IA) pourrait engendrer une nouvelle révolution industrielle en révolutionnant notamment les modalités de fabrication des produits et en changeant la médecine. L’impact des technologies nouvelles n’est pas prédéterminé mais peut être règlementé par des politiques volontaristes, afin de garantir que les acquis technologiques soient largement partagés, a-t-il ajouté. Pour mettre la planète sur la voie du développement durable, il a également conseillé de mettre ces technologies au service des personnes. « Nous ne pouvons pas arrêter le cours de l’avenir mais nous pouvons le façonner », a-t-il conclu.
ÉLIMINATION DE LA PAUVRETÉ ET AUTRES QUESTIONS LIEÉS AU DÉVELOPPEMENT
a) Activités relatives à la deuxième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (2008-2017) (A/72/283)
b) Participation des femmes au développement (A/72/282)
c) Mise en valeur des ressources humaines (A/72/292)
Discussion générale
M. DIEGO FERNANDO MOREJÓN PAZMIÑO (Équateur), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine (G77), a relevé le lien existant entre la pauvreté et les inégalités, déplorant également le fossé toujours grand, entre pays riches et pays pauvres. Faire face aux inégalités doit donc faire partie de toute stratégie d’éradication de la pauvreté, a-t-il recommandé. Il a noté que la mise en œuvre de la deuxième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté (2008 - 2017) avait contribué aux progrès, souhaitant que la proclamation d’une troisième décennie renforce les efforts dans ce sens. Le représentant a appelé à la mobilisation de moyens appropriés, notamment des fonds prévisibles et adéquats pour la lutte contre la pauvreté sous toutes ses dimensions dans les pays en développement. Les pays développés doivent respecter leur engagement en matière d’aide publique au développement (APD), a ajouté le G77.
Le Groupe est en outre inquiet du manque de progrès en matière d’autonomisation des femmes et des filles, notamment au vu des inégalités persistantes en matière de participation à la force de travail, de revenus, des pensions, des normes sociales et en ce qui concerne les conditions d’emploi. De plus, les femmes de tous les âges demeurent vulnérables en termes d’accès à la justice, de soins de santé élémentaires et d’éducation. Elles ne bénéficient pas des services qui leur permettraient d’être autosuffisantes sur le plan économique, a argué le délégué.
M. Mojerón Pazmiño a aussi noté que les femmes et filles sont particulièrement vulnérables aux catastrophes naturelles et aux changements climatiques. En outre, la violence dont elles sont victimes demeure l’un des obstacles majeurs à l’avènement de l’égalité des genres et à leur autonomisation. Il a aussi appelé à des mesures pour éliminer toutes les formes de violence sexiste, en particulier les féminicides. À travers les emplois rémunérés ou non, les femmes contribuent largement à l’économie, et leur autonomisation est cruciale pour l’éradication de la pauvreté, a insisté le représentant.
Le G77 souligne par ailleurs que la mise en valeur des ressources humaines est au cœur même du développement économique, social et environnemental, avec comme base la santé et l’éducation. Cette valorisation est particulièrement vitale pour la mise en œuvre des objectifs de développement durable et pour étendre les opportunités en faveur des populations, en particulier les plus vulnérables. L’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie sont des clefs de promotion du développement du potentiel humain, de l’égalité et de la compréhension entre les peuples, ainsi que de la durabilité de la croissance économique et de l’éradication de la pauvreté, a expliqué le représentant.
M. RY TUY (Cambodge) qui s’exprimait au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a réaffirmé la détermination des pays de sa région de venir à bout de la pauvreté à travers des approches intégrées permettant de rattraper les retards pris en matière de développement. Ces approches doivent aussi permettre de répondre aux exigences du développement rural, de responsabiliser les communautés et de promouvoir l’engagement des parties prenantes et des partenariats avec le secteur privé. Le représentant a mis l’accent sur la mise en œuvre réussie du plan-cadre de l’ASEAN pour la connectivité et de l’initiative de l’ASEAN pour l’intégration, des outils qui ont permis de connecter socialement et économiquement les États de la région, d’y faciliter le commerce et de réduire les écarts de développement. Depuis 2004, sa région a aussi lancé une série de plans-cadres pour le développement rural et l’élimination de la pauvreté, a expliqué le représentant.
Les pays de l’ASEAN, préoccupés par la baisse du niveau de l’aide publique au développement (APD), exhortent les pays développés à respecter leurs engagements et à continuer de venir en aide aux pays en développement et surtout aux pays les moins avancés (PMA). Pour le représentant, la coopération internationale, le financement du développement, l’innovation et les transferts de technologies sont des facteurs essentiels pour accélérer la réalisation des objectifs de développement durable. En plus de l’APD et de l’allègement de la dette, il a estimé que les pays développés devraient ouvrir les marchés commerciaux mondiaux aux pays en développement et éviter les mesures protectionnistes. Cela contribuerait, selon lui, à créer des règles du jeu plus équitables pour le commerce international.
Mme LOIS MICHELE YOUNG (Belize), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a noté que les progrès en matière de lutte contre la pauvreté étaient inégaux selon les endroits dans le monde. Le rapport sur le développement humain dans les Caraïbes en 2016 a relevé que la croissance et les revenus ne seront pas suffisants pour sortir et maintenir les populations de la région hors de la pauvreté. Elle a rappelé que les pays de la région étaient particulièrement vulnérables aux chocs externes, que ce soit les chocs économiques ou les évènements environnementaux comme les ouragans qui ont récemment affecté la Dominique et Antigua-et-Barbuda. Pour reconstruire ces pays, les ressources domestiques seules ne suffiront pas, a-t-elle prévenu.
La CARICOM note qu’aucune solution pour la réduction de la pauvreté ne saurait s’appliquer à toutes les situations vécues par divers pays. La CARICOM appelle plutôt à établir des normes plus adéquates de mesure des progrès qui prennent en compte toutes les dimensions. Le revenu par habitant reste le principal indicateur du développement et, de ce fait, est toujours considéré comme l’élément clef pour accéder aux ressources financières internationales, a noté la représentante. De ce fait, à l’exception d’Haïti, huit membres de la CARICOM sont classés comme pays à revenu moyen supérieur, tandis que les cinq autres sont considérés comme des pays à revenu élevé. Les deux pays affectés récemment par les ouragans devraient donc emprunter à des termes non préférentiels pour reconstruire les infrastructures détruites, a-t-elle expliqué avant de déplorer cette situation qui aboutit à priver les pays de la région, endettés et faisant face à des déficits, d’accès à des prêts préférentiels.
La CARICOM déplore en outre que les mesures de réduction du risque aient contraint de nombreux pays à supprimer leurs correspondants bancaires dans le pays des Caraïbes. Cette situation a un impact sur les économies de ces pays qui ne peuvent plus aisément procéder à des échanges commerciaux. De plus, ces pays voient diminuer le volume des transferts de liquidités des migrants ainsi que des investissements étrangers. Au vu de cette situation, elle a invité l’ONU à veiller à ce que « personne ne soit laissé de côté ».
Au nom des pays les moins avancés (PMA), M. SHAMEEM AHSAN (Bangladesh) s’est dit encouragé du fait que l’extrême pauvreté a baissé de 43,6% en 2008 à 36,3% en 2013 dans les PMA mais inquiet du fait qu’elle reste très élevée dans les PMA d’Afrique. La croissance économique est directement liée à l’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes, a rappelé le représentant, mais le taux de croissance des PMA est le plus faible jamais enregistré depuis 2000 et, à ce rythme, presque 35% de la population des PMA restera en situation de pauvreté extrême d’ici à 2030. En outre, les inégalités de revenu, de richesse et d’opportunités ont augmenté ou restent élevées dans les PMA, sans compter les conflits, les changements climatiques, les catastrophes, les crises économiques et financières qui ont un impact sur les processus de développement de ces pays.
Ceci dit, le représentant a cité sept éléments sur lesquels devraient se concentrer les efforts. D’abord, les PMA doivent redoubler d’efforts pour surmonter les obstacles structurels et augmenter leurs capacités de production, tout en recherchant un développement inclusif avec des filets de protection sociale. Deuxièmement, plus d’investissement en ressources, en technologie et en innovation devrait être affecté au renforcement du secteur agricole, qui est dominant dans les PMA, mais sans négliger les secteurs industriels à fort potentiel. Troisièmement, le développement du secteur privé est essentiel et l’obstacle de l’accès au financement doit être levé. Quatrièmement, une aide mondiale et solide pour aider les PMA à relever les défis structurels est d’une importance capitale. La coopération internationale est essentielle en ce sens, de même que pour lutter contre les flux financiers illicites, l’évasion fiscale et les prix élevés des transferts, afin que les PMA puissent mobiliser leurs ressources nationales pour réaliser les objectifs de développement durable.
Cinquièmement, l’accès aux technologies est essentiel pour lutter contre la pauvreté et M. Ahsan s’est félicité des progrès accomplis pour rendre opérationnelle la Banque de technologies pour les PMA. Sixièmement, l’examen quadriennal complet adopté l’année dernière reconnaît la vulnérabilité des PMA et demande au système de développement de l’ONU de donner la priorité aux PMA. Septièmement, le représentant a souhaité une aide additionnelle et prévisible de la communauté internationale pour aider les PMA à faire face aux graves conséquences des changements climatiques et des catastrophes.
Mme ZAHIR (Maldives), s’exprimant au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a rappelé que les petits États insulaires en développement (PEID) ne s’expriment pas souvent sur cette question de la pauvreté. Cependant, au vu des catastrophes naturelles récentes et d’autres évènements météorologiques extrêmes, il a souligné que ces pays méritent une attention particulière. Ces aléas climatiques, doublés des effets néfastes des crises économique et financière de 2007-2009, ont contribué à endetter davantage les PEID. Leurs ressources limitées sont désormais orientées vers la reconstruction, au lieu de servir pour le progrès vers le développement durable. En outre, les populations jeunes souffrent du manque d’opportunités d’emplois puisque tout est régulièrement détruit et que les commerces sont obligés de fermer boutique après les catastrophes. Des rapports préliminaires font état de dommages s’élevant à 184 milliards de dollars après les récents ouragans, a-t-elle affirmé.
En plus de ces évènements naturels, les PEID font face à des situations financières que la déléguée a qualifiées d’injustes, notamment les flux financiers illicites, les pratiques commerciales discriminatoires et les défis en matière fiscale vu l’exiguïté de leurs territoires. Ces pays ne peuvent bénéficier de prêts concessionnels à cause du niveau de leur produit intérieur brut (PIB), qui n’est pas suffisamment bas mais qui ne traduit pas fidèlement les vulnérabilités et réalités du terrain, a-t-elle déploré.
De même, a-t-elle poursuivi, les gains en matière d’autonomisation de la femme et de mise en valeur des ressources humaines sont remis en cause par cette vague de pauvreté déferlant sur les PEID, notamment les chocs externes et les catastrophes naturelles. C’est pour toutes ces raisons que la représentante a invité les États à respecter leurs engagements relatifs à l’Accord de Paris sur les changements climatiques. Elle a aussi invité les institutions financières internationales à aller au-delà du critère du revenu par habitant pour évaluer les possibilités d’accès aux financements. Elle a enfin invité le Secrétaire général de l’ONU à s’assurer que, dans la réforme du système engagé, la situation des PEID soit une priorité, dans la droite ligne des Orientations de Samoa.
Au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), M. HECTOR ENRIQUE JAIME CALDERÓN (El Salvador) a estimé que le développement durable devrait suivre une approche inclusive et holistique. Malgré les progrès enregistrés dans les pays de la CELAC, la pauvreté et la prévalence de l’insécurité alimentaire et de la faim restent des défis à relever. Les pays de la CELAC rappellent que le dialogue et l’accord politique sur la base de la confiance mutuelle et du respect des différences sont des éléments indispensables pour avancer vers une intégration politique, économique, sociale et culturelle de la région et pour progresser sur la voie du développement durable, ce qui permettra d’arriver à éliminer totalement la faim et la pauvreté. Dans ce même but, le représentant a également réitéré l’engagement des pays de la CELAC en faveur d’une coordination et d’une cohérence effectives dans la mise en place du Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement, de l’Accord de Paris sur les changements climatiques et du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes.
M. Jaime Calderón a réaffirmé qu’il est nécessaire de continuer à améliorer les mécanismes de régulation, de supervision et de contrôle du système financier international et régional afin de promouvoir un environnement favorable à la réalisation du Programme 2030, sachant que la seule mobilisation de ressources nationales ne peut suffire pour alimenter la croissance économique. La CELAC reconnaît le rôle pertinent de la coopération Sud-Sud et triangulaire, en complément de la coopération Nord-Sud, et de l’aide publique au développement pour augmenter les capacités nationales en faveur de la sécurité alimentaire. Enfin, M. Jaime Calderón a réitéré l’engagement des pays de la CELAC à promouvoir l’équité et l’égalité des genres, ainsi que l’avancement des femmes, comme des conditions nécessaires à l’exercice des libertés fondamentales et des droits de l’homme. Cela est également nécessaire pour éliminer les inégalités structurelles des genres qui perpétuent le cycle de la pauvreté et de la marginalisation.
Pour M. LU YUHUI (Chine), l’élimination de la pauvreté demeure le plus grand défi de notre époque, en particulier la pauvreté extrême. Il est pourtant indispensable d’atteindre cet objectif pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a souligné le représentant avant de pousser les pays développés à venir en aide aux pays en développement. Il a notamment demandé à ces derniers d’axer leur politique nationale sur cette question.
La Chine plaide pour plus de coopération internationale, régionale et Sud-Sud dans ce domaine, ainsi que pour des efforts pragmatiques. En outre, il faut aider les pays à mieux utiliser leurs ressources, a recommandé le délégué en invitant aussi les gouvernements à investir dans les infrastructures et les capacités. Tous ces efforts doivent s’inscrire dans une économie mondiale ouverte et un ordre économique et financier rationnel, a poursuivi le représentant notant qu’il s’agit d’un effort collectif. S’agissant de la Chine, qui a déjà permis à plus 60 millions de personnes de sortir de la pauvreté, ses politiques actuelles visent à venir à bout complètement de la pauvreté d’ici à 2030.
Mme MARIA ANGÉLA PONCE (Philippines) a regretté les inégalités dans la lutte contre la pauvreté, d’une région à une autre, comme à l’intérieur même des régions. Prenant l’exemple des Philippines, elle a affirmé que la croissance économique à elle seule ne suffisait pas pour atteindre cet objectif. En effet, en tant que pays à revenu intermédiaire, et avec un taux de croissance économique élevé, les Philippines comptent toujours 8,23 millions de pauvres dont le revenu ne suffit pas à couvrir les besoins alimentaires de base, qui font partie des 21,93 millions de pauvres recensés en 2015.
Pour sortir près de six millions de personnes de la pauvreté, le Plan de développement 2017-2022 cherche à faire passer le taux de pauvreté de 21,6% en 2015 à 14% en 2022, en visant le secteur agricole et les régions à la traine, a indiqué la représentante. Cet effort est accompagné par la Commission nationale de lutte contre la pauvreté.
L’une des priorités dans ce domaine est de permettre aux femmes et aux filles de pleinement réaliser leur potentiel par le biais de l’égalité des chances, notamment sur le marché du travail. À cet égard, la déléguée a fait part de ses préoccupations quant au chiffre avancé dans le rapport du Secrétaire général selon lequel le taux d’activité des femmes était d’un peu plus de 49,5% en 2016, comparé à 76,1 % pour les hommes. Elle a donc plaidé pour que l’on facilite l’accès des femmes au marché du travail formel, une exigence à laquelle cherche à répondre le Plan de développement des Philippines, notamment par l’accès à la santé reproductive, des services de garderie d’enfants abordables et des services de formation.
« Israël est fier de fournir des technologies et des formations aux pays faisant face à la désertification et à des pénuries d’eau », a affirmé Mme ORLI GIL (Israël). Elle a indiqué que les scientifiques israéliens consacraient du temps et des ressources considérables à la construction d’usines de désalinisation respectueuses de l’environnement. La déléguée a précisé que son pays aujourd’hui réutilisait 85% de l’eau consommée à des fins agricoles. « Animée par la séculaire valeur juive dite Tikkun Olam (qui veut dire réparer le monde), Israël est désireux de partager son savoir s’agissant de l’agriculture, des systèmes d’irrigation, de la gestion des récoltes et des méthodes permettant de nourrir ceux qui ont faim. » La déléguée a également souligné l’importance de l’emploi des femmes et des jeunes pour éradiquer la pauvreté. Enfin, Mme Gil a insisté sur le devoir collectif de la communauté internationale pour faire en sorte que l’extrême pauvreté appartienne au passé.
Mme ANGELA NG (Singapour) a jugé indispensable de mettre en place un filet de protection sociale pour ne laisser personne de côté sur la route du développement durable et a souhaité partager quelques leçons qui ont été utiles à Singapour dans ce domaine. D’abord, ce filet de protection doit être guidé par des valeurs et des principes, qui sont triples à Singapour: la dignité et l’autosuffisance de chaque individu, le soutien familial et le soutien communautaire. Quand ces principes sont en place, il n’est pas nécessaire d’élaborer de nouveaux plans d’assistance, par exemple pour répondre à l’évolution des modèles économiques, aux perturbations et aux incertitudes du marché du travail, a expliqué la représentante. Elle a aussi invité à se préoccuper davantage de la formation continue et de la reconversion professionnelle, afin de s’assurer que tous les citoyens disposent de compétences suffisantes pour faire face aux rapides changements dans le monde du travail.
La représentante a précisé que, la pauvreté étant un phénomène multidimensionnel, l’aide financière du filet de protection sociale ne doit être qu’une partie de la solution. C’est pourquoi à Singapour le filet englobe les soins de santé, le logement, l’éducation, la sécurité sociale obligatoire et des suppléments de revenu pour les travailleurs touchant une faible rémunération. Enfin, l’assistance sociale doit pouvoir s’adapter aux besoins de l’individu ou de chaque famille, sans s’enfermer dans un cadre rigide.
M. JAVAD MOMENI (République islamique d’Iran) a indiqué que son pays, par le biais de plans de développement nationaux, avait accompli de grands progrès dans l’éradication de la pauvreté. Les politiques de développement de l’Iran se concentrent notamment sur l’investissement dans l’éducation, les soins de santé, la protection sociale et la lutte contre les inégalités, en veillant particulièrement aux jeunes, aux personnes désavantagées et aux femmes qui assument la responsabilité de leur foyer. M. Momeni a indiqué que son pays considérait la promotion des femmes comme le moteur principal du développement durable et que fort de cette conviction, le Gouvernement iranien continuera à travailler à la création d’un environnement qui considère les femmes comme des partenaires et bénéficiaires égales du développement.
Notant que les niveaux de pauvreté avaient augmenté en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, en raison des conflits, il a toutefois indiqué que les inégalités de revenus restaient relativement basses dans cette région, comparées à d’autres régions, et qu’elles avaient même diminué durant les années 2000. M. Momeni a voulu souligner le lien entre pauvreté et paix, rappelant qu’il était extrêmement important de s’occuper de l’éradication de la pauvreté au Moyen-Orient, « un des défis les plus pressants du monde d’aujourd’hui ». Il a conclu son exposé en espérant que la proclamation de la troisième Décennie d’élimination de la pauvreté verrait le renforcement des efforts pour l’établissement d’un partenariat solide en faveur du développement et de la cohérence du système des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté.
Mme HA THI THANH HUYEN (Viet Nam) a indiqué qu’au cours des 30 dernières années, plus de 40 millions de Vietnamiens ont pu sortir de la pauvreté, un succès dû à la croissance économique qui a permis de créer des emplois. Des poches de pauvreté persistent néanmoins dans des zones rurales et au sein de certaines populations montagnardes, a-t-elle tempéré. Ces gains sont fragiles, a-t-elle donc concédé en expliquant qu’une portion de la population courrait le risque de replonger dans la pauvreté en cas de chocs tels que les évènements climatiques et les catastrophes humaines, ou en conséquence de la dépendance aux sources de revenus informelles. Le pays entend désormais établir un modèle de développement basé sur une plus grande productivité du travail, la mise sur pied d’infrastructures et la modernisation de son agriculture.
Mme ALMEHAID (Arabie saoudite) a abordé le rôle des femmes dans le développement alors que son pays célèbre l’adoption du haut décret permettant désormais aux femmes de conduire. L’un des aspects les plus importants de son pays est la participation des femmes au vote, a-t-elle dit en se félicitant qu’elles se soient portées candidates à certains postes gouvernementaux. Les femmes saoudiennes ont vu leurs efforts couronnés de succès dans tous les domaines et sont désormais partie intégrante de la société, a-t-elle affirmé en citant notamment le fait qu’une Saoudienne se trouve à la tête de la Bourse nationale.
Le Royaume est arrivé à un moment charnière pour ce qui est de l’intégration des femmes dans le monde des affaires et le secteur public, a poursuivi la représentante. Elle en a voulu pour preuve les 23 projets dirigés par des femmes et le fait que 52% des effectifs des élèves soient des femmes, sans compter qu’il y a 12 000 étudiantes inscrites à l’Université. L’égalité des chances dans l’éducation et le commerce est reconnue par le Royaume, a-t-elle encore expliqué avant de réaffirmer le rôle des femmes dans le développement.
M. MAHLATSE MMINELE (Afrique du Sud) a proposé plusieurs pistes pour éliminer la pauvreté dans les pays en développement. Il a tout d’abord demandé que ces pays disposent d’une chance équitable et de l’espace politique nécessaire pour développer leurs économies. En second lieu, il a insisté sur la nécessité de transformer le système commercial international qu’il a qualifié, en l’état actuel, d’injuste pour les pays en développement. Troisièmement, ces pays devraient recevoir des moyens appropriés, a-t-il dit. En dernier lieu, il a appelé les États Membres à s’engager en faveur d’un système multilatéral non discriminatoire, gouverné par des règles, et qui viendrait corriger des déséquilibres systémiques. Le délégué a ensuite souligné l’importance d’assurer la pleine participation des femmes dans tous les secteurs de l’économie. En conclusion, M. Mminele a déploré un engagement insuffisant dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
M. TLHALEFO MADISA (Botswana) a déploré que, malgré un déclin du taux d’extrême pauvreté, y compris dans les pays à faible revenu, l’Afrique continue à faire face à de lourds défis en matière d’éradication de la pauvreté. Parmi les facteurs qui expliquent ces difficultés, il a cité le manque de ressources financières allouées au développement, les termes défavorables des échanges commerciaux, la baisse des cours des matières premières, la faiblesse des services sociaux et des infrastructures nationales, ainsi qu’un taux élevé de chômage, en particulier chez les jeunes. En outre, le rythme de création d’emplois reste insuffisant par rapport à l’accroissement de la population active.
Ceci étant, M. Madisa a identifié des domaines et actions prioritaires, tant au niveau national qu’international, pour éliminer la pauvreté et parvenir à une croissance durable: des stratégies nationales de développement qui adoptent une approche holistique pour l’élimination de la pauvreté; un bon accès à la santé, à l’éducation et à la nourriture; l’autonomisation des femmes et des jeunes; la création d’emploi; la croissance par le biais des échanges et d’un investissement accru des secteurs public et privé; et une protection sociale qui protège les groupes les plus vulnérables. Le Gouvernement du Botswana, qui accorde la priorité à l’éradication de la pauvreté, a mis en place plusieurs programmes sociaux tels que le programme de travaux publics basé sur l’emploi, des régimes de pension pour les personnes âgées, des programmes nutritionnels pour les enfants de moins de 5 ans et les enfants scolarisés, une protection sociale pour les plus démunis et les orphelins, ainsi que des subventions agricoles.
M. HENCKERT (Namibie) a indiqué que la Namibie a mis en place plusieurs programmes pour éradiquer la pauvreté, alors que le pays fait face à de nombreux défis de développement, tels que les inégalités extrêmes, les sécheresses, les inondations, la hausse du chômage, des logements inadéquats et une pauvreté généralisée. Pour répondre à la nécessité de travail décent et de création d’emploi, le Gouvernement a instauré des mesures de protection des travailleurs, parmi lesquelles un salaire minimum dans les secteurs essentiels et des normes de sécurité. Il vient aussi de garantir le droit à une éducation gratuite de base dans le but de combattre la pauvreté.
Le représentant a évoqué nombre de mesures prises en ce sens par la Namibie, par exemple l’exemption d’impôts pour les pauvres, une hausse des pensions pour les plus âgés, une banque alimentaire pour lutter contre la faim et fournir une nutrition adéquate aux plus pauvres d’entre les pauvres. En outre, la Namibie cherche à parvenir à une stabilité macroéconomique, notamment avec une discipline budgétaire, qui bénéficie directement aux femmes, en particulier dans les zones rurales. Enfin, M. Gertze a fait observer que le classement de la Namibie dans le groupe des pays à revenu intermédiaire supérieur est problématique car il ne tient pas compte des énormes disparités de revenu entre les riches et les pauvres, héritage de la politique d’apartheid ayant précédé l’indépendance il y a 27 ans, et parce qu’il prive injustement le pays de l’accès aux financements préférentiels dont il a besoin.
M. RY TUY (Cambodge) a vanté les progrès réalisés au cours des dernières années par son pays en matière de lutte contre la pauvreté, notant au passage que le Cambodge fait maintenant partie des pays à revenu moyen inférieur. Il a souligné que le Gouvernement avait investi dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Le Cambodge a aussi cherché à diversifier son économie, afin de diminuer sa dépendance à l’industrie du vêtement et au tourisme. À cette fin, le Gouvernement a mis l’accent sur le développement technologique et l’innovation, secteurs dans lesquels il aura besoin de l’aide de ses partenaires, a-t-il relevé.
Après avoir réduit le taux de pauvreté qui est passé à 13,5% en 2014, il a souligné l’engagement de son pays à réaliser le Programme de développement durable à l'horizon 2030 et les objectifs qu’il contient, notamment par le biais de partenariats internationaux et de l’ouverture des marchés aux produits des pays comme le sien.
M. MAHE’ULI’ULI SANDHURST TUPOUNIUA (Tonga) a déclaré que l’élimination de la pauvreté requiert une approche intégrée et inclusive ainsi que des solutions multisectorielles de la part de toutes les parties prenantes. Il a demandé de reconnaître que cet objectif devait être au cœur des politiques sociales, économiques et environnementales des États, comme l’indique le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de la deuxième Décennie des Nations Unies pour l’élimination de la pauvreté.
Parmi les efforts entrepris par les Tonga pour lutter contre la pauvreté, le représentant a fait part de l’amélioration de l’éducation et des services de santé, ainsi que de la création de services sociaux accessibles aux plus vulnérables, des progrès ayant aussi été faits en termes d’autonomisation des femmes. Enfin, il a appelé au développement de partenariats internationaux et à une plus grande cohérence du système des Nations Unies sur cette question.
M. ALKHAFAJI (Iraq), rappelant que la pauvreté est un obstacle aux progrès des États, a regretté que l’Iraq ait vu son taux de pauvreté passer de 13,5% en 2013 à 25% actuellement. Il a expliqué cela par la baisse des cours du pétrole et l’occupation par l’État islamique (EI) d’une partie de l’Iraq, ce qui a conduit à des déplacements massifs de population et a sapé les progrès enregistrés suite à la mise en œuvre du plan de développement national. Soulignant que 50 millions de dollars avaient été alloués à un fonds de développement dédié aux zones les plus pauvres pour y créer des entreprises, il a quand même demandé à la communauté internationale de fournir une plus grande assistance à l’Iraq compte tenu de ses conditions difficiles.
Venant à la situation des femmes, le représentant a indiqué que le plan national de promotion des femmes met l’accent sur leur contribution au règlement des conflits et leur protection. L’Iraq est attaché à mettre en œuvre toutes les dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de violence et de discrimination à l’égard des femmes, a-t-il assuré, expliquant que des centres avaient été mis en place pour venir en aide aux femmes qui ont été victimes de l’EI.
M. MAYTHONG THAMMAVONGSA (République démocratique populaire lao) a estimé que l’éradication de la pauvreté passe par le renforcement de la coopération internationale. Il a ainsi appelé à davantage de financements en faveur des activités opérationnelles de développement des Nations Unies, en renforçant notamment les ressources de base tout comme les autres ressources, afin de soutenir les pays en développement dans leurs efforts de mise en œuvre des objectifs de développement durable.
L’élimination de la pauvreté et le développement rural sont parmi les priorités de tous les plans nationaux de développement socioéconomiques du Laos, y compris celui en cours, le huitième, qui intègre les objectifs de développement durable. Le pays a aussi adopté un objectif de développement sur la question des engins de guerre qui n’ont pas explosés et qui constituent un frein aux activités économiques, et partant à l’éradication de la pauvreté. Les efforts nationaux ont fait que le taux de pauvreté au Laos est passé de 35,5% en 2003 à 23,1% en 2013, la tendance à la baisse étant toujours d’actualité, s’est enorgueilli le délégué.
M. HYACINTHE TAMALGO (Burkina Faso) a estimé que l’élimination de la pauvreté constitue un des défis majeurs du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Pour faire face à cette problématique, le Burkina Faso a élaboré des politiques et stratégies de développement axées sur la lutte contre la pauvreté. Il dispose aussi d’un plan national de développement économique et social pour la période 2016-2020 dont l’objectif est de transformer structurellement l’économie burkinabé par la création d’un environnement favorable au développement industriel et la promotion d’une industrie compétitive et durable. L’augmentation de la productivité agricole et les opportunités de transformation de ses produits, en particulier le coton, devra s’accompagner de changements de composition et de valeur des produits exportés, a-t-il expliqué.
En vue de relever ces défis qui permettront d’éliminer la pauvreté à terme, le Burkina Faso met l’accent sur la mobilisation des ressources intérieures avec des méthodes innovantes pour le financement du Plan national de développement. Le respect de l’engagement de soutien pris par les partenaires du Burkina Faso permettra au pays d’accroître les investissements structurants, a-t-il espéré.
Mme CHRISTINE KALAMWINA (Zambie) a indiqué que, dans son pays, le taux de pauvreté se situe à 54,4%, la situation étant particulièrement déplorable dans les zones rurales où la pauvreté est estimée à 76,6%. Les catégories de la population les plus affectées sont les femmes, les enfants chefs de famille, les personnes handicapées, les orphelins, les personnes atteintes de maladies chroniques et les personnes âgées.
Le Gouvernement zambien envisage de réduire le taux de pauvreté de 20% d’ici à l’an 2021, a annoncé Mme Kalamwina. Parmi les mesures prises pour y parvenir, elle a cité les versements d’argent qui ont permis de soutenir pas moins de 242 000 familles dans 78 districts entre 2013 et 2016. Environ 590 000 familles en seront bénéficiaires d’ici la fin de 2017, a promis la représentante. En outre, le Gouvernement entend assurer que toutes les femmes et hommes aient les mêmes droits en ce qui concerne l’accès aux ressources économiques.
M. LEULSEGED TADESE ABEBE (Éthiopie) a repris les chiffres du rapport du Secrétaire général selon lesquels, dans les conditions actuelles, 35% de la population des PMA pourraient toujours vivre dans la pauvreté en 2030. Par conséquent, le test décisif pour vérifier la réalisation des objectifs de développement durable consistera à examiner la situation de ces pays, a-t-il estimé. Il a donc appelé à maintenir l’élan de la dernière décennie et à soutenir les efforts nationaux de lutte contre la pauvreté des PMA par l’aide internationale.
Le Gouvernement éthiopien, avec la participation du public, a poursuivi ses efforts de développement, ce qui lui vaut aujourd’hui un taux de croissance économique à deux chiffres et une baisse du taux de pauvreté qui est passé de 45 à 22%. Par ailleurs, le délégué a fait valoir qu’il ne peut y avoir de développement durable inclusif sans la parité entre les sexes. C’est la raison pour laquelle l’Éthiopie s’est dotée d’un cadre juridique et de mesures politiques pour favoriser l’autonomisation économique et la participation politique des femmes.
M. RAFAEL DARÍO RAMÍREZ CARREÑO(Venezuela) a estimé que la pauvreté était due au système capitaliste, ajoutant que l’occupation étrangère de territoires et le colonialisme étaient des facteurs aggravant pour la pauvreté. Les plus pauvres dans le monde restent exclus, au point où l’on estime que les neuf milliardaires les plus riches du monde possèdent davantage de richesses que la moitié de l’humanité. Il faut donc changer ce modèle et tenir compte du fait que le concept de pauvreté ne peut se réduire à l’aspect monétaire, a-t-il déclaré.
Le représentant a ensuite expliqué que la création d’emplois et la bonne gestion de ses ressources sont des facteurs importants pour éradiquer la pauvreté dans un pays. C’est pourquoi le Venezuela revendique la possession et la gestion de ses ressources depuis la révolution bolivarienne de 1999. Depuis lors, la pauvreté ne cesse de se réduire au Venezuela, a-t-il argué. Il a enfin appelé à une vision de développement axée sur l’être humain, se désolant que la pauvreté soit encore de mise dans un monde disposant de tant de technologies.
M. GONZALEZ PEÑA (Cuba) a constaté que l’ordre économique international actuel, « profondément injuste et insoutenable », a un impact croissant sur la marginalisation d’un nombre considérable de pays du Sud, où la faim, l’extrême pauvreté, l’analphabétisme, le manque d’assainissement et la mort prématurée restent une réalité constante. « Comment peut-on parler de progrès sans l’éradication de la pauvreté alors que plus de 80% de la population mondiale survit avec moins d’un dollar par jour et que le nombre de personnes souffrant de faim chronique a augmenté de 38 millions l’année dernière », a demandé le représentant, appelant le monde développé à assumer sa responsabilité historique dans la grave crise de l’environnement actuelle. Cette crise, a-t-il relevé, aggrave un modèle de production et de consommation qui n’est pas durable pour les générations présentes et futures.
Malgré le blocus économique imposé par les États-Unis depuis 55 ans et malgré les dégâts causés par les ouragans, les sécheresses et la récente crise mondiale, Cuba peut se targuer de progrès notables en matière sociale, a fait observer la délégation, citant les bons résultats en termes de taux de mortalité infantile, d’espérance de vie, d’accès à l’éducation et à la santé. Par ailleurs, Cuba croit fermement dans la coopération Sud-Sud et dans la solidarité internationale, et compte plus de 40 000 personnels de santé répartis dans 64 pays. Pour que l’espèce humaine survive, la justice sociale, l’égalité et le respect des droits des peuples et de tout être humain devront prévaloir, a conclu le représentant.
M. LOT THAUZENI PANSIPADANA DZONZI (Malawi) a rappelé que les niveaux de pauvreté extrême restent élevés en Afrique, en particulier dans les PMA du continent, dont le Malawi où le taux de pauvreté dépassait les 70% en 2013, à cause d’une combinaison de facteurs. Pour y remédier, le Malawi mène une campagne contre le VIH/sida et la mortalité maternelle et infantile. En dépit des progrès, il connaît toujours un fort taux de chômage chez les jeunes et ne dispose pas de sources énergétiques constantes qui lui permettraient de se diversifier technologiquement et d’engager son développement économique, a expliqué le représentant.
Il a également mis l’accent sur les femmes et dénoncé la féminisation de la pauvreté. Au Malawi, la participation des femmes à tous les niveaux du développement est une priorité notamment par leur scolarisation et le développement de leurs compétences professionnelles, mais aussi dans la sphère politique. En ce qui concerne le marché du travail, le Malawi cherche à améliorer les conditions de la participation des femmes, a encore précisé son représentant. Le Malawi prépare son examen national volontaire devant le Forum politique de haut niveau pour le développement durable, qu’il présentera en 2018 en mettant l’accent sur les objectifs de développement durable 6, 7, 11, 12, 15 et 17.