En cours au Siège de l'ONU

Soixante et onzième session,
91e séance plénière – après-midi
AG/11929

Haïti: l’Assemblée générale invite les États à réaffecter leurs avoirs inutilisés à la MINUSTAH au Fonds d’affectation pour la lutte contre le choléra

L’Assemblée générale a adopté, cet après-midi, par consensus une résolution par laquelle elle se félicite que le Secrétaire général ait l’intention d’inviter les États Membres à réaffecter leur part respective du solde inutilisé de la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti (MINUSTAH), « à titre exceptionnel et dans le respect de leur législation », au « Fonds d’affectation spéciale pluripartenaires des Nations Unies pour la lutte contre le choléra en Haïti », afin de financer la nouvelle stratégie de l’ONU.  La MINUSTAH ferme ses portes le 15 octobre prochain, pour être remplacée par la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH).

C’est le 19 août 2016 que l’ancien Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, avait dévoilé la « nouvelle stratégie de l’Organisation pour lutter contre le choléra en Haïti », estimée à 400 millions de dollars sur une période de deux ans.  Le Secrétaire général l’avait ensuite soumise le 1er décembre 2016 à l’Assemblée générale.  À cette occasion, M. Ban Ki-moon avait présenté les excuses de l’Organisation au peuple haïtien, déclarant que l’ONU n’avait tout simplement pas fait assez face à l’épidémie de choléra et à sa propagation en Haïti et que cette impéritie suscitait de profonds regrets.  Dans sa résolution 71/161, adoptée le 16 décembre 2016, l’Assemblée générale avait aussi reconnu la responsabilité morale de l’Organisation.

La « nouvelle stratégie » comprend deux volets.  Le premier vise à renforcer l’aide de l’ONU pour réduire et mettre un terme une fois pour toutes à la transmission du choléra dans le pays, améliorer l’accès aux soins et aux traitements, et s’attaquer aux enjeux à plus long terme que sont les systèmes d’approvisionnement en eau, d’assainissement et de santé du pays.  Comme l’indique le Secrétaire général actuel dans son rapport, ce volet « est largement perçu, en particulier par les Haïtiens eux-mêmes, comme la contribution la plus importante que les organismes des Nations Unies puissent apporter pour aider le pays ».

Le second volet consiste en un dispositif d’assistance et de soutien matériel et financier en faveur des Haïtiens les plus directement touchés par le choléra, qui doit bénéficier en priorité aux victimes de la maladie et à leurs familles.  Pour M. António Guterres, il est « l’expression tangible de ce que l’Organisation reconnaît et prend en compte la souffrance du peuple haïtien causée par la pandémie de choléra ».

Dans la résolution, qui a été présentée par le représentant de la Jamaïque, l’Assemblée générale se dit « consciente que l’épidémie de choléra a terni la réputation de l’Organisation des Nations Unies, tant en Haïti que dans le reste du monde ».  Elle rappelle que l’Organisation « a une responsabilité morale envers les victimes de l’épidémie de choléra en Haïti et les membres de leur famille » et qu’elle se doit d’aider le pays à vaincre l’épidémie et à mettre en place des systèmes fiables d’approvisionnement en eau, d’assainissement et de santé.

L’Assemblée générale invite les États Membres, les donateurs régionaux, internationaux et bilatéraux, les institutions financières, le secteur privé et les autres donateurs à « continuer d’appuyer la nouvelle stratégie de lutte contre le choléra en Haïti sous la forme de contributions financières volontaires ou d’autres formes appropriées ».

Deux pays ont profité de la réunion pour annoncer le versement de contributions au « Fonds d’affectation spéciale pluripartenaires des Nations Unies pour la lutte contre le choléra en Haïti »: l’Argentine, pour 10 000 dollars, et les Philippines, pour 50 000 dollars.  L’Argentine, qui a rappelé avoir contribué depuis 1994 à tous les efforts pour stabiliser Haïti, est revenue sur le rôle joué par son hôpital militaire, qui quittera le pays au mois d’août.  Le pays continuera néanmoins son aide bilatérale, dans le cadre du successeur de la MINUSTAH, la MINUJUSTH.  Le Mexique a aussi rappelé que son pays avait accordé 370 000 dollars pour la reconstruction d’un important institut haïtien lié à la santé.

L’épidémie de choléra en Haïti a commencé le 21 octobre 2010 dans le département de l’Artibonite avec la découverte du premier cas suspect.  Au 8 avril 2017, on avait comptabilisé 807 049 cas suspects, dont 476 730 ont donné lieu à une hospitalisation, et un total de 9 508 décès.

Le représentant de la Jamaïque, qui a rappelé que cette crise du choléra a été causée par « l’action et l’inaction » des Nations Unies, a parlé de « tache sur la réputation de l’Organisation », tout en rendant hommage à l’ancien Secrétaire général pour avoir présenté ses excuses.  Rappelant que le choléra est désormais endémique en Haïti et y aura des répercussions pour des années encore, il a précisé que la réponse devait être « axée sur la personne », en mettant l’accent sur ses besoins.  Il a ainsi constaté avec préoccupation que les ressources mises à disposition du Fonds d’affectation spéciale restaient limitées et a apporté son appui à l’invitation faite par le Secrétaire général aux États Membres concernés de réaffecter leurs avoirs à la MINUSTAH.

La représentante d’Haïti a vu là la manifestation du soutien international considérable dont jouit la nouvelle approche, « plus ouverte et plus généreuse, et surtout plus en phase avec l’idée de solidarité universelle des Nations Unies ».  « Nos espoirs sont grandement affermis », a-t-elle ajouté, avant de rappeler que l’épidémie représente « une véritable calamité » pour Haïti, dont elle a souligné et accentué les difficultés structurelles.  La représentante s’est félicitée de la nomination de Mme Josette Sheeran comme Envoyée spéciale des Nations Unies en Haïti. 

Au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), le représentant du Guyana a salué la « cohérence » des Nations Unies dans leur lutte contre l’épidémie de choléra et a accueilli la résolution comme « l’une des principales plateformes sur lesquelles les efforts pourront être poursuivis ».  Malgré les difficultés auxquelles le pays reste confronté, le représentant s’est dit encouragé par le dernier rapport du Secrétaire général, qui montre une baisse du nombre des cas de choléra en 2017.  Néanmoins, Haïti a besoin du soutien de toute la communauté internationale, non seulement pour lutter contre le choléra, mais aussi pour lutter contre les causes qui facilitent l’épidémie, à savoir l’extrême pauvreté. 

Les représentants du Guatemala, du Chili et du Canada ont aussi accueilli favorablement l’idée de réaffecter les ressources de la MINUSTAH.  Celle de la Colombie a parlé d’une « nouvelle étape dans la bonne direction » qui va permettre de mieux aider un pays « qui a toujours fait preuve d’une grande détermination malgré ses difficultés » et qui a aussi fait des progrès politiques, lesquels ont permis le remplacement prochain de la MINUSTAH par la MINUJUSTH.

À l’image du Chili, certains intervenants ont insisté sur le fait que le choléra, même s’il semble reculer, ne sera vaincu que si le Fonds d’affectation spéciale bénéficie de ressources suffisantes pour financer les deux volets de la stratégie de lutte contre l’épidémie.

Selon les chiffres fournis par le rapport, après une reprise en 2016, imputée principalement aux conséquences du passage dans le sud du pays de l’ouragan Matthew, le nombre de nouveaux cas de choléra a depuis lors fortement reculé.  Il est essentiel, dit le Secrétaire général dans son rapport, que les mesures renforcées de lutte anticholérique se poursuivent pendant la période 2017-2018 pour sauver des vies et réduire la transmission de la maladie à moins de 10 000 cas suspects par an d’ici à la fin de 2018.

À l’automne prochain, il doit présenter à l’Assemblée générale un rapport détaillé sur la mise en œuvre de la nouvelle stratégie et y inclure des informations sur l’état du Fonds d’affectation spéciale.

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