Assemblée générale: appels à mobiliser les sept milliards de dollars manquants pour inverser la progression du sida
Un an après l’adoption de la Déclaration politique sur le VIH/sida, les appels se sont multipliés, aujourd’hui, à l’Assemblée générale, pour mobiliser les sept milliards de dollars manquant pour inverser la progression du sida d’ici à 2020.
Notant que la cible 90-90-90 a provoqué un « essor spectaculaire » des traitements antirétroviraux et une « baisse considérable » du nombre de décès liés au sida, tout en contribuant à la réduction du nombre de nouvelles infections, le Président de l’Assemblée générale, M. Peter Thomson, a appelé les États Membres à redoubler d’efforts pour mettre fin à l’épidémie d’ici à 2030.
« Nous devons fournir les financements requis pour atteindre les objectifs de lutte contre le VIH/sida en inversant la tendance à la baisse de l’aide internationale », a-t-il déclaré, un appel appuyé par de nombreuses délégations.
Définie par l’ONU, la stratégie 90-90-90 vise à ce que d’ici à 2020, 90% des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut sérologique, 90% des personnes infectées par le VIH reçoivent un traitement antirétroviral durable, et 90% des personnes recevant un traitement aient une charge virale durablement supprimée.
Mais dans son premier rapport* sur la mise en œuvre de la Déclaration d’engagement sur le VIH/sida, adoptée par les États Membres en 2016, le Secrétaire général de l’ONU note qu’à moins de quatre années de l’échéance fixée, les engagements mondiaux ne se concrétisent pas toujours par de nouveaux investissements et initiatives sur le terrain, s’inquiétant notamment du fait que le financement de la riposte enregistre une stagnation, et que les progrès en matière de réduction des nouvelles infections à VIH chez les adultes sont au point mort.
Dans la Déclaration, les États Membres s’étaient notamment engagés à consacrer 26 milliards de dollars aux pays en développement d’ici à 2020. Or le rapport constate qu’en 2015, le montant total des investissements annuels s’élevait à 19 milliards de dollars, soit un déficit de sept milliard par rapport aux 26 milliards prévus.
Outre les ressources manquantes, la Vice-Secrétaire générale de l'ONU, Mme Amina J. Mohammed, a également déploré la persistance de carences en termes de services de prévention, de dépistage et de traitement du VIH pour les jeunes femmes. Elle a par conséquent appelé à définir une approche plus intégrée en matière de traitement, notamment en ayant davantage recours à la planification familiale.
Lui emboitant le pas, le représentant du Groupe des États d’Afrique a d’ailleurs signalé que les jeunes filles étaient touchées de manière disproportionnée par le VIH/sida en Afrique subsaharienne, insistant sur la nécessité de réaliser des progrès en matière d’autonomisation des femmes et des filles pour réduire ces risques.
De son côté, le représentant du Liechtenstein s’est dit alarmé par la persistance de discriminations juridiques et dans les faits contre les homosexuels, dénonçant notamment le fait que l’homosexualité soit encore officiellement condamnée dans 80 pays.
« Les discriminations à l’encontre des populations les plus exposées, telles que les travailleurs du sexe, les usagers de drogues injectables, les personnes transgenres, les détenus, les homosexuels et les autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, empêchent de faire des progrès réels », a-t-il notamment également déploré.
Le représentant du Canada a d’ailleurs estimé que pour atteindre les cibles de 2020, les campagnes de dépistage et de prévention doivent davantage cibler les « populations vulnérables et marginalisées » à haut risque, de même que les adolescents, tandis que le représentant de l’Union européenne (UE) a appelé à ne pas perdre de vue l’importance de lutter contre la discrimination à l’encontre des personnes infectées, plaidant pour que les programmes de lutte contre le VIH/sida s’emploient à réduire ces discriminations au niveau communautaire.
En la matière, le représentant du Kenya a parlé du lancement récent, dans son pays, de la campagne « Kick out HIV stigma », qui utilise le pouvoir du football pour combattre la discrimination liée au VIH/sida.
Plusieurs délégations, dont la France, ont enfin insisté sur la nécessité pour les États d’intégrer la prophylaxie préexposition à leur stratégie nationale, afin de garantir un accès systématique des malades au traitement antirétroviral.
Par ailleurs, le délégué de la Fédération de Russie a rejeté certaines dispositions contenues dans le rapport du Secrétaire général, relatives notamment à la distribution de seringues et à d’autres « pratiques controversées ». Entre autres critiques, son homologue de l’Indonésie a regretté l’absence de recommandations liées à l’abstinence, la fidélité et toute autre « pratique sexuelle responsable ».
En début de séance, l’Assemblée générale a par ailleurs nommé** par acclamation, sur recommandation de sa Cinquième Commission, M. Steve Townley, du Royaume-Uni, en tant que membre du Comité des contributions, pour un mandat prenant effet le 1er juin et venant à expiration le 31 décembre 2017.
La prochaine réunion de l’Assemblée, prévue, aujourd’hui, jeudi 1er juin, à partir de 15 heures, portera sur les conflits prolongés dans la région du Groupe GUAM (Géorgie, Ukraine, Azerbaïdjan et Moldova).
* A/71/864
** A/71/590/Add.3
MISE EN ŒUVRE DE LA DÉCLARATION D’ENGAGEMENT SUR LE VIH/SIDA ET DES DÉCLARATIONS POLITIQUES SUR LE VIH/SIDA: RAPPORT DU SÉCRÉTAIRE GÉNÉRAL (A/71/864)
M. PETER THOMSON, Président de l’Assemblée générale, a appelé à redoubler d’efforts pour atteindre l’objectif ambitieux de mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030. Il a noté que la cible 90-90-90 a provoqué un essor spectaculaire des traitements antirétroviraux et une baisse considérable du nombre de décès liés au sida, tout en contribuant à la réduction du nombre de nouvelles infections à VIH. Mettant l’accent sur la nécessité d’adopter une approche globale, le Président de l’Assemblée générale a dit la nécessité de fournir aux pays des appuis en matière d’éducation et d’information dispensées aux personnes vivant avec le VIH. « Nous devons protéger les droits humains de toutes les personnes et combattre la stigmatisation et la discrimination des victimes et des populations les plus exposées, comme les travailleurs du sexe, les usagers de drogues injectables, les personnes transgenres, les détenus et les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes », a-t-il notamment souligné. M. Thomson a aussi appelé à mobiliser les efforts de toutes les parties prenantes en renforçant les partenariats stratégiques entre tous les acteurs pertinents dont la société civile, le secteur privé et les philanthropes.
Le Président de l’Assemblée générale a ensuite indiqué que le Programme commun ONUSIDA est un exemple crucial de partenariat capable de galvaniser les actions. « Nous devons fournir les financements requis pour atteindre les objectifs de lutte contre le VIH/sida en inversant la tendance à la baisse de l’aide internationale », a insisté M. Thomson. Il a appelé à une mobilisation concertée pour combler le déficit d’investissement de 7 milliards de dollars par an, et cela, au nom de la solidarité mondiale et du partage des responsabilités.
Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a déclaré que le monde était encore loin d’être débarrassé du VIH/sida. Elle a toutefois constaté que de nombreux progrès avaient été réalisés au cours des dernières années pour vaincre la pandémie, se félicitant notamment du fait que les personnes bénéficiant d’un traitement peuvent désormais s’attendre à une espérance de vie égale à celles qui ne sont pas infectées par le virus. Elle a également mentionné les avancées réalisées pour réduire la transmission du virus de la mère à l’enfant.
Toutefois, des inégalités persistent dans l’accès aux soins, a-t-elle déploré, en particulier pour les jeunes femmes. Elle a par conséquent appelé à définir une approche plus intégrée en matière de traitement, notamment en ayant davantage recours à la planification familiale.
La Vice-Secrétaire générale a en outre constaté que les usagers de drogues injectables et les travailleurs du sexe demeuraient particulièrement exposés au VIH/sida. Elle a appelé à redoubler d’efforts pour protéger les catégories de personnes les plus à risque.
Mme Mohammed a ainsi invité les États Membres à former une « coalition d’action » au titre des cinq piliers de la prévention du VIH/sida, dans le but de mobiliser les 7 milliards de dollars nécessaires pour venir à bout de la maladie d’ici à 2030.
Dans ce cadre, la Vice-Secrétaire générale a salué l’action du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, l’ONUSIDA, qui tente de trouver des approches nouvelles pour vaincre la maladie. Elle a espéré que ces initiatives se traduisent par des avancées tangibles.
Enfin, Mme Mohammed a souligné l’importance de mettre en œuvre des ripostes contre le VIH/sida au niveau des communautés pour venir à bout de l’épidémie d’ici à 2030.
Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. MAMADOU TANGARA (Gambie) a dit l’engagement de son groupe à combattre le VIH/sida qui menace le développement du continent. Il a indiqué que la feuille de route de l’Union africaine de 2012 et le Sommet spécial qui s’est tenu à Abuja en 2013 témoignent de l’engagement du continent africain à faire face à ce fléau. Il a notamment cité l’engagement des États africains de consacrer 15% de leur budget à la santé. « Éliminer le VIH/sida doit passer par l’élaboration de plans régionaux assortis de cibles pour ceux qui en ont le plus besoin », a aussi estimé le représentant.
M. Tangara a ensuite insisté sur la nécessité de réaliser des progrès en matière d’autonomisation des femmes et des filles pour réduire les risques auxquels sont exposées ces dernières. Il a rappelé que les jeunes filles étaient touchées de manière disproportionnée par le VIH/sida en Afrique subsaharienne. Il a également fustigé les pratiques discriminatoires qui sapent les efforts visant à fournir un traitement à ceux qui en ont besoin. Il a ensuite remercié les pays qui ont annulé les restrictions de voyage aux personnes victimes du VIH/sida.
Le représentant a par ailleurs appelé à une mobilisation concertée pour combler le déficit d’investissement de 7 milliards de dollars, afin de sortir un peu plus la question du sida de son isolement.
S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. TEODORO LOPEZ LOCSIN, JR. (Philippines) a déclaré qu’en 2015, environ 1,7 million de personnes dans sa région étaient touchées par le VIH/sida. Les populations touchées, a-t-il précisé, diffèrent dans chaque État, mais sont principalement des travailleurs du sexe et leurs clients, des usagers de drogue injectables, des hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes et des membres de la population transgenre.
Le représentant a indiqué que les pays de l’ASEAN mettaient principalement l’accent sur des activités ciblant les populations exposées, y compris l’élargissement et le renforcement des services de prévention, de dépistage, de traitement, de soins et de soutien social, afin d’atteindre l’objectif de traitement 90-90-90 d’ici 2020. Les pays de l’ASEAN, a-t-il ajouté, ont également augmenté les ripostes nationales et locales contre l’épidémie par un renforcement des capacités et un plus grand investissement dans la participation des communautés à la riposte.
Intervenant ensuite en sa capacité nationale, M Locsin a indiqué que chaque jour, 28 Philippins reçoivent un diagnostic d’infection à VIH, précisant qu’alors que la détection du tout premier cas remonte à 1984, 80% des 41 000 cas que connaît le pays ont été détectés au cours des cinq dernières années. Le représentant a indiqué que son pays à mis sur pied un plan de développement pour la période 2017-2022 visant à inverser cette tendance croissante d’ici à 2022. Il a précisé que les efforts sont notamment focalisés sur les jeunes, ceux-ci étant moins vigilants face au virus. Une attention particulière est également accordée aux migrants. Alors que plus de neuf millions de Philippins vivent et travaillent à l’étranger, la politique migratoire cherche à renforcer la capacité de ces derniers à accéder aux services de santé où qu’ils se trouvent.
Le Gouvernement, a poursuivi le représentant, assure également l’accès à des services de traitement et de prévention de qualité, notamment à des médicaments antirétroviraux abordables et de qualité. Les Philippines ont également doublé le budget du Programme national VIH. M. Locsin a par ailleurs souligné qu’en attendant la création d’un vaccin contre le VIH, un aide notable doit être accordée aux pays en développement pour leur permettre d’atteindre la cible 90-90-90, moyennant l’accès aux médicaments antirétroviraux les moins chers, à des centres de soins et à des protocoles simplifiés de surveillance pour les traitements.
M. ANTONIO PARENTI, de l’Union européenne, a appelé à agir pour étoffer davantage la prévention du VIH/sida, afin de mieux atteindre les personnes les plus à risque, à savoir les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes, les usagers de drogues injectables, les travailleurs du sexe, les personnes transgenres et les prisonniers.
Le représentant a aussi appelé à ne pas perdre de vue la nécessité de lutter contre la discrimination à l’encontre des personnes infectées par le VIH/sida, un phénomène qui a des conséquences négatives importantes sur la prévention et le dépistage. Les programmes de lutte contre le VIH/sida doivent par conséquent s’employer à réduire ces discriminations au niveau communautaire, a-t-il notamment affirmé.
Les actions financées par l’Union européenne (UE) accordent la priorité au développement de nouveaux outils de lutte contre la maladie, en particulier s’agissant des diagnostics, des vaccins et des médicaments, a par ailleurs indiqué le représentant, précisant que 201 millions d’euros avaient été investis par l’UE, dont 115 millions pour le VIH/sida, 9 millions pour l’hépatite virale et les maladies du foie qui y sont associées, et 77 millions pour la tuberculose. Il a aussi indiqué que 60 millions avaient été investis pour le développement d’un vaccin thérapeutique et/ou préventif.
Le représentant a enfin appelé à faire en sorte que le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, l’ONUSIDA, dispose des fonds nécessaires pour lutter contre la maladie.
M. GEORGI VELIKOV PANAYOTOV (Bulgarie) a souhaité que des efforts soient déployés dans tous les secteurs pour permettre aux personnes les plus affectées par le VIH/sida d’en bénéficier. Il s’est en effet inquiété de voir autant d’inégalités d’accès aux services de prévention, de dépistage et de traitement parmi les populations qui en ont le plus besoin. Il a appelé à redoubler d’efforts pour améliorer la prévention, surtout pour les personnes victimes de stigmatisation et de crimes de haine en raison de leur identité sexuelle et de leur genre. Il faut aussi renforcer la prévention parmi les jeunes et leur donner notamment un accès complet aux services d’éducation sexuelle, a-t-il estimé. Le représentant a aussi approuvé la recommandation contenue dans le rapport qui souligne qu’on ne pourra mettre fin au VIH/sida que si on fait des progrès dans tous les aspects des droits de l’homme.
M. Panayotov a ensuite salué le leadership d’ONUSIDA et l’aide que ce programme apporte aux États Membres en leur fournissant des conseils stratégiques. Son pays, la Bulgarie, est engagé à mettre pleinement en œuvre la Stratégie 2016-2021 d’ONUSIDA et soutient son initiative pour une « coalition de grande prévention ». Il a indiqué que la Bulgarie offre des traitements antirétroviraux à tous les nouveaux cas de VIH/sida, avec notamment le soutien de 50 ONG, 35 centres de santé préventive, et 19 cabinets pour des dépistages gratuits et anonymes. Enfin, il a fait part de l’adoption, en mars 2017, de la Stratégie nationale 2017-2020 sur le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles, dont l’objectif principal est d’arriver à moins de 1% de prévalence du VIH/sida dans toute la population.
Mme MARÍA EMMA MEJÍA VÉLEZ (Colombie) a jugé qu’un an après l’adoption de la Déclaration politique sur le VIH et le sida, les progrès réalisés demeurent fragiles. Elle a dit l’engagement de la Colombie d’atteindre la cible 90-90-90 d’ici à 2020, insistant notamment sur l’importance du droit à une éducation sexuelle intégrale et de la mise au point d’un traitement. Elle a appelé à lutter contre la stigmatisation et la discrimination dans les établissements de santé, précisant que la Colombie a pris des mesures dans ce domaine. La représentante a aussi constaté que la lutte contre le VIH/sida nous met face à des défis importants notamment en matière de ressources qui sont en concurrence avec d’autres priorités.
M. MAYANK JOSHI (Inde) a mis l’accent sur l’objectif de développement durable 3 qui appelle à garantir la santé et le bien-être de tous à tout âge. Il a aussi dit son attachement à l’objectif 17 consacré aux partenariats. Le représentant a ensuite rappelé que l’Inde est le plus grand producteur de médicaments antirétroviraux génériques. Il a indiqué que l’Inde avait réussi à inverser la courbe des décès liés au VIH/sida, précisant que ceux-ci avaient diminué de 54% entre 2007 et 2015. Le représentant de l’Inde a parlé de la volonté de son pays d’affiner son approche nationale pour toucher un maximum de personnes, et atteindre l’objectif « triple zéro », à savoir zéro nouvelle infection, zéro décès lié au VIH/sida et zéro discrimination. Il a ensuite annoncé la promulgation à venir d’une loi historique qui vise à lutter contre les discriminations liées au VIH/sida, notamment en matière d’éducation et d’emploi, grâce à la création d’un mécanisme formel de plaintes.
Au nom de la Suisse et de la Zambie, les deux cofacilitateurs de la Déclaration politique sur le VIH et le sida, M. JÜRG LAUBER (Suisse) a appelé à adopter une approche équilibrée entre la prévention et le traitement tout en accordant une attention continue à la prévention primaire. Il a également jugé nécessaire de veiller à ce que les droits de l’homme et l’égalité des genres figurent au centre de toute action. Le représentant a aussi souligné qu’une approche fondée sur des données factuelles est nécessaire pour mettre l’accent sur les populations dont les besoins sont les plus importants.
« Il faut sortir le sida de l’isolement », a poursuivi le représentant pour qui la lutte contre l’épidémie doit contribuer au renforcement des systèmes de santé, ce qui implique, selon lui, de lier stratégiquement et efficacement le financement du VIH/sida aux problèmes plus vastes que rencontrent les systèmes de santé. Il a aussi souligné la nécessité de prendre en compte les déterminants du VIH/sida au sein et en dehors du secteur de la santé. Il importe en outre d’adopter une approche multipartite incluant les Nations Unies, la société civile, les universités, le secteur privé et d’autres partenaires importants.
M. CHARLES THEMBANI NTWAAGAE (Botswana) a indiqué que la lutte contre le VIH/sida reste l’une des priorités clefs du onzième Plan national de développement et de la Vision 2036, deux plans pour la planification et la mise en œuvre du développement national, qui sont alignés sur le Programme 2030 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Après avoir énuméré les stratégies et les programmes nationaux de lutte contre le VIH, le représentant a indiqué que plus de 95% des séropositifs ont accès aux médicaments antirétroviraux. Ces programmes ont aussi réduit significativement le taux de transmission de la mère à l’enfant qui est passé à 0,9% en 2016. Le Botswana, s’est-il félicité, est en voie de supprimer le sida avant 2030. Pour assurer le contrôle de l’épidémie et pour que personne ne soit laissé sur le côté, a ajouté le représentant, le Botswana mettra en œuvre le programme « population à risque » en 2017 et 2018.
Saluant la décision de l’Assemblée générale, en 2015, d’accélérer la riposte contre l’épidémie, M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a regretté la persistance d’obstacles nationaux qui entravent la lutte contre le VIH/sida. Seule une stratégie globale nous permettra de tenir ces promesses, en prenant en compte la dimension sanitaire et des droits de l’homme. Dans cette perspective, il a salué les efforts déployés pour lutter contre les discriminations.
Le représentant s’est toutefois dit alarmé par la persistance de discriminations juridiques et dans les faits contre les homosexuels, condamnant le fait que l’homosexualité soit encore officiellement condamnée dans 80 pays. Les discriminations à l’encontre des populations les plus exposées, telles que les travailleurs du sexe, les usagers de drogues injectables, les personnes transgenres, les détenus, les homosexuels et les autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, empêchent de faire des progrès réels, a-t-il également déploré.
De plus, le représentant a regretté les carences des services de prévention, de dépistage et de traitement du VIH pour les filles et les femmes. Il a appelé à accorder à ces dernières un meilleur accès aux soins de santé reproductive et aux services de planification familiale.
M. NEVILLE MELVIN GERTZE (Namibie) a indiqué qu’à l’heure actuelle, les jeunes femmes et les adolescentes étaient les personnes les plus touchées par le VIH/sida dans son pays. Il a rappelé que la Namibie a lancé, dès 2002, un programme national de traitement antirétroviral, précisant que le nombre de dispensaires distribuant des médicaments antirétroviraux était passé de 10 à 271 entre 2002 et 2016. Le représentant a aussi insisté sur l’importance de disposer de données et de statistiques pour mesurer la qualité de la riposte dans les 14 régions de la Namibie, dont la superficie est égale à celles de la France et de l’Allemagne combinées. Il a signalé qu’en raison de la répartition de la densité démographique, certaines populations sont plus difficiles à atteindre que d’autres. La Namibie déploie toutefois de nombreux efforts pour que toutes les femmes enceintes vivant avec le VIH reçoivent des médicaments antirétroviraux (prophylaxie ou traitement à vie), son objectif étant de devenir le premier pays africain à mettre fin à la transmission de la maladie de la mère à l’enfant.
M. JOSÉ LUIS FERNANDEZ VALONI (Argentine) a indiqué avoir participé activement à la négociation de la Déclaration politique sur le VIH et le sida en promouvant un libellé progressif pour parler notamment des populations clefs, des droits sexuels et reproductifs et de l’éducation sexuelle complète. Saluant les énormes avancées réalisées par la communauté internationale dans la lutte contre le VIH/sida au cours des 16 dernières années, il a noté que ces progrès sont le résultat d’actions coordonnées, financées et menées avec une ferme volonté politique. Il a jugé fondamental d’étoffer les engagements et les progrès réalisés jusqu’à ce jour en réaffirmant les engagements, la volonté politique et les ressources pour mettre enfin un terme à l’épidémie.
Dans l’optique de la mise en œuvre de la Déclaration politique de 2016, il a dit appuyer la mise en œuvre de la Stratégie 2016-2021 d’ONUSIDA, ainsi que celle des objectifs de traitement 90-90-90 pour l’an 2020. Il a plaidé en faveur d’une riposte mondiale exceptionnelle, reposant notamment sur la protection des droits à la santé sexuelle et reproductive des jeunes et des adolescents. Il a prôné un accès universel à des systèmes de santé et de protection sociale, en fournissant suffisamment tôt des traitements antirétroviraux. Il faut aussi promouvoir un accès à des médicaments abordables, car c’est là une condition sine qua non pour mettre fin à l’épidémie, a-t-il insisté. De son côté l’Argentine a mis au point une riposte dans le cadre d’une politique d’État, financée uniquement au moyen du budget national. Le représentant a ensuite recommandé de solidifier les acquis pour les 15 prochaines années.
M. MAURO VIEIRA (Brésil) a appelé à redoubler d’efforts pour atteindre la cible 90-90-90, estimant que la riposte doit reposer sur trois piliers: la promotion des droits de l’homme des personnes infectées, l’universalisation de l’accès à la prévention et au traitement, et la disponibilité des ressources nécessaires aux plans national et international.
Le représentant a appelé les gouvernements des pays à forte prévalence de la maladie à mieux cibler les besoins des populations exposées, indiquant qu’au Brésil, il s’agit notamment des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes et des usagers de drogues injectables.
Il a expliqué que le Brésil avait intégré la prophylaxie préexposition à sa stratégie nationale de lutte contre la maladie et assurait un accès systématique au traitement antirétroviral.
Le représentant a ensuite appelé à poursuivre les efforts mondiaux de lutte contre la tuberculose, qui demeure l’une des principales causes de décès des personnes vivant avec le VIH/sida.
Mme MARIANNE LOE (Norvège) a appelé à veiller à ce que la discrimination et la pénalisation ne deviennent pas un frein à la lutte contre le VIH/sida. Elle a indiqué que l’expérience démontre que le renforcement de la dimension des droits de l’homme permet d’obtenir des résultats plus durables en matière de lutte contre le VIH/sida. La représentante a estimé que l’éducation était le meilleur moyen de sensibiliser les filles et de les protéger contre tout risque de contamination au VIH/sida. Elle a ensuite parlé des initiatives de la Norvège qui a favorisé l’adoption d’une résolution visant à prévenir la transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant dans le milieu carcéral. Elle a exhorté le Programme commun ONUSIDA de mettre en œuvre cette résolution et les bailleurs de fonds à financer de tels programmes en milieu carcéral.
Environ 1,5 million de personnes vivent avec le VIH/sida au Kenya, a indiqué Mme SUSAN WANGECI MWANGI (Kenya). En 2015, 77 647 nouveaux cas d’infection ont été enregistrés, dont 55% parmi des adolescents et des jeunes âgés de 15 à 24 ans. Pour gérer cette épidémie, le Kenya a adopté une réponse multisectorielle en vue de renforcer l’accès des jeunes et des plus vulnérables à des services adéquats. Avec l’assistance de ses partenaires, le Kenya a établi un profil statistique du statut de l’épidémie dans ses 47 comtés.
En septembre 2015, a expliqué la représentante, le Gouvernement a élaboré un plan de mise en œuvre accélérée pour mettre fin aux nouvelles infections à VIH et aux décès liés au sida chez les adolescents et les jeunes. Le Cadre stratégique du Kenya sur le VIH/sida pour 2014/15-2018/19 est aligné sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’Agenda 2063 de l’Union africaine et ses objectifs sur le contrôle du VIH, ainsi que sur son propre plan de développement Vision 2030. Il s’agit notamment de trouver une nouvelle approche en matière de financement pour accroître les ressources et l’accès à une couverture sanitaire universelle pour ceux qui vivent avec le VIH.
Le Président Kenyan, M. Uhuru Kenyatta, a également lancé en 2015 l’initiative « The ALL IN to end Adolescent Aids » afin de mobiliser et autonomiser les jeunes et encourager leur participation au processus de prise de décisions à ce sujet. L’année dernière, a ajouté Mme Mwangi, le pays a réaffirmé son engagement à enrayer la stigmatisation à travers une nouvelle campagne nationale intitulée « Kick out HIV stigma » qui utilise le pouvoir du football pour combattre la discrimination liée au VIH/sida. Enfin, le Kenya a développé un deuxième cadre pour éliminer la transmission mère-enfant sur la période 2016-2021.
M. MICHAEL DOUGLAS GRANT (Canada) a regretté l’absence de progrès pour faire baisser le taux de prévalence et de mortalité liées au VIH/sida ces dernières années. Pour inverser cette tendance, le représentant a appelé à mieux atteindre les populations vulnérables et marginalisées, y compris les adolescents. Il faut également améliorer l’émancipation des femmes et des filles, a-t-il dit, appelant à mieux les prendre en compte dans la riposte contre la maladie.
Le représentant a par ailleurs appelé à faire davantage de progrès pour fournir des traitements contre la tuberculose et augmenter les fonds alloués à la recherche contre cette maladie. Enfin, le représentant a salué les efforts déployés par l’ONUSIDA.
M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a estimé que la lutte contre le VIH/sida doit tenir compte des particularités culturelles et religieuses des pays. Il a indiqué que son pays ne pouvait accepter certaines dispositions relatives à la distribution de seringues et autres pratiques controversées définies dans le rapport du Secrétaire général comme des moyens efficaces de lutte contre le VIH/sida. « Lutter contre la dépendance à l’opium en remplaçant une drogue par une autre n’est pas acceptable », a jugé le représentant russe qui a précisé que la méthadone est interdite en Russie. Le représentant russe s’est dit très perplexe quant au contenu du rapport du Secrétaire général qui indique que « la pénalisation de la possession de drogue et de la toxicomanie représente un frein à la lutte contre le VIH/sida ».
Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a dit les efforts de son pays en matière de prévention, citant notamment des programmes de sensibilisation à l’intention des populations scolaires, des mesures d’accompagnement pour les populations à risque, et des études sur les taux de prévalence des femmes enceintes. Elle a expliqué que la Hongrie avait fait de réels progrès en direction de la cible 90-90-90, précisant que deux de ces cibles avaient été atteintes. Elle a expliqué que 90% des personnes diagnostiquées avec le VIH/sida en Hongrie recevait un traitement antirétroviral.
M. MIRGUL MOLDOISAEVA (Kirghizistan) a indiqué que le programme national de lutte contre les infections à VIH pour la période 2017-2021 sera bientôt adopté. Pour réaliser les objectifs du programme, le Gouvernement est en train de recenser le nombre de personnes vivant avec le VIH. À cette fin, des tests rapides sont administrés et des cliniques mobiles ont été établies dans les zones rurales isolées. L’augmentation de l’accès de la population aux tests de dépistage a permis d’améliorer le taux de détection qui est passée de 588 cas, en 2015, à plus de 714 en 2016.
Le représentant a également indiqué qu’un débat sur la politique nationale relative au VIH/sida est en cours préparation dans le cadre de la Conférence nationale de haut niveau sur la propagation et le traitement du VIH/sida qui doit se dérouler pendant la visite, au mois de septembre prochain, de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le VIH/sida en Europe de l’Est et en Asie centrale.
Avant de terminer, le représentant a indiqué que les difficultés économiques que connaissent les pays en développement restreignent leur aptitude à financer les programmes de VIH/sida par le budget de l’État. Il a averti que sans un financement adéquat, des avancées seront perdues et les programmes fermés.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a indiqué que son pays avait intensifié sa riposte contre l’épidémie depuis l’adoption, en 2016, de la Déclaration d’engagement sur le VIH/sida de l’Assemblée générale, notamment en menant des programmes de sensibilisation dans les communautés et les groupes les plus vulnérables afin de dépister les personnes qui ignorent être infectées.
L’Indonésie a aussi renforcé les soins de santé à tous les niveaux, en améliorant les services de prévention de transmission de la mère à l’enfant et en fournissant des traitements antirétroviraux à toutes les personnes atteintes. Des programmes de prévention ciblent également les groupes à haut risque, notamment via des campagnes de distribution de préservatifs.
Le délégué a toutefois regretté l’absence dans la Déclaration d’engagement de 2016 de recommandations liées à l’abstinence, la fidélité et toute autre « pratique sexuelle responsable ».
M. CHRISTIAN BRAUN (Luxembourg) a rappelé que son pays soutenait financièrement et politiquement l’initiative 90-90-90 depuis le début, précisant que le parlementaire luxembourgeois Marc Engel a été nommé « défenseur d’ONUSIDA » pour sa contribution à cette initiative. Il s’est félicité du succès du Plan mondial pour l’élimination de la transmission de la mère à l’enfant. Le représentant s’est toutefois inquiété des difficultés rencontrées pour atteindre le premier objectif visant à ce que 90% des personnes touchées connaissent leur statut, estimant que le taux actuel est plus proche de 60%. Il a ensuite fait part de la détermination du Luxembourg à contribuer à combler le déficit d’investissement de sept milliards de dollars pour éradiquer le sida d’ici à 2030 et atteindre l’objectif 90-90-90 d’ici à 2020, précisant que la contribution actuelle de son pays à la lutte contre le VIH/sida s’élevait à 2,7 millions de dollars par an.
Tout en saluant les progrès réalisés dans la riposte contre le VIH/sida, Mme STEFANIE AMADEO (États-Unis) a appelé à redoubler d’efforts pour mettre fin à l’épidémie d’ici à 2030. La représentante a salué les travaux effectués à cette fin par l’ONUSIDA, qui fournit notamment des données épidémiologiques fiables et de qualité.
Elle a ensuite appelé à accorder la priorité à des actions de prévention chez les jeunes femmes et adolescentes à l’échelle mondiale. « Il ne faut pas nous reposer sur nos lauriers », a déclaré la représentante, tout en appelant l’ensemble des partenaires à s’unir de façon concertée pour atteindre les objectifs définis en 2016.
Mme JUDITH ARRIETA MUNGIA (Mexique) a jugé indispensable de revitaliser la lutte contre le VIH/sida au niveau mondial. Pour sa part le Mexique a mis au point un programme national qui a donné des résultats car, aujourd’hui, le pays enregistre le taux le plus bas de personnes vivant avec le VIH/sida dans la région des Amériques. Toutefois, il reste encore des objectifs à atteindre, en mettant l’accent sur le respect des droits de l’homme de certains groupes clefs comme les homosexuels et les travailleurs du sexe. Entre 2013 et 2016, le Gouvernement a réparti cinq millions de dollars entre des organisations de la société civile pour améliorer les actions de prévention, de détection et de traitement.
Il ne fait aucun doute, a assuré la représentante, que la prévention doit constituer l’axe de la réponse internationale. En tant que membre du Conseil de coordination du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), le Mexique réaffirme son appui au Programme en vue de mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030. Le Programme, a-t-elle conclu, doit pouvoir opérer, y compris financièrement, comme une agence du système des Nations Unies.
M. RUBÉN IGNACIO ZAMORA RIVAS (El Salvador) a indiqué que son pays mettait l’accent sur la lutte contre les inégalités de traitement et de droits des personnes vivant avec le VIH/sida. Il a expliqué qu’El Salvador lançait une réforme intégrale de son système de santé en mettant l’accent sur la participation sociale et les droits de l’homme afin de garantir une santé sans discrimination. Il a cité la création d’un plan 2016-2020 consacré à la lutte contre le VIH/sida. « Nous disposons en outre d’un nouveau système d’information qui nous permet désormais de mieux maîtriser l’épidémie et mieux orienter notre riposte » a-t-il indiqué.
M. MANABU SUMI (Japon) a indiqué que le meilleur moyen de garantir un traitement antirétroviral à toutes les personnes contaminées est d’assurer une couverture médicale universelle. Il a aussi souligné la nécessité de créer un monde exempt de stigmatisation et de discrimination. Il a par ailleurs signalé que son pays s’est engagé, l’année dernière, à consacrer 1,1 milliard de dollars aux institutions internationales de santé.
Mme FABIENNE BARTOLI (France) s’est réjouie des progrès considérables réalisés dans la lutte contre le VIH/sida, grâce à une mobilisation sans précédent des États, des organisations internationales et régionales et de la société civile.
La représentante a toutefois estimé que les défis pour parvenir aux cibles de 2020 restaient « immenses ». Pour y parvenir, elle a prôné une « approche inclusive » en termes d’accès à la prévention, aux traitements et au dépistage, en accordant notamment la priorité aux femmes et aux filles.
Mme Bartoli a ensuite annoncé que la prophylaxie de préexposition avait été rendue accessible aux personnes les plus exposées en France pour porter un coup d’arrêt à la progression de la maladie.
Elle a par ailleurs appelé à lutter contre la stagnation des investissements dans la riposte contre la maladie. « L’effet levier de l’innovation et de la recherche est indispensable », a-t-elle souligné, ajoutant que la France jouait un rôle de premier plan dans l’investissement dans la recherche.
La représentante a également appelé à mettre en place une « gouvernance coopérative et innovante » sous l’égide de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, l’ONUSIDA.