En cours au Siège de l'ONU

7852e séance – matin 
CS/12655

L’évacuation des quartiers est d’Alep s’est achevée mais la situation en Syrie demeure catastrophique, déclare le Directeur des opérations d’OCHA, M. John Ging

Le Directeur des opérations du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), M. John Ging, a indiqué, ce matin, devant le Conseil de sécurité, que le personnel onusien avait pu surveiller les opérations d’évacuation conduites dans l’est d’Alep, conformément à la résolution 2328 (2016), adoptée au début de cette semaine.

Si ces opérations se sont achevées la nuit dernière, permettant ainsi l’évacuation de plus de 35 000 personnes, la situation en Syrie demeure néanmoins catastrophique, a-t-il averti.  M. Ging a, en particulier, attiré l’attention des membres du Conseil sur la situation dans la ville d’Edleb qui court le risque de connaître le même destin qu’Alep.

M. Ging a entamé son intervention en détaillant les quatre éléments du rôle de l’ONU dans l’appui aux évacuations conduites dans les quartiers est de la ville d’Alep: la supervision des évacuations, l’appui aux personnes évacuées, l’accès aux quartiers est d’Alep repris par le Gouvernement pour fournir une aide aux personnes qui s’y trouvent encore et la fourniture d’une aide humanitaire aux personnes démunies dans la partie ouest de la ville. 

Il a précisé que 308 bus, 61 ambulances et 1 231 véhicules privés ont été utilisés lors de ces opérations, lesquels ont transité par de nombreux points de contrôle pour se diriger vers l’ouest d’Alep puis vers Edleb.  Le Directeur des opérations a indiqué que 1 300 personnes avaient également été évacuées des villages assiégés de Foah et Kafraya à Edleb.

Le personnel onusien a pu surveiller les évacuations conduites par bus et ambulances et, « dans la mesure du possible », s’assurer qu’aucune personne n’a été violentée, débarquée ou détenue au passage des points de contrôle, a affirmé M. Ging.  Il a insisté sur « l’extrême complexité » des opérations d’évacuation, en raison des conditions posées lors des négociations par les parties, en vue notamment d’une « synchronisation » des évacuations dans l’est d’Alep et celles conduites dans les villages de Foah et de Kafraya.

Les personnes évacuées ont pu se rendre là où elles le souhaitaient, a assuré le Directeur des opérations, tout en précisant que l’écrasante majorité s’était rendue dans les zones contrôlées par des groupes armés non étatiques.  Selon les organisations humanitaires, 23 615 personnes seraient arrivées dans les deux centres d’accueil établis à Atareb (Alep) et à Sarmada (Edleb) et dans 60 villages.  Un petit nombre des personnes évacuées ont préféré se rendre dans la partie ouest d’Alep.

M. Ging a passé en revue les différents incidents sécuritaires qui ont fait obstacle aux opérations d’évacuation.  L’ONU a ainsi reçu des informations crédibles selon lesquelles des forces alliées non syriennes dans l’ouest d’Alep auraient, le 16 décembre, détenu et passé à tabac 10 personnes parmi les 800 évacuées à ce moment-là, et en en tuant une autre, a déploré le Directeur des opérations.

Il a noté que 105 membres de l’ONU étaient présents à Alep, dont 34 se consacrent à la supervision des évacuations dans l’est d’Alep, dans le cadre de la résolution précitée.  L’ONU a demandé aujourd’hui l’accord du Gouvernement syrien pour que 100 onusiens supplémentaires soient déployés afin de superviser la réponse apportée dans l’est d’Alep, a soutenu M. Ging.

« Dans le cadre de la résolution 2328 (2016), nous sommes prêts à mettre en œuvre, dans les prochains jours, un plan pour tous les quartiers de l’est d’Alep, dès que nous aurons reçu le feu vert du Gouvernement syrien. »  Il a indiqué que, jusqu’à présent, l’ONU et ses partenaires avaient pu avoir accès à tous les quartiers auparavant assiégés, à l’exception de ceux repris hier par le Gouvernement syrien.  Une équipe forte de 16 onusiens est prête à s’y déployer, dès que le Gouvernement syrien aura donné son accord, a-t-il affirmé.

Le Directeur des opérations d’OCHA a ensuite évoqué la situation de la population civile à Edleb.  « Celle-ci court le risque de connaître le même destin que celle d’Alep si elle devient l’enjeu d’une nouvelle offensive plus soutenue », a prévenu M. Ging.  Parmi les 2 millions de personnes de la ville, 700 000 sont des personnes déplacées, dont 35 000 viennent des quartiers est d’Alep.

M. Ging a également insisté sur la gravité de la situation à Al Wa’er, un quartier assiégé aux alentours d’Homs, où 50 000 personnes font face à une grave pénurie d’articles de première nécessité.  Les avancées de Daech à Palmyre et dans certaines zones près d’Homs ont conduit à des milliers de déplacements forcés, a noté M. Ging.  Il s’est félicité, cependant, des progrès recensés dans la situation à Berm, près de la frontière avec la Jordanie.

De manière générale, M. Ging a estimé à 13,5 millions le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire d’urgence en Syrie, en précisant que près de 9 millions de personnes étaient exposées à une insécurité alimentaire.  Cette année, près de 1,3 million de personnes se trouvant dans les zones assiégées, des zones difficiles d’accès et autres localités prioritaires ont pu bénéficier d’une aide, a-t-il indiqué.

Il a vivement regretté les obstacles qui entravent le bon acheminement de l’aide, dont les retards accusés par le Gouvernement syrien dans l’approbation des convois.  « Nous avons besoin de procédures simplifiées », a-t-il insisté.  M. Ging a fait remarquer que l’ONU et ses partenaires avaient, en cas d’accord du Gouvernement syrien, la capacité d’apporter une aide immédiate à plus de 300 000 personnes se trouvant dans les zones assiégées et difficiles d’accès.

« Malgré les appels pour mettre fin aux sièges comme tactique de guerre, 2016 s’achève avec des centaines de milliers de civils pris au piège, tandis que les travailleurs humanitaires continuent d’éprouver des difficultés à leur apporter de l’aide », a affirmé le Directeur des opérations d’OCHA.  M. Ging a donc appelé les membres du Conseil, ainsi que toutes les parties au conflit et leurs alliés, à redoubler d’efforts pour mettre fin au conflit et à fournir, dans l’intervalle, un appui efficace à l’action humanitaire conduite dans le pays.

« Comme cela a été dit à maintes reprises, il n’y a pas de solution militaire à la crise », a-t-il affirmé, en saluant l’annonce faite par l’Envoyé spécial, M. Staffan de Mistura, d’une reprise des pourparlers politiques en février 2017.  Pour l’une de ses dernières interventions devant le Conseil de sécurité, puisque le mandat de son pays s’achève à la fin de l’année, le délégué de la Nouvelle-Zélande a regretté qu’il y ait eu peu d’avancées concrètes pour atténuer les souffrances du peuple syrien.

Au cours du mois dernier, les objectifs humanitaires avaient été mis de côté, « dès lors qu’ils ne coïncidaient pas avec les ambitions militaires de ceux ayant un pouvoir de décision au sein du Conseil », a-t-il déploré.  Cela est contraire aux principes du droit international humanitaire, a-t-il insisté, tout en ajoutant que ces divergences existaient également en ce qui concerne les situations au Yémen et au Soudan du Sud.

Rappelant que la protection des civils devrait être de mise partout en Syrie, le représentant de la Nouvelle-Zélande a salué la résolution adoptée par l’Assemblée générale il y a deux jours portant création d’un Mécanisme d’enquête sur les crimes graves commis pendant le conflit syrien.  Pour sa délégation, seule une solution politique pourra conduire à une paix durable pour la population syrienne.  

Réagissant à la déclaration que vient de faire son homologue de la Nouvelle-Zélande, qu’il a mis sur le compte d’une « déclaration de fin de mandat », le délégué de la Fédération de Russie a assuré que les conséquences humanitaires de l’évacuation figurent au centre des préoccupations de la Russie.  Cette évacuation, a-t-il tenu à préciser, est instrumentalisée par les groupes terroristes. 

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