La Procureure de la Cour pénale internationale promet un élargissement significatif de ses enquêtes en Libye en 2017
La Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), Mme Fatou Bensouda, a affirmé, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, qu’elle entendait faire de la Libye une situation prioritaire en 2017 afin de combattre le climat d’impunité dans le pays. « Mon Bureau fera tout ce qui est en son pouvoir pour élargir de manière significative ses enquêtes l’année prochaine en Libye », a-t-elle assuré, précisant que ces enquêtes pourraient viser les crimes commis par Daech.
Ce débat du Conseil, consacré aux activités de la Cour dans le cadre des affaires relatives à la situation en Libye, a été marqué par le soutien apporté par plusieurs pays à la Cour, qui se trouve fragilisée depuis l’annonce faite par plusieurs pays africains de se retirer du Statut de Rome. La promotion de « relations apaisées et empreintes de confiance » entre l’Afrique et la CPI passe forcément par le dialogue et la coopération, a estimé le représentant du Sénégal.
La Procureure a commencé son intervention en faisant un point sur l’affaire Saif Al-Islam Qadhafi en regrettant que celui-ci n’ait toujours pas été remis à la Cour. Démentant certaines informations, elle a affirmé qu’il se trouvait toujours à Zintan et n’était pas à la disposition du Conseil de la Présidence du Gouvernement d’entente nationale. « J’appelle les autorités libyennes à faire tout ce qui est leur pouvoir pour remettre Saif Al-Islam Qadhafi à la CPI sans délais », a-t-elle dit, appuyée par les délégués de l’Égypte, de la France ou bien encore du Venezuela.
« L’instabilité persistante et le conflit armé empêchent mon Bureau de conduire des enquêtes sur le territoire libyen, que ce soit en lien avec des affaires existantes ou avec de potentielles affaires », a-t-elle ensuite déclaré. Pour y remédier, la Procureure a exhorté le Conseil à agir afin d’assurer la sécurité du personnel de la CPI conduisant des enquêtes en Libye.
Mme Bensouda a expliqué que son engagement de faire de la Libye une situation prioritaire en 2017 était motivé par plusieurs facteurs, dont le climat d’impunité, le souhait de rendre justice aux victimes et l’atténuation des souffrances des civils. Elle a précisé que ces enquêtes pourraient viser les crimes commis par Daech et les groupes affiliés, ainsi que les actes criminels commis contre des réfugiés et migrants en Libye.
Outre les difficultés sécuritaires, Mme Bensouda a insisté sur le manque de ressources financières de son Bureau, indiquant qu’elle n’avait pas eu d’autre choix que de dégager des ressources additionnelles au sein de son budget pour les allouer à la situation en Libye. Soulignant que ces ressources manqueront de fait
à d’autres situations, elle a appelé le Conseil à appuyer l’assistance financière apportée par l’ONU à son Bureau en 2017. « Les Libyens ne méritent rien de moins », a affirmé la Procureure.
Cette demande de la Procureure a été diversement accueillie par les États Membres. La déléguée britannique a ainsi assuré qu’elle œuvrait avec ses partenaires à l’élaboration d’un budget qui réponde aux besoins de la Cour, « dans la limite des ressources disponibles », tandis que son homologue de l’Uruguay a souhaité que la Procureure dispose de toutes les ressources dont elle a besoin pour poursuivre ses enquêtes en 2017.
Le représentant de la Fédération de Russie a, en revanche, qualifié cette demande « d’illogique ». Les partisans du renvoi à la CPI de la situation en Libye auraient dû être conscients des ressources financières accrues qu’un tel renvoi impliquerait, a-t-il affirmé. Il s’est également étonné du fait que le rapport à l’examen ait été transmis à la veille de cette réunion, et ce, « pour des raisons qui nous échappent ». Cela suscite des doutes sur la volonté de la Cour d’avoir un dialogue constructif avec la Conseil, a-t-il dit.
Faisant référence à l’annonce du retrait du Statut de Rome de certains pays, le délégué russe a douté de l’opportunité de la CPI de se saisir de nouvelles affaires. Plusieurs délégués ont profité de cette séance pour dire leur préoccupation devant l’annonce de ces retraits qui placent la CPI, de l’avis du représentant de l’Espagne, dans une « situation délicate ».
Inquiété de la détérioration des relations entre la CPI et certains États africains, le représentant de la Nouvelle-Zélande a ainsi regretté que la réunion prévue en septembre entre le Conseil de sécurité et le Comité ministériel de l’Union africaine sur la CPI n’ait pas pu avoir lieu. « Il faut lancer un dialogue ouvert, honnête et respectueux entre le Conseil de sécurité, la CPI et ses membres africains », a-t-il affirmé.
Même son de cloche du côté du délégué du Sénégal qui a regretté « profondément » les retraits, « même s’il faut reconnaître qu’ils constituent un acte de souveraineté ». « La CPI reste aujourd’hui le seul recours pour les victimes lorsque le droit à la justice ne s’exerce pas in situ », a-t-il dit.
Mme Bensouda n’avait pas dit autre chose lorsqu’elle a demandé l’appui de la communauté internationale pour réaliser le plein potentiel du Statut de Rome en Libye et ailleurs. « Cela est une nécessité si nous voulons rendre justice aux victimes et renforcer le droit international. »
LA SITUATION EN LIBYE
Déclarations
Mme FATOU BENSOUDA, Procureure de la Cour pénale internationale (CPI), a indiqué que son Bureau a demandé en avril 2016 à la Chambre préliminaire d’enjoindre Al-’Ajimi al-’Atiri de remettre à la Cour Saif Al-Islam Qadhafi. M. al-’Atiri dirige le bataillon Abu-Bakr al-Siddiq à Zintan, sous le contrôle duquel Saif Al-Islam Qadhafi est placé, a-t-elle expliqué, ajoutant que son Bureau était en attente de nouveaux développements s’agissant de cette requête.
Mme Bensouda a affirmé que les informations faisant état de la libération de Saif Al-Islam Qadhafi à Zintan en raison d’une amnistie étaient fausses. Il est clair que Saif Al-Islam Qadhafi est à Zintan et ne se trouve pas sous le contrôle du Conseil de la Présidence du Gouvernement d’entente nationale, a-t-elle poursuivi. Mme Bensouda a appelé les autorités libyennes à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour remettre Saif Al-Islam Qadhafi à la CPI sans délais.
S’agissant de l’affaire portée contre Abdullah al-Senussi, Mme Bensouda a rappelé que la Chambre préliminaire I avait conclu à l’irrecevabilité de cette affaire et estimé qu’il n’y avait pas d’éléments nouveaux de nature à contester le fondement sur lequel cette décision a été prise.
Elle a ensuite détaillé la situation actuelle en Libye, la jugeant inacceptable. Les exécutions, y compris celles qui seraient le fait de Daech, sont à l’origine du grand nombre de tués sur la période soumise à l’examen, tandis que les informations faisant état de fosses communes sont en augmentation, a-t-elle dit.
Elle a indiqué que le nombre de personnes déplacées en Libye était de près de 350 000. L’instabilité persistante et le conflit armé empêchent mon Bureau de conduire des enquêtes sur le territoire libyen, que ce soit en lien avec des affaires existantes ou avec de potentielles affaires, a-t-elle déclaré.
Mme Bensouda a exhorté le Conseil à agir afin d’assurer la sécurité du personnel de la CPI conduisant des enquêtes en Libye, avant d’insister sur l’engagement de son Bureau de renforcer ses efforts pour lutter contre le climat d’impunité dans ce pays. Malgré les difficultés, y compris la question des ressources financières, mon Bureau fera tout ce qui est en son pouvoir pour élargir de manière significative ses enquêtes en 2017 dans le pays, a-t-elle assuré.
La Procureure a précisé que ces enquêtes viseront à entamer des poursuites dans les affaires d’activité criminelle de la compétence de la Cour, y compris les crimes qui auraient été commis par Daech et les groupes affiliés. Mme Bensouda a affirmé que son engagement de faire de la Libye une situation prioritaire en 2017 était motivé par plusieurs facteurs, dont le climat d’impunité, le souhait de rendre justice aux victimes et l’atténuation des souffrances des civils.
Mme Bensouda a déclaré que les efforts de son Bureau en vue de l’arrestation d’autres suspects ont avancé de manière significative et insisté sur son intention de délivrer de nouveaux mandats d’arrêt.
Mon Bureau ne peut, seul, parvenir à ses objectifs en Libye, a-t-elle affirmé, ajoutant que la lutte contre les activités criminelles exigeait des efforts communs. Elle a indiqué que son Bureau continuera d’étudier la faisabilité de l’ouverture d’une enquête sur les actes criminels qui auraient été commis contre des réfugiés et migrants en Libye, y compris des actes de violence sexuelle contre des enfants.
Elle a remercié les États de la région, en particulier la Tunisie et la Jordanie, pour leur bonne coopération avec son Bureau et appelé les rares États qui n’ont pas été aussi coopératifs à y remédier. Mme Bensouda a indiqué avoir dégagé des ressources additionnelles au sein de son budget pour les allouer à la situation en Libye. « Je n’avais pas le choix », a-t-elle dit.
Soulignant que ces ressources manqueront de fait à d’autres situations, elle a appelé le Conseil à appuyer l’assistance financière apportée par l’ONU à son Bureau en 2017. Les Libyens ne méritent rien de moins, a affirmé Mme Bensouda.
La Procureure a déclaré que les crimes les plus atroces devaient faire l’objet d’une reddition de comptes et d’une condamnation universelle. En adoptant le Statut de Rome, les États ont reconnu le lien intrinsèque qui existe entre une telle reddition de comptes et une paix durable, a-t-elle poursuivi. « La Cour demeure pleinement engagée en faveur de son mandat afin de mettre un terme à l’impunité pour les crimes les plus graves et, ce faisant, contribuer à la prévention de futures atrocités. »
Enfin, Mme Bensouda a demandé l’appui de la communauté internationale pour réaliser le plein potentiel du Statut de Rome en Libye et ailleurs. « Cela est une nécessité si nous voulons rendre justice aux victimes et renforcer le droit international. »
Mme HELEN MULVEIN (Royaume-Uni) a rappelé le rôle déterminant que joue la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur les crimes graves, et en juger. Elle a regretté de constater la détérioration de la situation en Libye, où Daech continue de perpétrer des violations massives des droits de l’homme. Nous souscrivons, a poursuivi la délégation, aux efforts de la Procureure pour poursuivre son enquête, tout en étant préoccupés par des conditions de sécurité de nature à l’empêcher d’y parvenir.
Pour le Royaume-Uni, l’absence d’une « structure sécuritaire unifiée » dans le pays est un obstacle majeur. La représentante a ensuite pris note de la demande de moyens supplémentaires formulée par le Bureau du Procureur pour lui permettre d’ouvrir de nouvelles enquêtes. Reconnaissant les contraintes financières qu’il subit, la délégation britannique a assuré qu’elle œuvrait avec ses partenaires à l’élaboration d’un budget qui réponde aux besoins de la Cour, dans la limite des ressources disponibles.
Elle a en conclusion plaidé pour le transfèrement de Saif Al-Islam Qadhafi à La Haye, avant de demander aux « organismes de répression » en Libye de maintenir leur coopération avec la CPI.
M. ALEXIS LAMEK (France), pleinement conscient de l’insécurité et de l’instabilité qui rendent particulièrement délicate la poursuite des enquêtes par le Bureau du Procureur, a relevé la capacité du Bureau à poursuivre les enquêtes à distance et soutenu à cet égard les démarches et programmes qui visent à faciliter la collecte d’éléments de preuve et le recueil de témoignages par des canaux sécurisés.
Étant donné qu’il reste encore beaucoup à faire pour mettre un terme à l’impunité en Libye, la France, a-t-il ajouté, estime qu’il est plus essentiel que jamais que le Conseil continue d’apporter son soutien à la Cour et à la médiation des Nations Unies et notamment au Représentant spécial des Nations Unies, Martin Kobler. Il a dit également apporter tout son soutien au Conseil présidentiel de Fayez al-Sarraj pour l’aider à relever les défis auxquels il est confronté.
M. Lamek a rappelé que la poursuite des enquêtes par le Bureau requiert une coopération pleine et entière de toutes les parties prenantes, en suivant une approche intégrée. Il a aussi mis l’accent sur l’importance d’une coopération étroite avec les autorités libyennes pour mener les enquêtes en toute sécurité, se réjouissant des nouvelles perspectives de soutien mutuel qui découlent des dernières réunions tenues en octobre dernier.
La France estime aussi primordial de consolider la collaboration avec tous les États, qu’ils soient ou non parties au Statut de Rome, afin que les demandes du Bureau puissent trouver des réponses de la façon la plus efficace et rapide possible. Il a salué en particulier la coopération des autorités jordaniennes et tunisiennes.
M. Lamek a également fait des observations concernant les enquêtes en cours et estimé notamment que M. Saif Al-Islam Qadhafi devrait être remis à la Cour dans les meilleurs délais conformément à la demande des juges.
M. SEIF ALLA YOUSSEF KANDEEL (Égypte) a demandé au Gouvernement libyen de remettre Saif Al-Islam Qadhafi à la Cour pénale internationale (CPI), conformément au droit international et au principe de la complémentarité des juridictions nationales et internationales. Il a souligné l’importance du travail de la CPI, qui s’inscrit dans une vaste perspective de lutte contre l’impunité pour crimes graves.
La coopération de tous les États Membres est indispensable à cet égard, a ajouté le représentant, en donnant l’assurance que son gouvernement poursuivrait la sienne.
M. FRANCISCO JAVIER GASSO MATOSES (Espagne) a déploré le fait que Saif Al-Islam Qadhafi n’ait pas encore été remis à la Cour pénale internationale (CPI). Tout en admettant que la situation sécuritaire était difficile, il a estimé que la Libye devait respecter ses obligations en vertu des résolutions du Conseil. Préoccupé par les informations faisant état d’actes de torture commis à l’encontre de Saif Al-Islam Qadhafi, il a exhorté les autorités libyennes à faire toute la lumière sur ces allégations.
Le délégué a également déploré le fait que l’insécurité empêche la Cour de mener ses enquêtes sur le terrain. Il a appelé les États Membres à répondre favorablement aux demandes formulées par la Procureure pour que la Cour puisse mener à bien ses activités en Libye. Soulignant que le climat d’impunité continuait de régner dans le pays, il a appelé les acteurs à surmonter leurs divergences et a exhorté les pays de la région à œuvrer à la pacification de la Libye.
Le représentant a reconnu que la CPI était dans une situation « délicate » depuis l’annonce du retrait de pays africains du Statut de Rome. « Cela n’est pas une bonne nouvelle », a-t-il dit. En conclusion, il a apporté l’appui sans faille de son pays à la Cour, laquelle « entretient l’espoir de milliers de victimes ».
M. TAKESHI AKAHORI (Japon) a déclaré que son pays croyait fermement que davantage d’États devraient adhérer à la Cour pénale internationale (CPI) pour faire en sorte qu’elle puisse promouvoir efficacement l’état de droit. À long terme, a-t-il souligné, la CPI devrait devenir une véritable cour criminelle universelle et obtenir une base de soutien renforcée pour son travail. « Nous sommes préoccupés par les récentes décisions prises par certains États africains de se retirer de la CPI », a également déclaré le représentant.
Au sujet de la Libye, M. Akahori a noté qu’en raison des problèmes politiques et de sécurité actuels M. Saif Al-Islam Qadhafi n’avait toujours pas pu être remis à la Cour. Il a souhaité qu’avec l’amélioration de la situation sur place, la coopération entre les autorités libyennes et la CPI pourra être renforcée, « et que cela permettra à la Cour de jouer pleinement son rôle dans la lutte contre l’impunité ».
Il a exhorté toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu de l’Accord politique libyen, et assuré que le Japon « soutient pleinement les activités de la CPI, y compris celles du Bureau du Procureur ».
M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a reconnu la gravité de la situation en Libye sur les plans sécuritaire et politique. L’impasse actuelle, a-t-il déclaré, affaiblit les efforts du Gouvernement d’entente nationale pour résoudre les problèmes économiques et lutter efficacement contre les groupes armés non étatiques, y compris les organisations terroristes.
Le représentant s’est ensuite alarmé des flux d’armes lourdes qui arrivent dans le pays, où ont été signalées des allégations d’exécutions sommaires, de sévices sexuels et de travaux forcés. Malheureusement, a constaté la délégation, les conditions actuelles en Libye ne permettent pas aux autorités d’y mener des enquêtes, d’où l’importance du travail réalisé par la CPI.
La délégation s’est ensuite félicitée de l’accord conclu récemment à propos du retour des personnes déplacées et des réparations à leur verser. L’Angola a réaffirmé en conclusion que « ce n’est que dans un environnement de paix et de sécurité que les institutions judiciaires peuvent fonctionner normalement ».
M. EVGENY T. ZAGAYNOV (Fédération de Russie) a souligné qu’il n’y avait pas eu d’amélioration dans la situation sécuritaire en Libye. Le pays est toujours aussi morcelé et le pouvoir émietté malgré les efforts du Conseil de la Présidence, a-t-il dit. Il a estimé qu’il n’y avait pas d’autre option pour le pays que la poursuite d’un dialogue intra-libyen sous l’égide de l’ONU. En raison de ce contexte, la lutte contre le terrorisme est menée dans la confusion, a-t-il continué. Il a mis en garde contre les risques inhérents aux ingérences extérieures dans le pays en rappelant les erreurs tragiques commises en 2011.
Le représentant s’est étonné du fait que le rapport à l’examen ait été transmis à la veille de cette réunion et ce, « pour des raisons qui nous échappent ». Il a estimé que cette pratique d’une remise tardive devenait la norme, ce qui suscite des doutes sur la volonté de la Cour pénale internationale (CPI) d’avoir un dialogue constructif avec le Conseil.
Il a regretté que le Bureau de la Procureure n’ait toujours pas décidé d’ouvrir une enquête sur les bombardements commis par l’OTAN en 2011. Ces cinq dernières années, aucune enquête n’a été ouverte, a-t-il fait remarquer. Il a indiqué que les partisans du renvoi à la CPI de la situation en Libye auraient dû être conscients des ressources financières accrues qu’un tel renvoi impliquerait. Les demandes d’une augmentation des ressources de la Cour sont illogiques, a-t-il jugé.
Enfin, au regard de l’annonce du retrait du Statut de Rome de certains pays, le délégué russe a douté de l’opportunité de la CPI de se saisir de nouvelles affaires.
Mme SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) a déclaré qu’en dépit des défis qui se posaient au plan sécuritaire en Libye, sa délégation était encouragée par les efforts des autorités libyennes, comme en témoigne l’accord de coopération conclu entre le Parquet libyen et la Cour pénale internationale (CPI). Les allégations de crimes graves contre des civils attribués à Daech et à d’autres acteurs doivent faire l’objet d’une enquête au nom de la lutte contre l’impunité, a plaidé Mme Adnin.
Soulignant que la Malaisie s’exprimait pour la dernière fois sur le sujet à l’ordre du jour, la représentante a rappelé sa contribution, en tant que membre non permanent du Conseil, aux efforts de stabilisation de la Libye, où malgré tout, « des progrès historiques ont été accomplis ». Elle a réaffirmé son soutien sans faille à ce pays en vue de lui permettre de surmonter l’adversité et de parvenir à un accord politique.
M. XU ZHONGSHENG (Chine) a appuyé le processus de transition en cours en Libye sous les auspices de l’ONU. Il a espéré que les divergences politiques seront réglées par la voie des négociations en vue de la stabilisation du pays. La position de la Chine sur la Cour pénale internationale (CPI) reste inchangée, a affirmé le délégué.
Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a affirmé que la persistance de la crise en Libye nourrissait le climat d’impunité. Elle a souligné l’importance de l’instauration d’un gouvernement unifié et stable en Libye et a demandé la mise en œuvre de l’Accord politique libyen. La déléguée a également encouragé toutes les parties à progresser sur la voie des négociations. La Chambre des représentants doit assumer ses responsabilités dans la mise en œuvre des dispositions de l’Accord politique libyen, a-t-elle affirmé.
La déléguée a regretté que les exactions continuent d’être commises contre les civils et estimé que les groupes armés agissaient dans un climat d’impunité. La présence de Daech en Libye demeure une menace pour la sécurité de la Libye et la région, a affirmé la représentante, avant d’insister sur l’importance de la reddition de comptes dans la promotion de l’état de droit.
Si les actes commis sous le régime Qadhafi peuvent paraître lointains, ils doivent être jugés, a-t-elle affirmé. Elle a, à cet effet, demandé la remise de M. Qadhafi à la Cour pénale internationale (CPI). En conclusion, la représentante a assuré de la volonté de son pays d’œuvrer avec les partenaires de la région en vue de la stabilisation de la Libye.
M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) a regretté que la conclusion de l’Accord politique libyen et les progrès vers la mise en place d’un gouvernement d’entente nationale n’eussent pas permis, comme espéré, de rétablir l’autorité de l’État, de restaurer l’état de droit, la protection des droits de l’homme et la justice pour tous. Il a jugé extrêmement compliqué l’action de la Cour pénale internationale (CPI) dans une Libye où la fragilité de la situation politique et sécuritaire empêche toute enquête sur le terrain.
Il a rappelé que Saif Al-Islam Qadhafi restait détenu dans une zone qui n’était pas sous le contrôle du Gouvernement d’entente nationale. Il s’est félicité de la coopération du Bureau du Procureur général de la Libye. Il a jugé indispensable l’intervention de la communauté internationale, notamment de la CPI, pour renforcer les capacités d’enquête et judiciaire nationales libyennes.
Il a salué l’accord de principe intervenu entre la CPI et les organes judiciaires et d’enquêtes libyennes. Par ailleurs, le représentant de la Nouvelle-Zélande s’est inquiété de la détérioration des relations entre la CPI et certains États africains en notant que trois États africains souhaitaient se retirer du Statut de Rome. Dans ce contexte, il a particulièrement regretté que la réunion prévue en septembre entre le Conseil de sécurité et le Comité ministériel de l’Union africaine sur la CPI n’eût pu avoir lieu. Il a jugé urgent de lancer un dialogue ouvert, honnête et respectueux entre le Conseil de sécurité, la CPI et ses membres africains.
M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a réitéré le plein appui de son pays au rôle de la Cour pénale internationale (CPI) pour renforcer l’état de droit au niveau international. À cet égard, il a appelé les États ne l’ayant pas encore fait à adhérer au Statut de Rome. Son message, a-t-il souligné, s’adresse aussi à ceux qui ont récemment dénoncé le Statut de Rome.
S’agissant de la Libye, le représentant a déploré le peu de progrès, regrettant que l’autorité du Conseil présidentiel reste contestée au niveau national et que le blocage de la Chambre des représentants de Tobrouk l’empêche de constituer son cabinet. Il faut, a-t-il insisté, promouvoir la réunification et la réconciliation pour « éviter un bain de sang » et mettre fin à la crise institutionnelle et au conflit.
Il s’est dit confiant que les nouvelles autorités libyennes respecteront leur engagement de rendre justice aux victimes des crimes commis dans ce pays, en coopérant avec le Bureau du Procureur de la CPI. À ce sujet, il a souhaité que la Procureure dispose de toutes les ressources dont elle a besoin pour poursuivre ses enquêtes en 2017.
M. YURIY VITRENKO (Ukraine) a constaté que la situation n’avait guère évolué depuis la précédente discussion du Conseil de sécurité consacrée aux travaux de la Cour pénale internationale (CPI) sur la mise en œuvre de la résolution 1970 (2011). Plus de cinq ans après l’adoption de cette résolution, a-t-il observé, les auteurs des principaux crimes contre l’humanité déférés devant la Cour n’ont pas eu à rendre compte de leurs actes.
Pour le représentant, cette situation n’est aucunement le résultat d’un manque de volonté des autorités libyennes de coopérer avec la Cour. Au contraire, le Gouvernement d’entente nationale libyen s’est réellement engagé à mettre en application le Mémorandum d’accord de 2013 sur le partage des obligations et le bureau du Procureur général libyen continue de coopérer avec la CPI, a-t-il noté, se félicitant aussi que la Cour poursuive l’examen des crimes commis sur le territoire libyen. Il a souhaité à cet égard qu’une attention particulière soit accordée aux atrocités commises par Daech, Ansar el-Charia et d’autres parties non étatiques en Libye.
Condamnant fermement les violences visant des civils, les enlèvements et assassinats de responsables du Gouvernement et de juges ainsi que les bombardements d’hôpitaux et les pillages perpétrés dans ce pays, il a soutenu en conclusion que la CPI ne pourra rendre justice aux victimes qu’avec le plein soutien du Conseil de sécurité et des entités pertinentes de l’ONU, dont la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), sans oublier les États parties au Statut de Rome.
Après avoir appelé tous les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à devenir partie au Statut de Rome de la CPI, M. HENRY ALFREDO SUÁREZ MORENO (Venezuela) a expliqué que la lutte contre l’impunité relève d’une nécessité absolue. Pour sa délégation, on continue de mesurer aujourd’hui les conséquences de l’offensive menée par l’OTAN en Libye, le pays étant plongé dans une situation chaotique permettant à Daech de perpétrer ses crimes.
Le Venezuela s’est dit ensuite satisfait du degré de coopération entre le Parquet libyen et le Bureau du Procureur de la CPI, avant de demander aux autorités de transférer M. Qadhafi à la Cour. Le représentant a en outre exprimé sa préoccupation devant les allégations d’actes de torture qui auraient été commis en Libye, et par le fait que les auteurs de ces actes n’aient pas encore été arrêtés, dont un aurait même pu continuer de travailler dans la prison où il était précédemment employé.
M. FODÉ SECK (Sénégal) a commencé par renouveler le soutien de son pays au Statut de Rome. Il a encouragé le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) à poursuivre les enquêtes dans les affaires Saif Al-Islam Qadhafi et Abdullah al-Senussi. Il a également engagé les autorités libyennes à travailler à l’édification d’un système judiciaire crédible et efficace. Dans cet esprit, il a réitéré son appui à la médiation et à la Mission d’appui des Nations Unies en Libye(MANUL).
D’après M. Seck, « la convergence entre les valeurs et les idéaux du Statut de Rome et les buts et principes de la Charte des Nations Unies dicte de s’inscrire dans une coopération toujours plus étroite entre la CPI et le Conseil de sécurité, dans leur combat contre l’impunité ».
Il a exhorté la communauté internationale à œuvrer en faveur du bon fonctionnement de la CPI et de l’universalité du Statut de Rome. La CPI, a-t-il rappelé, reste aujourd’hui le seul recours pour les victimes lorsque le droit à la justice ne s’exerce pas in situ. C’est pour cette raison qu’il a regretté « profondément » les retraits, « même s’il faut reconnaître qu’ils constituent un acte de souveraineté ».
Le représentant a dit avoir la profonde conviction que le changement de la perception négative de la Cour, la promotion des relations apaisées et empreintes de confiance mutuelle entre l’Afrique et la CPI et la prise en considération des perceptions de tous « passent forcément par le dialogue et la coopération ».
M. ELMAHDI S. ELMAJERBI (Libye) a souhaité que la situation dans son pays s’améliore pour permettre au Bureau du Procureur de poursuivre ses enquêtes et sa contribution au rétablissement de l’état de droit en Libye.