En cours au Siège de l'ONU

Conseil de sécurité
7716e séance – après-midi
CS/12402

Darfour: la nature du conflit est inchangée et le mandat de la Mission Union africaine/ONU est entravé, souligne devant le Conseil de sécurité le Chef des opérations de paix

La nature du conflit au Darfour reste inchangée depuis le renouvellement du mandat de l’Opération hybride de l’Union africaine et des Nations Unies au Darfour (MINUAD), le 1er juillet 2015, a déclaré cet après-midi, au Conseil de sécurité, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous.

Après avoir fait le point sur la situation au Darfour et sur les activités de la MINUAD, M. Ladsous a présenté les conclusions et recommandations issues du rapport conjoint du Secrétaire général et de la Présidente de la Commission de l’Union africaine concernant la MINUAD.

Ceux-ci recommandent que le Conseil de sécurité de l’ONU et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine envisagent de proroger le mandat de la MINUAD pour une période de 12 mois, jusqu’au 30 juin 2017, sans modification de ses priorités ni de ses effectifs militaires et de police autorisés.

S’agissant de ses relations avec le Gouvernement du Soudan, la MINUAD continue de faire face à des obstacles considérables qui entravent la réalisation de son mandat, a regretté le Secrétaire général adjoint.  

La situation au Darfour reste inchangée pour plusieurs raisons, a expliqué le Secrétaire général adjoint.  Premièrement, peu de progrès ont été enregistrés dans la recherche d’une solution politique viable au conflit.  Le Gouvernement du Soudan et les mouvements armés non signataires ne sont toujours pas parvenus à un consensus s’agissant de la place du Document de Doha pour la paix au Darfour dans le processus de négociation mené par le Groupe de mise en œuvre de haut niveau de l’Union africaine. 

Les 30 et 31 mai derniers à Doha, la MINUAD et le Gouvernement du Qatar ont mené des consultations avec le Mouvement pour la justice et l’égalité et l’Armée de libération du Soudan –faction Minni Minawi- pour aider au rapprochement des positions des deux parties. 

« Nous déplorons l’absence d’Abdul Wahid de la table de négociation et exhortons l’Armée de libération du Soudan –faction Abdel Wahid (ALS-AW)– à prendre part de façon constructive au processus », a dit M. Ladsous.  Pour l’heure, les Nations Unies et l’Union africaine appellent l’opposition soudanaise à adhérer à la feuille de route proposée par le Groupe de haut niveau et signée par le Gouvernement soudanais en avril. 

« L’adhésion de tous les acteurs concernés à la feuille de route représenterait sans aucun doute une avancée significative dans le processus de paix, qui ouvrirait la voie à des progrès en ce qui concerne les négociations de cessez-le-feu au Kordofan méridional et au Nil Bleu, le processus politique au Darfour, ainsi que le dialogue national », a-t-il ajouté. 

Deuxièmement, a poursuivi M. Ladsous, les violences intercommunautaires émanant de différends sur l’accès à la terre, à l’eau et aux zones de pâturage restent une cause majeure d’insécurité au Darfour.  Ces violences ont par ailleurs été exacerbées par la politisation des différends, l’armement des communautés, l’insuffisance des efforts pour restaurer l’état de droit, et l’impunité récurrente dont bénéficient leurs auteurs. 

Troisièmement, les combats entre le Gouvernement soudanais et l’Armée de libération du Soudan –tendance Abdel Wahid– à Jebel Marra, qui rejette toutes négociations avec le Gouvernement, se sont poursuivis.

Aujourd’hui, a souligné M. Ladsous, 2,6 millions de personnes demeurent déplacées au Darfour.  D’après le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), 80 000 personnes déplacées ont été enregistrées depuis la reprise des combats dans le djebel Marra à la mi-janvier, tandis que le statut de 127 000 autres personnes n’auraient pas encore été vérifié du fait d’un manque d’accès humanitaire.  De plus, 1,6 million de civils résident dans une soixantaine de camps pour personnes déplacées.

La liberté de mouvement de la MINUAD, notamment dans les zones de conflit, est limitée, et il y a des difficultés pour la délivrance de visas et le dédouanement des rations alimentaires destinées aux contingents militaires et de police.  Lors de la dernière réunion tripartite qui a eu lieu à Khartoum, le 23 mai, le Gouvernement a réitéré son engagement à œuvrer avec la MINUAD pour résoudre ces questions et, plus récemment, le Ministre des affaires étrangères soudanais, a répété cet engagement.  « Nous espérons que ces assurances se traduiront par des progrès sur le terrain », a dit le Secrétaire général adjoint.   

Par ailleurs, M. Ladsous a indiqué que l’ONU et l’Union africaine avaient poursuivi leurs consultations sur l’élaboration d’une stratégie de désengagement pour la MINUAD fondée sur les objectifs fixés par le Conseil de paix de l’Union africaine et le Conseil de sécurité.

Dans le cadre des priorités stratégiques de la MINUAD et, compte tenu de la situation au Darfour, a précisé M. Ladsous, le Secrétaire général et la Présidente de la Commission de l’Union africaine concernant la MINUAD ont recommandé dans leur rapport que la MINUAD axe ses efforts sur deux domaines d’action en particulier: protéger les personnes déplacées et remédier aux risques croissants de violence intercommunautaire au Darfour.

Ainsi, la MINUAD appuiera les mesures prises par les partenaires humanitaires et fournira une protection aux personnes déplacées en hiérarchisant ses activités et ses ressources existantes en fonction d’un bilan de la situation en matière de protection dans les camps de personnes déplacées, les zones où de nouveaux déplacements risquent d’avoir lieu et les zones de retours potentiels dans l’ensemble du Darfour.

Ensuite, s’agissant de la violence intercommunautaire, l’idée serait de conclure un accord politique global qui traite de questions essentielles telles que la gestion équitable des terres et autres ressources, reconnaisse les droits respectifs des agriculteurs et des éleveurs nomades, et habilite les mécanismes locaux de prévention et de règlement de conflits, traditionnels ou autres, tout en renforçant les capacités du système de justice pénale.   

« Au Darfour, la réalité n’est pas exactement la même que celle qui figure dans le rapport », a rétorqué le représentant du Soudan, M. Omer Dahab Fadl Mohamed.  Le représentant a choisi de se référer au rapport du Groupe de travail conjoint présenté au Mécanisme tripartite après sa visite dans les cinq États au Darfour, en mai dernier. 

Le Groupe de travail, a-t-il insisté, a constaté des progrès sur le plan sécuritaire, de même que la diminution des conflits intercommunautaires et une augmentation du nombre de déplacés retournant dans leurs foyers dans leur village d’origine, « dans le droit fil du Document de Doha ».  De plus, « le référendum administratif s’est tenu dans un environnement qui a permis aux citoyens du Darfour de faire valoir leurs droits, ce qui atteste de l’amélioration de la sécurité au Darfour », s’est-il félicité.

La MINUAD, composée de forces africaines, est le fruit d’un accord avec le Gouvernement du Soudan, a-t-il ensuite souligné.  Constatant que, « dans bien des régions du Darfour, la Mission n’est plus nécessaire », il a souhaité un retrait progressif des forces dans les zones du Darfour central, occidental et septentrional, comme point de départ, suite à quoi les devoirs de la Mission seraient transférés à l’équipe pays de l’ONU. 

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