En cours au Siège de l'ONU

7625e séance – après-midi
CS/12246

Conseil de sécurité: « le Yémen vit les jours les plus douloureux de son histoire », selon l’Envoyé spécial, M. Ismail Ould Cheikh Ahmed

La situation sécuritaire au Yémen s’est encore détériorée depuis le premier tour des pourparlers de paix, il y a deux mois, a déclaré, cet après-midi devant le Conseil de sécurité, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour ce pays, en soulignant qu’une cessation des hostilités et un esprit de compromis contribueraient à ouvrir la voie à un nouveau cycle de négociations et à un retour à une transition pacifique et ordonnée dans le pays.

« Le Yémen vit les jours les plus douloureux de son histoire », a affirmé M. Ismail Ould Cheikh Ahmed.  Cela fait deux mois maintenant que les parties se sont rencontrées en Suisse pour leur première série de pourparlers, qui avait débouché sur des accords concernant plusieurs mesures, notamment la livraison de l’aide humanitaire à Taïz et la libération de prisonniers.

À cette occasion, l’annonce de la cessation des hostilités s’était accompagnée de la création d’un comité de désescalade et de coordination pour veiller à ce que cet objectif soit rempli, ainsi que d’un accord de principe sur un cadre général fondé sur la résolution 2216 (2015).

Cependant, a regretté M. Ahmed, l’esprit positif qui avait fait naître l’espoir d’un avenir meilleur n’est plus au rendez-vous.  Depuis mars 2015, plus de 6 000 Yéménites ont perdu la vie et plus de 35 000 autres ont été blessés.  Le pays est de nouveau la cible de frappes aériennes et de combats au sol, tandis que les tirs de missiles en direction de l’Arabie saoudite se sont intensifiés.  L’escalade des opérations militaires et l’aggravation des tensions régionales, a-t-il dit, ont menacé de retarder une nouvelle série de pourparlers.

Une recrudescence des attaques terroristes a été, en outre, observée à Aden, Lahej, Abyan, Shabwa et Sanaa, de même que des attaques visant des postes de contrôle et des résidences de l’armée yéménite.  Des assassinats de responsables politiques et des services de sécurité se sont produits de manière régulière, a relevé l’Envoyé spécial.

De plus, l’absence de l’État dans de nombreuses régions du pays a facilité l’expansion des groupes terroristes comme Al-Qaida et Daech, notamment dans le gouvernorat d’Hadramaout, où ces groupes auraient pris le contrôle du trafic portuaire et se livreraient au commerce illicite d’hydrocarbures.

Le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire est essentiel pour permettre aux Yéménites de survivre à la crise qu’ils traversent dans la dignité et la sécurité, a ajouté M. Ahmed, qui a appelé le Gouvernement –et toutes les autres parties prenantes– à soutenir les activités menées en ce sens par les organismes des Nations Unies.

Au cours de ces dernières semaines, l’Envoyé spécial a discuté des défis qui se posent au processus de paix avec les dirigeants yéménites et les partenaires régionaux, notamment les Ministres des affaires étrangères de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, d’Oman, de la Jordanie et de la France, ainsi que le Secrétaire général du Conseil de coopération du Golfe et les Vice-Ministres des affaires étrangères du Japon et de la République de Corée.

Du 8 au 16 janvier, M. Ahmed a rencontré le Vice-Président et le Premier Ministre du Yémen, ainsi que d’autres responsables gouvernementaux et des personnalités de la société civile, en veillant à ce que soient mis en œuvre certains des engagements pris lors des discussions en Suisse.  Il a également œuvré à la libération, le 14 janvier, de deux ressortissants saoudiens par les Houthistes, une évolution positive suivie peu après de celle du Ministre yéménite de l’enseignement technique et professionnel et de quatre militants politiques yéménites et d’activistes.

L’Envoyé spécial a également expliqué avoir tenté d’obtenir des accords pour préserver le fonctionnement des institutions de l’État dont dépendent les Yéménites.  Ainsi, en collaboration avec le Coordonnateur résident de l’ONU, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et la Banque mondiale, il a travaillé à la relance de la Caisse de sécurité sociale du Yémen pour que les plus pauvres bénéficient d’une aide financière.

À cet égard, un soutien politique continu de toutes les parties et des donateurs est nécessaire, a insisté M. Ahmed, qui a rappelé l’impact considérable du conflit sur les secteurs public et privé du Yémen, dont le rôle est essentiel pour les perspectives économiques futures du pays.

Malgré les violations répétées de la cessation des hostilités, les parties se sont engagées à renforcer le Comité de désescalade et de coordination et d’accord et ont convenu d’un lieu pour ses réunions.  « Son travail est crucial pour assurer le succès de la cessation des hostilités », a souligné l’Envoyé spécial.

Des divisions profondes l’ont toutefois empêché de convoquer la prochaine série des pourparlers, les parties ne parvenant pas à se mettre d’accord pour déterminer si un nouveau cycle devrait se dérouler avec ou sans la cessation des hostilités.  M. Ahmed a donc exhorté le Conseil à engager à nouveau les parties en faveur d’une telle cessation –préalable à un cessez-le-feu permanent– et de mesures pour la mettre en œuvre dès que possible.

S’exprimant ensuite en sa qualité de Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2140 (2014), M. Motohide Yoshikawa, du Japon, a expliqué que l’adoption d’une résolution renouvelant le gel des avoirs et des mesures d’interdiction de voyager en vigueur pour certaines personnes et entités au Yémen permettrait aux membres du Conseil d’affiner son régime de sanctions ciblées, en particulier l’embargo sur les armes.

« Les sanctions sont un outil important pour donner effet aux décisions du Conseil », a-t-il dit, en faisant cependant remarquer qu’elles ne sont pas une fin en soi et doivent, par conséquent, être mises à profit pour soutenir un processus politique mené par les parties yéménites et négocié par les Nations Unies et l’Envoyé spécial du Secrétaire Général.  Soulignant l’importance pour les États Membres de pleinement mettre en œuvre les sanctions imposées par les résolutions 2140 (2013), 2204 (2015) et 2216 (2015), M. Yoshikawa les a encouragés à coopérer avec le Groupe d’experts en fournissant des renseignements demandés en temps utile et à faciliter leurs visites de terrain.

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