70 ans après son adoption, la Charte des Nations Unies fait l’objet d’interprétations différentes parmi les membres du Conseil de sécurité
Sous la présidence de la Ministre des affaires étrangères du Venezuela et, en présence du Secrétaire général de l’ONU, le Conseil de sécurité a débattu aujourd’hui du respect des « buts et principes » énoncés dans la Charte des Nations Unies en tant qu’élément fondamental du maintien de la paix et de la sécurité internationales, dont cet organe a la charge. Outre les membres du Conseil, une soixantaine de délégations sont intervenues au cours de cette réunion, dont plusieurs au niveau ministériel.
« Loin d’être de pure forme », cette question est « liée à des problèmes mondiaux trop réels qui touchent l’Organisation », précise la note de synthèse* élaborée par la présidence vénézuélienne à l’intention des participants. En effet, l’année 2015 –« l’une des plus tourmentées » de mémoire récente–, a révélé les défis qui se posent au Conseil pour s’acquitter de ses obligations en vertu de la Charte, notamment en Syrie et au Yémen, a relevé le Secrétaire général, M. Ban Ki-moon.
Rappelant que la « responsabilité de protéger » doit prévaloir lorsqu’un État n’est pas en mesure de protéger sa population ou ne démontre pas de volonté politique en ce sens, M. Ban a assuré que l’ONU peut apporter une assistance effective à cet égard.
« Je sais que, parfois, les États Membres perçoivent nos efforts comme une forme d’ingérence dans leur souveraineté nationale. Mais ce sont la violence et les conflits qui menacent cette souveraineté, et non pas notre tentative de les prévenir. Ce sont les violations des droits de l’homme par l’État qui érodent sa légitimité », a-t-il encore plaidé, avant d’évoquer l’Article 99 de la Charte, un « mécanisme clef » très peu invoqué selon lui, qui habilite le Secrétaire général à « attirer l’attention du Conseil sur toute affaire pouvant mettre en danger la paix et la sécurité internationales ».
La Ministre des affaires étrangères du Venezuela, Mme Delcy Eloína Rodríguez Gómez, a souligné, de son côté, que la Charte des Nations Unies interdit de faire de la guerre un « instrument de politique extérieure », en rejetant toute « intervention dans les affaires internes des États ».
C’est la raison pour laquelle elle a demandé au Conseil de sécurité d’éviter de recourir à la politique des « deux poids, deux mesures », dénoncée par de nombreuses délégations, de l’Égypte à la Fédération de Russie. De même, précise la note de synthèse, la « tendance négative » à imposer des « mesures coercitives » dans des situations qui ne constituent pas une menace doit être « renversée ». Il faudrait, en lieu et place, privilégier la négociation, la médiation et la conciliation, ainsi que le recours à des organismes ou accords régionaux, conformément aux Chapitres VI et VIII de la Charte.
La diplomatie préventive a également été plébiscitée par les participants, dont le Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération de l’Espagne, M. Ignacio Ybañez, qui a rappelé l’importance pour le Conseil de s’appuyer sur des mécanismes d’alerte précoce, puisque la plupart des conflits actuels sont souvent déclenchés par des rivalités internes. Il a annoncé que son pays serait l’organisateur d’une conférence sur la diplomatie préventive en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, dont la date reste à préciser.
Dans ce contexte, le rôle des organisations régionales est revenu avec insistance parmi les intervenants, qui ont invité le Conseil de sécurité à renforcer sa coopération avec celles-ci, observatrices privilégiées des situations à risque. C’est le cas de l’Union africaine, qui a plaidé aujourd’hui en faveur d’un financement plus « flexible, durable et prévisible » alors que cette organisation fournit plus de 45% des personnels de maintien de la paix à travers le monde depuis 2003.
C’est aussi sur le sens à donner aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies que des divergences sont apparues parmi les membres du Conseil. Accusée par l’Ukraine d’avoir violé les principes fondamentaux de la Charte en occupant « illégalement » la Crimée, la Fédération de Russie a expliqué qu’au contraire, ses habitants n’avaient fait qu’exercer leur droit à l’autodétermination, « prévu par la Charte ». La Ministre des affaires étrangères du Venezuela a d’ailleurs reconnu à la Palestine un « droit souverain » similaire pour récupérer son territoire.
Quant à l’« agression » qui a été reprochée aux autorités à Moscou dans l’est de l’Ukraine, notamment par le Royaume-Uni, les États-Unis et l’Union européenne, la délégation russe a expliqué que la responsabilité de la situation actuelle dans ce pays était imputable aux États ayant jugé bon « d’apporter leur soutien » à Kiev.
Pour sa délégation en revanche, ou encore la France, l’accord sur le dossier nucléaire iranien et la finalisation du programme d’élimination des armes chimiques syriennes ont démontré ce que le Conseil de sécurité peut accomplir lorsqu’il fait preuve de l’« unité » à laquelle le Secrétaire général l’a aujourd’hui appelé.
Alors que la crise en Syrie a été l’objet d’un recours au droit de veto à plusieurs reprises par le passé, l’Union européenne enjoint au Conseil de prendre les « décisions adéquates » si le régime de Bashar Al-Assad n’assume pas sa responsabilité de protéger sa population civile.
Pour la France, l’année 2016 doit être le « temps de l’action », pour trouver ensemble une issue aux conflits, en Syrie et au Yémen, au Moyen-Orient comme en Libye, pour en prévenir d’autres comme au Burundi et consolider les processus de paix comme au Mali ou en République centrafricaine, « ou encore apporter la réponse sévère et rapide qu’appellent les dernières provocations en date de la Corée du Nord ».
*S/2016/103
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES
Lettre datée du 1er février 2016, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la République bolivarienne du Venezuela auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2016/103)
Déclarations
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que l’année 2015 avait été marquée par d’importantes étapes en faveur du respect des valeurs consacrées par la Charte des Nations Unies, en particulier l’examen de l’architecture de la paix et de la sécurité internationales, qui ont abouti à des propositions pertinentes en matière de prévention des conflits et de maintien et de consolidation de la paix. « Nous devons également reconnaître que 2015 avait été l’une des années les plus tourmentées de l’histoire récente, comme en témoignent les guerres civiles qui ravagent la Syrie et le Yémen, posant des difficultés au Conseil de sécurité pour remplir ses obligations en vertu de la Charte », a ajouté M. Ban.
Si la responsabilité de prévenir les conflits et la protection des droits de l’homme incombe en premier lieu aux États Membres, parfois ces États ne disposent pas des capacités nécessaires pour l’assumer, et il arrive même que des États sont eux-mêmes à l’origine des violations des droits de l’homme commises sur leur territoire. Les Nations Unies peuvent aider les États Membres à surmonter ces difficultés, par exemple à travers l’Initiative « Les droits de l’homme avant tout », qui aide le système onusien à mieux coordonner les efforts entrepris en vertu des trois piliers: paix et sécurité, développement et droits de l’homme. « Nous mettons l’accent sur la prévention, grâce à l’alerte et à l’action précoces », a poursuivi le Secrétaire général. « Notre engagement sur ces questions continuera d’être basé sur la coopération, la transparence et le respect de la souveraineté. Je sais que parfois les États Membres perçoivent ces efforts comme une forme d’ingérence dans leur souveraineté nationale. Mais ce sont la violence et les conflits qui menacent cette souveraineté, et non notre tentative de les prévenir. Ce sont les violations des droits de l’homme par l’État qui érodent sa légitimité. »
L’Article 99 de la Charte des Nations Unies habilite le Secrétaire général à « attirer l’attention du Conseil de sécurité sur toute affaire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales », a rappelé M. Ban. Cet Article a rarement été invoqué dans l’histoire des Nations Unies, a-t-il précisé. Mais cela ne signifie pas qu’il n’est plus pertinent, ou qu’il ne pourrait pas être invoqué à l’avenir, a affirmé le Secrétaire général, qui le considère comme un « mécanisme clef ». Il a ensuite réaffirmé la responsabilité du Secrétariat d’alerter le Conseil chaque fois que cela est nécessaire, en émettant l’espoir que l’inscription d’un nouveau point à l’ordre du jour du Conseil serait à l’avenir dicté par les dispositions de la Charte, « et non par les rivalités géopolitiques ou d’autres dynamiques externes ». Ainsi, a ajouté le Secrétaire général, lorsqu’un État Membre recourt à une définition excessivement large de la notion de terrorisme pour monopoliser le pouvoir au détriment de la stabilité à long terme du pays, cela mérite d’être porté à l’attention du Conseil. Avant de conclure, il a souligné qu’il était nécessaire pour le Conseil de sécurité d’œuvrer dans l’« unité ».
Mme DELCY ELOÍNA RODRÍGUEZ GÓMEZ, Ministre des affaires étrangères du Venezuela, a souligné la pertinence du débat sur l’égalité des États en termes de souveraineté et l’importance du principe de non-ingérence dans les affaires internes des États. Il s’agit de promouvoir activement les buts et principes de la Charte des Nations Unies, dont l’intégrité territoriale et la souveraineté des États, la non-ingérence dans les affaires internes, la non-agression, le règlement pacifique des différends et la coopération, le droit des peuples à l’autodétermination et les relations de bon voisinage. La Charte des Nations Unies interdit la guerre comme instrument de politique extérieure, a-t-elle rappelé, en rejetant toute intervention dans les affaires internes des États et plaidant en faveur de la protection de l’indépendance des États.
Pour la majorité des États qui ne disposent pas de la capacité suffisante pour faire respecter ces principes, le respect du droit international est crucial, a-t-elle souligné. Le monde aspire constamment à la stabilité et à la paix, a-t-elle fait remarquer en appelant à relever les défis comme la prolifération du terrorisme. La Ministre s’est dite inquiète de la multiplication des guerres civiles ces dernières années, en citant les huit conflits qui se poursuivent en Afrique et les quatre crises violentes au Moyen-Orient. Elle a déclaré que le Venezuela appuyait le droit souverain de la Palestine, tout en insistant pour qu’elle puisse récupérer son territoire. Elle a ensuite dénoncé les violations du droit international dont la Palestine est victime.
Expliquant les causes de l’instabilité dans le monde, la Ministre a rejeté les « modèles antagonistes d’exploitation économique », qui reposent sur des modèles économiques destinés à satisfaire les intérêts des plus riches. Elle a aussi fait observer que les « guerres non conventionnelles » s’alimentaient de l’insuffisance institutionnelle des pays, tout en fustigeant l’émergence de « nouveaux jougs néocoloniaux » qui contribuent, selon elle, à promouvoir le pillage des richesses des pays en développement. Elle a également dénoncé l’ingérence dans les affaires intérieures de ces pays par les puissances mondiales. Il incombe au Conseil de sécurité, a-t-elle rappelé, de développer des approches multilatérales pour répondre à des menaces qui risquent de dégénérer. La Ministre a demandé aux membres du Conseil de sécurité d’éviter le recours à la politique des « deux poids, deux mesures » dans les décisions sur les questions qui ont une incidence sur la paix et la sécurité internationales. Elle leur a aussi demandé de s’abstenir de prendre des mesures coercitives unilatérales.
M. MANUEL DOMINGOS AUGUSTO, Secrétaire d’État aux relations extérieures de l’Angola, a tenu à rappeler que le maintien de la paix et de la sécurité internationales constituait le premier objectif de la Charte des Nations Unies, sur la base du multilatéralisme et de la diplomatie préventive. Investi de ce mandat considérable, le Conseil de sécurité doit agir conformément aux dispositions de la Charte et, « aussi puissant soit-il », cet organe n’en reste pas moins assujetti à la Charte, qui définit ses prérogatives. Pour le Chef de la diplomatie angolaise, le développement de relations amicales entre nations est le second objectif de la Charte des Nations Unies, fondé sur le respect des principes des droits égaux et le droit des peuples à l’autodétermination, et avec pour objectif final de renforcer la paix universelle. Toutefois, a-t-il regretté, la réalité n’est pas si « rose », comme en témoignent les violations répétées des principes de la Charte, en particulier l’ingérence dans les affaires intérieures d’autres pays et les violations de leur souveraineté nationale. Mettre la coopération internationale au service de la résolution des problèmes internationaux est un troisième objectif de la Charte, l’ONU étant par nature le point focal pour y parvenir, a précisé M. Augusto. L’Assemblée générale, a-t-il souligné, joue un rôle important à cet égard. Il a en conclusion réaffirmé la primauté de la Charte des Nations Unies, dont les principes et dispositions sont aussi valables aujourd’hui qu’ils l’étaient au moment de leur adoption.
M. IGNACIO YBAÑEZ, Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération de l’Espagne, a demandé de promouvoir l’utilisation des instruments pragmatiques qui garantissent la mise en œuvre des buts et principes de la Charte des Nations Unies. Rappelant que la Charte de San Francisco fait obligation de respecter la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale des États, il a fait remarquer que la violation de ces principes entraîne le chaos. La paix et la sécurité internationales sont indissociables des droits de l’homme, a-t-il rappelé. M. Ybañez a insisté sur les synergies qui existent entre ces piliers et celui du développement. Le Conseil de sécurité, a-t-il recommandé, doit accorder une attention croissante aux questions des droits de l’homme. Il a jugé indispensable d’œuvrer en même temps au développement du droit international, en soulignant l’importance de la primauté du droit et d’un ordre juridique international.
Si les menaces à la paix et à la sécurité internationales venaient autrefois surtout de l’extérieur, elles sont aujourd’hui le plus souvent internes, a fait observer le Vice-Ministre, qui a estimé que l’ONU devrait mener davantage d’actions préventives. À cet égard, il a apprécié l’évaluation lancée concernant les opérations de maintien de la paix de l’ONU. Le Vice-Ministre a également indiqué que son pays préparait une conférence sur la diplomatie préventive en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Il a aussi souhaité que le consensus sur la responsabilité de protéger soit renforcé. L’Espagne et le Chili ont organisé conjointement, à Madrid en juin dernier, une réunion des points de contact sur ce thème, ainsi que la première réunion sur ce point au Conseil de sécurité, en décembre dernier. Trop souvent, a regretté M. Ybáñez, le Conseil de sécurité ne s’est pas montré en mesure d’assumer ses responsabilités en raison de l’exercice du droit de veto par un membre permanent, ce qui, a-t-il dit, engendre de graves conséquences sur la population civile. Il a exhorté les membres permanents à ne pas recourir au veto en cas de crime grave en suivant ce que prône le Groupe ACT (Accountability, Coherence and Transparency) avec son Code de conduite.
M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a rappelé que la Charte des Nations Unies était le fruit d’une « expérience douloureuse » de l’humanité à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Pour lui, seul le respect de ses principes peut venir à bout des menaces qui se posent à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il estimé, en regrettant toutefois le recours trop fréquent à la politique des « deux poids, deux mesures ». Pour sa délégation, l’ONU doit réformer son action pour être en mesure de s’acquitter de ses obligations, « sous peine de voir l’Organisation perdre toute crédibilité ». Il est donc indispensable de faire preuve de volonté politique pour respecter toutes les dispositions de la Charte. Le Conseil de sécurité doit donc faire preuve d’objectivité lorsqu’il évalue les paramètres d’une situation inscrite à son ordre du jour, tout en gardant à l’esprit la nécessité de privilégier la diplomatie préventive à l’ingérence dans les affaires intérieures du pays concerné. Dès lors, pour l’Égypte, le Conseil doit être bien informé de la situation d’un conflit, le Secrétariat devant renforcer les mécanismes d’alerte précoce à sa disposition, en coopération avec les organisations régionales pertinentes. Le représentant a ensuite défendu l’importance de parvenir à un règlement politique juste et durable du conflit israélo-palestinien, afin de mettre fin aux souffrances des populations. Les Nations Unies, a-t-il conclu, doivent enfin se fixer des objectifs clairs de maintien de la paix, afin qu’un pays ne retombe pas dans une situation de conflit, et promouvoir les aspects économiques et sociaux.
M. FRANÇOIS DELATTRE (France) a déclaré que « l’on ne peut être que frappé par deux soucis qui restent les nôtres ». Le souci prioritaire est, au sortir d’un conflit dévastateur, de maintenir la paix et la sécurité internationales. Ce souci, 70 ans plus tard, est toujours le nôtre, a-t-il dit. Il est essentiel que le Conseil de sécurité puisse, en s’appuyant sur la Charte, se saisir des crises où la paix et la sécurité internationales sont menacées mais sache également se retirer lorsque la situation est normalisée. Le maintien de la paix et de la sécurité internationales n’est pas le seul but affirmé à la Charte des Nations Unies, a-t-il fait observer, en précisant qu’il s’agit là du deuxième souci qui transparaît de la lecture des buts et principes et du préambule. La Seconde Guerre mondiale a en effet été le combat de la liberté contre le mépris de la personne humaine, et c’est pourquoi les rédacteurs de la Charte ont tant insisté sur le respect des droits de l’homme, indissociable du progrès économique et social et du développement. Dans ces deux domaines, « je veux croire également que nous pouvons avoir la force de nous rassembler face à des défis de taille », a déclaré le représentant.
En premier lieu, ce sont les catastrophes humanitaires sur lesquelles s’est ouverte l’année 2016, en Syrie où les images de la ville assiégée de Madaya nous ont rappelé les pires souvenirs. Ici, comme au Yémen et dans bien d’autres situations, il est essentiel de respecter le droit international humanitaire. En second lieu, c’est le respect de la règle de droit et du droit international. Ces normes collectives visent à contenir l’emploi de la force, dans les limites de la responsabilité collective. Il est essentiel de tout faire pour régler les différends par des moyens pacifiques, a souligné M. Delattre. En troisième lieu, la France reste convaincue que la meilleure protection contre les conflits restera un développement harmonieux, dans toutes ses dimensions, des États et des sociétés et le respect des droits de l’homme. Sommes-nous à la hauteur de ces buts et principes de la Charte des Nations Unies? a demandé le représentant. « Je crois, a-t-il répondu, que l’année 2015 a connu deux développements qui redonnent confiance et élan dans le multilatéralisme et dans notre Organisation. »
Le premier acte fut l’adoption, par l’Assemblée générale le 25 septembre, du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de ses 17 objectifs, pour construire un avenir durable et éradiquer la pauvreté. Le deuxième acte fut l’adoption de l’Accord de Paris sur le climat le 12 décembre 2015. Ces deux résultats nous montrent que le multilatéralisme que l’ONU incarne, reste vivant pour surmonter les paradoxes, souvent violents de notre époque, a estimé le représentant. C’est dans cette perspective que la France a proposé, avec le soutien de plus de 90 pays, que les membres permanents s’abstiennent volontairement et collectivement de recourir au veto lorsque des atrocités de masses sont commises. L’année 2016 doit ainsi être le temps de l’action, pour trouver ensemble une issue aux conflits, en Syrie et au Yémen, au Moyen-Orient comme en Libye, pour en prévenir d’autres comme au Burundi et consolider les processus de paix comme au Mali ou en République centrafricaine, ou encore apporter la réponse sévère et rapide qu’appellent les dernières provocations de la Corée du Nord, à la suite d’un nouvel essai nucléaire et d’un tir de missile balistique sous couvert du lancement d’un fusée.
M. IBRAHIM BIN RAMLAN (Malaisie) a souligné les diverses menaces qui se posent à la paix et la sécurité internationales, allant de l’instabilité politique au risque d’une épidémie causée par le virus Zika. Il a cependant fait remarquer que les menaces traditionnelles continuent d’exister, en évoquant, en particulier, le récent essai nucléaire lancé par la République populaire démocratique de Corée et en demandant à ce pays de revenir à la table de négociations pour rétablir la paix et la stabilité dans la région. Venant à la Palestine, le représentant a estimé que c’était un exemple d’inaction sélective. Tant que ce territoire sera occupé, les Nations Unies seront toujours considérées comme un manque de la volonté politique nécessaire pour faire respecter la Charte des Nations Unies, a-t-il prévenu. « Nous sommes coupables de ne pas respecter scrupuleusement la Charte », a-t-il insisté, en regrettant que cette situation contribue au terrorisme international. Le représentant a demandé aux parties en Syrie d’appliquer le cessez-le-feu et de laisser un accès humanitaire. En ce qui concerne la situation au Yémen, il a demandé aux parties de reprendre les négociations. Il s’est aussi dit encouragé par la détermination des pays concernés qui souhaitent lutter ensemble contre Boko Haram.
Il est important de garder à l’esprit que les actions coercitives ne sont qu’un moyen et non une finalité en soi, a souligné M. FODÉ SECK (Sénégal) car, a-t-il dit, le succès de cette Organisation réside davantage dans sa capacité à recourir au Chapitre VI sur le règlement pacifique des différends qu’au Chapitre VII, « plus difficile et onéreux ». « C’est pourquoi le Sénégal, partisan convaincu de la diplomatie préventive, privilégie les opérations de maintien de la paix qui concilient ces deux chapitres dans ce qu’ils ont de plus essentiel. » Plus que jamais, a insisté le représentant, « l’environnement international complexe » auquel nous faisons face exige un attachement renouvelé aux principes et buts ayant présidé à la création des Nations Unies que sont l’égalité souveraine des États, la non-intervention dans les affaires intérieures d’un État, le règlement pacifique des différends, l’abstention de recourir à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un État.
M. Seck a cependant estimé que « ce constat devrait aussi nous inviter à une réflexion profonde sur la dialectique qui accompagne le maintien de la paix depuis la fin de la guerre froide: c’est celle entre mandat robuste et non-recours à la force, prévention des conflits et souveraineté, mais aussi protection des civils et impartialité ». Enfin, a préconisé le délégué, le Conseil de sécurité devrait renforcer sa coopération avec les organisations régionales et sous-régionales, en particulier l’Union africaine, qui peut aider à développer des capacités de réaction rapide aux premières heures de crise pour éviter une escalade de la violence.
M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a déclaré que la situation actuelle provoquée par l’occupation illégale de la Crimée et l’agression de l’est de l’Ukraine par la Russie montraient clairement que la violation des principes fondamentaux du droit international par un membre permanent du Conseil de sécurité constituait une menace grave à la paix et la sécurité en Europe et dans le monde. Ce fut le cas en Géorgie en 2008, en Crimée en 2014 et maintenant dans l’est de l’Ukraine. En essayant de justifier ses actions par une mauvaise interprétation des dispositions de la Charte des Nations Unies, la Russie a montré en plusieurs occasions en moins de 25 ans qu’elle n’avait pas respecté ses propres obligations conformément au droit international et à la Charte des Nations Unies. En outre, en exerçant de manière abusive son droit de veto au Conseil de sécurité, la Russie a agi au mépris de ses obligations en tant que membre permanent du Conseil à l’égard du maintien de la paix et la sécurité.
Le représentant a ajouté que, conformément à la résolution 3314 (1974) de l’Assemblée générale, les actions entreprises par la Russie en Crimée ainsi que dans l’est de l’Ukraine, relevaient d’un acte d’agression, qui est un crime contre la paix internationale. La guerre d’agression lancée par la Russie contre l’Ukraine constitue un manquement grave aux normes du droit international et un mépris flagrant des obligations internationales et des engagements de la Russie vis-à-vis de la Charte des Nations Unies, de l’Acte final d’Helsinki et d’autres traités internationaux.
Pendant ces deux dernières années, l’Ukraine a exhorté la Russie à plusieurs reprises à accepter sa responsabilité en vertu du droit international et a demandé de mettre fin à ces actes illégaux. « Nous partons du fait que l’Article 33 de la Charte des Nations Unies, a-t-il précisé, prévoit l’obligation de régler les différends internationaux pacifiquement, et fournit un ensemble d’instruments pour y parvenir. Nous demeurons engagés en faveur d’un règlement pacifique de ce conflit. » Dans ce contexte, l’Ukraine a attiré l’attention de la Russie sur de nombreux faits de son agression et a proposé de soumettre les différends actuels à la Cour internationale de Justice ou à un arbitrage ad hoc. Le représentant a exhorté la Russie en tant que « puissance occupante » à donner immédiatement un accès libre et inconditionnel dans la péninsule à une présence internationale permanente de l’ONU, du Conseil de l’Europe et des mécanismes de l’OSCE ainsi que d’autres organisations internationales. Il a insisté sur le fait que le déploiement d’une opération de maintien de la paix internationale de l’ONU sur le territoire de l’Ukraine pourrait être une importante étape vers une solution effective au conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine.
M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) a estimé que le Conseil de sécurité devrait changer son rôle dans cinq domaines. Nous devrions mettre l’accent sur la nécessité de résoudre des problèmes concrets. La Nouvelle-Zélande se concentre sur des mesures concrètes qui pourraient être prises même pour réaliser des progrès modestes afin d’améliorer la dynamique et la performance du Conseil. Le Conseil doit assumer sa rhétorique sur la prévention des conflits, a-t-il dit. Le Conseil doit être en mesure de concevoir des moyens permettant d’intervenir tôt pour désamorcer et résoudre une crise, qui sont efficaces tout en respectant la souveraineté des États, et qui tiennent compte du leadership régional. Nous avons besoin de renforcer l’efficacité des outils à la disposition du Conseil à remplir son mandat.
Le rapport du Groupe de haut niveau sur l’avenir des opérations de paix des Nations Unies représente une occasion importante à cet égard. Pour le reste de cette année, la Nouvelle-Zélande va travailler avec les autres membres du Conseil pour assurer la mise en œuvre des recommandations essentielles du rapport visant à améliorer l’efficacité des mandats du Conseil, y compris une plus grande priorisation et distribution des tâches et des déploiements. Il faudrait aussi encourager une plus grande culture de prise de décisions collective sous la forme d’un partage de la charge de travail, a estimé le représentant, avant de souligner la nécessité pour le Conseil de sécurité de faire preuve de plus de cohérence.
M. MATTHEW RYCROFT (Royaume-Uni) a rappelé que le recours à la force était parfois nécessaire lorsqu’un pays viole le droit international. Depuis la création de l’ONU, les menaces ont changé et sont souvent internes, a-t-il relevé en notant aussi qu’elles s’étendent au-delà des frontières et émanent souvent d’acteurs non étatiques. En réaction, nous ne devrions pas laisser des interprétations obsolètes empêcher l’action, a-t-il recommandé en regrettant que certains membres du Conseil continuent de le faire et ignorent ainsi la responsabilité que la Charte des Nations Unies a investie dans le Conseil de sécurité. Pour sa part, le Royaume-Uni, a-t-il dit, s’est rallié à l’initiative du Groupe ACT. L’invasion illégale de la Crimée a été un exemple de violation criante de la souveraineté nationale, a-t-il expliqué à titre d’illustration, en dénonçant les actions d’un membre du Conseil. Il a réaffirmé le principe de l’inviolabilité de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
Le Conseil de sécurité peut au contraire renforcer la souveraineté, comme l’a dit le Secrétaire général récemment à Cambridge, a cité le représentant en rappelant qu’il ne peut y avoir de souveraineté nationale sans le respect des droits de la population gouvernée. Il a voulu s’écarter de l’interprétation médiévale selon laquelle c’est le souverain qui possède et décide de tout. Lorsque les droits de l’homme sont violés, la paix et la sécurité sont en péril, a-t-il prévenu en donnant l’exemple du Burundi où il a constaté sur place, la semaine dernière lors de la visite de la délégation du Conseil de sécurité, les risques de déstabilisation. Il a également averti contre les risques de débordement de cette instabilité au-delà des frontières du Burundi. C’est ce qui se passe en Syrie, a continué le représentant en citant le nombre exorbitant de morts, de réfugiés et de personnes privées d’aide humanitaire en raison des sièges imposés dans plusieurs localités au cours de ces six dernières années. Il a demandé aux parties d’appliquer le cessez-le-feu et de respecter l’accès humanitaire dans ce pays.
M. ELBIO ROSSELLI (Uruguay) a expliqué que, traditionnellement, la politique étrangère de son pays rejette la menace ou l’usage de la force, et encourage l’utilisation des moyens pacifiques de règlement des conflits lorsqu’il y a des risques pour la paix et la sécurité internationales. Il a rappelé la contribution généreuse de son pays aux opérations de maintien de la paix de l’ONU. Le représentant a ensuite réaffirmé le droit à l’autodétermination des peuples dans tous les processus de décolonisation, y compris dans ceux qui ne sont pas achevés, et la nécessité de respecter la souveraineté des États et la non-ingérence dans les affaires intérieures de ceux-ci. Il est essentiel de respecter le droit international et l’état de droit, tant au niveau national qu’au niveau international, avant de souligner le rôle crucial du Conseil de sécurité en faveur du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous.
Il est erroné, a estimé le représentant, de prétendre qu’une interprétation extensive des principes de souveraineté des États et de non-ingérence dans leurs affaires intérieures peut justifier le comportement d’un pays à l’intérieur de ses frontières, alors qu’elle constitue une violation des principes énoncés dans la Charte. Si les États ont toujours la responsabilité première de faire respecter les droits de l’homme, la communauté internationale a créé un système international de protection de ces droits, en vertu du droit international et d’instruments multilatéraux, a-t-il rappelé, en faisant référence notamment à la création du Conseil des droits de l’homme. Le principe de non-ingérence ne doit pas être utilisé pour éroder le devoir moral et juridique de protéger les personnes, notamment contre les atrocités de masse. La souveraineté nationale ne peut pas être interprétée comme étant un prétexte à l’impunité, a-t-il ajouté. Soulignant également la responsabilité du Conseil de sécurité d’agir de manière cohérente en cas de génocide, de crimes de guerre ou contre l’humanité ou encore de nettoyage ethnique, il a demandé, en tant que membre du Groupe ACT, de ne pas utiliser le droit de veto dans de tels cas. Enfin, il a réaffirmé l’appui de sa délégation au principe de règlement pacifique des différends, en soulignant le rôle important des organisations internationales dans ce domaine.
M. MOTOHIDE YOSHIKAWA (Japon) a rappelé qu’en l’espace d’un mois, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) avait effectué son quatrième essai nucléaire et lancé un missile balistique en violation flagrante des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. « Il ne s’agit pas seulement d’une violation, mais d’un défi inacceptable lancé à la Charte elle-même », a-t-il accusé, en soulignant que le Conseil de sécurité devrait prendre des actions concrètes à cet égard, sous peine de voir remises en cause l’autorité et la crédibilité de l’Organisation. Il a ensuite attiré l’attention sur le rôle que jouent les organes judiciaires dans le respect de l’état de droit, en citant en exemple la Cour internationale de Justice (CIJ).
Pour sa délégation, cette juridiction a contribué de manière significative au règlement pacifique des différends internationaux depuis plus de 70 ans, en se prononçant sur 150 affaires. M. Yoshikawa a ainsi invité les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à reconnaître la compétence obligatoire de la CIJ. L’état de droit est également au cœur des travaux accomplis par le Tribunal international du droit de la mer, qui constitue, de l’avis de sa délégation, un mécanisme juridique très efficace. Enfin, a-t-il estimé, le Conseil de sécurité pourrait davantage renforcer sa coopération avec la Cour pénale internationale (CPI).
M. LIU JIEYI (Chine) a déclaré qu’il faudrait travailler d’arrache-pied pour que les relations multilatérales continuent d’être la norme, en soulignant que les prérogatives de chaque pays dans le choix des systèmes sociaux et autres devraient être respectées. Le représentant a aussi plaidé en faveur de la promotion de la coopération internationale sous tous ses aspects, en s’abstenant des logiques qui ont prévalu pendant la guerre froide. L’idée est d’édifier une communauté humaine fondée sur le respect mutuel des différences nationales, tout en œuvrant à la recherche d’une solution commune et harmonieuse. Dans ce contexte, la promotion de la tolérance et de la diversité culturelles doit être poursuivie en privilégiant la recherche systématique d’un terrain d’entente, a encouragé le délégué. Membre fondateur des Nations Unies, la Chine a été le premier pays à signer la Charte des Nations Unies et elle a fait des contributions historiques à la promotion de la paix et de la sécurité internationales, a rappelé son représentant. Pour son pays, 2016 qui marque la première année de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) est l’occasion idéale pour réaffirmer l’importance de la Charte, a-t-il estimé.
M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a rappelé qu’à la suite du conflit le plus dévastateur que le monde ait connu, le Président Truman avait qualifié la Charte des Nations Unie de « déclaration de grande foi », selon laquelle la guerre n’est pas inévitable et la paix peut être maintenue. Depuis 70 ans, nous avons tenté de maintenir cette déclaration de foi même si nous n’avons pas entièrement libéré le monde de la tyrannie, a-t-il dit. Certains, a-t-il fait remarquer, semblent suggérer que la solution est le retranchement et qu’il ne faut pas agir face à des déclencheurs de conflit, et c’est le cas lorsque nous déclarons que certains problèmes ne relèvent que des affaires intérieures des États. Nous devons cependant protéger toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, a-t-il affirmé en insistant sur le respect de la souveraineté nationale, sans que ce principe serve de bouclier à un État pour déroger à ses obligations. C’est la Charte, a-t-il argué, qui permet d’établir le lien entre respect des droits de l’homme et maintien de la paix et sécurité, en offrant les instruments pour réaliser cet objectif. Cela signifie que la Fédération de Russie doit mettre fin à son occupation illégale de la Crimée et cesser son soutien aux séparatistes en Ukraine, a-t-il précisé.
Il faudrait aussi, a poursuivi le représentant, promouvoir le respect des droits de l’homme et encourager les institutions qui permettent de préserver les libertés. Des régimes qui commettent des violations en masse des droits fondamentaux de leurs ressortissants risquent de porter atteinte à la paix et la sécurité internationales, a-t-il prévenu en citant le cas de la « Corée du Nord » où des prisonniers politiques sont battus à mort. Il a aussi parlé de la Syrie où les autorités étatiques ne sont pas en mesure de protéger leur population. L’objectif des Nations Unies est de promouvoir et d’encourager les droits et libertés fondamentales de tous, a-t-il rappelé. Le représentant a aussi souligné que des pays où la société civile est active et le système judiciaire indépendant sont mieux à même de promouvoir la paix.
Le représentant a regretté que trop de gouvernements empêchent les individus de s’exprimer et inspirent la crainte, les organisations de la société civile étant par exemple accusées indument de défendre des agendas internationaux ou de commettre des trahisons. Lorsqu’il y a un régime de répression, a-t-il prévenu, on peut prévoir des violations pires à venir. Si les États sont égaux, cela ne doit pas nous empêcher d’agir face aux menaces, a-t-il ainsi recommandé. Lorsque le Conseil de sécurité estime qu’il y a menace, il doit utiliser les instruments à sa disposition comme les bons offices du Secrétaire général, la coopération avec les organisations régionales, ou encore la création de tribunaux pénaux internationaux, d’opérations de maintien de la paix ou de régimes de sanctions, a estimé le représentant. Avec l’Iran, un régime de sanctions robuste a finalement conduit à la table des négociations et à la conclusion d’un accord pour éviter un risque nucléaire, a-t-il fait remarquer.
M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a déclaré que l’ensemble des principes consacrés par la Charte des Nations Unies constituait un code de conduite immuable pour l’ensemble des États Membres de l’Organisation. Ces principes fondamentaux, a-t-il cependant regretté, ne sont pas toujours respectés, en raison des obstacles qu’ils posent à un certain nombre d’États. Le représentant russe a appuyé l’objectif du débat d’aujourd’hui, tout en affirmant qu’il faudrait se débarrasser de la politique des « deux poids, deux mesures » et renforcer le rôle primordial du Conseil de sécurité dans le règlement pacifique et négocié des conflits. Des avancées sont possibles lorsque cet organe fait preuve d’unité, comme l’ont démontré l’accord sur le dossier du nucléaire iranien et la finalisation du programme d’élimination des armes chimiques syriennes.
Le représentant a soutenu qu’il n’y avait pas d’ingérence de la Russie dans les affaires intérieures de l’Ukraine, mais plutôt des États ayant jugé bon d’apporter leur soutien à Kiev. Cette situation, a-t-il précisé, s’est traduite par une radicalisation qui a conduit à un conflit. Le représentant a en outre reproché à l’Ukraine de ne pas s’acquitter de ses obligations en vertu des Accords de Minsk. Par ailleurs, a insisté le délégué russe, ce qui s’est produit en Crimée est prévu par la Charte des Nations Unies, puisqu’il s’agit du droit d’un peuple à l’autodétermination. Revenant enfin sur les accusations portées par certains intervenants concernant les violations supposées de la Fédération de Russie, le représentant a rappelé que les États-Unis auraient envahi la Grenade en 1983 et le Panama en 1989-1990.
M. CARLOS FORADORI (Argentine) a souligné que le respect mutuel est un des piliers sur lesquels se sont construits les principes fondamentaux des relations entre les États, ce qui se traduit notamment par l’égalité souveraine de ceux-ci et le principe de non-ingérence dans les affaires internes. Alors qu’on constate un certain déséquilibre entre ce dernier principe et la nécessité de respecter les droits de l’homme, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a été adopté par le Sommet mondial le 25 septembre dernier, a-t-il relevé en se félicitant du dix-septième objectif qui vise la promotion de la paix et de la justice. Il a expliqué également que l’Argentine coopérait activement lorsqu’une crise éclate, en envoyant des Casques blancs sur le terrain. M. Foradori a recommandé de rechercher la « juste mesure » pour assurer un équilibre entre les principes à respecter. Ces efforts doivent mener à une prospérité durable, a-t-il souhaité, en voulant que soient respectés les droits de tous, sans distinction entre la race ou la religion par exemple. Il a rappelé aux États Membres des Nations Unies que le respect des principes de droit international n’est pas facultatif, mais obligatoire.
M. CARLOS CASTANEDA, Vice-Ministre des relations extérieures de El Salvador, a déclaré que le respect des droits de l’homme était un principe fondamental pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Le Vice-Ministre a ajouté que les opérations de maintien de la paix en étaient les outils principaux pour réaliser cet objectif. Il a rappelé que son pays avait bénéficié de la présence d’une opération de maintien de la paix dans les années 1990. Il a réaffirmé l’attachement de son gouvernement à ces opérations et à l’appui que les Nations Unies continuent d’apporter dans son pays. Le Vice-Ministre a assuré que El Salvador continuera de contribuer aux futures des opérations de maintien de la paix des Nations Unies. El Salvador se félicite de la création de la nouvelle politique des risques de sécurité et les mesures prises, a-t-il dit, tout en regrettant qu’elle ait été élaborée sans aucune consultation et que son processus de diffusion ne fournisse pas une stratégie claire pour les États Membres.
M. GHOLAM ALI KHOSHROO (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des non-alignés (MNA), a réaffirmé son soutien aux buts et principes de la Charte des Nations Unies et aux principes de droit international, qui sont essentiels au maintien et à la promotion de la paix et de la sécurité, à l’état de droit, au développement économique et au progrès social, ainsi que pour la protection des droits de chacun. Il a cependant constaté la tendance croissante de la part de certains États à recourir à des mesures unilatérales ou arbitraires et à ne pas respecter leurs obligations en droit international, notamment en ce qui concerne les traités sur les armes de destruction massive et les armes classiques, le terrorisme, les conflits, les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire, l’utilisation de la politique de « deux poids, deux mesures » dans les relations internationales, ainsi que l’échec et le manque de volonté de la majorité des pays en développement de respecter leurs engagements dans les domaines économique et social. La communauté internationale doit collectivement redresser ces situations conformément à la Charte de l’ONU et aux principes du droit international, a-t-il demandé.
Le représentant du Mouvement des non-alignés a par ailleurs souligné une série de mesures utiles, à commencer par celles qui contribuent à un ordre mondial pacifique, prospère, juste et équitable. Il faut aussi respecter le droit des nations à décider de leurs systèmes politique, économique et social et à conduire leurs affaires étrangères en se fondant sur les idéaux, principes et buts du MNA, de la Charte de l’ONU et du droit international, ainsi que les différentes déclarations adoptées par l’Assemblée générale. Il a aussi recommandé de s’abstenir d’adopter ou de mettre en œuvre des mesures extraterritoriales ou coercitives unilatérales pour faire pression sur des pays membres du MNA, en menaçant leur souveraineté et leur indépendance, leur liberté de commerce et d’investissement. Enfin, il s’est opposé à la catégorisation de pays comme « bons » ou « mauvais » sur la base de critères unilatéraux ou injustifiés et a rejeté la doctrine de l’attaque préventive dans tous les cas de figure. La Charte contient suffisamment de dispositions sur l’utilisation de la force pour maintenir la paix et la sécurité internationales, a-t-il conclu, en demandant au Conseil de sécurité de ne poursuivre ces objectifs qu’en se conformant strictement à ces dispositions. Il lui a aussi demandé de n’utiliser les dispositions du Chapitre VII qu’en dernier ressort, en privilégiant les moyens prévus aux chapitres VI et VIII.
M. ANTONIO DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a estimé que, face aux violations de la Charte des Nations Unies, le respect des principes de la Charte exigeait un nouvel engagement de tous les États Membres au multilatéralisme. Il est aussi nécessaire de rétablir un pacte international sur l’inadmissibilité du recours à la force en dehors des provisions de la Charte et de l’autorisation expresse du Conseil de sécurité. Le recours à la force, même s’il était autorisé, devrait être utilisé de manière responsable, a-t-il affirmé. Les actions devraient être judicieuses et proportionnelles et strictement limitées aux objectifs du mandat, conformément au droit international humanitaire. Il est aussi nécessaire d’actualiser la structure de gouvernance de l’ONU, a ajouté le représentant. À son avis, faire face aux défis mondiaux requiert coopération et efforts coordonnés dans un cadre multilatéral robuste, en se conformant par exemple aux recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix et du Groupe consultatif d’experts sur l’examen de l’architecture de maintien de la paix.
M. CARLOS OLGUÍN CIGARROA (Chili) a estimé qu’en cas de violations des buts et principes de la Charte des Nations Unies, la communauté internationale se devait d’intervenir. Il a aussi affirmé que la prévention des conflits était une prérogative cruciale du Conseil de sécurité, mais que l’Assemblée générale et le Secrétaire général avaient également un rôle à jouer dans ce domaine. Il a en outre indiqué que la communauté internationale se devait de préserver les principes de la Charte qui sont à la base du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a déploré le fait que les actions du Conseil de sécurité ne respectent pas toujours les principes de la Charte et que les Comités des sanctions du Conseil de sécurité soient pris en otage par des États tiers. Il a par ailleurs affirmé que, s’agissant de questions relatives au maintien de la paix, qu’il y avait peu de concertation entre le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes, ce qui, à son avis, affaiblissait l’efficacité de ces opérations. Il a également estimé important que le Conseil de sécurité, qui a pour mandat de promouvoir l’état de droit dans le monde, commence par améliorer sa propre structure désormais désuète. À son avis, la réforme de cet organe de l’ONU est nécessaire pour en améliorer l’efficacité et pour se conformer véritablement aux principes de la Charte des Nations Unies.
M. NGUYEN PHUONG NGA (Viet Nam) a estimé que les succès remportés par les Nations Unies au cours de ces 70 dernières années, notamment la prévention des conflits, la promotion de la décolonisation, la protection des droits de l’homme et le développement économique et social, l’ont été grâce à l’application des dispositions de la Charte des Nations Unies. Les principes énoncés par la Charte assurent la protection sur laquelle s’appuient les plus faibles contre les abus. Face à la sévérité et la complexité de nouveaux défis, notamment sécuritaires, auxquels fait face le monde, le représentant a préconisé que les Nations Unies fassent respecter les principes de la Charte. Il a également appelé au respect de la spécificité de chaque nation, notamment son histoire, sa culture et ses options politiques et économiques.
Le délégué a aussi plaidé pour le règlement pacifique des conflits, en invitant le Conseil de sécurité à s’appuyer sur l’Article 33 de la Charte qui y fait référence. Il a aussi souhaité que le Conseil renforce ses relations avec les organisations régionales et sous-régionales qui jouent un rôle majeur en matière de gestion de différends et de prévention de conflits. M. Nga a par ailleurs déclaré que le Viet Nam participe aux efforts mis en œuvre au niveau sous-régional par l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) pour prévenir et régler pacifiquement les conflits, et ce, dans le respect de la Charte des Nations Unies. Il a précisé que ces efforts de l’ASEAN et de ses partenaires étaient importants dans une région marquée par les conflits relatifs à la mer d’Asie orientale, connue également sous le nom de mer de Chine méridionale. Il a aussi plaidé pour que la militarisation de cette mer cesse, avant d’appeler toutes les parties concernées à régler leur différend de manière pacifique, en conformité avec la Charte des Nations Unies, dans le respect du droit international et de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
M. PER THÖRESSON (Suède), au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande et Norvège), a estimé que dans le domaine de la paix et de la sécurité, nous devrions faire plus et mieux pour être à la hauteur des normes prévues par la Charte des Nations Unies. La Charte appelle les États à s’efforcer de résoudre les conflits de manière pacifique, par la négociation, la médiation, et les moyens légaux, ce qui place, à son avis, l’importance de la politique, et la prévention des conflits au centre de notre action. La paix durable ne peut être atteinte par l’engagement militaire mais par des solutions politiques et une gouvernance responsable fondée sur l’état de droit. L’alerte précoce et la prévention du conflit armé font partie de notre plus grande responsabilité et parfois nécessitent plus d’investissement de notre part à tous les niveaux. Pour jeter la fondation d’une paix durable, il faut créer une culture de prévention ce qui inclut le respect des droits de l’homme, a-t-il indiqué.
Le représentant a aussi souligné l’importance du rôle des organisations régionales dans la prévention et la résolution des conflits. Offrir un soutien et des ressources à l’Union africaine et aux organisations sous-régionales pour les opérations autorisées par le Conseil de sécurité est particulièrement important à cet égard, a-t-il ajouté, affirmant que l’appui des pays nordiques « aux solutions africaines aux problèmes africains » avait été démontré par de nombreux exemples de coopération dans le domaine de la sécurité et de la paix. « C’est une route à deux voies, a-t-il dit, faisant remarquer que les États africains étaient souvent les premiers à déployer leurs forces de maintien de la paix sur le terrain lorsque la paix était menacée. Cela doit être reconnu et des leçons doivent être tirées de l’expérience africaine », a conclu le représentant.
M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) s’est dit surpris des déclarations faites aujourd’hui par certains membres permanents du Conseil de sécurité, notamment le Royaume-Uni et la France, qui ont appelé à des interventions armées contre des États tiers. Il a affirmé que ces États semblaient avoir oublié leurs actions précédentes, comme leur soutien à Israël qui occupe les territoires palestiniens et syriens ou à la déstabilisation de la Libye et de la République arabe syrienne. Le représentant a relevé que les Nations Unies n’ont pu mettre en œuvre des résolutions pertinentes fondées sur les principes de la Charte, comme les divers textes relatifs à l’occupation par Israël de territoires arabes.
Le représentant a par ailleurs estimé que certains États essayaient de justifier leurs interventions militaires en Syrie, sous le fallacieux principe de protection des civils, alors même que leur but est d’imposer un changement de régime dans le pays. Il a aussi regretté que certains États arment, entraînent et financent les terroristes du monde entier pour déstabiliser la République arabe syrienne et déploré l’ingérence et les attaques des forces turques en Syrie. Il a aussi accusé d’autres pays comme l’Arabie saoudite et le Qatar de soutenir le terrorisme en Syrie déplorant que, face au drame du peuple syrien, le Conseil de sécurité semblait impuissant.
Mme KATALIN ANNAMÁRIA BOGYAY (Hongrie) a déclaré que la préservation de la paix requiert la synergie entre les trois piliers de la Charte des Nations Unies, à savoir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la dignité humaine et l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. La promotion du développement durable est aussi également importante, a-t-elle affirmé. Mme Bogyay a par ailleurs estimé qu’il était temps pour la communauté internationale de renouveler et de renforcer son engagement envers la protection des populations du génocide, des crimes contre l’humanité et du nettoyage ethnique. De plus, la Hongrie estime que la responsabilisation des auteurs de crimes contre l’humanité était un des meilleurs moyens de prévenir leurs répétitions. Les États ont la première obligation de réprimer les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme, a-t-elle précisé, soulignant le rôle clef de la CPI pour combattre l’impunité lorsque les mécanismes nationaux de responsabilisation n’existent pas ou ne sont pas appliqués. Elle a invité les États Membres à adhérer au Code de conduite relatif à l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre.
M. TÉTE ANTÓNIO, Observateur permanent de l’Union africaine auprès de l’ONU, a déclaré que l’Union africaine contribuait pour plus de 45% du personnel de maintien de la paix dans le monde et, depuis 2003, avait mandaté le déploiement de plus de 70 000 effectifs militaires et près de 1 500 civils dans le cadre de neuf opérations déployées par l’Union africaine. Les efforts de stabilisation entrepris par ces missions et les sacrifices consentis pas leur personnel ont considérablement facilité la tâche aux missions des Nations Unies qui ont finalement pris le relais. En outre, l’Union africaine s’attèle au renforcement de ses capacités à long terme à travers l’opérationnalisation de la Force africaine en attente. Cependant, l’un des plus grands obstacles régulièrement rencontrés par l’Union africaine dans ce cadre concerne le manque de financement flexible, durable et prévisible. Il est dès lors essentiel d’apporter, dans le cadre de l’examen en cours de l’architecture des opérations de maintien de la paix, une solution appropriée à cette question, en gardant à l’esprit que les efforts de paix déployés au niveau régional représentent aussi une contribution au maintien de la paix et de la sécurité internationales.
M. Tété António a ajouté que cette année qui marque aussi le dixième anniversaire de l’établissement des consultations annuelles entre le Conseil de sécurité et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, ainsi que la fin du programme décennal de renforcement des capacités pour l’Union africaine, nous offre l’occasion unique de faire le bilan du partenariat entre les deux organisations, de tirer les leçons appropriées de nos expériences passées, à la fois nos succès et nos échecs, et d’identifier les voies et moyens pour le renouvellement de notre coopération dans la perspective de mieux répondre aux défis. « Par ailleurs, nous avons hâte de voir l’Assemblée générale entériner et donner un effet concret au nouveau cadre du partenariat ONU-Union africaine pour l’intégration et le développement de l’Afrique (PAIDA), a plaidé l’Observateur permanent.
Le délegué de l’Union européenne, M. IOANNIS VRAILAS, a souligné qu’à la veille du cinquantième anniversaire de l’adoption du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et des préparatifs du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 2018, il était important de rappeler que la Charte des Nations Unies est la fondation sur laquelle s’est bâtie une pléiade de textes et d’engagements internationaux en matière de droits de l’homme. Il a affirmé que l’Union européenne et ses membres sont engagés à respecter les principes de la Charte, en ajoutant que l’Union européenne reconnaissait qu’il n’y a pas lieu d’user de la force ou de la coercition pour changer le tracé des frontières en Europe ou partout ailleurs dans le monde en ce XXIe siècle. Il a saisi l’occasion pour rappeler que la résolution 68/262 de l’Assemblée générale faisant référence à l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Le délégué de l’Union européenne a aussi souhaité que la crise à Chypre trouve bientôt un dénouement heureux, dans le respect de résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et des principes de l’Union européenne.
M. Vrailas a ensuite regretté qu’il n’existait pas d’autre endroit dans le monde qu’en Syrie où les principes de la Charte sont ignorés, avant de condamner l’usage de la famine comme tactique de guerre, une pratique qui, a-t-il dit, affecte particulièrement les plus vulnérables, notamment les femmes, les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées. Il a également dénoncé les bombardements aveugles de zones peuplées, forçant ainsi le déplacement de la population et encourageant les recrutements de combattants par les groupes terroristes en Syrie. Il a invité les parties au conflit à ne pas prendre pour cibles la population civile et il a appelé le Conseil à prendre des décisions adéquates si le régime syrien ne protège pas les civils, conformément à ses obligations en vertu du droit international. M. Vrailas a par ailleurs salué le succès de la Conférence des donateurs pour la Syrie, qui s’est tenue à Londres le 4 février dernier, et au cours de laquelle les donateurs ont annoncé des contributions d’un montant total de 10 milliards de dollars. Pour sa part, l’Union européenne a déjà pu mobiliser 5 milliards d’euros d’aide depuis le début du conflit, a-t-il assuré avant de conclure.
M. AHMED FATHALLA, Observateur permanent de la Ligue des États arabes, a regretté l’absence du Conseil de sécurité dans les conflits au Moyen-Orient. Affirmant que la paix doit reposer sur le dialogue, la négociation, la coopération et le respect du principe de la non-ingérence dans les affaires internes des États, l’observateur permanent a estimé que le Moyen-Orient, où les conflits s’étaient multipliés les dernières années, avait besoin de paix, soulignant que les membres permanents du Conseil de sécurité devaient jouer un rôle primordial à cet égard. À son avis, l’inefficacité du Conseil renforçait les menaces exacerbées par les acteurs non étatiques, alors qu’il était le seul organe capable de mettre en œuvre ses propres résolutions et décisions. Il faut empêcher les acteurs non étatiques d’élargir leur champ d’action en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, a-t-il lancé, estimant que le Conseil de sécurité devrait envisager de renforcer sa coopération avec l’OCI et la Ligue des États arabes, à l’instar de sa coopération avec l’Union africaine, pour créer une force conjointe et assurer l’intégrité et la souveraineté des États membres de la Ligue contre les acteurs non étatiques.
Mme MARÍA RUBIALES DE CHAMORRO, Vice-Ministre des affaires étrangères du Nicaragua, a estimé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales impliquait en premier lieu le respect du droit des peuples à l’autodétermination, conformément au droit international où les intérêts individuels et particuliers et la culture de guerre sont éliminés et remplacés par la culture du dialogue et du consensus, de la paix et de la solidarité. Elle a estimé qu’il n’était pas nécessaire de créer de nouveaux codes de conduite pour les membres du Conseil, mais seulement de respecter rigoureusement les règles existantes et les principes qui les guident. Elle a affirmé que la Cour internationale de Justice méritait une mention spéciale en tant que principal organe judiciaire dont les décisions doivent être respectées sans délai. Par ailleurs, a-t-elle dit, les actions contre le terrorisme doivent être collectives et conformes à la Charte et au droit international, assurant la participation de tous les États Membres sur un pied d’égalité dans le cadre du respect de leur souveraineté et leur intégrité territoriale.
M. KAIRAT ABDRAKHMANOV (Kazakhstan) a déclaré que la protection des civils a toujours été une priorité pour son pays. En tant qu’État Membre, a-t-il précisé, son pays a adhéré au Code de conduite concernant l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. Il a par ailleurs souligné le rôle grandement renforcé des organisations régionales en cas d’escalade des conflits dans différentes régions, précisant que son pays encourageait l’intensification de la coopération entre les Nations Unies et les États Membres avec les organisations régionales et sous-régionales en matière de règlement des conflits. Rappelant que son pays a appuyé les activités des bureaux régionaux des Nations Unies qui servent de plateforme pour la diplomatie préventive, le représentant a proposé la création d’un centre régional pour le développement durable et l’aide humanitaire à Almaty, capitale du Kazakhstan, qui serait chargé de compléter l’action du Centre régional des Nations Unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale dans la région eurasienne, notamment en matière d’alerte précoce, de prévention, de dialogue, de médiation et de résolution après-conflit.
M. RODOLFO REYES RODRÍGUEZ (Cuba) a déploré les mesures coercitives unilatérales prises contre certains et invité la communauté internationale à s’opposer à la doctrine d’agression de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Étant donné qu’il incombe en premier lieu au Conseil de sécurité de préserver la paix et la sécurité internationales, ses membres doivent jouer un rôle clef pour prôner le règlement pacifique des conflits et privilégier la paix, a-t-il affirmé, plaidant par ailleurs pour que le Conseil s’attaque aux causes profondes des conflits et qu’il fasse siens les principes de la diplomatie préventive. Le représentant a par ailleurs insisté sur le respect de la souveraineté nationale de chaque État et de la liberté de ses citoyens de choisir la culture et la politique économique qui leur conviennent. Il a également mis en garde contre toute tentative de déstabilisation envers le Venezuela, l’Équateur, la Bolivie et tout autre pays d’Amérique latine.
M. CARLOS ARTURO MORALES LOPEZ (Colombie) a estimé que le droit doit l’emporter sur la force dans le monde, comme le prescrit la Charte des Nations Unies. Il a aussi recommandé que des mesures de prévention des conflits soient renforcées, en soulignant que la paix ne peut être imposée, mais établie par les acteurs en conflit. Son pays, a-t-il rappelé, a connu un conflit interne durant des décennies, souhaitant que l’ONU apporte le soutien requis à la mission politique spéciale qui vient d’être autorisée par le Conseil pour appuyer le processus de paix en Colombie.
Après avoir brossé le tableau des conflits en cours au Moyen-Orient et leurs conséquences sur son pays, M. DAVID ROET (Israël) a dénoncé le silence du Conseil de sécurité. Ce silence n’est pas une option, a-t-il fait remarquer, rappelant qu’il y a deux semaines, le Conseil avait déclaré que « tous les actes de terrorisme sont criminels et injustifiables indépendamment de leurs motivations, quels que soient le lieu où ils sont commis ou les auteurs de ces actes ». Le Conseil ne respecte pas son engagement quand Israël est attaqué, a regretté le représentant. Ce mépris de la paix et de la sécurité du peuple d’Israël sape la crédibilité du Conseil et jette le doute sur son attachement à l’égard des buts et principes de la Charte des Nations Unies, a-t-il poursuivi. Afin de parvenir aux objectifs nobles de paix et de réconciliation, il était temps de dire la réalité comme elle est, de mettre fin à la politisation et de cesser de stigmatiser Israël, a ajouté le représentant, appelant le Conseil à condamner ceux qui encouragent la violence et préparent des attaques terroristes au nom de l’État islamique ou par le Hamas, et à les tenir pour responsables. L’engagement du Conseil en faveur du respect des buts et principes de la Charte sera mesuré par la manière dont il répond aux menaces à la paix et à la sécurité, a conclu le représentant.
M. ANDREA BIAGINI (Italie) a souligné que, compte tenu des nouveaux défis qui se posent au monde en termes de sécurité, il faudrait porter une attention spéciale aux questions plus générales dans ce domaine et à la coopération entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité. Il a cité des exemples à suivre, comme le débat public sur les défis sécuritaires des petits États insulaires en développement (PEID), organisé par la Nouvelle-Zélande lors de sa présidence du Conseil de sécurité, ou encore la réaction rapide du Conseil face à la crise causée par le virus Ebola. Le représentant a aussi recommandé de développer une approche intégrée et de traiter des causes profondes de l’instabilité, tâche à laquelle devrait contribuer le Programme de développement durable à l’horizon 2030, en prévenant l’extrémisme violent et en aidant à gérer les migrations forcées. Le représentant a par ailleurs souhaité une revitalisation des outils de prévention à la disposition du Conseil de sécurité et appelé à se concentrer sur les moyens de règlement pacifique des différends prévus au Chapitre VI de la Charte, tout en développant les partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales, en particulier avec l’Union africaine, et en resserrant les liens avec la Commission de consolidation de la paix.
M. GIRMA ASMEROM TESFAY (Érythrée) a déclaré que la communauté internationale était confrontée à un choix: est-ce que nous voulons voir les Nations Unies devenir un instrument multilatéral efficace pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales ou continuer, au contraire, de maintenir son rôle archaïque actuel qui permet aux pays dominants et puissants d’en abuser pour justifier leurs politiques hostiles et hégémoniques à l’encontre des pays qui refusent de danser au rythme de leur musique? Il est important que les petits et grands pays et peuples ainsi que les forces politiques et sociales se dressent pour défendre la paix, l’indépendance, le respect du droit international, la justice, l’équité et le développement durable afin de constituer un front commun pour défendre les principes de la souveraineté des États, de l’intégrité territoriale et de la coexistence pacifique. Le droit des États à choisir leur propre voie de développement doit non seulement être respecté mais également faire partie des principes fondamentaux des Nations Unies.
Pour souligner et comprendre comment ces principes ont été compromis et violés, il faudrait comprendre l’histoire de l’Érythrée et les expériences actuelles des Nations Unies. L’Érythrée est aujourd’hui victime de la méthode de travail hypocrite des Nations Unies qui sont dominées et contrôlées par un nombre restreint de membres permanents du Conseil de sécurité. Le peuple érythréen est aujourd’hui soumis aux sanctions illégitimes et injustes du Conseil sur la base d’accusations fabriquées qui, selon lui, sont inexistantes. Cependant, le Conseil continue de négliger l’occupation illégale de son territoire par l’Éthiopie en violation du droit international et de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité et la Décision finale et contraignante relative à la délimitation de la Commission du tracé de la frontière entre l’Érythrée et l’Éthiopie dont les Nations Unies sont garantes de leur mise en œuvre.
M. MANSOUR AYYAD SH A ALOTAIBI (Koweït), au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), qui est, a-t-il précisé, la deuxième plus grande organisation intergouvernementale après l’ONU, a indiqué que la charte de l’OCI réaffirme la détermination de ses membres à contribuer à la paix et à la sécurité internationales, ainsi qu’au dialogue entre civilisations, cultures et religions. En ce qui concerne les Nations Unies, il a fait remarquer que, malgré le cadre établi par la Charte pour développer des relations internationales modernes, ses principes n’ont pas toujours été respectés. Il a fait référence à la paralysie du Conseil sur la question de la Palestine, tandis qu’Israël poursuit ses politiques et pratiques illégales, en demandant que des mesures immédiates soient prises pour y mettre fin. Citant ensuite la situation en Syrie, il a appelé les parties à appliquer les résolutions pertinentes, en particulier la résolution 2254 (2015) qui appelle à laisser un accès humanitaire sans entrave et invite à rechercher une solution politique. M. Alotaibi a saisi cette occasion pour encourager les organisations régionales et sous-régionales à prendre une part active dans le règlement des conflits.
Le représentant a ensuite relevé que, comme le monde devient de plus en plus interconnecté et interdépendant, il en est de même des défis à relever. Cela exige de notre part des efforts collectifs renforcés, a-t-il dit en invitant à le faire, notamment aux niveaux régional et sous-régional, comme le prévoient l’Article 33 de la Charte des Nations Unies et le Chapitre VIII sur les accords régionaux. L’OCI est toujours prête à y contribuer, a-t-il assuré en réitérant que sa délégation continuera à œuvrer en faveur de la prévention et du règlement des conflits, ainsi que de la médiation, du maintien et de la consolidation de la paix, de la promotion de la bonne gouvernance et de la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme et l’intolérance religieuse, y compris contre l’islamophobie.
M. THOMAS SCHIEB (Allemagne) a invité la communauté internationale à puiser son courage dans les ambitions des Nations Unies qui restent, malgré les défis d’aujourd’hui, le cadre crucial de l’engagement en faveur de la paix et de la sécurité internationales. Il a rappelé que, au cours de nombreuses années, les Nations Unies avaient pu contribuer à mettre fin à des dizaines de conflits et avaient servi de forum pour les négociations en faveur de la paix. Tout en relevant l’importance de l’égalité des États en termes de souveraineté, M. Schieb a rappelé que, lors du Sommet de 2005, les États Membres des Nations Unies avaient défini la responsabilité de protéger en prévoyant une action collective, par le biais du Conseil de sécurité, en conformité avec la Charte des Nations Unies et au cas par cas, lorsque tous les moyens pacifiques de règlement des différends ne sont pas utiles et si les autorités nationales échouent manifestement à protéger leur population de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique ou de crimes contre l’humanité. L’Allemagne, a-t-il assuré, continue de soutenir ce principe, ainsi que l’initiative de la France et du Mexique visant à limiter l’utilisation du droit de veto par les membres permanents du Conseil de sécurité en cas de génocide. Il s’est dit favorable à une réforme du Conseil de sécurité pour élargir sa composition et améliorer ses méthodes de travail. Avec ses autres partenaires du G4 (Brésil, Inde et Japon), il a encouragé les États Membres à négocier pour réaliser cette réforme.
M. SABRI BOUKADOUM (Algérie) a réitéré que le règlement pacifique des différends devait guider l’action de la communauté internationale. Dans ce contexte, a-t-il précisé, le recours à la force devait être le dernier recours après avoir épuisé toutes les possibilités d’un règlement pacifique, et être approuvé par les Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité. Les menaces spécifiques et imprévues à la paix et à la sécurité internationales devaient être examinées conformément à la Charte, a poursuivi le représentant, estimant que, dans ces cas, les États touchés par ces situations, et en particulier les États Membres dans les zones affectées, devaient être associés à tous les processus de prise de décisions du Conseil de sécurité. Le représentant a par ailleurs affirmé que le respect des droits de l’homme et de la non-ingérence dans les affaires intérieures n’était pas incompatible, indiquant que les ingérences dans les affaires des États Membres étaient inacceptables. En conclusion, le représentant a estimé que la réforme des Nations Unies devait être accélérée dans un esprit renouvelé et avec détermination. Nous devons en premier lieu réformer le Conseil de sécurité, à la fois dans sa structure et ses méthodes de travail, a-t-il affirmé, estimant tout particulièrement que le droit de veto ne devait en aucune façon prévenir une action efficace.
Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a aussi montré du doigt la perte de confiance aux Nations Unies parmi les États Membres. Pour reconstruire cette confiance, elle a suggéré cinq pistes. Premièrement, la gestion de la paix et de la sécurité devrait être sur la base d’un vrai consensus forgé sur les principes de la Charte et non pas le pouvoir politique. Il devrait y avoir une attention renouvelée sur l’utilisation des moyens pacifiques pour aborder la rupture de la paix internationale et le règlement pacifique des conflits avec l’utilisation plus large et plus efficace du Chapitre VI de la Charte.
La prévention de la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États est de la responsabilité de l’Organisation. Le recours à la force ou la menace de recours à la force doit être censuré et efficacement dissuadé. L’échec dans cette situation a créé l’impression que les Nations Unies sont devenues un instrument des puissants et non le gardien des principes du droit international. La représentante a souligné que les Nations Unies devraient faire respecter le principe de la souveraineté égale des États. L’égalité comprend la notion d’égale opportunité qui, a-t-elle dit, est une garantie contre les mesures et les politiques discriminatoires. Ceci devrait être au cœur de la réforme de chaque institution des Nations Unies. Enfin, les Nations Unies doivent s’acquitter de leurs objectifs de développer des relations amicales entre les États sur la base du principe de l’égalité des droits et de l’autodétermination des peuples.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a réitéré que son pays condamnait fermement les actes de terrorisme et de violence contre les civils au Moyen-Orient, en particulier ceux commis par Daesh. Il a aussi attiré l’attention sur le cas de l’Europe qui n’est pas non plus en paix, à cause notamment de l’agression de la Russie contre la Géorgie. Il a fustigé le pari de la Russie de changer la situation géopolitique de la région proche, avec le cas de l’Ukraine et l’occupation des régions de l’Abkhasie et de Tskhinvali en Géorgie. Il a rappelé que l’agression contre son pays au début des années 1990 avait culminé en 2008 avec la reconnaissance illégale de la soi-disant indépendance de ces régions occupées, par seulement trois pays à ce jour.
La Géorgie, a-t-il assuré, a toujours été engagée en faveur de la diplomatie et du règlement pacifique du conflit. Il a regretté cependant que, face à cette approche constructive, la Russie ait conclu des dizaines de « traités » et d’« accords » avec les régimes d’occupation. Il a aussi dénoncé les « lois » adoptées récemment pour régir le statut des étrangers et leur entrée dans ces régions, lesquelles, a-t-il dit, sont discriminatoires à l’égard des populations minoritaires de la Géorgie. Il a aussi regretté que la population géorgienne vivant dans le district de Gali ne puisse même pas obtenir de documents d’identité, craignant que cela soit le préambule à une nouvelle vague de nettoyage ethnique contre les Géorgiens.
M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a rappelé que son pays avait toujours mis l’accent sur le règlement pacifique des conflits avec ses principaux voisins, dans le respect des principes de la Charte des Nations Unies. Il a invité les Membres de l’ONU à mener une réflexion sur la place de la Charte aujourd’hui, souhaitant que le Comité de la Charte soit au cœur de cette initiative. Il a toutefois déploré les blocages qui prévalent dans ce comité. Le représentant a par ailleurs dénoncé les mesures coercitives prises contre des États tiers, et il a souhaité que les résolutions du Conseil soient élaborées dans une démarche plus inclusive, insistant aussi sur un usage plus pondérable du droit de veto. Il a aussi encouragé la communauté internationale à mettre l’accent sur la prévention des conflits, notamment en analysant les signes précurseurs, en apportant des réponses adéquates à la violence extrémiste et en promouvant la bonne gouvernance et le développement.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a déclaré que le fait d’être membre du Conseil de sécurité était un privilège qui implique la responsabilité de prendre des mesures en cas de crime de masse. Le Code de conduite sur l’action du Conseil de sécurité contre le génocide, les crimes contre l’humanité ou les crimes de guerre est une expression d’engagement qui demande aux membres du Conseil, lorsqu’ils examinent une telle situation, de ne pas recourir au droit de veto. Ainsi, les membres du Conseil s’engagent à prévenir ou à mettre fin à des atrocités de masse. Cent dix États Membres ont signé le Code de conduite et nous souhaitons qu’il soit mis en pratique, y compris sur la base d’informations fournies par le Secrétaire général. Le représentant s’est ensuite adressé aux membres élus du Conseil de sécurité en les encourageant à contribuer activement au travail du Conseil. Avant de terminer, le représentant a souligné le rôle de la Cour pénale internationale pour tenir responsables ceux qui ont agi en violation des buts et objectifs de la Charte des Nations Unies.
M. EPHRAIM LESHALA MMINELE (Afrique du Sud) a cité un certain nombre de réalisations de l’ONU depuis sa création, y compris son rôle dans la lutte contre l’apartheid et le colonialisme. Il a estimé que l’ONU se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, nécessitant un certain nombre d’améliorations, dont la procédure de sélection de son Secrétaire général. Il a souhaité que cette procédure soit plus démocratique, plus inclusive et transparente. Il a aussi prôné la réforme du Conseil de sécurité qui, a-t-il dit, demeure non représentative des membres de l’ONU. Il a souligné que le statut quo est particulièrement inconfortable dans la mesure où cet organe est chargé de la tâche la plus importante de l’Organisation, à savoir le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Le représentant a fait observer que le Conseil n’avait pas réussi à jouer son rôle dans les conflits au Moyen-Orient, qui se prolongent depuis des décennies, ou encore au Sahara occidental. Il a ensuite plaidé pour le renforcement des relations entre l’ONU et les organisations régionales dans le cadre du maintien de la paix, en appelant également à un appui financier des organisations d’Afrique subsaharienne dans cette optique.
Mgr SIMON KASSAS, Observateur du Saint-Siège, a rappelé que, dans son discours à l’Assemblée générale le 2 octobre dernier, l’archevêque Gallagher avait plaidé pour une application authentique et transparente de l’Article 2 de la Charte des Nations Unies, qui consacre le principe de non-intervention, exclut toute action unilatérale contre un autre État Membre des Nations Unies, et exige le respect des gouvernements reconnus. Cet Article de la Charte a donc banni le concept de « guerre préventive », les tentatives de redessiner des zones géographiques et de recomposer des peuples au nom du principe de sécurité, et les interventions d’États tiers auprès d’une des parties au conflit, et ne peut être invoqué comme prétexte pour justifier des violations graves des droits de l’homme. La persistance de telles violations ne laisse alors pas d’autre recours que d’appliquer les mesures définies dans les Chapitres 6 et 7 de la Charte, a indiqué M. Kassas.
M. GONZALO KONCKE, Organisation des États américains (OEA), a indiqué tout d’abord qu’il ferait parvenir une note à la présidence du Conseil de sécurité concernant les modalités de participation des organisations régionales aux débats de cet organe. L’OEA, qui compte 35 États membres, souhaite voir renforcer les principes de respect des droits de l’homme, de protection des civils et de promotion des responsabilités de la communauté internationale, a-t-il dit. À cet égard, M. Koncke a estimé que l’ONU, les organisations régionales et leurs États membres devraient œuvrer en vue de résoudre la tension apparente entre ces principes.
La meilleure façon de travailler en faveur des êtres humains dans les situations d’urgence, a-t-il assuré, c’est de respecter pleinement ces principes. Il a donné l’exemple de la mission spéciale envoyée en Haïti, afin de trouver une issue constitutionnelle pour organiser le plus rapidement possible des élections dans ce pays. L’OEA a également joué un rôle important en Colombie et au Honduras, collaborant avec les gouvernements et les acteurs concernés en faveur de la paix et de la stabilité, ou encore en République dominicaine et en Haïti pour faire face à la crise des migrants. L’OEA est en outre intervenue au Venezuela, a-t-il ajouté, à l’occasion des élections législatives du 6 décembre 2015 et de la mise en place de la nouvelle assemblée nationale.
M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc) a déclaré que le Maroc réaffirmait les principes de la Charte de l’ONU, en particulier ceux relatifs au règlement pacifique des différends, conformément au Chapitre VI, et soutenait fermement le rôle que jouent les Nations Unies pour résoudre les questions relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales, à la promotion des droits de l’homme et au développement durable. Son pays, a poursuivi le représentant, adhère pleinement aux efforts visant la réconciliation et au règlement des différends, « à l’image de l’action de médiation du Roi Mohammed VI dans le règlement de la crise dans la région du fleuve Mano ». En outre, à la demande du Secrétaire général, le Maroc a accueilli les pourparlers interlibyens, couronnés par la signature, le 17 décembre dernier, de l’accord politique de Skhirat. Par ailleurs, a rappelé M. Laassel, le Maroc s’est engagé dès 1960 dans les efforts de l’ONU en faveur du maintien de la paix et de la sécurité internationales, notamment par sa participation aux opérations de maintien de la paix.
Mme LAURA ELENA FLORES HERRERA (Panama) a estimé que le contexte actuel, qui est différent de ce qu’il était il y a 70 ans, exige que le Conseil de sécurité mène une action préventive efficace. Elle lui a recommandé de ne pas se focaliser uniquement sur les interventions armées, les opérations de maintien de la paix a posteriori et les situations qui s’aggravent. Elle a parlé d’« obligation morale » des États et de l’ONU envers l’humanité. Après avoir évoqué les situations en Syrie, en Palestine, au Yémen et au Burundi, elle a expliqué que des mesures étaient nécessaires non pas pour l’Organisation ou pour favoriser des positions particulières, mais pour les 120 millions de personnes déplacées qui attendent que les Nations Unies agissent.
Mme Flores a aussi invité à démocratiser le Conseil de sécurité, pour qu’il soit davantage conforme aux principes fondateurs de l’ONU. Notant que cette année comporterait beaucoup de défis pour la communauté internationale, notamment avec la nomination du prochain Secrétaire général, Mme Flores Herrera a appelé à suivre un processus de sélection qui constituera un précédent positif et encouragera la participation des femmes. Il doit aussi préserver une transparence qui illustre les intérêts supérieurs poursuivis par l’ONU, a-t-elle rappelé.
M. DIEGO MOREJÓN PAZMIÑO (Équateur) a déclaré que l’ONU et en particulier le Conseil de sécurité, doivent devenir plus transparents, en soulignant que les buts et principes énoncés dans la Charte doivent être scrupuleusement appliqués. Après avoir plaidé pour le règlement pacifique des conflits, le représentant a toutefois déclaré que le Conseil prenait ses décisions « de manière inégale » en raison de sa composition limitée et peu représentative.
Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a déploré les conséquences de l’échec des gouvernements et de la communauté internationale face aux acteurs non étatiques qui déstabilisent le Moyen-Orient. À quoi servent les interdictions de voyage et le gel des avoirs quand les coupables ne sont pas assujettis à des règles concernant leurs passeports et leurs comptes bancaires? a-t-elle demandé. La communauté internationale, a-t-elle insisté, doit réagir, au risque de devenir de plus en plus inefficace. Le recours croissant à la force contre l’intégrité territoriale et l’indépendance des États est un autre risque pour la paix dans la région, a-t-elle noté en soulignant les écarts entre ce que les États prônent sur la scène internationale et ce qu’ils font. Si son pays s’est félicité de l’accord conclu avec l’Iran l’an dernier, elle a estimé que les termes de cet accord ne s’étaient pas concrétisés comme le démontrent les actions de l’Iran au Moyen-Orient. Elle a aussi dénoncé l’occupation par l’Iran de trois îles du Golfe arabique qui font partie des Émirats arabes unis.
La légitimité et l’efficacité des Nations Unies peuvent être rétablies, a cependant estimé Mme Nusseibeh, à condition tout d’abord que l’on exige une grande responsabilité de la part des États, notamment en faisant appliquer la résolution 2216 du Conseil de sécurité sur le Yémen et celle relative à l’accès humanitaire en Syrie. « Nous saluons l’accent mis par le Secrétaire général sur la prévention », a-t-elle ajouté en souhaitant que l’ONU y consacre plus de ressources. Elle a également souhaité que le Secrétaire général fasse plus souvent usage des prérogatives que lui confère l’Article 99 de la Charte, sans toutefois réduire le niveau d’engagement du Conseil. Enfin, elle a recommandé que le Conseil s’appuie davantage sur l’expérience des organisations régionales, avant de rappeler que les mêmes règles doivent s’appliquer à tous les acteurs.
Partisan d’« approches multilatérales renforcées », M. MUHAMMAD ANSHOR (Indonésie) a indiqué que le plus urgent, c’est de moderniser l’Organisation, en particulier le Conseil de sécurité, afin de refléter les réalités du monde d’aujourd’hui. Si sa représentativité doit être élargie, le respect des principes démocratiques et des valeurs d’inclusion et de transparence ne peuvent qu’améliorer la légitimité et l’efficacité des travaux du Conseil. En outre, le Conseil doit faire preuve d’audace et d’innovation et se doter, par exemple, d’un mécanisme capable de répondre aux problèmes découlant de son manque d’unité, en particulier au sein de ses cinq membres permanents. Enfin, a ajouté le représentant, un arrangement devrait être mis en place pour que le Conseil travaille en toute harmonie avec l’Assemblée générale et d’autres entités des Nations Unies dans le respect des prérogatives respectives de ces organes.
M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) a déclaré que 70 ans après l’établissement de la Charte et de ses principes, le respect de la souveraineté des États et le respect de leur intégralité territoriale demeurent non respectés. Il a déclaré que la Thaïlande attachait une grande importance au règlement pacifique des conflits, saluant dans ce contexte l’accord intervenu récemment sur la question du programme nucléaire iranien ou encore la normalisation des relations bilatérales entre les États-Unis et Cuba. Il a aussi rappelé la pertinence du principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures d’États tiers. M. Plasai a aussi invité les Nations Unies à renforcer leur coopération avec les organisations régionales qui, de par leur nature, sont plus proches des zones de crise, et plus à même de garantir le maintien de la paix et la sécurité internationales d’une manière durable.
M. PAWEŁ RADOMSKI (Pologne) a déclaré que les principes établis par la Charte des Nations Unies, y compris le respect de la souveraineté des États et l’intégrité territoriale, le règlement pacifique des différends et la non-ingérence dans les affaires intérieures d’autres États devraient être pleinement respectés. La souveraineté nationale, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Ukraine doivent être pleinement respectées comme l’a réaffirmé la résolution 68/262, adoptée par l’Assemblée générale en mars 2014. Le représentant a ajouté que les différends internationaux entre les pays devraient être résolus de manière pacifique. Le Conseil de sécurité devrait plaider pour des solutions pacifiques aux différends et appuyer les efforts en vue de résoudre les différends par le dialogue, les négociations, la réconciliation, les bons offices et autres moyens pacifiques.
Le rôle des organisations régionales et des acteurs locaux est aussi important dans ce contexte, compte tenu de la nature multidimensionnelle des conflits d’aujourd’hui et les ressources limitées des Nations Unies. Face aux nouvelles menaces et aux nouveaux défis à la paix et à la sécurité internationales, le Conseil devrait s’efforcer d’aborder ces défis avec plus de cohérence pour assurer le succès de ses efforts pour maintenir la paix et la sécurité internationales. À cet égard, le représentant a salué le Plan d’action pour la prévention de l’extrémisme violent présenté par le Secrétaire général, vendredi dernier à l’Assemblée générale.
M. AHMED SAREER (Maldives) a présenté les réalisations majeures des Nations Unies en 70 années d’existence: aujourd’hui, l’ONU nourrit 104 millions de personnes dans 80 pays, dans des zones de guerre, de catastrophes naturelles et des régions affectées par des urgences sanitaires. Chaque jour, les Nations Unies aident 17 millions de demandeurs d’asile et de réfugiés, a-t-il ajouté, avant de remarquer toutefois que les buts et principes énoncés dans sa Charte ne sont pas toujours respectés. Ces échecs pèsent sur notre conscience, a-t-il affirmé, en citant les cinq années d’inaction en Syrie et le demi-siècle d’échec en Palestine. Il a souhaité que les vues sur le monde produisent davantage de résultats au bénéfice des plus vulnérables, soulignant les graves conséquences humanitaires de ces conflits. Il y a 60 millions de réfugiés dans le monde aujourd’hui, a-t-il aussi précisé.
M. Sareer a par ailleurs rappelé les débats importants au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale sur les changements climatiques, qui affectent en particulier la paix et la sécurité des petits pays insulaires en développement. Il a fallu près de 30 ans pour que le Conseil de sécurité écoute l’appel de ces pays, dont les Maldives, a-t-il déploré, soulignant notamment les menaces qui pèsent sur ces pays en termes de sécurité alimentaire et de sécurité de l’eau. Il a enfin placé son espoir dans l’approche holistique du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui pose les jalons pour la mise en place de sociétés pacifiques, justes et inclusives.
M. KAYODE LARO (Nigéria) a réaffirmé, lui aussi, la primauté des principes de la Charte des Nations Unies, qui fixent les paramètres de l’engagement multilatéral des États Membres en faveur de la paix, de la sécurité et de la stabilité. Il a rappelé l’Article 103, qui stipule qu’« en cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations Unies en vertu de la Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ». En outre, a poursuivi le représentant, le paragraphe 2 de l’Article 1 précise d’emblée que l’un des buts des Nations Unies est de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes ».
Par ailleurs, a-t-il dit, les Chapitres VI, VII et VIII de la Charte définissent clairement les moyens par lesquels les Nations Unies, les États Membres et les organisations régionales peuvent promouvoir la paix et la sécurité internationales. La délégation a précisé que le Chapitre VI avait été la base sur laquelle le Nigéria et le Cameroun ont résolu pacifiquement leur différend territorial relatif à la péninsule de Bakassi. Soulignant que le rôle des organisations régionales est reconnu par le Chapitre VIII de la Charte, le représentant du Nigéria a indiqué que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont il fait partie, avait accompli des réalisations significatives dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales.
M. MENELAOS MENELAOU (Chypre) s’est prévalu d’avoir toujours défendu le cadre international mis en place par l’ONU, même si son pays a été le témoin à plusieurs reprises de violations de sa souveraineté et de l’usage de la force, comme en attestent plusieurs résolutions du Conseil de sécurité. Il a rappelé qu’une partie du territoire de Chypre est toujours sous occupation étrangère du fait de la Turquie, mais a dit espérer une résolution pacifique de ce différend, notamment grâce à l’application des résolutions du Conseil de sécurité. La Charte des Nations Unies appelle à préserver les générations futures de la guerre et à créer de meilleures conditions de vie dans la paix: ce sont des principes qui devraient nous guider partout dans le monde, a conclu le représentant.
M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a relevé que, malgré les changements de contexte international par rapport à l’époque de la création de l’ONU, les principes de droit international tels que l’intégrité territoriale et la non-ingérence dans les affaires intérieures des États non seulement restent pertinents mais ils ont aussi gagné en force, compte tenu de la complexité des défis actuels. La Tunisie, a-t-il réaffirmé, a toujours voulu que ces principes soient acceptés comme étant fondamentaux pour les relations entre les États. Face à la recrudescence de menaces à la paix et sécurité internationales, il a conseillé à la communauté internationale de renforcer ses efforts et d’organiser une campagne mondiale pour réaffirmer le rôle crucial des principes de la Charte des Nations Unies afin de préserver la paix et la stabilité.
Après avoir souligné la nécessité de renforcer la coopération internationale en vue d’éviter l’éruption de conflits, M. Khiari a exprimé le ferme soutien de sa délégation à l’utilisation par le Conseil de sécurité des outils à sa disposition en vertu du Chapitre VI de la Charte, ainsi que des mesures coercitives du Chapitre VII, lesquelles, a-t-il rappelé, ne doivent être prises qu’en dernier ressort. Il s’est félicité, à cet égard, de l’accord conclu entre les parties libyennes pour former un nouveau gouvernement, tout en regrettant que la même détermination n’ait pas été appliquée au dossier palestinien, dénonçant la paralysie du Conseil de sécurité sur cette question. Plaidant pour que les organes chargés de prendre des décisions reflètent les nouvelles réalités du monde, il a misé sur la réforme du Conseil de sécurité pour renforcer le rôle du droit international qui est le fondement de la paix, de la sécurité et du développement. Cela devrait aussi permettre de consolider le Conseil de sécurité en tant qu’élément central d’une gouvernance mondiale efficace. Enfin, il a recommandé d’utiliser les partenariats stratégiques avec les organisations régionales, comme l’Union africaine, sur la bse du Chapitre VIII de la Charte.
M. JĀNIS MAŽEIKS (Lettonie) a déclaré que la soumission continue des populations aux crimes atroces est un rappel brutal de la nécessité urgente pour la communauté internationale de prévenir et de répondre. Les conflits provoquant des souffrances humaines ne doivent pas devenir la « norme ». Les Nations Unies ont la responsabilité d’être à la hauteur de leur tâche de « sauver les générations futures du fléau de la guerre ». Le Conseil de sécurité, en tant que principal garant de la paix et de la sécurité internationales, a la responsabilité de prévenir et d’arrêter les atrocités de masse. Dans le cas de la Syrie, la Lettonie espère que le sens renouvelé de responsabilité au sein du Conseil pour trouver une solution politique au conflit obtiendra des résultats tangibles. Le représentant a exprimé son appui aux efforts continus de l’Envoyé spécial pour la Syrie.
Il a rappelé que l’un des plus importants principes de la Charte des Nations Unies de s’abstenir de recourir à la force contre l’intégrité territoriale d’un État souverain a été violé par un membre permanent du Conseil de sécurité, au XXIe Siècle, pendant que la communauté internationale continue de réitérer qu’il est nécessaire de rétablir la légalité internationale. Le représentant a déploré la violation des règles internationales par le recours à la force et l’annexion d’une partie d’un autre pays. Les principes de la Charte s’appliquent à tous les États Membres parce que, a-t-il rappelé, « nous sommes tous les gardiens de ce système international et de la Charte des Nations Unies ». « Nous appuyons fortement la souveraineté de l’Ukraine, son intégrité territoriale et son indépendance politique, et nous soutenons la voie de réformes démocratiques qu’elle a choisie », a assuré le représentant avant de conclure.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a souligné l’importance de continuer de faire des avancées dans la réforme du Conseil de sécurité. Il a ensuite expliqué que la responsabilité de protéger ne devait pas être perçue par le Pérou comme une remise en cause de la souveraineté des États, mais au contraire comme un renforcement de celle-ci. S’agissant du droit de veto, il a souscrit à la proposition du Mexique et de la France, qui consiste à s’abstenir de recourir à l’exercice de ce droit dans les situations où des atrocités de masse sont commises. En outre, a estimé le représentant, il est fondamental que le Conseil ait recours au Chapitre VIII de la Charte, les mesures prévues au Chapitre VII ne devant être envisagées qu’après l’adoption de mesures coercitives dans un premier temps.
M. ZOHRAB MNATSAKANYAN (Arménie) a demandé de ne pas sous-estimer les réalisations de l’ONU au cours des 70 dernières années, tout en notant les difficultés qu’elle rencontre dans les négociations des accords de paix. Il a attiré l’attention sur le cas du peuple du Nagorno-Karabakh qui a gagné son droit à l’autodétermination après une lutte inlassable contre des discriminations historiques et des injustices d’ordre économique, social et politique. Il a dénoncé la « culture de haine et d’agression » contre ce peuple et les violations systématiques de droits de l’homme en Azerbaïdjan. Il a aussi fustigé le refus de négocier un accord de paix sous la médiation du Groupe de Minsk de l’OCDE. L’Arménie accorde beaucoup d’importance à l’ONU et à ce Groupe pour le règlement pacifique du conflit du Nagorno-Karabakh, a-t-il dit.
Le représentant a ensuite souligné l’importance de la collecte de données fiables, en saluant la source que représentent, à cet égard, les Nations Unies. Il a cependant appelé à écouter les informations qui proviennent des peuples qui souffrent directement des conflits, en plaidant pour le respect de leur dignité. Enfin, tout en reconnaissant qu’il était nécessaire de disposer de mécanismes d’alerte précoce et saluant le Secrétaire général et le système de l’ONU pour leurs efforts en ce sens, le représentant a souligné les difficultés à réagir de manière précoce du fait des divergences importantes en matière de sensibilités sur l’engagement politique des États Membres dans le domaine de la prévention.
M. GEORGE WILFRED TALBOT (Guyana) a déclaré que pour de petits pays en développement comme le sien, le thème retenu aujourd’hui revêt la plus haute importance, en précisant que la Charte des Nations Unies devrait présider à des relations harmonieuses entre les États. Il incombe donc au Conseil de sécurité, auquel a été confiée la charge du maintien de la paix et de la sécurité internationales, d’éviter toute conduite qui irait à l’encontre de ce mandat. Aucun membre ne saurait se soustraire à cette obligation, a-t-il estimé. Dans ce contexte également, les organes principaux des Nations Unies –le Conseil économique et social (ECOSOC), l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité– doivent jouer des rôles complémentaires dans le respect de leurs prérogatives respectives, a ajouté le représentant.
M. ROLANDO CASTRO-CÓRDOBA (Costa Rica) a rappelé que son pays, qui est petit et dépourvu d’armée, a placé sa sécurité et la défense de sa souveraineté entre les mains du système multilatéral international. Le Costa Rica est favorable au principe de non-intervention qui, a-t-il précisé, ne se limite pas aux situations relevant du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, mais s’applique aussi à la responsabilité des États comme garants de la sécurité et du bien-être de leurs citoyens. La souveraineté implique la responsabilité, a-t-il dit, avant de soutenir le principe de « responsabilité de protéger » et son application dans les cas de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et nettoyage ethnique. Lorsque les États n’ont pas la capacité d’exercer leur responsabilité de protection, l’action de la communauté internationale est primordiale, a-t-il expliqué en demandant de faire avancer la reconnaissance et l’application de ce principe. Il a ensuite fait référence à l’Article 99 de la Charte qui autorise le Secrétaire général à saisir le Conseil de sécurité de nouvelles situations qui pourraient mettre en danger la paix et la sécurité internationales. C’est un rôle politique indépendant que le Secrétaire général doit jouer quand les circonstances l’exigent, a-t-il recommandé.
M. Y. HALIT ÇEVIK (Turquie) a rappelé que le Conseil de sécurité, à plusieurs reprises par le passé, avait échoué à trouver des solutions opportunes et durables, comme dans les cas du conflit israélo-palestinien et du conflit syrien. Cette réalité regrettable rend indispensable la nécessité d’intensifier les efforts en vue de prévenir les conflits avant qu’ils ne se produisent. Dès lors, la priorité devrait, selon lui, être donnée à une utilisation efficace des outils prévus par le Chapitre VI de la Charte des Nations Unies et, tout particulièrement, des processus de médiation. Gravement préoccupé par la situation en Syrie, le représentant a déclaré que tous les efforts possibles devraient être mis en œuvre pour faire respecter le droit international humanitaire dans ce pays et au-delà. C’est la raison pour laquelle il a annoncé la décision de la Turquie, qui accueille à l’heure actuelle 2,5 millions de réfugiés syriens, d’accueillir en mai prochain le Sommet mondial humanitaire, qui sera l’occasion de réfléchir aux moyens de relever les défis qui se posent à cet égard.
M. OH JOON (République de Corée) a rappelé que son pays et la République populaire démocratique de Corée (RPDC) avaient tous les deux rejoint l’Organisation des Nations Unies il y a 25 ans, mais que la RPDC avait sans cesse rompu sa promesse de respecter les valeurs et idéaux de l’Organisation. Au cours des 10 dernières années, la RPDC a en effet mené quatre essais nucléaires et six essais de tirs de missiles de longue portée, a-t-il souligné, en rappelant que les derniers incidents dataient du 6 janvier et du 7 février derniers. Il a dénoncé ces violations flagrantes de la paix et sécurité internationales de la part d’un pays qui est le seul à mener des essais nucléaires au XXIe siècle et à développer des programmes d’armes nucléaires alors qu’il a signé le Traité de non-prolifération des armes nucléaires avant de déclarer son retrait. C’est aussi le seul pays qui stipule dans sa Constitution qu’il est un « État doté de l’arme nucléaire » et le seul à être soumis à des sanctions imposées par le Conseil de sécurité. Après avoir rappelé la résolution 2094 (2013) du Conseil de sécurité qui envisage de prendre de nouvelles mesures en cas de nouvel essai ou tir nucléaire, il a dit attendre une résolution ferme de la part de cet organe pour éviter que la RPDC continue d’agir en violation de ses textes. Il a regretté que ce pays continue de le faire en toute impunité.
M. ERVIN NINA (Albanie) a estimé que les conflits armés étaient devenus complexes, le nombre d’acteurs plus important, les armes utilisées plus sophistiquées et, par-dessus tout, plus meurtrières. Il a affirmé que la réponse de la communauté internationale devrait être adaptée à cette nouvelle réalité et aux nouveaux défis à affronter. Il est par conséquent impératif d’adapter l’ONU pour permettre une réponse plus adaptée aux violations politiques et humanitaires dans le monde, mais, à son avis, le développement d’un cadre normatif ne fournit ni prévention ni protection.
Le soutien croissant pour le cadre normatif doit être associé à la volonté politique et, surtout, à des ressources suffisantes pour prévenir les atrocités, a estimé le représentant. La montée de l’extrémisme violent et des groupes armés non étatiques qui commettent de tels crimes, en particulier contre les minorités ethniques et religieuses, continue d’être l’un des défis les plus pressants, qui doit être relevé et surmonté. Le représentant a apporté son soutien à la proposition de la France aux membres permanents du Conseil de sécurité de s’abstenir d’utiliser le droit de veto en cas de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de nettoyage ethnique, et aux efforts du « Groupe Responsabilité, cohérence et transparence » pour un Code de conduite concernant le recours au veto dans les situations de génocide, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et le nettoyage ethnique.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a déclaré que les Nations Unies devraient tirer le meilleur parti des outils prévus par la Charte pour relever certains des défis les plus pressants qui se posent dans le monde. Ce n’est pas seulement les États les plus puissants qui ont une responsabilité à cet égard, mais tous les États, « y compris l’Érythrée », qui doivent s’engager à régler les différends à travers le dialogue et la négociation. Par ailleurs, a ajouté le représentant, l’accord sur le nucléaire iranien, l’Accord de Paris sur les changements climatiques, le Programme de développement durable à l’horizon 2030, et le Programme d’action d’Addis-Abeba issu sur le financement du développement, « bien qu’ils furent arrachés de haute lutte », n’en représentent pas moins des victoires de la diplomatie préventive.
Mme HUSNIYYA MAMMADOVA (Azerbaïdjan) a souhaité que le Conseil de sécurité prenne les rennes pour faire respecter la Charte des Nations Unies, en se débarrassant de la politique des « deux poids, deux mesures » et en évitant d’appliquer les règles de manière sélective. Le rôle du Conseil de sécurité ne se limite pas à l’adoption formelle de résolutions, a-t-elle souligné en lui conseillant d’agir de manière plus cohérente pour faire respecter le droit international. L’Arménie, a-t-elle dit, utilise depuis plus de 20 ans la force pour saper l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan, occupant près d’un cinquième de ce pays après avoir mené un « nettoyage ethnique » qui a éliminé les Azéris du territoire occupé. Elle a regretté les obstacles mis par l’Arménie au règlement de ce conflit et jugé paradoxal que le représentant de l’Arménie parle de paix et de respect des droits de l’homme. Elle a accusé ce pays de parrainer le terrorisme et de se faire le chantre d’une « idéologie douteuse ». La politique de l’Arménie m’a rien à voir avec l’autodétermination, a-t-elle affirmé dénonçant un régime d’occupation et un « régime marionnette » au Haut-Karabakh. Elle a exigé que l’Arménie retire ses forces du territoire occupé et respecte ses obligations en vertu du droit international.
M. JOSÉ ALBERTO SANDOVAL COJULÚN (Guatemala) a relevé que dans de nombreux cas, les outils et mécanismes à la disposition du Conseil de sécurité ont été utilisés pour gérer des conflits déjà déclenchés et non pour les prévenir. En ce qui concerne la prévention, il a jugé utile de promouvoir la responsabilité de protéger la population civile par les États. Il faudrait, a-t-il demandé, que le Conseil de sécurité continue à remplir son mandat en analysant chaque situation et en influençant les acteurs sur le terrain. Si la communauté internationale peut jouer un rôle important en matière de guerre ou de paix, seuls les acteurs internes sont maîtres de leur propre destinée, a-t-il fait remarquer. Il a suggéré de se livrer à une autocritique du Conseil de sécurité dans les situations où les droits de l’homme continuent d’être violés au Moyen-Orient. En tant que pays qui a bénéficié d’un mandat du Conseil de sécurité pour suivre le processus de paix, nous voulons partager notre expérience, tout en se prévalant aussi de la nécessité de fournir des Casques bleus dans plusieurs missions, a-t-il dit. Le délégué a salué à cette occasion la résolution qui a créé une mission politique spéciale en Colombie.
M. KAREL JAN GUSTAAF VAN OOSTEROM (Pays-Bas) a estimé que le soixante-dixième anniversaire de la Cour internationale de Justice (CIJ) en avril prochain serait l’occasion de réitérer la contribution de cette juridiction au règlement pacifique des différends, auquel sa délégation est indéfectiblement attachée. Par ailleurs, il a exhorté les membres du Conseil de sécurité à s’abstenir de faire usage du droit de veto lorsqu’ils se prononcent sur des situations où des atrocités de masse sont commises. Le représentant a en outre appelé tous les États Membres des Nations Unies à fournir des contingents aux opérations de maintien de la paix, et à permettre à celles-ci de pouvoir se déployer rapidement sur le terrain. Sa délégation a réitéré en conclusion la primauté de la Charte des Nations Unies.
Le représentant de la Syrie a répondu aux propos de la Turquie, qu’il a accusée de soutenir le terrorisme au Moyen-Orient. Les différents groupes terroristes opérant dans la région comme Daech et le Front el-Nosra, a-t-il soutenu, n’auraient pas posé une menace aussi grave s’ils n’avaient reçu un soutien de la part d’un certain nombre d’États Membres, dont la Turquie. Il a également assuré que les autorités à Ankara poursuivaient des relations commerciales avec Daech. La délégation syrienne a enfin renouvelé la demande adressée par son pays au Conseil de sécurité pour que cet organe « rejette » les actes d’agression commis par la Turquie « contre toutes les valeurs des Nations Unies ».
Le représentant de l’Arménie a jugé qu’il n’y avait rien de nouveau dans la déclaration de son homologue de l’Azerbaïdjan qui, a-t-il dit, se livre au même discours année après année. Il a réfuté l’argument selon lequel il y aurait une hiérarchie dans les principes de droit international, arguant que le droit à l’autodétermination était tout aussi important que les autres principes. Le cessez-le-feu est violé constamment du fait de l’Azerbaïdjan, a-t-il également précisé. En outre, il a relevé qu’aucun président arménien n’avait été réélu depuis une vingtaine d’années, la même famille régnant sur ce pays depuis près de 25 ans.
La représentante de l’Azerbaïdjan a dénoncé la tentative du représentant de l’Arménie de présenter une image déformée de la réalité. Contrairement à ses allégations, la résolution susmentionnée réaffirme l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan et exige le retrait complet des troupes arméniennes, a-t-elle fait valoir. C’est l’Arménie, a-t-elle dit, qui a rejeté le calendrier d’application de la résolution et qui commet des actes d’agression contre l’Azerbaïdjan, en prétendant mener un mécanisme de surveillance. En 2015, en raison des violations de cessez-le-feu par l’Arménie, un certain nombre de personnes ont perdu la vie, a-t-elle indiqué, avant d’évoquer les nombreux soldats tués dans ce conflit. Si l’Arménie prétend défendre des droits, il faut rappeler les atrocités qu’elle a commises contre le peuple azerbaïdjanais, a-t-elle ajouté.
Le représentant de la Chine a déclaré que le statu quo ante prévalant dans les îles Nansha devait être rétabli, affirmant que l’occupation de cet archipel était illégale et la souveraineté de la Chine sur ces îles incontestable.