En cours au Siège de l'ONU

Soixante et onzième session,
17e et 18e séances – matin et après-midi
AG/SHC/4171

La Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones demande des mesures de conservation de l’environnement axées sur les droits de l’homme

Si elles permettent de préserver la biodiversité pour le bien de toute l’’humanité, les zones dites « protégées » sont également associées à des violations des droits fondamentaux des peuples autochtones, a souligné, aujourd’hui, devant la Troisième Commission, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, la Rapporteuse spéciale sur l’es droits des peuples autochtones, Mme Victoria Tauli-Corpuz.

Présentant son rapport thématique consacré à l’impact des mesures de conservation des zones protégées sur les peuples autochtones, à l’occasion de l’examen par la Troisième Commission des droits des peuples autochtones, Mme Tauli-Corpuz a lancé un appel pour que ces mesures soient orientées sur les droits de l’homme.

Pendant trop longtemps, a-t-elle constaté, ces mesures ont consisté à vider ces zones de toute présence humaine ce qui, paradoxalement, a conduit à des expulsions, voire à des meurtres en cas de résistance des communautés lors de la création de parcs nationaux.  Elle a plaidé, en conséquence, pour le respect du principe de consentement préalable libre et éclairé.

La Rapporteuse spéciale, dont le mandat vient d’être renouvelé pour une période de trois ans par le Conseil des droits de l’homme, a d’ailleurs indiqué qu’elle continuait de recevoir des plaintes de « violations graves contre les droits de ces peuples au nom de la conservation », car, pour eux, ces zones sont un instrument d’assimilation forcée.

Les zones protégées peuvent être des forêts, des parcs nationaux, des refuges de faune et de flore sauvages, des zones marines ou des réserves gérées par le secteur privé et par les organisations non gouvernementales, ou encore des zones appartenant aux peuples autochtones ou être des terrains communautaires.

Or, a fait remarquer la Rapporteuse spéciale, la surface de ces zones a presque doublé en deux décennies, passant de 8,7 millions de kilomètres carrés en 1980, à 16,1 millions en 2000, ce qui fait que les peuples et communautés autochtones, dont les territoires traditionnels représentent près de 22% de la surface terrestre et 80% de la biodiversité de la planète, sont de plus en plus concernés par les mesures de conservation. 

On estime en effet que 50% des zones protégées dans le monde ont été établies sur des terres traditionnellement occupées et utilisées par les autochtones, et que cette proportion pourrait dépasser les 90% en Amérique centrale.  Le pourcentage est également élevé en Bolivie, au Brésil, au Chili, en Colombie, au Canada et aux États-Unis.

À l’occasion du dialogue avec la titulaire de mandat, plusieurs de ces pays ont décrit les actions qu’ils ont entreprises pour respecter les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée en 2007, à l’issue de deux décennies de négociations difficiles entre les États.

Ainsi, aujourd’hui, le Canada, un des États qui avaient refusé de souscrire à la Déclaration, s’est déclaré « fier d’annoncer » à l’Instance permanente sur les questions autochtones, en mai 2016, qu’il appuyait désormais « pleinement et sans réserve la Déclaration, qui fait progresser les efforts essentiels de réconciliation avec les peuples autochtones dans le pays », à travers notamment la Commission vérité et réconciliation.

Les États-Unis, en revanche, ont rejeté l’allégation figurant dans le rapport selon laquelle, pour créer les premières zones américaines protégées des parcs nationaux de Yellowstone et Yosemite, le Gouvernement avait violemment expulsé les autochtones dont la survie dépendait des ressources naturelles de ces zones.

Des délégations se sont en outre demandé s’il ne serait pas opportun d’apporter des modifications aux directives opérationnelles régissant la mise en œuvre de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, afin de les aligner sur les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Plusieurs intervenants au débat général ont rappelé qu’outre le mandat de la Rapporteuse spéciale, les deux autres mécanismes onusiens de défense des droits de peuples autochtones, en l’occurrence l’Instance permanente sur les questions des peuples autochtones, et le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones, doivent bénéficier de tout l’appui des États, y compris financier.

Certains intervenants se sont félicités de la résolution, adoptée le 30 septembre 2016 par le Conseil des droits de l’homme, modifiant le mandat du Mécanisme d’experts et le priant d’entreprendre une étude sur les bonnes pratiques et les problèmes, y compris la discrimination, dans les entreprises et dans l’accès aux services financiers par les peuples autochtones.

La République-Unie de Tanzanie s’est en revanche érigée contre le terme « autochtone, concept qui, selon elle, « date de l’époque coloniale » et qui infériorise les communautés locales.  Allant plus loin, l’Afrique du Sud a exhorté à passer à la vitesse supérieure en élaborant une convention sur les peuples autochtones.

La Troisième Commission entamera demain, à partir de 10 heures, l’examen des questions relatives à la promotion et la protection des droits de l’homme.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES (A/71/228 et A/71/229)

Déclarations liminaires

M. JAVIER HERNÁNDEZ VALENCIA, Fonctionnaire principal aux droits de l’homme, Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté le rapport biennal du Haut-Commissariat sur l’état du Fonds des contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones (A/71/228), qui donne un aperçu de l’appui du Fonds à la participation de 181 représentants autochtones aux sessions de l’Instance permanente sur les questions autochtones et du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones ainsi qu’à plusieurs sessions d’organes conventionnels, du Conseil des droits de l’homme, du Groupe de travail pour l’examen périodique universel, et d’autres réunions de suivi de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones.

Entre janvier 2014 et juin 2016, le Fonds a reçu 1,36 million de dollars de 14 États.  Le Haut-Commissariat recommande vivement à tous les gouvernements et aux autres donateurs potentiels d’envisager de contribuer à ce Fonds, qui célèbre son trentième anniversaire, a ajouté M. Hernandez Valencia.

Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, a déclaré que, l’an dernier, elle avait mené différentes activités se consacrant à une analyse thématique, à des visites, ainsi qu’à la promotion de bonnes pratiques.  Mme Victoria Tauli-Corpuz a souligné que son action dans le cadre de l’analyse thématique avait mis en relief les mesures de conservation et leurs incidences sur les droits des peuples autochtones.

Dans les zones protégées, des créations de parcs nationaux ont eu pour conséquences des expropriations, ainsi que des meurtres.  Par ailleurs, la Rapporteuse a regretté que ces communautés soient exclues des mécanismes de réparation, soulignant qu’elle continuait de recevoir des plaintes de violations graves contre les droits de ces peuples au nom de la conservation.

Elle a mis en avant le fait que son rapport s’évertuait également à montrer de quelles manières les droits de ces communautés peuvent être respectés.  Mme Tauli-Corpuz a rappelé que 22% de la surface de la terre constituait les territoires des peuples autochtones, soit 80% des zones de biodiversité de la planète.

Les pratiques de conservation du passé ont été caractérisées par un manque de consultation avec les peuples autochtones, a-t-elle dit.  Elle a réaffirmé que les terres traditionnelles de ces communautés avaient été déclarées zones protégées en vue de la conservation.  Elle a noté l’importance des autochtones dans leur rôle d’acteurs de préservation de la biodiversité.  À cet égard, elle a précisé leur droit à l’autodétermination, à leur participation aux prises de décisions, mais aussi à contrôler et à posséder leurs terres.

Par ailleurs, elle a lancé un appel aux associations de conservation pour qu’elles exercent leur influence sur les autorités nationales, notamment celles qui ne reconnaissent pas les droits des peuples autochtones, soulignant que les mesures de conservation devraient s’accompagner d’un suivi sur la manière de garantir leurs droits.

Elle a également demandé aux États de revoir leurs politiques et cadres juridiques en vue de respecter et de protéger les droits des peuples autochtones.

S’agissant des visites quelle a menées dans certains pays, elle a dit avoir constaté que les droits des peuples autochtones n’étaient pas protégés et observé un regain de violences contre ces peuples.  Elle est revenue sur la militante Linka, assassinée trois mois après quelle l’eut rencontrée, alors qu’elle bénéficiait de mesures de protection.  Elle a dit suivre avec intérêt la suite qui sera donnée à l’enquête sur cet assassinat.

La Rapporteuse spéciale a réaffirmé son engagement en vue de la promotion des droits des peuples autochtones et de leur intégration dans les processus de coordination avec les mécanismes et institutions pertinents, lançant un appel à la prise de mesures de conservation axées sur les droits de l’homme.  Selon Mme Tauli-Corpuz, les autochtones pourraient s’avérer être des alliés pour la protection de la nature et l’exploitation des ressources.

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, Mme Victoria Tauli-Corpuz

L’Espagne a rappelé que la question de l’environnement était à prendre en compte dans le contexte des droits des peuples autochtones.  La première responsabilisation des États concerne l’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT).

Les États-Unis ont reconnu le rôle fondamental des peuples autochtones dans la protection de la diversité et de la conservation de l’environnement.  Ces peuples dépendent des terres et des ressources naturelles pour des raisons spirituelles et matérielles. 

L’intervenante a cependant dit qu’elle n’était pas d’accord avec le paragraphe 33 de son rapport portant sur les pratiques initiales en matière de conservation.  Selon la Rapporteuse spéciale, pour créer les premières zones protégées « modernes » en 1872 (le parc national de Yellowstone) et en 1890 (le parc national de Yosemite), le Gouvernement des États-Unis d’Amérique en a violemment expulsé les autochtones d’Amérique, dont la survie dépendait des ressources naturelles de ces zones.

Le Mexique s’est demandé comment mener les activités de conservation tout en favorisant le développement durable.  Le Mexique et le Guatemala se sont attachés à promouvoir le renouvellement du mandat de la Rapporteuse spéciale pour trois ans, a précisé par ailleurs l’intervenant, qui a ensuite demandé quelles réformes il faudrait apporter aux directives opérationnelles régissant la mise en œuvre de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, afin de les aligner sur les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Pour que le système de conservation soit plus institutionnel, la Colombie a fait des aménagements législatifs, car il existe un vide juridique concernant la préservation des ressources naturelles, notamment celles se trouvant sur les territoires des peuples autochtones.  Une grande partie des zones protégées en Colombie se trouvent sur ces territoires. 

Le Canada a également reconnu que les processus de conservation devaient respecter les droits collectifs et individuels des autochtones.  Il est donc indispensable d’avoir un cadre institutionnel solide.  Quelles sont les meilleures pratiques et les dispositions juridiques à appliquer dans ce contexte, a demandé la délégation.

L’Union européenne a mis l’accent sur le fait que 90% des terres à conserver en Amérique latine étaient aussi des territoires autochtones.  C’est une question complexe qu’il  convient de régler en consultation avec les peuples autochtones, sur la base du consentement préalable.  L’Union européenne a aussi attiré l’attention  sur les situations où les peuples autochtones participent également à la préservation des parcs nationaux.

L’Inde a réfuté les références la concernant dans le rapport, car celles-ci ont été fondées sur des informations uniquement fournies par certaines organisations non gouvernementales, a affirmé le représentant.  Il est erroné de comparer des communautés tribales en Inde avec des peuples autochtones dans d’autres contrées, a fait remarquer l’orateur, en priant la Rapporteuse spéciale de s’abstenir de faire des références sélectives.

Le Maroc a réitéré l’importance du rôle des Nations Unies et de ses mécanismes dans la protection des droits des peuples autochtones.  Elle a prié la Rapporteuse spéciale de préciser sa référence à un mécanisme de dépôt de plaintes pour les peuples autochtones.

La Norvège a salué la visite de la Rapporteuse spéciale dans la région des Samis.  Elle a encouragé le travail de Mme Tauli-Corpuz en vue de l’élaboration d’un traité d’investissement bilatéral type.  En outre, elle a demandé ce que faisait la titulaire de mandat pour promouvoir davantage la ratification de la Convention n169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT).

Le Brésil a reconnu les difficultés qui subsistent dans la protection des droits des peuples autochtones dans ce pays.  Cependant, un conseil national a été créé à cet effet et a recruté 200 fonctionnaires supplémentaires pour pouvoir couvrir les très larges territoires brésiliens.  Comment accroître la participation des représentants des peuples autochtones aux réunions des Nations Unies, a demandé l’orateur.

Le Danemark a pleinement appuyé le mandat de la Rapporteuse spéciale, indispensable pour améliorer le sort des peuples autochtones, dont il faut reconnaître le savoir endogène dans la protection de la nature.  Elle a jugé capital de souligner le droit à l’autodétermination de ces peuples, et du principe de consentement préalable aux niveaux national et international.  La Rapporteuse spéciale dispose-t-elle de pratiques optimales de coopération entre les États et les peuples autochtones?

La République-Unie de Tanzanie a exprimé ses réserves au sujet du rapport, en particulier pour ce qui a trait à l’existence de peuples autochtones dans le pays.  Selon la délégation, il n’en existe pas au regard de la définition de ces peuples dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

La Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, répondant à la question de l’application du consentement libre et éclairé, a fait valoir l’importance des consultations avec les peuples autochtones en vue d’obtenir leur consentement pour toute prise de décisions.

S’agissant du processus relatif à l’accession au patrimoine mondial de l’UNESCO, Mme Tauli-Corpuz a souligné qu’un groupe consultatif pourrait prodiguer des conseils chaque fois que des États proposent l’inscription d’un site.

Elle est également revenue sur les pratiques optimales et les dispositions juridiques, précisant que la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) prévoyait des cadres juridiques visant à protéger les droits des peuples autochtones.  Elle a indiqué que ces dispositions étaient applicables par les pays, citant l’exemple  de l’Australie où des zones protégées ont vu la participation effective des communautés autochtones au processus de décisions dans ces zones.

Au sujet de la ratification élargie de la Convention no 169 de l’OIT, Mme Tauli-Corpuz a dit être en discussion avec des États et quelle continuerait à insister auprès deux pour qu’ils se joignent au mouvement. 

Elle a également plaidé auprès des organismes de conservation pour la mise en place de mécanismes de dépôt de plaintes, en vue de recueillir les préoccupations des peuples autochtones.

Débat général

Mme MILDRED GUZMÁN MADERA (République dominicaine), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), s’est félicitée de la résolution 70/232 de l’Assemblée générale qui invite les gouvernements et le système des Nations Unies à prendre des mesures appropriées pour concrétiser les engagements pris dans le document final de la réunion plénière de haut niveau dite Conférence mondiale sur les peuples autochtones. 

Elle s’est réjouie de la décision du Conseil des droits de l’homme visant à l’amélioration du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones pour mieux respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

L’élimination de la pauvreté et l’appui au développement durable exige des efforts de tous pour que nul ne soit exclu, notamment les peuples autochtones et les personnes d’ascendance africaine.  La promotion d’une culture de paix et de non-violence est également fondamentale pour atteindre les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

L’oratrice a aussi mis l’accent sur la protection des pratiques culturelles des peuples autochtones dans leur accès à l’eau.  Cela exige un système de culture en terrasse, la récupération de graines autochtones et des semences conformément à la loi et à la culture de chaque pays.  Elle a encouragé à éviter que des tiers mettent à mal les droits fonciers des autochtones et à préserver leurs droits et ceux des peuples tribaux et des communautés locales.

Elle a salué les conclusions agréées et le programme de travail pluriannuel de la soixantième session de la Commission de la condition de la femme, qui fait une référence directe aux femmes et filles autochtones en tant que protagonistes clefs du développement durable.

Mme LOIS MICHELE YOUNG (Belize), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a indiqué que cette communauté de pays avait établi des ministères et des commissions pour s’assurer que les peuples autochtones sont représentés dans le cadre national et qu’une plateforme fiable leur est offerte pour garantir leur participation aux affaires qui concernent leur développement social, culturel et économique.  Alors qu’un nombre croissant de langues autochtones sont menacées d’extinction, elle a appelé les populations autochtones à continuer de travailler à la revitalisation de leurs langues.  La représentante a également appelé à faire de 2018 l’année internationale des langues indigènes.  Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 doit être promu à partir d’une perspective fondée sur les droits de l’homme, en accord avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a-t-elle ajouté.

M. FERNANDO DE LA MORA SALCEDO (Mexique), qui s’exprimait au nom du Groupe des Amis des peuples autochtones, a abondé dans le sens de l’analyse de la Rapporteuse spéciale sur la corrélation entre la préservation de la biodiversité et la mise en œuvre concrète de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  

Le Groupe des Amis a réitéré, un an avant son dixième anniversaire, son attachement à ce document adopté en 2007.  Il a mis en avant la nécessité d’établir des partenariats de travail avec les peuples autochtones dans le but de protéger la biodiversité commune, et a assuré qu’il  continuerait à appuyer ces peuples dans la conception, l’exécution et le suivi d’initiatives de conservation.

Le Groupe a souligné en outre la nécessité de tirer des enseignements du savoir ancestral et des pratiques de conservation traditionnelles, ainsi que de l’importance du transfert de compétences techniques pour permettre aux peuples autochtones d’œuvrer à la gestion écologique.

S’agissant du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones, le Groupe des Amis des peuples autochtones a rappelé que celui-ci avait aidé, depuis sa mise en place il y a 30 ans, à la participation de plus de 2 000 représentants autochtones aux différents processus onusiens qui les affectent directement.

Il a encouragé tous les États et donateurs potentiels à lui apporter son appui.  Il a enfin loué la résolution du Conseil des droits de l’homme demandant au Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones de conduire une étude mondiale sur les meilleures pratiques et les défis de la discrimination à l’endroit des peuples autochtones dans les affaires et l’accès aux services financiers, en particulier les femmes entrepreneurs, espérant que cela favorisera la participation des entrepreneurs autochtones dans les délibérations et politiques économiques mondiales qui les concernent.  

Mme DÖRTHE WACKER, de l’Union européenne, a rappelé que L’Union européenne avait plaidé pour placer l’inclusion au cœur du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Les 17 objectifs du Programme sont pertinents pour les peuples autochtones, qui, comme d’autres groupes vulnérables, méritent une attention particulière, a-t-elle souligné.

L’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme et le programme sur les défis des biens publics mondiaux de l’Instrument de coopération pour le développement de L’Union européenne appuient le projet « Navigateur autochtone ».  C’est un instrument qui aide les communautés autochtones à développer des données fiables qui leur permettront de suivre les progrès réalisés dans le cadre du Programme 2030. 

La panoplie de méthodes de L’Union européenne et son approche fondée sur les droits de l’homme englobent les droits des peuples autochtones, a précisé Mme Wacker.  Le Plan d’action sur les droits de l’homme et la démocratie pour la période 2015-2019 insiste sur les droits économiques, sociaux et culturels.  

Il inclut des efforts visant à protéger les défenseurs des droits de l’homme qui travaillent avec les peuples autochtones sur des questions d’usurpation des terres et des changements climatiques.  Il promeut également la mise en œuvre des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

L’Union européenne est l’un des plus grands donateurs pour la protection et la conservation de l’environnement, a rappelé la déléguée.  À ce titre, elle étudiera le chapitre du rapport de Mme Tauli-Corpuz consacré aux principales difficultés et perspectives en matière de conservation, en gardant à l’esprit les directives de L’Union européenne pour une meilleure réglementation tenant compte des droits fondamentaux. 

L’Union européenne, a-t-elle annoncé, s’attachera également à donner suite aux recommandations de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, notamment en ce qui concerne leur participation aux instances de l’ONU sur des questions les concernant. 

M. PEDERSEN (Danemark), s’exprimant au nom des pays nordiques, a déclaré que la promotion des droits des peuples autochtones était une priorité de longue date.  Il a souligné l’importance de promouvoir le processus de participation accrue et effective de ces communautés dans les enceintes de l’ONU, avec une marge de manœuvre leur permettant d’exercer leurs droits.  Il estime qu’il  est nécessaire, pour être efficace, d’examiner le statut de leur participation pas seulement en tant qu’organisation non gouvernementale.

À cet égard, il a précisé que les pays nordiques souhaitaient participer à ce processus et parvenir à un accord avant la fin de l’Assemblée générale.  Le représentant a insisté sur le droit des peuples autochtones à l’autodétermination, soulignant l’importance d’obtenir préalablement leur consentement sur toutes les questions ayant un lien avec  sur leurs terres et territoires.

Selon le délégué, il estime impératif de forger une alliance avec les peuples autochtones.  Les pays nordiques se sont félicités du fait que le Conseil des droits de l’homme ait modifié le Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones en vue de mener des études globales pour mieux cerner les difficultés dans les zones où vivent ces communautés.

Mme KYLA BROOKE (États-Unis) a dit attendre avec impatience la célébration du dixième anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones que son pays a appuyée dès le début.  Elle a aussi fait part de sa satisfaction suite à la révision, par le Conseil des droits de l’homme, du mandat du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones en vue de son renforcement.

Au sujet du Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les peuples autochtones, elle a proposé qu’à l’avenir, la gestion du Fonds soit plus transparente et a appelé à la mise en place d’un mécanisme de dépôt de candidatures. 

M. FRANCISCO TENYA HASEGAWA (Pérou) a expliqué que le Pérou était un pays culturellement divers où vivaient 55 peuples autochtones qui parlent un total de 48 langues et transmettent de génération en génération leurs traditions, leurs savoirs et leurs coutumes.  L’État péruvien s’efforce activement de promouvoir et de protéger leurs droits, conformément à la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et la Déclaration américaine relative aux droits des peuples autochtones. 

Promulguée en septembre 2011, la loi du droit à la consultation préalable a permis de développer une série d’instruments de gestion, comme la base de données officielles des peuples autochtones ou originaires et le guide méthodologique pour la consultation des peuples autochtones. 

À ce jour, a précisé M. Hasegawa, 24 processus de consultation préalable impliquant plus de 20 peuples autochtones et 600 communautés ont été menés, dont 21 ont abouti à des accords entre l’État et les peuples autochtones sur des projets liés, entre autres, aux hydrocarbures, aux mines, à l’infrastructure et aux zones naturelles protégées. 

En outre, le Ministère de la culture a créé un espace de coordination permanent pour discuter des politiques publiques concernant les peuples autochtones.  Créé en octobre 2014, le Groupe de travail avec les peuples autochtones a permis à des fonctionnaires de plus de dix entités publiques de dialoguer avec les dirigeants des sept fédérations autochtones nationales.

En 2015, le Gouvernement péruvien a approuvé la politique nationale pour l’intégration de l’approche interculturelle en vue de garantir l’exercice de leurs droits par les peuples autochtones à travers le pays.  S’agissant des territoires et des terres autochtones, a poursuivi le représentant, le Gouvernement reconnaît cinq réserves territoriales, représentant environ 3 millions d’hectares, afin de protéger les droits des peuples isolés. 

La présidence du Conseil des ministres, a-t-il assuré, aborde de façon intégrale la problématique des communautés d’Amazonie, qu’il s’agisse de lutter contre l’abattage illégal ou d’accélérer le processus de titrisation de terres.  

Mme IRENE SUSAN BARREIRO NATIVIDAD (Philippines) a déclaré que la loi nationale sur les peuples autochtones reconnaissait leur droit à l’autodétermination et a un développement socioéconomique librement consenti.  Pour la déléguée, le consentement préalable est respecté et, pour ce faire, 2 000 chefs autochtones avaient été désignés. 

Elle a indiqué qu’en partenariat avec l’ONU, les Philippines allaient mettre en place un projet de 6,78 millions de dollars pour promouvoir la protection environnementale et les efforts de conservation de la biodiversité dans les zones sacrées.  L’objectif d’ici à 2020 estime de garantir que 17% des terres et des zones côtières et fluviales soient conservées, a précisé la représentante.

En outre, elle a expliqué que les Philippines disposait de 4,5 millions d’hectares de terres disposant de certificats de titres ancestraux, et que 4,5 millions d’autres étaient en attente.  La déléguée a annoncé qu’une équipe avait a été mise sur pied pour protéger les droits fonciers des autochtones.  Cette structure, a-t-elle assuré, n’octroiera pas de titres fonciers aux endroits où sont identifiés des sites sacrés.

Plus de 15 millions de personnes autochtones vivent au Mexique, a déclaré Mme PEREZ SISTOS (Mexique).  Elles s’expriment en 68 langues et 364 variantes linguistiques.  Le Gouvernement mexicain appuie les peuples autochtones pour qu’ils parviennent au développement inclusif et à une meilleure qualité de vie, sans perdre leur identité culturelle ni compromettre leur patrimoine naturel, a-t-elle assuré.  Un bureau de défense public spécial a été créé pour ces peuples. 

En collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Mexique accueille le portail des « Bonnes pratiques pour l’accès à la justice électorale et le renforcement de la culture de la légalité ».

Chaque année, a relevé la représentante, le Mexique et le Guatemala présentent au Conseil des droits de l’homme la résolution intitulée « Droits de l’homme et peuples autochtones ».  Le Mexique promeut également les travaux de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones et propose de proroger son mandat de trois ans. 

Pour faire suite au Document final de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, le pays a présenté une résolution visant à porter à sept le nombre d’experts du Mécanisme sur les droits des peuples autochtones.  Il souhaite également améliorer les méthodes de travail de l’Instance permanente sur les questions autochtones.  En conclusion, la représentante a souligné l’importance de la participation des peuples autochtones aux réunions pertinentes de l’ONU. 

M. MIGUEL CAMILO RUIZ BLANCO (Colombie) a fait valoir le tournant historique qui a permis, par le biais de nouveaux textes normatifs, la garantie du droit des peuples autochtones à l’autonomie à partir de décrets leur octroyant la possibilité d’assumer l’administration des ressources en matière de santé, d’éducation, d’eau potable et d’assainissement.

Grâce à ces modifications législatives, à présent 22 peuples autochtones gèrent leurs services éducatifs et ont créé des mécanismes efficaces de protection et de sécurité juridique des territoires ancestraux qu’ils occupent ou possèdent. 

Il a aussi mis en exergue les progrès réalisés dans l’enseignement des 65 langues autochtones, reconnues officielles sur leur territoire.

Mme THOMAS (Cuba) a déclaré que, 30 ans après le début de la colonisation dans son pays, environ 120 000 personnes, pour la plupart des autochtones, avaient été exterminées.  Aussi, s’est-t-elle réjouie de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui représente une victoire pour toutes ces victimes.

La représentante a appelé la communauté internationale à reconnaître légalité et le droit des peuples autochtones à l’autodétermination, à jouir de leur culture sans souffrir de discriminations.  Il faut reconnaître que les terres de ces peuples ayant obtenu des droits fonciers sont mieux protégées que les terres voisines, s’est-elle félicitée.

La déléguée a réaffirmé que les peuples autochtones devaient bénéficier de leur droit millénaire à mâcher la feuille de coca.  Par ailleurs, elle a affirmé que son pays était favorable à une participation équitable et juste des peuples aux instances de décisions au plus haut niveau.

Mme IRINA ANICHINA (Fédération de Russie) a souligné que la première responsabilité pour définir les stratégies en faveur des peuples autochtones incombait aux États.  La Fédération a d’ailleurs apporté des modifications des politiques dans les régions de la Sibérie. 

La déléguée a encouragé à une approche équilibrée et un examen minutieux avant de créer tout nouveau mécanisme des Nations Unies sur les questions qui affectent les peuples autochtones.  Elle a fait remarquer que ces peuples avaient, d’ores et déjà, la possibilité de participer aux travaux des organes onusiens, y compris les organes conventionnels.

Mme MERYL MICHELLE DIEDRICKS (Afrique du Sud) a fait valoir que son pays avait érigé la non-discrimination et légalité en principes fondamentaux et qu’il  était un ardent défenseur des droits humains des peuples et communautés autochtones, notamment pour la réalisation de leur développement socioéconomique.  Elle a observé qu’en la matière, les Nations Unies s’étaient fixé des objectifs ambitieux dans leur Programme de développement durable à l’horizon 2030, lesquels visent à créer des sociétés inclusives permettant de ne laisser personne de côté, en particulier les peuples autochtones.

À cet égard, elle a salué la poursuite des consultations destinées à aborder la situation déplorable des peuples autochtones et plaidé pour leur participation aux réunions de l’ONU sur des questions qui les concernent. 

L’Afrique du Sud, a-t-elle souligné, croit fermement à la notion du « rien sur nous, sans nous », qui résume celle de ne laisser personne pour compte.  Selon le délégué, la communauté internationale n’a d’autre choix, si elle veut promouvoir les droits de l’homme et les libertés fondamentales des autochtones dans le monde, que de progresser vers la rédaction d’une convention sur les droits des peuples indigènes. 

Elle s’est par ailleurs déclarée préoccupée par les violations dans le domaine des droits de l’homme commises par des entreprises multinationales à l’encontre de peuples autochtones, de leurs terres et de leurs ressources, appelant à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant qui permette de les tenir pour responsables de ces transgressions qualifiées par les autochtones de génocide contre leur communauté.

En outre, elle a noté une tendance accrue des multinationales à commettre des violations, insistant sur la nécessité de mettre en place un cadre permettant de leur demander des réparations en cas de violations.

Mme INGRID SABJA (Bolivie) a rappelé que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, document historique, était la base même de la politique nationale bolivienne, qui prend des mesures dans le cadre de tous les instruments internationaux ratifiés et incluant les droits des peuples autochtones.

Ces peuples ont en effet gardé leur culture et leur vision du « bien-vivre » et du respect de la terre et de ses ressources, et ce, en dépit de siècles de tentatives d’extermination et de souffrances abominables.

La Bolivie élabore des techniques d’utilisation des savoirs traditionnels.  Enfin, la déléguée a déclaré qu’elle ne pouvait qu’appuyer la proposition du Président de l’Assemblée générale en prévision du dixième anniversaire de la Déclaration en 2017.  

Mme ANA SOLEDAD SANDOVAL ESPÍNOLA (Paraguay) a déclaré que les autochtones représentaient 1,7% de la population qui appartient à 19 groupes ethniques répartis en 493 communautés sur tout le territoire et que le guarani était la langue officielle.  La Constitution du pays consacre le droit des peuples autochtones à la propriété collective des terres, à l’aide à la conservation et au développement de leurs différentes formes spécifiques de vie.

Leur droit à la participation dans la vie politique est aussi garanti, tout comme celui à la prise de décisions qui les affectent.  Ces dernières années, des changements législatifs ont été opérés, comme la promulgation de la loi sur la santé autochtone, outil important qui permettra la prestation de services d’assistance médicale adaptés à la culture pertinente des patients.

Dans le domaine de la protection sociale, le Programme Tekopora de transfert d’argent assorti de conditions a peu à peu été élargi aux familles autochtones, tandis que le Programme des peuples originaires consiste à construire des logements autochtones.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a rappelé que le pape François s’était prononcé, lors d’une rencontre en juillet 2015 avec des groupes autochtones de Bolivie, pour la construction d’une « alternative humaine à la mondialisation qui exclut » en faveur des peuples autochtones.  Ces derniers, avait insisté le souverain pontife, ne doivent pas être seulement les bénéficiaires d’une telle alternative mais les acteurs de leur propre développement, et leur voix doit être entendue. 

L’Observateur permanent a ainsi plaidé pour que les peuples autochtones soient au cœur de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Accord de Paris sur le climat, lesquels visent à combattre l’exclusion et à apporter des solutions concrètes aux fléaux de notre temps.  « Ils doivent être acteurs et non spectateurs du processus de mise en œuvre », a-t-il lancé, appelant à ce que les cultures autochtones soient intégrées aux mesures et actions prises dans les domaines socioéconomique et environnemental. 

Pour cela, a-t-il dit, la participation des représentants et des institutions des peuples autochtones aux réunions des organes pertinents de l’ONU doit être renforcée, notamment sur les questions qui les concernent.  Il a ainsi demandé que les consultations inclusives et transparentes organisées lors de la soixante-dixième session de l’Assemblée générale puissent se poursuivre « avec une vigueur renouvelée » durant la présente session.

M. JORGE SKINNER-KLEE (Guatemala) a déclaré qu’il  fallait appuyer les mesures prises sur le plan international pour sauvegarder la protection des droits des autochtones.  Il a salué l’adoption par le Conseil des droits de l’homme de trois résolutions pertinentes, y compris la reconduction de la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones, Mme Victoria Tauli-Corpuz, laquelle, a-t-il dit, se rendra bientôt dans son pays pour évaluer la situation des peuples autochtones.

Pour le délégué, il sera impossible de parvenir aux objectifs de développement durable si l’on échoue à inclure les groupes vulnérables, dont les autochtones.  Le représentant a noté la nécessité de disposer de données ventilées par sexe pour lutter contre l’exclusion dans le domaine socioéconomique.

M. JUAN CARLOS MENDOZA-GARCÍA (Costa Rica) a déclaré que son pays s’était équipé d’une politique forte d’appui aux peuples autochtones, en adoptant en 1998 la loi sur la biodiversité dont l’article 66 reconnaît le droit des communautés locales et des peuples autochtones à s’opposer à l’accès aux ressources pour des motivations culturelles, spirituelles, sociales ou économiques.

Le Costa Rica s’emploie également à réviser sa législation pour veiller au respect des vues et droits autochtones lors de l’établissement de zones écologiques protégées qui incluent leurs territoires. 

M. CAMERON JELINSKI (Canada) a cité le Premier Ministre canadien, M. Justin Trudeau, pour qui aucune relation n’est plus importante pour lui et pour le Canada que la relation avec les peuples autochtones.  Il a affirmé la ferme détermination de son pays à renouveler cette relation pour qu’elle soit fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat. 

Pour cette raison, le Gouvernement poursuit la mise en œuvre du processus nécessaire de recherche de la vérité, de guérison et de collaboration avec les premières Nations, les Métis et les Inuits.  Le Canada était fier d’annoncer à l’Instance permanente sur les questions autochtones, en mai 2016, qu’il  appuyait désormais pleinement et sans réserve la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui fait progresser les efforts essentiels de réconciliation avec les peuples autochtones dans le pays, a ajouté le délégué.

Dans cette optique, le Gouvernement est tout aussi déterminé à répondre aux appels à l’action de la Commission vérité et réconciliation et à préparer une stratégie de mobilisation en vue d’élaborer un cadre national de réconciliation. 

En outre, il a lancé récemment une enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées.  Le délégué a aussi expliqué que le Gouvernement continuait de s’acquitter de ses obligations pour veiller à ce que des consultations véritables soient tenues et que des mesures d’accommodement soient prises, le cas échéant, de même que pour garantir la protection des droits ancestraux et issus des traités.  

Mme YASUE NUNOSHIBA (Japon) a demandé que soient renforcés les efforts pour la participation des peuples autochtones dans la vie des différents pays.  À cet égard, elle a expliqué qu’au Japon, le peuple aïnou avait eu des discussions avec les autorités pour évaluer la manière dont des mesures pouvaient être prises afin d’apporter des réponses à différentes problématiques, y compris leur éducation, la revitalisation de leur culture et la promotion du développement industriel.

À la suite de ces pourparlers, le Gouvernement japonais a lancé différents projets, dont un centre de revitalisation pour la culture aïnou avec l’ouverture d’un musée.  Pour redonner vie à la culture et à la langue aïnou mises à mal, de nombreux programmes vont être initiés avec, notamment, des cours d’apprentissage de la langue, a déclaré la déléguée. 

Elle a également annoncé qu’en 2020, son pays allait ouvrir au public un espace symbolique.  Le Japon, a souligné la représentante, estime qu’un dialogue avec le peuple aïnou déboucherait sur la création d’une société où tout le monde serait respecté sans discrimination.

Mme ELLEN AZARIA MADUHU (République-Unie de Tanzanie) a exprimé des réserves quant à l’allégation selon laquelle des communautés autochtones vivraient dans son pays.  D’après elle, « le concept autochtone date de l’époque coloniale » c’est une notion qui infériorise les communautés locales.  Le colonialisme a marginalisé les sociétés pastorales en Afrique, a-t-elle insisté. 

Dès l’indépendance, la Tanzanie a pris des mesures pour améliorer le bien-être de tous les peuples indépendamment de leur ethnicité ou de leur appartenance tribale et pour rééquilibrer la situation. 

De plus, a assuré la représentante, le Gouvernement a mis en place des mécanismes constitutionnels et législatifs pour protéger les éleveurs et les chasseurs-cueilleurs contre toute forme de discrimination.  L’article 24 de la Constitution protège le droit de propriété et un organe judiciaire indépendant gère les différends territoriaux.  Elle a reconnu que quelques groupes minoritaires continuaient de vivre de façon traditionnelle et que leurs vies dépendaient de l’accès aux terres et aux ressources naturelles. 

Ces groupes ne sont pas connus, contrairement aux Massai qui se trouvent dans les lieux touristiques.  « En Tanzanie, il n’existe pas de peuples autochtones tels que définis par les Nations Unies ou par l’Union africaine », a-t-elle conclu.  

M. CHU GUANG (Chine) a noté que dans beaucoup de pays, les peuples autochtones souffraient de discriminations multiples, et que leurs droits et leur espoir de développement étaient compromis.  Ces pays doivent prendre des mesures efficaces dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 pour que nul ne soit laissé de côté. 

Les peuples autochtones ont le droit de tirer profit du développement socioéconomique, a argué le délégué chinois, qui s’est félicité de la participation de représentants des peuples autochtones aux différents débats et processus les concernant au sein des Nations Unies.

Il a néanmoins estimé que les travaux des mécanismes sur les peuples autochtones pertinents gagneraient à être améliorés, et les processus de consultation, à être préservés.  Il a appelé à éviter, toutefois, que des organisations non gouvernementales et non agréées participent au processus consultatif dans la perspective du dixième anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. 

M. SOMAYYEH KARIMDOOST (République islamique d’Iran) a reproché au colonialisme d’avoir utilisé de fausses doctrines, comme « la doctrine de la découverte », pour violer les droits des peuples autochtones pendant des siècles.  D’après lui, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007 et le document final de la Conférence de 2014 doivent servir de cadre pour autonomiser ces peuples aux niveaux national et international. 

Notant que les pays du nord qui continuent d’avoir les peuples autochtones les plus désavantagés n’accueillaient pas d’agences des Nations Unies, il s’est demandé comment leurs besoins spécifiques en matière de développement seront satisfaits.

Le représentant a également mis en garde contre la tendance de certains groupes à se présenter comme autochtones qui risque d’éclipser les droits légitimes des peuples autochtones, dont celui de participer aux activités pertinentes de l’ONU.  

M. IHOR YAREMENKO (Ukraine) a déclaré que son pays garantissait la protection des droits des peoples autochtones et faisait la promotion de leur identité culturelle, et ne leur niait pas leur droit inaliénable à l’autodétermination.  Son pays, a-t-il dit, reconnaît les Tatars de Crimée, lesquels sont depuis l’occupation de la Crimée sujets à des exécutions extrajudiciaires, à des détentions illégales, voire à des emprisonnements.

Le représentant a mis en avant l’un des cas les plus flagrants, à savoir la détention du Vice-Président du Mejlis (Assemblée) des Tatars de Crimée, M. Imli Umerov, lequel a été placé dans un hôpital psychiatrique.  Selon le délégué, ce dernier a été accusé de séparatisme pour avoir dit que la Crimée ne faisait pas partie de la Fédération de Russie.  Il a souligné qu’il existait des preuves prouvant l’existence de menaces réelles  à la vie des peuples autochtones d’Ukraine sur le territoire de la Crimée.

Le représentant a indiqué que depuis l’occupation de l’Ukraine par la Fédération de Russie, celle-ci a détruit systématiquement les mécanismes indépendants qui garantissent et protègent les droits des Tatars de Crimée.

Mme NORA IMANE BELLOUT (Algérie) a rappelé que les composantes fondamentales de l’identité du peuple algérien étaient l’islam, l’arabisme et l’amazigh.  L’Algérie, a-t-elle dit, est un État unitaire.  La Constitution stipule que tous les citoyens sont égaux devant la loi. 

Aucune discrimination n’a lieu d’être et la liberté de rassemblement et d’expression est garantie par la loi.  L’Algérie s’est engagée à promouvoir l’amazigh sous toutes ses formes, a-t-elle insisté.  Le tamazight, en tant que langue officielle et nationale, est promu à l’école, dans la vie culturelle et dans les médias.   

Mme CHAND (Fidji) a plaidé pour que la réalisation du droit au développement des peuples autochtones soit cohérente et en harmonie avec leur identité, leurs traditions et leurs valeurs spécifiques et qu’ils puissent faire entendre leur voix lors de la prise de décisions.

La politique fidjienne à cet effet repose sur l’autonomisation des institutions des autochtones itaukei, pour que ce peuple ne soit jamais plus manipulé à des fins politiques.  Cette autonomisation est indissociable de la réalisation du droit à la démocratie et au développement, a-t-elle déclaré.

Elle a aussi mentionné la disposition constitutionnelle qui garantit que les terres acquises par l’État pour un usage public soient restituées aux propriétaires coutumiers une fois que l’État n’en a plus besoin.    

M. NEOW CHOO SEONG (Malaisie) a rappelé que la loi de 1954 sur les peuples aborigènes renforçait la protection des droits des Orang Asli dans la péninsule malaisienne.  Le onzième plan quinquennal de la Malaisie pour la période 2016-2020 s’attache à améliorer la vie de la communauté autochtone à travers un meilleur accès à la santé et à l’éducation. 

De plus, a-t-il poursuivi, le Gouvernement a développé un plan stratégique inclusif pour renforcer le statut socioéconomique de cette communauté et y réduire la pauvreté, en mettant notamment en place des programmes générateurs de revenus et des activités agricoles commerciales adaptées à ses besoins.    

M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) a déclaré que son pays continuait de promouvoir les droits des peuples autochtones et a reconnu que l’accès de ces populations aux titres fonciers pouvait avoir une incidence sur les questions de conservation.  Le représentant a indiqué que les autorités néo-zélandaises s’efforçaient de maintenir une relation effective avec les « Tangata whenua », peuple qui s’identifie comme les gardiens des terres ancestrales.

Pour le délégué, cette approche est essentielle pour réaliser la conservation des ressources naturelles et historiques, ainsi que l’héritage culturel.  Il a également déclaré qu’un traité de réinstallation avait été initié et reconnaissait que la rivière était un ancêtre qui avait sa propre force de vie.  La représentation humaine de la rivière est assurée par les peuples et un gardien fourni par le Gouvernement, a précisé le délégué.

La Nouvelle-Zélande continue d’appuyer la participation effective des représentants des peuples autochtones et institutions lors des réunions de l’ONU sur les questions qui les touchent, a-t-il conclu.

M. CARLOS SERGIO SOBRAL DUARTE (Brésil) a indiqué que son pays avait participé aux consultations organisées pour voir comment il est possible de renforcer la participation des peuples autochtones aux activités des Nations Unies.  Ces peuples, a-t-il estimé, ne doivent pas être vus comme des organisations non gouvernementales et l’équilibre géographique doit rester un principe pour le choix des représentants autochtones.  Il a invité tous les experts des droits de l’homme à se rendre au Brésil.  Le pays, a assuré le représentant, est engagé en faveur des droits des peuples autochtones et, au cours des dernières années, il a enregistré des progrès.

En 2015, une conférence sur les peuples autochtones a été organisée, après la création, en 2014, d’un groupe de travail sur ces peuples.  Le Brésil compte 462 territoires autochtones, soit 12% de l’ensemble du territoire brésilien, a précisé la délégation.

Entre 2015 et 2016, 35 nouveaux sites représentant 91 000 hectares ont été démarqués.  De plus, le Gouvernement offre une protection à une centaine de leaders.  Il existe plus de 3 000 écoles autochtones et 22 000 étudiants autochtones vont à l’université, un chiffre qui augmente rapidement grâce à un système de quotas et de bourses.  Un Fonds pour l’Amazonie fonctionne depuis 2008 et les premiers jeux autochtones ont eu lieu au Brésil en novembre 2015.

Mme ILLA MAINALI (Népal) a déclaré que 36,6% de la population du Népal était issue des peuples autochtones qui sont inscrits dans la catégorie des nationalités autochtones.  La représentante a souligné que la nouvelle Constitution népalaise mettait l’accent sur l’inclusion de ces peuples pour leur développement et protégeait leur participation proportionnelle à tous les niveaux. 

À cet égard, elle a souligné qu’une commission des nationalités autochtones avait été mise en place pour protéger leurs droits et leurs intérêts.  Mme Mainali a précisé que les langues des autochtones étaient un excellent moyen de préserver leur héritage culturel et leurs traditions uniques.

Elle a également expliqué que le Népal reconnaissait toutes les langues maternelles comme des langues nationales utilisées à l’école primaire.  La déléguée a réaffirmé la lutte de son pays contre les violences sexuelles, et toutes formes de discriminations contre les peuples autochtones, ainsi que l’acquisition illégale des terres de ces communautés.

Le Népal prévoit des dispositions juridiques qui garantissent une intégration des groupes sous-représentés dans le service public, en particulier les femmes issues des minorités ethniques, a affirmé Mme Mainali.  Elle a également fait ressortir le fait que le Népal allouait 35% de son budget de développement aux programmes en faveur des peuples et nationalités autochtones.

Mme CARLA MUCAVI, déléguée de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a évoqué les liens étroits que les peuples autochtones entretiennent avec la nature.  « Ce sont les gardiens de la biodiversité », a-t-elle fait valoir, précisant que 8% de la biodiversité mondiale se trouvait dans leurs territoires.  Leurs savoirs traditionnels peuvent donner de nombreuses réponses aux défis actuels et futurs, notamment les changements climatiques.

La FAO a pris plusieurs mesures pour garantir le respect des droits et la pleine participation des peuples autochtones dans le processus de développement, a indiqué la déléguée.  Cette année, l’Organisation copréside le groupe interinstitutions de l’ONU sur les peuples autochtones et elle est particulièrement active en Amérique latine. 

La semaine dernière, la FAO a participé au lancement du « Manuel sur le consentement préalable en connaissance de cause », avec une série de partenaires internationaux.  Cet ouvrage préconise une approche commune pour identifier quelles communautés doivent être consultées dans le cadre de projets de développement, en prêtant une attention particulière à l’intégration des dirigeants traditionnels, des femmes et des jeunes dans le processus de prise de décisions.

« Le Programme 2030 ne peut être réalisé sans la prise en compte et le respect des droits des peuples autochtones », a-t-elle conclu.  

M. KEVIN CASSIDY, délégué de l’Organisation internationale du Travail (OIT), s’est félicité du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui intègre des dispositions sur la promotion et la protection des droits des peuples autochtones et tribaux. 

Il a cependant relevé la persistance de lacunes en matière de reconnaissance des peuples autochtones, de protection de leurs droits et de mécanismes d’intégration des autochtones dans les politiques publiques et les processus de prise de décisions, ainsi que l’absence de reconnaissance de leurs contributions à la sauvegarde de l’environnement et au développement durable.

M. Cassidy a aussi observé que les changements climatiques avaient fait surgir une nouvelle menace pour les peuples autochtones, premiers frappés par leur impact, d’où la nécessité urgente qu’ils aient accès à un emploi et à des opportunités de créer des entreprises ou des coopératives et à améliorer leurs activités génératrices de revenus grâce à la promotion de la Convention n169 de l’OIT.    

M. DIEGO ALONSO TITUAÑA MATANGO (Équateur) a souligné que le bien-vivre, lequel est basé sur la philosophie des peuples autochtones, était l’une des valeurs prônées par son pays.  En vue de réussir à rendre effective l’approche des droits et de légalité, l’Équateur n’a pas hésité à créer des conseils nationaux, a affirmé le délégué.  Selon le représentant, c’est un outil significatif de planification des actions, notamment celles en faveur des peuples autochtones qui, a-t-il dit, ne devaient pas faire l’objet de racisme ou de discrimination.

Le délégué a indiqué que son pays entamait un processus de transformation en vue de créer un pays interculturel dans lequel toutes les communautés pourraient s’épanouir.  Les autorités de l’Équateur, a-t-il dit, ont procédé à la mise en œuvre de politiques d’actions affirmatives qui permettent, entre autres, un meilleur accès de tous les groupes vulnérables au monde du travail, à la santé, avec une plus grande participation des peuples et nationalités autochtones aux postes publics.

Selon le délégué, la perte d’une langue maternelle équivaut à la perte irrécupérable de l’identité des peuples.  En conséquence, a-t-il prévenu, il faut sensibiliser le monde entier au maintien de cette identité.

Droits de réponse

La représentante de la Fédération de Russie a répondu aux déclarations « infondées » du représentant de l’Ukraine.  « Les Tatars de Crimée bénéficient des mêmes droits que les autres citoyens de la péninsule », a-t-elle affirmé.  Les violations sont enregistrées, des enquêtes sont menées.  Les Tatars de Crimée voyaient leurs droits limités par l’Ukraine, notamment en ce qui concerne l’usage de la langue.

Le représentant de l’Ukraine a cité une partie du rapport « impartial » de la Commission d’enquête de l’ONU sur les droits de l’homme en Ukraine pour illustrer la détérioration des droits des habitants en Crimée.   

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