L’égalité des sexes, la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles et leur autonomisation doivent être au cœur du Programme 2030
L’intégration systématique de la problématique hommes-femmes dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est essentielle, a déclaré, ce matin, la Sous-Secrétaire générale des Nations Unies de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), Mme Lakshmi Puri, devant la Troisième Commission, qui entamait son débat sur la promotion de la femme.
En adoptant les objectifs de développement durable et d’autres accords internationaux, les États ont manifesté leur attachement au respect de l’égalité des sexes, a rappelé le numéro deux d’ONU-Femmes. Ils se sont engagés à redoubler d’efforts pour éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, notamment la traite.
Avec la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, adoptée le mois dernier, les États ont aussi reconnu les vulnérabilités spécifiques des femmes et des filles durant leur déplacement.
« Nous avons l’objectif 5 sur l’égalité des sexes et des cibles spécifiques », a précisé Mme Puri, en se référant à l’objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030 intitulé « Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles ».
« Il faut en finir avec les discriminations et les barrières structurelles », a-t-elle insisté, en rappelant que l’autonomie économique des femmes était un élément clef des efforts vers une planète 50/50.
Avant même l’adoption du Programme 2030, 189 États avaient souscrit aux principes y figurant, notamment sur l’égalité entre les sexes, en devenant parties à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, a fait remarquer la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, Mme Yoko Hayashi.
Depuis octobre 2015, la majorité des observations générales du Comité sont liées aux violations des droits de migrantes, réfugiées et demandeuses d’asile, a expliqué Mme Hayashi. Les membres du Comité ont notamment souligné que la leçon à tirer des déplacements massifs au cours desquels beaucoup de réfugiés et migrants périssent, c’est qu’il est fondamental d’en examiner les causes sous-jacentes, au-delà des conflits et de la persécution.
La Rapporteuse spéciale chargée de la question de la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences, Mme Dubrakva Šimonović, a mis l’accent sur la prévention des féminicides et recommandé la création d’un observatoire sur cette problématique, a-t-elle affirmé.
Elle a réaffirmé sa volonté au cours de son mandat de se battre pour la question du féminicide qui n’est rien d’autre que le meurtre des femmes en raison de leur sexe. En 2012, a-t-elle précisé, 47% des femmes victimes de ce fléau avaient été tuées par un membre de leur famille ou par un partenaire intime.
Pour sa part, la Directrice exécutive adjointe du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Mme Natalia Kanem, a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’action engagée pour en finir avec la fistule obstétricale, qui résume les progrès accomplis dans la réduction des décès maternels et des handicaps. Mais là encore, pour atteindre les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en la matière, beaucoup reste à faire, a-t-elle averti.
S’exprimant ensuite au nom du Groupe des 77 et la Chine dans le cadre du débat général, le représentant de la Thaïlande a insisté sur le renforcement des mécanismes institutionnels, juridiques et financiers de prévention et de lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes. Il a également plaidé en faveur d’opportunités économiques, essentielles pour que les femmes puissent subvenir à leurs besoins et participer à la vie active.
Au nom du Groupe des États d’Afrique, le représentant du Niger a rappelé qu’ils s’étaient engagés à créer des mécanismes pour dispenser aux femmes des compétences financières, techniques et entrepreneuriales dans l’esprit de la Déclaration de l’Assemblée de l’Union africaine proclamant l’année 2015 « Année de l’autonomisation des femmes et du développement de l’Afrique pour la concrétisation de l’Agenda 2063 ».
Les violences domestiques constituent une véritable barrière à l’accès des femmes aux opportunités égales dans les domaines social, économique et politique, a déploré le représentant du Guyana en prenant la parole au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM). Les femmes sont les plus touchées par le phénomène du trafic des personnes, a-t-il ajouté.
Son homologue de la République dominicaine a indiqué que la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) s’inquiétait de la féminisation de la pauvreté et la vulnérabilité des femmes qui souffrent de multiples formes de discrimination, comme les femmes migrantes, rurales, autochtones, handicapées, âgées, et les femmes d’ascendance africaine.
La Troisième Commission poursuivra demain, dès 10 heures, son débat général consacré à la promotion de la femme auquel participe plus d’une centaine de délégations.
PROMOTION DE LA FEMME (A/71/38, A/71/209, A/71/219, A/71/223, A/71/306 et A/71/398
Déclarations liminaires
Mme LAKSHMI PURI, Directrice exécutive adjointe chargée du Bureau de l’appui aux mécanismes intergouvernementaux et des partenariats stratégiques et Sous-Secrétaire générale des Nations Unies de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a évoqué l’ensemble normatif historique sur lesquels les États Membres se sont mis d’accord l’année passée et qui ne demande maintenant qu’à être mis en œuvre. ONU-Femmes, a-t-elle assuré, est prête à appuyer ces avancées, notamment en ce qui concerne les réfugiées et les migrantes.
« L’autonomie économique des femmes est un élément clef des efforts vers une planète 50/50 », a affirmé Mme Puri. L’intégration systématique de la problématique hommes-femmes dans la mise en œuvre du Programme de développement durable est essentielle. Partout, les femmes continuent de lutter pour un salaire égal et les femmes entrepreneurs n’ont pas accès au financement. Dans le secteur informel notamment, domestique ou en matière de soins de santé, « il faut en finir avec les discriminations et les barrières structurelles », a-t-elle déclaré.
Mme Puri a proposé de s’appuyer sur la feuille de route adoptée par la soixantième session de la Commission de la condition de la femme pour appliquer le Programme 2030 en tenant compte de la problématique hommes-femmes. « Nous avons l’objectif 5 sur l’égalité des sexes et des cibles spécifiques », s’est-elle félicitée. Elle a également cité l’initiative phare d’ONU-Femmes intitulée « Faire en sorte que chaque femme et chaque fille comptent » et le partenariat sur les statistiques ventilées par sexe lancé le 22 septembre.
Elle a appelé la Troisième Commission à porter son attention sur l’importance d’avoir des cadres juridiques non discriminatoires et une action affirmative. Il faut travailler avec les hommes dans tous les aspects du leadership et du processus de décision, a-t-elle insisté.
S’agissant de l’action menée pour éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, la Sous-Secrétaire générale a dit qu’il fallait « mettre un terme aux violences qui empêchent les femmes et les filles d’avoir accès à l’éducation et d’exercer leurs droits économiques et sociaux ». Cette violence est quantifiable, a-t-elle précisé. Il y a « un prix à payer » et des conséquences pour le développement durable.
Mme Puri a appelé ensuite à plus de coopération entre les différents acteurs, y compris les Nations Unies, pour éliminer les mutilations génitales féminines. Elle a rappelé le besoin de légiférer pour pénaliser ces pratiques. Quant au problème de la traite des femmes et des filles, il est aggravé par les déplacements massifs, a-t-elle averti.
Lors de la réunion des dirigeants mondiaux sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, organisée l’année dernière par ONU-Femmes et la Chine, 72 chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à réaliser des progrès tangibles pour les femmes et les filles d’ici à 2020. À ce jour, a expliqué l’intervenante, 24 pays ont rapporté des avancées dans ce cadre, qu’il s’agisse d’une meilleure représentation politique ou d’une autonomisation économique.
Mme NATALIA KANEM, Directrice exécutive adjointe du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a présenté le rapport du Secrétaire général intitulé « Intensifier l’action engagée pour en finir avec la fistule obstétricale », qui résume les nouveaux faits dans cette lutte aux niveaux international, régional et national.
Elle a signalé qu’au cours des deux années écoulées, des progrès significatifs avaient été accomplis dans la réduction des décès maternels et des handicaps, notamment en ce qui concerne la fistule obstétricale. Cependant, pour atteindre les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030 en la matière, beaucoup reste à faire, a-t-elle averti.
Mme Kanem a expliqué que la fistule obstétricale était une lésion du canal de naissance du fait d’un accouchement prolongé et compliqué sans accès à des soins qualitatifs d’urgence. Dans la plupart des cas, le bébé est mort-né ou décède avant la fin de la première semaine de vie. La mère souffre de cette lésion dévastatrice et garde des cicatrices physiques, mentales et émotionnelles pendant de longues années.
La Directrice exécutive adjointe du FNUAP a ajouté que la fistule obstétricale était évitable et que des stratégies, plans et politiques avaient été mis en place à l’échelle nationale, y compris des équipes spéciales sur la fistule.
À la fin de 2015, 15 pays au moins ont conçu des stratégies nationales pour en finir avec la fistule. Le rapport fait également état de la première campagne mondiale, lancée en 2003, par le FNUAP et ses partenaires. Cette campagne a abouti à des résultats quantifiables grâce à un leadership robuste, à des mesures spécifiques et un travail de plaidoyer avec des acteurs clefs à travers un partenariat bien coordonné pour intensifier les efforts mondiaux, régionaux et nationaux.
À l’échelle des Nations Unies, elle a notamment signalé le Mécanisme H6, qui comprend le FNUAP, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), ONU-Femmes et la Banque mondiale, qui fut fondamentale dans l’intégration de la fistule dans des programmes de santé plus larges liés à la Stratégie mondiale pour la santé de la femme, de l’enfant et de l’adolescent (2016-2030).
Au chapitre des défis, Mme Kanem a relevé un sérieux manque de ressources qui continue à entraver la réponse nécessaire pour éliminer la fistule obstétricale. Elle a enfin souligné que le Secrétaire général recommandait, entre autres, une intensification des efforts dans cinq domaines: stratégies et interventions en termes de prévention et traitement; appui financier; stratégies de réinsertion; plaidoyer et sensibilisation; et recherche, collecte de données et analyse.
Dialogue interactif
Le Chili a demandé une clarification quant au fait que la fistule obstétricale est le résultat d’un accouchement dans de mauvaises conditions.
Le Mexique s’est intéressé à la situation de vulnérabilité des migrantes qui sont une proie facile pour les réseaux de traite des personnes. Il a fait valoir l’expérience des institutions des Nations Unies pour aider les États Membres.
Mme Kanem a confirmé que la fistule obstétricale était le résultat de la rupture du canal durant l’accouchement suite à un travail prolongé. Les organes internes risquent de se briser durant l’accouchement d’où la nécessité de la prévention.
Elle a également mentionné la stigmatisation sociale des femmes souffrant de cette incontinence. Pour les millions de femmes menacées par ce problème et pour celles qui en souffrent déjà, une opération chirurgicale pourrait être salvatrice, a-t-elle expliqué.
La Directrice exécutive adjointe a rappelé que le Mexique était le pays qui appuyait le plus les programmes d’appui aux femmes et filles migrantes et réfugiées. ONU-Femmes continuera de s’occuper de la corrélation entre la migration et le problème de la traite des personnes, a-t-elle assuré.
Déclaration liminaire
Mme YOKO HAYASHI, Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a mis en avant quatre thèmes sur lesquels le Comité s’est concentré durant l’année écoulée: l’engagement du Comité dans le suivi et l’examen des objectifs du Millénaire pour le développement; les droits des femmes et filles migrantes et réfugiées; les observations générales du Comité; et le processus de renforcement des organes conventionnels.
Elle a souligné qu’avant l’adoption même du Programme de développement durable à l’horizon 2030, 189 États avaient souscrit aux principes y figurant, notamment l’objectif 5 sur l’égalité entre les sexes, en devenant parties à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
Cette année, le Comité a commencé à inclure une référence systématique sur la mise en place de cadres juridiques de promotion, d’application et de suivi de l’égalité et de la non-discrimination sur la base du sexe.
Elle s’est ensuite réjouie du fait que le Conseil économique et social (ECOSOC) ait invité le Comité à apporter sa contribution au Forum politique de haut niveau, qui aura lieu en 2017, et sera axé sur l’élimination de la pauvreté et les 17 objectifs de développement durable.
Elle a rappelé par ailleurs l’adoption, le 19 septembre 2016, de la Déclaration sur les réfugiés et les migrants et a salué, au nom des membres du Comité, l’engagement politique des États à protéger les droits des réfugiés et des migrants, la reconnaissance des vulnérabilités spécifiques des femmes et des filles durant leur déplacement et la protection de leurs droits.
Elle a mis l’accent sur le fait que 18 des 27 observations générales du Comité, adoptées depuis octobre 2015, étaient liées aux migrantes, aux réfugiées et aux demandeuses d’asile, concernant en particulier les violations de leurs droits au sujet des procédures d’asile. Les membres du Comité ont notamment souligné que la leçon à tirer des déplacements massifs au cours desquels beaucoup de réfugiés et migrants périssent, c’est qu’il est fondamental d’en examiner de près les causes sous-jacentes, bien au-delà des conflits et de la persécution.
Il faudrait aussi inclure la violence fondée sur le sexe, l’exploitation, les effets des changements climatiques, la détérioration de l’environnement, les catastrophes naturelles, l’extrême pauvreté et le manque d’accès à l’éducation, à un emploi décent et à des services de santé de base.
S’agissant des ressources du Comité, Mme Hayashi, dont le mandat expire cette année, a salué le processus de renforcement des organes conventionnels, tout en signalant que l’appui en termes de personnel n’avait pas augmenté proportionnellement à l’accroissement des tâches du Comité.
Dialogue interactif
Rappelant que les organisations de la société civile jouent un rôle essentiel pour dénoncer les discriminations dont sont victimes les femmes et les filles, le représentant de l’Irlande s’est inquiété du rétrécissement de la marge de manœuvre de ces organisations.
Le représentant du Japon, soulignant qu’il fallait prendre des mesures concrètes pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a demandé à Mme Hayashi comment chaque gouvernement devrait coopérer avec le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.
« Quelle expérience le Comité a-t-il eu avec la procédure simplifiée de présentation des rapports et comment explique-t-il l’augmentation du nombre de rapports d’États parties en attente dans ce contexte », a souhaité savoir la représentante de la Suisse.
La déléguée de l’Union européenne s’est félicitée du fait que, face à la crise des réfugiés, le Comité ait déclaré que les États avaient le devoir de protéger les droits des femmes tout au long du cycle de déplacement. Elle a demandé ensuite à Mme Hayashi quelles difficultés elle rencontrait pour donner davantage d’accès à la justice pour les femmes et comment elle coopérait avec les autres organes conventionnels des droits de l’homme.
Les lois discriminatoires persistent, a déploré la représentante du Danemark, en faisait notamment remarquer que 70% de la population mondiale pauvre était composée de femmes. Les chiffres doivent changer, a-t-elle dit, avant de demander à Mme Hayashi quelles priorités lui permettraient de mieux assurer l’objectif d’éliminer la discrimination et de lutter contre les stéréotypes liés au sexe.
Le représentant du Royaume-Uni lui a demandé des précisions sur son approche en matière de représailles et d’intimidations, et « comment s’assurer que les femmes partout pourront travailler auprès du Comité ».
À son tour, la représentante de la Lituanie a souhaité parler de la contribution du Comité à la mise en œuvre de l’objectif 5 du Programme 2030 et de la façon dont il échange des informations avec d’autres organes de traités.
La représentante de la Slovénie, après avoir rappelé que le Comité avait évalué le rapport de son pays, lui a demandé son point de vue sur les bonnes pratiques dans la lutte contre les stéréotypes au sein des systèmes judiciaires et les discriminations dans les zones rurales.
Enfin, la représentante de la Norvège a voulu connaître les modalités existantes pour interagir avec la Commission des statistiques de l’ONU et avec d’autres organes qui traitent aussi des questions des femmes.
S’agissant des procédures de renforcement des organes de traités, la Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a souligné que son Comité avait joué un rôle de pionnier en matière de simplification. Sept pays ont déjà reçu l’approbation pour utiliser la procédure simplifiée de présentation des rapports et le premier dialogue commencera en février 2017, a-t-elle précisé. Elle n’a donc pas pu encore examiner un cycle complet.
En ce qui concerne la participation, le Comité tient des réunions publiques ouvertes aux organisations de défense des droits de l’homme et organise parfois des exposés officieux avec des représentants de la société civile, a répondu Mme Hayashi.
L’année dernière, à San José, au Costa Rica, un document important a été adopté sur la question des représailles contre les défenseurs des droits de l’homme et des intimidations contre ceux qui coopèrent avec les organes de traités. Le Comité n’a pas créé de poste de rapporteur spécial à ce sujet, a-t-elle précisé, mais le bureau traite de cette question.
S’agissant des objectifs de développement durable, le Comité s’efforce de partager ses informations pour aider à la création des indicateurs, a expliqué Mme Hayashi. Elle aimerait que les États Membres disposent de lois fondamentales pour interdire la discrimination à l’égard des femmes et promouvoir leur autonomisation.
Le droit coutumier, les us et coutumes, des pratiques justifiées au nom de la religion font que les femmes n’ont pas accès aux tribunaux. « Il faut en finir avec les pratiques et les lois discriminatoires », a insisté l’intervenante. L’Académie du droit humanitaire de Genève a permis de réunir les organes de traités, mais il faut plus de coopération, a-t-elle reconnu.
« Nous travaillons en étroite coopération avec le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes », a assuré à son tour la Sous-Secrétaire générale des Nations Unies de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes), Mme Laksmi Puri.
L’important, a-t-elle rappelé, est de savoir s’il y a des cadres juridiques en place pour promouvoir et mesurer l’égalité entre les sexes et la non-discrimination. Il y a 50 indicateurs sur cette question, dont 14 liés à l’objectif 5.
Déclaration liminaire
Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIĆ, Rapporteuse spéciale chargée de la question de la violence contre les femmes, ses causes et conséquences, a expliqué que le rapport du Secrétaire général qu’elle présentait offrait une mise à jour sur le débat relatif à l’adéquation du cadre juridique sur la violence contre les femmes initié par son prédécesseur, et contient les vues des mécanismes mondiaux y compris celles du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.
Il s’agit d’un processus en cours appuyé par les contributions des États Membres et autres parties prenantes, notamment sur la nécessité d’initier un traité juridiquement contraignant sur les violences contre les femmes, a-t-elle déclaré.
Une autre partie de ce rapport met l’accent sur la prévention des féminicides et les recommandations pour la création d’un observatoire sur cette problématique, a-t-elle affirmé. Mme Šimonović a réaffirmé sa volonté au cours de son mandat de se battre pour la question du féminicide qui n’est rien d’autre que le meurtre des femmes en raison de leur sexe ou genre.
Elle a indiqué qu’en 2012, 47% des femmes victimes de ce fléau avaient été tuées par un membre de leur famille ou par un partenaire intime. Une situation qui survient à un moment où l’on observe de nombreuses lacunes et défaillances dans les systèmes de prévention nationaux, un manque de données et de leur ventilation sur le phénomène. Elle a expliqué que ce rapport visait à promouvoir et à fournir des directives aux États sur les modalités permettant de mettre sur pied l’observatoire sur le féminicide.
La Rapporteuse spéciale a reconnu que des actions significatives avaient été prises dans la lutte contre les féminicides, citant l’exemple en 2013 de l’adoption par l’Assemblée générale d’une résolution dans laquelle elle exprimait ses profondes préoccupations sur le féminicide et l’impunité dont jouissent les auteurs.
Cette résolution, a-t-elle dit, appelait à une action renouvelée et invitait les États Membres à renforcer leur système de justice pénale, et demandait au Secrétaire général de convoquer un groupe intergouvernemental d’experts à composition non limitée.
Parallèlement, elle a mis en avant le Programme d’action de développement durable à l’horizon 2030, qui reconnaît les violences basées sur le genre comme un obstacle majeur au développement économique et social et à la réalisation des objectifs de développement durable.
Selon Mme Šimonović, la mise en œuvre du Programme 2030 offre une nouvelle opportunité d’accélérer le progrès dans la réalisation de l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes et des filles en améliorant la collecte de données sur le germinicide.
À cet égard, elle a soutenu le fait que l’observatoire sur le féminicide était un mécanisme national concret en vue de réussir cette collecte de données et l’utiliser comme un outil de prévention.
Par ailleurs, elle a salué les initiatives louables des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni, appelant les États et autres parties prenantes à partager des expériences de bonnes pratiques dans le domaine.
Dialogue interactif
Le Chili a déploré que son pays enregistre l’un des taux les plus élevés de féminicide de la planète. C’est la violence la plus extrême, a-t-il déclaré avec effroi, saluant le travail de la Rapporteuse spéciale notamment sur la proposition de mise en place d’un observatoire national du féminicide. Il a également abordé le thème des mutilations génitales féminines en invoquant le rapport du Secrétaire général sur cette question (A/71/209).
L’Égypte a regretté que le rapport de Mme Šimonović n’ait été mis à la disposition des délégations que tardivement. Il ne faut pas créer un nouveau cadre juridique qui serait consacré uniquement à la violence à l’égard des femmes, a déclaré l’oratrice, qui a souligné que les observations générales des organes conventionnels n’étaient pas de nature contraignante.
Elle a déploré le fait que les précédents titulaires de mandat sur la violence à l’égard des femmes se soient uniquement concentrés sur la violence domestique et qu’il serait opportun, à présent, qu’ils examinent la violence sur les lieux publics.
L’Australie a mis en exergue la nécessité de la prévention et de l’appui à long terme en cas de violence à l’égard des femmes. Elle a insisté pour que cette question demeure prioritaire au sein des Nations Unies. Elle a demandé des exemples de pratiques optimales sur les éléments de preuves concernant la violence domestique.
Le Liechtenstein a appuyé l’initiative en vue de mettre en place des observatoires nationaux sur le féminicide et a prié la Rapporteuse spéciale de dire son avis sur la violence contre les femmes politiques, comme l’assassinat de la députée britannique Jo Cox.
L’Espagne a appuyé la décision de la Rapporteuse spéciale de prendre des mesures immédiates pour l’élimination du féminicide. L’Espagne dispose d’un observatoire suite à une étude qui a eu un effet de prise de conscience nationale. Il a rappelé le lien existant entre violence sexiste et développement, toujours présent dans la politique espagnole qui dispose d’une série de mesures pour en finir avec le féminicide. Le silence est l’une des ombres au tableau, a déclaré le délégué, qui s’est demandé comment résoudre le problème.
Le Brésil a aussi salué l’idée d’établir un observatoire, ajoutant que sa nouvelle législation prévoyait des peines lourdes contre la violence faite aux femmes. Comment les États pourraient-ils coordonner leur action aux niveaux régional et international?
L’Estonie a voulu savoir pourquoi certains considèrent qu’une nouvelle convention juridiquement contraignante des Nations Unies sur la violence à l’égard des femmes serait déterminante?
Davantage de coopération, de recherche et de preuves serait très important pour susciter un changement collectif a estimé la Norvège, qui s’est interrogée sur la manière dont les hommes pourraient contribuer à une solution visant à en finir avec la violence à l’égard des femmes.
Les États-Unis ont considéré que la collecte de données précises sur les meurtres de femmes et de filles était cruciale. La violence en ligne, notamment le dénigrement et le harcèlement, gagne du terrain et quels seraient alors les moyens de résoudre ce problème.
La réalité est choquante a déclaré le Royaume-Uni, qui a rappelé que de nombreuses femmes étaient assassinées dans le cadre intime de leur vie privée. La moitié des femmes tuées le sont par des personnes supposées les aimer et les protéger, a affirmé le représentant. Dans le cadre de l’examen du féminicide, comment traiter la situation des femmes les plus marginalisées comme les déplacements, s’est-il enquis.
La République tchèque a appuyé la création d’un observatoire des féminicides pour analyser systématiquement tous les assassinats de femmes. Quelles mesures pratiques recommander, a-t-elle demandé à la Rapporteuse spéciale.
Condamnant toute forme de violence à l’égard des femmes et des filles, qui entrave la paix et le développement durable, le Canada a mis l’accent sur l’impact économique de la violence à l’égard des femmes et sur la stabilité des pays.
Cette violence est liée à une culture des sociétés où il manque une condamnation publique et politique de ce fléau universel, a affirmé le Portugal, qui a ajouté qu’une femme sur trois dans le monde avait eu à subir une forme ou une autre de violence en raison de son sexe.
Les Maldives ont renforcé leur arsenal juridique pour prévenir et punir la violence fondée sur le sexe. Des systèmes de suivi ont été notamment mis en place pour éviter la traite des femmes et des filles. Un code de conduite des forces de l’ordre, des refuges et des mesures d’assistance aux victimes ont également été créés.
L’Union européenne a souligné que les Nations Unies avaient un rôle fondamental à jouer pour répondre au problème des violences à l’égard des femmes. Les féminicides ne sont pas des cas isolés mais plutôt l’étape ultime de différentes violences. Elle a prié la Rapporteuse spéciale de détailler les mesures que les États pourraient prendre dans la collecte des données, ou créer des unités spéciales.
L’État de Palestine a remercié Mme Šimonović pour sa visite, le mois dernier, durant laquelle elle a pu observer la situation tragique du peuple palestinien. Cette situation s’est détériorée avec l’utilisation excessive de la force d’occupation israélienne qui a tué 22 femmes en octobre dont près de la moitié étaient âgées de moins de 18 ans. L’observatrice a dénoncé la violence à l’égard des femmes dans les colonies de peuplement. Elle a demandé l’opinion de la Rapporteuse spéciale pour responsabiliser la force d’occupation israélienne.
Des millions de femmes sont assujetties à la violence sexiste également pour intimider ou réprimer les revendications de communautés spécifiques a fait rappeler le Danemark, qui a plaidé en faveur de systèmes judiciaires justes, qui sanctionnent dûment les auteurs de violence. Comment mettre fin à la violence aux femmes dans les zones de conflit, a demandé l’oratrice?
Le Slovénie a mis en place un groupe de travail interministériel pour la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. Le mariage forcé est interdit, conformément au Code pénal. Ce groupe de travail est une sorte d’observatoire, a signalé l’intervenante, qui a prié Mme Šimonović de publier des exemples d’observatoires sur son site en ligne.
Comment impliquer la société civile et d’autres acteurs contre cette violence extrême, s’est enquise l’Argentine.
La Fédération de Russie a déploré qu’aucun pays n’ait été en mesure d’éliminer la violence à l’égard des femmes. Le problème ne provient pas de l’absence de mesures pratiques mais bien de la mise en œuvre des dispositions des textes existants. Il convient de concentrer les efforts sur le bon fonctionnement des mécanismes, d’ores et déjà, opérationnels.
La délégation d’Israël a dit ne pas avoir voulu intervenir mais s’y est vue obligée puisque, contrairement à ce qu’a déclaré l’observatrice de la Palestine, ce sont les Israéliens qui sont agressés, les femmes palestiniennes incitant même à la violence contre son pays.
La Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences a souhaité que son rapport soit perçu « comme un rapport vivant » et que, dès qu’il sera publié dans toutes les langues, il soit utilisé comme outil pour le suivi. Elle a espéré recevoir des informations afin de compléter en ligne le rapport et elle a invité les États à se concentrer sur la mise en œuvre des recommandations au niveau national.
Le modèle qu’elle a utilisé pour le féminicide peut être appliqué à d’autres formes de violence contre les femmes, a assuré Mme Šimonović.
Si elle a remercié les participants pour leur dialogue, elle a toutefois estimé qu’elle n’avait pas reçu suffisamment d’informations sur les questions posées. Il faut, selon elle, un « processus transparent pour inclure toutes les parties prenantes » et les points de vue des États Membres, des organisations non gouvernementales et des représentants du monde universitaire.
S’agissant de la collecte de données, son intention, a-t-elle poursuivi, est de voir quelles sont les meilleures pratiques, puis de les utiliser. En particulier, il faut continuer de collecter les informations qui s’avèrent nécessaires pour prévenir la violence à l’encontre des femmes en politique.
« Le silence en ce qui concerne le féminicide est un obstacle », a déploré la Rapporteuse spéciale. Un grand nombre de violences sont perpétrées dans la sphère privée; il faut des campagnes de sensibilisation et des plaidoyers inscrits dans la durée.
Pour une meilleure mise en œuvre des objectifs de développement durable, Mme Šimonović a recommandé aux pays de s’inspirer du modèle souple qu’elle a mis en place pour le féminicide. « Ce qui est important, ce sont les résultats », a-t-elle insité. Il faut des mécanismes de mise en œuvre, a-t-elle ajouté.
Elle a salué les initiatives régionales, comme en Afrique, et nationales en matière de codes de conduite. D’après elle, la police et les services de sécurité ne sont pas suffisamment sensibilisés en général.
Revenant sur le besoin de collecter des données plus précises, elle a proposé de cibler certaines sous-catégories, notamment sur l’ethnicité.
Mme Šimonović a dit qu’il fallait fournir aux professionnels du système judiciaire de bons exemples en matière de jurisprudence, pour refléter à bon escient l’égalité hommes-femmes.
Il faut continuer de mettre l’accent sur les stéréotypes, car ils sont partout, profondément ancrés dans les sociétés.
Dans son prochain rapport au Conseil des droits de l’homme, en juin 2017, la Rapporteuse spéciale se concentrera sur les centres de protection des femmes victimes de violences.
S’agissant de la mise en œuvre des engagements à l’horizon 2030, elle a dit avoir tenu des consultations avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).
Lutter contre la violence dans les zones de conflit est l’une des priorités de son mandat, a-t-elle assuré ensuite.
Elle a reconnu avoir besoin d’acteurs indépendants et de la société civile pour lutter contre la violence à l’égard des femmes sur le terrain.
« Faut-il ou non un nouvel instrument international? Donnez-moi votre avis », a-t-elle conclu.
Débat général
M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande), qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et la Chine, a estimé que les rapports du Secrétaire général faisaient le bilan des défis à relever pour ce qui a trait à la violence à l’égard des femmes et des filles, la traite des personnes, les mutilations génitales féminines ou la fistule obstétricale. Il a salué les recommandations utiles et l’identification de voies de coopération potentielle.
Il a appelé à une accélération de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et du suivi de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, en particulier dans les 12 domaines de préoccupation majeure identifiés lors de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes à Beijing.
Il a ajouté que la problématique de l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes étaient indissociables du développement durable et devaient être transversales dans l’application des objectifs à l’horizon 2030.
L’intervenant a insisté sur le renforcement des mécanismes institutionnels, juridiques et financiers de prévention et de lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes. Il a également plaidé en faveur d’opportunités économiques, essentielles pour que les femmes puissent subvenir à leurs besoins et participer à la vie active.
À cet égard, la communauté internationale devrait intensifier sa coopération et le Partenariat mondial pour l’éducation pour que l’égalité des sexes devienne une réalité partout dans le monde.
Il a en outre fait part de sa profonde inquiétude devant les souffrances des femmes et des filles vivant sous occupation étrangère et a souligné l’urgence d’une action collective pour résoudre ce problème.
Il a enfin formé le vœu que le prochain Secrétaire général de l’ONU poursuive les efforts de M. Ban Ki-moon visant à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes.
M. ABDALLAH WAFY (Niger), au nom du Groupe des États d’Afrique, a réaffirmé l’engagement du Groupe en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation de toutes les femmes et les filles. Il a affirmé que l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles dans la sphère publique comme privée, notamment la traite et l’exploitation sexuelle, ainsi que de toutes les autres formes d’exploitation, permettrait de promouvoir le bien-être des femmes, d’œuvrer à leur participation pleine et entière et d’encourager l’égalité des chances dans l’exercice des postes de direction au sein de la vie politique, économique et publique.
Le représentant a ensuite rappelé que l’Assemblée de l’Union africaine avait adopté, en juin 2015, la « Déclaration proclamant l’année 2015 année de l’autonomisation des femmes et du développement de l’Afrique pour la concrétisation de l’Agenda 2063 ». Par cette Déclaration, les États s’engagent notamment à créer des mécanismes qui dispensent aux femmes des compétences financières, techniques et entrepreneuriales.
Par ailleurs, le Groupe des États d’Afrique présentera, cette année, son projet de résolution annuel intitulé « Intensification de l’action mondiale visant à éliminer les mutilations génitales féminines » et demande à la famille des Nations Unies de parrainer cette résolution importante.
Le représentant a indiqué que le Groupe des États d’Afrique soumettrait aussi son projet de résolution intitulé « Intensifier l’action engagée pour en finir avec la fistule obstétricale ». Il a appelé tous les partenaires du Groupe à soutenir ce projet de résolution important en l’adoptant par consensus comme les années précédentes.
Mme LUZ DEL CARMEN ANDUJAR (République dominicaine), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), s’est inquiétée de la féminisation de la pauvreté, de la violence à l’égard des femmes, de la discrimination en matière d’éducation et de formation, de l’accès inégal aux ressources économiques et financières, des politiques d’emploi inégalitaires, du travail non rémunéré, et, de façon générale, des inégalités structurelles qui perpétuent le cycle de la marginalisation.
D’après elle, la participation des femmes au processus de prise de décisions au plus haut niveau doit figurer en tête des priorités nationales, régionales et internationales.
La CELAC est également préoccupée par la vulnérabilité des femmes qui souffrent de multiples formes de discrimination, comme les femmes migrantes, rurales, autochtones, handicapées, âgées, et les femmes d’ascendance africaine. À ce sujet, la représentante a estimé qu’il fallait reconnaître pleinement la contribution des travailleuses migrantes au développement de leurs pays de destination et d’origine. « Les droits de l’homme des femmes migrantes doivent être pleinement respectés, quel que soit leur statut », a-t-elle insisté.
Les pays d’Amérique latine et des Caraïbes sont engagés à intensifier leur action pour prévenir et combattre la traite des personnes, y compris le trafic illicite et l’exploitation de migrants, en portant une attention particulière aux femmes, aux garçons, aux filles et aux adolescents. La CELAC appelle les États à établir et à renforcer les points focaux pour la coordination entre les pays d’origine, de transit et de destination.
Les gouvernements de la région ont créé un groupe de travail sur la promotion des femmes, appuyé par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes et ONU-Femmes, qui s’est déjà réuni à San Salvador, en 2014 et 2015. Il se réunira le mois prochain à Santo Domingo, en République dominicaine, a annoncé le représentant.
De plus, la treizième Conférence régionale sur les femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes, qui se tiendra du 25 au 29 octobre 2016 à Montevideo, en Uruguay, devrait adopter la Stratégie de Montevideo en vue d’appuyer la mise en œuvre des engagements des États sur l’égalité des sexes dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La représentante a également reconnu la contribution importante des mouvements féministes et de la société civile à cet égard.
M. MICHAEL R. TEN-POW (Guyana), prenant la parole au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a indiqué que le fait que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 mettait l’accent sur la question de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes était la preuve que les États Membres reconnaissaient l’importance de la problématique dans la réalisation de l’ensemble du Programme.
Toutefois, il est urgent de signaler que des problèmes subsistent, notamment la pauvreté qui touche un plus grand nombre de femmes. À propos de la violence contre les femmes, le rapport du Secrétaire général estime à 35% le nombre de femmes ayant subi une violence physique ou sexuelle à un moment de leur vie, a fait remarquer M. Ten-Pow. Une situation très préoccupante, a-t-il souligné, avant de rappeler que les violences domestiques constituaient une véritable barrière a l’accès des femmes aux opportunités égales dans les domaines social, économique et politique.
Par ailleurs, elles sont les plus touchées par le phénomène du trafic des personnes, a déclaré le représentant, en citant le rapport 2014 de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) qui constate que 71% des victimes de cette exploitation sont des femmes et des filles.
Dans les Caraïbes, les femmes sont perçues comme des partenaires des processus de développement et des acteurs majeurs dans les efforts visant à éliminer la pauvreté, s’est réjoui le représentant, en expliquant que la région avait réalisé des avancées significatives pour la promotion du statut économique des femmes et des filles, ainsi que la réduction des inégalités entre hommes et femmes.
Toujours sur le plan régional, il a fait état de plans et stratégies conçus en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) afin de réduire de 20% le nombre d’adolescentes enceintes. Il s’est également félicité de ce que, dans les États membres, le nombre de femmes ayant accès aux études secondaires s’était accru avec également un bon niveau de participation des femmes au secteur de l’emploi dans la région.
Toujours au titre des motifs de satisfaction, M. Ten-Pow a déclaré qu’au Guyana une loi stipulait qu’un tiers des candidats choisis par les hommes politiques devaient être des femmes. La CARICOM est d’avis que la promotion de la femme doit avoir une approche transformative pour l’atteinte des objectifs de développement durable, a-t-il conclu.
M. RAMLAN BIN IBRAHIM (Malaisie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a indiqué que le plan de travail du Comité de l’ASEAN sur les femmes pour la période 2016-2020 intégrait des éléments de la Charte de l’ASEAN, de la feuille de route pour la Communauté de l’ASEAN (2009-2015), de la Commission intergouvernementale des droits de l’homme de l’ASEAN et de la Commission de l’ASEAN pour la protection et la promotion des droits de la femme et de l’enfant.
La problématique hommes-femmes est intégrée dans divers domaines du développement, notamment en ce qui concerne l’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de leurs effets dans la région.
Des directives visant les femmes et les filles victimes de la traite sont également en cours de finalisation, a précisé le représentant. Le Comité de l’ASEAN sur les femmes continuera de travailler avec la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence à l’encontre des enfants, Mme Marta Pais, et avec les agences pertinentes des Nations Unies, a-t-il assuré.
D’autres mécanismes régionaux, tels que le réseau des femmes entrepreneurs de l’ASEAN ou les femmes parlementaires de l’ASEAN, contribuent à l’autonomisation économique et politique des femmes.
Mme JOANNE ADAMSON, Union européenne, a souligné que la mobilité humaine actuelle, phénomène qui a pourtant toujours existé, était en train de mettre à l’épreuve la volonté politique. Aujourd’hui, les femmes et les filles représentent approximativement la moitié d’environ d’un milliard de migrants et également la moitié de la population de réfugiés, déplacés à l’intérieur ou apatrides.
Or, c’est précisément en raison de la violence, de l’exploitation et des formes multiples de violence fondées sur le sexe que des millions de femmes et de filles choisissent de quitter leur pays d’origine. Par conséquent, selon l’Union européenne, la communauté internationale doit aborder la migration sous l’angle de l’égalité des sexes pour apporter les réponses spécifiques en termes de besoins de protection des femmes et des filles durant les différentes étapes de leur migration.
La Déclaration de New York, adoptée lors du Sommet du 19 septembre 2016, va dans ce sens et contribuera au renforcement des engagements en vue d’atteindre certains des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Dans le contexte de la création de la facilité de l’Union européenne pour les réfugiés en Turquie et d’autres actions entreprises en Jordanie et au Liban, les projets et mesures sont basés sur une évaluation des besoins soucieuse de l’égalité des sexes.
L’Union européenne a aussi investi dans le renforcement des capacités et a approuvé un critère prenant en compte le sexe et l’âge. Par ailleurs, le Fonds d’affectation d’urgence pour l’Afrique, d’un montant total de 1,8 milliard d’euros, constitue un bon exemple du travail de l’Union européenne, des projets d’un montant de 927 millions d’euros ayant été, d’ores et déjà, approuvés.
Mme VALERIE BIDEN OWENS (États-Unis) a réaffirmé que son pays faisait de la lutte contre les violences faites aux femmes, en particulier aux personnes autochtones, l’une de ses priorités. À cet égard, elle a mentionné l’ordonnance prise en 2012 par le Président américain, M. Barack Obama, pour prévenir et apporter une riposte à ce phénomène.
Rappelant que les mutilations et ablations génitales étaient des violations qui créent des inégalités et provoquent des problèmes de santé chez les femmes et les jeunes filles, elle a insisté sur le fait que le Département d’État mettait tout en œuvre pour combattre ce phénomène.
Mme Biden Owens a déploré le fait que près de deux millions de femmes à travers le monde souffraient de fistules. Au regard de cette situation préoccupante, elle a souligné la nécessité de promouvoir la santé sexuelle et reproductive, ainsi que les droits des femmes pour un meilleur accès aux centres de santé et pour prévenir les grossesses précoces qui menacent la vie des femmes.
Les États-Unis, a-t-elle affirmé, sont associés à tous les gouvernements du monde engagés dans la lutte contre la traite des êtres humains sous toutes ses formes. À cet égard, son pays a débloqué environ 18 millions de dollars pour combattre le fléau, a fait savoir la représentante.
Mme ABDELKAWY (Égypte) a rappelé les différents engagements internationaux, adoptés l’année dernière, qui comportent notamment des recommandations particulières sur l’égalité des sexes et l’autonomisation. L’Égypte a créé, cette année, la première stratégie nationale 2015-2020 d’égalité des chances, en gardant à l’esprit les comportements culturels.
Le Programme des Nations Unies de développement durable a appuyé une enquête nationale sur le coût économique de la violence à l’égard des femmes, ainsi que la préparation d’un projet de loi sur cette question. Les mutilations génitales féminines n’ont rien à avoir avec l’Islam ni avec aucune religion.
Elle a appelé à leur élimination, rappelant que son pays avait adopté des sanctions pénales. Des services d’aide aux victimes des mutilations ont été mis en place, et leurs auteurs sanctionnés. Elle a également souligné que le Parlement comptait plusieurs députés, dont certaines handicapées.
Mme ANA SOLEDAD SANDOVAL ESPÍNOLA (Paraguay) a indiqué que son pays mettait en œuvre le troisième Plan national d’égalité des chances entre hommes et femmes, principal instrument visant à rendre transversale la perspective du genre dans les politiques publiques de manière à en finir avec le déséquilibre historique et culturel au détriment de la femme au sein de la société.
S’agissant des femmes rurales, une nouvelle législation a été approuvée en vue de garantir leurs droits économiques, sociaux, politiques et culturels. D’autre part, le Gouvernement met en place des programmes de transfert d’argent assortis de conditions tendant à freiner la transmission de la pauvreté d’une génération à une autre, à améliorer l’accès des familles à l’éducation et à la santé, avec une attention particulière aux femmes chef de ménage.
L’allaitement maternel est également encouragé par une loi qui élargit la protection sociale des mères. Le législateur a défini le féminicide et prévoit des sanctions.
Il a appelé tous les États à être à la hauteur de leurs engagements politiques pour atteindre, collectivement, l’objectif 5 du développement durable, en l’occurrence l’égalité des sexes et l’autonomisation de toutes les femmes d’ici à 2030.
Mme AL FASSAM (Koweït) a déclaré que tous les pays devaient renforcer les efforts pour prévenir les violences à l’égard des femmes qui ont lieu dans les sphères publiques et privées. La déléguée a souligné que la Constitution du Koweït précisait que le développement de la société reposait sur l’égalité entre homme et femme en tant que partenaires.
À cet égard, des mesures ont été prises pour consolider le rôle des femmes avec notamment une rémunération égale, ainsi que la présence des femmes dans l’armée et le pouvoir judiciaire, a-t-elle affirmé. Toujours au niveau national, le Plan 2019-2020 s’efforce par tous les moyens de renforcer les capacités des femmes, tout en encourageant l’enseignement des femmes et filles pour consolider les principes d’équité.
Elle a souligné que 52% des femmes étaient scolarisées au Koweït. Dans le domaine de la santé, elle a fait remarquer qu’un programme de vaccination avait été initié en vue de prévenir le cancer chez les femmes.
Elle a rappelé que son pays avait approuvé et ratifié plusieurs accords internationaux pour démontrer sa volonté de coopérer avec des institutions internationales et régionales pour contribuer de manière efficace à la lutte contre les violences à l’égard des femmes.
M. KAI SAUER (Finlande) a reconnu que, même dans son pays, la violence à l’égard des femmes et des filles restait un problème grave. Pour progresser, a-t-il fait valoir, il faut s’attaquer aux stéréotypes qui entourent les hommes et la masculinité, ainsi que les valeurs culturelles et sociétales qui subordonnent les femmes.
On ne peut pas résoudre cette violation des droits de l’homme sans impliquer les hommes et les garçons, a-t-il insisté. La participation des femmes au processus de prise de décisions bénéficie aux sociétés dans leur ensemble et à la croissance économique, a-t-il rappelé.
La Division de statistique de l’ONU en collaboration avec Statistics Finland organisera le sixième Forum mondial sur les statistiques ventilées par sexe, du 24 au 26 octobre, à Helsinki, a annoncé M. Sauer. Cette année, le Forum se concentrera sur les données et les méthodes nécessaires au suivi et à l’examen des indicateurs des objectifs de développement durable, dans une démarche soucieuse de l’égalité des sexes.
En Finlande, par exemple, des experts ont travaillé avec le Conseil national de la police pour améliorer les données relatives aux femmes victimes de violences.
M. HEINZER (Suisse) a jugé important que les services de soutien aux victimes et aux rescapées de la violence à l’égard des femmes soient complets et multisectoriels et intègrent des services médicaux, un appui psychosocial, une aide juridique ainsi qu’une intégration économique, indispensable au rétablissement des victimes sur le long terme.
L’indépendance financière peut en effet être un facteur déterminant permettant de se libérer plus rapidement de certaines situations de violence en particulier domestique. Il a précisé qu’en Suisse, la violence contre les femmes faisait partie intégrante du programme de coopération internationale, du programme de législature et de la stratégie nationale de développement durable.
D’autre part, la violence sexuelle est désormais inscrite comme priorité pour les quatre prochaines années dans le cadre de l’engagement humanitaire du pays. Il a également estimé que les jeunes hommes et les garçons pouvaient être de puissants agents de changement pour soutenir l’élimination des mutilations génitales féminines et que, par conséquent, leur mobilisation était nécessaire tant dans les pays où elles persistent comme pratique courante que dans ceux où elles ont été importée du fait des migrations internationales.
M. NADAV YESOD (Israël) a cité Shimon Peres, ancien Président et Premier Ministre d’Israël pour qui « il n’y a pas d’avenir pour un monde discriminatoire pour les femmes. Les femmes sont l’avenir ». Le représentant israélien a imaginé un monde meilleur dans 15 ans où chaque femme et fille jouirait de chances égales et où la bataille pour les droits des femmes serait gagnée.
D’ici-là, il a exhorté à arrêter la violence, cette « peur paralysante » qui contrôle les sociétés et ce, par un changement de normes et l’octroi de moyens permettant aux femmes de s’exprimer et d’avoir un impact au sein de leurs communautés respectives.
Dans cette optique, l’éducation est fondamentale en ce qu’elle enseigne aux garçons et aux hommes qu’il n’existe rien que les femmes ne puissent faire. Il a encouragé à modifier la perception sociétale à cet égard.
M. INIGO LAMBERTINI (Italie) a déclaré que le monde devait être pacifique et sans pauvreté pour favoriser le développement des femmes. Le délégué a affirmé que des études avaient démontré que les pays impliquant plus de femmes dans leur processus politique étaient les plus riches, les plus pacifiques et les plus équilibrés. Il faut donc renforcer les cadres juridiques pour garantir l’autonomisation des femmes.
Le représentant a fustigé les mutilations génitales, ainsi que les mariages forcés qui, a-t-il dit, sont de graves violations des droits. M. Lambertini a réaffirmé la nécessité de se pencher sur les violations des femmes dans les zones de conflits, en leur accordant plus de protection.
À cet égard, il a lancé un appel à prévenir et à répondre aux crimes dans les zones de conflits et à combattre les violences sexistes. En dépit des progrès dans le domaine, les femmes portent le plus lourd fardeau lors des guerres. L’Italie est d’avis que les femmes mettent davantage leur vie en danger en quittant leur pays pour garantir un mieux-être à leurs familles. Pour le délégué, l’autonomisation des femmes peut leur permettre de participer à la réussite des objectifs de développement durable.
M. SYLAPHET THINKEOMEUANGNEUA (République démocratique populaire lao) a rappelé que l’amendement constitutionnel de 2003 visait à garantir la protection des intérêts des femmes et leur autonomisation. Cet amendement a été suivi, un an après, d’une loi portant sur le développement et la protection des femmes.
Le pays a ensuite promulgué des textes sur l’union des femmes et enfants lao et sur la prévention et l’élimination de la violence à l’égard de la femme et de l’enfant. Une commission nationale de promotion de la femme a été établie par un décret du Premier Ministre avec pour mandat la formulation d’orientations de politique nationale sur la promotion de l’égalité des sexes et de l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes.
Le Gouvernement a également approuvé le Plan de développement des femmes et enfants lao qui contient des objectifs de promotion de la sensibilisation juridique des femmes, de l’amélioration de l’accès à l’éducation, de formations professionnelles, et d’opportunités en termes d’accès à la santé, à la nutrition et aux revenus.
M. MAYANK JOSHI (Inde) a noté que l’égalité des sexes était inscrite dans la Constitution de son pays bien avant l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing. Le Gouvernement a pris une série d’initiatives pour autonomiser les femmes sur les plans économique, social, juridique et politique, et il a intégré une démarche antisexiste dans toutes ses actions.
La lutte contre la pauvreté est une priorité et 80% des microcrédits bénéficient à des femmes. Plus d’1,5 million de femmes participent au processus de prise de décision, a expliqué le représentant. Dans beaucoup d’États, la moitié des sièges sont réservés à des femmes.
En matière d’éducation, l’Inde a réalisé la parité des sexes à l’école primaire. « Sauver nos filles, éduquer nos filles », la campagne phare du Premier Ministre, M. Narendra Modi, s’inscrit dans cet effort. Dans le domaine de la santé, le Gouvernement concentre ses efforts sur la mère, l’enfant et l’adolescent et mène une autre campagne intitulée « Inde propre ». Le congé de maternité a été étendu à 26 semaines. En outre, plusieurs mesures visent à combattre la violence à l’égard des femmes et des filles.
M. MARTÍN GARCÍA MORITÁN (Argentine) a déclaré que la promotion de la femme était d’une grande importance soulignant que sans autonomisation de la femme le développement durable serait un leurre. Le délégué a affirmé que son pays faisait de l’éradication de la violence à l’égard des femmes une politique d’état, soulignant que cette approche est justifiée puisqu’elles doivent faire face à toute une série de violations et de discriminations.
Ces violations des droits de l’homme, a-t-il souligné, sont peu perçues et ont de graves conséquences sur la société. Pour le représentant, outre les nombreuses difficultés auxquelles les femmes sont confrontées, elles doivent également faire face à la traite des êtres humains mais surtout à l’absence de justice dans le domaine.
Pour l’Argentine, il faut mettre en place, notamment, un système de consultation gratuite leur permettant de réclamer justice.
Mme ZAIZAR (Mexique) a déclaré que face aux discriminations multiples auxquelles les femmes et les filles étaient assujetties depuis des temps immémoriaux, il était indispensable de concevoir des programmes et des politiques axés sur la responsabilité conjointe au sein du foyer, sur une visibilité de la problématique de l’égalité des sexes, sur le travail non rémunéré des femmes à la maison et sur des politiques sociales promouvant l’inclusion et le maintien des filles et adolescentes dans le système scolaire.
Le Mexique a adopté, en 2015, une stratégie nationale pour la prévention des grossesses précoces avec pour objectif de réduire de moitié, d’ici à 2030, le taux de fécondité des adolescentes âgées de 15 à 19 ans et d’éliminer les grossesses des filles de moins de 14 ans.
Il a appuyé la nécessité pour les pays d’Amérique latine d’améliorer la collecte des données et les statistiques ventilées par sexe en vue de renforcer les mécanismes de reddition de comptes et d’orienter les lois et politiques publiques, en leur réservant des budgets prévisibles.
Mme MIGUEL CAMILO RUIZ BLANCO (Colombie) a déclaré que le pays avait réussi à mettre en place une solide plateforme normative et de politique publique en faveur des femmes. La violence est abordée à partir de trois dimensions: prévention; renforcement des secteurs et institutions chargés de la prévention et du traitement de la violence à l’égard des femmes; et renforcement des prestations de santé et de la justice pour les victimes.
Elle a précisé que la coordination s’articule autour de l’adéquation normative, du renforcement du système d’information et du suivi. La Colombie a en outre approuvé une loi pénalisant le féminicide comme délit à part.
Concernant l’Accord de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), elle a fait valoir que les femmes avaient été présentes dès le début du processus de négociations. Les femmes représentaient le tiers des négociateurs des deux parties, en particulier en raison du fait que c’étaient surtout les femmes qui avaient le plus souffert des affres du conflit armé.
Saluant l’objectif 5 du Programme de développement durable à l’horizon 2030 sur l’égalité des sexes, M. ANA SILVIA RODRÍGUEZ ABASCAL (Cuba) a affirmé que les Cubaines bénéficiaient des mêmes avantages dans la sphère publique que les Cubains. La stratégie nationale de développement de Cuba, a-t-il ajouté, garantit l’égalité des droits et des opportunités entre les hommes et les femmes.
La conceptualisation du rôle des femmes et des filles dans la société et la famille, et l’élimination des stéréotypes sexuels traditionnels ont progressé. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS), s’est-il enorgueilli, a reconnu Cuba comme étant le premier pays à avoir éliminé la transmission du VIH/sida et de la syphilis congénitale de la mère à l’enfant.
Les droits sexuels et génésiques, y compris le droit à l’avortement et la contraception, sont garantis et font partie des services de santé, a poursuivi le représentant. Par ailleurs, il a considéré que l’embargo économique, commercial et financier imposé à Cuba constituait « une forme de violence directe et indirecte » qui entrave la jouissance par les Cubaines de leurs droits fondamentaux.
Mme SUKACHEVA (Fédération de Russie) a déclaré que pour parvenir à un équilibre entre les sexes, il fallait créer les conditions qui garantissent le respect des droits des femmes. Elle a estimé que, depuis l’adoption de la Déclaration de Beijing, des avancées avaient été réalisées, mais les pays n’étaient pas parvenus à éliminer les violences à l’égard des femmes.
Face à cette situation, elle a lancé un appel à l’ONU à jouer un rôle de chef de file. La Fédération de Russie, a-t-elle dit, a créé une politique étatique holistique dans l’intérêt des femmes, avec notamment le Plan 2017-2022. Ce cadre accorde la priorité à l’élargissement de la participation des femmes aux activités politiques, à l’amélioration des conditions économiques des femmes, leur santé, ainsi qu’à la prévention des cas de violence.
Elle est revenue sur la coopération élargie de son pays avec les autres États en vue de matérialiser les efforts sur les questions liées à l’autonomisation de la femme. La déléguée s’est félicitée de l’organisation, en 2015 à Saint-Pétersbourg, du Forum eurasiatique des femmes et a annoncé que ces assises se dérouleraient de nouveau en Russie en 2018.
M. FIDEL COLOMA GRIMBERG (Chili) a mis l’accent sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes dont les chiffres sont alarmants. On peut parler d’épidémie mondiale, comme l’a indiqué l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a-t-il déclaré, en insistant sur l’importance de données fiables de sorte que chaque pays puisse avoir les politiques qui correspondent à la réalité sur le terrain.
Préoccupé par les formes extrêmes de violence, il a appelé à une prise de conscience au niveau mondial sur le mariage forcé, les mutilations génitales féminines ou l’exploitation sexuelle. Il a salué l’initiative de la Rapporteuse spéciale sur la violence à l’égard des femmes, ses causes et ses conséquences d’œuvrer sans relâche contre le féminicide.
La prévention et le renforcement des capacités des institutions chargées de l’évaluation ainsi que l’éducation, sont quelques-uns des moyens évoqués par le Chili pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe.
M. RAMLAN IBRAHIM (Malaisie) a souligné que son pays s’était fixé pour objectif d’augmenter de 54% à 59% la participation des femmes au marché du travail d’ici à 2020. À cette fin, un certain nombre de ministères et d’agences ont déjà mis en place des horaires de travail flexibles.
La Malaisie a également réussi à faire passer le pourcentage de femmes dans le processus de prise de décision de 18,8% à 35% entre 2004 et 2015. Pour l’instant, 15,6% de femmes siègent aux conseils d’administrations de sociétés publiques.
Par ailleurs, a poursuivi M. Ibrahim, le Gouvernement a lancé l’année dernière un plan d’action national pour autonomiser les mères célibataires.
Mme SALIM (Libye) a indiqué qu’il était impossible de parvenir au développement durable sans la pleine participation des femmes. Elle a mis l’accent sur la violence sexuelle dans les situations de violence armée et d’instabilité politique, ou au sortir d’un conflit.
Dans le contexte politique et sécuritaire actuel en Libye, le Gouvernement d’union nationale est déterminé à assurer la protection des femmes et à prendre des mesures pour lutter contre l’impunité. La Déclaration politique de 2011 en Libye garantit l’égalité des chances ainsi que le droit à l’éducation, à la santé, à posséder des biens et à participer aux processus de prise de décisions.
Cependant, l’implication des femmes demeure en-deçà de ce qui est écrit sur le papier, ce qui est inadmissible. Le Gouvernement vient de créer une unité d’autonomisation des femmes pour reconnaître le rôle des Libyennes, qui se sont avérées très actives au cours des dernières années. Elle a appelé à une assistance des institutions onusiennes aux fins de créer un état de droit.
Mme SALAZAR (Pérou) a réaffirmé son attachement aux documents issus de la Conférence de Beijing et à la mise œuvre de l’objectif 5 de développement durable qui invite à unir les efforts pour éliminer toutes les formes de discrimination à l’encontre des femmes et des filles, de même que la violence fondée sur le sexe dans toutes les sphères de la vie, y compris les pratiques préjudiciables comme le mariage précoce et le mariage forcé des fillettes.
Le Pérou s’est doté d’un plan national d’égalité des sexes pour rendre transversales les politiques publiques dans ce domaine, ainsi que d’un plan contre la violence à l’égard des femmes qui a un caractère prioritaire dans toutes les politiques péruviennes dans le but de modifier les comportements socioculturels qui reproduisent des stéréotypes d’inégalité de pouvoir et de différences hiérarchiques légitimant la violence au sein de la famille, de la société et des institutions publiques et privées.
Mme AL SUWAIDI (Émirats arabes unis) a affirmé que son pays n’avait eu de cesse d’améliorer sa législation en vue d’accroître le nombre des femmes dirigeantes. Elle a souligné que l’objectif principal des Émirats arabes unis était de parvenir à réaliser l’égalité entre les sexes. Elle a indiqué que le Programme national 2015-2021 visait à autonomiser les femmes et à leur garantir une protection accrue, en particulier aux victimes des violences.
La déléguée a déclaré qu’une stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes avait été mise en place pour apporter une réponse appropriée à ce phénomène préoccupant.
En outre, elle a fait valoir que depuis 2012, la loi rendait obligatoire la participation des femmes dans les institutions, soulignant que l’autonomisation était une priorité pour les autorités de son pays.
La déléguée a réaffirmé la volonté de son pays de renforcer le rôle des femmes comme actrices principales sur les questions de développement social.
Par ailleurs, elle a souligné la nécessité de traiter plusieurs défis comme la réduction du taux de la mortalité maternelle dans les cas de conflits mais également l’urgence d’intégrer les femmes dans les processus de règlements des conflits.
M. NGUYEN DUY THANH (Viet Nam) a déclaré que le développement socioéconomique ne saurait être inclusif sans la participation de la moitié de la population mondiale. L’inclusion des femmes, agents de changement, garantira le succès du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a-t-il dit.
Le Viet Nam a créé des cadres juridiques et politiques pour faire avancer la cause des femmes, la Constitution interdisant clairement toute inégalité et discrimination contre environ 50% de la population et 48% de la population active. L’Assemblée nationale est présidée par une femme tandis que le pays a quasiment atteint l’égalité salariale.
Mme MAJDA MOUTCHOU (Maroc) a déclaré que la réforme du Code de la famille avait rendu justice à la femme marocaine et renforcé son rôle au sein de la famille et de la société. La nouvelle Constitution a ouvert la voie à une lutte efficace contre la discrimination à l’égard des femmes et à la pleine jouissance de leurs droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et gouvernemental.
Elle a aussi fait valoir que le Maroc avait ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes et adhéré à son Protocole facultatif. En 2011, le Royaume a aussi décidé de lever toutes les réserves à la Convention.
D’autre part, en 2015, a été introduite la nécessité d’inclure dans la liste de candidature pour l’élection de la Chambre des conseillers au Parlement autant de femmes que d’hommes. Elle a rappelé que le 7 octobre 2016, le Maroc avait eu des élections législatives qui avaient été marquées par une présentation massive de candidates.
M. ANTONIO DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a rappelé que son pays avait présidé les travaux de la Commission de la condition de la femme, tenue en mars dernier après l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Les conclusions agréées, adoptées par la Commission, représentent le premier accord intergouvernemental ayant mis l’accent sur la manière de mettre en œuvre une perspective sensible à l’égalité des sexes pour atteindre les objectifs fixés.
La Commission a en effet détaillé les domaines d’action urgente avec la pleine participation des femmes et des filles, ainsi qu’un large éventail d’acteurs. Il a ajouté que cette vision avait été récemment confirmée par le Conseil des droits de l’homme, qui a adopté une résolution sur les formes multiples et convergentes de discrimination et de violence dans le contexte du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée.
Mme ROSEMARY OWINO (Kenya) a déclaré que la Constitution du Kenya garantissait les droits civils, politiques, sociaux et économiques des femmes. Le programme de développement durable du Kenya, intitulé « Vision 2030 », souligne l’importance d’intégrer la problématique hommes-femmes et l’autonomisation des femmes.
Diverses lois sur la prévention de la violence domestique, l’interdiction des mutilations génitales féminines, les infractions sexuelles, l’emploi, la traite des personnes, la propriété matrimoniale et la violence sexiste ont été adoptées. Un comité a été créé pour combattre les pratiques socioculturelles néfastes aux filles.
Ce mois-ci, a annoncé Mme Owino, le Kenya va lancer la campagne de l’Union africaine pour mettre fin aux mariages précoces des filles en Afrique. Par ailleurs, le Kenya approche la parité des sexes pour ce qui est de l’éducation gratuite au primaire et au secondaire.
Le Gouvernement a consacré 43 millions de dollars pour des services de santé maternelle gratuits. L’égalité des sexes a également progressé dans la sphère politique; le Cabinet et le Parlement comprennent aujourd’hui 24% et 34% de femmes respectivement. De plus, des fonds ont été établis pour aider les femmes entrepreneurs.
Mme ILLA MAINALI (Népal) a indiqué que la Constitution de son pays, adoptée en septembre 2015, prévoyait qu’au moins 33% des sièges au Parlement soient occupés par des femmes. La Constitution, « très progressive » en ce qui concerne l’autonomisation des femmes, a également conféré un statut constitutionnel à la Commission nationale pour les femmes afin de sauvegarder leurs droits, a-t-elle ajouté.
Elle a précisé que trois des quatre postes les plus importants au Népal étaient occupés par des femmes. La déléguée a ensuite rappelé que son pays avait été le premier de l’Asie du Sud à développer un plan d’action national en application des résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008) du Conseil de sécurité.
Le Gouvernement veille en outre à ce que ces résolutions soient appliquées au niveau local, a-t-elle dit. Insistant sur la priorité qu’est pour son pays l’élimination de la violence contre les femmes et filles, Mme Mainali a indiqué qu’en 2010 une unité spécifique avait été établie à cette fin sous l’autorité du Bureau du Premier Ministre et du Conseil des ministres.
Elle a souhaité que des efforts concertés soient menés aux niveaux national, régional et international afin de combattre la violence perpétrée contre les travailleuses migrantes et de protéger leurs droits.
En conclusion, la déléguée du Népal a insisté sur la détermination de son pays d’intensifier ses efforts pour promouvoir l’autonomisation des femmes et la défense de leurs intérêts légitimes.
M. GEIR O. PEDERSEN (Norvège) a jugé inacceptable la tradition des mariages précoces et forcés qui perdure. « Nous ne devons jamais accepter que la religion et des valeurs soi-disant traditionnelles soient utilisées comme excuse pour priver les filles de leurs droits », a-t-il insisté. « Des filles de moins de 18 ans ne devraient pas être des épouses et des mères. »
Le représentant a dit qu’il fallait mettre fin à toutes les formes de violence contre les femmes, y compris le viol marital, la traite et les mutilations génitales. À cette fin, il faut enrôler les hommes, « en particulier ceux qui ont le pouvoir de modifier les normes sexistes ». Il a également souligné l’importance de l’éducation dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
M. PETER AGHA (République arabe syrienne) a déclaré que, depuis plusieurs années, les femmes syriennes avaient bénéficié pleinement de leurs droits avec notamment le droit de vote depuis 1948. En outre, il a souligné que la femme syrienne était rentrée dans l’histoire car elle avait combattu face à l’occupation ottomane et française.
La délégation a rappelé que, depuis cinq ans, les femmes de son pays étaient les cibles de terroristes qui n’ont pas hésité à décapiter certaines d’entre elles car elles possédaient un compte Facebook ou refusaient de se soumettre à des mariages forcés. D’autres, a-t-il déploré, ont été enlevés et sont traitées comme des esclaves, pendant que plusieurs d’entre elles sont transportées aux portes de la Méditerranée et deviennent des proies pour les criminels turcs.
Mme ZAHIR (Maldives) s’est dite préoccupée par la situation actuelle des femmes et des filles dans le monde, principalement touchées par les conflits. Les Maldives ont encouragé à poursuivre les réformes pour consolider les droits et libertés des femmes.
Elle s’est dite ravie de voir que 55% des élèves qui ont achevé l’enseignement secondaire soient des filles. Dans les conseils d’administration publics, la moitié des membres doivent être des femmes, conformément à une loi novatrice aux Maldives sur l’égalité des sexes dans tous les domaines.
La déléguée a ensuite déclaré qu’un seul cas de violence sexuelle à l’égard d’une femme ou d’une fille devait être considéré par la communauté internationale comme un de trop. Les Maldives ont érigé le viol en infraction pénale en 2014, a-t-elle dit en outre.
Mme NESCHER (Liechtenstein) a déclaré qu’en cette année 2016, l’on aurait pu penser qu’il n’était plus nécessaire d’évoquer notamment la participation égale des femmes dans la vie sociale, économique et politique d’un pays. En 2015, a-t-elle déclaré, l’Union interparlementaire a estimé que seulement 17,7% des ministres de tous les gouvernements étaient des femmes.
Selon la représentante, il y a des preuves évidentes que la participation des femmes aux systèmes politiques améliorerait les processus de prise de décisions. La mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 va de pair avec la réalisation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes dans les sphères politiques, sociales et économiques, a-t-elle estimé.
Les femmes sont des moteurs de changement pour pérenniser la paix, a-t-elle dit, invitant ceux qui participent au processus de paix notamment en Syrie à en tenir compte.
Mme DANTUONO, représentante du Saint-Siège, a jugé alarmant qu’environ 35 % des femmes dans le monde aient été confrontées à une violence au cours de leur vie. Elle a condamné toutes les formes de violence à l’égard des femmes, notamment la violence domestique et l’esclavage moderne, qualifiées de lâcheté par le pape François.
Dans un contexte social où l’appui à la famille garantit le respect et la protection de tous ses membres, des comportements violents risquent d’alimenter de nouvelles formes d’agression sociale dans les sphères culturelles, économiques, politiques et sociales.
Le pape François identifie les mutilations génitales féminines comme des pratiques à éliminer. Le Saint-Siège cherche aussi à empêcher l’esclavage moderne. Elle a cité à cet égard le Groupe Sainte-Marthe, Talitha Kum et la campagne #EndSlavery, autant d’initiatives inspirées par le pape, qui a en outre proclamé le 8 février Journée de prière et de réflexion contre la traite humaine.