Sixième Commission: le manque de coopération des États face aux crimes commis par les fonctionnaires en mission des Nations Unies est inacceptable
Les délégations confirment leur désaccord sur l’avenir des projets d’articles sur la protection diplomatique et sur la responsabilité de l’État
Tout écart de conduite de la part des fonctionnaires et experts des Nations Unies en mission est inacceptable mais l’est aussi le manque de coopération des États sur la question, ont rappelé aujourd’hui les délégations à la Sixième Commission, qui examinait la question de la responsabilité pénale de ses personnes.
Compte tenu de leur gravité, les faits contenus dans le rapport du Secrétaire général -cas d’exploitation sexuelle, d’abus sexuels, y compris sur des mineurs, de fraudes, de vol ou de violences physiques– portent atteinte à la crédibilité et la réputation des Nations Unies et menacent le succès de ses missions. Ils ne doivent donc pas rester impunis, ont affirmé les intervenants, qui ont demandé aux Nations Unies d’envoyer un message politique très clair et souhaité que le prochain Secrétaire général en fasse une priorité.
Un de ces messages consiste à réaffirmer la politique de tolérance zéro vis-à-vis des abus sexuels. Pour les États du Groupe africain, qui accueillent le plus grand nombre d’opérations de maintien de la paix, il s’agit maintenant que tous les pays, en particulier ceux qui en ont les moyens, exercent leur juridiction afin que ces crimes ne restent pas impunis. En attendant, le Groupe africain apprécie les mesures prises par les Nations Unies, y compris les formations fournies aux fonctionnaires et aux troupes avant leur déploiement, le code de conduite et les programmes d’assistance pour aider les pays à se doter de structures juridiques efficaces.
Si les initiatives du Secrétaire général ont été saluées par nombre de délégations, y compris par les pays contributeurs de troupe à l’image de l’Éthiopie et du Nigéria, plusieurs ont déploré que son rapport contienne aussi peu d’informations sur les mesures prises par les États pour lutter contre ces faits. Ce manque de coopération est tout simplement inacceptable, ont déploré notamment les Pays nordiques, qui ont demandé que le projet de résolution qui sera présenté sur le sujet soit amendé afin qu’il y soit fait mention des pays qui ont fourni des informations au Secrétaire général et ceux qui ne l’ont pas fait.
En attendant que la politique de tolérance zéro et les mesures préventives fassent leurs preuves, les États ont l’obligation d’établir des mécanismes d’enquête et des juridictions pour sanctionner ces comportements criminels, ont rappelé plusieurs délégations, y compris des États contributeurs de troupes comme le Viet Nam et le Nigéria. Si ces mesures restent insuffisantes, il faudra élaborer un instrument juridiquement contraignant définissant la responsabilité pénale des personnels des Nations Unies en mission, a plaidé le Venezuela.
D’autres moyens sont envisageables, ont toutefois objecté d’autres États, qui ont préconisé une meilleure coopération entre États et Nations Unies afin de faire progresser la reddition de comptes. On peut même envisager des accords avec les victimes dans l’intérêt public national, a proposé Israël. Autres opposants à une convention, l’Inde, la Malaisie, l’Indonésie et la Fédération de Russie ont expliqué qu’elle n’est pas nécessaire, et que, faute d’appui consensuel et volonté, un tel texte n’aurait aucune chance d’être appliqué.
La Sixième Commission, qui avait préalablement achevé son débat sur l’état de droit, a également examiné les questions de la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite et de la protection diplomatique, deux domaines pour lesquels la Commission du droit international a adopté il y a plusieurs années -en 2001 et 2006 respectivement- des projets d’articles, sans que ces derniers aient pu ensuite être transcrits dans des instruments juridiques contraignants.
Sur ces deux points, les États ont continué d’afficher leurs divergences de longue date entre partisans de négociations diplomatiques visant à mettre au point des conventions internationales contraignantes –Groupe africain, Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes, notamment- et ceux qui, conscients de l’absence de consensus, préfèrent utiliser en l’état les articles adoptés, fruits d’un équilibre fragile mais aussi reconnus et déjà utilisés par les praticiens du droit international, y compris les tribunaux internationaux. Dans ce groupe figurent notamment les États-Unis, la Fédération de Russie, la Chine, les pays nordiques, le groupe CANZ ou encore Israël.
La Sixième Commission doit conclure l’examen de la protection diplomatique lundi 10 octobre à partir 10 heures. Elle examinera ensuite la question de l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés, avant de se pencher sur les mesures propres à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires.
L’ÉTAT DE DROIT AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONAL (A/71/169)
Déclarations
M. RUSLAN VARANKOV (Bélarus), s’alignant sur la déclaration du Mouvement des pays non alignés, a déclaré que la garantie du respect de l’état de droit à l’échelon national et international devait être une des activités prioritaires des Nations Unies. L’Organisation doit donc s’assurer que les principes établis dans la Charte, à savoir l’égalité souveraine des États, le non recours à la force ou encore la non-ingérence dans les affaires intérieures soient respectés et appliqués. Le représentant a ensuite déclaré ne pas comprendre l’approche sélective appliquée dans les affaires internationales, estimant que cette attitude n’est pas de nature à renforcer l’état de droit. Il est en outre primordial que les mesures prises par l’Organisation ne servent pas uniquement les intérêts de quelques-uns au détriment des autres, a-t-il ajouté.
Le représentant a ensuite présenté les mesures prises par le Gouvernement du Bélarus pour renforcer l’état de droit dans le pays. L’une des réalisations les plus emblématiques est la mise sur pied d’un Groupe consultatif de haut niveau de l’état de droit, composé de représentants des principaux organes ministériels et judiciaires du pays, mais aussi de représentants des Nations Unies, de l’Union européenne, de l’ Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ou encore de membres de la société civile, a-t-il expliqué. Ce groupe discute des thèmes divers portant sur le domaine judiciaire, notamment l’assistance judiciaire, a expliqué le représentant.
M. LOT DONZI (Malawi) a rappelé que son pays était indépendant depuis 1952 et qu’il est une démocratie naissante depuis 22 ans seulement. Il a rappelé le ferme engagement de son pays envers les principes de démocratie et d’état de droit, le respect des droits de l’homme, la transparence et la reddition de comptes. La Constitution du Malawi assure la séparation des pouvoirs et l’indépendance du pouvoir judiciaire Pour garantir cette indépendance, le gouvernement a mis en place une Commission des services judiciaires, qui est indépendante et responsable de la nomination des juges. Le Bureau du parquet prend des décisions indépendantes. Il en va de même pour la Commission des droits de l’homme, chargée de faire des recommandations pour promouvoir les droits de l’homme dans le pays. Le Malawi est aussi doté d’une société juridique dynamique qui s’assure que la profession soit indépendante.
M. Donzi a estimé que le pouvoir législatif, au cours des 22 dernières années, s’était acquitté de sa tâche de façon efficace, ainsi que les services de police. Outre le rôle de la Commission des droits de l’homme, il a cité celui du Bureau du Médiateur, créé en 1994, qui procède à des enquêtes en cas de violation de la légalité par le gouvernement. Le représentant a par ailleurs souligné la nécessité d’appui et de soutien de la part de la communauté internationale pour permettre à son pays de remplir ses obligations internationales en ce qui concerne la promotion de l’état de droit.
Mme REEM JULIA MANSOUR, Conseillère juridique de l’État de Palestine, s’alignant sur la déclaration du Mouvement des pays non-alignés, a déclaré que l’État de Palestine avait adhéré à de nombreux instruments internationaux afin de promouvoir l’état de droit aux plans national et international. L’État de Palestine a ainsi été le trentième État à ratifier l’amendement de Kampala sur le crime d’agression, dans le contexte de l’occupation israélienne prolongée.
L’État de Palestine reconnait au plan national les divergences existant au sein du peuple palestinien, qui ont pour conséquence de saper l’effectivité de l’état de droit, a déclaré la représentante, ajoutant que son pays s’était engagé avec ses partenaires dans un processus de transparence. L’Observatrice a reconnu que les rapports sur les droits de l’homme devaient être suivis de mesures efficaces pour pallier les défis qui y sont identifiés. À cet égard, l’État de Palestine apprécie l’aide apportée par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme dans la recherche de la justice. Cela dit, l’État de Palestine estime que la justice doit s’appliquer à tous, sans distinction, a dit l’observatrice, qui a rappelé que la Palestine vit sous occupation israélienne depuis 50 ans dans un système international qui, a-t-elle ajouté, ne fonctionne pas.
Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint-Siège, a déclaré que la prise en compte des préoccupations des plus nécessiteux ne représentait pas seulement une obligation morale mais était devenue un critère pour mesurer la réussite ou l’échec du Programme de développement à l’horizon 2030, dont le premier objectif est de ne pas faire de laissés-pour-compte. L’état de droit est supposé jouer un rôle didactique. Dans ce cas, il devrait être une expression de la capacité de la société à aider les pauvres et les exclus, les personnes handicapées ou encore les personnes détenues.
Le Saint-Siège est particulièrement inquiet du sort des personnes faisant l’objet d’actions en justice, en particulier celles qui sont illégalement incarcérées, injustement accusées et qui n’ont pas de ressources pour faire valoir leurs droits. Le Saint-Siège cherche à déterminer si ces catégories de personnes sont reconnues par les systèmes juridiques. L’un des objectifs de cette Commission était de proposer et d’évaluer les indicateurs de l’état de droit, aussi doit-elle voir au-delà des codifications et de l’infrastructure juridique et examiner si les plus pauvres d’entre nous sont en mesure de comprendre et naviguer dans le système judiciaire, et s’ils sont en mesure de lui faire confiance et de compter sur lui, a poursuivi l’observateur permanent.
Pour le Saint Siège, la réflexion sur l’état de droit devrait aussi explorer les aspects culturels et sociaux dans lesquels la loi est appliquée. L’Observateur du Saint-Siège a également souligné le rapport entre l’état de droit et la liberté d’expression et d’opinion. L’emprisonnement et les meurtres de journalistes, de chercheurs ou d’artistes est souvent le signal que quelques puissants intérêts sont en train de fuir leurs responsabilités, ce qui est contraire à l’état de droit, a conclu l’Observateur permanent.
Mme JUDIT ARENAS, Organisation internationale de droit du développement (OIDD), a estimé que la question de l’état de droit et ses implications juridiques dépassait l’objectif 16 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, car c’est aussi une question de développement. L’observatrice a précisé les régions où l’OIDD œuvre et précise qu’elle travaille en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le développement au Myanmar mais aussi à Dar es-Salaam, en Tanzanie.
L’état de droit doit aussi prendre en compte la question des réfugiés, a fait observer la représentante. En outre, il faut appuyer l’intégration des normes internationales au niveau national. « Il nous faut renforcer notre coopération avec les Nations Unies pour que les trois piliers, économique, social et environnemental, soient fondés sur la justice et le respect de l’état de droit », a-t-elle déclaré.
M. STEPHAN OJEDA, Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a rappelé le mandat du CICR de protéger et d’aider les victimes des conflits armés. Il a rappelé que les parties aux Conventions de Genève de 1949 étaient les premières responsables de leur respect et ce, dans toutes les circonstances. Cette obligation existe aussi en vertu du droit international coutumier, a-t-il rappelé.
Les résolutions adoptées lors de la trente-deuxième Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-rouge, tenue en décembre 2015 à Genève, ont été l’occasion d’attirer l’attention sur le respect de la règle de droit, notamment celles qui portaient sur le renforcement du respect du droit international humanitaire et sur le renforcement du droit international humanitaire visant à protéger les personnes privées de liberté. Elles ont rappelé l’obligation des États de respecter et d’assurer le respect du droit international humanitaire, a poursuivi le représentant, qui a rappelé que cette obligation exige que les États mettent en place des cadres normatifs clairs, des mécanismes judiciaires forts et des mesures efficaces pour assurer la reddition de comptes, afin de prévenir et de sanctionner les violations du droit international humanitaire.
De plus, la résolution sur la santé en danger demande aux États d’adopter et d’appliquer efficacement leurs propres lois et de poursuivre leurs efforts pour que leurs forces armées et de sécurité intègrent à leurs opérations des mesures concrètes pour prévenir et faire face à la violence à l’encontre des personnes blessées et des malades, ainsi qu’à l’encontre de la fourniture de soins de santé, y compris pendant les conflits armés. Le représentant a rappelé à cet égard la résolution 2286(2016) du Conseil de sécurité.
Le CICR aide les États à assumer leurs responsabilités à promouvoir l’état de droit, a encore expliqué le représentant. Le Service juridique du CICR sur le droit international humanitaire continue de fournir une expertise technique aux États, à leur demande. Les comités nationaux du droit international humanitaire joue un rôle important dans l’élaboration des réponses nationales sur cette question. Plus de cent comités nationaux ont vu le jour dans le monde, a fait observer le représentant, qui a rappelé que ces derniers étaient invités à rencontrer le CICC en novembre prochain à Genève pour débattre du renforcement de la protection pendant les conflits armés, dans le cadre de lois et de politiques nationales et pour partager leurs travaux et expériences.
Responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies (A/71/167)
M. JUAN AVILA République dominicaine, au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a d’abord relevé que tout écart de conduite, en particulier les comportements criminels de la part des fonctionnaires des Nations Unies, était absolument inacceptable et ne devait pas rester impuni. Ces actes sont graves au regard de la nature des fonctions exercées par leurs auteurs et au regard de la vulnérabilité des victimes. Ils portent par ailleurs atteinte à la réputation et à la crédibilité des Nations Unies en plus d’avoir des conséquences sur les mandats de ces missions, a estimé le représentant.
Les États membres de la CELAC prennent note du rapport du Secrétaire général sur les moyens de combattre l’exploitation et les abus sexuels. Alors que des incidents de ce type continuent de se répéter, il est évident que les États Membres doivent faire plus, a poursuivi le représentant, qui a invité les pays mentionnés dans le rapport à fournir au Secrétaire général les informations sur les mesures prises pour sanctionner les actes commis et le suivi de ces mesures.
La CELAC, qui est choquée par les cas d’abus sexuels décrits dans le rapport du Secrétaire général, redit sa position en faveur d’une politique de tolérance zéro face à ces comportements. Elle redit aussi qu’il est de la responsabilité du Secrétaire général et de tous les États Membres de prendre toutes les mesures pour prévenir et sanctionner ces actes lorsqu’ils sont commis par les personnels et experts des Nations Unies en mission. Dans ce contexte, la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes attend de voir les progrès qui seront accomplis après la mise en œuvre du cadre de reddition de comptes développé par le Secrétaire général pour mesurer la performance sur le terrain, en accord avec les indicateurs du code de conduite.
M. ALI NASIMFAER (République islamique d’Iran), au nom du (Mouvement des pays non alignés), a dit attacher une grande importance à la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies. Au moment où nous parlons, les pays du Mouvement des pays non alignés contribuent à hauteur de 80% aux opérations de maintien de la paix sur le terrain, a-t-il rappelé.
Les pays non alignés rendent hommage aux contributions et sacrifices des Casques bleus, a poursuivi M. Nasimfaer. Le Mouvement des pays non alignés souligne cependant que tous les fonctionnaires et experts devraient continuer à faire leur devoir d’une façon qui préserve l’image, la crédibilité, l’impartialité et l’intégrité des Nations Unies. Il souligne l’importance de la politique de tolérance zéro en cas d’exploitation sexuelle et demande instamment aux Nations Unies de continuer à coopérer avec les États, en accord avec les règles du droit international en cas d’infraction.
Le représentant a souligné la nécessité de mettre en œuvre sans délai la résolution 61/291 de l’Assemblée générale, qui fait siennes les propositions, recommandations et conclusions formulées par le Comité spécial des opérations de maintien de la paix. Le Mouvement des pays non alignés estime que ce processus renforcera les mécanismes de responsabilité et contribuera à garantir le processus en respectant les investigations en cas d’actes d’exploitation et d’abus sexuels. Il encourage les États Membres à exercer leurs compétences pour que ces actes ne restent pas impunis.
De la même façon, il ne saurait y avoir de tolérance en ce qui concerne les malversations financières et la corruption, a déclaré M. Nasimfaer. Le Mouvement des pays non alignés estime, en revanche, prématuré de discuter d’un projet de convention sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies.
M. THEMBILE JOYINI (Afrique du Sud), au nom du Groupe africain, a déclaré que le sujet traité était particulièrement pertinent pour les pays africains, qui accueillent nombre de ces opérations de maintien de la paix. Le Groupe africain appuie la politique de tolérance zéro en ce qui concerne les mauvaises conduites et les actes criminels, en particulier les cas d’exploitation et d’abus sexuel commis par les fonctionnaires et experts des Nations Unies en mission. Tous ces actes ont un impact négatif sur la crédibilité des Nations Unies et nuisent aux objectifs des missions, a affirmé le représentant, qui a appelé l’Organisation à envoyer un message politique très clair, qui montre qu’elle ne tolère pas ces comportements.
Le Groupe africain, qui salue le rapport du Secrétaire général, constate également qu’il montre que, si certains États ont des législations et des capacités pour exercer leur juridiction, d’autres ne disposent à cette fin que de moyens limités. Dans ce contexte, le Groupe africain appelle les États qui ont les moyens de le faire à exercer leur compétence dans les cas applicables afin que ces crimes ne restent pas impunis. Mais il peut exister des lacunes juridiques, en particulier lorsque l’État hôte de la mission n’a pas les moyens d’exercer sa juridiction pénale au regard de l’auteur du crime, et que l’État d’origine n’est pas en position d’exercer sa législation dans le pays hôte. Dans de tels cas, le Groupe africain estime que les mesures correctrices adoptées par l’Assemblée générale, pourraient combler ce vide juridique. En attendant, le Groupe africain apprécie les mesures prises par les Nations Unies, y compris celles qui sont prises avant le déploiement, notamment avec le code de conduite, les formations délivrées aux fonctionnaires et les programmes d’assistance pour aider les pays à se doter de structures juridiques efficaces.
Mme LIZANNE ACHING (Trinité-et-Tobago), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a salué la contribution de l’ONU en matière de gestion des crises complexes qui constituent une menace pour la paix et la sécurité. La CARICOM se félicite notamment de l’assistance fournie aux autorités haïtiennes dans le cadre du processus électoral, du renforcement de l’état de droit, de la promotion de la justice et de la formation de la police. Pour autant, la CARICOM est préoccupée par les allégations d’abus sexuels qu’auraient commis des casques bleus sur des femmes et enfants. Selon la représentante, ce type de comportements n’est rien d’autre qu’un acte de trahison de la part de ces individus censés protéger des populations vulnérables. La CARICOM réaffirme sa conviction que les auteurs de ces violations doivent être tenus responsables de leurs actes.
La CARICOM se félicite donc de l’initiative du Secrétaire-général visant à promouvoir une politique de tolérance zéro au sujet des cas d’exploitation et d’abus sexuels impliquant les personnels de l’ONU, ainsi que de l’engagement pris par le Secrétaire général de l’ONU d’exposer ces cas d’abus aux États Membres, afin que des mesures appropriées soient prises. Elle lance aussi un appel aux États afin qu’ils coopèrent et facilitent les enquêtes et les procédures d’extradition en lien avec les crimes commis par des hauts responsables et des experts de l’ONU, tout en protégeant les victimes.
Mme CRISTINA MEZDREA, Union européenne, a rappelé la préoccupation de l’Union européenne face aux crimes commis par les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies, qu’il s’agisse d’abus et d’exploitation sexuelle, de corruption ou de fraudes ou autres crimes financiers, comme le reflète la résolution 70/114 de l’Assemblée générale. La représentante a noté que l’impunité sape la confiance des peuples en les Nations Unies. « Nous ne devrions pas laisser les actions de quelques-uns ternir la réputation et les actions héroïques du plus grand nombre », a-t-elle rappelé.
Pour l’Union européenne, ce n’est qu’avec des actions concertées que l’on pourra résoudre cette question. Il est en revanche nécessaire que ce soit l’État de nationalité du fonctionnaire ou expert mis en cause qui procède à des enquêtes et, le cas échéant, à des poursuites. La représentante a déploré que presque aucun des cas allégués depuis le 1er juillet 2007 mentionnés dans le rapport du Secrétaire général n’ait été traité. À cet égard, le nombre des allégations d’actes odieux qu’auraient commis des casques bleus a été de 99 depuis 2015, ce qui souligne la nécessité de réponses plus résolues dans la prévention des abus ou crimes sexuels, a noté Mme Mezdrea. Le personnel de l’ONU doit respecter un comportement adéquat, a-t-elle déclaré, et, pour cela, la prévention est une bonne solution.
L’Union européenne est également préoccupée par le nombre de cas de corruption et de vols qui ont été comptabilisés dans le Rapport. Cela signifie que les fonds de l’ONU pour le développement durable sont détournés, a fait observer la représentante, qui a souhaité que soient combinées les mesures à court terme et à long terme. À cette fin, elle a souhaité davantage d’informations de la part des États Membres comme du Secrétariat.
Pour Mme MAY-ELIN STENER (Norvège,) au nom du Groupe des pays nordiques, vu que la politique de tolérance zéro ne portera pas ses fruits avant longtemps et qu’il existe toujours un vide juridique sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission, il est de la responsabilité première des pays d’origine de juger leurs ressortissants quand ils ont commis des actes criminels dans le cadre de leurs fonctions au sein des missions des Nations Unies. Les États doivent établir des juridictions pour juger des comportements criminels commis par leurs ressortissants dans ce contexte. La représentante s’est également déclarée favorable à ce que soient fixées des conditions minimales pour les États contributeurs de contingents. Une des conditions pourrait être que les pays en question disposent de mécanismes et de juridictions à même de juger des crimes potentiels commis par leurs ressortissants qui servent à l’étranger, a expliqué la représentante.
La représentante a également déploré le manque d’informations dont dispose le Secrétaire général dans son rapport pour ce qui concerne les mesures prises par les gouvernements pour juger des cas mentionnés, notamment des cas d’exploitation sexuelle, d’abus sexuels, y compris sur des mineurs, des cas de fraudes, de vol, ou de violence physique. Un seul pays a fourni des informations, a noté la représentante, estimant cette situation tout simplement inacceptable. Dans ce contexte, les pays nordiques demandent que la résolution qui sera présentée sur le sujet soit amendée, afin qu’il y soit mentionnés les pays qui ont fourni des informations au Secrétaire général et ceux qui ne l’ont pas fait. La crédibilité des Nations Unies est en jeu et on ne peut accepter rien de moins que la transparence, a-t-elle conclu.
Mme CATHERINE BOUCHER (Canada), au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a déclaré souscrire à l’avis du Secrétaire général: les actes criminels que commentent des personnes qui tentent de tirer profit de leur statut ou de leur rôle en tant que représentants ou experts des Nations Unies représentent une menace sérieuse à la crédibilité et au travail de l’ONU. « Consternation », c’est le mot qui nous vient à l’esprit lorsqu’il est question d’allégations d’actes sexuels commis par des représentants de l’ONU envers les populations les plus vulnérables, c’est-à-dire, au sein des populations que nous tentons de protéger, a ajouté la représentante, pour laquelle un tel comportement est déplorable et ne saurait être toléré. Toute activité criminelle commise par ces personnes porte atteinte à notre crédibilité et pourrait saper la confiance que les populations mettent en nous, a ajouté la représentante.
La représentante a fait part de sa préoccupation du fait que, selon le rapport du Secrétaire général, aucune information n’a été fournie par les États Membres dans 73 des 89 cas qui ont été renvoyés aux États Membres aux fins d’enquête. L’ONU n’a pas compétence pour traiter des cas de grande criminalité et il revient en conséquence, entièrement aux États de mener les enquêtes, a rappelé la représentante. Le groupe CANZ exhorte les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à établir leur compétence vis-à-vis de leurs ressortissants qui commettent des crimes graves alors qu’ils agissent pour protéger les populations. Elle exhorte les États Membres à faire rapport sur les efforts qu’ils déploient à l’égard des enquêtes et des poursuites visant leurs ressortissants. Le groupe CANZ réitère son appel pour une pleine mise en œuvre continue de la politique de tolérance zéro que défend le Secrétaire général.
Mme DAMARIS CARNAL (Suisse) a proposé un certain nombre de mesures qui « devraient être prises sans tarder » pour assurer la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies. Pour la Suisse, le prochain rapport du Secrétaire général sur la question devrait contenir des informations sur les cas qui ont été transmis non seulement à l’État de nationalité de l’auteur présumé, mais aussi à l’État hôte ou à d’autres États, ainsi que sur les critères utilisés pour déterminer si un cas doit ou non être déféré à un État. En outre, la Suisse demande que soit renforcé le suivi donné aux cas transmis aux États. Si ces derniers doivent eux-mêmes assurer un suivi, la Suisse est d’avis que le Secrétaire général a un rôle essentiel à jouer pour garantir la coordination et donner les impulsions nécessaires.
La Suisse estime également qu’il y a lieu d’apporter une réponse cohérente et globale, qui vise tous les types de crimes et l’ensemble du personnel de l’ONU. La représentante a jugé fondamental que des procédures et des mécanismes soient mis en place pour assurer un traitement uniforme et professionnel de l’ensemble des crimes commis par le personnel de l’ONU.
Enfin, a ajouté la représentante, les États Membres ont un rôle déterminant à jouer. En effet, la lutte contre l’impunité des crimes commis par le personnel des Nations Unies ne pourra avancer sans un engagement actif des États, qui ont le devoir de faire toute la lumière sur les cas dont ils ont connaissance et de renseigner le Secrétaire général sur ce qu’ils ont entrepris. Pour la Suisse, la résolution préparée à la Sixième Commission devrait, cette année, appeler explicitement les États Membres à faire rapport sur l’avancement des enquêtes, des poursuites et des mesures disciplinaires dans leur juridiction, y compris sur les cas soulevés les années précédentes, et à informer sur les mesures prises pour éviter que de tels actes ne se reproduisent.
M. ELSADIG ALI (Soudan) a déclaré être gravement préoccupé par les allégations d’atteintes sexuelles et de tueries commises par des Casques bleus. Le rapport du Secrétaire général: cela ne fait que renforcer l’idée d’impunité, a-t-il déploré. La responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies est extrêmement importante car elle nuit à l’image des Nations Unies. Les préjudices de ces crimes affectent non seulement les victimes mais aussi l’ONU dans son ensemble. Dès lors, l’ONU ne devrait pas faire valoir la protection spéciale des personnels, a estimé le représentant. Pour lui, il existe un grand besoin de procédures tangibles permettant de traduire les membres du personnel en justice. Il faut non seulement que justice soit faite, mais aussi que cela soit connu, a-t-il déclaré.
M. RUBÉN IGNACIO ZAMORA RIVAS (El Salvador) a déclaré qu’en tant que pays ayant par le passé accueilli une opération de maintien de la paix, El Salvador connaît les difficultés posées par cette question, aggravées par la fragilité des populations en situation de conflit. Ce genre de circonstances exige que les missions des Nations Unies et leurs personnels respectent rigoureusement les principes de la Charte et ceux de l’état de droit en luttant contre l’impunité. À El Salvador, les législations permettent qu’un ressortissant soit jugé pour un crime extraterritorial, a expliqué le représentant, ajoutant que le personnel salvadorien servant à l’étranger dans des missions des Nations Unies reçoit une formation au code de conduite de l’Organisation.
Cela dit, El Salvador est en faveur d’un instrument juridiquement contraignant définissant la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies, qui permettrait, selon lui, de réduire les cas allégués. Argumenter qu’un tel instrument n’est pas nécessaire, compte tenu du faible nombre de cas rapportés, n’est pas fondé, a ajouté le représentant. Soutenir un tel argument reviendrait à dire qu’il faut supprimer les législations pénales portant sur un grand nombre de crimes, en commençant par les quelques rares crimes inscrits dans les Constitutions des États pour sanctionner les crimes de haute trahison commis à un haut niveau. Un tel instrument aurait certes un aspect punitif, mais également un aspect préventif, a-t-il ajouté.
M. SERGEY LEONIDCHENKO (Fédération de Russie) a noté que l’Assemblée générale contribuait à la lutte pour l’impunité des crimes commis par des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies et a estimé que les États Membres devaient avertir le Secrétariat en cas de crimes commis par leurs ressortissants. L’ONU doit, pour sa part, concentrer ses efforts sur la prévention des actes criminels. Pour la Fédération de Russie, il appartient aux États dont les ressortissants sont mis en cause de diligenter les enquêtes en cas d’allégation de crime. Étant donné la nature spéciale du personnel des Nations Unies, cela permet de leur garantir un procès juste et équitable, a estimé le représentant.
Enfin, l’utilité d’un nouveau traité portant sur cette question n’est pas claire, a déclaré le représentant. Pour la Fédération de Russie, il faut plutôt faire preuve de volonté politique et un nouveau traité qui ne serait pas appliqué faute d’une telle volonté ne servirait à rien. C’est cette position que la Fédération de Russie adoptera lors des consultations sur cette question, a conclu le représentant.
Mme PONPAT THITTHONGKHAM (Thaïlande) a expliqué qu’en tant que pays contributeur de troupes, la Thaïlande juge essentiel que les Casques bleus conservent leur statut. La représentante a réitéré l’importance des formations et des initiations avant le déploiement des personnels en missions, en particulier en ce qui concerne l’obligation de respecter les normes de conduite des Nations Unies et les lois des pays hôtes. La Thaïlande salue les efforts actuels du Département des opérations de maintien de la paix et du Département de l’appui aux missions, qui donnent des appuis techniques en matière de formation préalable au développement. La représentante a également énuméré les mesures prises au niveau national par la Thaïlande pour assurer la responsabilité criminelle de ses ressortissants, y compris ceux qui servent comme à l’ONU ou comme experts en mission.
Mme INA KRISNAMURTHI (Indonésie) a souligné que les privilèges et immunités des fonctionnaires des Nations Unies en mission devaient être préservés et il faut penser aux milliers de fonctionnaires qui travaillent de façon remarquable. Pourtant, a-t-elle ajouté, il faut rendre justice aux victimes en cas de crime inacceptable commis sur le terrain et l’Indonésie est préoccupée par le nombre d’abus d’exploitation sexuelle commis lors d’opération de maintien de la paix. Elle prend bonne note des recommandations de l’Assemblée générale pour lutter contre l’impunité.
Le nombre total d’allégation d’abus a augmenté ces dernières années, a déploré la représentante, qui a rappelé qu’un seul cas était déjà inacceptable. La participation à des opérations de maintien de la paix et de redéploiement nécessite des formations sur les normes de conduite. Par ailleurs, l’Indonésie soutient le principe de mesures de dédommagement aux victimes. Pour sa part, le système des Nations Unies ne doit pas détourner son attention au fait de fournir un appui financier adéquat aux Casques bleus.
M. ISAIAS MEDINA (Venezuela) a souligné combien il est important de s’assurer de l’intégrité des fonctionnaires et experts des Nations Unies en mission. Alors que le Venezuela reconnaît les efforts déployés par certains États pour juger des crimes commis par leurs nationaux, il souligne aussi qu’il faut régler la question des immunités accordées aux fonctionnaires. En ce qui le concerne, le Venezuela a décidé que ses ressortissants ayant commis des crimes à l’étranger ou contre les populations du pays concerné seraient jugés au Venezuela si le crime commis est passible d’une condamnation au Venezuela.
Mme EMILY PIERCE (États-Unis) a noté que, plus d’une décennie après les discussions sur la réponse à apporter aux allégations choquantes d’abus et d’exploitations sexuelles par le personnel de l’ONU, la problématique continuait de se poser avec acuité. Elle a émis le vœu qu’à l’instar de son prédécesseur, le prochain Secrétaire général fasse prévaloir la transparence, la responsabilité, la prévention et la protection des victimes.
La représentante a néanmoins fait remarquer que d’autres formes de crimes et de violations prospéraient, y compris la corruption, la fraude, ainsi que le trafic de diamant. Ce genre d’agissements criminels est de nature à ternir l’image et la réputation de l’ONU et constitue une entrave à la mise en œuvre des mandats des missions, a estimé la représentante. Elle a jugé inacceptable que depuis presque 10 ans la question est traitée, très peu d’informations ont filtré sur les mesures prises par les États Membres face aux allégations de crimes commis par leurs concitoyens et a insisté sur l’importance cruciale d’instaurer la transparence sur les cas enregistrés, car le manque de suivi des dossiers donne l’impression de cautionner l’impunité.
Les États-Unis estiment que la Sixième Commission doit examiner la possibilité d’adopter une convention, qui jouerait un rôle utile pour combler les lacunes juridiques qui peuvent empêcher d’établir la responsabilité des experts et fonctionnaires de l’ONU en mission en cas de crimes graves.
Mme MAHLET GUADEY (Éthiopie) a fait observer que le point étudié était très important pour son pays, étant donné que l’Éthiopie est un des plus importants fournisseurs de contingents. Nous sommes préoccupés de voir que les comportements d’une poignée ternissent l’image de l’ensemble d’un personnel le plus souvent exemplaire, a ajouté la représentante, pour qui il est donc essentiel que les auteurs de ces crimes soient poursuivis. Elle a réitéré l’appui de l’Éthiopie à la politique de tolérance zéro prônée par le Secrétaire général en cas d’abus sexuels.
Mme Guadey a en outre insisté sur la nécessité de la coopération entre les États et les Nations Unies lors des investigations. En outre, la représentante a souligné que son pays fournissait des formations avant le départ en mission. Par ailleurs, elle a exhorté les États Membres à établir leur compétence pour que justice soit rendue en cas de crimes commis par leurs ressortissants. Elle a conclu en jugeant important que l’Assemblée générale se saisisse de cette question.
M. TAIWO ABIDOGUN (Nigéria) a déclaré que son pays, État contributeur de troupes, avait toujours assuré la formation de ses ressortissants servant dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et qu’il le faisait avant leur déploiement sur le terrain. Le Nigéria, qui soutient également la politique de tolérance zéro du Secrétaire général en ce qui concerne les mauvais comportements des personnels et experts des Nations Unies en mission, n’a jamais laissé impuni un crime commis par un de ses nationaux, a assuré le représentant.
M. AVIGAIL FRISCH BEN AVRAHAM (Israël) a dit apprécier les progrès déjà accomplis pour assurer que les allégations de crimes et mauvais comportement des fonctionnaires et experts en missions feraient l’objet d’enquête et, le cas échéant, de sanctions, dans le respect de leurs privilèges et immunités. Le représentant a dit attendre avec intérêt de voir comment les différents États allaient élaborer leurs lois nationales pour assurer la reddition de comptes de leurs ressortissants travaillant pour les Nations Unies, lorsqu’ils sont mis en cause et a exhorté les États Membres à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que les crimes ne restent pas impunis. Les actions des États Membres à cet égard pourraient être plus efficientes si elles étaient accomplies avec diligence au nom des Nations Unies et en coopération avec les autorités du pays hôte, a –t-il estimé.
M. Ben Avraham a noté que, dans les cas où les fonctionnaires de l’ONU et les experts en mission bénéficient de l’immunité de juridiction, il est important que les autorités de l’ONU fassent des efforts pour parvenir à des solutions justes en dehors des tribunaux locaux, y compris sous la forme d’accord avec les victimes et dans l’intérêt public national, en particulier, dans les cas impliquant des morts ou des blessures graves. Par ailleurs, Israël considère que la coopération entre États et entre États et les Nations Unies est un moyen essentiel de combattre l’impunité et de faire progresser la reddition de comptes.
M. JUAN SANDOVAL MENDIOLEA (Mexique) a estimé que le plus préoccupant était le faible nombre d’informations données par les États Membres pour pouvoir mener des enquêtes, notamment en cas de plaintes pour allégations d’abus sexuels. Le représentant a salué le travail d’enquête réalisé par les Nations Unies et les États concernés, mais a noté avec préoccupation qu’en 2015, 69 dénonciations avaient été recensées dans dix missions de maintien de la paix. Nous espérons que dans son prochain rapport, le Secrétaire général abordera les mesures prises par l’État hôte pour trouver des solutions à ces questions, a-t-il ajouté, tout en réitérant l’appui de son pays à la politique de tolérance zéro dans les cas d’abus sexuels.
Il ne fait aucun doute que la bataille contre l’exploitation sexuelle ne peut être gagnée sans la participation active de tous les États Membres et leur coopération avec l’ONU, a poursuivi le représentant. Le Mexique estime que la bataille ne saurait être couronnée de succès sans que tous les États Membres agissent et coopèrent entre eux. La juridiction qu’exercent les États est essentielle, en particulier tant que se poursuivent les discussions sur un projet de convention en la matière. Le Mexique souhaite l’adoption d’une telle convention, qui jetterait les bases d’obligations de juger ou d’extrader les accusés de tels méfaits. En tant que pays qui est récemment devenu contributeur de contingents aux opérations de maintien de la paix, le Mexique réaffirme sa ferme intention de défendre les principes des droits de l'homme.
M. MEHDI REMAOUN (Algérie) s’est dit préoccupé par les allégations de crimes, de corruption et d’autres délits financiers commis par des responsables et des experts des Nations Unies en mission. À cet égard, il a réaffirmé son appui à la politique de tolérance zéro de l’ONU à l’égard des conduites criminelles, en particulier pour les crimes graves d’abus et d’exploitation sexuelle, de fraude financière et de corruption. Le renforcement de la prévention exige une formation et une sensibilisation constantes, a poursuivi le représentant. Le représentant a, en outre, rappelé l’appui de son pays à la mise en œuvre des mesures de prévention pratiques adoptées par les missions, le Département des opérations de maintien de la paix et le Département de l’appui aux missions pour renforcer la formation actuellement existante aux Nations Unies en ce qui concerne les normes de conduite, y compris en ce qui concerne la formation préalable au déploiement et à l’installation.
M. KOTESWARA RAO (Inde) a rappelé que son pays est un important fournisseur de contingent aux opérations de maintien de la paix et a dit espérer que les États dont sont ressortissants les fonctionnaires ou experts mis en cause, dans les cas cités dans le Rapport du Secrétaire général mèneront des enquêtes, que les auteurs seront jugés et purgeront leur peine. Cela dit, l’Inde estime qu’un instrument juridiquement contraignant sur la question n’est pas nécessaire. Ce qu’il faut faire c’est aider les pays et s’assurer qu’ils poursuivent devant les tribunaux leurs ressortissants soupçonnés d’avoir commis des crimes. En ce qui concerne l’Inde, sa législation lui permet de juger des crimes commis par ses ressortissants à l’étranger. Dans des cas où un accord bilatéral n’existe pas avec le pays hôte, la loi indienne autorise le Gouvernement à recourir aux conventions internationales pour juger l’auteur d’un crime, a expliqué le représentant.
M. ANGEL HORNA (Pérou), a réaffirmé son soutien aux valeurs de la Charte. Les plaintes exceptionnelles en cas d’abus sexuels ont à être condamnées fermement, car elles affectent gravement la crédibilité de l’organisation. Le représentant a encouragé tous les États Membres et l’ONU à coopérer entre eux. Nous souhaitons aussi que tous les États coopèrent entre eux dans ces cas. Pour conclure, le représentant a rappelé que le Pérou souhaite contribuer à l’examen de cette question, mais cela ne saurait violer les principes de base de l’état de droit.
Mme INGA KANCHAVELI (Géorgie) a déclaré que les citoyens géorgiens qui ont commis un acte pénalement responsable devraient être jugés avant d’ajouter que son pays avait une longue expérience de la stabilité internationale. Nous restons attachés aux efforts internationaux de paix, a-t-elle déclaré, même si 20% de notre territoire n’est pas sous notre contrôle. Si des abus ou crimes ont été commis, nous souhaitons que leurs auteurs soient traduits en justice.
S’agissant des allégations de violence sexuelles dénoncées par le Haut-Commissariat aux réfugiés en République centrafricaine, la Géorgie a été exemplaire pour mener une enquête sur cette affaire, a affirmé la représentante. Afin d’assurer un bon processus d’enquête, une équipe de psychologues et autres professionnels s’est rendue en RCA en 2016, a-t-elle expliqué, ajoutant que les agents des Nations Unies avaient reconnu que cette équipe avait donné un bon exemple, que les autres pays pourraient suivre. Pour l’instant, aucun signe d’implication des soldats géorgiens n’a été reconnue, a ajouté la représentante, pour qui, si les soldats géorgiens sont reconnus innocents, le pays aura démontré qu’il avait eu une conduite éthique.
M. RAJU GURAGAIN (Népal) a jugé impératif que les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies se conduisent de façon irréprochable, de manière à renforcer la crédibilité de l’ONU. À défaut, l’état de droit en sera fragilisé, de même que la crédibilité de l’ONU et de ses principaux organes. Les auteurs d’infractions odieuses tels que les crimes sexuels doivent être traduits en justice. Le représentant a estimé que ce type d’actes devrait être considéré au cas par cas et qu’il fallait pouvoir mener des enquêtes sur ces cas pour protéger les victimes. Le Népal souligne l’importance des relations entre le Secrétariat et les autres organes de l’ONU lorsque des enquêtes sont diligentées. En outre, le Népal se félicite des mesures de formation des fonctionnaires et experts en mission. Le représentant a émis l’espoir que l’action des soldats lors des opérations de maintien de la paix permettra de mieux protéger les femmes et les enfants.
M. MOHD RADZI HARUN (Malaisie) a dit appuyer les appels à la coopération lancée par les délégations, tout en ajoutant que le régime juridique actuel ne permettait pas à la Malaisie de fournir des informations ou des éléments de preuve aux États ou aux institutions internationales. Quoiqu’il en soit, la Malaisie reste disposée à contribuer aux débats sur cette question, a ajouté le représentant.
Le représentant s’est également dit plutôt en faveur d’une convention internationale sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies, à condition qu’elle donne une définition claire des crimes visés et une liste limitée de ces crimes. Par ailleurs, le projet de convention ne doit pas comporter de double incrimination, laquelle est exclue par de nombreux systèmes juridiques. Si elle devait le faire, il lui faudrait travailler sur une base juridique solide, a encore ajouté le représentant.
M. MOHAMMED ATLASSI (Maroc) a déclaré que son pays attache une grande importance à la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU. Le Maroc a contribué, depuis 1960, aux opérations de maintien de la paix avec des contingents qualifiés, a-t-il fait observer. Le représentant a rappelé la position sans équivoque de son pays, à savoir que toute infraction pénale commise par un personnel de l’ONU doit faire l’objet d’une poursuite judiciaire devant les tribunaux compétents de l’État dont le fonctionnaire est le ressortissant. Il a donc insisté sur le fait que les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies sont tenus de se conformer à la législation nationale du pays où ils travaillent, en dépit de leurs privilèges et immunités accordés par la Convention de 1946.
M. MD. HUMAYUN KABIR (Bangladesh) a estimé que les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies, s’ils sont reconnus responsables de crimes, doivent être traduits en justice. Il est obligatoire de mettre fin à l’impunité. Les États Membres sont invités à faire preuve de responsabilité à propos des allégations lancées. Concernant les sévices sexuels, des enquêtes doivent être menées avec volontarisme. Si un Casque bleu du Bangladesh est mis en cause, nous vous assurons que nous ferons toute la lumière car c’est de notre responsabilité, a affirmé le représentant, qui a précisé que toute allégation à l’encontre d’un fonctionnaire des Nations Unies entraînerait un rapatriement du fonctionnaire en question, en vue de sa mise en accusation.
Dans son rapport, le Secrétaire général a signalé les différents facteurs à l’origine des cas d’exploitations sexuelles, a par ailleurs noté le représentant. Il a appelé à la coopération et a pris note des discussions qui ont lieu dans différentes instances, estimant que les réunions tenues entre États Membres sur cette question devraient permettre d’accroître la transparence dans tous les domaines.
Mme NGUYEN TA HA MI (Viet Nam) a déclaré que les États dont les ressortissants mis en cause sont originaires devaient avoir compétence pour connaître les faits perpétrés par leurs nationaux. Depuis que le Viet Nam envoie des personnels et experts servir les Nations Unies, aucun d’entre eux n’a été impliqué dans quel que soit l’affaire, a ajouté la représentante.
Responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite (A/71/79 et A/71/80)
M. JUAN AVILA (République dominicaine), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a rappelé que la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite était un sujet qui avait été longuement et profondément analysé. Le représentant a ainsi rappelé que la Commission du droit international avait travaillé durement sur cette question pendant quelque 50 années dans le but de développer un projet d’articles, qu’elle a adopté en 2001 et dont l’Assemblée générale a pris note la même année. La raison d’une telle réflexion est claire: la responsabilité de l’État est un sujet à la croisée de différentes matières et l’efficacité du droit international compte sur son existence, a poursuivi le représentant.
La CELAC a accueilli avec bienveillance le fait que le projet d’articles, dont certains reflètent aussi le droit international coutumier, ait été largement utilisé comme référence par les cours internationales. Nous ne pouvons nier le lien qui existe entre la responsabilité d’un État et d’autres sujets prioritaires comme la protection diplomatique, a aussi noté le représentant. Pour la CELAC, le développement de la notion de responsabilité de l’État et l’éventuelle adoption d’une convention sur ce sujet auront, sans aucun doute, un impact positif sur ces sujets. Les États Membres de la CELAC estiment qu’une prudence excessive ne doit pas empêcher de concrétiser le large accord sur la tenue d’une conférence diplomatique internationale. Ils sont disposés à contribuer à ce débat et appellent les autres États Membres à se joindre à leurs efforts.
M. THEMBILE JOYINI (Afrique du Sud), au nom du Groupe africain, a rappelé que la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite était traitée au sein des Nations Unies depuis des décennies par la Commission du droit international et par de nombreux rapporteurs spéciaux. L’Assemblée générale a même reconnu la nécessité d’adopter un instrument juridiquement contraignant sur cette question, tandis que les débats au sein de la Sixième Commission ont montré qu’une majorité des délégations était en faveur de cette convention. Compte tenu du fait que les bases juridiques des projets d’articles sont solides et que nombre des dispositions de ces projet d’articles sont largement reconnues comme conformes au droit international, au droit coutumier, à la jurisprudence internationale et aux pratiques des États, il est temps que la Sixième Commission mette sur pied un processus visant à adopter une convention, a estimé le représentant, pour qui un nouveau report de l’examen de cette question ne changerait pas la donne.
Mme NIINA NYRHINEN (Finlande), au nom des pays nordiques, a rappelé que la Commission du droit international avait adopté, en 2001, un Projet d’Articles concernant la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. « Pour les pays nordiques, ce projet était une façon réaliste de codifier une pratique courante du droit international coutumier », a indiqué la représentante. La représentante a aussi salué l’incorporation des projets d’articles, la même année, dans une résolution de l’Assemblée générale, estimant qu’il s’agissait là de « la forme la plus appropriée pour leur conférer la plus haute autorité en matière de responsabilité de l’État ».
Les pays nordiques rappellent que ces projets d’articles ont, depuis 2001, fortement influencé la pratique des États et la jurisprudence des cours et tribunaux internationaux. Ils continuent de penser qu’il ne serait pas opportun de s’embarquer, à l’heure actuelle, dans des négociations sur l’adoption d’une convention sur la Responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. Tout en admettant qu’une convention multilatérale est généralement un instrument idéal pour guider l’action des États, la représentante a en effet estimé que de telles négociations risqueraient de remettre en cause « l’équilibre délicat » contenu dans les articles sous leur forme actuelle.
M. KELLY MACKIE (Nouvelle-Zélande), au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a dit être reconnaissante à la Commission du droit international pour avoir adopté en 2001 le projet d’articles sur la responsabilité des États. Il s’est également réjoui que ces textes aient été bien accueillis par les États Membres, les tribunaux et cours internationaux au cours des quinze dernières années. S’agissant des questions liées à la codification, la position du groupe CANZ n’a pas varié, à savoir qu’il serait inutile d’essayer de négocier en vue de faire des articles une convention internationale. Le représentant a expliqué que ces articles servaient de guide utile aux gouvernements, aux tribunaux et cours internationaux dans leurs efforts pour trouver des solutions pratiques conformes au droit international.
Préoccupé par la possibilité que des désaccords apparaissent au sujet des différents aspects du projet d’articles si on tente de les codifier dans une convention, le groupe CANZ veut éviter que la Sixième Commission, malgré ses bonnes intentions, ne dilue et mette à mal l’influence du projet d’articles et les réalisations significatives de la Commission du droit international qu’ils incarnent. Il favorise donc l’option de l’adoption par l’Assemblée générale d’une résolution par laquelle elle ferait sien le projet d’articles. Il faut que le débat se concentre sur le meilleur moyen de donner du poids au projet d’articles, et non de l’affaiblir.
Mme TANIERIS DIEGUEZ LA O (Cuba) a dit soutenir la codification sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite sur la base des Projets d’articles proposés par la Commission du droit international, d’autant qu’ils reprennent des normes du droit international largement admises par la communauté internationale. Cuba observe que ceux qui s’opposent à une éventuelle convention sont ceux qui estiment pouvoir se passer du droit international dans leurs agissements. La représentante a estimé qu’il fallait au contraire mettre ces États devant leurs responsabilités, ajoutant qu’une convention fournirait une protection aux victimes face aux agissements de ces États, responsables de fait d’occupation ou de génocide.
M. HECTOR CELARIE (El Salvador) a fait part de sa conviction que les articles sur la responsabilité de l’État pour faits internationalement illicites adoptés en 2001 par la Commission du droit international en ont fait un principe de droit international. L’adoption d’un instrument international sur cette notion permettrait de la consacrer en tant que droit impératif et de réduire la tendance à recourir à l’usage de la force, a-t-il ajouté. El Salvador réaffirme donc son soutien à l’organisation d’une conférence internationale ayant pour objet d’élaborer une convention sur la responsabilité des États, ce qui permettrait de fortifier cette notion en tant que pilier fondamental du droit international.
Mme NATALIE Y. MORRIS-SHARMA (Singapour) s’est interrogée sur le bien-fondé d’un régime juridique relatif aux « contre-mesures » dans le cadre de la responsabilité de l’État, estimant qu’un tel régime aurait des implications potentiellement négatives. C’est un sujet complexe et il serait plus approprié de le discuter dans un forum de spécialistes, a ajouté la représentante. La Commission du droit international, qui a examiné l’option consistant à supprimer la disposition sur les contremesures du projet d’articles, y a finalement renoncé et s’est limitée à modifier l’approche des projets antérieurs, a rappelé la représentante qui a expliqué que, pour son pays, ces modifications ne sont pas suffisantes pour répondre aux préoccupations qui avaient été soulevées. Quelle que soit l’approche qu’adoptera l’Assemblée générale pour faire avancer le travail de la Commission, il faudra agir par consensus, a affirmé Mme Morris-Sharma.
Mme ELENA MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a estimé qu’une convention sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite pourrait devenir une des pierres angulaires du droit international. Étant donné que l’on n’a pas réglé le sort des projets d’articles adoptés par la Commission du droit international, ceux-ci fonctionnent comme documents autonomes, a-t-elle fait observer. Toutefois, certaines de leurs dispositions doivent être peaufinées et la Fédération de Russie est favorable à la convocation d’une conférence internationale à cette fin.
M. ISAIAS ARTURO MEDINA MEIJAS (Venezuela) a rappelé son alignement sur les positions de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) et du Mouvement des pays non alignés, ajoutant seulement que sa délégation appuierait toute initiative visant à adopter un instrument juridiquement contraignant sur la base des projets d’articles existants.
Mme AHILA SORNARAJAH (Royaume-Uni) a constaté qu’il n’était pas possible d’identifier un consensus entre les États sur un certain nombre de questions clefs couvertes par le projet d’articles, et qu’il n’était pas non plus possible de tirer des conclusions fermes concernant le statut de certains aspects des articles comme reflétant le droit international coutumier. La pratique des États dans ce domaine continue d’évoluer, a estimé la représentante, pour qui il reste des domaines d’incertitudes et de désaccord. Pour le Royaume-Uni, il existe des dangers à se précipiter vers une convention pendant le processus du développement naturel du droit international coutumier sur la question. Le projet d’articles n’a pas encore réuni non plus les conditions définissant le droit international coutumier, a poursuivi Mme Sornarajah, qui a estimé en conclusion que négocier une convention pour faire adopter le projet d’articles serait prématuré et probablement contreproductif.
Mme AVIGAIL FRISCH BEN AVRAHAM (Israël) a salué la Commission du droit international pour le travail titanesque qu’a représenté l’élaboration du projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite finalement adopté en 2001. La représentante a réitéré la position antérieure de son pays: des négociations sur un projet de convention sur le sujet pourraient affaiblir le fragile équilibre existant et ne sont donc pas souhaitables. Les articles adoptés par la CDI devraient pouvoir se développer d’eux-mêmes sans passer par des négociations diplomatiques. Ces articles bénéficient dans leur forme non contraignante du respect des érudits, des cours et des tribunaux, ainsi que des arbitrages. Ils n’ont donc pas besoin d’être rendus contraignants par le biais d’une convention.
M. MEHDI REMAOUN (Algérie) a déclaré que le projet d’articles avait été élaboré avec soin, ajoutant que les États Membres avaient pu dialoguer avec la Commission du droit international. Compte tenu que nombre de ces articles sont d’ores et déjà invoqués par les tribunaux, l’Algérie estime que le moment est venu de tenir une conférence internationale sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite afin de les transcrire dans une convention.
Mme CRISTINA PUCARINHO (Portugal) a dit que les projets d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite devraient être adoptés sous la forme d’une convention juridiquement contraignante. Le Portugal est ouvert à un dialogue qui viserait notamment à identifier les points d’accord et de désaccord dans le cadre d’un groupe de travail chargé de discuter, entre autres, de la possibilité de demander au Secrétaire général de préparer une note sur les différentes options concernant les méthodes de travail et procédures à suivre pour structurer les discussions sans préjudice d’aucun résultat particulier, d’identifier les principales préoccupations des États Membres concernant le fonds des projets d’articles, et de délimiter une liste des questions essentielles qui devraient portées à l’ordre du jour du groupe de travail pour discussion. Cela devrait être fait en gardant à l’esprit que les projets d’articles de la Commission du droit international devraient rester la base d’une convention internationale sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.
M. ALEXANDROS KOLLIOPOULOUS (Grèce) a déclaré que le projet d’articles était solide, équilibré et a ajouté que ses articles étaient désormais cités par la Cour internationale de Justice et d’autres tribunaux internationaux. Compte tenu de ces faits et du compromis que représentent ces articles, il devrait être facile, dans un monde idéal, de parvenir à un instrument juridiquement contraignant. Cela dit, le processus d’adoption d’un tel instrument ne doit pas rompre le compromis acquis en 2001 en tentant de modifier le projet d’articles, lesquels abordent des questions juridiquement sensibles.
M. ALI NASIMFAR (République islamique d’Iran) a déclaré que la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite était la pierre angulaire du droit international et des relations internationales. En effet, sans responsabilité, il est difficile de parler de droit. Le fait que les articles adoptés en 2001 par la CDI soient cités par des tribunaux internationaux prouve la haute valeur du travail de la Commission. L’article 48 reflète le développement progressif du droit international, a ajouté le représentant.
Concernant l’avenir du projet d’articles, le représentant a estimé que tout ce qui concerne la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite devrait faire l’objet d’une convention contraignante. Le moment est venu de convoquer une conférence diplomatique afin d’adopter une telle convention, a-t-il conclu.
M. ANGEL HORNA (Pérou) a rappelé que le projet d’articles est le fruit de 50 ans de travail de la Commission du droit international et de cinq Rapporteurs spéciaux. Ces articles bénéficient d’un large appui et sont déjà évoqués dans les tribunaux internationaux. Le Pérou estime qu’il est temps de prendre une décision sur une convention et a l’intention de coopérer avec le Groupe de travail mis en place à cet effet.
M. MOHD RADZI HARUN (Malaisie) a rappelé que son pays était préoccupé par certains des articles du projet. Le représentant a pris note des avis émis à propos du projet d’articles mais a estimé qu’il ne devait pas être transformé en convention. Les articles adoptés en 2001 sont le fruit d’un compromis. Si l’on essaie de convoquer une convention à ce stade, cela sera contre-productif, a déclaré le représentant, qui a souhaité que les États continuent plutôt à partager leur expérience sur la question.
Mme EMILY PIERCE (États-Unis) a déclaré que les articles du projet étaient suffisants sous leur forme actuelle et que l’Assemblée générale n’avait pas besoin de statuer davantage. Discuter d’une future convention n’apportera rien de plus, d’autant que dans leur formulation actuelle, les articles ont déjà une autorité reconnue, y compris par les tribunaux internationaux, a fait observer la représentante. Les États-Unis estiment qu’il faut les laisser à l’état afin qu’ils continuent d’orienter le droit international coutumier.
M. PABLO ARROCHA (Mexique) a estimé que la question de la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite était une des questions les plus importantes de l’ordre du jour de la Sixième Commission. Comme le précise le Rapport du Secrétaire général, les articles de la Commission du droit international adoptés en 2001 ont été utilisés à plus de 60 reprises par des tribunaux internationaux, la dernière fois étant la semaine dernière à la Cour internationale de Justice.
Plusieurs des articles codifient le droit international et leur développement doit se poursuivre, a estimé le représentant. Mais le Mexique est aussi conscient des défaillances du droit international coutumier, notamment parce qu’il est une source de droit parfois difficile à identifier. Pour cette raison, le Mexique pense qu’il faut convoquer une conférence internationale afin de codifier cet ensemble de normes secondaires.
Au cours de ces dernières années, nos débats ont porté sur les mesures futures à propos du projet d’articles dont nous sommes saisis, a fait observer le représentant, pour qui les positions exprimées ne sont pas irréconciliables, bien au contraire. Nous pouvons désormais faire avancer cette question, a-t-il ajouté, avant de lancer un appel en ce sens, estimant que la pire des solutions serait de ne rien faire.
M. SHI XIAOBIN (Chine) a rappelé que, depuis l’adoption du projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite en 2001, ce corpus avait été largement invoqué par les institutions juridiques internationales, y compris la Cour internationale de Justice, et avait eu une importance considérable sur la pratique diplomatique des États. Les règles de droit international du projet d’articles ont été constamment mises à l’épreuve de façon concrète et la Chine salue les travaux de la Commission du droit international sur cette question.
En même temps, depuis 2001 les États Membres n’ont pas pu trouver de terrain d’entente sur une possible action de l’Assemblée générale, a constaté le représentant, qui a rappelé que trois options étaient apparues: la négociation d’une convention sur la base du projet d’articles, l’adoption directe du projet d’articles par l’Assemblée générale par le biais d’une résolution et enfin l’absence d’action de la part de l’Assemblée générale. Le représentant a rappelé que son pays avait à de nombreuses reprises, fait connaitre sa position, qui reste inchangée. La Chine considère que les projets d’articles sont matures mais que certaines clauses en restent controversées, notamment en ce qui concerne la « violation grave par un État d’une obligation découlant d’une norme impérative du droit international général », les contre-mesures et les « mesures prises par les États autres que l’État lésé ». Elle souhaite donc une discussion approfondies entre États sur le projet d’articles afin d’élargir le consensus. À cet égard, la Chine considérera comme positif tout effort visant à explorer la possibilité d’élaborer une convention sur la base de négociations.
Protection diplomatique (A/71/93 et A/71/93/Corr.1)
M. JUAN AVILA (République dominicaine), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a estimé que la protection diplomatique était d’une grande importance dans les relations entre les États. La CELAC considère qu’il s’agit d’une institution bien établie de droit international et que beaucoup de projets d’articles adoptés en 2006 reflètent la pratique des États. Pour les États membres de la CELAC, l’adoption d’une convention internationale permettrait d’harmoniser la pratique d’État et la jurisprudence. En outre, elle permettrait de combler les lacunes existantes dans le droit international et d’asseoir une sécurité juridique.
Mme ADRIENNE ELMITT (Australie), au nom du groupe CANZ (Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a estimé qu’en l’absence de consensus clair sur l’élaboration d’une convention sur la base des articles sur la protection diplomatique, il était prématuré de commencer les négociations sur une convention sur la base du projet d’articles adopté par la CDI en 2006. Certains aspects du projet d’articles vont au-delà du droit international coutumier et il est peu probable qu’il existe un consensus international si ces aspects devraient être l’objet d’une négociation en vue de l’élaboration d’une convention.
Mme TANIERIS DIEGUEZ LA O (Cuba) a exprimé sa reconnaissance à la Commission du droit International pour ses apports en vue d’une convention sur la protection diplomatique et a réitéré sa disposition à travailler conjointement avec tous les États Membres dans le but que ces divers apports se convertissent en un instrument international contraignant. L’adoption d’une convention sur la protection diplomatique offrirait la possibilité d’harmoniser et d’intégrer la pratique et la jurisprudence existant en la matière, y compris le contenu des décisions de la Cour Internationale de Justice, a estimé la représentante.
M. HECTOR CELARIE (El Salvador) a déclaré que, si les normes de protection diplomatique sont apparues à une époque, désormais révolue, où la subjectivité des individus n’était pas reconnue au plan international, elles n’en restent pas moins un outil pertinent de défense des droits de l’homme dans le cadre juridique actuel.
Le représentant a par conséquent plaidé en faveur d’un renforcement des normes de protection diplomatique. A ce titre, il a appelé les États Membres à redoubler d’efforts pour traduire le projet d’articles sur la protection diplomatique adopté en 2006 par la Commission du droit international en instrument juridiquement contraignant. Il a toutefois estimé nécessaire que la future convention trouve le bon équilibre entre le droit discrétionnaire des États à exercer la protection diplomatique et la pratique recommandée dans l’article 19 du projet.
Mme Elena MELIKBEKYAN (Fédération de Russie) a déclaré que le projet d’articles sur la protection diplomatique adopté par la Commission du droit international était un bon texte qui pouvait justifier l’élaboration d’une convention juridiquement contraignante. La Fédération de Russie est en faveur d’un tel texte normatif, a dit sa représentante.
Mme AHILA SORNARAJAH (Royaume-Uni) a déclaré qu’une convention sur la protection diplomatique serait prématurée. L’article 19 du projet d’articles adopté en 2006, qui est non contraignant, ne semble pas approprié dans une convention, a ainsi expliqué la représentante. D’ailleurs, a-t-elle fait observer, une convention n’est pas la seule voie possible. Le Royaume-Uni pense qu’il faudrait que les articles continuent d’orienter la pratique des États et qu’il convient de reporter l’examen de ce point de l’ordre du jour de la Sixième Commission.
M. DAVID LOW (Singapour) a rappelé que de nombreux États avaient des réserves quant à l’adoption d’une convention sur la protection diplomatique basée sur le projet d’articles adopté en 2006 par la CDI. Certains aspects du projet appellent à la prudence, a ajouté le représentant. En effet, certains des articles relèvent du développement progressif du droit plutôt que d’une codification du droit international coutumier. En outre, ce thème est étroitement lié à plusieurs domaines importants du droit international tels que la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite. Le représentant a indiqué qu’il attendait avec impatience l’échange de vues dans le cadre du groupe de travail sur le sujet.
M. ALI NASIMFAR (République islamique d’Iran) a remercié la Commission du droit international pour son travail de codification du droit international, avant de déclarer que la protection diplomatique était un processus complexe qui implique le droit des individus et les droits de l’État. Il faut donc un bon équilibre entre ces notions. Nous ne sommes pas sûrs que les projets d’articles puissent bien prendre en compte ces préoccupations, a fait observer le représentant, qui a cité en exemple le projet d’articles sur les apatrides ou encore celui sur la double nationalité, estimant qu’ils sont fondés sur des jurisprudences qui ne reflètent pas la codification du droit international coutumier. Les États Membres ont des vues divergentes sur l’avenir du projet d’articles, a ajouté le représentant, pour qui, de fait, l’heure n’est pas venue pour la négociation d’une convention.
Mme Emily PIERCE (États-Unis) a estimé que certains articles du projet sur la protection diplomatique n’étaient pas suffisants pour participer à la codification du droit international coutumier. Nous craignons que la négociation d’une convention sur cette question sape l’évolution du projet d’articles, a ajouté la représentante, pour qui il est donc préférable de la remettre à plus tard.
M. ISAIAS ARTURO MEDINA MEIJAS (Venezuela) a demandé que soit précisé le sens et la portée de la protection diplomatique en particulier qui, individu ou entreprise, pouvait la solliciter et dans quelles conditions. Le Venezuela observe, en outre, que l’article 8 du projet d’articles contient des dispositions discriminatoires visant notamment les demandeurs d’asiles et les apatrides, qui sont exclus de la protection diplomatique. Il constate aussi que l’article 19 du projet contient une référence à des « pratiques souhaitables » qui ne sont pas reconnues au titre du droit international coutumier. Par conséquent, le Venezuela est d’avis qu’une convention dénaturerait la coutume comme source de droit.