Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient plaide pour une « nouvelle stratégie accordant la priorité à Gaza »
« Après sept années et trois guerres », le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient a partagé quelques réflexions avec le Conseil de sécurité sur un processus qui ressemble à « une canette dévalant une pente sans fin ». M. Robert Serry a plaidé pour « une nouvelle stratégie qui accorde la priorité à Gaza » afin de réaliser quatre « objectifs urgents »: le gel des activités militaires, la réconciliation palestinienne, la réouverture des points de passage et l’appui international au Gouvernement de consensus national.
Le Coordonnateur spécial, qui quitte ses fonctions, « après sept années et trois guerres », a rappelé que les trois initiatives de paix américaines se sont révélées vaines et que les progrès « remarquables » enregistrés dans l’édification de l’État palestinien s’apparentent désormais à « l’échec d’un succès ». « J’ai fait partie d’un processus qui ressemble à une canette dévalant une pente sans fin », s’est alarmé M. Robert Serry.
Le Coordonnateur spécial a appelé, une nouvelle fois, à une nouvelle stratégie qui accorde la priorité à Gaza. « Pas seulement à Gaza », s’est-il expliqué, car « ni moi ni les Nations Unies n’appuieraient une stratégie qui cherche à séparer Gaza de la Cisjordanie ». Accorder la priorité à Gaza doit s’inscrire inextricablement dans le processus plus large de la paix, a-t-il rassuré.
Pour lui, « la priorité à Gaza », signifie la réalisation urgente de quatre objectifs et d’abord d’un cessez-le-feu plus stable sous le parapluie du Gouvernement de consensus national. J’ai appelé, a souligné M. Serry, à « une reconstruction par l’hudna », à savoir une reconstruction adossée au gel de toutes les activités militaires pendant trois à cinq ans. Mais, a-t-il reconnu, en livrant son deuxième objectif, l’« hudna » ne serait possible que si les Palestiniens travaillent à une vraie réconciliation. La tâche ne sera pas facile mais quelle est l’alternative?
Pour le troisième objectif, le Coordonnateur spécial a demandé la réouverture de tous les points de passage à Gaza, entre autres pour la relier à la Cisjordanie et enfin, a-t-il ajouté, la communauté internationale doit se préparer à appuyer pleinement, politiquement et financièrement, le Gouvernement de consensus national et cela passe par le respect des engagements pris à la Conférence du Caire en matière de reconstruction.
Le Coordonnateur spécial a dit avoir tiré d’autres leçons de son expérience: le processus de paix au Moyen-Orient s’est principalement joué sur trois scènes interconnectées mais conflictuelles à savoir, les négociations de paix, Gaza et l’ONU. L’interconnexion entre ces trois éléments a produit « un résultat dangereux », et, a-t-il osé dire, « la plus grande crise de nos efforts conjoints visant à réaliser la solution à deux États ». Car, s’est-il expliqué, depuis 2012, les partes s’orientent plutôt vers ce qu’on ne peut décrire que comme « une réalité à un État ».
Comme ces parties ne semblent pas prêtes à reprendre les négociations, il ne faut pas les presser, a suggéré M. Serry. Si la communauté internationale est vraiment convaincue que les parties veulent deux États voisins vivant dans la paix et la sécurité, sans pouvoir y arriver, elle devrait envisager sérieusement de leur présenter un nouveau cadre de négociations assortis de « paramètres ». Dans les circonstances actuelles, cela pourrait être la seule manière de préserver la solution à deux États, a prévenu le Coordonnateur spécial.
Le Conseil de sécurité, a-t-il tranché, a toujours la responsabilité première de jouer son rôle dans l’élaboration d’une nouvelle architecture de paix pour résoudre, « une fois pour toutes », le conflit. La résolution 242, qui consacre le principe essentiel de « la terre contre la paix », a presqu’un demi-siècle. Pendant ces sept dernières années, a dénoncé M. Serry, le Conseil de sécurité n’a adopté que deux résolutions sur Israël et la Palestine et aucune d’elles n’a offert de stratégie.
« N’est-ce pas temps que le Conseil prenne l’initiative? » s’est interrogé un Coordonnateur spécial qui s’est félicité de ses contacts avec toutes les parties, y compris quand il le fallait, avec les acteurs non étatiques comme le Hamas. Quand on a des objectifs à atteindre, le contact avec de tels interlocuteurs est « un élément essentiel » du travail de tout envoyé spécial qui recherche la paix dans un conflit « moderne et complexe ».