Quatrième Commission: appel à l’intensification de la lutte antimines compte tenu de leur impact humanitaire et sur le développement
La Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation) a adopté sans vote, lors de sa séance de ce matin, le projet de résolution sur l’assistance à la lutte antimines, aux termes duquel elle appelle l’Assemblée générale à se déclarer « profondément alarmée par le nombre très important, quoique décroissant, de mines et de zones minées et par le nombre croissant de restes explosifs de guerre provenant de conflits armés, et convaincue par conséquent que la communauté internationale doit intensifier d’urgence les activités de déminage en vue d’éliminer au plus tôt le danger que les mines terrestres et les restes explosifs de guerre présentent pour les civils et leurs répercussions sur le plan humanitaire ».
Ce texte a été adopté conformément à un point de l’ordre du jour de la Commission qu’elle n’examine qu’une année sur deux.
La Commission a recommandé à l’Assemblée générale de demander que les États poursuivent leur action, notamment grâce à la coopération Sud-Sud, régionale et sous-régionale avec l’assistance de l’Organisation des Nations Unies et des organisations compétentes en matière de lutte antimines et en coordination avec le pays touché, pour encourager la mise en place et le développement de capacités nationales de lutte antimines dans les pays où les mines et les restes explosifs de guerre font peser une grave menace sur la sécurité, la santé et la vie des populations civiles locales ou compromettent l’acheminement de l’aide humanitaire et l’effort de développement socioéconomique aux niveaux national et local.
La Commission a également recommandé que l’Assemblée engage instamment tous les États touchés par le problème des mines à veiller à identifier toutes les zones sous leur juridiction ou leur contrôle où se trouvent des mines ou des restes explosifs de guerre, de la manière la plus efficace possible, et à recourir, pour la remise à disposition des terres, à des techniques telles que le repérage technique et non technique et le déminage.
Les intervenants au débat sur la question, qui représentaient certains des pays les plus touchés par ce problème comme l’Afghanistan, l’Iraq, République démocratique populaire lao, la Libye ou le Liban, ont souligné l’importance des problèmes d’ordre humanitaire et de développement que posent les mines et les autres restes explosifs de guerre sur leur sol.
Le représentant du Pérou a parlé du « déminage humanitaire » de son pays, alors que ses homologues afghan et iraquien ont indiqué que la plupart des mines étaient dissimulées en zones rurales, ce qui portait un grave préjudice à leurs économies essentiellement agricoles. D’autres intervenants, comme la Croatie, ont évoqué la nouvelle menace que posent les engins explosifs artisanaux dans les conflits actuels qui sont souvent utilisés par des acteurs non étatiques. Le représentant iraquien a, quant à lui, attiré l’attention sur le problème de l’emplacement des mines, dont la détection suppose des moyens techniques avancés.
Il ne fait pas de doute pour les pays concernés que le déminage postconflit est un travail de longue haleine qui ne peut aboutir qu’à condition d’avoir des moyens financiers, humains et techniques adéquats. Ces États, qui sont les premiers responsables de la « décontamination » de leur territoire ont lancé des appels à la communauté internationale pour qu’elle appuie leurs efforts en ce sens. Le Service de la lutte antimines de l’ONU (SLAM) est à leur disposition pour ce faire, a affirmé sa Directrice, Mme Agnes Marcaillou, prévenant toutefois que compte tenu de l’importance des besoins dans le monde où près de 800 millions de personnes vivent toujours à proximité de zones minées, les Nations Unies devaient pouvoir compter sur une participation plus active des États Membres aux opérations de déminage.
Par ailleurs, le rapport du Secrétaire général sur l’assistance à la lutte antimines a été présenté par M. Dmitry Titov, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité.
La Quatrième Commission se réunira lundi 19 octobre, à partir de 15 heures, pour entamer l’examen de l’Université de la paix ainsi que la Coopération internationale touchant les utilisations pacifiques de l’espace.
ASSISTANCE À LA LUTTE ANTIMINES (A/70/207)
Décision sur le projet de résolution A/C.4/70/L.8
Déclaration liminaire
Le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité, M. DMITRY TITOV, a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’assistance à l’action antimines (A/70/207) qui met en exergue l’action des Nations Unies dans ce domaine. Ce point est étudié une année sur deux par la Quatrième Commission.
M. Titov a rappelé qu’à l’heure actuelle plus de 7,9 millions de personnes vivent encore à proximité de zones affectées par des mines et autres engins explosifs qui sont des restes de guerres et conflits. L’action de déminage doit donc continuer à évoluer dans ce monde en mutation rapide. À ce titre il a évoqué les risques liés aux engins explosifs improvisés qui sont de plus en plus utilisés dans les conflits actuels. En Afghanistan, les victimes de ces engins dépassent celles des mines, a souligné M. Titov. Il a mis l’accent sur la nécessité d’une approche holistique et flexible, y compris l’assistance aux victimes. Le Service de la lutte antimines de l’ONU est le point focal de cette riposte cohérente interinstitutions qui dirige les efforts des Nations Unies sur le terrain, en particulier immédiatement après les conflits, a-t-il précisé.
La stratégie 2013-2018 de l’ONU a été élaborée par le Groupe interinstitutions de coordination de la lutte antimines et l’ONU a mis en place un mécanisme d’évaluation pour mesurer les progrès dans tous les pays où l’ONU est présente dans le cadre de cette lutte, a expliqué M. Titov.
Il a salué le fait que 162 pays ont aujourd’hui signé ou ratifié le Traité sur l’interdiction des mines antipersonnel, mais le Secrétariat estime que des progrès sont encore possibles pour parvenir à son universalisation. M. Titov a également salué le Plan d’action de Maputo.
Abordant la question des armes à sous-munitions, il a précisé que, depuis la rédaction de ce rapport, plusieurs pays se sont rajoutés aux 93 États qui sont parties à la Convention sur ces armes. Par ailleurs, 121 pays ont ratifié ou accédé à la Convention sur certaines armes conventionnelles. Ces engagements sont essentiels, mais il faut surtout qu’ils se traduisent en actions concrètes sur le terrain, a estimé M. Titov.
Il a salué le Mozambique pour avoir achevé le déminage du pays, et a noté que d’autres pays avaient également fait des progrès considérables au cours de la période considérée grâce à des partenariats entre les Nations Unies, les États Membres et la société civile. Il a rapporté que le nombre de personnes victimes ou blessées par des mines a baissé de deux tiers depuis 2005.
De plus, il a salué la réduction de 85% des victimes en République démocratique populaire lao au cours des 10 dernières années, et le fait que 1 631 champs de mines aient été nettoyés en Afghanistan au cours des deux dernières années ainsi que 50km2 de terres au Cambodge.
Mais il faut aller plus loin et faire davantage. M. Titov préconise notamment de continuer à tout faire pour que les gouvernements disposent de zones de stockage de munitions sécurisées, ce qui réduit les risques d’accident. Il faut également sensibiliser les populations civiles aux risques des engins explosifs, ce que l’ONU a fait dans 18 territoires, et accélérer le transfert des capacités de lutte antimines aux acteurs nationaux. C’est essentiel pour permettre aux pays de s’approprier la question du déminage sur leur territoire.
M. Titov a également mis en valeur le rôle des partenariats Sud-Sud en termes de déminage. La lutte antimines doit en outre être intégrée dans des plans et législations nationales ainsi que dans les stratégies régionales. À ce sujet, il a salué l’action de l’Union africaine par le biais de son cadre stratégique pour la lutte antimines et l’élimination des restes explosifs de guerre pour la période 2014-2017.
Dernier point évoqué par M. Titov était celui de la participation des femmes en tant qu’agent de paix et de sécurité aux actions de déminage.
Il a conclu en souhaitant que l’impulsion donnée à la lutte antimines et autres objets explosifs se poursuive et a encouragé les États Membres à s’impliquer davantage dans cette question compte tenu de l’importance que cela peut avoir pour le développement socioéconomique des pays concernés par ces problèmes.
Débat interactif
Le représentant de l’Iran a demandé quel type d’assistance pouvait fournir le Service de la lutte antimines aux États Membres. Pensez-vous que les services de la lutte antimines aient des capacités suffisantes pour répondre aux besoins de tous les pays qui ont besoin d’assistance? a-t-il également demandé. Si tel n’est pas le cas, qu’attendez-vous des États Membres pour pouvoir faire face à cette demande?
M. Titov lui a répondu en expliquant que l’action antimines de l’ONU est un cycle de travail complet et multifacette. Le SLAM est une petite entité mais très souple avec des effectifs importants internationaux et nationaux sur le terrain. S’agissant des capacités du SLAM à répondre à tous les besoins, il a reconnu qu’elles restaient insuffisantes et qu’il comptait sur le soutien des États Membres pour plaider la cause du Service à la Cinquième Commission.
La Directrice du Service de la lutte antimines de l’ONU a précisé que lorsque son Service est invité par un pays pour fournir son assistance il lui apporte les compétences nécessaires, notamment pour déployer rapidement des experts et des équipements et technologies sur le terrain. Elle a reconnu que le SLAM n’avait pas suffisamment de personnel et ne dispose pas toujours du financement nécessaire pour répondre à tous les besoins, notamment humanitaires, des pays faisant appel à ses services. Elle souhaite renforcer le partenariat avec les pays concernés et lance un appel pour des financements suffisants aux actions de son service.
Déclarations
M. PREDRAG AVRAMOVIC, s’exprimant au nom de l’Union européenne ainsi qu’au nom de la Turquie, de l’ex-République yougoslave de Macédoine, du Monténégro, de la Serbie, de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, de la République de Moldova et de la Géorgie, a rappelé que les 28 pays membres de l’Union européenne sont États parties à la Convention d’Ottawa et soutiennent la résolution de l’Assemblée générale sur l’assistance antimines. L’Union européenne et ses États membres ont contribué à hauteur de 600 millions d’euros depuis la précédente Conférence des parties tenue en 1999 à Cartagena, ce qui représente plus d’un tiers du financement mondial de l’assistance à la lutte antimines, a-t-il rappelé. Cependant, la communauté internationale a besoin de renforcer les partenariats et la collaboration entre les États, les Nations Unies et d’autres organisations internationales, l’Union africaine et d’autres organisations régionales, ainsi que les ONG et le Comité international de la Croix-Rouge, a souligné le représentant.
En ce qui concerne la résolution sur l’assistance à l’action antimines, il s’est félicité que sa dimension humanitaire ait été renforcée et que les besoins spécifiques des réfugiés et des personnes déplacées aient été pris en compte. Il a également salué la reconnaissance de la menace humanitaire posée par les engins explosifs artisanaux apparaissant après les conflits.
Après avoir souligné l’impact des mines antipersonnel et des restes explosifs de guerre, M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) s’est arrêté sur un point particulier du rapport, celui du changement de nature des opérations de lutte antimines, en raison des violents conflits armés dans plusieurs pays du monde et la menace étendue d’explosions dans des zones peuplées. La lutte antimines n’a plus lieu seulement après les conflits mais également pendant, afin de sauver la vie de civils, a-t-il estimé, appelant tous les États Membres impliqués dans des conflits armés à ne pas déployer d’armes explosives dans les zones peuplées et à soutenir l’inclusion du service de lutte antimines dans le mandat des opérations de maintien de la paix de l’ONU.
Le Centre de lutte antimines de Thaïlande a déminé 2 100 km2 ces 15 dernières années, a souligné le représentant, et s’est engagé à achever le déminage des dernières zones dangereuses. Concernant l’assistance aux victimes, l’objectif de la Thaïlande est de créer une société où les droits des victimes à vivre dans la dignité sont respectés, dans l’attente de la mise à jour de la stratégie des Nations Unies sur l’assistance aux victimes, qui pourrait guider les efforts de mon pays, a conclu le représentant.
Mme LORENA ALVARADO QUEZADA (Mexique) s’est félicitée que les traités aient contribué à la lutte antimines et permis une sensibilisation, soulignant que seule une minorité d’États n’a toujours pas interdit les mines terrestres, États qu’elle a encouragés à adhérer à la Convention d’Oslo. Elle a par ailleurs salué la Déclaration de Maputo, qui devrait guider l’assistance aux victimes. Notant que plus de 48 millions de mines ont été détruites dans le monde, elle a néanmoins estimé que des progrès devaient être faits, compte tenu du nombre croissant de victimes d’accidents dus aux mines, notamment chez les enfants, dans les zones récentes de conflits et dans les zones densément peuplées, où l’utilisation d’engins artisanaux a suscité son inquiétude.
Le Mexique reconnaît le rôle que les Nations Unies ont joué dans la lutte antimines et l’établissement de mécanismes de vigilance, et salué la stratégie fondée sur les droits des victimes et l’assistance, réitérant que la coopération et l’assistance aux victimes sont essentielles. La représentante a réaffirmé l’importance d’établir des synergies entre les traités dans une approche droits de l’homme.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA VELASQUEZ (Pérou) a partagé les progrès réalisés dans son pays en matière de déminage humanitaire pour parvenir à l’élimination totale des mines antipersonnel sur son territoire. À ce jour, 9 200 mines ont été détruites et le Pérou a acquis des équipements de déminage pour accroitre la capacité de son personnel national qui dispose aujourd’hui de nouvelles technologies et de chiens dressés. Le Centre national Contra Minas forme le personnel péruvien ainsi que celui d’autres pays voisins. Le déminage humanitaire au Pérou a pu significativement progresser grâce à un travail de coordination important le long de la frontière terrestre avec l’Équateur, a-t-il expliqué. Dans ce climat de confiance et de coopération, le Centre « contra minas » échange des informations avec les pays limitrophes et a mis en place une unité de déminage binationale. Le Pérou a également mis sur place un registre des mines de ces engins explosifs afin de leur apporter l’aide requise. Il a remercié les bailleurs de fonds qui ont soutenu les efforts péruviens de déminage.
M. MAHDI (Iraq) a expliqué que son pays est en tête de liste des pays les plus minés au monde. Les 25 millions de mines et 21 000 personnes en ont été victimes. Les terres agricoles contaminées par les mines représentent près de 85% des terres rurales ce qui a des répercussions directes sur le développement socioéconomique de ces régions. Il a demandé à la communauté internationale de venir en aide à l’action de déminage en Iraq qui souffre depuis 50 ans de ce phénomène. Aujourd’hui, le danger vient de Daech qui plante des mines et des explosifs dans des bâtiments, a-t-il rappelé. Parmi les plus grands défis dans l’action de décontamination, il a cité le manque d’informations sur l’emplacement de ces engins explosifs. Son gouvernement a commencé à mener des enquêtes en ce sens dans les provinces du sud et a lancé des actions de sensibilisation de la population, notamment dans les écoles et collectivités locales. L’Iraq n’a pas les moyens d’apporter l’assistance suffisante aux victimes et compte sur l’aide internationale dans ce domaine. Rappelant qu’à ce jour 1 milliard 941 millions de km2 ont été déminés, il a précisé qu’il restait encore 1 milliard 311 millions de km2 à nettoyer. Face à l’énormité de cette tâche, l’Iraq souhaite pouvoir compter sur une assistance renforcée de la part de la communauté internationale.
M. AHMED ELSHANDAWILY (Égypte) a relevé que les mines sont un obstacle au développement et que leur enlèvement a un coût prohibitif pour de nombreux pays concernés, dont le sien, affirmant que la responsabilité de fournir une assistance aux pays concernés par ce fléau incombait à ceux qui ont posé des mines.
Pour M. PETER HALL (Nouvelle-Zélande), les mines terrestres et les armes à sous-munitions créent un sens d’insécurité et de peur qui entrave la consolidation de la paix et empêche les gens de reprendre leur vie normale. En 2015, la Nouvelle-Zélande a contribué 1 million de dollars au déminage et 500 000 dollars supplémentaires aux besoins urgents du Service de la lutte antimines de l’ONU. Il a lancé un appel pour que ce Service et les autres organes de Nations Unies qui contribuent aux services de déminage soient mieux financés et de manière non conditionnée. À ce titre il a mis l’accent sur les activités de déminage, mais aussi de sensibilisation des populations civiles aux risques des engins explosifs et des mines. Toute action dans ce domaine s’inscrit, selon lui, dans le cadre du développement humain, de la paix et de la possibilité des réfugiés internes de rentrer chez eux.
M. KHIANE PHANSOURIVONG (République démocratique populaire lao) a souligné l’importance de la coopération internationale en matière de déminage, qu’il s’agisse de mines terrestres ou à sous-munitions. Son pays fait partie des pays les plus touchés par les engins non explosés ce qui entrave son développement, a expliqué le représentant, précisant qu’un Fonds d’appui aux deux institutions nationales avait été mis en place par le PNUD en 2010 où des bailleurs de fonds ont contribué à hauteur de 28 millions de dollars. La République démocratique populaire lao travaille également sur le plan bilatéral, notamment avec les États-Unis, le Japon, l’Inde et la Chine, et à ce jour 15 acteurs et ONG travaillent dans ce domaine sur le terrain, avec des ressources de 56 millions de dollars, a précisé le représentant. Il a remercié tous ceux qui sont venus en aide à son pays, estimant que grâce à cette action de décontamination, le nombre des victimes avait sensiblement baissé, mais qu’il restait beaucoup à faire pour surmonter complètement ce problème. Mon pays compte sur le soutien continu de ses partenaires pour venir à bout de son action de déminage, a conclu le représentant.
M. HUANG DA (Chine) a déclaré que son pays avait mis très vite en œuvre le Protocole II de la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination. « En 1990, a-t-il expliqué, la Chine a mené deux campagnes massives de déminage dans les zones frontalières des provinces de Guangxi et Yunan », précisant que l’armée chinoise continuait de détruire les mines antipersonnel ne répondant pas aux critères de ce protocole. Il a, par ailleurs, indiqué que son pays était très actif dans la coopération et l’assistance internationale en matière de déminage. Depuis 1998, le Gouvernement chinois a consacré des dizaines de millions de dollars sous forme de programmes de formation, de matériel de déminage à plus de 40 pays en Afrique, en Asie et en Amérique latine, a-t-il dit. Le représentant a également souligné que 60 pays souffraient encore du problème des mines antipersonnel qui ne posent pas seulement un risque pour les vies humaines mais demeurent un frein au développement économique.
M. VOLODYMYR MIALKOVSKYI (Ukraine) s’est félicité des progrès accomplis par de nombreux pays en matière de déminage, mais a déploré l’utilisation d’engins explosifs par des groupes terroristes dans les conflits en cours. Il a souligné que son pays continuait à appliquer les traités internationaux malgré les menaces d’une guerre « hybride » menée à son encontre et l’agression de groupes illégaux armés par la Russie dans les régions de Donetsk et Lougansk, qui ont essaimé des mines et engins explosifs dans ces régions, faisant de nombreuses victimes parmi les civils, y compris des enfants. La lutte antimines est l’une des priorités de l’Ukraine, a-t-il souligné, mais faute de ressources suffisantes, cette lutte devrait s’inscrire dans un cadre humanitaire et de développement, dans lequel les Nations Unies pourraient jouer un grand rôle.
M. DIANGUINA DIT YAYA DOUCOURÉ (Mali) a expliqué que les deux tiers du territoire malien subissaient encore les séquelles de l’occupation de 2012 lorsque des groupes terroristes avaient planté massivement des mines antipersonnel et autres engins explosifs improvisés dans les régions du nord faisant, à ce jour, 444 victimes dont 73 morts. À travers l’utilisation de ce type d’armes, ces groupes terroristes visent, selon lui, à saboter les efforts de la communauté internationale qui a accompagné le dialogue inter-malien ayant abouti à la signature en mai 2015 de l’Accord pour la paix et la réconciliation du Mali, a affirmé le représentant. Il a précisé à ce sujet que la mise en œuvre de cet Accord, dont le financement sera à l’ordre du jour de la Conférence internationale pour le développement du Mali, prévue à Paris, le 22 octobre prochain, devrait favoriser, entre autres, l’exécution des opérations de DDR (démobilisation, désarmement et réintégration de groupes armés) et de déminage des nombreuses zones du nord du Mali, a conclu le représentant.
Mme DIANA RENGIFO (Colombie) s’est félicitée que, pour la première fois, les engins explosifs artisanaux considérés comme menace humanitaire figurent dans la résolution, relevant qu’ils sont aussi destructeurs que les mines terrestres. En Colombie, ces engins représentent une grande menace pour la population et sont difficiles à détecter, d’où l’importance de la coopération internationale et de l’assistance. Soulignant que le Gouvernement colombien et les FARC s’étaient mis d’accord, avant la signature d’un Accord de paix, sur le déminage du territoire avec l’objectif d’en terminer en 2021, la représentante a indiqué, par ailleurs, que les mines, posées par des groupes armés hors la loi, avaient fait 11 200 victimes en Colombie entre 1990 et 2015. La représentante a également affirmé l’engagement de son pays envers les victimes, pour les aider à surmonter les dégâts dus aux mines, pour protéger leurs droits et garantir que ça ne se produirait plus. En conclusion, elle a remercié tous ceux qui avaient assisté la Colombie, en particulier les agences des Nations Unies et les ONG comme la britannique HALO Trust.
M. KOJI MIZUMOTO (Japon) a expliqué que son pays avait consacré 622 millions de dollars depuis 1998 à l’assistance au déminage dans une cinquantaine de pays. Il a précisé que la Japon a présenté son approche en matière de lutte antimines en juin 1994 au Mozambique lors de la Troisième Conférence d’examen de la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et en septembre 2015 en Croatie dans le cadre de la Convention sur les armes à sous-munitions. Au-delà de la nécessité de faciliter le déminage, le représentant du Japon a dit l’importance de l’assistance aux victimes des mines et de la sensibilisation au danger des mines.
S’agissant de l’assistance par le biais du système des Nations Unies, M. Mizumoto a indiqué que son pays appuyait les efforts antimines du Groupe interinstitutions de coordination de la lutte antimines, notamment le Service de la lutte antimines des Nations Unies, le PNUD et l’UNICEF. Le représentant a particulièrement salué l’adoption en 2014 d’un mécanisme de suivi et d’évaluation de la mise en œuvre de la Stratégie de lutte antimines des Nations Unies pour la période 2013-2018. Par ailleurs, il a indiqué que le Japon assurait depuis le 1er janvier 2014 la présidence biennale du Groupe d’appui à l’action antimines, forum de 36 pays donateurs qui vient de tenir sa réunion annuelle 2015 vendredi dernier à la mission japonaise. Il a mis l’accent sur la nécessité de garantir la participation des femmes à la lutte antimines et sur l’importance de la coopération Sud-Sud.
M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a expliqué que son pays était confronté au problème des mines terrestres et des restes explosifs de guerre depuis 30 ans. Celles-ci représentent une grave menace et entravent le développement et la sécurité de mon peuple dans la mesure où l’Afghanistan reste l’un des pays les plus minés dans le monde, avec une moyenne de 33 victimes tous les mois en 2015. Plus de 107 km2 de champs de mines ont des effets néfastes sur des projets d’infrastructure et les engins explosifs sont toujours présents dans des zones qui ne sont plus frappées par les conflits, a-t-il indiqué. Précisant que 80% de ces engins se trouvent dans des zones agricoles, le représentant a affirmé que leur présence constituait un problème majeur étant sonné le nombre important de personnes qui travaillent dans ce secteur. Les engins explosifs artisanaux sont une autre menace à la vie civile, sachant que l’année dernière 3 000 personnes en ont été victimes de ces engins souvent utilisés par les talibans, a-t-il dit.
Le programme de déminage afghan a permis de nettoyer environ 78,5% de terres contaminées, avec 557,6 km2 à décontaminer, a poursuivi le représentant, expliquant qu’en décembre 2012, son pays avait présenté une demande aux États parties au Traité sur l’interdiction des mines antipersonnel pour proroger une date butoir et s’est engagé à éliminer toutes les mines d’ici 2023, à condition que de nouvelles mines ne soient pas plantées sur son territoire.
M. MOHAMED ELMODIR (Libye) a souligné que son pays accordait une grande importance à la coopération internationale pour le déminage, ayant souffert de nombreux dommages humanitaires et dégâts économiques en raison des mines et engins explosifs posés depuis la Seconde Guerre mondiale. « Les événements qui se sont rapidement enchaînés depuis 2011 en Libye dans la lutte armée imposée par le dictateur précédent » ont aggravé à son avis cette situation, de même que la propagation des armes et la constitution de groupes armés depuis 2014. La difficile tâche du déminage ne peut être réalisée sans assistance des Nations Unies et d’autres pays pour aider à renforcer les capacités nationales dans la lutte antimines, a estimé le représentant, exprimant l’espoir que les efforts internationaux seraient redoublés pour fournir une assistance technique aux pays touchés. Le représentant s’est, par ailleurs, prononcé pour l’établissement de programmes dans les pays sortant de conflits pour réduire les dommages résultant des mines et autres engins explosifs, assurer la réinsertion des victimes et sensibiliser l’opinion contre les dangers des mines.
M. DANIILEL MEDAN (Croatie) a estimé que la Convention d’Ottawa sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction est la pierre angulaire de l’action antimines visant à mettre fin aux souffrances infligées par ces engins, souvent aux populations civiles. Il s’est dit inquiet de voir les mines utilisées comme base pour les engins explosifs artisanaux de nos jours. Compte tenu de l’impact dévastateur des mines antipersonnel, il a appelé à l’universalisation de la Convention d’interdiction des mines antipersonnel et a salué le Plan d’action de Maputo.
La Croatie estime que l’assistance aux victimes des mines devrait être davantage prise en compte dans les programmes de déminage et intégrée dans les plans nationaux. À son avis, cela suppose un renforcement des liens entre les différents instruments juridiques internationaux dans ce domaine. Pour sa délégation il ne fait pas de doute que la lutte antimines est complexe et pluridimensionnelle et doit s’inscrire dans un effort de longue haleine avec des ressources considérables. Mon pays, qui est passé par cette étape, prône la coordination des actions de déminage et des partenariats accompagnés de financements adéquats pour faire des progrès dans ce domaine, a conclu le représentant.
M. WAYNE SWAN (Australie) a déclaré que son pays a consacré 125 millions de dollars à la lutte antimines depuis 2010 avant de mettre l’accent sur les programmes bilatéraux engagés par l’Australie dans ce domaine avec l’Afghanistan, le Sri Lanka, le Laos, le Mozambique et Palau. Il a dit que l’Australie finançait aussi au niveau mondial et régional la mise en œuvre de la convention sur les mines antipersonnel et de la convention sur les armes à sous-munitions. Il a ajouté que son pays participait au financement de partenaires comme le Centre international de déminage humanitaire de Genève, le Service de la lutte antimines des Nations Unies, et la Coalition internationale pour l’interdiction des mines antipersonnel et armes à sous-munitions. Le représentant de l’Australie a dit, par ailleurs, que son pays occupait actuellement le rôle de coordonnateur à l’assistance aux victimes sous l’égide de la Convention contre les armes à sous-munitions. M. Swan a aussi indiqué que l’Australie avait mené des opérations de déminage dans le sud-ouest du Pacifique, à Bougainville et en Papouasie-Nouvelle-Guinée en octobre 2014 et novembre 2014.
Mme CAROLINE ZIADE (Liban) a fait remarquer que son pays était l’un des pays très contaminé par les mines par rapport à sa taille et à sa densité de population, et qu’il était aussi l’un de ceux bénéficiant d’une tendance positive au partenariat pour le déminage, en particulier entre la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et l’armée libanaise. Elle a par ailleurs déploré l’attitude d’Israël, qui n’a pas transmis les données sur les mines qu’il avait posées. En 2011, la Stratégie nationale de lutte antimines a été créée avec pour objectifs de déminer tout le pays d’ici à 2020 et de remplir les engagements du Liban au titre la Convention sur les sous-munitions, a-t-elle indiqué. Depuis lors, et malgré l’insécurité et l’afflux de réfugiés, le Liban a déjà permis aux communautés touchées de mieux gérer les risques et remis des cartes handicap aux victimes pour qu’elles puissent exercer leurs droits, a affirmé la représentante Mon pays a aussi établi une école régionale qui a commencé à former aux opérations de déminage et il est prêt à partager son expertise dans ce domaine, a-t-elle conclu.
Mme JAMAL JAMA AHMED ABDULLA AL MUSHARAKH (Émirats arabes unis) a souligné les risques sécuritaires associés aux régions contaminées par les mines et explosifs restes de guerre, soulignant que près de huit millions de personnes vivent à proximité de telles zones. Il s’agit d’une entrave au développement national et régional, a-t-elle fait valoir. Tout en saluant la réduction de deux tiers des victimes de mines antipersonnel, elle s’est dite préoccupée par le grand nombre de victimes hors régions de conflits. Elle a également souligné qu’il appartenait aux pays concernés d’empêcher la propagation des armes et de faciliter le déminage des régions infestées et la destruction des stocks d’armes. Prenant note du nombre croissant de pays qui demandent l’assistance du Service de lutte antimines, elle a lancé un appel au soutien à ce service. Les Émirats arabes unis, qui appuient les efforts internationaux en matière de déminage, sont engagés au plan bilatéral dans la région du Yémen où les Houthistes ont implanté des mines et ont également apporté une assistance financière au déminage au Liban et en Afghanistan, a conclu le représentant.
Adoption de projets
Présentant le projet de résolution A/C.4/70/L.8 intitulé « Assistance à la lutte antimines », le représentant du Pologne a indiqué que les 28 États membres de l’Union européenne ont appuyé ce texte qui est le produit d’un processus de rédaction transparente, inclusif et ouvert à tous. Il a expliqué que ce processus a bénéficié de l’appui du Secrétariat de l’ONU et de L’Équipe de lutte antimines des Nations Unies. Il s’est dit persuadé que ce texte aurait une grande importance sur le plan pratique et faciliterait « les travaux de tous ces héros qui risquent leur vie durant leurs activités de déminage ».
Au terme du projet de résolution A/C.4/70/L.8 sur l’Assistance à la lutte antimines, l’Assemblée générale, considérant la grave menace que les mines et les restes explosifs de guerre, y compris les armes à sous-munitions, présents dans les pays touchés font peser sur les populations civiles locales ainsi que des membres du personnel participant aux programmes et opérations de secours humanitaire, de maintien de la paix, de relèvement et de déminage, prierait instamment tous les États, en particulier ceux qui sont le mieux à même de le faire, ainsi que les organismes des Nations Unies et les autres organisations et institutions compétentes en matière de lutte antimines, d’aider les États touchés par le problème des mines en leur fournissant une assistance pour leur permettre de créer ou de développer leurs propres capacités de lutte. Elle les prierait également de fournir un soutien aux programmes nationaux en vue de réduire les risques que font courir les mines terrestres et les restes explosifs de guerre, en prenant en considération les besoins différents des femmes, des filles, des garçons et des hommes; des contributions régulières et prévisibles en temps voulu à l’appui des activités de lutte antimines; les informations et l’assistance technique, financière et matérielle nécessaires; ainsi qu’une assistance technologique visant à aider les pays touchés et à promouvoir la réalisation de travaux de recherche scientifique axés sur la conception de techniques et de moyens de lutte antimines d’utilisation facile.
L’Assemblée générale engagerait instamment tous les États touchés par le problème des mines à veiller, conformément au droit international applicable, à identifier toutes les zones sous leur juridiction ou leur contrôle où se trouvent des mines ou des restes explosifs de guerre, de la manière la plus efficace possible, et à recourir, pour la remise à disposition des terres, à des techniques telles que le repérage technique et non technique et le déminage. Elle demanderait instamment aux États de fournir une aide humanitaire aux victimes et de prendre des mesures pour que la population civile soit épargnée, conformément au droit international humanitaire. Elle estime important de mentionner expressément la lutte antimines dans les accords de cessez-le-feu et les accords de paix, ainsi que dans les mandats des opérations de maintien de la paix et des missions politiques spéciales.