En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dixième session,
21e séance – après-midi
CPSD/599

Quatrième Commission: l’UNRWA, l’Office des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens réclame un « financement consolidé, prévisible et pluriannuel »

L’aide à un réfugié palestinien coûte sept fois plus cher en Europe qu’en Syrie, a prévenu aujourd’hui devant la Quatrième Commission chargée des questions politiques spéciales, le Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA).  M. Pierre Krähenbühl, qui présentait son rapport annuel d’activité, s’est livré à un vibrant plaidoyer pour que son Office bénéficie d’un « financement consolidé, prévisible et pluriannuel ».

Le Commissaire général a d’abord fait part du « profond sentiment de désespoir et d’insécurité » des réfugiés palestiniens qui se sentent, plus d’un an après la guerre de l’été 2014, « plus abandonnés que jamais ».  M. Krähenbühl a par exemple déclaré que « les conditions déplorables imposées à la population de Gaza, dont la moitié sont des enfants, ne peuvent être décrites que comme immorales, intenables et compromettant la sécurité et les droits des États et des peuples de la région ». 

La situation actuelle, a-t-il alerté, a créé une nouvelle crise existentielle où, quand cela est possible, la fuite dans la région ou vers l’Europe, devient le premier choix des réfugiés palestiniens, en particulier ceux qui vivent en Syrie.  Or, aider un réfugié palestinien en Europe coûte sept fois plus cher qu’en Syrie, a prévenu le Commissaire général.  À ce jour, l’UNRWA n’a reçu que la moitié des 420 millions de dollars qu’il avait demandés pour 2015.

L’été dernier, faute de fonds, « des mesures douloureuses et difficiles » ont dû être prises, avant que ne soient trouvés les 101 millions de dollars nécessaires à l’ouverture des écoles de l’UNRWA après les vacances d’été, a rappelé le Commissaire général.  Cette « véritable alerte » a montré qu’il faut prendre des mesures sérieuses pour offrir à l’Office une assise financière plus solide et combler, cette année, un déficit ramené de 131 millions à 81 millions.

Le Commissaire général a plaidé pour « un financement consolidé, prévisible et pluriannuel », entre autres de la part « des anciens amis » dont l’absence se fait ressentir et des pays du Golfe.  Depuis 2013, a fait valoir la représentante saoudienne, mon pays a débloqué 350 millions de dollars et signé avec l’UNRWA un accord en vue du versement d’une somme de 11 millions de dollars pour les travaux de reconstruction à Gaza.  Avec l’Arabie saoudite, la Suisse, a dit son représentant, a été l’un des pays qui s’est porté au chevet de l’Office lorsqu’il a traversé « la crise la plus grave de son histoire » et risqué de rater l’année scolaire.  Il importe maintenant, a estimé le représentant, de trouver une solution durable afin d’éviter que de tels épisodes ne se reproduisent chaque année.  Il a promis une contribution suisse de 21 millions de dollars au Fonds général de l’Office.

La Suisse, a-t-il ajouté, continuera de financer le processus de réforme, en particulier les efforts pour développer une stratégie de mobilisation des ressources permettant à l’Office d’élargir le cercle de ses donateurs et d’améliorer sa stabilité financière.  Il faut, en effet, trouver d’autres voies pour assurer la viabilité de l’Office, a encouragé le représentant de l’Union européenne qui a salué d’ores et déjà les mesures prises sous la houlette du Commissaire général.  En dépit de la crise économique et financière qu’elle traverse, a-t-il souligné, l’Union européenne reste le principal donateur de l’Office couvrant environ 33% des coûts globaux. 

Avec les 5,5 millions de réfugiés palestiniens dont il s’occupe, l’UNRWA prend en charge depuis 65 ans, 44% des réfugiés à long terme dans le monde.  L’Office, s’est enorgueilli son Commissaire général, est un bon exemple de la manière de mettre l’action humanitaire et le développement sous « un même toit », une de ses forces étant qu’il a les institutions et les structures –écoles, centres de santé, entrepôts, immeubles administratifs- construites, il y a 65 ans pour répondre aux besoins d’urgence et assurer les services sociaux de base, y compris pendant les crises.

Les besoins des 58 camps de réfugiés de l’UNRWA sont réels et ce sont les rêves d’une génération pour la justice, la dignité et la liberté qui sont en jeu, a souligné l’observatrice de l’État de Palestine qui a pris la parole aux côtés d’une dizaine d’autres délégations.

La Quatrième Commission achèvera son débat demain, mardi 10 novembre.

OFFICE DE SECOURS ET DE TRAVAUX DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS DE PALESTINE DANS LE PROCHE-ORIENT

Déclaration liminaire du Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) (A/70/13, A/70/13/ADD.1)

M. PIERRE KRÄHENBÜHL, Commissaire général de l’UNRWA, a tenu à transmettre « le profond sentiment de désespoir et d’insécurité » des réfugiés palestiniens mais aussi « le courage, la détermination et la force extraordinaires » qu’il a vus tant de fois dans ses déplacements et ses réunions.  C’est la raison pour laquelle, a-t-il souligné, l’UNRWA assume son rôle avec un profond sentiment de responsabilité à l’égard des 5,2 millions de réfugiés palestiniens en Cisjordanie, à Jérusalem-est, à Gaza, en Jordanie, au Liban et en Syrie.  Un an après la guerre de l’été 2014 à Gaza, a-t-il prévenu, les réfugiés palestiniens se sentent « plus que jamais abandonnés ».  Leur vulnérabilité et leur isolement ont atteint un niveau jamais égalé en plusieurs générations dans un Moyen-Orient frappé par des conflits qui poussent une communauté après l’autre dans l’insécurité la plus totale. 

La situation actuelle a créé une nouvelle crise existentielle où, quand cela est possible, la fuite dans la région ou vers l’Europe, devient le premier choix, a expliqué M. Krähenbühl.  Il faut, a-t-il dit, faire le lien entre les réfugiés palestiniens, l’UNRWA et les Objectifs de développement durable.  Ces Objectifs ne seront qu’une aspiration lointaine, tant que les réfugiés palestiniens seront les victimes d’un conflit non réglé qui a volé leurs droits fondamentaux depuis 67 ans, même si, en termes d’accès à une éducation de qualité et inclusive, les enfants réfugiés ont bien réussi. 

Depuis sa création, il y a 65 ans, l’UNRWA a en effet misé sur l’éducation en tant que fondement du développement humain.  Pourtant, l’été dernier, faute de fonds, « des mesures douloureuses et difficiles » ont dû être prises, avant que les 101 millions de dollars nécessaires permettent l’ouverture à temps des écoles.  La situation de l’été dernier était « une véritable alerte » qui montre qu’il faut prendre des mesures sérieuses, dans la coopération et des efforts collectifs, pour offrir à l’Office d’avoir une assise financière plus solide.  L’Office a assumé sa part de responsabilité et entend prendre d’autres mesures afin de mieux contrôler les coûts tout en maximisant l’impact de ses modestes ressources, a annoncé le Commissaire général. 

En conséquence, pour 2016, le déficit budgétaire initialement estimé à 135 millions de dollars tombe à 81 millions, une épargne sans précédent de 50 millions pour maintenir un budget à croissance zéro.  Même avec un contrôle plus strict des dépenses, il faudra des ressources supplémentaires pour combler le déficit, a expliqué le Commissaire général.  Les donateurs traditionnels qui assurent 85% des ressources de base nous demandent d’être novateurs et de trouver de nouvelles sources de financement, a-t-il noté.  À ce propos, il a souhaité que le projet de l’UNRWA soit l’un des premiers projets pilote à prouver le potentiel du « zakat » islamique au Sommet humanitaire mondial d’Istanbul en mai 2016.  Mais, a-t-il précisé, nous aurons besoin de l’appui des donateurs, dont la Banque mondiale, pour ouvrir de nouvelles fenêtres de financement.

Notre financement dépendra toujours des États Membres desquels nous attendons des financements consolidés, prévisibles et pluriannuels.  Le Commissaire général a, entre autres, jugé important de consolider les efforts déployés récemment par les donateurs du Golfe qui doivent au moins maintenir le niveau de leurs contributions.  Il aussi espéré pouvoir compter sur le retour « des anciens amis » dont l’absence se fait clairement ressentir.  Pour M. Krähenbühl, la viabilité financière de l’Office est une « responsabilité collective » et cela jusqu’à ce qu’une solution durable soit trouvée au sort des réfugiés palestiniens.

Insistant sur le programme « éducation » de l’Office, le Commissaire général a indiqué qu’en Syrie, 49 des 118 écoles ont été endommagées depuis 2011; seules 42 d’entre elles demeurant opérationnelles.  Au Liban, une des écoles a été prise par des groupes extrémistes armés à Ein el-Hiweh et à Gaza, pendant les hostilités de l’été dernier, 83 écoles ont été touchées directement ou indirectement par les frappes militaires israéliennes, y compris sept qui servaient d’abris. 

Pour M. Krähenbühl, l’éducation reste l’un des facteurs clefs de l’espoir et de la résilience de la jeunesse palestinienne et, par conséquent, il faut tout faire pour leur garantir l’accès à l’éducation.  Il s’agit d’un investissement dans la prévention contre la radicalisation.

M. Krähenbühl a ensuite passé en revue la situation spécifique des cinq territoires où opère l’Office.  À Gaza où 1,3 million de réfugiés palestiniens, soit deux tiers de la population totale, vit dans des conditions difficiles, « le blocus illégal » est toujours en place.  Dans cette « punition collective », 893 000 personnes dépendent de l’aide alimentaire, soit 11 fois plus qu’il y a 15 ans, le taux de chômage a atteint 42%, soit le plus haut du monde, et celui des jeunes réfugiés, 70%.  En 2014, l’économie de Gaza s’est « dé-développée » avec une croissance négative de 15%; le PNB par habitant n’atteignant que 72% du ratio de 1994.  Après avoir insisté sur la lenteur de la reconstruction de Gaza, le Commissaire général tranché: « les conditions déplorables imposées à la population de Gaza, dont la moitié sont des enfants, ne peuvent être décrites que comme immorales, intenables et compromettant la sécurité et aux droits des États et des peuples de la région ».  

En Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, la vague de violence et de protestation récente a eu un impact direct sur les Palestiniens dont 71 sont morts et plus de 7 500 blessés depuis le 1er octobre.  Pendant la même période, on a compté 8 parmi les Israéliens et 126 blessés, a rappelé le Commissaire.   Partageant l’opinion du Vice-Secrétaire général de l’ONU, il a affirmé que cette crise n’aurait pas eu lieu si le peuple palestinien avait une perspective d’espoir de voir un État palestinien viable, une économie créatrice d’emplois et d’opportunités, un contrôle sur les processus juridique et administratif et la fin d’une occupation paralysante et humiliante qui dure depuis près d’un demi-siècle. 

Le Commissaire général s’est dit choqué par cette violence qui affecte Israéliens et Palestiniens, le recours à une force meurtrière contre les Palestiniens, celui accru des balles réelles dans et autour des camps de réfugiés, l’extension des colonies de peuplement, la violence des colons à l’encontre des réfugiés palestiniens et les déplacements forcés des réfugiés après les démolitions et les destructions.

Passant à la situation en Syrie, M. Krähenbühl a indiqué que 450 000 réfugiés palestiniens, soit 80% du nombre avant la guerre, vivent toujours sur place, dépendant presque tous de l’aide de l’UNRWA.  L’Office estime que 58 000 de ces réfugiés ont fui au Liban et en Jordanie et 52 000 vers l’Europe, l’Asie et les États-Unis, certains mourant en cours de route. 

Pour lui, la capacité de l’Office à leur venir en aide a décidé les réfugiés à rester en Syrie.  Il est par conséquent essentiel de financer l’UNRWA, ses services d’urgence et son programme « éducation».  Il a affirmé qu’il coûte sept fois plus cher d’aider un réfugié palestinien en Europe qu’en Syrie, avant de rappeler que seuls 50% des 420 millions de dollars que l’Office a demandés en 2015 pour la Syrie ont été reçus.  Maintenant que l’hiver approche, les fonds doivent arriver au plus vite.

Avant de passer à la situation au Liban, M. Krähenbühl a rendu hommage aux 14 membres du personnel de l’Office et aux 28 autres qui ont été portés disparus ou emprisonnés en Syrie.  « Aucun autre organisme international n’a connu de telles pertes en Syrie et je ne connais pas beaucoup d’autres organisations qui continueraient à y travailler dans de telles circonstances », a remarqué le Commissaire général.

Au Liban, le statut et les opportunités de travail des réfugiés palestiniens qui y vivent n’ont pas changé.  Les 42 000 réfugiés palestiniens supplémentaires venus de Syrie se sont installés autour des 12 camps de réfugiés et ont besoin d’une aide d’urgence.  Dans de telles conditions, où 90% d’entre eux vivent dans la précarité la plus totale, ils risquent soit de retourner en Syrie, malgré les dangers, soit de tenter la fuite vers l’Europe, a averti M. Krähenbühl.

Abordant également la situation en Jordanie, il a rappelé que ce pays accueillait le plus grand nombre de réfugiés palestiniens, doit 2,1 millions, et 16 000 réfugiés supplémentaires venant de Syrie. 

En conclusion, le Commissaire a recadré les défis posés à l’Office dans une perspective plus large.  Pour lui, la crise financière de cet été est symptomatique d’une crise existentielle plus large du système humanitaire mondial à savoir « qu’on ne peut plus faire face à la demande croissante; les ressources offertes par la communauté des donateurs n’arrivent pas à suivre les besoins sur le terrain ».

Pour sa part, l’UNRWA s’occupe depuis 65 ans, de 44% des réfugiés à long terme dans le monde.  Il est un bon exemple de la manière de mettre le financement humanitaire et le développement sous « un même toit », une de ses forces étant qu’il a les institutions et les structures –écoles, centres de santé, entrepôts, immeubles administratifs- construites, il y a 65 ans pour répondre aux besoins d’urgence et assurer les services sociaux de base, y compris pendant les crises.  L’Office appuie pleinement les efforts de Jemilah Mahmood et son équipe pour identifier les moyens de calibrer autrement et de rééquiper le système humanitaire mondial.

M. Krähenbühl n’a pas manqué de reconnaître que l’Office travaille dans un environnement tendu fait d’émotions.  Répondant aux allégations sur des déclarations inappropriées qu’auraient faites certains membres de son personnel, le Commissaire général a condamné toute forme d’antisémitisme et de racisme.  Nous traitons toutes les allégations avec sérieux, a-t-il dit.  N’oublions pas, a conclu le Commissaire général, que l’injustice historique à laquelle le monde a soumis des générations et des générations de Palestiniens n’a jamais été réparée.  Malheureusement, un règlement politique n’a jamais paru ni aussi éloigné ni aussi urgent, maintenant que des pans entiers du Moyen-Orient sombrent dans le chaos. 

Dialogue interactif

Après cette intervention, la Turquie a reconnu que le déficit budgétaire de l’Office constitue un défi majeur.  Par quels autres moyens, les pays pourraient-ils apporter leur concours?  Le système des contributions volontaires ayant montré ses limites, a commenté l’Iran, quelles sont les mesures envisagées par le Secrétaire général?  N’oublions pas que l’UNRWA a été créée par l’Assemblée générale, a souligné l’Indonésie.

Le Pakistan est revenu sur la situation et, prenant note de l’Accord tripartite, a estimé que celui-ci ne saurait en aucune manière remplacer la levée du blocus et l’indemnisation des populations.  Que fait l’UNRWA pour les victimes palestiniennes des pratiques israéliennes? a d’ailleurs demandé l’Égypte.  Les autorités et les responsables du Ministère israélien des affaires étrangères ont des contacts réguliers avec l’UNRWA, a précisé Israël.  Qu’en est-il des réfugiés palestiniens en Syrie? s’est interrogée l’Algérie.  Quelles sont les mesures spécifiques prises pour protéger le personnel de l’UNRWA? s’est inquiétée l’observatrice de l’État de Palestine.  

Depuis le début du conflit en Syrie, l’UNRWA a perdu 14 membres de son personnel mais le rapport du Commissaire général ne pointe du doigt aucune faction, aucun groupe ni aucun individu, a dit avoir remarqué Israël.  Rien n’est dit sur le « carnage en Syrie », a-t-il insisté en condamnant « les paroles de louanges » adressées au « régime de Bashar Al Assad ».  Quand on écoute le Commissaire général, on a l’impression que la catastrophe généralisée en Syrie est une « catastrophe naturelle », a accusé celui qui a aussi dénoncé le fait que le rapport ne mentionne pas le Hamas.

Le Commissaire général de l’UNRWA a, s’agissant du financement, signalé le début d’un dialogue avec plusieurs pays, dont la Chine et la République de Corée.  Il a insisté sur la prévisibilité des fonds, indiquant qu’il y eu un véritable dialogue avec le Cabinet du Secrétaire général sur cette question qui est également à l’examen à la Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires.  Quant à la sécurité du personnel, une évaluation a été menée à Gaza et le fait est que le personnel local n’est pas couvert par le Département de la sécurité de l’ONU.

Répondant ensuite à Cuba, le Commissaire général a expliqué qu’il y eu deux phases dans le fonctionnement du mécanisme pour la reconstruction de Gaza, une première difficile puis une autre plus efficace, mais tant que l’appel de fonds ne sera couvert qu’à 45%, les choses iront lentement parce que « le financement est le nerf de la guerre ».   Le budget de l’Office est en moyenne de 1,2 milliard de dollars et comme il travaille sur le long terme, il doit pouvoir compter sur des financements prévisibles pluriannuels, a insisté le Commissaire général qui a répondu aux remarques d’Israël.  Le rapport de cette année, a-t-il estimé, est bien plus complet que celui de l’an dernier.  Aucune enquête n’a clairement établi la responsabilité du Hamas dans l’affaire des armes trouvées dans les écoles de Gaza, a-t-il ajouté, en assurant que l’UNRWA n’a aucun problème à parler du Hamas si les circonstances l’exigent. 

La communauté internationale, a commenté l’observatrice de l’État de Palestine, doit exiger d’Israël qu’il respecte ses obligations en vertu du droit international et des résolutions pertinentes de l’ONU.  On ne saurait tolérer plus longtemps que ce pays empêche la paix, sans conséquence aucune.  L’observatrice a réaffirmé le droit au retour des réfugiés palestiniens et leur droit à la compensation pour les pertes endurées.  Elle s’est ensuite livrée à un vibrant plaidoyer en faveur de l’UNRWA, demandant à son tour un financement prévisible et suffisant

Pour l’examen de ces questions, la Commission était aussi saisie du Rapport du Groupe de travail chargé d’étudier le financement de l’UNRWA (A/70/379) et des Rapports du Secrétaire général sur les personnes déplacées du fait des hostilités de juin 1967 et des hostilités postérieures (A/70/308), les biens appartenant à des réfugiés de Palestine et produit de ces biens (A/70/308) et la Commission de conciliation des Nations Unies pour la Palestine (A/70/319).

Débat général

Au nom du Mouvement des pays non alignés, M. HOSSEIN MALEKI (République islamique d’Iran) a déclaré que l’UNRWA avait fait un travail remarquable dans tous les domaines de ses opérations, compte tenu notamment de la situation extrêmement difficile à laquelle elle se heurte depuis 2014 dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.  Il a salué les efforts du personnel de l’Office, dont 18 ont perdu leur vie, principalement l’été dernier à Gaza.  Il a aussi dit apprécier les efforts inlassables du Commissaire général, M. Pierre Krähenbül, pour répondre aux besoins et alléger les souffrances des réfugiés.

Citant le rapport du Commissaire général, il a rappelé que les réfugiés continuent de faire face à de graves défis et qu’ils s’enfoncent chaque fois plus dans la pauvreté et le désespoir.  « Cette situation désastreuse », a-t-il commenté, a été aggravée et exacerbée par le conflit armé en Syrie.  Après avoir décrit les effets dévastateurs du blocus israélien de Gaza, et les entraves à l’assistance humanitaire, à la reconstruction de dizaines de milliers d’habitations détruites et à la relance socioéconomique, le représentant a exhorté les autorités israéliennes à lever immédiatement les restrictions à la liberté de mouvement et à l’accès humanitaire, de même que le blocus de Gaza.

Il a appelé la communauté internationale à assumer ses responsabilités « morales, politiques et juridiques » pour faire cesser les politiques israéliennes illégales et toutes les violations des droits des Palestiniens.  Il a en outre appelé Israël « Puissance occupante », à respecter ses obligations en vertu de la quatrième Convention de Genève et des résolutions pertinentes des Nations Unies, en particulier la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité.  Il a exprimé, par ailleurs, ses inquiétudes face à la situation des réfugiés palestiniens en Syrie et les difficultés engendrées par les déplacements, qui les ont fait fuir vers d’autres pays.  Il a vivement encouragé les bailleurs de fonds à répondre aux appels urgents de l’UNRWA.  Constatant le déficit de l’UNRWA, il a encouragé tous les donateurs à « faire les efforts les plus généreux possibles » afin de répondre à une grave situation financière.      

Au nom du Groupe des États arabes, Mme MANAL RADWAN (Arabie saoudite) a félicité le Commissaire général pour la clarté de son rapport et la description exhaustive de ce que subissent, au quotidien, les réfugiés palestiniens.  L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït et d’autres pays arabes ont fourni rapidement des contributions substantielles pour remédier à une situation préoccupante, a souligné le représentant.

Si l’UNRWA doit poursuivre sa tâche « cruciale », a-t-il dit, il est temps qu’Israël mette fin à l’occupation et, surtout, cesse de détruire tout ce qui est reconstruit dans les territoires occupés illégalement.  Les différents incidents où des colons ont tué tous les membres d’une famille palestinienne sont « insupportables », s’est-elle révoltée, s’érigeant également contre l’utilisation de balles réelles contre de jeunes palestiniens en Cisjordanie.  Elle a fustigé les déplacements forcés et l’incapacité évidente d’Israël d’assurer la protection des Palestiniens.

La représentante a fait valoir le droit au retour des réfugiés, avec indemnisation pour tous les dommages subis.  La crise avec Israël ne cessera qu’avec la fin de l’occupation, a-t-elle tranché, exigeant un retrait aux frontières de 1967 et l’indépendance effective du peuple palestinien par la création de son propre État souverain.

Depuis 2013, a fait valoir la représentante, l’Arabie saoudite a débloqué une somme de 350 millions de dollars et signé avec l’UNRWA un accord en vue du versement d’une somme de 11 millions de dollars pour couvrir le coût des travaux de reconstruction, en particulier des établissements scolaires et l’aide humanitaire.  Les efforts colossaux déployés par l’UNRWA depuis plus de 65 ans exigent de la communauté internationale qu’elle l’appuie et qu’elle fasse tout pour la création d’un État palestinien, avec Jérusalem-Est pour capitale, a-t-elle conclu.

Au nom de l’Union européenne, M. ROBERTO STORACI a salué le travail remarquable de l’UNRWA et le dévouement de son personnel qui, tous les jours, travaille dans des conditions dangereuses.  Il a souligné la responsabilité de tous les États de protéger les travailleurs humanitaires.  Pour lui, la réunion de septembre dernier sur la viabilité financière de l’Office a pris un autre sens au lendemain de la crise financière de cet été qui avait failli se solder par la fermeture des écoles de l’UNRWA.  Soulignant que l’éducation est une source de dignité et d’espoir, il s’est félicité ce que cette crise « grave » ait pu être évitée grâce à la générosité de nombreux donateurs.

Il faut maintenant agir dans le long terme et permettre à l’Office de s’acquitter de son mandat avec des risques minimaux.  Il s’agit d’une responsabilité collective vis à vis de l’Office et des refugiés qu’il sert.  À cet égard, le représentant a appelé tous les nouveaux bailleurs de fonds à apporter leur pierre à l’édifice.  La stratégie à moyen terme 2016-2021 montre que l’UNRWA ne peut répondre seul aux besoins des cinq millions de réfugiés.  Elle montre aussi que l’Office est un partenaire privilégié dans la région.  En dépit de la crise économique et financière qu’elle traverse, l’Union européenne reste le principal donateur de l’Office et couvre environ 33% des coûts globaux de ses opérations, a-t-il rappelé.  Il faut, a-t-il souligné, trouver d’autres voies pour assurer la viabilité de l’Office à plus long terme et l’Union européenne salue d’ores et déjà les mesures prises sous la houlette du Commissaire général.

Le représentant a fait part de la préoccupation de l’Union européenne face à la situation socioéconomique et humanitaire à Gaza laquelle reste affligeante, un an après la guerre.  Il a appelé à la fin du bouclage et plaidé pour la réconciliation intrapalestinienne.  L’Autorité palestinienne doit pouvoir assumer pleinement les fonctions gouvernementales.

M. Storaci n’a pas oublié le prix payé par les réfugiés palestiniens en Syrie.  Il a salué les efforts importants des pays voisins qui font face à l’afflux de réfugiés, y compris palestiniens, et a appelé le « régime de Bashar Al Assad » à pleinement appliquer les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Pour l’Union européenne, l’UNRWA joue un rôle indispensable et, en attendant une solution juste, globale et consensuelle à ce conflit, il reste indispensable et, à ce titre, il pourra compter sur le soutien de l’Union européenne.

Mme DINA KAWAR (Jordanie) a signalé que lors de la création de l’UNRWA, le nombre de réfugiés était de 700 000 et l’on pensait que leur situation serait rapidement réglée.  Aujourd’hui leur nombre s’élève à plus de 5,5 millions, a-t-elle noté, en lançant à l’adresse des États Membres: quand nous sommes-nous égarés?  La communauté internationale ne pourrait se cacher derrière des questions financières pour ne pas assumer ses responsabilités « morales et juridiques ».  On ne saurait politiser la question des réfugiés et il est impératif que la fourniture des services de base se poursuive.  L’assistance humanitaire à la population civile de Gaza est essentielle, a insisté la représentante, notant, à son tour, que la crise financière de l’UNRWA a failli affecter la rentrée scolaire d’environ un demi-million d’enfants.  Elle a appelé à une nouvelle méthodologie pour la mobilisation de l’appui à l’UNRWA afin de combler le déficit financier.  L’Office est un partenaire stratégique « incontournable » en Jordanie qui accueille deux millions de réfugiés palestiniens, soit 42% de la population enregistrée, à laquelle s’ajoutent les réfugiés fuyant la Syrie.  La Jordanie, a conclu la représentante, maintiendra son appui mais insiste sur le fait que la véritable solution viendra de la création d’un État palestinien indépendant.  

M. CHARBEL WEHBI (Liban) a pris note des efforts drastiques entrepris depuis 2006 pour réformer l’Office et souhaité une intensification de la levée de fonds afin de renforcer sa structure financière et la prévisibilité de ses ressources.  Seul un UNRWA fort peut apporter la stabilité dans la vie des réfugiés palestiniens, en attendant une solution juste et définitive à la question de la Palestine, conforme aux principes du droit international et aux résolutions des Nations Unies.  Travaillant en étroite collaboration avec l’UNRWA, le Liban accueille environ 400 000 réfugiés palestiniens dans 12 camps, ce qui représente 10% de sa population, auxquels se sont ajoutés 45 000 réfugiés fuyant le conflit en Syrie.  Cette hausse du nombre de réfugiés ajoutée au manque de ressources financières, à des services de santé sommaires, à de mauvaises conditions dans les écoles et autres infrastructures a exacerbé les tensions dans un environnement déjà fragile. 

Le Comité de dialogue libano-palestinien a tenté de faire face aux problèmes économiques et sécuritaires des camps mais les progrès à régler restent énormes.  Le représentant a mentionné la reconstruction du camp de Nahr el Bared, pour laquelle il manque 157 millions de dollars, pour héberger 26 000 réfugiés.  Il a lancé, à son tour, un appel aux donateurs pour qu’ils répondent aux besoins humanitaires des réfugiés soutenus par l’UNRWA.

M. GEIR O. PEDERSEN (Norvège) a rappelé que l’UNRWA célèbre son soixante-cinquième anniversaire cette année, ce qui correspond au nombre d’années de souffrances des réfugiés palestiniens.  Il s’est dit vivement préoccupé par l’escalade récente de la violence en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, y compris dans les camps de réfugiés, ce qui ne pourra qu’affecter davantage la capacité de l’UNRWA à répondre aux besoins des réfugiés.  Au milieu des troubles régionaux, l’UNRWA joue un « rôle pivot dans la stabilisation de la situation sur le terrain ».  Le représentant a relevé les limites des pays d’accueil et le manque criant de ressources, avant d’affirmer que la priorité est d’évaluer les besoins réels et d’aider l’UNRWA à ajuster ses programmes à la réalité changeante de la région.  Il a plaidé pour que, ce faisant, l’attention requise soit accordée aux groupes de réfugiés les plus vulnérables.

Dans cette optique, il s’avère urgent d’accélérer le processus de réforme de l’UNRWA et de prendre en compte les aspects de transparence, de contrôle et de redevabilité.  Il a exhorté les donateurs à fournir des contributions prévisibles et adaptées aux besoins financiers.  M. Pedersen a salué, en outre, les efforts de l’Office pour la reconstruction du camp de Nahr el-Bared au Liban, ce qui contribue à « mettre fin à la misère d’un grand nombre de personnes déplacées ».  Il a insisté pour que les donateurs apportent des financements à cet effort et facilitent le retour des déplacés du camp.   

M. IHAB HAMED (République arabe syrienne) a cité le médiateur des Nations Unies qui disait, il y a quasiment 70 ans, que la situation des réfugiés était « passagère ».  Depuis, les droits, la dignité et le statut même de réfugiés sont niés aux Palestiniens par Israël, alors que leur nombre actuel a dépassé les 5,5 millions.  Le représentant a passé en revue les multiples destructions et exactions israéliennes, avant de faire valoir le droit au retour des Palestiniens « aussitôt que possible », expression a–t-il tenu à ironiser, utilisée depuis maintenant 70 années.

Bien que le personnel de l’UNRWA soit sciemment ciblé par les forces israéliennes, y compris ses bureaux et ses écoles, l’Office continue à s’ingénier à trouver des solutions pour assister les réfugiés palestiniens.  La Syrie, de son côté, accueille depuis plusieurs décennies beaucoup de ces réfugiés, en leur offrant l’accès à l’éducation, à la santé et à l’emploi.  La question qui se pose aujourd’hui est de savoir ce qu’il est arrivé aux réfugiés palestiniens en Syrie, a-t-il demandé, répondant que ceux-ci fuient les attaques des groupes terroristes comme Daech.  Il a aussi dénoncé les mesures coercitives unilatérales imposées par l’Union européenne à la Syrie, lesquelles ont des répercussions directes sur les réfugiés palestiniens.  Le délégué a assuré, en revanche, de l’appui de son gouvernement aux réfugiés et a appelé à leur juste indemnisation, dans le cadre de leur retour.  Il a prié les États Membres qui se font complices des terroristes en leur fournissant des sommes exorbitantes pour accomplir leurs forfaits inhumains, de cesser de le faire de sorte que l’UNRWA ne pâtisse plus d’un si grand déficit budgétaire.

M. OLIVIER ZEHNDER (Suisse) a noté que l’environnement dans lequel intervient l’URNWA demeure extrêmement difficile étant donné la détérioration continue de la situation sécuritaire, politique et socioéconomique régionale, les réfugiés de Palestine se trouvant particulièrement affectés du fait de leur grande vulnérabilité et marginalisation.  M. Zehnder a insisté sur le fait que l’Office joue un rôle clef pour répondre à des besoins croissants et offrir une « forme de stabilité à cette population ».  Un « UNRWA fort et efficace est dès lors essentiel », a-t-il souligné, ajoutant que cette année, l’Office a « traversé la crise la plus grave de son histoire », l’ensemble de ses écoles ayant risqué de ne pas rouvrir après les vacances estivales en raison du « déficit sans précédent » enregistré par le Fonds général.  Le problème a pu être résolu, in extremis, grâce à la générosité de nombreux donateurs parmi lesquels la Suisse, a-t-il fait remarquer, ajoutant qu’il « importe maintenant de trouver une solution durable afin d’éviter que de tels épisodes ne se reproduisent chaque année ».

Le représentant a déploré les conséquences du conflit en Syrie pour la population civile, y compris les réfugiés palestiniens, dont 95% dépendent de l’aide humanitaire fournie par l’UNRWA.  Pour la Suisse, l’absence d’un réel processus de paix entre Palestiniens et Israéliens « n’est pas tenable » et accroît la vulnérabilité des réfugiés de Palestine.  Ainsi, le bouclage de Gaza, entré dans sa neuvième année, et l’intensification des violences en Cisjordanie, les rendent encore plus dépendants de la protection et des services de l’UNRWA.  Dans ce contexte, l’Office a plus que jamais besoin de moyens suffisants et prévisibles pour remplir la mission que lui ont confiée les Nations Unies.  Le représentant a encouragé les donateurs à se concentrer en priorité sur le Fonds général et a annoncé que la Suisse augmentera sa contribution régulière en 2016 à 18,5 millions de francs suisses en même temps qu’elle s’engage à apporter une contribution totale de 21 millions de francs.  Le représentant a enfin déclaré que son pays continuera de financer le processus de réforme, en particulier les efforts de développement d’une stratégie de mobilisation des ressources permettant à l’Office d’élargir le cercle de ses donateurs et d’améliorer sa stabilité financière.  

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