Le Comité spécial des opérations de maintien de la paix achève son débat général au terme d’une journée marquée par des interrogations sur la notion de la protection des civils
Les délégations ont rappelé le rôle et les prérogatives uniques du Comité des 34, qui fêtait aujourd’hui son cinquantième anniversaire, en matière d’opérations de maintien de la paix
Au cours de la deuxième journée du débat général du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, encore dénommé « Comité spécial des 34 » ou « C-34 », les participants à cette session ont relevé la complexité et le vide juridique qui entourent la notion de « protection des civils » par les opérations de maintien de la paix des Nations Unies.
Les intervenants au débat ont unanimement reconnu que la protection des civils est de la plus grande importance dans le déroulement des opérations de maintien de la paix (OMP). Les soldats de la paix devraient donc, quand le besoin s’en fait sentir, s’atteler à cette tâche, surtout quand elle fait partie du mandat assigné à la mission au sein de laquelle ils évoluent et quand la vie des populations civiles est clairement mise en danger par les belligérants.
Mais pour ce faire, ont souligné certaines délégations, il est important que l’on garde à l’esprit l’obligation de respecter les trois grands principes énoncés par la Charte des Nations Unies et régissant les OMP que sont le consentement des parties, l’impartialité, et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou d’action visant à assurer la protection de la mise en œuvre du mandat de la mission.
Le représentant de la République arabe syrienne a relevé que la Charte de l’ONU met l’accent sur l’obligation de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des États, et il a estimé qu’il serait indispensable que le pays hôte d’une OMP donne son consentement à l’ONU avant que l’Organisation n’envisage de donner le feu vert à une quelconque intervention étrangère sur le territoire de l’État concerné. La protection des populations civiles, a rappelé le représentant, incombe en premier lieu à l’État. Il a aussi souligné que l’importance de la protection des civils ne saurait servir de prétexte à des ingérences étrangères dans les affaires intérieures d’un pays connaissant un conflit, surtout, a-t-il estimé, quand le but inavoué de ces ingérences est de modifier les réalités politiques d’un pays et le cours de son histoire en y provoquant un changement de régime.
Face à ce que de nombreux intervenants ont taxé de « tendance à utiliser la protection des civils comme prétexte pour justifier des interventions militaires », des délégations ont appelé à l’adoption d’une définition claire et légalement admise de la qualité de civil dans le contexte des conflits. D’autres participants au débat se sont inquiétés de la tendance croissante du Conseil de sécurité à autoriser les troupes déployées au sein des OMP à recourir à la force, ce qui crée « une situation qui rend de plus en plus floue la limite entre le maintien de la paix et l’imposition de la paix ». « Cette ambiguïté porte atteinte à la crédibilité de l’Organisation des Nations Unies », ont jugé de nombreuses délégations, « parce qu’elle donne l’impression que l’ONU a un parti pris sur le terrain et favorise un des belligérants aux dépens des autres ».
Dans ce contexte, le représentant du Japon a averti que si les missions de maintien de la paix s’impliquent dans des conflits qu’elles sont censées aider à résoudre, cette attitude constitue une violation et une déviation commises envers les principes de base des OMP, qui sont énoncés dans la Charte. Son homologue du Venezuela a pour sa part déploré la tendance, qui s’est développée au sein des Nations Unies, à « choisir des solutions militaires pour résoudre les conflits, et cela en élaborant des mandats toujours plus offensifs sur le plan militaire et à les confier aux OMP ». Il a souligné que les OMP font partie d’un ensemble de mesures mises à la disposition des décideurs, et que d’autres mesures comme la diplomatie préventive et la médiation sont aussi disponibles et devraient être mises en œuvre.
Un certain nombre d’intervenants ont par ailleurs exprimé des réserves vis-à-vis de l’usage croissant par les missions de maintien de la paix de nouvelles technologies, notamment les drones. Si ces technologies permettent de garantir le succès des actions entreprises par les missions, il est tout de même légitime de s’interroger sur la confidentialité des données que récoltent ces drones, étant donné qu’ils sont opérés par des compagnies privées, ont mis en garde ces délégations. L’utilisation des nouvelles technologies, et notamment les drones, doit se faire dans le respect de la Charte des Nations Unies et de manière transparente, ont-elles insisté.
La cinquantaine d’intervenants qui ont participé au débat général du Comité spécial des 34 ont, pour la plupart, rappelé que le C-34 est le seul organe de l’ONU habilité à formuler des recommandations politiques et des stratégies en matière de maintien de la paix. Le Comité, qui célèbre aujourd’hui son cinquantième anniversaire, adopte ses recommandations à l’unanimité, ce qui leur confère une légitimité et une crédibilité certaines dans le domaine du maintien de la paix.
Le Comité spécial des 34 se réunira en groupe de travail plénier pour le reste de sa session de fond. Le 13 mars prochain, il devrait tenir sa dernière séance plénière publique afin d’adopter le rapport de ses travaux, qui sera présenté à l’Assemblée générale à sa soixante-neuvième session.
Suite du débat général (A/69/642, A/69/642/Add.1 et A/69/651)
M. KAIRAT ABDRAKHMANOV (Kazakhstan) a estimé que durant cette année 2015 marquée par la célébration du soixante-dixième anniversaire de l’Organisation des Nations Unies, les opérations de maintien de la paix (OMP) qui font partie des activités phares de l’ONU méritent également d’être modifiées dans le contexte du programme de développement pour l’après-2015. Il a relevé que le caractère multiforme des nouveaux mandats des OMP devrait intégrer l’approche genre, notamment en favorisant une plus grande implication des femmes à tous les niveaux des processus de résolution des conflits. Il a, par ailleurs, souligné que la notion de sécurité générale, combinant les activités civiles et militaires, fait appel à un large éventail d’expertise en ingénierie, en matière de droits de l’homme, ainsi que dans les domaines de la justice, du droit et du genre. Il a aussi relevé que de telles mutations en appellent à davantage d’investissements dans la médiation, la prévention des conflits, la consolidation de la paix, les questions économiques et sociales et le respect de l’état de droit et de la bonne gouvernance.
Mme KUNZANG C. NAMGYEL (Bhoutan) s’est félicitée du fait que le Bhoutan soit devenu un pays contributeur de troupes aux opérations de maintien de la paix (OMP) en 2014, notamment en mettant à la disposition de l’ONU des soldats et des forces de police qui sont aujourd’hui déployés notamment au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), à la Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL) et au sein de l’Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST). Elle a ensuite appelé à la fin des attaques contre les soldats de la paix, plaidant pour que les auteurs de ces actes soient poursuivis en justice. Elle a appelé aussi à la construction d’un mémorial, au Siège de l’ONU, en mémoire des soldats de la paix tombés aux cours d’OMP, et a estimé qu’un tel mémorial devrait être érigé pour honorer leur mémoire et apparaitrait ainsi comme étant la reconnaissance des services que ces soldats ont rendus pour le triomphe de la cause de la paix et de la sécurité internationales. « Nos soldats de la paix doivent être mieux préparés à se protéger », a-t-elle ensuite déclaré, souhaitant en outre qu’ils soient mieux équipés, dotés de technologies nouvelles et qu’ils bénéficient de l’apport d’information provenant des services de renseignements.
M. ABDULKALAM ABDUL MOMEN (Bangladesh) s’est félicité de l’évolution dynamique des mandats donnés aux opérations de maintien de la paix (OMP) qui sont exposés à des menaces croissantes et à des défis de plus en plus importants. Face à la complexité croissante des différentes situations de maintien de la paix, il a constaté la difficulté de mettre en œuvre des mandats de protection des civils. Il s’est félicité de la formation qui a été mise en place sous les auspices du Japon sur les stratégies à adopter pour la protection des femmes et des enfants et à laquelle ont pris part 34 Casques bleus issus de 16 pays. Il a jugé important que les Casques bleus disposent des ressources et de la formation nécessaires à la mise en œuvre des missions qui leur sont confiées. Il a regretté l’absence de planification à long terme et les divergences existant entre le Secrétariat et les sièges des missions de maintien de la paix en ce domaine. M. Momen a aussi regretté que les pays hôtes des missions ne font pas toujours ce qu’il faut pour favoriser le plein succès des OMP déployées sur leur sol. Il a dit le rôle essentiel joué par le Bangladesh en matière de maintien de la paix en précisant que son pays avait fourni 127 000 Casques bleus à 54 OMP, dont 118 ont payé de leur vie leur engagement en faveur de la paix.
Mme MWABA P. KASESE-BOTA (Zambie) a dit que son pays a participé à de nombreuses OMP et a mis un bataillon d’infanterie à la disposition de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). Elle a dit que la Zambie est soucieuse de promouvoir la protection des civils et s’est félicitée de l’initiative lancée par le Bureau des affaires militaires qui consiste à tenir plusieurs ateliers sur les principes directeurs en matière de protection des civils. Elle a demandé au Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) de mettre au point un programme qui permette de répondre aux questions émergentes et aux nouvelles menaces qui se posent à la protection des civils en mettant en place une formation adéquate à dispenser aux Casques bleus.
M. HIROSHI ISHIKAWA (Japon) a averti que si les missions de maintien de la paix sont impliquées dans des conflits qu’elles sont censées aider à résoudre, cette attitude constituera une violation et une déviation commises envers les principes de base des OMP énoncés dans la Charte, à savoir la neutralité, l’impartialité et le recours à la force seulement en cas de légitime défense. Il a aussi noté qu’une formation adéquate des troupes déployées est de la plus grande importance, et a ajouté que l’usage de technologies nouvelles peut s’avérer être un puissant outil permettant d’améliorer l’efficacité des missions de maintien de la paix. Dans ce contexte, M. Ishikawa a annoncé que le Japon va débourser 40 millions de dollars pour fournir des équipements militaires aux Nations Unies, et contribuer à la formation et à l’équipement des soldats de la paix africains.
M. RAFAEL RAMIREZ (Venezuela) a rappelé que les principes de la Charte des Nations Unies doivent servir de principes directeurs aux OMP. Il a aussi relevé que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix est le seul organe chargé de définir et évaluer les politiques relatives à toutes les OMP. « Nous avons constaté qu’au sein des Nations Unies, règne une tendance croissante à choisir des solutions militaires pour résoudre les conflits, et cela en élaborant des mandats toujours plus offensifs et à les confier aux OMP », a déclaré le représentant. « Nous devons nous demander si les OMP sont l’outil adéquat pour gérer les situations dans lesquelles il n’y a pas de menace à la paix », s’est interrogé M. Ramirez. Il a ensuite expliqué que les OMP font partie d’un ensemble de mesures mises à la disposition des décideurs, à côté d’autres mesures comme la diplomatie préventive et la médiation. Il a proposé qu’en cas de déploiement d’une mission de maintien de la paix, il faudrait que la prévention des conflits, le dialogue politique et la réconciliation, et le développement inclusif et durable, fassent partie du mandat de cette mission en plus des simples prérogatives militaires qui lui sont accordées.
Le représentant a par ailleurs relevé que la protection des civils est importante dans le cadre des OMP, mais qu’elle ne devrait pas constituer un élément allant à l’encontre de la mission première des OMP qui est de trouver des solutions aux conflits. Il a également mis en garde contre l’usage de la force pour protéger des civils dans un conflit où sont impliquées plusieurs parties adverses, expliquant que la crédibilité des Nations Unies s’en trouverait peut-être diminuée car l’utilisation de la force contre certaines parties prenantes pourrait être perçue comme un parti pris en faveur d’une faction adverse. Il a enfin salué l’usage croissant des technologies innovantes dans le cadre des OMP, mais s’est interrogé sur la confidentialité des données que récoltent par exemple les drones. Il s’est inquiété que ces outils technologiques nouveaux soient opérés par des compagnies privées.
M. MACHARIA KAMAU (Kenya) a souhaité que le Groupe indépendant de haut niveau sur les opérations de maintien de la paix (OMP) reçoive le plus grand appui possible afin que les OMP puissent faire de notre monde un monde meilleur. Il a demandé à l’ONU de garantir aux Casques bleus la souplesse et la liberté d’action dont ils ont besoin pour protéger les civils lorsque les situations exigent une telle protection et non pas seulement quand cela est voulu par les mandats. Il a estimé que les mandats de l’ONU ont souvent gêné les Casques bleus en limitant leur capacité d’initiative au lieu de leur donner la marge de manœuvre dont ils ont besoin sur le terrain. M. Kamau a dit que les pays fournisseurs de troupes ont la responsabilité de la formation des Casques bleus qu’ils mettent à la disposition de l’ONU avant le déploiement des missions. Il a demandé que l’évaluation de la formation soit intégrée dans les critères d’inspection des Nations Unies. Il a dit que l’emploi de drones a révolutionné le mode opérationnel des missions en permettant d’augmenter leur capacité de surveillance. « La perception que le Casque bleu n’est qu’un simple soldat doit être éliminée en rappelant à toutes les parties que les Casques bleus sont des professionnels à qui sont confiées des tâches multiples », a-t-il insisté. Il a dit qu’il est nécessaire de promouvoir une meilleure coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales, qui ont l’avantage de mieux connaitre l’environnement régional et comprennent mieux les dynamiques des conflits locaux.
M. OSCAR LEÓN GONZÁLEZ (Cuba) a jugé important que les États Membres parviennent, au sein du Comité spécial des 34 (C-34) à un consensus sur les concepts, politiques et stratégies applicables aux OMP ainsi qu’aux missions politiques spéciales. « Une approche par phase de la définition des mandats serait plus efficace », a estimé le représentant de Cuba en notant que les États Membres ne peuvent s’engager à fournir des contingents à l’ONU tant qu’il n’y a pas une vision claire de toutes les composantes d’une mission. Il a souligné la nécessité, pour l’ONU et le Conseil de sécurité, de consulter les pays fournisseurs de troupes à toutes les étapes de l’élaboration du mandat d’une OMP. Il est indispensable de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays hôtes des OMP, a-t-il ensuite rappelé.
Le représentant de Cuba s’est ensuite inquiété de la tendance croissante à autoriser les troupes déployées au sein des OMP à recourir à la force et a estimé que la limite entre le maintien de la paix et l’imposition de la paix devient de plus en plus floue. Il a prévenu que le recours à la force par l’ONU aura toujours ensuite des conséquences politiques. « L’histoire nous démontre que l’emploi de la force ne crée jamais de solution durable », a dit le représentant en jugeant que le développement économique et social était beaucoup plus important pour aider un pays en conflit à parvenir à une paix durable. Il a souligné l’importance de la diplomatie préventive et a dit que la protection des civils ne doit pas servir de prétexte pour mettre de côté les principes de la Charte ou imposer des changements de régimes.
M. FETHI METREF (Algérie) a relevé que les conflits auxquels le monde fait face aujourd’hui sont de plus en plus régionalisés, sinon internationalisés, en plus d’avoir une nature complexe qui intègre des questions humanitaires et socioéconomiques et se caractérisent bien souvent par l’implication de groupes armés terroristes. Il a ensuite noté que le Conseil de sécurité a, parmi ses prérogatives, la possibilité de revoir le mandat des missions de maintien de la paix et de les adapter à de nouvelles circonstances. Il a souhaité que cette option soit exercée pour toutes les missions, et non de manière sélective, et il a proposé que toutes les missions de maintien de la paix soient dotées d’un mandat concernant le suivi des violations des droits de l’homme.
Le représentant a en outre déploré le fait que les missions de maintien de la paix qui sont déployées dans des zones où sévissent des groupes terroristes manquent cruellement d’expertise en matière de contre-terrorisme, et il a cité en exemple le cas des OMP déployées au Sahel. Il a par ailleurs prôné une appropriation régionale des questions de maintien de la paix et de la sécurité, et a pris pour exemple l’Afrique, où l’Union africaine est de plus en plus en première ligne de la résolution des conflits. Il a invité le Conseil de sécurité à promouvoir et soutenir les approches régionales de résolution des conflits. Il l’a en outre invité à renforcer les capacités de maintien de la paix de l’Afrique, notamment en fournissant des fonds suffisants et prévisibles aux missions africaines de maintien de la paix.
M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a fait part de la préoccupation qu’éprouve la Fédération de Russie face à la multiplication des attaques menées contre les soldats de la paix. Il a plaidé pour que des enquêtes approfondies soient conduites sur ces évènements, et pour que les auteurs de ces actes soient poursuivis en justice. Il a estimé que le Conseil de sécurité ne doit pas accorder d’autorisation de recours à la force à toutes les missions de maintien de la paix, mais que cela doit se faire au cas par cas et selon les circonstances et les réalités du terrain. Il s’est en outre inquiété de la libre interprétation du droit international humanitaire à laquelle se livrent certains États dans le cadre de la protection des civils. Les mesures prises pour protéger les civils ne doivent pas aller au-delà des mandats donnés aux missions de maintien de la paix, a-t-il averti, soulignant par ailleurs que les soldats de la paix se doivent de collaborer avec les autorités locales qui sont les seules à avoir la responsabilité première et la légitimité de protéger leurs populations civiles.
M. Iliichev a ensuite salué les résultats positifs obtenus grâce à l’usage de technologies nouvelles en République démocratique du Congo (RDC) par la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Néanmoins, il a mis en garde contre la tentation de vulgariser ce nouvel outil et d’en étendre l’utilisation à d’autres missions. Il a proposé à cet égard que des études approfondies soient au préalable menées en tenant compte des aspects juridiques et budgétaires de cette évolution avant qu’on ne pense à la généraliser. Il a en outre souligné que les dispositions de la Charte des Nations Unies, notamment le Chapitre VI portant sur « le règlement pacifique des différends », restent d’actualité. Il est également revenu sur les propos tenus hier par le représentant de la Géorgie devant le Comité spécial, et a indiqué que les soldats de la paix de la Fédération de Russie qui avaient été déployés en 2008 en Ossétie du Sud avaient reçu pour mission de s’interposer entre les deux parties en conflit, et qu’ils avaient de ce fait empêcher une escalade de violence dans la situation dans laquelle se trouvait la région.
Mme IRENE SUSAN BARREIRO (Philippines) a regretté que des éléments qui n’ont pas été pris en compte lors de la définition des mandats d’OMP, dont les épidémies, viennent de plus en plus souvent miner la capacité de ces opérations à mettre en œuvre les programmes qui leur sont confiés. Elle s’est inquiétée des conclusions du rapport publié sous la cote A/69/642 par le Secrétaire général, qui démontre une augmentation de la violence dans le monde, qui se caractérise par une hausse de 100% des actes hostiles commis contre les Casques bleus. Elle a souligné que 45 Casques bleus philippins ont été enlevés et 72 assiégés par des éléments armés en 2014, alors que 59 ont perdu la vie en 2013 et 2014. Elle a dit que les Philippines ont démontré leur volonté de participer de manière active aux OMP depuis 50 ans. Tous les acteurs concernés par le maintien de la paix doivent s’efforcer de régler les litiges qui donnent naissance aux conflits sur la base du respect des principes de la Charte et des principes directeurs des OMP, a-t-elle préconisé. Elle a dit que le Chapitre 6 de la Charte offre à l’ONU et aux États Membres tous les moyens d’assurer la paix sans recourir à la force. Elle a mis l’accent sur l’importance de la formation et sur la nécessité d’aider les OMP à opérer même quand elles ont à faire face à des pandémies du type Ebola. Elle a précisé que son pays a consacré 2 millions de dollars à la mission de lutte contre Ebola.
M. MALIAN MILANOVIĆ (Serbie) a déclaré qu’il est nécessaire de mieux équiper les OMP pour leur permettre de faire face à de nouvelles menaces asymétriques, comme la criminalité transnationale organisée et les actes terroristes. Il s’est félicité des efforts investis dans l’utilisation de nouvelles technologies pour améliorer la sécurité et la sûreté du personnel onusien et des populations civiles. Il a salué la mise en place, par le Secrétariat, d’un projet de plan d’action pour améliorer la protection des civils au cours de la période 2015-2016. M. Milanovic a dit que la Serbie est un contributeur actif aux efforts de maintien de la paix, et qu’elle a déployé des personnels et matériels dans un hôpital de niveau 2 dont s’occupe la MINUSCA. La Serbie est également pourvoyeuse de troupes qui sont en ce moment déployées au sein de la FINUL, a-t-il précisé. Il a ajouté que la Serbie a accueilli en 2014 un séminaire régional sur le maintien de la paix.
M. AMR ABOULATTA (Égypte) a souligné la nécessité de renforcer le soutien aux OMP par le versement de fonds conséquents et substantiels et le déploiement des troupes en nombre suffisant. Il a souhaité que les pays contributeurs de troupes aient davantage la possibilité de participer à l’élaboration des politiques de maintien de la paix. Il a précisé que les missions de maintien de la paix (OMP) doivent recevoir les fonds nécessaires à l’accomplissement de leur mandat, et il a déclaré que les mandats desdites missions ne doivent pas être modifiés sans l’accord préalable des pays contributeurs de troupes. Concernant les nouvelles technologies qui pourraient être adoptées dans le cadre des OMP, M. Aboulatta a préconisé que cela soit fait dans le respect de la Charte des Nations Unies, avec l’accord du pays hôte de la mission, et en conformité avec la préservation de la sécurité des troupes engagées. Il a en outre déclaré que la protection des civils ne doit pas être utilisée comme prétexte pour justifier des interventions militaires, appelant aussi à l’adoption d’une définition claire et légalement admise de la qualité de civil dans le contexte des conflits. M. Aboulatta a enfin promis que l’Égypte allait augmenter sa contribution aux missions de maintien de la paix des Nations Unies.
M. OLIVIER NDUHUNGIREHE (Rwanda) a souligné que le Rwanda est le cinquième plus important contributeur de troupes aux OMP des Nations Unies avec une présence dans huit missions. Il a indiqué que la protection des civils est de la plus grande importance, et que le Comité spécial se doit de discuter de cette question afin d’adapter ce principe à l’environnement complexe et changeant de la préservation de la paix et de la sécurité internationale. Il a notamment indiqué l’importance, pour la communauté internationale, de se doter d’une compréhension unique et consensuelle du concept de protection des civils. Le représentant a en outre déploré le nombre croissant d’attaques menées contre les soldats de la paix, ajoutant que l’une des préoccupations majeures est posée par l’usage d’engins explosifs improvisés contre les personnels des missions de la paix.
M. Nduhungirehe a également insisté sur le besoin de procéder au renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales dans le cadre du maintien de la paix. Il a souligné que cette mesure est de la plus grande importance en ce qui concerne l’Afrique, dont les questions de sécurité et de paix représentent 70% des réunions du Conseil de sécurité. Il a par ailleurs appelé l’ONU à déployer plus de femmes dans les OMP, notant que le Rwanda attache beaucoup d’importance à cette question. Concernant l’usage de nouvelles technologies dans le cadre des OMP, il a indiqué que les données collectées par les drones doivent être partagées avec les États impliqués, et a précisé que ces technologies ne doivent en aucun cas remplacer la présence des troupes sur le terrain, notamment dans le cadre du renseignement. Il a enfin souhaité que les remboursements effectués aux pays contributeurs de troupes puissent être faits dans des délais plus raisonnables.
M. GHANA SHYAM LAMSAL (Népal) a précisé que 110 000 soldats népalais ont participé à plus de 40 OMP depuis 1958 à travers le monde, et que 68 soldats népalais ont payé de leur vie leur participation à ces opérations. Nous voulons améliorer notre niveau de participation à la cause de la paix et de la sécurité internationale, a ensuite assuré le représentant du Népal. Il a salué le caractère unique du C-34, qui a pour rôle d’examiner et de revoir tous les aspects des OMP et de fournir des orientations et stratégies pour les améliorer. Il a souligné l’importance à accorder au Groupe indépendant de haut niveau créé à la fin de l’année 2014 afin de débattre des moyens d’améliorer les OMP. Il a mis l’accent sur le respect des trois grands principes régissant les OMP que sont le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou d’action visant à assurer la protection du mandat de la mission. Il a exhorté le Secrétariat à faire des efforts pour assurer le remboursement rapide des indemnités à verser aux familles en cas de décès et de handicap infligé à un Casque bleu en regrettant que certains dossiers trainent depuis trop longtemps, alors que les familles de ces soldats sont dans le besoin. Il a demandé que l’on prenne en compte les pathologies liées au stress et dont souffrent les Casques bleus. Il a jugé nécessaire, face aux menaces croissantes, que les Casques bleus soient mieux équipés. La situation actuelle exige aussi que les troupes de maintien de la paix soient mieux remboursées, a préconisé M. Lamsal. Il a dit que le Népal appuyait la proposition de l’Inde visant à construire au Siège de l’ONU un mur portant les noms des Casques bleus tombés dans l’exercice de leur fonction.
M. GORGUI CISS (Sénégal) s’est inquiété de l’augmentation du nombre de morts et de blessés parmi les Casques bleus victimes d’agressions violentes, alors que les OMP elles-mêmes sont touchées par des défis et des formes de menaces nouvelles et croissantes. Sans vouloir remettre en cause les trois grands principes des OMP que sont le consentement des parties, l’impartialité, et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou de protection du mandat de la mission, le représentant du Sénégal a dit la nécessité de mettre en place de nouvelles mesures proactives et multidimensionnelles pour mieux assurer la protection des acteurs du maintien de la paix. Il a appelé à investir de manière substantielle et continue dans les OMP, en rappelant que les vies de millions de femmes, d’hommes et d’enfants dépendent du succès de ces missions. Il a précisé que le Sénégal fournissait actuellement 3 000 personnels à huit OMP, ce qui place le pays au septième rang du classement des 122 pays contributeurs de troupes militaires et de forces de police à l’ONU. Face à la multiplication des attaques, il a jugé essentiel que les OMP soient dotées de mandat adaptés. Il a estimé que la mise en œuvre de la stratégie globale d’appui aux missions est déterminante pour progresser dans la protection des civils. Le représentant a ajouté que les organisations régionales et sous-régionales demeurent des relais surs pour s’assurer des succès des OMP au niveau local. Il a souhaité un meilleur respect des délais de remboursement des sommes dues aux pays fournisseurs de troupes.
M. RUBEN A. E. HASBÚN (El Salvador) a souligné l’importance de la consolidation des capacités organisationnelles des OMP afin qu’elles deviennent plus efficaces. Il faut davantage de cohérence entre les mandats et les moyens accordés aux OMP, a-t-il relevé. El Salvador, qui a bénéficié d’une OMP entre 1991 et 1995, participe aujourd’hui à six OMP, a précisé le représentant. Il a affirmé que El Salvador allait déployer une première unité aérienne, composée de 90 personnels et de trois hélicoptères, dans le cadre de la MINUSMA. Il a appelé à revoir régulièrement les procédures des opérations ayant un caractère spécifique, comme les opérations aériennes. Il a jugé indispensable d’accélérer le remboursement des sommes dues aux pays fournisseurs de contingents, et a dit qu’il est nécessaire de promouvoir le rôle des femmes dans les OMP et de ne faire usage de la force qu’en dernier recours.
M. RIADH BEN SLIMAN (Tunisie) a invité la communauté internationale à s’assurer que les soldats de la paix soient mieux équipés et bien formés pour mener à bien les missions qui leur sont confiées. Il a aussi déclaré qu’il est important que les pays contributeurs de troupes soient davantage impliqués dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de maintien de la paix, notamment dans le cadre de la modification des mandats de missions de maintien de la paix confiés aux OMP. Il a en outre indiqué que ces pays sont les plus à même d’effectuer des évaluations de la situation sur le terrain. Il a par ailleurs appelé au renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales, notamment l’Union africaine. Il a en outre rappelé que la Tunisie participe aux OMP depuis l’année 1960, et que le pays est prêt à renforcer sa contribution dans ce domaine.
Mme GIZEM SUCUOĞLU (Turquie) a souhaité que les mandats des missions de maintien de la paix des Nations Unies soient modifiés et adaptés aux mutations du monde. Elle a noté que la protection des civils est certes importante, mais qu’il faut faire attention à ce que l’implication militaire des Nations Unies dans un conflit n’entache pas la crédibilité de l’Organisation. Elle a en outre souhaité que l’utilisation de nouvelles technologies, notamment les drones, soit menée dans le respect de la Charte des Nations Unies, et se fasse de manière transparente. Elle a ensuite relevé que les efforts de maintien de la paix doivent s’inscrire dans une stratégie globale établie sur le long terme, et tenant compte des causes profondes des conflits et des solutions institutionnelles qui pourraient leur être apportées de manière adéquate. Dans ce contexte, elle a rappelé que la prévention des conflits est la meilleure façon de préserver la paix, et a mis aussi en avant l’importance de la médiation et du dialogue et le rôle que les organisations régionales et sous-régionales pourraient jouer à cet effet. La représentante a aussi appelé au renforcement de la coopération entre l’ONU et l’Union africaine et l’Union européenne notamment, qui sont deux organisations qui sont devenues « incontournables dans le cadre du maintien de la paix ».
M. IHAB HAMED (Syrie) a rappelé que les buts et objectifs de la Charte de l’ONU mettent l’accent sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. Il a souligné l’importance de respecter les trois grands principes des OMP que sont le consentement des parties, l’impartialité, et le non-recours à la force sauf en cas de légitime défense ou de protection du mandat. « Nous croyons à l’évolution de la nature des OMP », a-t-il ajouté en appelant à traiter les causes profondes des conflits de manière impartiale. Le représentant a rappelé que la responsabilité de la protection des civils repose d’abord sur les pays hôtes des missions. Il a souligné que l’importance de la protection des civils ne saurait servir de prétexte à des ingérences d’autres États dans les affaires intérieures d’un pays connaissant un conflit.
Il a dénoncé les attaques aériennes répétées menées par Israël contre le territoire syrien. Il a dit que trois OMP concernent des territoires arabes en raison des activités d’Israël. Il s’est inquiété de la situation qui règne dans la zone de séparation située sur le plateau du Golan, qui a poussé la mission de la FNUOD à évacuer provisoirement les positions occupées par ses contingents. Le représentant a ensuite parlé des activités de groupes terroristes qui se sont attaqués aux Casques bleus de la FNUOD. Il a estimé qu’Israël devait porter pleinement la responsabilité de tous les actes commis dans la zone d’opérations de la FNUOD. « Il semble qu’Israël soutienne des groupes terroristes dans cette zone », a ensuite accusé le représentant syrien en déclarant que des terroristes auraient été traités dans des hôpitaux israéliens avant d’être ensuite relâchés.
M. ZOHRAB MNATSAKAYAN (Arménie) s’est dit préoccupé par l’augmentation des attaques ciblées lancées contre les personnels de l’ONU dans différentes OMP. Il a demandé aux participants à la session du Comité spécial des 34 de mettre l’accent sur les facteurs qui créent une augmentation des risques encourus par les Casques bleus, dont font partie les distances importantes entre les différentes bases à partir desquelles opèrent les personnels des missions, et l’augmentation du nombre de groupes armés et de réseaux criminels transfrontaliers. Après la publication du Rapport Brahimi, il a estimé qu’il est nécessaire de conduire une nouvelle réflexion stratégique collective sur les OMP. Dans ce contexte, il s’est félicité de la constitution, par le Secrétaire général, d’un groupe de haut niveau pour examiner le fonctionnement des OMP. Il a dit que l’Arménie s’intéressait tout particulièrement à la partie du rapport du Secrétaire général consacrée à la coopération avec les organisations régionales. Il a indiqué que son pays avait beaucoup d’expérience en matière de maintien de la paix grâce aux activités qu’il a menées dans le cadre de l’OTAN et il a souhaité une intensification de la coopération entre l’ONU et l’OSCE.
Mme CRISTINA CARRION (Uruguay) a dit que l’Uruguay n’a cessé d’augmenter le niveau de sa participation aux OMP depuis les années 50, et qu’il est parvenu en 2013 à mettre à la disposition de l’ONU un effectif de 2 000 Casques bleus, déployés majoritairement à la MONUSCO et à la MINUSTAH. Elle a indiqué que son pays venait d’obtenir le soutien du GRULAC pour sa candidature en tant qu’État membre non permanent du Conseil de sécurité. Alors que le nombre total de Casques bleus a atteint un niveau record de 120 000, la représentante de l’Uruguay a dit la nécessité de gagner aussi en efficacité. Elle s’est félicitée de la constitution d’un groupe de haut niveau pour examiner le fonctionnement des OMP. Elle a appelé à respecter les principes directeurs du maintien de la paix et a souhaité que l’accent soit mis sur la nécessité de mieux protéger les civils et de prévenir les violences sexuelles. La lutte contre l’impunité doit aussi être au centre des activités des OMP, a-t-elle insisté.
Mme SONIA ISHAQ AHMAD SUGHAYAR (Jordanie) a souhaité que de nouvelles politiques en matière de maintien de la paix soient élaborées et mises en œuvre, en conformité avec les mutations que connaît le monde. Elle a aussi indiqué que le succès des missions de maintien de la paix passe d’abord par la définition de mandats clairs et réalisables, et a ajouté que la protection des civils, bien qu’étant nécessaire dans le contexte des OMP, relève en premier lieu de la responsabilité des États. Elle a par ailleurs appelé à lutter contre l’impunité découlant des violations des droits de l’homme dans le contexte des conflits, afin que les auteurs d’atrocités soient trainés en justice.
M. HOSSEIN MALEKI (Iran) a rappelé que le Comité spécial des 34 est le seul organe des Nations Unies censé examiner et arrêter les politiques en rapport avec les opérations de maintien de la paix. Il a ensuite appelé au respect de la souveraineté des États dans le contexte des OMP des Nations Unies, insistant aussi sur le fait que les mandats des missions de maintien de la paix doivent être conformes à la Charte des Nations Unies. Le représentant a ensuite déploré les nombreuses attaques qui visent les soldats de la paix des Nations Unies. Il a en outre dit que l’Iran soutient la politique de « tolérance zéro » en cas d’abus sexuels et autres actes répréhensibles commis par des soldats de la paix. M. Maleki a par ailleurs souhaité que l’utilisation des nouvelles technologies dans les OMP se fasse au cas par cas et selon les besoins des missions, dans le respect de la Charte des Nations Unies et avec l’accord des pays hôtes. Il a enfin souligné que la protection des civils est du ressort de l’État concerné au premier chef, et que cette notion ne saurait être utilisée comme prétexte pour des interventions militaires dans des pays tiers.
M. DAVID PRESSMAN (États-Unis) a rappelé que ce 18 février marque le cinquantième anniversaire de la création du Comité spécial des 34. Il s’est inquiété de l’augmentation du niveau de violence à l’encontre des Casques bleus et des civils. Il a dit que seules des innovations permettront de faire face à ces défis croissants. Il a rappelé que 32 Casques bleus ont été tués et 122 blessés au Mali. Il a regretté le manque de coopération des pays hôtes, qui empêchent parfois les Casques bleus de faire leur travail. Illustrant son propos, il a indiqué que le Gouvernement du Soudan « a empêché les Casques bleus de venir enquêter dans un village du nord du Darfour suite à des allégations de viols commis par des soldats soudanais ». Il faut un environnement plus sûr pour les Casques bleus et pour les civils, a insisté le représentant des États-Unis avant de se féliciter de la rédaction d’un manuel définissant les tâches à poursuivre par les contingents déployés. Le degré de préparation et de formation des contingents est déterminant pour garantir le succès des OMP, a encore insisté le représentant. Il a cité la mise en place d’un partenariat de réponse rapide entre les États-Unis et l’Union africaine pour former à terme 280 000 soldats africains.
Mme MARIA CRISTINA PERCEVAL (Argentine) a indiqué que 45 000 militaires argentins ont participé à plus de 30 OMP et que 900 Casques bleus argentins sont actuellement présents dans 7 missions. Elle a ajouté que son pays, au sein du Groupe informel de coordination des positions, continuera de présenter des alternatives aux différentes questions soulevées par le Secrétaire général. Elle a mis l’accent sur la bonne gouvernance en indiquant que l’Argentine sera particulièrement attentive aux liens entre maintien de la paix et renforcement de l’état de droit dans des situations postconflit.
« La paix et la justice sont indissociables », a-t-elle encore ajouté avant de juger fondamentale la coopération entre la Cour pénale internationale (CPI) et les États Membres de l’ONU. « Nous pensons que tous les acteurs de la mise en œuvre des mandats de la protection des civils, dont le Conseil de sécurité, les pays contributeurs de troupes, les pays hôtes et le Secrétariat, doivent comprendre de la même manière les règles d’engagement en ce qui concerne la protection des civils faisant l’objet de menaces imminentes », a dit la représentante. Elle a appelé aussi à améliorer la coopération triangulaire entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays contributeurs de troupes. Elle a, en outre, demandé que des moyens à la hauteur des besoins des mandats soient à la disposition de chaque OMP et a invité certains États à arrêter de penser que les OMP peuvent « faire mieux et plus avec moins de ressources ».
M. MAHLATSE MMINELE (Afrique du Sud) a souligné que les OMP ne peuvent être considérées comme une solution durable aux conséquences des crises nées de différends politiques. Il a estimé qu’avec le manque crucial de moyens financiers pour accompagner le déploiement des missions de maintien de la paix, il serait louable de leur donner un solide soutien politique. Il a ensuite appelé au renforcement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales dans le cadre de la prévention et de la résolution des conflits, notamment en ce qui concerne l’Afrique, où un certain nombre de conflits ont cours. M. Mminele a par ailleurs relevé que les violences à caractère sexiste sont une préoccupation majeure dans le contexte des conflits, et il a appelé à l’établissement de mesures adéquates pour y faire face, notamment le déploiement de personnels chargés de s’occuper spécifiquement de cette question personnels qui devraient particulièrement être composés de femmes.
M. MIGUEL CAMILO RUIZ (Colombie) a relevé que les OMP jouent un rôle essentiel dans l’établissement d’une paix durable. La Colombie a participé aux OMP onusiennes depuis l’année 2006, notamment au sein de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), a-t-il rappelé. Il a souligné que les OMP doivent respecter les trois principes cardinaux que sont le consentement des parties, l’impartialité et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou d’action visant à assurer la protection du mandat de la mission. Il a expliqué que l’usage de la force doit avoir lieu en dernier recours et en cas d’ultime nécessité. Il a en outre estimé que l’utilisation des technologies nouvelles dans le cadre des OMP doit se faire après discussion avec les États Membres et dans le respect de la Charte des Nations Unies. Il a aussi rappelé que les OMP doivent à terme conduire à une paix durable, d’où le besoin de lier les activités de maintien de la paix à celles relatives à la consolidation de la paix et au développement.
Mme PAIK JI-AH (République de Corée) a mis l’accent dans son intervention sur quatre propositions visant à améliorer l’efficacité des OMP. Citant les difficultés rencontrées par la MINUSS et la MINUSCA, elle a estimé que l’amélioration de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales africaines est une clef de l’efficacité de ces missions. Par ailleurs, elle a estimé que l’introduction des nouvelles technologies, y compris les drones, permettrait une mise en œuvre plus efficace des mandats des OMP, dont celui ayant trait à la protection des civils. Enfin, pour assurer la sécurité des Casques bleus, elle a invité les chefs de mission à parvenir au meilleur niveau de confiance avec les pays hôtes. En outre, elle a appelé l’ONU à assurer la crédibilité des mandats des missions par le biais d’une collaboration avec tous les acteurs. La République de Corée a envoyé 13 000 Casques bleus dans des OMP depuis 1993, a-t-elle précisé.
M. ELHAFIZ E. A. ADAM (Soudan) a exhorté les acteurs du maintien de la paix à respecter les principes directeurs des OMP, énoncés par la Charte, dont le respect de la souveraineté nationale. Réagissant à la déclaration du représentant des États-Unis, le représentant du Soudan a indiqué que son pays a mené les enquêtes nécessaires concernant les incidents auxquels il a été fait allusion.
M. U KYAW TIN (Myanmar) a rappelé le rôle central du Comité spécial dans l’élaboration des politiques et stratégies en matière de maintien de la paix. Il a relevé que la nature des conflits est de plus en plus complexe, ce qui a provoqué la prise de mesures modifiant la nature des missions de maintien de la paix, ainsi que celles des mandats qui leur sont assignés. M. Kyaw Tin a, dans ce contexte, insisté sur l’importance du respect des trois grands principes de la Charte régissant les OMP, qui sont le consentement des parties, l’impartialité, et le non-recours à la force, sauf en cas de légitime défense ou d’action visant à assurer la protection du mandat de la mission. Il a en outre lancé un appel pour que le financement des missions de maintien de la paix se fasse de manière prévisible et en temps opportun, ce que le Myanmar s’attèle à faire en dépit de ses restrictions budgétaires, s’est-il félicité.
M. PAUL ROBERT TIENDRÉBÉOGO, Observateur permanent de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a souligné que la Francophonie est engagée, depuis 10 ans, en faveur du maintien de la paix, et ce, par un travail de plaidoyer, de renforcement de capacités de ses États membres et de partenariat avec le système onusien, partenariat qui porte notamment sur le volet civil des opérations de maintien de la paix et sur les processus de consolidation de la paix. Il a rappelé qu’au cours du XVe Sommet de la Francophonie tenu à Dakar, au Sénégal, les 29 et 30 novembre derniers, les chefs d’État et de gouvernement francophones ont renouvelé leur engagement à renforcer la présence francophone dans les opérations de maintien de la paix, notamment en y favorisant la participation des femmes, y compris par leur accession à des postes de décision ou de commandement.
M. Tiendrébéogo a en outre indiqué que l’OIF a lancé, en janvier 2014, le Réseau d’expertise et de formation francophone pour les opérations de paix (REFFOP), qui est une plateforme en ligne qui fédère les différents acteurs engagés dans le maintien de la paix. Il a enfin rappelé l’attachement de l’OIF à la dimension linguistique dans les opérations de maintien de la paix, la prise en compte de ce facteur étant une des conditions pratiques à remplir pour assurer la réussite d’une OMP.
M. TETE ANTONIO, Union africaine, a indiqué que le continent africain était aujourd’hui le théâtre d’opération de 100 000 Casques bleus de l’ONU ou de l’Union africaine, et que le coût de ces déploiements était estimé à 5,5 milliards de dollars. Loin de se limiter à séparer les belligérants autour d’un cessez-le-feu, les Casques bleus ont aussi le devoir de protéger la vie des civils face à des menaces imminentes, a indiqué M. Antonio. Il a dit que le succès de l’AMISOM, déployée en Somalie sous la bannière mixte de l’Union africaine et de l’ONU, est lié à la détermination des pays fournisseurs de contingents. Il a estimé que l’efficacité des OMP exige une approche coordonnée et une complémentarité de rôle entre l’ONU et les organisations régionales, conformément aux termes du Chapitre VIII de la Charte de l’ONU.
Droits de réponse
Réagissant à l’intervention de la délégation de la Fédération de Russie, qui a eu lieu ce matin, le représentant de la Géorgie a estimé que la présence de troupes russes en Abkhazie ne peut être qualifiée que comme étant une occupation étrangère. Il a dénoncé les mesures prises par la Fédération de Russie pour « annexer » des territoires géorgiens. Faisant le parallèle avec l’actualité en Ukraine, le représentant géorgien a indiqué que la mission internationale d’établissement des faits créée en 2008 par les institutions européennes, a démontré la fourniture, par la partie russe, d’équipements militaires en Abkhazie et en Ossétie du Sud avant le début des hostilités de 2008.
Le représentant d’Israël a exercé son droit de réponse et a déclaré que la Syrie est devenue experte dans l’accusation de « toutes les autres parties du monde ». Un régime qui terrorise sa propre population n’a pas de leçons à donner, a-t-il ajouté. S’agissant de l’attaque menée contre les troupes de la FNUOD présentes sur le plateau du Golan, il a précisé « qu’Israël a ouvert ses portes face au danger, pour permettre à ceux qui étaient attaqués de se protéger et de trouver un refuge ».
Le représentant de la Fédération de Russie a dit que les allégations avancées par la délégation de la Géorgie ne sont corroborées par aucun élément factuel. Il a souligné que la Fédération de Russie n’a procédé à aucun transfert ou remplacement de population ou de pouvoir législatif en Abkhazie ou en Ossétie du Sud. En 2008, l’usage de la force par la Géorgie contre des agents de maintien de la paix en Abkhazie ou en Ossétie du Sud n’avait aucune légitimité, a-t-il déclaré.
Le représentant de la Géorgie a repris la parole pour dire que des troupes de la Fédération de Russie sont stationnées sans aucune autorisation sur un territoire qui appartient à la Géorgie, et que cette situation ne peut être décrite que comme une « agression ou une occupation ».