Le Président de la Cour internationale de Justice rappelle devant la Sixième Commission la contribution de la Cour au droit institutionnel de l’ONU
La Commission poursuit son examen des chapitres VI, VII et VIII du rapport de la Commission du droit international
La Sixième Commission (Commission des questions juridiques) a reçu ce matin le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ), M. Rony Abraham, qui a dressé un bilan de 70 ans de contributions de la Cour au droit institutionnel de l’Organisation, notamment par le biais de ses avis consultatifs.
M. Abraham a tout d’abord rappelé que la jurisprudence de la Cour avait contribué à asseoir le rôle et la place de l’ONU dans l’ordonnancement juridique international en clarifiant son statut juridique en tant qu’organisation internationale, ainsi que la portée des pouvoirs qu’elle exerce à ce titre et celle de ses obligations.
Le Président de la CIJ a ensuite rappelé la contribution de la Cour à l’éclairage sur le fonctionnement et les attributions des organes principaux de l’ONU et des relations entre ces derniers. M. Abraham a ainsi rappelé que la Cour avait eu l’occasion de s’exprimer sur l’étendue des pouvoirs de l’Assemblée générale. Elle a aussi joué un rôle pour clarifier les pouvoirs respectifs de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité. Le Président a enfin expliqué comment la Cour prenait en compte le travail de l’Assemblée générale, rappelant qu’en dépit du caractère non contraignant des résolutions de l’Assemblée générale, celles-ci ont une importance considérable.
À la suite du discours de M. Abraham, les membres de la Sixième Commission ont tenu un bref dialogue interactif avec le Président de la Cour.
La Sixième Commission a, par ailleurs, poursuivi l’examen du rapport de la Commission du droit international et principalement des chapitres relatifs à la « Détermination du droit international coutumier », aux « Crimes contre l’humanité » et aux « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités ».
Concernant la « Détermination du droit international coutumier », de nombreuses délégations ont invité à la prudence et à ne considérer trop rapidement le silence ou l’inaction d’un État comme son acceptation de la règle de droit. Certains, comme El Salvador ont même souhaité ajouter des conditions à celles déjà proposées par le rapporteur spécial. Pour déterminer si les dispositions d’un traité reflètent l’état du droit international coutumier, la Chine a recommandé d’appliquer les critères d’objectivité et d’impartialité, en se basant strictement sur la pratique générale et l’opinio juris. Le rôle de la pratique des organisations internationales dans la détermination du droit international coutumier fait débat: les États-Unis ont exprimé leur opposition, l’Australie se veut prudente mais ouverte à un examen au cas par cas et la Turquie suggère de remonter le seuil des exigences pour que cette pratique soit acceptable. La même prudence a été conseillée dans l’approche de la question de l’objecteur persistant.
Concernant les « Crimes contre l’humanité », plusieurs pays -Nouvelle-Zélande, Allemagne et Suisse notamment- ont exprimé leur satisfaction de voir le projet d’articles définissant ces crimes reprendre strictement la définition donnée par l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). En revanche, la Chine –qui n’est partie au Statut de Rome-, a conseillé à la CDI de baser davantage son travail sur un examen approfondi de la pratique des États.
Ces projets d’articles devraient-il aboutir à un traité international? Le Chili a répondu « oui », car il estime essentiel de créer une obligation internationale de punir et réprimer de tels crimes par le biais d’un traité spécifique, comme il en existe pour réprimer les crimes de guerre et le génocide. De même, la Hongrie estime qu’il faut étendre la lutte contre les crimes contre l’humanité au-delà de la seule communauté des États parties à la CPI. Pour les Pays-Bas, le problème est moins de définir les crimes contre l’humanité que de mettre en pratique des mécanismes de prévention et de répression, en particulier par les juridictions nationales. Dans ce contexte, ils ont rappelé le travail mené avec d’autres États en vue d’un traité multilatéral sur l’aide juridictionnelle mutuelle et l’extradition dans le cas de poursuites exercées au plan national pour les crimes internationaux les plus graves. Certains États ont en outre souhaité que le projet d’articles développe, outre les obligations de prévenir et de réprimer ces crimes, une obligation de réparation pour les victimes
Enfin, concernant le thème des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », nombre d’États invitent à la prudence lorsque l’on évalue la pratique des organisations internationales ainsi que le poids à leur accorder, étant donné les différences entre organisations internationales en termes de structures, mandats, composition, organes et processus de décision. Pour le Chili, les traités constitutifs d’organisations internationales peuvent, dans certains cas, être interprétés à la lumière de la pratique ultérieure de l’organisation, comme l’illustre la pratique ultérieure de l’Article 27 de la Charte concernant les votes au Conseil de sécurité.
Par ailleurs, la représentante du Ghana a présenté un projet de résolution sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international. La Sixième Commission se prononcera la semaine prochaine.
La Sixième Commission doit achever lundi 9 novembre à 10 heures son débat sur les chapitres VI à VIII du rapport de la CDI. Elle entamera ensuite l’examen des chapitres IX à XI, consacré à la « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés », à l’« Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État » et à l’« Application provisoire des traités ».
Déclaration du Président de la Cour internationale de Justice (CIJ)
M. RONY ABRAHAM, Président de la Cour internationale de Justice, a déclaré que le soixante-dixième anniversaire de l’ONU était l’occasion de dresser un bilan des travaux de la Cour, qui célèbrera elle-même ses 70 ans en avril prochain, bilan auquel il a consacré sa présentation, en se concentrant sur la contribution de la Cour internationale de Justice au droit institutionnel de l’Organisation, notamment par le biais des avis consultatifs.
M. Abraham a tout d’abord rappelé que la jurisprudence de la Cour avait contribué à asseoir le rôle et la place de l’ONU dans l’ordonnancement juridique international en clarifiant son statut juridique en tant qu’organisation internationale ainsi que la portée des pouvoirs qu’elle exerce à ce titre. Il a ainsi rappelé que la Cour s’était rapidement déclarée habilitée à interpréter la Charte des Nations Unies, dans le cadre de deux avis consultatifs portant sur l’admission de nouveaux États au sein de l’Organisation. Le premier est l’avis consultatif de 1948 relatif aux Conditions de l’admission d’un État comme Membre des Nations Unies, où la Cour a été invitée à interpréter l’Article 4 de la Charte, et le second est l’avis consultatif de 1950 portant sur la Compétence de l’Assemblée générale pour l’admission d’un État aux Nations Unies. S’estimant compétente, la Cour a relevé qu’aucune disposition de la Charte ne lui interdisait d’exercer à l’égard de la Charte une fonction d’interprétation.
S’agissant des obligations découlant pour l’Organisation de la reconnaissance de sa personnalité juridique internationale, la Cour a affirmé en particulier que ses organes sont liés par les décisions judiciaires ayant force obligatoire à leur égard. Elle a réaffirmé ce principe dans son avis consultatif de 1954 sur les Effets des jugements du Tribunal administratif des Nations Unies accordant indemnité. L’Assemblée générale ne peut refuser d’exécuter le jugement d’un tribunal administratif qu’elle avait, elle-même, constitué pour traiter des différends survenant entre l’Organisation et ses fonctionnaires au motif que, « si l’Organisation des Nations Unies laissait ses propres fonctionnaires sans protection judiciaire ou arbitrale pour le règlement des différends qui pourrait surgir entre elle et eux, cela ne serait guère compatible avec les fins explicites de la Charte, qui sont de favoriser la liberté et la justice pour les êtres humains, ou avec le souci constant de l’Organisation des Nations Unies, qui est de promouvoir ces fins ».
Le Président de la CIJ a ensuite rappelé la contribution de la Cour à l’éclairage sur le fonctionnement et les attributions des organes principaux de l’ONU et des relations entre ces derniers. Rappelant une nouvelle fois l’avis consultatif de 1948 relatif aux Conditions de l’admission d’un État comme Membre des Nations Unies, il a noté que la Cour avait déterminé qu’un État ne pouvait être admis comme membre par une seule décision de l’Assemblée générale sans recommandation préalable du Conseil de sécurité, car cela aurait eu pour effet de « priver le Conseil de sécurité d’un pouvoir important que lui confie la Charte et réduire à peu de chose son rôle dans l’existence d’une de ses fonctions essentielles », alors qu’il convient de préserver l’équilibre entre organes principaux tel qu’établi par la Charte. M. Abraham a ensuite rappelé que la Cour avait eu l’occasion de s’exprimer sur l’étendue des pouvoirs de l’Assemblée générale et notamment sur son droit de solliciter un avis consultatif de la Cour sur « toute question juridique » comme le prévoit l’Article 96 de la Charte. Il a cité à cet égard, parmi d’autres, l’avis relatif à la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, à l’occasion duquel certains États avaient plaidé que l’Assemblée générale n’était pas habilitée à demander un avis sur une question sans rapport avec ses travaux.
La Cour a aussi joué un rôle pour clarifier les pouvoirs respectifs de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, particulièrement sur les questions concernant le maintien de la paix et de la sécurité internationales, en particulier dans son avis consultatif sur Certaines dépenses des Nations Unies, en 1962, dans lequel la Cour a déclaré que, bien que le Conseil de sécurité exerce la responsabilité première du maintien de la sécurité internationale, « les fonctions et pouvoirs conférés à l’Assemblée générale par la Charte ne se limitent pas à la discussion, l’examen et le lancement d’études et à l’adoption de recommandations ». La Cour a confirmé sa position, en 2004, dans l’avis sur les Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé.
Le Président a également expliqué comment la Cour prenait en compte le travail de l’Assemblée générale, rappelant que, quoi qu’on puisse dire sur le caractère non contraignant des résolutions de l’Assemblée générale, celles-ci, surtout quand elles sont adoptées à une large majorité, ont une importance considérable. La Cour n’hésite donc pas à s’y référer dans ses avis, comme dans l’avis de 1971 sur les Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie nonobstant la résolution 276 du Conseil de sécurité (1970), dans lequel la Cour a estimé illégale cette présence en se fondant sur la résolution 1524 de l’Assemblée générale, qui proclame le droit à l’autodétermination des peuples. Si ces résolutions ne sont pas contraignantes, elles peuvent donner d’importants éléments de preuve ou faciliter l’émergence de l’opinio juris, a ajouté M. Abraham. Inversement, il a noté que les avis de la Cour sont cités dans les résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale. Tel a été le cas des résolutions 301 et 366 du Conseil de sécurité sur la situation en Namibie.
En conclusion, M. Abraham a noté que la CIJ, en tant qu’organe judiciaire principal des Nations Unies, avait reçu un appui constant des États Membres et a exprimé sa gratitude pour ces marques de confiance. Il a noté aussi que la Cour n’avait jamais été aussi sollicitée qu’actuellement, rappelant qu’elle comptait 12 affaires pendantes, dont quatre sont en délibéré.
Dialogue interactif avec le Président de la Cour internationale de Justice (CIJ)
Au Venezuela qui lui demandait quelles sont les limites au pouvoir du Conseil de sécurité et quel organe pourrait le contraindre à assumer ses responsabilités, M. Abraham a rappelé que les limites des pouvoirs de cet organe sont définies par la Charte des Nations Unies. Au besoin, a-t-il ajouté, la Cour est disponible pour interpréter la Charte, soit dans le cadre d’une affaire contentieuse soir pour rendre un avis consultatif.
Au Pérou qui demandait quelles sont les principaux défis qui se posent à la Cour lorsqu’elle rend des avis consultatifs, le Président a expliqué qu’elle devait d’abord déterminer si les conditions était réunies pour qu’elle exerce sa compétence. Néanmoins, elle n’a jamais refusé, jusqu’à présent, de rendre son avis consultatif lorsque sa compétence est avérée. M. Abraham a précisé aussi qu’un ordre de priorité s’appliquait dans l’examen des demandes d’avis, selon le degré d’urgence des situations renvoyées devant elle. L’Éthiopie ayant souhaité savoir ce qui pouvait être fait pour promouvoir les activités de la Cour et mieux faire connaître son rôle joué dans la codification du droit international, notamment dans les pays en développement, le Président de la CIJ a estimé que c’était à l’ensemble des acteurs en contact avec la Cour de sensibiliser le public susceptible d’être intéressé. Il a fait observer que les grands médias étaient moins intéressés par les travaux de la CIJ que par ceux d’autres juridictions, y compris internationales.
M. Abraham a également dit, en réponse à une question de la France sur les relations entre la Cour et la Commission du droit international, que la CIJ n’hésitait pas à se référer aux travaux de la CDI, citant en exemple le cas de la notion de responsabilité internationale des États. En revanche, il a précisé au Maroc qu’elle s’abstenait de se référer à des textes encore à un stade provisoire. « Mais il est certain que les travaux de la CDI sont pris en considération pour déterminer le droit applicable », a assuré le Président.
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-SEPTIÈME SESSION (A/70/10)
Déclarations
M. ANDREI N. POPKOV (Bélarus) a dit partager l’avis de la Commission du droit international (CDI) au sujet de l’importance des résolutions adoptées par la communauté internationale et autres sources écrites aux fins de la détermination du droit international coutumier. Selon lui, ces sources sont utiles puisqu’on peut établir des preuves claires de l’existence de ces normes, sous réserve toutefois de ne les considérer que dans ce contexte spécifique. Concernant le projet de conclusion relatif à l’objecteur persistant, M. Popkov a estimé qu’il faudrait examiner les circonstances dans lesquelles l’État peut s’exempter des obligations découlant des normes existantes. Dans le monde interdépendant d’aujourd’hui, les normes du droit coutumier international doivent imposer des obligations égales à tous les États, y compris à ceux qui ont émis des objections à leur endroit, a assuré la délégation.
M. Popkov a estimé que la notion de crime contre l’humanité devait être précisée à la lumière des tendances récentes. Mais il a dit n’être pas convaincu qu’il faille élaborer un traité sur cette question, qui pourrait avoir des effets contraires à ceux désirés. Il a noté des contradictions entre les projets d’articles 2 et 3, relatifs à l’obligation générale et à la définition des crimes contre l’humanité. La référence à la jurisprudence des organes internationaux ne tient pas compte, selon lui, du fait que ces juridictions ont examiné la notion de crime contre l’humanité dans le cadre d’un conflit armé.
Mme VASILIKI KRASA (Chypre) a dit partager les doutes déjà exprimés par certains membres du comité de rédaction de la CDI sur la pertinence du point de « l’objecteur persistant » dans le cadre du projet de conclusions sur la détermination du droit international coutumier. Cette notion est litigieuse, n’est pas soutenue par la pratique des États et ne se retrouve dans aucun jugement de tribunal. Sans aucun doute, cette notion n’est pas applicable au jus cogens. « Que deviendraient les relations internationales si un État était autorisé à contester à partir du principe de l’objecteur persistant? », s’est-elle demandée, avant d’ajouter que le droit international coutumier s’impose, de façon contraignante, aux États qui ne peuvent se dérober à ses obligations.
Quant à la notion de coutume particulière, régionale ou locale, Mme Krasa a rappelé, en citant la jurisprudence adéquate, que la Cour internationale de Justice (CIJ) avait estimé que cette règle pouvait être invoquée dans certains cas. Toutefois, a-t-elle ajouté, pour qu’une règle coutumière existe, elle doit être « tacitement acceptée par toutes les parties concernées », et surtout cette existence doit être prouvée par l’État qui l’invoque. Mme Krasa a estimé que le projet de conclusions devrait comporter une clause additionnelle, qui puisse servir à sauvegarder les intérêts de l’État contestataire, à savoir que l’État qui invoque la coutume régionale porte le fardeau de la preuve de l’existence de celle-ci.
Mme LIESBETH LIJNZAAD (Pays Bas) a apprécié l’approche prudente qu’a adoptée le Rapporteur spécial sur la détermination du droit international coutumier, qui évite de tirer trop de conclusions du silence ou de l’inaction des États. Elle a jugé intéressante la discussion au sein de la CDI sur les « écrits » en tant que moyens subsidiaires pour l’identification du droit international coutumier. Elle a soutenu l’inclusion de la question de « l’objecteur persistant » dans le projet de conclusions que la Commission élabore. Au cœur de cette notion, a-t-elle expliqué, se trouve la notion du droit international en tant que système consensuel. Si le consentement explicite est moins important dans le droit international coutumier que dans le droit des traités, au contraire seules les objections explicites et claires permettront à un État de ne pas être lié. Mais cela à une condition précise, a-t-elle ajouté: il faut que ces objections soient exprimées lors de la formation de la règle.
Passant au chapitre des « Crimes contre l’humanité », Mme Lijnzaad a salué les quatre premiers projets d’articles. Pour elle, le problème n’est peut-être pas tant la définition que la mise en pratique des mécanismes de prévention et de répression de ces crimes, en particulier par les juridictions nationales. Elle a donc jugé qu’un traité serait utile dans ce contexte et invité à s’appuyer sur la pratique existante. Mme Lijnzaad a aussi rappelé que son pays travaille avec l’Argentine, la Belgique et la Slovénie à un projet de traité multilatéral sur l’aide juridictionnelle mutuelle et l’extradition dans le cas de poursuites exercées au plan national pour les crimes internationaux les plus graves, un projet que soutiennent, à ce jour, 48 pays.
Enfin, sur le thème des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », Mme Lijnzaad a attiré l’attention sur la différence entre l’interprétation d’un traité et l’amendement à un traité ou une modification à la suite d’un accord ou d’une pratique ultérieure, particulièrement dans le cas de la pratique d’une organisation internationale concernant l’application de son instrument constitutif. La fonction de l’interprétation n’est pas de réviser les traités ou de lire dans ceux-ci ce qu’ils ne contiennent pas, que ce soit explicitement ou implicitement. Dès lors, la pratique d’un organe d’une organisation internationale peut influencer la pratique de l’organisation internationale dans la mise en œuvre d’un élément constitutif, en particulier quand cette pratique n’est pas contestée par les parties à cet instrument. Il peut en résulter une modification de l’élément constitutif de l’organisation. Mme Lijnzaad a, à cet égard, attiré l’attention sur la relation existant entre les organes d’une organisation internationale et ses États membres, et sur la difficulté qui s’ensuit de déterminer si une décision interprétant ou modifiant un élément constitutif a été prise par les États membres ou par un organe de l’organisation internationale.
Mme Lijnzaad a, par ailleurs, estimé qu’eu égard à leur rôle respectif dans le développement du droit international, il fallait renforcer les liens entre la Sixième Commission et la CDI.
M. RICARDO ALDAY GONZÁLEZ (Mexique) a estimé que la lecture du rapport démontrait que la CDI contribuait de manière décisive à la codification du droit international. S’agissant de la détermination du droit international coutumier, M. González a estimé que le rapport reflète l’étude approfondie effectuée et la concision avec laquelle les thématiques y afférentes ont été examinées. Il a jugé extrêmement pertinente l’analyse de l’effet de l’inaction en matière de droit coutumier, qui a tout particulièrement fait référence à la contradiction « apparente et fausse » entre l’« inaction » et l’« inaction en cas de circonstances appelant à une réaction ». Pour le Mexique, ni les traités ni la jurisprudence ne constituent une preuve de l’existence d’un droit coutumier, mais tous deux peuvent être considérés comme des « moyens auxiliaires » dans la détermination des règles du droit international coutumier. « Détermination » du droit international coutumier n’est pas non plus le terme approprié pour le Mexique, dans la mesure où il peut impliquer un effet de création. Aussi la délégation lui préfère-t-elle celui d’« identification », qui correspond mieux à celui utilisé en anglais.
Le projet d’articles relatif à la définition des crimes contre l’humanité reprend la définition figurant dans le Statut de Rome, a ensuite relevé le représentant. Il a estimé que ce projet devait se montrer plus précis s’agissant de la politique conduite par un État ou une organisation, sachant que cette organisation doit présenter les caractéristiques d’un État « State-like organization ». L’histoire démontre que, dans l’après-guerre, l’inclusion des crimes contre l’humanité dans la catégorie des crimes internationaux obéissait précisément au fait que les politiques nazies étaient des politiques d’État et qu’il était improbable que les auteurs de tels crimes puissent être jugés par l’État en question. Ce n’est pas le cas, en revanche, pour les politiques des organisations qui ne présentent pas les caractéristiques d’un État et qui peuvent être jugées par des juridictions nationales.
M. PANG KHANG CHAU (Singapour) a recommandé la prudence lorsque l’on évalue la pratique des organisations internationales dans la question des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », ainsi que le poids à leur accorder, étant donné les différences entre organisations internationales en termes de structures, mandats, composition, organes et processus de décision. Il a appelé à faire la distinction entre la pratique des États au sein de ces organisations et celle des organisations internationales elles-mêmes, comme le fait le rapport. Il a aussi donné des précisions sur les différentes formes de pratiques, estimant qu’il n’y a pas de hiérarchie prédéterminée entre elles et que l’inaction peut, dans certains cas, constituer une pratique. En outre, il a dit apprécier l’affirmation de l’exception importante de l’objecteur persistant.
Concernant les « Crimes contre l’humanité », M. Pang a dit apprécier l’évaluation complète que fait le rapport sur le contexte historique et sur le cadre juridique international existant. Il a souhaité que ce sujet soit étudié plus avant. Passant au chapitre « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », le représentant a estimé que la base de l’interprétation des formulations contenues dans un traité devait résider dans le traité lui-même. Il ne faut utiliser la pratique ultérieure comme moyen d’interprétation que de manière prudente, a-t-il ajouté. À son avis, la pratique ultérieure est plus importante quand il s’agit d’interpréter un instrument constitutif d’une organisation internationale. Il a aussi recommandé d’éviter les raccourcis qui contournent de manière inappropriée les mécanismes prévus pour amender un instrument constitutif. Nous avons besoin, a-t-il dit, de prévision et de solidité pour savoir quelle attitude constitue un « accord ultérieur » ou une « pratique ultérieure ».
Mme RITI PATHAK (Inde), qui a noté que la Cour internationale de Justice (CIJ) avait mandat pour appliquer le droit international coutumier pour résoudre les différends entre États, a ensuite estimé qu’il serait bon que la Commission du droit international accorde la même importance aux deux éléments permettant de déterminer l’existence du droit international coutumier, à savoir la pratique des États etl’opinio juris. La CDI devrait également prendre en compte la pratique des États des diverses régions du monde. À cet égard, Mme Pathak a estimé que les pays en développement, qui ne publient pas de résumés de leur pratique, devraient être encouragés et aidés en ce sens. Elle a exhorté la CDI à travailler avec les organisations régionales et fait observer les efforts entrepris, à cette fin, par l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Asie et d’Afrique.
En ce qui concerne l’inaction en tant qu’acceptation de la règle de droit, la représentante a noté que la notion de « silence » devait être analysée et délibérée en détail. Concernant le projet de conclusion 4 relatif à la valeur aux fins de la détermination du droit international coutumier de la « pratique d’autres acteurs », elle a déclaré qu’il faudrait préciser ce que signifie la « conduite d’autre acteurs ». Elle a également estimé que les décisions des tribunaux nationaux en matière de détermination du droit international coutumier ne devraient pas être ignorées, pas plus que les opinions dissidentes des juges ou encore la doctrine des différentes régions du monde.
Concernant les crimes contre l’humanité, Mme Pathak a jugé qu’au vu des régimes juridiques internationaux existants, il faudrait mener des études et des débats approfondis au sein de la Commission. Les obligations proposées ne devraient pas entrer en conflit avec les obligations découlant des traités et ne devraient pas faire double emploi.
Mme ANNA WYROZUMSKA (Pologne) a regretté que le droit international coutumier soit parfois ignoré, parfois abusé. La délégation polonaise soutient l’approche dite des deux éléments - pratique générale et opinio juris. Les deux éléments sont étroitement liés mais ils ne peuvent être mélangés . La présence des deux éléments doit être prouvée lors du processus d’assertion et de vérification de l’existence d’une règle de droit international coutumier. Dans ce contexte, la question de la nécessité en tant que facteur important de l’opinio juris sive necessitatis devrait recevoir la considération nécessaire. Mme Wyrozumska a salué l’adoption par la Commission du droit international de la notion de l’objecteur persistant. Cette question devrait être envisagée dans le travail futur de la Commission dans le contexte de la fragmentation du droit international. La Commission devrait analyser sous quelles circonstances il est possible de se retirer d’une règle contraignante de droit international coutumier, et comment évaluer si une telle situation constitue une violation de la règle ou bien un début d’une nouvelle pratique menant à la création d’une nouvelle règle coutumière. Mme Wyrozumska a estimé que le projet de directive 12 allait trop loin dans la restriction du rôle des organisations internationales dans la détermination du droit international coutumier. De surcroît, cette disposition ne fait pas de différence entre les règles générales de droit coutumier et les lois contraignantes qui ne s’appliquent qu’aux organisations internationales.
Mme Wyrozumska a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur les Crimes contre l’humanité, et notamment le choix de reprendre la définition des crimes contre l’humanité donné à l’article 7 du Statut de Rome. Il faut considérer le travail en cours du point de vue des victimes, notamment des catégories de victimes les plus vulnérables que sont les enfants, a ajouté la représentante, pour qui cette approche devrait être reflétée dans les projets d’articles 1 et 2, en ajoutant notamment « le recours et les réparations aux victimes » au champ d’application de l’étude, qui concerne actuellement « la prévention et la répression des crimes contre l’humanité ».
Enfin, Mme Wyrozumska a apporté son appui au projet de conclusion 11 de l’étude sur les Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités.
Mme ANNA WYROZUMSKA (Pologne) a regretté que le droit international coutumier soit parfois ignoré, parfois abusé. La délégation polonaise soutient l’approche dite des deux éléments – -pratique générale et opinio juris. Les deux éléments sont étroitement liés mais ils ne peuvent être mélangés. L’existence des deux éléments doit être prouvée lors du processus d’assertion et de vérification de l’existence d’une règle de droit international coutumier. Dans ce contexte, la question de la nécessité en tant que facteur important de l’opinio juris sive necessitatis devrait recevoir la considération nécessaire. Mme Wyrozumska a salué l’adoption par la Commission du droit international de la notion de l’objecteur pertinent. Cette question devrait être envisagée dans le travail futur de la Commission dans le contexte de la fragmentation du droit international. La Commission devrait analyser sous quelles circonstances il est possible de se retirer d’une règle contraignante de droit international coutumier, et comment évaluer si une telle situation constitue une violation de la règle ou bien un début d’une nouvelle pratique menant à la création d’une nouvelle règle coutumière. Mme Wyrozumska a estimé que le projet de directives 12 allait trop loin dans la restriction du rôle de organisations internationales dans la détermination du droit international coutumier. De surcroit, cette disposition ne fait pas de différence entre les règles générales de droit coutumier et les lois contraignantes qui ne s’appliquent qu’aux organisations internationales.
Mme Wyrozumska a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur les « Crimes contre l’humanité », et notamment le choix de reprendre la définition des crimes contre l’humanité donnée à l’article 7 du Statut de Rome. Il faut considérer le travail en cours du point de vue des victimes, notamment des catégories de victimes les plus vulnérables que sont les enfants, a ajouté la représentante, pour qui cette approche devrait être reflétée dans les projets d’articles 1 et 2, en ajoutant notamment « le recours et les réparations aux victimes » au champ d’application de l’étude, qui concerne actuellement « la prévention et la répression des crimes contre l’humanité ».
Enfin, Mme Wyrozumska a apporté son appui au projet de conclusion 11 de l’étude sur les « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités ».
Mme SARAH WEISS MA’UDI (Israël) s’est déclarée d’accord avec le Rapporteur spécial sur la détermination du droit international coutumier lorsqu’il affirme qu’il est nécessaire de vérifier séparément l’existence de chaque élément, la pratique générale et l’opinio juris, avant de déterminer qu’une règle du droit international coutumier existe en effet. Elle a ensuite rappelé que la question des crimes contre l’humanité était d’une importance particulière pour sa délégation, compte tenu du génocide commis contre le peuple juif par le régime nazi. Depuis sa création, Israël s’est engagé en faveur de la justice internationale et de la prévention et de la répression des crimes internationaux, y compris des crimes contre l’humanité, a déclaré la représentante. Israël a ainsi été l’un des tous premiers à devenir partie à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide et à adopter une législation nationale correspondante. Par ailleurs, a fait observer Mme Ma’Udi, suite à une recommandation formulée en février 2013 par une Commission publique d’enquête établie par le Gouvernement, Israël mène actuellement une étude pour déterminer la compatibilité de sa législation avec les définitions de crimes internationaux graves par le droit international. Dans le cadre de ce processus, Israël envisage la possibilité d’adopter une législation consacrée spécifiquement aux crimes contre l’humanité, a ajouté la représentante. Elle s’est prononcée, en conclusion, en faveur d’une codification internationale de la notion de « Crimes contre l’humanité », souhaitant qu’elle couvre également ceux qui sont commis par des acteurs non étatiques et qu’elle traite des aspects spécifiques liés à l’implication de tels acteurs non étatiques dans la commission de crimes contre l’humanité.
M. ION GÂLEA (Roumanie) a indiqué que l’inaction d’un État pouvait être considérée comme relevant de sa pratique et donc être un élément constitutif permettant de déterminer le droit international coutumier. L’État en question doit néanmoins avoir eu la volonté de ne pas agir, a-t-il poursuivi, ajoutant que cette inaction ne saurait découler d’une omission. Il a également précisé que l’inaction d’un État en ce qui concerne une coutume n’empêche pas celle-ci de s’appliquer si elle est invoquée par un autre État, le droit coutumier découlant de la pratique générale et de l’opinio juris des États. M. Gâlea a également déclaré que les traités multilatéraux revêtaient la plus grande importance et que les traités bilatéraux, s’ils ne doivent pas être exclus des projets de conclusions, devaient être considérés avec prudence. Soulignant que les décisions judiciaires et la doctrine sont incluses dans le projet de conclusion 14, il a estimé que ces éléments devraient être examinés séparément.
En ce qui concerne les « Crimes contre l’humanité », M. Gâlea a souligné l’approche prudente de son pays, qui ne veut pas entraver, même indirectement, les efforts en vue de l’universalisation du Statut de Rome. Les dispositions d’un traité sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, traité que préconise le Rapporteur spécial, ne doivent pas faire double emploi avec celles du Statut de Rome, ou l’affaiblir, a affirmé le représentant. Il a partagé la position de la Commission, selon laquelle la qualification de crime contre l’humanité ne doit pas dépendre de l’existence d’un conflit armé, puisque de tels crimes peuvent aussi être commis en temps de paix.
Enfin, au titre des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », M. Gâlea a discuté de la formulation de certains projets d’articles et approuvé l’idée que la pratique ultérieure des États puisse découler de leurs positions vis-à-vis de la pratique d’organisations internationales.
Mme RITA SILEK (Hongrie) a rappelé que son pays considère comme une priorité le thème de la « Protection de l’atmosphère ». Après avoir rappelé les instruments juridiquement contraignants pertinents auxquels son pays est déjà partie, Mme Silek a expliqué qu’en Hongrie et plus généralement en Europe, c’est le carbone noir et l’ozone troposphérique qui sont à l’origine de la pollution la plus grave, d’où l’importance d’inclure ces éléments dans les projets de directives.
Évoquant ensuite les « Crimes contre l’humanité » Mme Silek a réaffirmé la nécessité pour la communauté internationale de se doter d’un traité unifié ouvrant la voie à des poursuites judiciaires et de combler cette lacune juridique. Il ne peut y avoir de reddition de comptes à moins de redoubler d’efforts en matière de prévention, de poursuite et de coopération interétatique, a assuré la déléguée. Dans la mesure où les États portent la responsabilité première de la prévention et de la répression des crimes contre l’humanité, il faut renforcer le régime juridique existant pour prêter assistance aux autorités nationales à cette fin. Nous devons également étendre notre combat contre les crimes contre l’humanité au-delà de la seule communauté des États parties à la Cour pénale internationale, a conclu Mme Silek.
M. IDREES MOHAMMED ALI MOHAMMED SAEED (Soudan) a déclaré attacher la plus haute importance au sujet de la détermination du droit international coutumier et a réaffirmé le rôle prépondérant de la pratique des États comme source de droit international coutumier. Concernant les projets de conclusions, il a appuyé l’approche des deux éléments –la pratique générale et l’opinio juris- en soulignant qu’il est important d’évaluer ces deux éléments constitutifs et ce, de façon séparée. En ce qui concerne l’inaction, le représentant a noté qu’il est difficile dans la pratique de dire que c’est une preuve comme acceptation du droit. Il faut prendre en considération d’autres critères, a-t-il noté. Il a, par ailleurs, estimé qu’en ce qui concerne le rôle des cours et tribunaux internationaux dans la détermination du droit international coutumier, le projet de conclusion avait besoin d’un examen plus approfondi. Il a noté l’importance des arrêts de la Cour internationale de Justice en notant qu’ils ne peuvent être mis sur un pied d’égalité avec les arrêts d’autres cours nationales. Il a estimé que les résolutions et décisions des organisations internationales ne pouvaient être mises sur un pied d’égalité avec les décisions des arrêts nationaux.
Le représentant a estimé que le projet de conclusion 15, relatif à la coutume particulière, avait besoin de clarification. À également besoin de clarification le projet 16 sur l’« objecteur persistant » afin qu’on puisse déterminer à quel moment un État peut être considéré comme un objecteur persistant. Enfin, en ce qui concerne le programme de travail futur concernant le droit international coutumier, il serait bon de procéder par étapes pour que les délégations aient le temps d’examiner les rapports de façon approfondie.
M. ANGEL HORNA (Pérou) s’est concentré sur la question de la « Détermination du droit international coutumier ». Il s’est félicité des progrès réalisés grâce au Rapporteur spécial s’agissant de savoir si l’inaction peut être considérée comme une pratique ou une preuve établissant le droit. Il a estimé qu’il y avait des difficultés concrètes pour caractériser la notion d’inaction, estimant que les circonstances qui entourent l’inaction devaient être évaluées prudemment avant de déterminer que l’inaction relève d’une omission juridique. Il a fait observer que certaines déclarations unilatérales avaient parfois fondé le droit international coutumier, par exemple dans la définition du plateau continental. Concernant la question des « Crimes contre l’humanité », le représentant a pris note de l’approbation provisoire des projets d’articles 1 à 4 avec les commentaires correspondants.
M. MICHAEL KOCH (Allemagne) a déclaré que l’Allemagne, qui figure au rang des premiers pays signataires du Statut de Rome, saluait l’accent particulier mis sur le projet d’article 3 du thème « Crimes contre l’humanité », correspondant à l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il a estimé qu’il est crucial pour la réussite du travail de la Commission du droit international de garantir la compatibilité entre les règles existantes et les institutions juridiques internationales, en particulier la CPI. Pour M. Koch, la dimension de la compatibilité est pertinente car elle détermine le rôle des tribunaux dans la manière d’interpréter, notamment, une éventuelle future convention. Par conséquent, il a encouragé la clarification dans le commentaire du projet d’article 3, lequel indique que la jurisprudence de la CPI, et d’autres tribunaux internationaux ou hybrides, continuera de fournir des orientations sur la signification de la définition des crimes contre l’humanité.
En ce qui concerne la « Détermination du droit international coutumier », M. Koch a noté l’importance, pour la formation de ce droit, des organisations supranationales, qui exercent certaines compétences spécifiques à la place des États qui ont consenti à leur transfert. Leur pratique et l’opinio juris devraient être prises en compte comme si les États Membres continuaient d’exercer ces compétences au niveau national, a-t-il avancé. Il a jugé, à ce titre particulièrement, regrettable l’absence de commentaires s’agissant du paragraphe 3, estimant qu’ils auraient pu être utiles pour évaluer la pertinence de la conduite des acteurs non étatiques dans ce domaine. S’il a souligné que la pratique des États devait être univoque et consistante, il a affirmé qu’un moindre poids devrait être accordé à la pratique des États qui se caractérisent par des sociétés ouvertes et pluralistes et où l’indépendance de la justice et la coexistence d’un pouvoir législatif et exécutif peuvent aboutir à la formulation de vues différentes. Ce point mérite d’être qualifié, a-t-il dit.
Enfin, au titre des « Accords et pratiques ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », M. Koch a exprimé son plein accord avec le projet de conclusion 11, paragraphe 3, selon lequel la pratique des organisations internationales doit recevoir une attention spécifique dans l’interprétation des traités. Leur pratique est particulièrement pertinente pour déterminer l’objet et la portée de leur traité constitutif, a déclaré M. Koch.
Mme WANNER (Suisse) a souhaité, dans le domaine des « Crimes contre l’humanité », une convention concise qui soit « aussi longue que nécessaire et aussi courte que possible ». Elle s’est félicitée que les quatre projets d’articles actuels soient fondés sur le cadre juridique international en place. En particulier, elle s’est dite très favorable à ce que la définition des crimes contre l’humanité, donnée dans le projet d’article 3, reprenne mot pour mot celle donnée à l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Des définitions contradictoires poseraient un problème, non seulement au niveau du droit international mais aussi dans l’ordre juridique interne des États, notamment ceux qui, comme la Suisse, ont déjà transposé dans leur code pénal national la définition des crimes contre l’humanité donnée dans le Statut de Rome.
La représentante a, en outre, rappelé que la prévention et la répression des crimes contre l’humanité étaient essentielles. Les États doivent donc prendre les mesures dans ces deux domaines et coopérer avec d’autres États et organisations pertinentes. En outre, a rappelé Mme Wanner; les crimes contre l’humanité peuvent être commis en temps de conflit armé comme en temps de paix. Ils peuvent être commis par tout un chacun, et pas uniquement par les représentants de l’État et aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier les crimes contre l’humanité. Mme Wanner a également estimé que le futur projet d’articles devrait traiter des dispositions sur l’entraide judiciaire, exigeant des États qu’ils coopèrent tout en respectant les contraintes imposées par les systèmes nationaux existants. Ils devraient aussi aborder la non-pertinence de la position officielle, l’inapplicabilité de la prescription et la nécessité de faire face au lourd héritage des crimes contre l’humanité.
Mme Wanner a, par ailleurs, jugé indispensable que le droit international et sa promotion soient assurés non seulement depuis le Siège de New York, mais aussi depuis celui de Genève. Elle a rappelé, à cet égard, le Séminaire de droit international qui se tient, chaque année, à Genève et permet à ses participants de se familiariser avec les travaux de la CDI, notamment en assistant aux séances publiques et aux conférences animées par ses membres. Ces échanges ne seraient plus possibles à l’occasion des sessions de la Commission organisées ailleurs qu’à Genève, a-t-elle fait observer.
Mme KATHY-ANN BROWN (Jamaïque), évoquant les « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », a présenté la jurisprudence régionale de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), en rappelant que ses États membres avaient, dans le Traité de Chaguaramas révisé en 2003, conféré ipso facto une juridiction obligatoire et exclusive à la Cour caribéenne de justice pour entendre et se prononcer sur des différends concernant l’interprétation et l’application du Traité révisé. Pour la délégation, la pratique institutionnelle est d’une importance considérable pour faciliter l’approfondissement et le renforcement des cadres institutionnels fragiles et en faire des entités d’intégration fortes et vibrantes.
Mme Brown a ensuite noté que certains États de la CARICOM appliquent à titre provisoire des accords régionaux à cause d’une législation exigeant la ratification des traités avant leur application. Pour cette raison, a-t-elle relevé, les pays dont la législation interdit l’application à titre provisoire, au niveau national, ont dû accélérer les procédures formelles d’acceptation. La délégation a espéré en conclusion que la Commission du droit international accorderait l’attention qu’elles méritent aux pratiques de toutes les régions et par conséquent promouvraient un échange informé sur les perspectives juridiques différentes.
M. SCOTT BICKERTON (Nouvelle-Zélande) a, sur le chapitre des « Crimes contre l’humanité », salué l’analyse approfondie par la Commission du droit international du concept de prévention tel que prévu par plusieurs instruments de droit international des droits de l’homme et de droit pénal international. Il s’est félicité de la définition proposée pour ces crimes dans le projet d’article 3. Constatant que l’article 7 du Statut de Rome contient une disposition similaire, il a apprécié que le projet d’articles n’essaye pas de créer une nouvelle définition. La Nouvelle-Zélande, a-t-il indiqué à cet égard, a pénalisé les crimes contre l’humanité dans une loi de 2000 qui fait directement référence à l’article 7 du Statut de Rome.
Sur le chapitre des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », M. Bickerton a exprimé son soutien au paragraphe 1 du projet de conclusion 11 qui concerne l’applicabilité des articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités en tant que moyen d’interprétation d’actes constitutifs d’organisations internationales. Il a souhaité que ces organisations adoptent une certaine souplesse vis-à-vis de leurs instruments constitutifs, tout en souhaitant que cette souplesse ne soit pas une excuse pour contourner les dispositions d’un instrument constitutif dans le contexte de la mise à jour ou de modifications au mandat et à la pratique de ces organisations. Il a, par ailleurs, salué les résultats des recherches de la Commission sur les décisions des organes pléniers qui peuvent présenter la position ou la pratique des États Membres, même si ces décisions ne sont pas soutenues par tous les États. Enfin, il a réaffirmé son ferme soutien à l’application d’accords et de pratique ultérieurs parmi les méthodes d’interprétation d’un traité.
M. TODD BUCHWALD (États-Unis) a salué le « travail impressionnant » de la Commission du droit international sur la question « Détermination du droit international coutumier » mais a toutefois exprimé ses préoccupations concernant le projet de conclusion 4 sur la contribution de la pratique des organisations internationales dans la formation du droit international coutumier. Les États-Unis ne souhaitent pas que la pratique de ces organisations soit interprétée comme pouvant servir directement de pratique pertinente dans la formation du droit international coutumier. Parmi ses arguments, M. Buchwald a remarqué que la jurisprudence et la doctrine des États n’avaient pas reconnu que les actes des organisations internationales « tels quels », c’est-à-dire distincts de la pratique des États Membres, contribuaient directement à la détermination du droit international coutumier.
Le représentant a relevé à la fois l’importance majeure des travaux sur les crimes contre l’humanité, et les difficultés des questions juridiques qu’ils impliquent. Il a souhaité que des discussions approfondies se poursuivent sur ce point, à la lumière de la doctrine des États. Il a en même temps indiqué que les vues de son pays sur cette question étaient encore en évolution.
Passant aux projets de conclusions sur les « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », M. Buchwald a commenté le projet de conclusion 11. Les États-Unis sont d’accord avec l’idée que les règles d’interprétation d’un traité prévues aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités s’appliquent aux instruments constitutifs des organisations internationales. Il a cependant émis des doutes sur le projet de conclusion 11, paragraphe 3, selon lequel « la pratique d’une organisation internationale dans l’application de son acte constitutif peut contribuer à l’interprétation de cet acte, lors de l’application des articles 31, paragraphe 1, et 32 ». Il a également dit craindre que les règles d’interprétation prévues au projet de conclusion 11 soient incohérentes avec celles figurant aux articles précités de la Convention de Vienne sur le droit des traités.
M. BILL CAMPBELL (Australie) a rappelé qu’aux fins de la détermination du droit international coutumier, le simple fait qu’un État s’engage dans une pratique particulière ne signifiait pas qu’il se percevait comme agissant en vertu d’une obligation juridique. Chaque élément d’une norme coutumière doit être déterminé de manière distincte afin de ne pas confondre les exigences de la pratique des États et l’opinio juris. Il a invité à la prudence avant de présumer que l’inaction d’un État par rapport à une pratique donnée constitue la preuve d’une opinio juris. L’inaction peut servir de telle preuve uniquement lorsqu’un État, dans des circonstances données, et par son silence, signifie véritablement son acceptation d’une pratique particulière comme constituant une obligation.
M. Campbell a également prôné une approche prudente en ce qui concerne la pratique des acteurs autres que les États, soulignant, dans le droit fil du rapport, l’importance que la pratique des États au sein d’une organisation internationale soit correctement imputée aux États concernés. D’un autre côté, l’Australie convient que la pratique des organisations internationales, en particulier celles qui sont dotées de la personnalité juridique, ne soit pas assimilée à la pratique des États. L’Australie reste ouverte à la possibilité que la pratique de ces organisations puisse contribuer à la formation d’un droit coutumier dans « un certain nombre de cas », même s’il faut, là encore, faire preuve de prudence. M. Campbell a écarté l’idée que les autres acteurs non étatiques puissent contribuer à la formation d’un tel droit.
Le représentant a ensuite affirmé que la Convention de Vienne sur le droit des traités s’appliquait aux traités constitutifs d’organisations internationales. Ces traités peuvent, dans certains cas, être interprétés à la lumière de la pratique ultérieure de l’organisation, a-t-il ajouté, prenant pour exemple la pratique ultérieure de l’Article 27, paragraphe 3, de la Charte -qui dispose que « les décisions du Conseil de sécurité sur toutes autres questions sont prises par un vote affirmatif de neuf de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents »- par laquelle l’abstention d’un membre permanent du Conseil ne constitue pas un obstacle à l’adoption d’une résolution.
Mme RITA FADEN (Portugal) a déclaré que la détermination du droit international coutumier était une question de haute portée pour les conseillers juridiques et les praticiens du monde entier, et a salué l’intention de la Commission du droit international d’adopter, l’année prochaine, les projets de conclusions proposés par le Rapporteur spécial, ainsi que ses commentaires. Elle a estimé qu’un ensemble de pratiques et de simples conclusions, assorties d’un commentaire et visant à aider à déterminer le droit international coutumier, semble être la façon la plus appropriée de procéder. Toutefois, Mme Faden a dit approuver les commentaires mettant en garde contre la simplification excessive.
S’agissant de la « Détermination du droit international coutumier », Mme Faden a mis en avant la relation entre les deux éléments constitutifs de la coutume et le projet de conclusion 3 relative à la preuve de l’existence de ces deux éléments, soulignant qu’il pourrait avoir une différence dans l’application de ces deux éléments. Concernant le projet de conclusion 12 portant sur les résolutions des organisations et des conférences internationales, elle a déclaré qu’il serait utile de détailler dans quelles circonstances de telles résolutions sont la preuve du droit international coutumier ou peuvent contribuer à son développement. Mme Faden a également fait référence à la coutume particulière et au projet de conclusion 16, que le Portugal appuie. Cependant, elle a demandé qu’elle soit mieux spécifiée comme faisant allusion à la coutume régionale, locale ou particulière.
Pour ce qui est des « Crimes contre l’humanité », Mme Faden a dit qu’il était justifié d’envisager l’élaboration d’une convention qui serait un instrument permettant d’effectuer des avancées dans la lutte contre l’impunité et de situer les responsabilités dans les endroits où ces crimes sont commis.
M. XU HONG (Chine) a jugé très importantes les discussions et la codification de la question des crimes contre l’humanité. Il a conseillé de baser la codification sur un examen approfondi de la pratique des États. Dans le rapport du Rapporteur spécial, on accorde beaucoup d’importance à la pratique des organes judiciaires internationaux, mais on fait peu de référence à la pratique générale et à l’opinio juris des États, a-t-il noté. Il a donc demandé à la Commission d’examiner les positions et la pratique des États de manière plus complète en vue de donner des bases solides à la définition de ces crimes. En ce qui concerne la liste des crimes, il a invité à examiner avec soin les différences existantes entre les systèmes judiciaires nationaux. Il a remarqué par exemple que, dans de nombreux pays, le crime de disparitions forcées n’existe pas en droit national.
Passant à la question de la « Détermination du droit international coutumier », M. Xu a invité la CDI à se référer aux travaux de l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Asie et d’Afrique (AALCO) dont la cinquante-quatrième session a eu lieu, à Beijing, en mars dernier. Pour déterminer si les dispositions d’un traité reflètent l’état du droit international coutumier, il a recommandé d’appliquer les critères d’objectivité et d’impartialité, en se basant strictement sur la pratique générale et l’opinio juris. Il faut aussi, a-t-il conseillé, mener une évaluation complète du rôle supplémentaire de la jurisprudence et de la doctrine des États.
Le représentant a ensuite abordé le chapitre de l’« Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État ». Il a soutenu le projet d’article 6 sur la portée de l’immunité ratione materiae, ainsi que le projet d’article 2 sur les « actes accomplis à titre officiel ». À son avis, la définition de l’« exercice de l’autorité de l’État » devrait être interprétée de manière large et celle d’un acte exercé dans ce cadre devrait être précisée au cas par cas. Il a aussi souhaité que la CDI clarifie, dans le projet d’articles ou les commentaires associés, que les règles de l’immunité sont des règles de procédure et non des règles de fond du droit international. Enfin, à propos du chapitre relatif à la « Protection de l’environnement en rapport avec les conflits armés », M. Xu a conseillé de faire la distinction entre les règles applicables aux conflits armés internationaux et celles applicables aux conflits armés non internationaux.
Mme ANDREJA METELKO-ZGOMBIĆ (Croatie) a soutenu l’approche suivie par la Commission du droit international pour aborder la question des crimes contre l’humanité. Elle a jugé important que la Commission identifie clairement et avec précision la notion juridique et l’étendue de ces crimes. Elle lui a conseillé de se baser sur le cadre juridique existant qui réside dans plusieurs conventions internationales, le droit coutumier international, les lois nationales et les instruments élaborés précédemment par la Commission, auxquels s’ajoutent les statuts et la jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux.
Mme Metelko-Zgombić a également souhaité que le projet fasse bien la distinction entre les crimes contre l’humanité et les autres principaux crimes internationaux, comme les crimes de guerre, sachant que la frontière entre les deux est encore floue dans la théorie comme dans la pratique. Elle a estimé qu’il n’y avait pas besoin d’inclure dans le projet d’article 2 la référence au conflit armé. Outre le fait que les crimes contre l’humanité ne sont pas nécessairement liés à des conflits armés, omettre cette référence permet de bien faire la différence entre crime contre l’humanité et crimes de guerre, a-t-elle argué.
Pour ce qui est des éléments spécifiques constitutifs du crime contre l’humanité, qui le différencient des autres principaux crimes internationaux, Mme Metelko-Zgombić a estimé qu’il fallait comprendre que les acteurs non étatiques étaient inclus. L’expression « politique d’une organisation » se comprend donc comme les mesures ou les politiques de toute organisation ou groupe ayant la capacité et les ressources de mener une attaque systématique. Enfin, concernant les projets d’articles .1.j et 3.2.h, elle a indiqué préférer les expressions « discrimination raciale » ou « ségrégation » plutôt que celle d’« apartheïd ».
M. CLAUDIO TRONCOSO (Chili) a affirmé que les résolutions adoptées par les organisations internationales ou lors de conférences internationales pouvaient participer à la formation d’un droit international coutumier. Une attention spéciale devrait être accordée aux résolutions de l’Assemblée générale, a-t-il dit. Au sujet de l’inaction d’un État, il a indiqué qu’en droit international le silence ne vaut généralement pas consentement. Pour que l’inaction d’un sujet de droit international soit juridiquement contraignante, sa portée doit être clairement limitée aux cas où la réaction d’un sujet par rapport à la conduite d’un autre est attendue mais ne se produit pas.
À la différence des crimes de guerre et de génocide, il n’existe pas de traité international qui oblige spécifiquement les États à prévenir et punir les crimes contre l’humanité, a poursuivi M. Troncoso. Rappelant que de tels crimes constituent des crimes en vertu du droit international, il a jugé essentiel de créer une obligation internationale aux fins de punir et réprimer de tels crimes par le biais d’un traité spécifique.
Au titre des « Accords et pratiques ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », M. Troncoso a expliqué que le traité constitutif des Nations Unies constitue la « Magna carta du droit international ». C’est dans ce contexte que le projet de conclusion 11 revêt toute son importance en indiquant que les articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités s’appliquent aux traités constitutifs des organisations internationales. Il a poursuivi en affirmant que ces traités peuvent être interprétés à la lumière d’accords et de la pratique ultérieure, prenant pour exemple le paragraphe 3 de l’Article 27 de la Charte, par lequel l’abstention d’un membre permanent du Conseil ne constitue pas un obstacle à l’adoption d’une résolution. Cette interprétation a reçu le soutien des États Membres, a-t-il dit, avant de rappeler qu’un traité ne saurait être amendé ou modifié par une pratique suivie.
Enfin, le représentant a salué l’inclusion du thème du jus cogens dans le programme de travail, ajoutant que ces normes constituaient les fondations du droit international.
Mme MARÍA PALACIOS PALACIOS (Espagne) a traité d’abord de la « Détermination du droit international coutumier ». Elle a jugé trop stricte la position de la Commission, qui exclut la conduite des acteurs non étatiques autres que les organisations internationales pour examiner la pratique dans le cadre du droit international coutumier. En ce qui concerne la preuve de l’acceptation comme étant le droit, elle a jugé intéressant d’examiner l’inaction non seulement comme preuve d’opinio juris mais aussi comme preuve de dissolution d’une opinio juris précédente.
À propos du chapitre des « Crimes contre l’humanité », la représentante a noté que le travail de la Commission avait été facilité par l’existence d’instruments conventionnels adoptés précédemment, comme le Statut de Rome et la Convention de 1948 sur la prévention et la répression du crime de génocide. Elle a estimé que le contenu du projet d’article 1: « Les présents projets d’article s’appliquent à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité » pourrait être le titre du projet d’article, ce qui entraînerait donc la suppression de cet article. Elle préférerait en outre que le terme « s’applique » soit remplacé par « concerne ».
Sur le chapitre « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », la représentante a commenté le projet de conclusion 11 relatif aux « Actes constitutifs d’organisations internationales ». Ce texte serait plus clair, à son avis, s’il disait spécifiquement que les accords ultérieurs, la pratique ultérieure et les autres pratiques ultérieures se réfèrent aux accords et à la pratique des États parties à un traité constitutif de l’organisation internationale. Ensuite, étant donné que l’article 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités ne fait pas référence à une pratique quelconque, il ne lui a pas semblé utile de parler de « pratique ultérieure sous l’article 32 », du moins dans la version espagnole.
Mme MARIA DEL PILAR ESCOBAR (El Salvador) a jugé acceptable le projet de conclusion 3 sur l’appréciation de la preuve de la relation entre les deux éléments constitutifs du droit international coutumier. La représentante a cependant proposé de changer le texte « évaluation de l’existence des deux éléments » en « moyen pour examiner les deux éléments ». Concernant le projet de conclusion 10 relatif à l’opinio juris, Mme Escobar a estimé que ce projet devait partir du principe que toute inaction ne peut être considérée comme appréciation; à cet égard, seuls deux critères sont pour le moment considérés. El Salvador propose d’ajouter d’autres critères limitatifs, comme d’exiger la connaissance effective de la pratique et que celle-ci ait été observée pendant un certain temps. Venant à la question de l’objecteur persistant, objet du projet de conclusion 15, la représentante a déclaré qu’un État ne saurait être soumis par une règle, si la règle apparaît durant le processus de formation de la coutume. Il ne faut donc pas confondre la figure de l’objecteur persistant avec la violation de la norme de droit coutumier et les autres normes de droit international.
Mme Escobar a estimé que le projet d’articles sur les « Crimes contre l’humanité » devait dire clairement que ces derniers peuvent être commis à n’importe quel moment, que ce soit en temps de guerre ou en temps de paix. El Salvador propose aussi une modification du texte en espagnol pour une meilleure compréhension. En ce qui concerne la définition des crimes contre l’humanité, Mme Escobar a souligné la nécessité de conserver la cohérence avec les autres traités déjà existants, mais a estimé que cela ne devait pas signifier une reproduction automatique de leur contenu. Elle a proposé de discuter de la portée de la définition des crimes contre l’humanité. En ce qui concerne les travaux futurs de la Commission, elle a suggéré que la Commission développe l’obligation de réparation comme cela a été reconnu déjà par divers tribunaux traitant des droits de l’homme, en plus des obligations pour prévenir et sanctionner les crimes contre l’humanité.
Enfin, concernant la question des « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », la représentante a noté avec satisfaction qu’une attention particulière avait été donnée aux particularités des organisations internationales, qui, contrairement aux États, se définissent par une spécialisation. Par ailleurs, tout en reconnaissant les difficultés liées à l’analyse de la pratique ultérieure due à leur grande diversité, elle a estimé qu’il serait intéressant d’incorporer l’analyse des auteurs qui réalisent la pratique ultérieure, c’est-à-dire, ceux à qui il est possible d’attribuer la pratique ultérieure de l’organisation internationale. Outre les traités constitutifs des organisations, il serait d’une grande utilité de mettre en place un projet de conclusion spécifique en respectant les traités adoptés par une organisation internationale, en tenant compte de la Convention de Vienne sur le droit des traités.
Mme İPEK ZEYTINOĞLU ÖZKAN (Turquie) a salué les progrès accomplis dans l’étude de la question de la détermination du droit international coutumier. En ce qui concerne le projet de conclusion 4, elle s’est dite d’accord avec l’idée que la conduite d’un acteur non étatique ne pouvait pas constituer une pratique susceptible d’aider à former ou identifier le droit international coutumier. Sur le projet de conclusion 11, relatif à l’inaction, elle s’est dite d’accord avec la CDI sur la nécessité d’examiner plus avant les circonstances dans lesquelles l’inaction peut être considérée comme pertinente. Elle a, en revanche, exprimé son désaccord, à propos du projet de conclusion 12, avec l’avis selon lequel la distribution géographique des parties à un traité pourrait servir de preuve du caractère général d’une pratique. Elle a également souhaité qu’on prévoie un seuil élevé pour accorder une valeur de preuve aux résolutions des organisations internationales.
Au chapitre des « Crimes contre l’humanité », la représentante a noté que la définition figurant au projet d’article 3 différait de la définition prévue au Statut de Rome sur deux points. Elle a d’abord remarqué que la Convention contre la torture contenait une disposition similaire à celle du paragraphe 4 de ce projet d’article. « Ce projet d’article est sans préjudice de toute définition plus large prévue par tout instrument international ou loi nationale .» Étant donné que l’objectif des projets d’articles est l’« harmonisation des lois nationales », nous doutons de l’intérêt de ce paragraphe, a-t-elle argué. La dernière partie du paragraphe 1 (h), qui est adaptée de l’article 7, paragraphe 1 (h), du Statut de Rome, fait référence au crime de génocide et aux crimes de guerre, a-t-elle aussi noté, en relevant que ces derniers ne sont pas définis dans le projet d’articles. Elle a dès lors demandé d’écarter les incertitudes à cet égard.
M. ANDREA TIRITICCO (Italie) a apporté son soutien au projet de conclusion 11 des travaux de la CDI sur les « Accords et pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités », exprimant son appréciation quant au choix de se concentrer sur l’interprétation des traités qui sont les instruments constitutifs des organisations internationales.
M. Tiriticco a, par ailleurs, salué l’approche en trois phases privilégiée par le Rapporteur spécial sur la « Protection de l’environnement » en rapport avec les conflits armés. Il a recommandé d’étudier davantage les liens entre le droit humanitaire international et le droit de l’environnement, ainsi qu’avec le droit des droits de l’homme en relation avec la protection de l’environnement et le droit à la santé dans les situations de conflits armés.
S’agissant de l’« Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État », M. Tiriticco s’est félicité de la référence faite au concept d’éléments de l’autorité gouvernementale dans le commentaire à l’article 5. Il a dit apprécier le classement, dans les commentaires du Rapporteur spécial et de la CDI, de l’exercice des pouvoirs de police et des activités des forces armées sous la catégorie largement reconnue par la pratique judiciaire d’exercice de l’autorité gouvernementale ou de l’État s’agissant des objectifs de déterminer l’application de l’immunité ratione materiae.
M. TOMOYUKI HANAMI (Japon) a estimé que pour déterminer le droit international coutumier, il fallait adopter une approche prudente concernant l’inaction. En l’absence d’expression claire de plusieurs États à différentes occasions, l’inaction ne devrait pas être prise comme une preuve d’acceptation de cette attitude comme étant le droit. Sur la question de l’objecteur persistant, il a rappelé la controverse qui entoure cette règle et demandé d’en discuter plus avant en se basant sur des exemples concrets. Pour ce qui est du rôle des résolutions des organisations internationales, il a dit partager les conclusions de la Commission selon lesquelles les résolutions adoptées par une telle organisation peuvent servir de preuve pour établir l’existence et le contenu d’une règle de droit international coutumier. En même temps, a-t-il ajouté, la valeur de preuve de ces résolutions doit dépendre des autres éléments de preuve de la pratique et de l’opinio juris.
Sur la question des « Crimes contre l’humanité », M. Hanami a dit apprécier les travaux de la Commission qui visent à créer des « relations horizontales » entre États et à réguler la coopération interétatique et ce, afin de renforcer les efforts de prévention de la communauté internationale. Il a estimé que les travaux en cours devraient éviter des conflits juridiques avec les obligations des États en vertu des instruments constitutifs des cours ou tribunaux internationaux, dont la Cour pénale internationale. Il a dit attendre avec intérêt les discussions de la Commission sur l’étendue de l’immunité ou sur les questions juridictionnelles en relation avec le Statut de Rome.