En cours au Siège de l'ONU

Soixante-dixième session,
14e séance – matin
AG/J/3503

Sixième Commission: le Conseil de sécurité au cœur des discussions sur le rapport du Comité spécial de la Charte

À l’occasion de l’examen, aujourd’hui, par la Sixième Commission (Commission des questions juridiques) du rapport du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement de rôle de l’Organisation, de nombreuses délégations ont largement évoqué le rôle du Conseil de sécurité au sein du système des Nations Unies.

L’Assemblée générale reste le principal organe délibérant des Nations Unies, ont rappelé notamment Cuba, le Soudan et le Qatar.  Le Mouvement des pays non alignés et certains pays, dont le Nicaragua et Cuba, ont dénoncé les empiètements constants du Conseil de sécurité sur les attributions des autres organes, y compris l’Assemblée générale et le Conseil économique et social (ECOSOC), lui reprochant de s’attribuer des sujets qui ne sont ni de son ressort, ni dans ses attributions, à l’exemple des changements climatiques.

Les reproches adressées au Conseil de sécurité concernent aussi l’imposition de sanctions.  L’Union européenne et les États-Unis considèrent celles–ci comme un instrument important pour le maintien et la restauration de la paix internationale, conformément à la Charte.  Pour l’Union européenne, la pratique du Conseil de sécurité, ces dernières années, démontre d’ailleurs que les sanctions peuvent atténuer les conséquences néfastes pour les populations civiles ainsi que pour les parties tierces.

Pour la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) comme pour le Mouvement des pays non alignés, les sanctions doivent être appliquées conformément aux principes de la Charte et dans le respect des droits de l’homme.  Pour les pays non alignés, le Conseil de sécurité ne devrait imposer de sanctions qu’en dernier recours et uniquement en cas d’acte d’agression caractérisée.  Mesure grave, l’imposition de sanctions ne devrait pas s’appliquer à titre préventif.  Les objectifs des sanctions doivent être clairement définis, elles doivent s’accompagner d’un calendrier précis et prendre fin dès que le but dans lequel elles ont été prises est atteint.  Le Nigéria a souligné que la plupart des sanctions existant à l’heure actuelle sont imposées à des États en développement.

Pour l’Inde, le maintien de la paix et de la sécurité internationales relève en premier lieu de la responsabilité du Conseil de sécurité, qui agit au nom des États Membres conformément à son mandat.  Il a donc aussi la responsabilité de trouver des solutions aux problèmes des États tiers affectés par les sanctions qu’il impose.  Sur cette question, l’Union européenne estime que, puisque le Rapport du Secrétaire général constate que ni l’Assemblée générale ni l’ECOSOC n’ont signalé de demandes d’assistance de la part d’États tiers affectés par les sanctions depuis 2003, il n’est plus nécessaire d’étudier cette question.  Pour les États-Unis, le Comité ne devrait en traiter que tous les trois ans.  En revanche, la CELAC juge, pour sa part, important d’en continuer l’examen.

Le Groupe des États d’Afrique, qui dénonce le statu quo actuel dans les travaux du Comité et y voit un risque d’affaiblissement de l’Organisation, a mis l’accent sur la nouvelle proposition, présentée par le Ghana, qui porte sur le renforcement de la relation et de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales ou les arrangements dans la résolution pacifique des conflits.  Le Ghana soumettra en 2016 une proposition révisée au Comité spécial; pour sa part, l’Union européenne a déclaré que cette question était déjà traitée par d’autres instances et qu’il fallait éviter les doublons.

Plusieurs délégations ont aussi rappelé qu’aux termes de la Charte, les États devaient chercher à régler pacifiquement leurs différends.  L’Inde a estimé que la Cour internationale de Justice (CIJ) avait un rôle important à jouer en ce sens.  D’autres pays ont rappelé la possibilité qu’a l’Assemblée générale de demander à la CIJ un avis consultatif.  Cuba a proposé que l’Assemblée générale demande un tel avis sur la question du recours à la force, ce à quoi les États-Unis ont répété leur opposition.

En début de séance, le Directeur de la Division de la codification et le Chef de la Division du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité et des pratiques connexes, ont présenté l’état d’avancement de la mise à jour des Répertoires.

Demain, vendredi 23 octobre 2015, la Sixième Commission achèvera d’étudier le rapport du Comité spécial de la Charte avant de se pencher sur le Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international.

RAPPORT DU COMITÉ SPÉCIAL DE LA CHARTE DES NATIONS UNIES ET DU RAFFERMISSEMENT DU RÔLE DE L’ORGANISATION (A/70/33, A/70/119 ET A/70/295)

Déclarations

M. ODO TEVI, Président du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement de rôle de l’Organisation, a présenté le rapport du Comité spécial de la Charte en soulignant que le Comité spécial s’était réuni pour étudier la mise en œuvre des dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l’assistance aux États tiers touchés par l’application de sanctions et pour continuer d’améliorer les ressources.  M. Tevi a ensuite détaillé les différents chapitres du rapport.  Concernant le maintien de la paix et de la sécurité internationales, il a pris note de l’examen des modifications proposées par la Libye aux fins de renforcement du rôle joué par l’ONU dans ce domaine.  Il a également évoqué la nouvelle version révisée du document de travail présenté par le Venezuela et intitulé « Groupe de travail à composition non limitée chargé d’étudier la question de la bonne mise en œuvre de la Charte des Nations Unies dans les aspects relatifs au rapport fonctionnel entre les différents organes de l’Organisation ».  M. Tevi a également souligné l’examen par le Comité de la question de l’organisation d’une manifestation qui permettrait de célébrer comme il se doit le soixante-dixième anniversaire de la Charte des Nations Unies.  Il a par ailleurs a évoqué la question du règlement pacifique des différends et celle du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et le répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, ainsi que le Chapitre V du rapport, qui porte sur les méthodes de travail du Comité spécial et la définition des nouveaux sujets.

M. HUW LLEWELLYN, Directeur de la Division de la codification, a présenté l’état d’avancement des travaux relatifs au Répertoire de la pratique des organes des Nations Unies.  Il a indiqué qu’il avait été décidé que le Supplément nº 11 concernerait la période 2010-2015.  Il a estimé que des progrès importants avaient été réalisés concernant le Supplément nº 10.  Les études des 43 volumes achevés, y compris 15 volumes en cours de publication, sont disponibles sur le site Internet des Nations Unies en ce qui concerne le Répertoire.  Des versions préliminaires de plusieurs études portant sur des articles individuels destinés au volume III des Suppléments 7, 8 et 9 ainsi qu’une partie importante des études destinées au Supplément nº 10 achevées sont également disponibles sur le site Internet.  Une version électronique du Répertoire offre aux usagers l’occasion de chercher toutes les études instantanément en anglais, en espagnol et en français.   M. Llewellyn a également souligné la poursuite depuis 12 ans de la coopération avec la Faculté de droit de l’Université de Columbia à New York ainsi qu’avec la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.

Concernant le financement des travaux, le Directeur a rappelé la possibilité de faire des contributions volontaires au Fonds d’affectation spécial et a invité le secteur privé et les particuliers à y contribuer.  Depuis la publication du rapport 2014, 10 000 dollars ont été reçus de la Turquie et, au 30 juin 2015, le budget du Fonds d’affectation spécial était de 31 699 dollars, a conclu M. Llewellyn.

M. GREGOR BOVENTER, Chef de la Division du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité et des pratiques connexes, a estimé qu’en 2015, sa Division avait continué de faire des progrès dans la mise à jour du Répertoire, expliquant qu’elle avait travaillé simultanément sur les Suppléments nos 18 et 19.  Durant l’année écoulée, la Division a concentré son travail sur le Supplément nº 18 du Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, qui couvre les années 2012 et 2013.  Cinq parties sont déjà disponibles en ligne et l’ensemble du Supplément devrait l’être au début 2016 dans sa version préliminaire, a-t-il déclaré.  Le travail de fond a été établi en reprenant toute la pratique du Conseil de sécurité à partir d’une base de données interne.  Toutes les versions en langue anglaise du Répertoire ont été publiées jusqu’au Supplément nº 16 inclus, a précisé, M. Boventer, qui a invité les États Membres à se rendre sur les sites Web de l’Organisation qui offrent une panoplie de moyens de recherches, ce qui permet aux chercheurs ou autres d’analyser la pratique du Conseil de sécurité.

Les progrès ont été réalisés grâce à toute une série de mesures destinées à rendre le travail plus efficace, a déclaré M. Boventer, qui a ensuite rappelé que les travaux futurs sur le Répertoire dépendront des ressources disponibles.  À cet égard, il s’est félicité des contributions récentes de l’Angola, de la Turquie et du Bénin.  Il a aussi remercié la Chine pour avoir récemment appuyé un expert associé.  M. Boventer a souligné que la mise à jour du répertoire demandait beaucoup de travail et a encouragé tous les États à contribuer au Fonds d’affectation spéciale.

M. AGUSTIN FORNELL (Équateur), au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes - CELAC, a rappelé que, pour s’acquitter de son travail, le Comité spécial dépendait de la volonté politique des États Membres et de la pleine mise en œuvre et l’optimisation des méthodes de travail.  À cet égard, il est important que les États Membres redoublent d’efforts pour que les débats du Comité puissent se fonder sur des nouveaux sujets identifiés et sur l’étude des sujets en cours.  Cela permettra de faire une utilisation maximale des ressources du Comité.

Le représentant a rappelé l’importance d’un règlement pacifique des différends entre États ainsi que l’importance du respect des résolutions de l’Assemblée générale.  Pour la CELAC, la légitimité du recours aux sanctions est essentielle à leur efficacité, ainsi qu’au maintien et à la consolidation de paix dans le monde.  Les sanctions doivent être appliquées en vertu des principes de la Charte et des droits de l’homme.  Par ailleurs, la CELAC exhorte le Conseil de sécurité à respecter ses propres méthodes de travail, y compris de ses procédures, en particulier pour ce qui concerne le maintien et la consolidation de la paix dans le monde. C’est important pour la crédibilité de l’Organisation.  Enfin, la CELAC juge important de continuer d’étudier les conséquences négatives pour des pays tiers des sanctions décidées par le Conseil de sécurité. 

M. GHOLAMHOSSEIN DEHGHANI (République islamique d’Iran), au nom du Mouvement des pays non alignés, a dit attacher une grande importance au travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation.  Le Mouvement attache en effet la plus grande importance au processus de réforme et à la démocratisation des principaux organes des Nations Unies et au respect de l’autorité de l’Assemblée générale, y compris pour les questions relatives à la paix et la sécurité internationales.  L’Assemblée générale demeure le principal organe délibérant représentatif des Nations Unies.  Le Mouvement des pays non alignés est préoccupé par les empiètements constants du Conseil de sécurité sur les attributions des autres organes, y compris l’Assemblée générale et le Conseil économique et social (ECOSOC).  Il réaffirme que la réforme de l’Organisation devrait être conduite en accord avec les principes et procédures établies par la Charte des Nations Unies et en préserver le cadre juridique.  Il est donc important que le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation continue son analyse, a déclaré M. Dehghani.

Pour le Mouvement des pays non alignés, le Conseil de sécurité ne devrait imposer de sanctions qu’en dernier recours et uniquement en cas d’acte d’agression caractérisée, conformément à la Charte.  Les sanctions ne doivent pas s’appliquer à titre de mesures de prévention.  Ce sont des instruments forts et leur imposition pose des problèmes moraux importants.  Les objectifs des sanctions doivent être clairement définis, a encore ajouté M. Dehghani, pour qui elles devraient s’accompagner d’un calendrier précis et prendre fin dès que le but dans lequel elles ont été prises est atteint.  En outre, il faut tenir compte d’autres aspects concernant les sanctions, notamment celle des compensations.

Le représentant a rappelé que, cette année, le Mouvement des pays non alignés avait fait deux propositions, l’une intitulée « règlement pacifique des différends et leur impact sur le maintien de la paix », l’autre, présentée par le Ghana, sur « le renforcement des relations et de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales ou les arrangements dans le règlement pacifique des différends ».  Il a regretté qu’en dépit de l’importance du sujet, la Commission n’ait pas pu atteindre un consensus sur ce thème « 70 ans après son adoption, la Charte des Nations Unies est toujours d’actualité ».

M. KINGSLEY MAMABOLO (Afrique du Sud), au nom du Groupe des États d’Afrique, a déclaré que les travaux du Comité devaient protéger l’Organisation, afin qu’on ne la considère pas comme hypocrite.  Il a dénoncé le statu quo actuel, qui risque d’entraîner l’affaiblissement de l’Organisation et d’entamer sa crédibilité.  Il a regretté que le Comité spécial n’ait pas pu révéler son potentiel, du fait de ses méthodes de travail et à cause « des luttes idéologiques » qui prévalent dans ses travaux, qui sont pourtant des travaux plutôt juridiques.  Il a proposé de réviser l’ordre du jour, les méthodes de travail et l’étude de nouveaux thèmes pour raffermir le rôle des Nations Unies, notamment en matière de maintien de la paix dans le monde.  Après avoir apporté son appui aux différentes propositions présentées, ces dernières années, au Comité par la Libye, le Venezuela, la Fédération de Russie et le Bélarus, M. Mamabolo a mis l’accent sur la nouvelle proposition du Ghana, sur le renforcement de la relation et de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales ou les arrangements dans la résolution pacifique des conflits.  

M. GILLES MARHIC de l’Union européenne a déclaré que le respect des principes de la Charte était un des principes directeurs de l’Union européenne.  La Charte, en 1945, représentait une lueur d’espoir pour le monde et elle reste pertinente 70 ans plus tard, a-t-il ajouté, soulignant l’importance des trois piliers.

Demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur les effets juridiques du recours à la force armée par des États sans l’autorisation préalable du Conseil de sécurité, en dehors des cas où serait exercé le droit de légitime défense sur l’imposition de sanctions, n’est pas utile à ce stade, a déclaré M. Marhic.  En ce qui concerne la question du maintien de la paix internationale, l’Union européenne considère que les sanctions restent un instrument important, conformément à la Charte, pour le maintien et la restauration de la paix internationale.  La pratique du Conseil de sécurité, ces dernières années, démontre que les sanctions peuvent atténuer les conséquences néfastes pour les populations civiles ainsi que pour les parties tierces.  Quant à la question spécifique de la mise en œuvre des dispositions de la Charte relatives aux États tiers affectés par l’application de sanctions, l’Union européenne estime que, puisque le Rapport du Secrétaire général constate que ni l’Assemblée générale ni l’ECOSOC n’ont fait état de demandes en ce sens de la part d’États depuis 2003, il n’est plus nécessaire d’étudier la question de l’assistance aux États tiers affectés par les sanctions.

Enfin, l’Union européenne estime que la question du lien entre les Nations Unies et les organisations régionales, thème du document de réflexion présenté au Comité de la Charte par le Ghana, est déjà traitée par d’autres instances et qu’il faut éviter les doublons.  De même, l’Union européenne reste peu convaincue par le traitement au sein du Comité de la question du « règlement pacifique des différends ».  Enfin, l’Union européenne appelle le Secrétariat à redoubler d’effort pour mettre à jour et rendre disponibles, dans toutes les langues officielles des Nations Unies, le Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et le Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA VELÁSQUEZ (Pérou) a réaffirmé le devoir des États d’agir de bonne foi conformément aux principes de la Charte.  En ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité internationales, il faut poursuivre les séances d’informations avec le Département des opérations de maintien de la paix, a suggéré le représentant.  M. Meza-Cuadra Velásquez a estimé, par ailleurs, qu’il fallait maintenir le thème du règlement des différends à l’ordre du jour du Comité spécial.  À ce sujet, il a souligné le rôle et la contribution de la Cour internationale de Justice (CIJ) dans le règlement pacifique des conflits, rappelant qu’elle pouvait notamment donner des avis consultatifs à la demande de l’Assemblée générale.   

Mme TANIERIS DIEGUEZ LAO (Cuba) a réitéré l’appui déterminé de Cuba au Comité spécial.  Elle a dénoncé les pratiques de certains États qui essaient de réinterpréter les principes de la Charte.  L’Assemblée générale est le principal organe délibérant des Nations Unies, a-t-elle rappelé, et le Comité spécial est le lieu adéquat pour vérifier la bonne application des principes du droit international.  Le Comité spécial devrait ainsi rester ouvert pour traiter de toute décision ou mesure prise lorsque celle-ci a des incidences sur l’interprétation de la Charte.  La représentante a ensuite rappelé les différentes résolutions qui ont donné son mandat au Comité spécial. 

Cette année, des documents ont été présentés au Comité, a rappelé Mme Dieguez Lao, qui a déploré que l’adoption de tels documents précieux n’ait pas été possible.  La représentante a ensuite appuyé la proposition tendant à ce que l’Assemblée générale demande un avis consultatif à la Cour internationale de Justice concernant le recours à la force.  Sur les méthodes de travail, Cuba estime que les propositions présentées au Comité devraient être débattues paragraphe par paragraphe, de façon raisonnée.  La situation actuelle dans laquelle se trouve le Comité est le résultat direct de la volonté politique de certains États, a poursuivi la représentante, qui s’est opposée à toute tentative de réduire les travaux du Comité spécial sur une base biennale, voire tous les trois ans.

M. DMITRY SPRESOV (Bélarus) s’est dit préoccupé du blocage actuel au Comité spécial.  Il a rappelé qu’en février 2015, le Comité spécial n’avait pas été en mesure de se mettre d’accord sur la célébration du soixante-dixième anniversaire de la Charte des Nations Unies.  Il s’est dit convaincu que les débats de droit international étaient longs et que les décisions devaient être prises par consensus.  Pour le représentant, il ne faut pas donner la priorité à l’examen des méthodes de travail du Comité, étant donné les défis posés à la communauté internationale en matière de paix et de la sécurité dans le monde.  Il a suggéré que le Comité spécial se focalise sur les initiatives du Ghana, de la Libye et de la Turquie. 

M. IDREES MOHAMMED ALI MOHAMMED SAEED (Soudan) a dit attacher beaucoup d’importance au Comité spécial et avoir étudié avec minutie le rapport sur cette question.  Il est très important que le Comité spécial joue un rôle essentiel dans les discussions actuelles.  L’Assemblée générale est le principal organe représentatif et le forum où les délibérations se tiennent.  À cet égard, l’Assemblée générale a un rôle à jouer dans le renforcement de la paix et la sécurité internationales.  La Charte des Nations Unies a précisé les responsabilités de l’Assemblée générale de façon très claire mais la pratique montre que le Conseil de sécurité outrepasse ses droits et empiète sur les fonctions de l’Assemblée générale et celles du Conseil économique et social, a déploré le représentant, pour qui l’approche adoptée par le Conseil de sécurité lors de l’imposition de sanctions est un sujet de préoccupation pour les États Membres.  Imposer des sanctions est un acte très grave qui touche directement les populations, a souligné M. Saeed, pour qui le fait d’imposer des sanctions sans mandat est une violation du droit international qui ne peut pas contribuer au rapprochement entre les peuples et est donc contraire aux principes de la Charte.  Le représentant a lancé un appel à ceux qui imposent des sanctions unilatérales pour qu’ils respectent le droit international.

Nous attendons le processus de réforme de la Charte depuis longtemps, a poursuivi M. Saeed.  Le représentant a demandé que la Cour internationale de Justice puisse se prononcer sur la question des sanctions.  Les Nations Unies doivent, en outre, encourager les mécanismes régionaux pour atteindre la paix et la sécurité, conformément au Chapitre VIII de la Charte.  En tant que vice-président du Comité spécial, le Soudan a œuvré pour réactiver ses travaux, a rappelé le représentant, qui a appelé tous les États Membres à participer aux débats du Comité spécial de façon positive.

M. ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a rappelé que la Charte avait établi des mandats pour chacun des principaux organes des Nations Unies, notamment le Conseil de sécurité.  Le représentant a mis l’accent sur le rôle de l’Assemblée générale et a mis en garde contre tout empiètement par le Conseil de sécurité sur les fonctions de l’Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC).  Le Qatar, qui a consenti des efforts pour atténuer les tensions dans la région du Moyen-Orient, se prononce en faveur du règlement pacifique des différends et apporte son appui à la proposition faite au Comité spécial par le Mouvement des pays non alignés sur la question.  M. Al-Thani a en outre déclaré que les sanctions étaient des instruments fondamentaux pour le maintien de la paix mais a ajouté qu’il ne fallait les imposer qu’en dernier recours.  Les sanctions devraient être accompagnées par des calendriers et elles ne devraient être prises que dans des cas précis de menace à la paix et à la vie des gens.  Le représentant a estimé utile de prévoir les impacts de ces sanctions sur les États tiers.  En conclusion, le représentant a jugé important de rattraper le retard dans les travaux du Comité spécial et a rappelé le soutien que le Qatar lui apporte.

Mme ALINA JULIA ARGÜELLO GONZÁLEZ (Nicaragua) a affirmé que les travaux du Comité spécial de la Charte étaient essentiels à l’Organisation.  Elle a noté avec grande préoccupation que le Conseil de sécurité s’attribuait des sujets qui ne sont ni de son ressort, ni dans ses attributions, comme les changements climatiques.  La représentante a en outre estimé que la Cour internationale de Justice revêt une importance particulière en favorisant le règlement pacifique des différends.  Cette question du règlement pacifique des différends doit donc rester à l’ordre du jour, a-t-elle noté.  Mme Argüello González s’est opposée à une réduction des travaux de ce Comité, que certaines délégations ont demandée.  Le temps dévolu aux travaux du Comité spécial est absolument nécessaire, a-t-elle affirmé.  Elle s’est prononcée pour une renaissance des Nations Unies et a appuyé un rôle éthique des agences des Nations Unies, qui serait exempt de toute interférence des États souverains.

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE (Ghana) a rappelé la proposition présentée au Comité spécial par son pays sur le « renforcement de la relation et de la coopération entre les Nations Unies et les organisations et arrangements régionaux dans le règlement pacifique des différends ».  Cette proposition a été faite en reconnaissance des travaux qui ont été réalisés dans différents organes des Nations Unies sur le sujet, a expliqué la représentante.  Une attention particulière devrait être accordée à la détermination de mécanismes et de mesures clairs, afin de traiter de manière efficace les écarts et les défis dans la relation entre les Nations Unies et les organisations, et les arrangements régionaux dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-elle ajouté.  Étant donné le rôle important des organisations régionales dans la promotion de l’état de droit, le maintien de la paix et de la sécurité internationales, le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire, les Nations Unies doivent travailler assidûment sur ces questions et viser à améliorer la coordination et la coopération avec ces organisations, a ajouté la représentante.  La proposition du Ghana se focalise sur l’identification des écarts existants et explore des mécanismes institutionnels susceptibles d’apporter une clarification dans la relation entre les Nations Unies et les organisions régionales et de forger des partenariats stratégiques ainsi que des interactions plus efficaces en temps utile.  Le Ghana soumettra en 2016 une proposition révisée au Comité spécial et formulera des recommandations sur le sujet, a conclu la représentante.

Mme VIJILA SATHYANANTH (Inde) a pris note du rapport du Comité spécial et a dit attacher la plus haute importante aux travaux de celui-ci.  Les questions spécifiques du Comité méritent un examen approfondi, a-t-elle ajouté.  Ainsi, l’application de sanctions dans le contexte du maintien de la paix et de la sécurité internationales revêt une grande importance.  Le maintien de la paix et de la sécurité internationales relève principalement de la responsabilité du Conseil de sécurité, qui agit au nom des États Membres conformément à son mandat.  Il a donc la responsabilité de trouver des solutions aux problèmes des États tiers affectés par les sanctions qu’il impose.  À cet égard, l’Article 50 de la Charte ne doit pas être considéré comme une question de procédure, mais comme obligeant le Conseil à trouver des solutions pour ces États.  L’Inde réitère sa position, à savoir le Conseil de sécurité devrait se concentrer sur les effets directs de l’imposition de sanctions sur des États tiers.  Il est essentiel d’assurer une aide importante aux États tiers affectés, a-t-elle déclaré.  Par ailleurs, régler leurs différends de façon pacifique est un devoir des États au titre de la Charte.  Les États peuvent choisir librement le moyen de régler leurs différends et, à cet égard, la Cour internationale de Justice à un rôle à jouer.  L’Inde appuie le maintien du thème du règlement pacifique des différends à l’ordre du jour du Comité pour sa prochaine session.

M. MEHDI REMAOUN (Algérie) a réitéré la nécessité de respecter la Charte des Nations Unies et les mandats qu’elle confère à chaque organe, y compris l’équilibre entre l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité.  Le représentant a estimé qu’il serait bon de se mettre d’accord sur la proposition du Venezuela visant à créer un groupe de travail pour étudier la mise en œuvre de la Charte dans ses rapports fonctionnels entre les différents organes des Nations Unies, en particulier l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social (ECOSOC).  S’agissant du renforcement de l’efficacité des méthodes de travail du Comité spécial, l’Algérie juge l’étude de nouvelles approches d’une importance capitale pour revigorer les travaux du Comité.  À cet effet, le représentant a souligné la nécessité d’une bonne volonté politique des États Membres afin d’avancer sur les questions qui ont été inscrites depuis longtemps à l’ordre du jour du Comité.  Il a apporté l’appui de son pays à la proposition de Cuba concernant la validité du la Charte des Nations Unies pour son soixante-dixième anniversaire.

M. PIMPIDA RAVIRAT THANARAT (Thaïlande) a apporté son appui à toutes les initiatives et à tous les efforts visant à revitaliser le Comité spécial.  Cela comprend l’élection du Bureau trois mois avant la réunion du Comité, pour lui donner le temps de planifier et de se préparer, ainsi que pour distribuer à l’avance les documents aux États Membres.  Pour la Thaïlande, une telle initiative permettrait au Comité d’avoir plus de temps à consacrer à ses débats de fonds, y compris l’examen des propositions actuelles et nouvelles des États Membres. 

M. ESSA A. E. ESSA (Libye) a dit attacher une importance capitale au Comité spécial de la Charte et a rappelé les propositions présentées par son pays pour renforcer le rôle joué par l’ONU dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La Libye continuera à travailler avec le Comité, a-t-il assuré.  II a insisté sur la nécessité de promouvoir le rôle de l’Assemblée générale pour atteindre les objectifs des Nations Unies.  Il s’est félicité de la réduction du retard concernant les Répertoires et a insisté sur la nécessité de les publier dans toutes les langues des Nations Unies, notamment en arabe, afin que les chercheurs du monde entier puissent les consulter.

M. BELLO RINGIM (Nigéria) a estimé que les efforts pour le renforcement du rôle des Nations Unies devraient être le fruit du dialogue, de la coopération et du consensus entre les États Membres.  Pour le Nigéria, l’imposition de sanctions unilatérales va à l’encontre de la souveraineté des États et du droit international.  L’imposition de sanctions à l’encontre d’un État souverain devrait être conforme aux dispositions de la Charte des Nations Unies.  En outre, a fait remarquer le représentant, la plupart des sanctions existant à l’heure actuelle sont imposées à des États en développement, membres du Groupe des 77 et la Chine et du Mouvement des pays non-alignés.

Le représentant a répété que les sanctions ne devraient en outre être utilisées qu’en dernier recours, après épuisement de tous les autres instruments de résolution pacifique des différends.  L’objectif des sanctions imposées à un pays ne devrait pas être de punir sa population mais de viser à obtenir le respect de ses obligations internationales par ce pays.  La fréquence du recours aux sanctions internationales doit être réduite et leur portée comme leur durée doivent être limitées afin d’empêcher qu’elles ne causent des dégâts prolongés sur les populations et les États.  En outre, toutes les violations des obligations internationales ne devraient pas impliquer l’imposition de sanctions, du fait qu’il existe plusieurs voies de règlement pacifique des différends qui peuvent être explorées.  Le représentant a exhorté les États Membres à faire la plus efficace utilisation des procédures et méthodes existantes pour prévenir les différends et les résoudre pacifiquement.  Le rôle de la Cour internationale de Justice doit être renforcé et la soumission à ses décisions devrait devenir la norme.  Le Comité spécial devrait en conséquence étudier la possibilité d’examiner la légalité des sanctions unilatérales et recommander des mécanismes pour des examens périodiques de tous les régimes de sanctions. 

Le représentant a, par ailleurs, rappelé que l’Article 2, paragraphe 7, de la Charte interdit aux États Membres de s’ingérer dans les affaires intérieures d’autres États.  Pour le Nigéria, cela signifie que les Nations Unies n’ont pas compétence pour prendre des décisions qui affectent les capacités juridictionnelles d’un État Membre ni pour leur imposer une obligation juridique quelconque sans leur consentement.  À cet égard, le Nigéria note avec préoccupation une tendance des Nations Unies à accorder une validité juridique à la prétendue « orientation sexuelle et identité de genre ».  Les discussions sur cette question aux Nations Unies semblent être basées sur la supposition que la notion est définie par le droit international.  Or, ce n’est pas le cas.  Cette notion n’a pas de base dans le corpus international des droits de l’homme.  Ce manque de reconnaissance juridique est souligné par l’absence de consensus des États Membres sur l’utilisation de ce terme.  Dès lors, les États Membres n’ont aucune obligation d’adopter des lois qui accorderaient une considération particulière à des individus ou groupes sur la base de leur préférence ou orientation sexuelle.  Le fait qu’un nombre peu important d’États Membres aient reconnu la notion d’orientation sexuelle n’en fait pas une notion universellement acceptée.  En conséquence, le Nigéria appelle les Nations Unies à s’abstenir de toute nouvelle incorporation de cette notion dans leur travail et de revenir sur leur soutien actuel face à cette notion.

M. KOUSSAY ABDULJABBAR ALDAHHAK (République arabe syrienne) a déclaré que la Charte des Nations Unies avait permis de traduire les espoirs des peuples en la paix à travers le monde et d’éviter la guerre.  La Charte est la clef de voûte sur laquelle repose l’édifice du droit international.  Les célébrations du soixante-dixième anniversaire de l’ONU sont l’occasion de mesurer l’attachement des États Membres à ses principes.

La pratique au long des dernières décennies a montré qu’il fallait réformer les Nations Unies pour qu’elles puissent s’acquitter le rôle qui est le leur, a déclaré le représentant.  Pour lui, la conjoncture pénible dans laquelle se trouvent la République arabe syrienne, ainsi que d’autres États, est la conséquence directe du manque d’engagement de certains Membres influents envers le respect de la Charte.  Nos peuples souffrent d’actions prises en dehors de la Charte, a affirmé M. Aldahhak, qui a dénoncé les interventions militaires comme n’ayant fait qu’exacerber la situation difficile des pays affectés et créer un terrain fertile pour le terrorisme, sans compter les dommages causés à l’environnement.

L’occupation israélienne du Golan syrien constitue une violation de la Charte a rappelé le représentant, qui a dénoncé l’appui déclaré envers Israël de certains États influents.  Cette crise perdure sans qu’une solution n’apparaisse, a-t-il déploré.  En outre, quatre années durant, « certains États que vous connaissez » ont entravé les efforts pour trouver une solution à la crise en Syrie.  Pour ces États, le terrorisme est l’outil le plus indiqué pour maintenir leurs intérêts en Syrie, a poursuivi le représentant.  En dépit de cela, a-t-il déploré, nous n’avons entendu aucun appel pour cesser ces violations de la Charte ou pour que ces pays répondent de leurs actes.

Le représentant a encore affirmé que la plupart des victimes des déplacements de population étaient des femmes et des enfants.  Des décennies durant, la République arabe syrienne a accueilli des millions de réfugiés, a ajouté M. Aldahhak, ajoutant que son pays les avait traités avec respect et humanité.  Ce à quoi nous assistons à l’encontre des réfugiés syriens et de leur exploitation est éhonté et contraire à la Charte, a-t-il poursuivi.  Il a par ailleurs accusé des États Membres des Nations Unies de continuer à vouloir appliquer leur loi nationale à l’intérieur d’autres États, dont la Syrie.  Il a réitéré son rejet des politiques d’hégémonie, du « deux poids deux mesures » et de la sélectivité, et a réaffirmé son soutien aux propositions du Mouvement des pays non alignés. 

M. RUBÉN IGNACIO ZAMORA RIVAS (El Salvador) a déclaré que les documents qui avaient été préparés à ce jour au sein du Comité spécial étaient importants.  Pour lui, la Déclaration de Manille sur le règlement pacifique des différends et les autres modèles sur ce sujet sont des exemples de ce qui pourrait être réalisé par le Comité spécial, lequel pourrait faire de réels progrès sur beaucoup de points.  Parmi ces points figurent les règles régissant les récentes négociations sur la restructuration de la dette souveraine et le maintien de la paix et la sécurité internationales.  Ce ne sont pas des questions mineures, mais des questions d’une importance particulière compte tenu des problèmes auxquels la communauté internationale est confrontée, a poursuivi le représentant. 

M. Zamora Rivas a remercié le Secrétariat pour son travail dans la mise à jour du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies et du  Répertoire de la pratique du Conseil de sécurité, estimant qu’il s’agit là de deux documents précieux pour l’étude du droit international.  Il a aussi jugé nécessaire d’examiner les méthodes de travail du Comité spécial.  La revitalisation de ses travaux donnerait des résultats largement acceptés et assurerait sa plus grande stabilité sur le long terme, a encore estimé le représentant, qui a proposé d’étudier la fréquence des débats du Comité, ajoutant que ce dernier devrait se concentrer sur les questions susceptibleS d’aboutir à un changement réel.

M. JOHN ARBOGAST (États-Unis) a noté qu’un grand nombre de questions traitées depuis longtemps au sein du Comité spécial avaient été abordées ailleurs et pour cette raison faisaient des doublons assez conséquents.  C’est la raison pour laquelle la Sixième Commission a mis peu d’enthousiasme pour discuter de ces questions en profondeur, a déclaré le représentant, qui a émis l’espoir de voir enfin une plus grande rationalisation des travaux du Comité.  En ce sens, il a invité le Comité spécial à envisager des sessions plus courtes, voire des réunions sur une base biennale.  Le Comité devrait reconnaître que ces propositions sont raisonnables, a-t-il ajouté.

Les États-Unis estiment que le Comité spécial ne devrait pas poursuivre des travaux sur la question de la paix et de la sécurité internationales, qui viennent dupliquer les activités d’organes principaux des Nations Unies qui ont reçu mandat en ce sens aux termes de la Charte.  Dans le domaine des sanctions, le représentant a noté que les sanctions ciblées restaient un outil utile pour combattre les menaces à la sécurité internationale.  Les développements positifs sur la question des effets des sanctions sur les États tiers ont aussi été réalisés ailleurs au sein des Nations Unies, et aucun appel officiel sur cette question par des États tiers n’a été transmis depuis 2003, si bien que conserver la question de l’impact des sanctions sur les pays tiers au Comité spécial n’a que peu de sens, a-t-il déclaré.  Il a rappelé en ce sens la résolution 69/122 de l’Assemblée générale qui, tout en demandant au Comité spécial de continuer à étudier la question des États tiers affectés par les sanctions, l’invite à envisager la fréquence avec laquelle elle devrait le faire.  Pour les États-Unis, cette fréquence devrait être envisagée comme triennale.  De la même façon, il a estimé que le Secrétaire général pourrait présenter un exposé plutôt qu’un rapport sur la question.  Concernant le recours à la Cour internationale de Justice pour obtenir un avis juridique, il a rappelé la position constante de son pays qui ne soutient pas cette solution.

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