La Deuxième Commission appelle à lever les obstacles au développement de pays du Moyen-Orient et de pays frappés par des mesures coercitives unilatérales
La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a, cet après-midi, recouru à des procédures de vote pour adopter trois projets de résolution qui visent à lever les obstacles au développement du Liban, de la Syrie et de la Palestine, ainsi que pour les pays frappés par des mesures coercitives unilatérales. La Commission a également entendu la présentation de cinq projets de résolution sur lesquels elle se prononcera ultérieurement.
Par le premier projet de résolution adopté aujourd’hui, par 117 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 51 abstentions, la Deuxième Commission recommande à ce qu’il soit mis fin aux mesures économiques coercitives qui ne sont pas autorisées par les organes compétents de l’ONU ou qui sont contraires aux principes du droit international énoncés dans la Charte des Nations Unies.
Ce texte propose également à l’Assemblée générale d’engager instamment la communauté internationale à prendre d’urgence des mesures efficaces pour mettre fin au recours unilatéral à ces mesures à l’encontre de pays en développement. Si les délégations des États-Unis et du Luxembourg, au nom de l’Union européenne, ont défendu le droit d’imposer de telles mesures, notamment pour promouvoir l’état de droit et lutter contre le terrorisme, celles de la Fédération de Russie et de la République arabe syrienne s’y sont vivement opposées.
Les deux autres projets de résolution adoptés concernent la région du Moyen-Orient. Le premier appelle le Gouvernement israélien, pour la dixième année consécutive, à assumer sa responsabilité pour le dédommagement de l’État libanais à la suite des dégâts causés par l’armée de l’air israélienne qui avait, le 15 juillet 2006, détruit des réservoirs de carburant situés près de la centrale électrique de Jiyeh. Cet incident avait entraîné une marée noire sur les côtes libanaises dont les dégâts sont évalués, en 2014, à 856,4 millions de dollars.
Ce texte a été adopté, par 159 voix pour, 8 contre (Australie, Canada, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Nauru et Palaos) et 5 abstentions (Cameroun, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République centrafricaine, Tonga et Tuvalu). Le représentant d’Israël a dénoncé ce « rituel stupide annuel » de la Commission, tandis que son homologue du Liban lui a demandé de s’engager à respecter le droit international et, notamment, le droit de l’environnement.
Un autre projet de résolution met l’accent sur les conséquences négatives des activités israéliennes sur le développement de la « Palestine ». Ce texte, adopté par 156 voix pour, 7 contre (Canada, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Nauru et Palaos) et 9 abstentions (Australie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Honduras, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, République centrafricaine, Togo et Tonga), recommande à l’Assemblée générale d’exiger qu’Israël cesse d’exploiter, d’épuiser et de mettre en péril les ressources naturelles du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et du Golan syrien occupé.
En outre, cinq projets de résolution supplémentaires ont été soumis aux délégations pour qu’elles les examinent en vue de les adopter au cours d’une future séance. Ces textes ont trait aux produits de base, à l’application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, au suivi de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral, à la question « science et technique au service du développement », et aux partenariats mondiaux.
Le Président de la Deuxième Commission, M. Andrej Logar, de la Slovénie, a par ailleurs annoncé la nomination de deux facilitateurs, Mme Marcela Ordoñez (Colombie) et M. Erich Cripton (Canada) pour coordonner les discussions sur les questions « transversales » ou « horizontales » communes aux projets de résolution que la Commission doit adopter.
La prochaine séance de la Deuxième Commission sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.
PRÉSENTATION DE PROJETS DE RÉSOLUTION
Le représentant de l’Afrique du Sud, au nom du Groupe des 77 et la Chine, a présenté les trois premiers projets de résolution.
Questions de politique macroéconomique: produits de base
Présentation du projet de résolution A/C.2/70/L.25 intitulé « Produits de base ».
Développement durable: application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique
Présentation du projet de résolution A/C.2/70/L.26 intitulé « Application de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification, en particulier en Afrique ».
Groupes de pays en situation particulière: suivi de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral
Présentation du projet de résolution A/C.2/70/L.27 intitulé « Suivi de la deuxième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral ».
Mondialisation et interdépendance: science et technique au service du développement
Le représentant de Malte a présenté le projet de résolution A/C.2/70/L.4 intitulé « Journée internationale des femmes de science ».
Vers des partenariats mondiaux
Le représentant du Luxembourg, intervenant au nom de l’Union européenne, a présenté le projet de résolution A/C.2/70/L.24 intitulé « Vers des partenariats mondiaux: démarche fondée sur des principes pour le renforcement de la coopération entre l’Organisation des Nations Unies et tous les partenaires intéressés ».
ADOPTION DE PROJETS DE RÉSOLUTION
Questions de politique macroéconomique: commerce international et développement
La Deuxième Commission a adopté, par 117 voix pour, 2 voix contre (États-Unis et Israël) et 51 abstentions, un projet de résolution (A/C.2/70/L.2), tel qu’oralement amendé, intitulé « Mesures économiques unilatérales utilisées pour exercer une pression politique et économique sur les pays en développement », aux termes desquels l’Assemblée générale se déclarerait gravement préoccupée de constater que le recours unilatéral à des mesures économiques coercitives porte préjudice en particulier à l’économie et aux efforts de développement des pays en développement et prendrait acte du rapport du Secrétaire général sur cette question (A/70/152).
L’Assemblée engagerait instamment la communauté internationale à prendre d’urgence des mesures efficaces pour mettre fin au recours unilatéral, à l’encontre de pays en développement, à des mesures économiques coercitives qui ne sont pas autorisées par les organes compétents de l’ONU ou sont contraires aux principes du droit international énoncés dans la Charte des Nations Unies et qui contreviennent aux principes de base du système commercial multilatéral.
En outre, elle demanderait à la communauté internationale de condamner et de rejeter l’imposition de mesures visant à exercer une pression économique et politique sur les pays en développement, en demandant aussi au Secrétaire général de continuer à surveiller l’imposition de mesures de ce type et à étudier leurs répercussions sur les pays touchés, en particulier leurs incidences sur le commerce et le développement.
Explications de vote
La représentante des États-Unis a soutenu que chaque État Membre avait le droit souverain de mener sa politique commerciale avec d’autres pays comme il l’entend. Cela inclut également, a-t-elle ajouté, des mesures unilatérales ou coercitives si nécessaire, notamment pour promouvoir l’état de droit et les droits de l’homme. C’est la raison pour laquelle sa délégation a demandé un vote enregistré et a voté contre le texte, a-t-elle précisé.
Le représentant du Luxembourg, s’exprimant au nom de l’Union européenne, a déclaré que les États membres de l’Union européenne s’étaient abstenus lors du vote sur le projet de résolution, réaffirmant ainsi que des mesures économiques unilatérales devaient respecter les principes du droit international, y compris les obligations contractuelles internationales de l’État qui les applique, ainsi que, le cas échéant, les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). L’Union européenne considère que de telles mesures sont nécessaires afin de lutter contre le terrorisme et la prolifération d’armes de destruction massive, et pour assurer le respect des droits de l’homme, de la démocratie, de l’état de droit et de la bonne gouvernance.
La représentante de la Fédération de Russie s’est opposée « rigoureusement » à l’introduction de mesures unilatérales à l’encontre des pays en développement, qui constituent des violations flagrantes de la Charte des Nations Unies, du droit international et des règles de l’OMC. Ces mesures peuvent ouvrir la voie à des crises humanitaires graves et avoir des conséquences extraterritoriales pour les pays voisins de celui visé. C’est la raison pour laquelle la délégation s’est portée coauteur du texte de résolution.
Le représentant de la République arabe syrienne a regretté que cette résolution n’ait pas pu être adoptée sans vote et affirmé que les mesures de sanctions constituaient une violation des règles du commerce international. Les sanctions économiques imposées à son pays, a-t-il expliqué, empêchent l’acheminement de l’aide humanitaire et sont à l’origine d’une inflation alarmante. Il a regretté que quelques délégations tentent de justifier leur opposition à ce texte en invoquant la défense des droits de l’homme.
Développement durable
La Deuxième Commission a adopté, par 159 voix pour, 8 contre (Australie, Canada, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Nauru et Palaos) et 5 abstentions (Cameroun, Papouasie-Nouvelle-Guinée, République centrafricaine, Tonga et Tuvalu), un projet de résolution (A/C.2/70/L.14) intitulé « Marée noire sur les côtes libanaises » qui fait référence à la catastrophe écologique provoquée par l’armée de l’air israélienne à la suite de la destruction le 15 juillet 2006 des réservoirs de carburant situés près de la centrale électrique de Jiyeh (Liban). Si l’Assemblée générale adoptait ce texte, elle se déclarerait de nouveau très préoccupée, pour la dixième année consécutive, par les conséquences néfastes qu’a entraînées la destruction, par l’armée de l’air israélienne, de réservoirs de carburant situés dans le voisinage immédiat de la centrale électrique de Jiyeh, sur les efforts entrepris dans la voie du développement durable au Liban
Ce projet de résolution rappelle que, selon les études menées, les dommages subis par le Liban se chiffraient en 2014 à 856,4 millions de dollars. Aux termes de ce texte, l’Assemblée prierait le Secrétaire général d’engager les organismes et institutions des Nations Unies et les autres organisations participant à l’évaluation initiale des dégâts écologiques à entreprendre, dans la limite des ressources existantes, une nouvelle étude s’appuyant notamment sur les travaux initialement menés par la Banque mondiale et présentés dans le rapport du Secrétaire général à sa soixante-deuxième session, en vue de mesurer et quantifier les dommages causés à l’environnement des pays voisins.
L’Assemblée générale demanderait de nouveau au Gouvernement israélien d’assumer la responsabilité qui est la sienne de dédommager rapidement et convenablement l’État libanais pour les dégâts susmentionnés, ainsi que les autres pays directement touchés par la marée noire, tels que la République arabe syrienne. En outre, elle se féliciterait de ce que le Fonds pour le relèvement du Liban ait accepté d’accueillir le Fonds de financement de la réparation des dégâts causés par la marée noire dans la partie orientale de la mer Méditerranée, alimenté par des contributions volontaires, en vue d’assister et d’appuyer les pays directement touchés. Elle prierait le Secrétaire général de mobiliser une assistance technique et financière internationale pour faire en sorte que le Fonds dispose de ressources suffisantes et appropriées.
Explications de vote
Avant l’adoption du texte, le représentant d’Israël a dénoncé un « rituel stupide annuel » qui détourne l’attention de la Deuxième Commission de son travail essentiel. Il a estimé que ce projet de résolution présentait un discours dénaturé et imprécis de ce qui s’est passé en 2006. Il a rappelé que le conflit avait été lancé par le Hezbollah, ce que le texte ne dit pas, et que celui-ci avait tiré plus de 400 roquettes sur des villages du nord d’Israël et causé de nombreux feux de forêts. Environ un million d’arbres ont été détruits dans le nord d’Israël, a-t-il ajouté. Le délégué israélien a estimé que l’objectif de cette résolution n’était pas le développement durable. La marée noire n’existe plus, a-t-il affirmé, en estimant que le texte n’avait pas sa place à la Deuxième Commission. C’est pourquoi, sa délégation a demandé un vote enregistré pour l’adoption du projet de résolution.
Intervenant après l’adoption du projet de résolution, le représentant du Liban a expliqué que sa délégation avait voté en faveur de ce texte qui, a-t-il fait remarquer, a recueilli d’une écrasante majorité des États Membres pour la dixième année consécutive. Il a relevé que la Deuxième Commission appelait une nouvelle fois Israël à s’acquitter de ses responsabilités pour réparer les dommages causés. Le délégué du Liban a apprécié que la Deuxième Commission réaffirme son engagement à défendre les obligations du droit international et, notamment, le droit de l’environnement, surtout à la veille de la Conférence des États Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), la COP21, qui se tiendra du 30 novembre au 11 décembre prochain. Le Liban, a-t-il dit, continuera à mobiliser les ressources possibles et les moyens juridiques à sa disposition pour veiller à ce que cette résolution soit appliquée.
Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles
La Deuxième Commission a adopté, 156 voix pour, 7 contre (Canada, États fédérés de Micronésie, États-Unis, Îles Marshall, Israël, Nauru, et Palau) et 9 abstentions (Australie, Cameroun, Côte d’Ivoire, Honduras, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Paraguay, République centrafricaine, Togo et Tonga), un projet de résolution (A/C.2/70/L.21) intitulé « Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles ».
Ce texte recommande à l’Assemblée générale d’exiger qu’Israël, puissance occupante, cesse d’exploiter, d’épuiser et de mettre en péril les ressources naturelles du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et du Golan syrien occupé. Aux termes de ce texte, l’Assemblée générale demanderait aussi à Israël de s’acquitter scrupuleusement des obligations que lui impose le droit international, notamment le droit international humanitaire. Elle demanderait également à Israël de mettre fin dans ces mêmes régions à toute intervention, y compris celle des colons israéliens, portant atteinte à l’environnement, en particulier au déversement de déchets de toutes sortes. Une autre demande serait faite à Israël pour qu’il mette fin à la destruction d’équipements essentiels.
Déclarations générales
Le représentant d’Israël a estimé qu’une fois de plus, le travail capital de la Deuxième Commission était détourné par certains de ses objectifs premiers. Le projet de résolution mis aux voix s’appuie sur un rapport « biaisé », qui manque d’analyses et oublie un fait très simple: que « Gaza est contrôlée par un groupe terroriste ». En outre, a-t-il dénoncé, rien dans ce texte n’appelle à régler les différends de manière pacifique. C’est la raison pour laquelle Israël a demandé un vote enregistré et votera contre ce texte, a-t-il précisé.
Le représentant du Luxembourg, qui s’est exprimé au nom de l’Union européenne, a déclaré que l’utilisation du terme « Palestine » dans le projet de résolution ne devrait pas être comprise comme étant une reconnaissance de l’État de Palestine. Il a également souligné que l’adoption de ce texte ne devrait pas préjuger des discussions en cours sur la revitalisation des travaux de l’Assemblée générale.
S’exprimant après l’adoption du texte, l’observateur de la Palestine a remercié tous les États Membres ayant voté en faveur du projet de résolution qui, a-t-il rappelé, réaffirme les droits légitimes du peuple palestinien sur ses ressources naturelles et reconnaît également son droit à des réparations en raison de l’exploitation « illégale » de ces ressources. Il a ainsi invoqué le précédent qui avait permis à Israël d’obtenir des réparations pour les crimes commis par le régime nazi. L’observateur a, en outre, demandé le boycott des produits issus des colonies de peuplement illégales.