En cours au Siège de l'ONU

Soixante-neuvième session,
19e séance – après-midi
CPSD/571

La Quatrième Commission débat du financement et des politiques générales appliquées aux missions politiques spéciales en relevant leurs manque d’inclusion et opacité

Cet après-midi, à la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, les délégations ont profité de leur deuxième débat sur « l’étude d’ensemble des missions politiques spéciales (MPS) », pour soulever la question des politiques générales et du financement de ces missions.

Deux d’entre elles, à savoir le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Sierra Leone (BINUCSIL) et le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine (BINUCA), ont achevé leur mandat cette année, et le Conseil de sécurité en a créé trois nouvelles: le Groupe d’experts sur la République centrafricaine, le Groupe d’experts sur le Yémen et la Mission conjointe de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et de l’Organisation des Nations Unies chargée du démantèlement du programme d’armes chimiques de la République arabe syrienne.

Envoyés spéciaux, groupes de surveillance des sanctions et groupes de contrôle, bureaux régionaux ou missions affectées à un pays donné, les MPS jouent un rôle essentiel dans l’architecture du maintien de la paix des Nations Unies, ont constaté des délégations.  Leurs mandats s’élargissent et couvrent désormais un éventail de tâches qui vont des activités de bons offices, à l’assistance électorale et l’appui à l’élaboration de constitutions et d’autres questions liées aux droits de l’homme, à l’état de droit, à l’égalité des sexes et à la réforme du secteur de la sécurité, ce qui dépasse sensiblement le cadre relativement restreint des fonctions de facilitation politique qui leur étaient initialement confiées.

Les délégations se sont donc félicitées d’avoir pour la deuxième fois l’occasion d’en discuter, puisque cette question a été abordée pour la première fois par la Quatrième Commission l’an dernier.

Face à la multiplication des missions politiques spéciales et à la complexité croissante de leurs mandats, les délégations ont fait valoir le droit de l’Assemblée générale de définir les questions de politique générale relatives à ces missions.  Le représentant du Maroc, au nom du Mouvement des pays non alignés, a estimé que seules les approches adoptées collectivement pour la mise en œuvre des mandats confiés aux MPS devraient être encouragées, avis partagé par les délégations de Cuba et du Guatemala. 

De son côté, le représentant du Mexique a mis l’accent sur les exigences en termes de transparence et de reddition de comptes.  Si ces exigences étaient satisfaites, cela encouragerait une participation active du plus grand nombre possible d’États Membres aux MPS, a-t-il souligné.  À ce titre, il a attiré l’attention sur l’importance d’organiser des dialogues périodiques sur les questions de politique générale relatives aux activités des MPS, une exigence à laquelle le Département des affaires politiques a donné suite en organisant un premier dialogue interactif avec les États Membres.  Cette initiative a été favorablement accueillie par les délégations même si certaines, comme celles de l’Éthiopie, ont demandé au DPA de fournir aux États Membres des analyses politiques rigoureuses, arguant que si les États ne disposent pas d’analyses de ce type, les missions déployées sont vouées à l’échec.

Pour la délégation suisse, ce sont plutôt les mécanismes actuels de financement et d’appui aux MPS qui représentent un frein permanent au potentiel, aux performances et à l’efficacité des mandats confiés à ces missions.  Tout en reconnaissant que la Cinquième Commission est celle à qui incombent les questions administratives et budgétaires, le représentant de la Suisse a estimé que ces questions sont étroitement liées et ne peuvent être traitées de manière séparée ou isolée au sein d’un seul forum.  La délégation des États-Unis a, sur ce point, marqué sa différence en estimant que ces questions relèvent exclusivement de la Cinquième Commission.

Ce point de vue n’a cependant pas empêché le représentant du Brésil de dénoncer le fait que les MPS sont pour la plupart établies par le Conseil de sécurité, alors qu’elles sont financées par le budget ordinaire de l’Organisation dont elles représentent aujourd’hui 25% du total.  Cette situation souligne le déséquilibre entre la prise de décision, dont se sont accaparés quelques États au Conseil de sécurité, et la dilution disproportionnée des coûts, a-t-il relevé.  Le financement des MPS est « la plus grande manipulation » du processus budgétaire de l’ONU, a-t-il déploré.

Comme un certain nombre de délégations, il a défendu l’idée que ces missions soient financées selon les mêmes critères et la même méthodologie que les opérations de maintien de la paix et que soit créé à leur intention un nouveau compte spécial distinct.

Le rapport du Secrétaire général relatif à ces questions a été présenté en début de réunion par le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Jeffrey Feltman.

La Quatrième Commission commencera l’examen des questions liées à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) demain, mardi 4 novembre, à partir de 15 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DES MISSIONS POLITIQUES SPÉCIALES (A/69/325)

Déclaration du Secrétaire général adjoint aux affaires politiques

M. JEFFREY FELTMAN, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, qui présentait le rapport du Secrétaire général sur les questions de politique générale relatives aux missions politiques spéciales (MPS) a fait le point sur cet outil de l’architecture de sécurité des Nations Unies dans le contexte des menaces et défis sécuritaires qui se posent sur le terrain.  Les MPS sont un instrument unique et sont la manifestation la plus visible des missions de bons offices du Secrétaire général, a-t-il estimé.  Elles ont fait la preuve de leur efficacité pour désamorcer les tensions et faciliter la consolidation de la paix.  Le rapport du Secrétaire général reflète les principales questions de politique générale qui affectent la capacité des MPS à s’acquitter de leurs mandats, dit le Secrétaire général adjoint.

À ce titre, M. Feltman a souligné les risques croissants auxquels sont exposés le personnel et le matériel onusiens dans le contexte des MPS.  Pour donner la mesure du problème, il a rappelé qu’en 2014, il avait fallu procéder à des évacuations de personnels dans deux MPS.  Pour gérer ces menaces croissantes, le Département des affaires politiques (DPA) a déployé tout un éventail de mesures comme le renforcement de la coopération avec les pays hôtes, notamment par le recours aux groupements de gardes.  Ces groupements, composés de personnel militaire ou de police ou d’autres forces de sécurité nationales mises à la disposition de l’Organisation des Nations Unies par un ou plusieurs États Membres sous forme de contingents déployés sur autorisation du Conseil de sécurité ou de l’Assemblée générale, auraient pour mission de protéger le personnel, les locaux et les biens des missions de l’ONU opérant dans des régions dangereuses.  M. Feltman a estimé qu’il s’agit d’une priorité, parce que la capacité à exécuter les mandats confiés par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale aux MPS peut être mise à mal par les risques sécuritaires accrus qui affectent le moral du personnel. 

Il a également abordé la question du renforcement des partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales dont le rôle est « essentiel », a-t-il noté, en raison de leur proximité et de leur connaissance du terrain.  Ces dernières années, l’accent a été mis sur cet aspect par le biais de la nomination de deux envoyés régionaux qui coopèrent étroitement avec les parties prenantes de la région dans laquelle ils opèrent.  Les missions spécifiques présentes dans les pays concernés travaillent également avec les organisations régionales et sous-régionales.

M. Feltman est également revenu sur la volonté d’augmenter la participation des femmes aux travaux des missions politiques spéciales (MPS).  Il a rappelé à nouveau que le paysage avait beaucoup changé ces dernières années en matière de sécurité et qu’il fallait répondre à ces mutations de manière collective.  À cet égard, il a émis l’espoir que le panel nommé par le Secrétaire général pour faire un examen complet du maintien de la paix, y compris des MPS, travaillera avec les États Membres et fera des propositions concrètes sur la manière de renforcer au mieux les MPS.  Il a espéré que cet examen permettra d’améliorer la sécurité du personnel dans les zones particulièrement difficiles. 

S’agissant des besoins en matière de ressources et de la gestion des MPS, il s’est dit conscient de la nécessité d’assurer la plus grande transparence, comme le revendiquent les États Membres, cette demande étant à ses yeux la preuve de leur engagement.  Le Département des affaires politiques continuera de tenir des réunions régulières et inclusives avec les États Membres sur toutes les questions de politique générale dans le contexte des MPS. 

Débat interactif

Le représentant de l’Iran a demandé au Secrétaire général adjoint aux affaires politiques s’il avait été envisagé d’intégrer les MPS aux opérations de maintien de la paix (OMP).

Lui répondant, M. FELTMAN a expliqué que d’ores et déjà le Département des affaires politiques et le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) se concentrent sur les cas où il y a des interconnections et des similitudes entre les travaux accomplis par les MPS et ceux menés par les opérations de maintien de la paix (OMP).  Dans les deux cas, MPS et OMP sont des outils politiques qui ont pour but d’assurer la stabilité dans les pays où ils sont présents.  Mais ils sont néanmoins très différents, en ce qui concerne le moment où chacun d’eux intervient et est mis à contribution, et dans la manière d’opérer.  M. Feltman a indiqué que l’examen d’ensemble des opérations de maintien de la paix demandé par le Secrétaire général se penchera sur cette question et pourrait faire des recommandations.

Le représentant du Mexique a demandé à M. Feltman à quel point il serait important de disposer d’un compte budgétaire bien distinct pour financer les MPS au sein du DPA.

M. FELTMAN lui a répondu que cette question s’adressait en premier lieu aux États Membres.  Ce qui importe pour le Département des affaires politiques, c’est de permettre qu’il y ait suffisamment de souplesse pour garantir le succès des MPS, et il est de la prérogative des États Membres de décider quelle est la meilleure méthode financière et comptable à adopter pour atteindre ce but.

Débat général

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc), qui s’exprimait au nom du Mouvement des pays non alignés, s’est réjoui qu’un débat comme celui d’aujourd’hui permette d’attirer l’attention des États Membres sur les importants instruments politiques que sont les missions politiques spéciales de l’ONU.  Seules les approches adoptées collectivement doivent être mises en œuvre, a-t-il cependant estimé.  Ces approches doivent en outre être cohérentes pour que les mandats confiés aux missions puissent être efficacement mis en œuvre sur le terrain.  Après avoir insisté qu’il est important que soit respectée la souveraineté des États dans lesquels sont déployées les missions, le représentant a noté qu’il était crucial que les acteurs locaux s’approprient les processus de paix.  Il a par ailleurs salué la proposition du Secrétaire général de tenir des dialogues interactifs sur les questions de politique générale intéressant directement les missions politiques spéciales, le Secrétariat devant faire en sorte que la participation à ces discussions soit maximale et significative.  Le représentant du Maroc a enfin estimé que, compte tenu de leur portée, les missions politiques spéciales devraient être financées en tenant compte des critères appliqués au financement des opérations de maintien de la paix.

M. NORACHIT SINHASENI (Thaïlande), qui s’exprimait au nom des pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a souligné que les missions politiques spéciales doivent être transparentes et responsables, afin de renforcer leur crédibilité et efficacité.  Il a déploré à cet égard que le rapport du Secrétaire général ne contienne pas suffisamment de propositions précises concernant les moyens à déployer et à mettre en œuvre pour renforcer la transparence des missions.  Pour que nous puissions contribuer plus efficacement aux missions, il est indispensable que les États Membres basent leur réflexion et prise de décisions sur davantage d’informations et de données, a-t-il insisté. 

Le représentant a ensuite salué le transfert des responsabilités du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Sierra Leone à l’équipe de pays.  Ce cas de figure démontre l’efficacité des missions politiques spéciales en tant que premier instrument de consolidation de la paix, a-t-il jugé.  Revenant au rapport du Secrétaire général, il a attiré l’attention sur la nécessité de réaliser l’égalité de représentation entre hommes et femmes au sein des missions, compte tenu notamment de la contribution souvent déterminante des femmes dans la prévention et la résolution des conflits.  Il a ajouté que, sur le terrain, la participation active des parties prenantes nationales était indispensable pour permettre une appropriation rapide des processus de paix par les acteurs locaux.  Enfin, M. Sinhaseni a estimé vital de renforcer la coopération, à plusieurs niveaux, non seulement entre les missions et le système des Nations Unies, mais aussi entre les missions elles-mêmes.  Une meilleure coordination entre les différents sièges et les équipes de pays aidera également les Nations Unies à œuvrer plus efficacement à la paix et à la promotion des droits de l’homme, et à poser partout les fondations de solutions durables, a déclaré le représentant. 

M. IOANNIS VRAILAS, de la délégation de l’Union européenne, a souligné que les Nations Unies devaient faire face à des crises de plus en plus complexes, nécessitant des efforts sur le long terme de plus en plus diversifiés.  Il a également estimé que les missions politiques spéciales devaient rester un outil flexible au service des Nations Unies pour prévenir les conflits et maintenir et consolider la paix et la sécurité.  Dans ce contexte, le représentant a salué l’intention du Secrétaire général de procéder à une évaluation des opérations de maintien de la paix, y compris les missions politiques spéciales.  Plaidant pour une approche inclusive, il a insisté pour que les femmes participent pleinement aux processus de paix et aux stratégies de prévention des conflits.  « La pleine mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité et de celles liées au rôle des femmes dans la résolution des conflits et l’établissement de la paix est cruciale », a-t-il ajouté, en saluant, avant de conclure, l’approche du Secrétaire général qui insiste sur le renforcement des partenariats avec les organisations régionales et sous-régionales.

M. RICARDO ALDAY GONZÁLEZ (Mexique) a rappelé l’utilité des missions, qui sont indispensables en amont pour la prévention des conflits, et en aval pour jeter les bases de la consolidation de la paix dans les pays sortant d’un conflit.  Il a souhaité que le Groupe d’experts chargé par le Secrétaire général d’examiner tous les aspects des missions présente, dans les meilleurs délais, des propositions pour répondre de manière stratégique et efficace aux besoins croissants de ces missions.  Le Groupe d’experts doit travailler à cette fin avec le Comité des 34, a-t-il encore souligné.  

Le représentant a ensuite considéré que les réalités obligeaient les États Membres à réfléchir à la question du financement des missions politiques spéciales, qui sont les seules initiatives des Nations Unies ayant connu des transformations radicales et à être toujours financées au titre du budget ordinaire.  « Dans certains pays, des doublons existent, ceci en raison de la présence simultanée d’une opération de la paix et d’une mission politique spéciale. »  « Les besoins évoluent pour pouvoir faire face à des crises qui ont chacune des caractères uniques », a poursuivi le représentant, qui a également signalé que les mandats étaient source de confusion pour certaines catégories de personnel, comme les unités de gardes.  « Transparence et reddition de comptes ne peuvent que renforcer la participation active du plus grand nombre possible d’États Membres aux missions, a souligné le représentant, avant de rappeler l’importance d’organiser des dialogues périodiques sur les questions de politique générale relatives aux activités des missions politiques spéciales.  Il faut, en ce sens, donner plus de contenu au dialogue interactif entre les États Membres et le Département des affaires politiques, a insisté le délégué mexicain.

M. KAI SAUER (Finlande) a salué les efforts de médiation déployés par le Département des affaires politiques et le renforcement de la capacité de médiation des Nations Unies en général.  Il a souligné que les missions politiques spéciales devaient être des mécanismes flexibles, susceptibles d’évoluer en équipes de pays.  La Finlande pense que le rapport du Secrétaire général aurait gagné à être plus audacieux dans sa formulation sur la « voie à venir ».  Elle espère donc qu’au cours de l’année prochaine, des dialogues interactifs seraient engagés par le Secrétaire général avec les États Membres sur les moyens de veiller à ce que cet outil soit utilisé aussi efficacement que possible.  Dans ce contexte, M. Sauer a plaidé en faveur de la possibilité de poser des limites à des mandats à la portée de plus en plus large, et ce, afin de veiller à ce que les missions politiques spéciales soient aussi opérationnelles que possibles.  Le représentant de la Finlande s’est enfin intéressé aux synergies possibles entre opérations de maintien de la paix et missions politiques spéciales.

M. DAVID FORES RODRIGUEZ (Cuba) s’est associé à la déclaration faite au nom du Mouvement des non-alignés.  La délégation de Cuba considère que les MPS doivent être régies par des politiques et des mandats adoptés dans la transparence et de manière démocratique au sein de l’Assemblée générale.  Ces misions doivent être règlementées par les principes directeurs du maintien de la paix et avoir des mandats clairs et réalistes qui soient le fruit de négociations intergouvernementales, a-t-il poursuivi.  Compte tenu de cela, Cuba estime qu’il faudrait organiser un débat sur un mécanisme différencié de financement des MPS, chose qui devrait se faire par le biais de la création d’un nouveau compte budgétaire, spécialement affecté à ces missions. 

Mme MONICA BOLAÑOS PEREZ (Guatemala) a déclaré qu’il faut mettre fin au déficit et bien souvent à l’absence d’informations relatives aux questions de politique générale qui ont trait aux MPS.  Le Guatemala salue le dernier rapport du Secrétaire général qui vient répondre en partie à cette exigence, a dit la représentante.  Elle a mis l’accent sur la nécessité de parvenir à un consensus entre États Membres sur ces politiques et de veiller à ce que les idées et approches proposées soient réellement respectées sur le terrain. 

Il faut également que les MPS aient des mandats clairs et réalistes et que des ressources suffisantes leur soient allouées, a dit la représentante.  Il faut maintenir l’équilibre entre la formulation des intentions et des mandats et l’application sur le terrain de ces mandats en employant des règles claires, en dépit de la nécessité de donner une certaine souplesse à ces missions.  L’augmentation du nombre de MPS et de leur complexité montre que l’Assemblée générale devrait jouer un rôle central pour ce qui est de définir les politiques générales qui régissent ces missions, a-t-elle estimé.  Elle a regretté que le rapport soumis par le Secrétaire général ne fasse pas mention de l’exigence de transparence dans ces missions et a déploré qu’il n’y ait eu qu’un seul dialogue interactif entre le DPA et les États Membres depuis l’année dernière.  Compte tenu du fait que les MPS représentent aujourd’hui 25% du budget ordinaire de l’ONU, la délégation du Guatemala est d’avis que cela justifie la création de trois catégories de budgets qui seraient: le budget du maintien de la paix, celui des MPS et le budget ordinaire.

M. GUILHERME DE AGUIAR PATRIOTA (Brésil) a noté qu’alors que les mandats des missions politiques spéciales sont établis par le Conseil de sécurité, toutes sont financées par le budget ordinaire de l’Organisation.  « Cette situation souligne le déséquilibre entre la prise de décision, dont se sont accaparés quelques États au Conseil de sécurité, et la dilution disproportionnée des coûts », a-t-il ajouté, notant que le financement des missions constitue la plus importante distorsion infligée au processus budgétaire des Nations Unies.  Le représentant a estimé que cette distorsion –les missions étant financées à hauteur de 20% du budget ordinaire– pesait négativement sur la capacité de l’ONU d’exécuter pleinement ses mandats politiques et de paix.  Par conséquent, il a déclaré que le Brésil appuyait la proposition du Secrétariat et du CCQAB, datant de 2011, d’établir un compte spécial destiné au financement des missions et séparé du budget ordinaire.  Il a également demandé aux membres permanents du Conseil de sécurité d’honorer leurs engagements en matière d’appui financier à toutes les initiatives de paix et de sécurité, y compris notamment les missions politiques spéciales. 

M. DESRA PERCAYA (Indonésie), prenant note du rapport présenté par M. Feltman, a jugé qu’il serait utile que le Secrétaire général donne plus de détails et d’informations sur la transparence, la responsabilité et la répartition géographique des missions politiques spéciales et de leurs personnels, comme le lui demande la résolution de l’Assemblée générale ayant commandé le rapport.  Les États Membres ont le droit d’avoir une vision d’ensemble de tous les différents aspects des missions politiques spéciales et non seulement un résumé des derniers  développements sur le terrain.  Ils ont également le droit d’avoir des informations sur la répartition géographique du personnel de ces missions et tout ce qui est fait pour rendre cette répartition géographique équitable, a dit le représentant.  

Même la meilleure des missions peut échouer si elle ne bénéficie pas de l’appui des organisations sous-régionales, a souligné le représentant.  C’est pour cette raison qu’un dialogue inclusif entre États Membres et Secrétariat, en particulier le Département des affaires politiques, est vital, ceci autant que des mandats clairs et réalistes ou encore l’appropriation par les autorités locales.  Enfin, compte tenu des besoins croissants en financement de ces missions, il serait utile d’avoir un rapport sur les arrangements financiers des missions politiques spéciales.  Ce rapport devrait être présenté devant la Cinquième Commission et si cela est nécessaire, devant la Quatrième Commission, a conclu le représentant. 

M. GIHRANI (Libye) a souligné l’intérêt des missions politiques spéciales, qui, basées sur le principe de sécurité collective, sont devenues un outil précieux de médiation, de réconciliation et de prévention.  « Aujourd’hui, 37 missions complexes et diverses en fonction de chaque contexte, sont déployées.  Toutes partagent un seul objectif: aider à l’instauration de la paix et à la restauration de l’autorité de l’État, et lier la sécurité au développement économique et social ainsi qu’aux efforts de consolidation de la paix », a déclaré le représentant.  Rappelant que la Libye accueille l’une de ces missions, il a mis en exergue l’aide apportée par l’ONU à son pays dans les domaines de la justice transitionnelle, de la réforme du secteur de la sécurité et de la réintégration des anciens combattants.  « Nous contribuerons au renforcement du dialogue national entre toutes les parties, afin d’accélérer la transition de la Libye vers la démocratie tant attendue par le peuple libyen », a-t-il conclu.

M. ADRIAN MICHAEL SOLLBERGER (Suisse) a insisté sur la nécessité de resserrer la collaboration entre l’ensemble des acteurs concernés par les MPS.  Au-delà du dialogue interactif, il a estimé qu’il est possible d’intensifier le dialogue entre les États Membres et le Secrétariat et d’adopter une approche plus inclusive, structurée et ciblée, ce qui peut déjà se faire lors de la présente session de l’Assemblée générale.  La Suisse juge en outre que le dialogue sur les MPS ne devrait pas être circonscrit à la Quatrième Commission, mais devrait impliquer les autres acteurs concernés.  Une large majorité des mandats étant attribués par le Conseil de sécurité, ce dernier joue à cet égard un rôle essentiel, a souligné le représentant qui a souhaité voir davantage de relations avec le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale. 

La Suisse reste également convaincue qu’il est urgent d’apporter des améliorations au financement et à l’appui fonctionnel à apporter aux MPS.  Tout en reconnaissant que la Cinquième Commission est celle à qui incombent les questions administratives et budgétaire, la délégation suisse estime tout de même que ces questions sont étroitement liées et ne peuvent être traitées de manière séparée ou isolée.  La Suisse estime que les mécanismes actuels de financement et d’appui aux MPS sont un frein permanent au potentiel, aux performances et à l’efficacité des mandats confiés à ces missions.

M. Sollberger a déclaré que la Suisse salue l’examen des opérations de maintien de la paix de l’ONU annoncé par le Secrétaire général, et plus particulièrement son intention d’y adjoindre les MPS.  Une approche exclusivement axée sur les OMP ne saurait refléter la réalité opérationnelle du moment, a estimé le représentant, dans la mesure où les MPS sont devenues un instrument stratégique dans les processus de prévention des conflits, de rétablissement et de consolidation de la paix, et de la sécurité.  Il a espéré que cet examen, prévu pour 2015, permettra de mieux comprendre la façon dont l’ONU traite la sortie des conflits et dans quelle mesure il faut développer les outils mis à la disposition de l’Organisation pour lui permettre de répondre aux défis actuels et futurs.

M. HIROSHI ISHIKAWA (Japon) a commencé par évoquer les liens entre missions politiques spéciales et opérations de maintien de la paix.  Les premières sont devenues des opérations multidimensionnelles, qui combinent des tâches politiques et des prérogatives plus larges dans des domaines comme les droits de l’homme, l’état de droit et la violence sexuelle dans les conflits.  Il a jugé que cette situation, qui voit les missions politiques spéciales s’apparenter de plus en plus à des opérations de maintien de la paix, appelle des clarifications sur les rôles des unes et des autres.  Par ailleurs, le représentant a souligné la nécessité d’une plus grande transparence, rappelant que de nombreuses décisions relatives aux missions politiques spéciales avaient été prises dans le cadre d’un processus interne du Conseil de sécurité.  C’est la raison pour laquelle il a souligné l’importance de clarifier également le processus d’établissement de ces missions, pour le bienfait de tous les États Membres.  D’autre part, M. Ishikawa a expliqué que le Conseil de sécurité devait assumer une responsabilité spéciale vis-à-vis des missions qu’il mandate.  Enfin, s’agissant de la Commission de consolidation de la paix (CCP), la délégation du Japon a déclaré qu’elle poursuivrait son soutien aux activités de consolidation de la paix des missions politiques spéciales.

M. SINGH (Inde) a déploré que l’élaboration des mandats des missions politiques spéciales soit issue d’un processus de décisions opaque, et totalement dénué de transparence.  Nous exhortons la Quatrième Commission à se pencher plus avant sur cette question, et à réclamer un processus plus transparent impliquant le plus grand nombre possible d’États Membres, a-t-il ajouté.  Le représentant a par ailleurs espéré que l’Inde, en tant qu’important pays contributeur de troupes, sera en mesure de participer de manière active à l’examen complet, prôné par le Secrétaire général, de tous les aspects des opérations de paix des Nations Unies.  Il a également demandé au Département des affaires politiques, qui a la responsabilité première des missions politiques spéciales, d’organiser plus de dialogues interactifs avec les États Membres, ce qui permettrait à ces derniers de faire davantage de propositions en vue d’améliorer le financement et l’efficacité de ces missions.

Mme ANASTASIA CARAYANIDES (Australie) a souligné le rôle essentiel joué par les MPS dans l’architecture de paix et de sécurité des Nations Unies.  Le rôle des MPS, pour ce qui est d’appuyer les acteurs nationaux à sortir d’un conflit, est essentiel, ce dont témoigne le fait que rien qu’au cours de l’année dernière, trois nouvelles MPS ont été créées en Syrie, au Yémen et en République centrafricaine, a estimé la représentante.  Alors que le nombre des MPS a augmenté de manière significative au fil des ans, leurs mandats sont devenus de plus en plus complexes, et les environnements dans lesquels elles opèrent de plus en plus risqués et dangereux, a constaté la représentante. 

L’Australie attend une plus grande représentation des femmes à des postes de prise de décisions au sein des MPS, a dit Mme Carayanides.  Compte tenu des défis actuels, la délégation australienne salue le moment opportun choisi pour se livrer à l’examen stratégique général du maintien de la paix, comme cela a été annoncé par le Secrétaire général.  Cet examen concerne également les MPS, a noté la représentante.  Elle a souhaité que les outils de médiation que sont les MPS de l’ONU soient davantage mis en valeur, ce qui suppose de trouver des solutions aux problèmes de financement de ces missions.  À cet égard, la délégation australienne estime que pour pouvoir assurer la souplesse et l’efficacité nécessaires au fonctionnement des MPS, il faut donner à ces missions la possibilité d’avoir accès aux ressources du fonds de réserve du maintien de la paix et aux moyens matériels dont dispose l’ONU pour le déploiement rapide des OMP.

Mme SHIRUZIMATH SAMEER (Maldives) a estimé que les objectifs, les mandats et les résultats attendus des missions politiques spéciales devraient être absolument clairs avant qu’une telle mission soit approuvée.  « Le Département des affaires politiques ne devrait pas être autorisé à se servir d’une mission politique spéciale pour s’immiscer et créer des interférences dans les politiques nationales des États », a-t-elle souligné.  La représentante a estimé que ces missions devraient au contraire développer avec le pays hôte un ordre du jour « commun, flexible et spécifique à chaque contexte ».  Il faut que les débats publics autour des missions politiques spéciales soient conduits de manière responsable, sans remettre en cause les objectifs du mandat de chaque mission, a insisté Mme Sameer.  Le principal objectif à atteindre doit être celui de renforcer la confiance mutuelle entre toutes les parties prenantes et s’abstenir de toute activité qui pourrait contribuer à l’affaiblir.

Mme WILSON (Fidji) a déclaré soutenir la coordination entre les États Membres et les organisations régionales dans l’élaboration des politiques et mandats des missions politiques spéciales.  Ceci est vital pour leur succès.  Fidji, qui soutient aussi toutes les initiatives visant à accroître la transparence et l’efficacité de ces missions, salue dans ce contexte le rapport du Secrétaire général, a dit la représentante.  La tenue régulière de consultations inclusives entre les États Membres et les autres partenaires sur les politiques d’ensemble des missions politiques est centrale pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale, a ajouté la représentante.  Enfin la délégation de Fidji est d’avis que ces missions devraient être financées de la même manière que les missions de maintien de la paix, ce qui leur garantirait une meilleure transparence et leur donnerait l’opportunité de respecter l’obligation de reddition de comptes, a conclu la représentante.    

Mme BETH JONES (États-Unis) a notamment déclaré qu’il convenait d’éviter les chevauchements dans l’appréhension des questions politiques et de celles traitées à la Cinquième Commission, chargée des questions administratives et budgétaires.  Elle a en outre appelé de ses vœux la tenue d’un nombre plus important, et sur une base périodique, de débats interactifs entre les États Membres et le Département des affaires politiques, afin que les pays renforcent leurs connaissances des enjeux et des défis auxquels sont confrontées les missions politiques spéciales sur des terrains soumis à d’importantes transformations et à de nouveaux périls.  Sur ce dernier point, elle a cité la montée en puissance de l’État islamique d’Iraq et du Levant et la persistance des groupes armés dans certaines régions du continent africain.

M. PETR V. ILIICHEV (Fédération de Russie) a salué le rôle joué par les MPS en particulier pour ce qui est d’aider les pays à ne pas retomber dans le conflit d’où ils sortent.  La souplesse des MPS est essentielle, ce qui explique qu’elles figurent en bonne place dans les outils du Conseil de sécurité, qui peut choisir au cas par cas la réponse à donner à la situation et qui peut être une mission de bons offices ou une autre démarche.  Pour que les missions politiques spéciales soient vraiment efficaces à long terme, elles doivent s’inscrire dans un principe de coopération étroite avec le pays hôte, ainsi qu’avec les organisations régionales et sous-régionales qui peuvent leur apporter un soutien précieux, a estimé le représentant.

Soulignant la complexité croissante des MPS, il a abordé la question du dialogue interactif entre les États Membres et le Secrétariat qui en est « à ses débuts », et qui doit être renforcé tout en veillant à ne pas créer de doublons dans ce contexte.

Mme GIRMA ASMEROM TESFAY (Érythrée) a salué les recommandations du Secrétaire général mentionnées dans son rapport A/69/325, avant de souligner la complexité de l’environnement dans lequel les missions politiques spéciales sont aujourd’hui mises en œuvre.  Elle a ensuite insisté sur le « rôle critique » de l’Assemblée générale, comme organe universel et délibérant des Nations Unies, pour le développement des stratégies relatives aux missions politiques spéciales.  À cet égard, elle a rappelé l’importance du soutien qu’elles doivent recevoir des États Membres pour leur réussite.

La représentante s’est ensuite félicitée de la tenue en mars dernier d’un dialogue interactif sur les missions politiques spéciales, qui a eu lieu à l’initiative du Département des affaires politiques, estimant que des consultations entre le Secrétariat et les États Membres, ainsi qu’un calendrier précis de nouveaux échanges interactifs, permettraient d’obtenir des résultats plus significatifs.  Enfin, elle a insisté sur l’importance de maintenir l’équilibre entre les différentes composantes des missions politiques spéciales, tant dans les dialogues interactifs que dans les rapports du Secrétaire général.

M. MOHAMMED SAMIR EZZAT SAMI ALNAQSHABANDI (Iraq) a souscrit à la déclaration prononcée au nom du Mouvement des non-alignés et a salué les efforts positifs déployés par la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI).  Il a affirmé que son pays était victime d’une attaque terroriste de l’État islamique (EIIL), indiquant que son gouvernement avait depuis longtemps averti le monde des dangers que pose l’EIIL.  Lutter contre ces terroristes est « une guerre pour toute l’humanité » et pas uniquement les Iraquiens, a-t-il dit.  À ce jour, 1,8 million de personnes sont déplacées en raison des actes terroristes de l’EIIL, ce qui amène l’Iraq à demander un soutien spécial de la communauté internationale, par le biais de la MANUI, pour venir en aide à ses populations.

M. FETHI METREF (Algérie) a souligné que les missions politiques spéciales s’étaient multipliées, avaient pris de l’ampleur, et que leurs mandats avaient gagné en complexité avec des tâches allant des droits de l’homme à la promotion de la réconciliation, en passant par les activités de médiation, le suivi du dialogue politique entre parties, l’assistance électorale, le renforcement des capacités des États dans des domaines tels que la consolidation de l’état de droit, la réforme du secteur de la sécurité, le désarmement, la démobilisation ou la réinsertion.  Il a ensuite souligné que le budget des MPS avait été multiplié par 12 en 10 ans, pour représenter aujourd’hui 25% du budget ordinaire des Nations Unies.  Dans ce contexte, il a estimé que le budget ordinaire n’était « plus l’outil en mesure de faire face aux fluctuations des besoins et à l’évolution du rôle des MPS », plaidant par conséquent pour « un nouveau type de financement de ces missions, notamment par la mise en place d’un compte spécial distinct, à l’instar du budget des opérations de maintien de la paix ».

Le représentant a conclu en faisant siennes les recommandations du Secrétaire général mentionné dans son rapport intitulé « Questions de politique générale intéressant les missions politiques spéciales », notamment la poursuite d’une « coopération étroite entre les MPS et les acteurs nationaux pour fixer des priorités et renforcer les capacités des pays à les mettre en œuvre », et le « renforcement des capacités des missions à mener des actions intégrées où les objectifs politiques et sécuritaires sont liés aux objectifs de développement à plus long terme ».

M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie) a déclaré qu’il fallait tout mettre en œuvre pour que les missions politiques spéciales soient utilisées de manière optimale.  Il a plaidé à cet égard pour que soit renforcé financièrement le Département des affaires politiques (DAP), afin que ce dernier puisse être en mesure de fournir des analyses politiques rigoureuses.  Car si les États ne disposent pas d’analyses de ce type, les missions déployées sont vouées à l’échec, a-t-il affirmé.  Il a à son tour souligné l’importance que les États Membres aient leur mot à dire dans l’élaboration des mandats des missions, « comme cela a été dit par le Mouvement des non-alignés ».  Sur la situation en Afrique, M. Alemu a salué le fait que les missions aient permis d’intensifier la coopération entre l’ONU et l’Union africaine.  L’expérience somalienne est encourageante, a-t-il encore noté.  Revenant sur le rôle du DAP, il a prévenu qu’un Département affaibli entraverait l’atteinte de solutions durables à des situations complexes de conflit.  « Nous ne devons pas nous contenter de rendre ces situations moins dangereuses.  Nous devons leur trouver des solutions de long terme », a-t-il insisté en conclusion.

 

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