Soixante-neuvième session
7e séance – après-midi
AG/DSI/3502

Devant la Première Commission, les États réaffirment la priorité que sont le désarmement nucléaire et le contrôle du commerce illicite des armes classiques

« L’incapacité des États dotés de l’armes nucléaires à lancer des négociations visant la réduction de leurs arsenaux est troublante », a déclaré le représentant du Saint-Siège, résumant pour partie le sentiment général des délégations qui se sont exprimées cet après-midi devant la Première Commission, chargée des questions de désarmement et de sécurité internationales.  Il est déplorable qu’à quelques mois de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) qui se tiendra en 2015 à New York, un Traité aussi important pour l’humanité et le bien commun n’ait pas encore été intégralement mis en œuvre, a-t-il regretté. 

Il faut donc que le processus, dont la crédibilité est en jeu, selon le Portugal, se poursuive malgré tout, a affirmé le Myanmar, qui a par ailleurs estimé que la conférence d’examen sera l’occasion pour les États dotés de renouveler leurs engagements et de passer à l’action, en particulier pour ce qui concerne les garanties négatives de sécurité.

Constatant, à l’instar d’autres délégations, les blocages des mécanismes de désarmement, l’Argentine a jugé indispensable d’établir un nouveau paradigme de coopération en matière de désarmement, axé sur la coopération et le multilatéralisme, seule voie de succès.  Les priorités aujourd’hui sont l’abandon de la doctrine nucléaire, l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires (TICEN), la tenue de la Conférence sur une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient ou le début des négociations pour parvenir à un instrument international juridiquement contraignant pour la production de matière fissile, a estimé cette délégation.

La réalisation de ces priorités est d’autant plus importante que les conséquences que représentent les armes nucléaires pour l’humanité sont graves, a souligné la Suède, déplorant le climat et les « postures de la guerre froide » qui continuent de prévaloir.  Pour cette délégation, les armes nucléaires devraient faire partie du passé et la politique de puissance ne devrait plus avoir sa place.  Le désarmement nucléaire doit suivre la voie du désarmement chimique, a pour sa part estimé le représentant de la République du Congo. 

S’agissant des armes classiques, notamment les armes légères et de petit calibre (ALPC), les délégations ont également réaffirmé le danger qu’elles représentent pour la paix et la sécurité internationales.  En Érythrée, elles sèment la désolation, nourrissent le terrorisme et la violence.  En Afghanistan aussi, avec les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions, elles constituent la source première de l’insécurité et de la violence qui sévissent dans ce pays, ont indiqué leurs délégations.

Ce trafic n’est possible que parce que des groupes armés non étatiques parviennent à se procurer des armes par le biais du commerce illicite, a souligné le Salvador, autre pays victime, alors que la représentante du Comité internationale de la Croix Rouge a mis en cause la responsabilité des États fournisseurs d’armes.  Ces États, dont certains sont parties au Traité sur le commerce des armes, devraient être plus attentifs aux conséquences de l’usage de telles armes, en termes de coût humain et de destruction des infrastructures, a-t-elle estimé.   

Dans ce contexte, les délégations ont exprimé leur souhait de voir le Traité sur le commerce des armes entrer en vigueur.  En attendant, ont-elles affirmé, il fallait appliquer le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et intensifier la coopération multilatérale pour neutraliser ce type de commerce.  Le représentant de l’Arménie a estimé quant à lui que le nouvel environnement sécuritaire en Europe nécessitait une révision du mécanisme actuel de contrôle de ces armes.

La Première Commission poursuit son débat général demain, mercredi 15 octobre 2014, à 15 heures.

DÉBAT GÉNÉRAL SUR TOUS LES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR RELATIFS AU DÉSARMEMENT ET À LA SÉCURITÉ INTERNATIONALE

Déclarations

M. MAUNG WAI (Myanmar) a déclaré que l’établissement de zones exemptes d’armes nucléaires contribuait à la paix et à la sécurité dans le monde et c’est la raison pour laquelle il faudrait en établir une au Moyen-Orient.

Le représentant s’est prononcé pour la démilitarisation de l’espace extra-atmosphérique, précisant que sa délégation parrainerait le projet de résolution qui sera présenté sur la question au cours de cette session.  

Évoquant le désarmement nucléaire, en tant qu’objectif du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le représentant a estimé que ce processus devait se poursuivre, notamment dans le cadre de la conférence d’examen de 2015.  Cette occasion doit permettre aux États dotés de renouveler leurs engagements et de passer à l’action dans ce domaine, en particulier pour ce qui concerne les garanties négatives de sécurité, a-t-il encore indiqué.  

M. SINBAD MEME (République démocratique du Congo) a regretté l’inertie de la Conférence du désarmement, l’attribuant au manque de volonté politique des États qui protègent leurs intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général.  Il a estimé que la conclusion d’une convention d’interdiction des armes nucléaires restait « une des priorités les plus urgentes ».  Rappelant que les armes nucléaires étaient non seulement un danger, mais aussi un outil de domination, il a fait part de deux préoccupations principales, à savoir la modernisation continue des armes nucléaires et l’augmentation du nombre de leurs détenteurs et les limites imposées aux transferts de technologies nucléaires susceptibles de limiter le potentiel d’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques.

Il a par ailleurs estimé qu’il appartenait aux États dotés d’armes nucléaires de montrer la voie à suivre, en réduisant considérablement leurs stocks de manière vérifiable.  « Le désarmement nucléaire doit suivre la voie du désarmement chimique », a-t-il affirmé.

Évoquant les armes classiques, le représentant a salué l’entrée en vigueur du Traité sur le commerce des armes en décembre prochain, mais a estimé que le processus de contrôle et de vérification de ces armes devait se poursuivre.

M. GIRMA ASMEROM TESFAY (Érythrée) a déclaré que les armes classiques continuaient de semer la désolation dans de nombreux pays et que le terrorisme et la violence qui frappent les pays de sa région étaient des conséquences du commerce illicite des armes légères et de petit calibre.  C’est pourquoi, à son avis, il était urgent de mettre en œuvre le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects et d’insister sur la responsabilité » des États de lutter contre le commerce illicite de ces armes.  

Le représentant a également déclaré que la technologie moderne avait un potentiel d’utilisation illicite par les États et les groupes non étatiques.  Pour cette raison, a-t-il indiqué, qu’il était urgent de trouver un terrain commun pour que ces technologies ne soient pas détournées de leur but premier, afin de garantir la sécurité de tous.

M. TIGRAN SAMVELIAN (Arménie) a réitéré son soutien à l’objectif d’élimination totale des armes de destruction massive qui devrait constituer à son avis une priorité internationale.  Il a rappelé que le Traité sur la non-prolifération nucléaire était la pierre angulaire du régime de non-prolifération et a estimé que le Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects était « essentiel » et nécessitait un contrôle renforcé.

Le représentant a par ailleurs salué le Traité sur le contrôle des armes conventionnelles en Europe, mais jugé qu’il avait été bafoué ces dernières années.  « Le nouvel environnement sécuritaire en Europe impose de revoir le mécanisme actuel de contrôle », a-t-il précisé.  

M. GABRIELA MARTINIC (Argentine) a jugé indispensable d’établir un nouveau paradigme de coopération en matière de désarmement, estimant que les priorités dans ce domaine étaient l’abandon de la doctrine nucléaire, l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires, la tenue de la conférence sur une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient ou le début des négociations pour parvenir à un instrument international juridiquement contraignant pour la production de matière fissile. 

Le représentant a rappelé que son pays, qui présente traditionnellement une résolution sur les armes classiques, se félicitait de l’entrée en vigueur prochaine du Traité sur le commerce des armes et qu’il appuyait la candidature de Trinité-et-Tobago pour en accueillir le secrétariat.

M. RUBEN ZAMORA (El Salvador) a estimé que les zones exemptes d’armes nucléaires étaient des exemples de refus des armes nucléaires et que son pays appuyait les peuples qui souhaitaient l’établissement de telles zones dans leurs régions.

Il a également déclaré que le commerce illicite des armes légères et de petit calibre alimentait les activités des groupes non étatiques armés et menaçait la paix et la sécurité.  Cette situation a incité le Salvador, qui souffre de l’agissement de ces groupes, à signer et ratifier le Traité sur le commerce des armes, a indiqué le représentant.  Le Salvador attend à présent que des mesures soient prises pour neutraliser le commerce des armes légères et de petit calibre, a conclu le représentant.  

M. MÅRTEN GRUNDITZ (Suède) a rappelé les conséquences et les risques que représentent les armes nucléaires pour la planète et salué la tenue de conférences internationales sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires, appelant les États à participer à la réunion internationale organisée en décembre prochain, à Vienne, en Autriche.  Le représentant a également déploré « la lenteur des avancées et la persistance des postures de la guerre froide », rappelant que le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires restait la pierre angulaire du régime de désarmement et de non-prolifération.

Dénonçant ensuite « l’annexion du territoire ukrainien par la Fédération de Russie » et qualifiant cette politique de « défi grave à la paix et à la stabilité », il s’est dit préoccupé « par la présence d’armes nucléaires tactiques aux portes de la Suède ».  « Tout comme les armes nucléaires devraient faire partie du passé, la politique de puissance ne devrait plus avoir sa place », a-t-il déclaré.

Il a réitéré son soutien à l’élimination des armes chimiques, saluant les efforts de l’Organisation pour démanteler l’arsenal chimique de la Syrie, tout en déplorant l’usage de gaz chloré ces derniers mois contre des civils dans ce pays.

Il a également salué l’entrée en vigueur du Traité sur le commerce des armes et appuyé le lancement de négociations sur l’élaboration d’un code de conduite sur les activités dans l’espace extra-atmosphérique.

M. ÁLVARO MENDONÇA E MOURA (Portugal) a salué l’entrée en vigueur du Traité sur le commerce des armes le 24 décembre prochain et appelé les États qui n’y étaient pas encore parties à le signer et à le ratifier dans les plus brefs délais.  Évoquant la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires de 2015, il a estimé que la crédibilité de l’instrument dépendrait des résultats de cette conférence.  Il a partagé les préoccupations ayant trait aux conséquences humanitaires de l’usage d’armes nucléaires et souligné la nécessité de la tenue d’une conférence internationale pour l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient.

Concernant la non-prolifération, le représentant a déploré le manque de coopération de la République populaire démocratique de Corée avec l’AIEA et la poursuite de ses programmes nucléaires et balistiques.  Quant au programme nucléaire iranien, il a apporté son soutien aux négociations en cours, souhaitant qu’elles débouchent sur « un accord global et définitif ».

Le représentant a également rappelé que la Conférence du désarmement était le seul organe multilatéral de négociation du désarmement et a déploré l’impasse qui y persistait, se prononçant pour un élargissement de sa composition.

Se félicitant par ailleurs du démantèlement de l’arsenal chimique de la Syrie, il a estimé qu’il prouvait l’efficacité du multilatéralisme.

En conclusion, il a salué les travaux du groupe d’experts gouvernementaux sur les mesures de confiance dans l’espace extra-atmosphérique et s’est dit favorable à l’élaboration d’un code de conduite international.

Mgr BERNARDITO CLEOPAS AUZA, Observateur permanent du Saint Siège, a rappelé le message du pape François qui a apporté son soutien à l’adoption rapide d’étapes permettant de se rapprocher de l’élimination totale des armes de destruction massive et à la réduction de la dépendance aux forces armées dans la conduite des relations internationales.  Il a salué les progrès réalisés ces dernières années dans la lutte contre l’utilisation des armes chimiques et souhaité que la communauté internationale poursuive ses efforts pour parvenir à leur élimination totale.

Abordant la question des armes nucléaires, le représentant a salué la tenue en décembre prochain, à Vienne, en Autriche, de la troisième Conférence internationale consacrée aux conséquences humanitaires « inhumaine et immorale » de ces armes.  « L’incapacité des États dotés à lancer des négociations visant à la réduction de leurs arsenaux est troublante », a-t-il indiqué, estimant « encore plus troublante » la modernisation de ces armes.  À quelques mois de la Conférence d’examen du TNP qui se tiendra en 2015, à New York, le représentant a déploré

qu’un Traité aussi important pour l’humanité et le bien commun n’ait pas encore été intégralement mis en œuvre.  Dans ce contexte, il a appelé les États Membres à renoncer à la menace nucléaire, à signer ou ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires et à œuvrer à la création de zones exemptes d’armes nucléaires qui représentent « une étape importante » vers un monde sans armes nucléaires. disparité

Mme KATHLEEN LAWAND (CICR) s’est félicitée de l’entrée en vigueur prochaine du Traité sur le commerce des armes, appelant les États qui ne sont pas encore parties au Traité à le signer et à le ratifier sans tarder.  Elle a toutefois déploré que la circulation de ces armes continue d’alimenter les conflits et rappelé la responsabilité des fournisseurs d’armes, quand bien même ils ne sont pas États parties au Traité sur le commerce des armes.  Elle a souhaité que les États soient plus attentifs aux conséquences de l’usage de telles armes, en termes de coût humain et de destruction des infrastructures.

Évoquant la menace que représentent les armes nucléaires, elle a rappelé que le CICR considérait l’emploi de ce type d’armes comme incompatible avec le droit international humanitaire.  À ce propos, elle a salué le cycle de conférences internationales sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires et souhaité que la prochaine Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires de 2015 débouche sur de nouvelles mesures d’urgence pour faire avancer le désarmement.

La représentante a également soulevé la question des nouvelles technologies de guerre, nommément les armes autonomes et les « cyberarmes », soulignant l’incompatibilité de ces armes avec le droit international et rappelant qu’il ne s’agissait « pas d’armes du futur puisque d’ores et déjà, certaines armes sont suffisamment autonomes et soulèvent les questions de la disparition probable de la décision humaine ».

M. ZAHIR TANIN (Afghanistan) a apporté son soutien au multilatéralisme en tant que base de négociations pour parvenir aux objectifs de la communauté internationale sur le désarmement.  Pour la délégation, c’est la coopération entre États qui apportera de meilleurs résultats dans ce sens, a-t-il précisé.  Le représentant a également appuyé l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, estimant que tout retard dans sa mise en œuvre serait contraire aux conclusions de la conférence d’examen de 2010 du TNP. 

Le représentant a également affirmé que les activités des groupes terroristes qui frappaient notamment son pays et sa région contrevenaient directement au droit international.  C’est pour cela que le Gouvernement avait interdit, en 2001, l’importation de substances telles que le nitrate d’ammoniaque qui sert à la fabrication d’engins explosifs, a-t-il dit.

Le représentant a en outre déclaré que le commerce illicite des armes légères et de petit calibre constituait un sujet de grave préoccupation pour l’Afghanistan, de même que l’existence des mines antipersonnel ou des armes à sous-munitions.  Il a estimé que le temps était venu pour la mise en œuvre du Programme d’action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects.  Le représentant a également déploré le manque de ressources de son pays pour les opérations de déminage. 

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