Cinquième Commission: les délégations s’inquiètent des dépassements budgétaires et des retards dans la rénovation du Siège de l’ONU à New York
La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a examiné, cet après-midi, la question de la rénovation du Siège de l’ONU dont un dépassement budgétaire de 379 millions de dollars.
Les délégations ont entendu de la bouche du Président du Comité des commissaires aux comptes (CCC), M. Steven Townley, que les estimations finales portent le budget à 2,374 milliards de dollars, alors que les délégations s’étaient entendues sur une somme de 1,990 milliard.
« La situation est grave », a ajouté le Secrétaire général adjoint à la gestion, M. Yukio Takasu, qui a estimé les dépenses connexes à 139,8 millions de dollars et celles liées au centre de données auxiliaires, à 15 millions. Or, le compte de la rénovation du Siège de l’ONU dit « plan-cadre d’équipement » n’a plus que 39 millions de dollars de liquidités.
Le représentant de l’Union européenne a demandé des précisions sur les dépassements budgétaires et des propositions détaillées sur leur financement.
Parmi les autres causes d’inquiétude, les délégations ont noté les retards dans le démantèlement du bâtiment temporaire de la pelouse nord et l’absence de solution à la rénovation de l’annexe sud et de la Bibliothèque Dag Hammarskjöld, sans oublier l’impasse dans le renforcement des dispositifs de sécurité au niveau des 42e et 48e Rues, qui attendent toujours des autorités de la ville de New York, les permis de construire.
Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, la représentante de la Bolivie n’a pas manqué de rappeler la ville hôte à ses obligations, arguant des nombreux avantages qu’elle tire de la présence de l’ONU. Son homologue de la Fédération de Russie est revenu sur le démantèlement prévu du bâtiment temporaire de la pelouse nord qui, selon lui, pourrait servir à des manifestations de haut niveau pour le soixante-dixième anniversaire des Nations Unies, en septembre 2015. Le représentant du Kenya a eu une autre idée: le transfert du bâtiment démantelé à l’Office des Nations Unies à Nairobi (ONUN). Il a assuré que son gouvernement était prêt à faciliter l’opération.
Le Groupe des 77 et la Chine ont, par la voix de la représentante de la Bolivie, aussi noté l’absence d’un plan pour la Bibliothèque Dag Hammarskjöld et l’annexe sud. Mon Groupe ne considérera que la rénovation du Siège est terminée qu’une fois que celle de ces deux bâtiments le sera, a prévenu la représentante.
La fin des travaux n’est désormais prévue qu’à la fin de 2016 et le montant définitif des dépenses ne sera connu qu’au premier trimestre de 2018, a confirmé le Président du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), M. Carlos Ruiz Massieu. L’échéance de la fin 2016 que propose actuellement le Secrétaire général n’est conforme ni au calendrier approuvé par l’Assemblée générale ni à l’intégralité du cahier de charges, a tranché le Président du CCQAB.
La prochaine réunion de la Cinquième Commission sera annoncée dans le Journal des Nations Unies.
BUDGET-PROGRAMME DE L’EXERCICE BIENNAL 2014-2015
Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) sur le douzième rapport annuel relatif au plan-cadre d’équipement (A/69/529)
Pour l’établissement de ce rapport, le CCQAB a examiné le douzième rapport annuel du Secrétaire général sur l’état d’avancement de l’exécution du plan-cadre d’équipement (A/69/360). Il était également saisi du rapport du Comité des commissaires aux comptes (CCC) sur le plan-cadre d’équipement pour l’année terminée le 31 décembre 2013 [A/69/5 (Vol. V)] et du rapport correspondant du Secrétaire général sur la suite donnée aux recommandations formulées par le Comité (A/69/353).
Le CCQAB recommande que l’Assemblée générale prie le Secrétaire général de donner suite à la recommandation du Comité des commissaires aux comptes, afin que la mise en place d’un dispositif de gouvernance et d’assurance indépendant fasse partie intégrante de tout grand projet à l’avenir.
Dans son rapport, le Comité des commissaires aux comptes constate que le coût du contrat de rénovation du bâtiment de l’Assemblée générale a enregistré une augmentation de 21 millions de dollars, passant de 104 millions de dollars en 2013 à 125 millions de dollars, en raison de la nécessité d’accélérer les travaux pour livrer le bâtiment de l’Assemblée générale à temps pour le débat général en septembre 2014. Il souligne que l’Administration prévoit que le projet s’achèvera en juin 2015 sans que les travaux de rénovation de la Bibliothèque et de l’annexe sud, ni ceux portant sur la voie de desserte au niveau des 42e et 48e Rues aient été réalisés, avec un retard de 17 mois par rapport à la date initialement prévue et un dépassement des coûts de 379 millions de dollars.
En ce qui concerne le coût final prévu du projet, le Comité des commissaires aux comptes considère que, pour être fiable, la méthode adoptée pour estimer ce coût final devrait tenir compte des risques quantifiés, des tendances en ce qui concerne les demandes d’avenants, de la possibilité de réclamations futures et de l’accélération des travaux de construction. Il fait observer que l’on s’est beaucoup concentré sur les aspects techniques de l’exécution du projet mais que peu d’efforts ont été faits pour définir les avantages du projet et un plan pour les valoriser. Il rappelle que le Secrétaire général indiquait que les principaux avantages avaient trait à l’amélioration de la performance environnementale, dont une réduction de 50% de la consommation d’énergie, une réduction de 40% de la consommation d’eau et une réduction de 45% des émissions de dioxyde de carbone. Le Comité a été informé que l’Administration entend commencer à rendre compte des économies d’énergie d’ici à la fin de 2015.
Tout en reconnaissant qu’il est nécessaire de prévoir des ressources au budget ordinaire pour financer les frais d’entretien après l’achèvement du plan-cadre d’équipement, le CCQAB juge contestable que le budget ordinaire serve à financer des améliorations apportées aux locaux du Siège, comme le système d’éclairage périphérique ou la remise en état de la clôture, travaux qui lui paraissent relever du plan-cadre d’équipement en cours d’exécution.
Il note que le Secrétaire général affirme que les travaux restant à effectuer après l’achèvement de la phase de rénovation en 2014 sont la démolition du bâtiment temporaire de la pelouse nord, qui doit être achevée à la fin de 2015; la remise en état paysagère du site et les travaux liés à la sécurité à la hauteur des 42e et 48e Rues, y compris le réaménagement des entrées nord et sud de la rampe d’accès pour permettre l’installation d’un quai de déchargement à la 48e Rue, et la modification du dispositif de circulation à la 42e Rue. Ces travaux ne pourront débuter qu’après la délivrance des permis de construire nécessaires par la ville hôte.
Cette activité, qui demandera jusqu’à 18 mois de travaux, devrait s’achever à la fin de 2016. Elle marquera la fin du plan-cadre d’équipement. La clôture financière et comptable du plan-cadre interviendrait donc après 2016; la communication des informations financières définitives se fera au plus tôt dans les états financiers de l’ONU pour l’année terminée le 31 décembre 2017.
Le CCQAB estime que les informations fournies par le Secrétaire général manquent de clarté en ce qui concerne l’éventualité d’augmentations des dépenses, de modifications de l’ampleur et de la portée des travaux ou de reports du délai définitif pour l’achèvement du projet, qui pourraient avoir une incidence sur d’autres projets, notamment le plan stratégique patrimonial.
Si l’Assemblée générale approuve la proposition consistant à repousser de la fin de 2015 à la fin de 2016 la date d’achèvement du plan-cadre d’équipement, ce qui exigerait que le Secrétaire général lui soumette des rapports annuels supplémentaires, le CCQAB estime que le Comité des commissaires aux comptes devrait poursuivre ses vérifications annuelles des comptes du projet jusqu’à ce que le Secrétaire général ait remis son rapport final sur le projet, y compris le compte-rendu de l’évaluation postérieure à l’achèvement de celui-ci.
D’après le Secrétaire général, le coût des travaux de construction en cours s’élève à 2 milliards 150 millions de dollars, déduction faite des prévisions de dépenses initiales relatives à la rénovation des bâtiments de la Bibliothèque Dag Hammarskjöld et de l’annexe sud (65 millions de dollars). Au 30 juin 2014, le montant cumulé des dépenses s’élevait à 2 131,8 millions de dollars, ce qui signifie que 99,2% du montant prévu pour mener le projet à terme avaient été utilisés.
Pour le Secrétariat, la variation potentielle des coûts sera limitée dans la mesure où 99,2% des dépenses jusqu’à l’achèvement du projet ont été réalisées ou engagées et où les travaux qui restent à effectuer constituent une faible proportion de l’ensemble du projet et sont moins complexes que les travaux de rénovation. En conséquence, le Bureau chargé du plan-cadre d’équipement escompte que le coût total du projet se maintiendra à 2 214,97 millions de dollars. Une évaluation après achèvement des travaux, comportant une détermination du coût final de la mise en œuvre du plan-cadre d’équipement, sera soumise à l’Assemblée générale.
Le CCQAB regrette à nouveau que le projet du plan-cadre d’équipement n’ait guère de chances de voir l’exécution des travaux initialement prévus dans la limite du budget approuvé par l’Assemblée générale pour la rénovation des bâtiments de la Bibliothèque et de l’annexe sud. Il prend note des solutions provisoires que propose le Secrétaire général et qui prévoit notamment que les fonctions continuent d’être exercées dans les bâtiments actuels, à condition que les conditions de sécurité s’améliorent; qu’elles le soient dans le bâtiment temporaire de la pelouse; qu’elles soient déplacées dans de nouveaux locaux loués hors complexe, à l’exception de la cafétéria, qui serait installée au 3e sous-sol; qu’elles le soient dans d’autres bâtiments du complexe, dans l’hypothèse où le bâtiment de la pelouse nord aurait été démantelé; ou encore qu’elles soient transférées dans les étages inférieurs du bâtiment du Secrétariat, ce qui nécessiterait le déplacement des services qui y sont actuellement hébergés.
Le CCQAB estime que ces solutions provisoires ne constituent pas des réponses adéquates à la demande de l’Assemblée générale, à savoir la nécessité pour le Secrétaire général de présenter des solutions réalistes, quels que soient les besoins en locaux à long terme au Siège.
Déclarations
Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, Mme DAYANA RIOS REQUENA (Bolivie) a dit que le plan-cadre doit être achevé à temps et dans le cadre du budget approuvé sans que cela ne compromette la qualité du produit final. Elle a appuyé le recouvrement des dépenses afin de renflouer les Fonds de roulement et le Compte spécial. Elle a rappelé qu’au titre de la résolution pertinente, l’Assemblée générale reconnait la nécessité de financer les insuffisances budgétaires y compris celle des dépenses connexes de la réhabilitation.
Tout en se félicitant des résultats obtenus, elle a dit que de sérieuses questions devaient encore être réglées avant l’achèvement du plan-cadre. Elle a demandé des précisions sur le transfert de responsabilité après juin 2015, du Bureau chargé du plan-cadre d’équipement au Bureau des services centraux d’appui du suivi de la réhabilitation. Elle a invité le Secrétaire général à faire face aux insuffisances observées dans les nouvelles installations, notamment dans les salles de conférence. Elle a cité les difficultés qu’ont les délégations d’accéder à leurs places, notamment les personnes handicapées. Dans ce contexte, elle a voulu savoir qui est responsable.
En ce qui concerne la Bibliothèque Dag Hammarskjöld et l’annexe sud, la représentante a regretté que le Secrétaire général n’ait pas présenté de plan. Elle a d’emblée prévenu que son Groupe ne pourra pas considérer que la rénovation est terminée tant que les deux bâtiments ne seront pas terminés.
Préoccupée par les retards dans le démantèlement du bâtiment de la pelouse nord, elle a fait siennes les inquiétudes du CCQAB qui attribuait ces retards à l’utilisation de ce bâtiment en dehors du plan-cadre.
Soulignant l’importance qu’il y a à ce que la rénovation respecte l’intégrité architecturale du complexe de l’ONU, la représentante s’est dite préoccupée par les nouveaux retards dans le renforcement des dispositifs de sécurité au niveau de la 42e et de la 48e Rues, faute de permis de construire. Elle a souligné les nombreux avantages que les États-Unis tirent de la présence de l’ONU à New York et a rappelé le pays à ses obligations de pays hôte.
Mme CARMEL POWER, Union européenne, s’est félicitée de la rénovation du bâtiment de l’Assemblée générale dans le respect du calendrier prévu. Au vu de ces réalisations, elle a estimé qu’un point final devait désormais être mis à l’exécution du plan-cadre d’équipement. Elle a salué la décision du Secrétariat de fermer le Bureau chargé de ce plan-cadre à compter du mois de juin 2015 et s’est prononcée en faveur du transfert au Bureau des services centraux d’appui de la responsabilité des travaux restants après l’achèvement de la phase de rénovation.
Mme Power n’a pas caché l’inquiétude de l’Union européenne face aux dépassements budgétaires, précisant qu’elle attendait avec impatience les détails promis. Elle a insisté sur la nécessité de tirer les enseignements du plan-cadre d’équipement dans la planification et la mise en œuvre des futurs travaux de construction.
M. SHIGETOSHI NAGAO (Japon) s’est, à son tour, félicité de la rénovation du bâtiment de l’Assemblée générale et a salué l’estimation du Secrétaire général selon laquelle les travaux restants après l’achèvement de la phase de rénovation seront financés à partir des ressources approuvées. M. Nagao a particulièrement insisté sur les dépassements budgétaires ainsi que sur les coûts du second centre de données de l’ONU, devant être en partie financés via le budget du plan-cadre d’équipement et le Compte spécial des Nations Unies. Le représentant a appelé les États Membres à faire preuve d’une certaine retenue dans le recours à de telles solutions, les invitant à effectuer un suivi rigoureux de l’évolution des fonds de trésorerie.
Concernant la question de la Bibliothèque Dag Hammarskjöld et de l’annexe sud, M. Nagao a appuyé la vision du Secrétaire général en vertu de laquelle il convient d’inclure cette question dans les futures décisions de l’Assemblée générale relatives à l’aménagement du Siège de l’Organisation.
M. SERGEY KHALIZOV (Fédération de Russie) a dit la nécessité de garantir un transfert sans heurt après juin 2015 des responsabilités entre le Bureau chargé du plan-cadre d’équipement et le Bureau des services centraux d’appui. Il a demandé que le Secrétaire général présente davantage d’informations sur les options et coûts de réinstallation des services actuellement logés dans l’annexe sud et la Bibliothèque Dag Hammarskjöld. Tout en notant que l’Assemblée générale a autorisé, en avril 2014, le recours au Fonds de réserve et au Compte spécial en tant que mécanisme provisoire de financement des dépenses supplémentaires du plan-cadre d’équipement, le représentant russe a espéré que les délégations pourront, au cours de cette session, s’accorder sur les moyens de faire face aux dépenses supplémentaires grâce à de nouvelles quotes-parts de contribution.
S’agissant du démantèlement programmé du bâtiment provisoire de la pelouse nord, il a souligné que ce bâtiment pourrait servir à des manifestations de haut niveau dans le cadre du soixante-dixième anniversaire des Nations Unies, en septembre 2015. Notant qu’il serait insensé d’organiser ces manifestations en dehors du Siège de l’ONU, le représentant russe a indiqué que sa délégation serait prête à envisager le report de la démolition, si elle recevait une analyse démontrant les avantages d’un tel report.
M. ROBERT MULE (Kenya) s’est félicité des rénovations et concernant les travaux en suspens, a souhaité que l’ensemble du projet soit mené à terme. S’agissant du bâtiment temporaire de la pelouse nord, il a pris acte de la nécessité de le démanteler. Il a officiellement demandé, au nom de son pays, que le bâtiment démantelé soit déplacé à l’Office des Nations Unies à Nairobi (ONUN). Mon gouvernement est prêt à tout faire pour faciliter ce transfert, a-t-il assuré.