Quatrième Commission: le mandat offensif de la Brigade d’intervention de la Mission de l’ONU en RDC et le déploiement de drones suscitent des craintes
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Quatrième Commission
16e séance – matin
QUATRIÈME COMMISSION: LE MANDAT OFFENSIF DE LA BRIGADE D’INTERVENTION DE LA
MISSION DE L’ONU EN RDC ET LE DÉPLOIEMENT DE DRONES SUSCITENT DES CRAINTES
Le mandat offensif de la Brigade d’intervention de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et le déploiement, au printemps prochain, de drones ont continué de susciter des craintes chez les plus grands contributeurs de troupes. La Quatrième Commission chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation poursuivait aujourd’hui son débat sur l’étude d’ensemble des opérations de maintien de la paix.
Face au concept d’« opérations robustes » qui envisage le recours à la force, plusieurs délégations ont réaffirmé leur attachement aux principes fondamentaux du maintien de la paix dont l’impartialité et le non-recours à la force sauf en cas de légitime défense. Mécanisme multilatéral, le maintien de la paix ne saurait se transformer en une force d’intervention qui ferait office d’arbitre dans un conflit, a commenté le représentant du Venezuela.
Au nom de la crédibilité et de la légitimité de l’ONU, a renchéri le représentant du Pakistan, il faut veiller à une distinction claire entre maintien et imposition de la paix. Il a insisté pour que la Brigade d’intervention déployée au sein de la Mission de l’ONU en RDC soit l’exception et non la norme. Ce doit être une mesure temporaire. Autre contributeur de troupes, le Rwanda a, par la voix de son représentant, prévenu que le recours à la force peut faire des soldats de la paix des cibles et renforcer les risques encourus par les populations civiles qui seraient ainsi exposées aux représailles.
Son homologue de la Suisse a pris le contre-pied. Il s’est plutôt réjoui que les opérations de maintien de la paix aient enfin montré leur capacité à réagir « de manière prompte » face aux violences contre les civils. Il est allé plus loin et a argué que l’emploi prévu de systèmes aériens sans pilote et non armés –drones- pour appuyer les efforts de surveillance de la Mission en RDC n’est qu’un exemple de la manière dont les avancées technologiques de pointe peuvent servir de multiplicateurs de forces lorsqu’elles sont judicieusement mises à profit.
Les premiers résultats que l’ONU tirera de cette expérience « inédite » dans l’histoire des opérations de maintien de la paix seront d’une importance cruciale pour déterminer le rôle que de telles technologies peuvent jouer dans d’autres contextes de maintien de la paix, a estimé le représentant suisse. Son homologue du Rwanda a dit tenir à un recours « impartial et transparent » à ces nouvelles technologies.
La représentante de l’Indonésie a demandé un débat sur ces questions à la prochaine session du Comité spécial des opérations de maintien de la paix. Ce Comité, a insisté son homologue de la Fédération de Russie, reste l’organe central pour les changements stratégiques dans la politique de maintien de la paix de l’Organisation. L’incapacité dudit Comité à adopter son rapport pour des questions « triviales » de procédure, comme l’a dit le représentant du Pakistan, a, une nouvelle fois, été décriée.
La solution aux blocages actuels, a préconisé le représentant de la Suisse, nécessite avant tout un changement d’attitude de la part des États Membres: le maintien de la paix est un partenariat, basé sur le partage des tâches et des responsabilités, et sur la confiance mutuelle au service d’un objectif commun. Ce partenariat ne peut exister que si chaque groupe et délégation est capable de comprendre les besoins des autres, de négocier de bonne foi, et surtout de faire des compromis.
Il est grand temps, a renchéri le représentant du Pakistan, que le partenariat prenne sa véritable signification, et pour cela les pays développés et autres qui ont des ressources essentielles doivent partager la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales. L’importance et l’utilité d’un dialogue triangulaire renforcé entre le Secrétariat, le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police ont été soulignée aujourd’hui comme hier.
La Quatrième Commission poursuivra son débat sur cette question, demain, mercredi 30 octobre à partir de 10 heures.
ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS
Déclarations
M. MASOOD KHAN (Pakistan) a dit que les missions de maintien de la paix sont « l’activité phare » de l’ONU. En tant que participant essentiel de ces activités, a-t-il dit, le Pakistan accorde un intérêt particulier à ce débat. Les opérations de maintien de la paix fonctionnent dans des contextes de plus en plus complexes et les attentes ne cessent d’augmenter. Les défis opérationnels sont tels qu’on ne peut les relever que grâce à l’action collective, et au renforcement des capacités régionales.
Le Pakistan, a ajouté le représentant, estime qu’il faut mettre un terme à la tendance de la compartimentation des rôles dans le maintien de la paix, entre pays contributeurs de troupes et décideurs politiques. Les pays développés et d’autres qui ont les ressources requises doivent aussi assumer la responsabilité du maintien de la paix. Il faut plus de cohérence entre ceux qui formulent les mandats des missions et ceux qui les mettent en œuvre. « Il est grand temps que ce partenariat prenne sa véritable signification », a exigé M. Khan.
Compte tenu des défis croissants, il a jugé inacceptable que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix n’ait pas été capable de mener à bien ses travaux pour des questions « triviales » de procédure. Il espère que ces problèmes seront dépassés pour la prochaine session.
En tant que Président du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le maintien de la paix, le Pakistan a, a déclaré son représentant, mis l’accent sur la participation accrue des pays contributeurs de contingents au dialogue triangulaire du Conseil de sécurité. Sous la présidence pakistanaise, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 2086 qui s’est concentrée sur les démarches multidimensionnelles du maintien de la paix, a rappelé M. Khan.
Parmi les questions fondamentales à clarifier dans le contexte du maintien de la paix il a évoqué celle de l’utilisation de la force. Afin de maintenir la crédibilité et la légitimité du maintien de la paix, il faut veiller à la distinction claire entre maintien et imposition de la paix. Le recours à la force n’est autorisé qu’en cas de légitime défense, a tancé le représentant. Par conséquent, le Pakistan insiste pour que la Brigade d’intervention qui a été déployée en République démocratique du Congo soit l’exception et non la norme. Ce doit être une mesure temporaire.
Pour garantir leur succès, les opérations de maintien de la paix doivent être dotées des capacités et des ressources adaptées à leurs besoins réels et changeants. Le Pakistan a condamné la fréquence accélérée des attaques contre le personnel de l’ONU et a même suggéré l’examen de leurs causes pour mieux les contrecarrer. Il a appuyé le recours aux nouvelles technologies pour contribuer à la sécurité et à la sûreté du personnel.
Le Pakistan est activement engagé dans le travail du Groupe consultatif de haut niveau sur les taux de remboursement des pays contributeurs de troupes, a indiqué le représentant. Le pays attend un dialogue franc sur la direction stratégique du maintien de la paix de l’ONU, un dialogue sur les questions politiques, opérationnelles, financières et sur les ressources. Il faut innover er renforcer l’architecture de la paix de l’ONU.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA VELÁSQUEZ (Pérou) a rappelé que les Nations Unies ont comme mission fondamentale le maintien de la paix et de la sécurité internationales. C’est pourquoi les opérations de maintien de la paix sont très importantes, a-t-il ajouté, en soulignant qu’elles présentent aujourd’hui un caractère multidimensionnel, incluant le renforcement de l’état de droit ou la protection des civils. Il est donc indispensable de réaffirmer le principe de l’appropriation nationale et d’accorder l’importance voulue à la consolidation de la paix.
Le Pérou, a relevé M. Velásquez, déplore que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix n’ait pas été en mesure d’adopter un rapport à sa dernière session. Cet organe intergouvernemental doit continuer de jouer un rôle crucial dans l’élaboration et la réalisation des politiques en la matière.
Le représentant a noté que cette année marque les 40 ans de l’engagement constant du Pérou dans les opérations de maintien de la paix. Le Pérou contribue à huit opérations, a-t-il indiqué, en jugeant important que le comportement éthique du personnel soit exemplaire. Il a salué la politique de tolérance zéro du Secrétaire général et encouragé la promotion des femmes dans le maintien de la paix.
M. LAWRENCE MANZI (Rwanda) a regretté que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix (C34)n’ait pas été en mesure de mener à bien son travail lors de la soixante-septième session, indiquant néanmoins que le Rwanda, en tant que contributeur actif aux missions de maintien de la paix, espérait que la soixante-huitième session serait plus productive.
Le représentant a par ailleurs souligné l’importance de la coopération entre partenaires. Le Rwanda reconnaît les changements continus intervenus dans le maintien de la paix et les défis qui se présentent, et salue la capacité de l’organe à faire preuve d’adaptation et de souplesse. Dans notre expérience, cette évolution et la nature instable des conflits ont créé un plus grand nombre d’attentes vis-à-vis de nos soldats de la paix, a ajouté le représentant, soulignant que le nombre croissant d’attaques contre les soldats de la paix était là pour rappeler la responsabilité de tous de réduire les risques qu’ils encourent, renforcer les mesures préventives, et améliorer l’efficacité des opérations de maintien de la paix.
Le Rwanda reconnaît que l’usage de la force dans les opérations de maintien de la paix peut menacer l’impartialité des opérations de la mission, faire des soldats de la paix des cibles, et renforcer les risques encourus par les populations civiles qui peuvent être la cible de représailles, a précisé le représentant, se disant favorable à l’usage impartial et transparent de nouvelles technologies capables de protéger les civils et le personnel de l’ONU.
En conclusion, le représentant a salué l’augmentation de la participation des femmes dans les opérations de maintien de la paix dans le monde, et rappelé que son pays était favorable à un renforcement des liens entre le maintien de la paix et l’édification de la paix.
Mme RINA SOOMARNO (Indonésie) a tout d’abord rendu hommage aux Casques bleus qui ont perdu la vie dans l’exercice de leurs fonctions et à ceux qui continuent de remplir leur devoir avec courage, professionnalisme et dévouement. Tandis que les opérations continuent d’évoluer et que les conflits deviennent de plus en plus complexes, il faut faire en sorte que les ressources nécessaires soient mises à la disposition des Casques bleus et qu’un appui politique et opérationnel soit offert à leurs missions. « Il en va de la crédibilité des Nations Unies », a-t-elle souligné, avant de déplorer l’incapacité du Comité spécial des opérations de maintien de la paix à adopter son rapport annuel.
L’Indonésie, a déclaré la représentante, réaffirme que les principes fondamentaux des Nations Unies sont des éléments cruciaux du succès des opérations de maintien de la paix. La planification des opérations et l’organisation de la transition à moyen et long termes sont indispensables. Un partenariat renforcé entre toutes les parties prenantes est crucial et la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix, y compris dans les organes décisionnels, est très importante, car elle participe à l’autonomisation des femmes. Enfin, la représentante a exprimé sa préoccupation face au recours à des sociétés de sécurité privées et aux drones, qui devrait faire l’objet d’un débat, à la prochaine session du Comité spécial. Elle a indiqué que son pays a déployé actuellement 1 800 Casques bleus dans neuf opérations de maintien de la paix.
M. ALFREDO FERNANDO TORO-CARNEVALI (Venezuela) a souligné les profonds changements que les opérations de maintien de la paix ont connus au cours des 10 dernières années. Les mandats de plus en plus complexes et de nouvelles tâches comme la supervision des élections, le renforcement de l’état de droit, les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) et la protection des civils ont apporté des changements dans la doctrine du maintien de la paix, a noté le représentant. À ce titre, il a cité le concept d’« opérations robustes » qui envisage le recours à la force dans certaines situations différentes de la sphère traditionnelle de la légitime défense. Face à ces évolutions, il a réaffirmé son attachement aux objectifs et principes fondamentaux du maintien de la paix et de la Charte. Il a souligné que ce mécanisme multilatéral ne peut se transformer en un élément d’intervention qui ferait office d’arbitre dans un conflit.
Pour sa délégation, il serait nécessaire de mettre l’accent sur l’influence politique et le soutien intégral aux parties qui cherchent une solution aux conflits. Les opérations de maintien de la paix ne sauraient remplacer les solutions politiques, a-t-il estimé. Il a déploré les stratégies utilisées par certains États pour entraver les négociations sur le rapport final du Comité spécial des opérations de maintien de la paix. Les efforts de maintien de la paix, a-t-il dit, doivent s’accompagner des efforts de la communauté internationale en faveur de la coopération au développement. Il ne faut pas considérer « l’État protégé » comme une victime qui a besoin de protection mais plutôt comme un acteur fondamental dans les décisions prises et dans le projet de paix et de développement.
M. BENJAMIN SHARONY (Israël) a déclaré que son pays attache une grande importance à la Force des Nations Unies chargée d’observer le désengagement (FNUOD) et remercie le Conseil de sécurité d’avoir prorogé son mandat pour six mois. Il a indiqué qu’Israël est en faveur d’un renforcement des forces de la FNUOD, mais pas au détriment des capacités de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL), que ce soit en termes de personnel ou de budget. En effet, la FINUL joue un rôle stabilisateur dans la région et Israël réaffirme son soutien à la résolution 1701.
Le calme relatif dans le sud du Liban est trompeur, a déclaré le représentant, en estimant que le Hezbollah dispose d’une capacité militaire croissante et que son engagement en Syrie peut provoquer un effet « boule de neige » au Liban. « Il est donc nécessaire de faire cesser les livraisons d’armes au Hezbollah », a dit M. Sharony, en relevant que le Moyen-Orient est secoué par un « tremblement de terre » et qu’il est indispensable de se tenir prêt à défendre la liberté, la démocratie et la paix. « Le cas échéant, Israël est prêt à se défendre seul », a-t-il conclu.
Les propos du représentant sur la situation en Syrie ont valu à la Commission une motion d’ordre du représentant syrien: « le représentant des forces d’occupation israéliennes est sorti du cadre du point de l’ordre du jour en discussion qui est l’étude d’ensemble de toute la question des opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects, et non pas la situation interne de pays en particulier. Le temps de la Commission est précieux et l’on ne devrait pas s’écarter du point à l’ordre du jour. »
M. FRÉDÉRIC MARC-ANDRÉ TISSOT-DAGUETTE (Suisse) a salué le fait que l’ONU ait renforcé l’action de la MONUSCO en République démocratique du Congo. « Les opérations de l’ONU doivent en effet montrer leur capacité à réagir de manière prompte face aux violences contre les civils. » Au Mali, la création de la MINUSMA est un élément majeur, selon lui, qui doit contribuer à la paix et la sécurité dans une région qui fait face à de nombreux défis. Compte tenu de l’importance du mandat de cette Mission, il a estimé qu’il est d’autant plus urgent qu’elle reçoive les ressources financières et humaines nécessaires. Soulignant que les efforts de maintien de la paix de l’ONU en RDC et au Mali ont souvent été sous le feu des projecteurs ces derniers mois, il a tenu à rappeler que de grandes et de petites missions ont été menées tout au long de l’année à travers le monde, comme au Libéria, en Côte d’Ivoire ou encore en Haïti. Ces opérations étaient certes moins visibles mais tout aussi importantes et souvent non moins efficaces, a estimé le représentant, qui a appelé les États Membres à leur accorder le même intérêt et le même soutien pour éviter la reprise des hostilités et aider à l’instauration d’une paix durable.
Il est essentiel de soutenir le système des Nations Unies dans ses efforts pour développer des réponses adaptées, à la fois innovantes et souples, aux défis que pose la gestion de la sécurité dans les situations volatiles. Le représentant a appelé les États Membres, et en particulier les pays hôtes de missions de maintien de la paix, à poursuivre leur action de sensibilisation du public au rôle des soldats de la paix, à contribuer à expliquer les raisons de leur présence et leur mandat et à veiller, au besoin, à ce que les auteurs des attaques contre eux soient traduits en justice, conformément au droit humanitaire international.
Après une courte période de consolidation, la demande d’opérations progresse à nouveau, a souligné le représentant. Entre janvier et août, le nombre de soldats de la paix déployés a augmenté de 3 000 militaires, dont quelques 140 femmes. La Suisse tient à féliciter les Départements des opérations de maintien de la paix et de l’appui aux missions ainsi que les missions de terrain pour ce résultat remarquable et appelle les États Membres à redoubler d’effort pour favoriser la participation de femmes à ces missions.
Le représentant a soutenu l’utilisation de technologies modernes dans les opérations de maintien de la paix qui permette de mener les activités de manière plus efficace, plus rapide, plus conséquente et de réduire les coûts. Cette démarche devrait se concrétiser à tous les niveaux et pour tous les types d’activités de maintien de la paix et impliquer le recours à des technologies de communication bien établies et aux technologies de pointe émergentes. L’emploi prévu de systèmes aériens sans pilote et non armés pour appuyer les efforts de surveillance de la MONUSCO dans l’est de la RDC n’est qu’un exemple de la manière dont les avancées technologiques de pointe peuvent servir de multiplicateurs de forces lorsqu’elles sont judicieusement mises à profit. Les premiers résultats que l’ONU tirera de cette expérience inédite dans l’histoire de ses opérations seront d’une importance cruciale pour déterminer le rôle que de telles technologies peuvent jouer dans d’autres contextes de maintien de la paix, a estimé le représentant.
Avant de conclure, il a invité le Comité spécial des opérations de maintien de la paix à se demander où se trouve son intérêt, face à la crise qu’il traverse car « malgré son incapacité à produire des résultats pertinents pour la conduite des opérations de maintien de la paix, la réalité n’attend pas, et le maintien de la paix se développe sans que nous ayons voix au chapitre ». La solution aux blocages actuels nécessite avant tout un changement d’attitude: le maintien de la paix est un partenariat, basé sur le partage des tâches et des responsabilités, et sur la confiance mutuelle au service d’un objectif commun. Ce partenariat ne peut exister que si chaque groupe et délégation est capable de comprendre les besoins des autres, de négocier de bonne foi, et surtout de faire des compromis.
M. ABDOU SALAM DIALLO (Sénégal) a rappelé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales constituaient l’une des missions essentielles et même l’une des raisons d’être de l’ONU. À cet égard, dans le préambule de sa Charte fondamentale, l’Organisation affirme avec conviction sa volonté et sa détermination à « préserver les générations futures du fléau de la guerre » après la tragique expérience de laquelle le monde venait de s’extirper, a souligné le représentant. Il a ajouté que son pays avait, depuis son accession à la souveraineté internationale, décidé de se tenir aux côtés des Nations Unies en contribuant de manière substantielle à l’effort international de promotion de la paix et de la sécurité. Le représentant a affirmé que cet engagement, reflet et expression d’une ligne de politique étrangère, s’appréciait aujourd’hui à travers la présence de 2 934 soldats et forces de police sénégalais dans les différents théâtres d’opérations, plaçant ainsi le Sénégal au dixième rang du classement mondial des pays contributeurs de troupes et au troisième rang des pays fournisseurs de contingents de police.
Le Sénégal estime que le souci d’efficacité doit constituer le crédo des stratégies de maintien de la paix élaborées et mises en œuvre par l’ONU. Par conséquent, il importe de prendre en compte plusieurs paramètres importants renvoyant, entre autres, à la définition de mandats clairs, crédibles et réalistes mais aussi au déploiement de ressources humaines de qualité et de moyens logistiques et financiers adéquats. Le représentant a affirmé que l’exécution des opérations de maintien de la paix devait être respectueuse de certains principes fondamentaux, de manière à préserver l’image de marque des Nations Unies et de consolider sa légitimité au regard des États et des peuples du monde entier.
M. IHAB HAMED (République arabe syrienne) a déclaré que la responsabilité principale du maintien et de la consolidation de la paix repose sur les Nations Unies et que les opérations de maintien de la paix constituent un outil indispensable pour mener à bien cette mission. Les opérations garantissent un environnement propice à la consolidation de la paix après les conflits, a-t-il ajouté.
Le représentant a rappelé que la Charte des Nations Unies consacre les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale et de non-ingérence dans les affaires internes des États. Les opérations de maintien de la paix doivent donc se tenir strictement à ces principes fondamentaux, a-t-il souligné, avant de relever un autre principe qui est le consentement des États hôtes. La Syrie, a poursuivi M. Hamed, a toujours appuyé le développement des opérations de maintien de la paix, mais réaffirme que ces opérations ne peuvent en aucun cas se substituer à une solution durable d’un conflit. Le principe de la protection des civils ne doit pas être instrumentalisé pour s’ingérer dans les affaires internes d’un pays, a relevé le représentant, en appelant à une définition juridique commune s’agissant de ce principe.
La Syrie, a noté M. Hamed, réaffirme son engagement et son appui en faveur de la FNUOD et de la FINUL, tout en réitérant que les opérations de maintien de la paix devraient avoir un mandat limité dans le temps. Malgré le déploiement d’opérations dans la région depuis des décennies, la paix reste hors de portée à cause de la politique israélienne d’agression ainsi que son absence de respect pour le droit international. Israël doit cesser son agression contre les peuples et les États de la région, a-t-il tranché.
Le représentant a affirmé que les menaces sécuritaires et les agressions dont sont victimes les Casques bleus sont préoccupantes. Ces agissements constituent l’un des principaux défis au travail des opérations de maintien de la paix sur le terrain. À cet égard, les Nations Unies doivent mettre fin à l’appui apporté par Israël aux forces terroristes dans le Golan syrien occupé, a-t-il plaidé. Les forces d’occupation transfèrent les terroristes blessés dans des hôpitaux israéliens avant d’être renvoyés illégalement vers le territoire syrien pour y poursuivre leurs opérations. Cela constitue non seulement une violation des accords pertinents mais cela met en outre la vie des Casques bleus en danger, a-t-il conclu.
M. ABUZIED SHAMSELDIM AHMED MOHAMED (Soudan), en tant que pays hôte de la MINUAD, a estimé qu’il s’agit d’une expérience édifiante dont on peut tirer des leçons. Les opérations de maintien de la paix doivent s’en tenir aux principes fondamentaux du maintien de la paix et à la Charte, dont le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures, le consentement des parties ou encore le non-recours à la force sauf en cas de légitime défense. Le représentant a également insisté sur la nécessité d’examiner les causes profondes des conflits pour y trouver des solutions durables, ce qui suppose une coopération plus étroite entre missions de la paix et gouvernements hôtes. Les opérations de maintien de la paix ne peuvent se substituer à un processus politique, a-t-il estimé. Elles doivent avoir un mandat clair et une stratégie de sortie bien définie. Le représentant a souligné le rôle essentiel des pays contributeurs de troupes qui doivent participer aux processus décisionnels. À cet égard il a appelé à redoubler d’efforts pour que leur rôle soit renforcé et jugé important que le déploiement des opérations s’accompagne de missions de bons offices et du soutien de la communauté internationale pour faciliter les processus politiques dans les pays.
Mme BATTUNGALAG GANKHUURAI (Mongolie) a souligné que le maintien de la paix, aujourd’hui, était le théâtre de situations ambigües qui confrontent les soldats de la paix à des degrés extrêmes de violence et de tension. Pour contribuer aux efforts en faveur du maintien de la paix et de la sécurité, la Mongolie a pris différentes mesures. À ce jour, environ 1 000 officiers militaires de Mongolie servent dans les six missions de la paix qui comptent parmi les plus délicates, notamment en République démocratique du Congo (RDC), au Darfour et au Sud Soudan.
À la lumière de l’aggravation de la situation sécuritaire qui prévaut dans de nombreuses missions sur le terrain, la sécurité du personnel doit figurer parmi les plus hautes priorités. À cet égard, le représentant a condamné les attaques perpétrées contre les soldats de la paix, et toutes les formes de violences qu’ils subissent. Il a demandé des mesures pour que les soldats de la paix soient entraînés au mieux et préparés dans les meilleures conditions. D’un autre côté, les pays contributeurs de troupes et d’effectifs de police, qui ont la responsabilité du succès des missions, doivent être davantage impliqués dans le processus de décision, a souligné le représentant. Le Comité spécial des opérations de la paix joue un rôle indispensable comme le seul organe des Nations Unies mandaté pour examiner les opérations de maintien de la paix sous tous leurs aspects. Il a donc regretté que le Comité spécial ait été incapable de progresser dans la mise en œuvre de son mandat, cela pour des raisons de procédure.
M. CHARLES WEHBI (Liban) a déclaré que la nature changeante et la complexité des conflits exigent une plus grande coopération, afin de consolider l’expertise, la coordination dans le système des Nations Unies, identifier les besoins spécifiques et aligner efficacement les ressources sur les priorités du terrain. C’est pour cela que le Liban souligne l’importance du personnel civil, d’autant que les opérations de maintien de la paix ne sont pas une fin en soi, mais un moyen d’instaurer une paix durable.
Dans ce contexte, le Liban, qui accueille une mission de maintien de la paix sur son territoire, la FINUL, salue l’initiative du Département des opérations de maintien de la paix de nommer plus de femmes à des postes à responsabilités. Il salue en outre les efforts de la communauté internationale pour obtenir le retrait d’Israël, la Puissance occupante, des derniers territoires libanais occupés et pour assurer le respect de la souveraineté territoriale, aérienne et maritime du Liban, a conclu son représentant.
M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a déploré l’impasse dans laquelle se trouve le travail du Comité spécial des opérations de maintien de la paix, qui est le seul organe des Nations Unies dont le mandat est d’étudier de façon globale les opérations. Il s’est dit préoccupé par le peu d’attention accordée à la question des équipements, dont les hélicoptères. Il a cité d’autres questions de priorités dont les taux de remboursement et la participation des pays fournisseurs de contingents à la planification des opérations. En tant que pays fournisseurs d’effectifs de police, l’Ukraine, a indiqué M. Kyslytsya, note l’évolution récente du cadre d’orientation stratégique pour normaliser les activités de maintien de la paix dans le domaine de la police. Il faut former les personnels avant leur déploiement et l’Ukraine se tient prête à appuyer tous les efforts des Nations Unies en la matière, a-t-il conclu.
M. PETR V. ILICHEV (Fédération de Russie) a réaffirmé que les missions de maintien de la paix sont l’instrument le plus important dont dispose la communauté internationale. Toutefois, il faut veiller à ce qu’elles restent conformes aux principes fondamentaux du maintien de la paix et à la Charte des Nations Unies. Compte tenu de ce qui précède, il a pris note de la transformation du mandat de la MONUSCO avec la mise en place de la Brigade d’intervention. Tout en saluant la capacité et la volonté du Conseil de sécurité de l’ONU à réagir à la réalité changeante sur le terrain, il a insisté sur le fait que le Comité spécial des opérations de maintien de la paix reste l’organe central pour les changements stratégiques dans la politique de maintien de la paix de l’Organisation. Il a dit espérer que l’année prochaine tous les pays seront prêts à discuter sur le fond du rapport final du Comité spécial.
Le représentant a en outre estimé que toute décision prise par le Conseil de sécurité doit tenir compte des situations dans les pays et qu’il faut coordonner les efforts de tous les programmes, fonds et du Secrétariat pour éviter les doublons. Il a également noté que les opérations de maintien de la paix avaient des mandats de plus en plus complexes qui couvrent souvent les questions de consolidation de la paix et de protection des civils. Mais il s’est dit préoccupé par la tendance actuelle à réinterpréter le droit international et en particulier par la notion ambigüe de « responsabilité de protéger ».
Il a insisté sur le fait que les soldats de la paix doivent strictement respecter le principe d’impartialité car il y va de la réputation et de la crédibilité de l’ONU. Les changements actuels dans l’approche du maintien de la paix exigent des discussions entre États Membres et une démarche politique unifiée, a encore souligné le représentant. Le succès des opérations suppose une collaboration étroite entre les Nations Unies et les organisations régionales, comme l’Union africaine. Compte tenu des ressources limitées du maintien de la paix, il a insisté sur le partenariat entre tous les États Membres d’un côté, et le redéploiement régional des ressources lorsque cela est possible et judicieux.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a remercié les Casques bleus actifs à travers le monde, en rendant hommage aux 79 d’entre eux qui ont perdu la vie cette année au service de la paix. « Il ne fait aucun doute que le monde continue d’avoir besoin du soutien des forces onusiennes de maintien de la paix », notamment pour aider les États fragiles à opérer des transitions vers une stabilité durable, a-t-il souligné. À cet égard, il a rappelé qu’en 2013, le Conseil de sécurité a autorisé une nouvelle mission au Mali. Ailleurs, de nouveaux défis sont apparus, comme dans les hauteurs du Golan ou en République démocratique du Congo (RDC). En RDC, la MONUSCO emploie de nouvelles innovations en matière de maintien de la paix, comme la Brigade d’intervention et le prochain déploiement de drones qui permettront de mieux protéger les populations civiles, a-t-il estimé.
« Le maintien de la paix est un effort collectif qui nécessite la coopération des États concernés et l’expertise et le dévouement de nombreuses personnes, militaires, policiers et civils, au siège et sur le terrain », a souligné M. DeLaurentis. Les États-Unis, a-t-il indiqué, soulignent que la protection des civils est essentielle dans les activités des opérations de maintien de la paix. En dépit du dévouement et de la conduite exemplaire de la plupart des Casques bleus, il est décevant que des incidents d’exploitation sexuelle et d’abus soient commis par des « brebis galeuses », a déploré le représentant. Ainsi, les États-Unis appellent les États Membres et les dirigeants des Nations Unies sur le terrain à prendre les mesures nécessaires pour éliminer les actes répréhensibles commis par ceux qui abusent de leur position de pouvoir. Le représentant a réaffirmé le soutien continu de son pays aux efforts de maintien de la paix consentis par l’ONU.
Droits de réponse
Le représentant d’Israël a répondu à la Syrie, en soulignant que le Gouvernement syrien semblait penser qu’il peut détourner l’attention des crimes atroces qui ont été commis sur son sol, de la même façon qu’il foule au pied les droits fondamentaux de son peuple. Ce régime est responsable de la mort de 100 000 de ses propres citoyens, a-t-il affirmé, avant de s’adresser au peuple syrien pour lui dire qu’Israël fait appel à « notre humanité commune en dépit de nos différends politiques » et se tient prêt à offrir une aide humanitaire.
Répondant également au Liban, le représentant a affirmé qu’au cours des derniers mois, les Forces armées libanaises sont restées « les bras croisés » et ont autorisé des violations du droit international. Comment peut-il avoir l’audace de critiquer Israël alors que le Hezbollah est responsable du massacre de nombreux civils en Syrie? a-t-il demandé.
Le représentant de la République arabe syrienne a souligné qu’il s’exprimerait uniquement sur le point à l’ordre du jour et non sur d’autres sujets comme l’a fait le représentant des forces d’occupation israéliennes. Les allégations du représentant israélien constituent une tentative désespérée de détourner l’attention et de dissimuler le soutien d’Israël aux terroristes et le fait que l’occupation est la raison de la présence de trois opérations de maintien de la paix dans la région. « Le représentant de la force d’occupation israélienne aurait dû demander à ses forces de mettre fin à l’occupation, ce qui mettrait un terme aux opérations de maintien de la paix dans la région. »
Il est surprenant, a dit le représentant, d’entendre Israël déclarer qu’il respecte les opérations de maintien de la paix, alors qu’il a la longue histoire d’attaques contre les forces onusiennes, et il ne s’agit pas d’accusations infondées, a-t-il souligné. En 1996, Israël a ciblé le quartier général de la FINUL au Sud-Liban, tuant 106 civils qui cherchaient protection dans le bâtiment de l’ONU. En juillet 2006, Israël a bombardé un poste de supervision de la trêve, tuant quatre officiers de la Force internationale. L’ancien Secrétaire général, M. Kofi Annan, s’était dit préoccupé par le fait qu’Israël avait délibérément ciblé les forces onusiennes, ce qui a été confirmé par un rapport des forces canadiennes en poste.
Outre ce qui vient d’être mentionné, d’autres actes suspects ont été perpétrés par Israël contre les forces onusiennes au Sud-Liban. Pour conclure, le représentant a estimé que les forces israéliennes prennent le prétexte de l’aide humanitaire pour soutenir les forces terroristes liées à Al-Qaida qui menacent les civils et les opérations de maintien de la paix.
À son tour, le représentant du Liban a réaffirmé ce qu’il avait déclaré dans son intervention par rapport « aux crimes de l’ennemi israélien sur les sites et installations de l’ONU au Sud-Liban ». « Tout ce que j’ai demandé c’est que ces crimes ne se répètent plus », a indiqué le délégué. Il a réitéré que les violations systématiques d’Israël de l’espace aérien libanais et de ses eaux territoriales sont au nombre de 1 000 selon l’ONU. Il est également revenu à l’agression israélienne de 2006 où des bombes à sous-munitions avaient été lâchées sur des populations civiles au Sud-Liban.
Reprenant la parole, son homologue d’Israël a noté que le représentant syrien avait décidé de « faire la leçon » à Israël alors même que son propre régime a tué plus de 100 000 de ses concitoyens.
Le représentant de la Syrie a dit s’être contenté de citer des informations vérifiées par les Nations Unies. « Le représentant des autorités d’occupation doit sortir de la bulle dans laquelle il vit pour réaliser les violations avérées commises par ses forces d’occupation », a-t-il poursuivi, avant d’estimer que le représentant israélien a tenu des propos vides de sens qui n’ont aucun lien avec le point à l’ordre du jour, ce qui démontre son incapacité à répondre à des faits documentés. Le représentant des autorités d’occupation sait-il que les forces d’occupation ont tué en 1948 l’Envoyé de la communauté internationale, le Comte Bernadotte, dans une rue de Jérusalem? Les agressions avérées commises par Israël contre les représentants de la paix sont documentées et durent depuis des décennies, a-t-il accusé.
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