Cinquième Commission: critiques sur la gestion de l’ONU, relayées par les États-Unis qui réclament une réduction budgétaire de 4%
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Cinquième Commission
2e séance – matin
CINQUIÈME COMMISSION: CRITIQUES SUR LA GESTION DE L’ONU, RELAYÉES
PAR LES ÉTATS-UNIS QUI RÉCLAMENT UNE RÉDUCTION BUDGÉTAIRE DE 4%
La Cinquième Commission chargée des questions administratives et budgétaires a entamé, ce matin, une « session budgétaire » qui s’annonce pleine de défis pour le Secrétariat de l’ONU, compte tenu des critiques sur sa gestion et de la détermination des États-Unis à obtenir une réduction budgétaire de 4%.
L’ONU doit être capable de faire face aux contraintes financières de notre temps et de maîtriser ses dépenses, a tranché le représentant américain. Il a rappelé que depuis l’an 2000, l’enveloppe budgétaire a augmenté de 15% tous les deux ans et a accusé l’Organisation d’utiliser un vocabulaire « flou » pour camoufler les fluctuations du budget. Il a dénoncé une « actualisation des coûts » qui n’existe dans aucun exercice comptable au monde et a fustigé une culture consistant à considérer le budget « comme une suggestion temporaire plutôt que comme un ensemble contraignant ».
Le projet de budget biennal 2014-2015 devant être adopté avant le 13 décembre, le représentant des États-Unis, qui a rappelé le statut de « plus grand contributeur » de son pays, s’est dit soucieux des intérêts du contribuable américain. Il a donc réclamé une baisse de 4% du budget de l’ONU. Les ressources doivent être utilisées de la manière la plus efficace possible, d’autant qu’un financement supplémentaire « n’a aucune chance d’être accepté », a renchéri le représentant de l’Union européenne, en réclamant un budget limité aux 5,392 milliards de dollars convenus en 2012. Son homologue du Japon a promis « la meilleure discipline budgétaire » pendant l’examen des propositions de budget.
Ces propos ont préoccupé le Groupe des 77 et la Chine qui, par la voix du représentant de Fidji, s’est inquiété des conséquences des coupes budgétaires sur la faculté de l’ONU à mettre en œuvre des programmes agréés par les États Membres eux-mêmes. Son homologue de l’Union européenne a continué d’insister sur « de nouvelles approches pouvant permettre d’économiser davantage », alors que le représentant américain rappelait que le budget 2012-2013 d’un montant de 5,152 milliards de dollars était inférieur au précédent, « ce qui n’est arrivé que deux fois en 50 ans ». Il a appelé à des nouveaux outils permettant de maîtriser le coût du personnel.
C’est plutôt le coût des missions politiques spéciales qui a semblé inquiéter le représentant de Cuba, qui s’exprimait au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC). Il a regretté que les modalités « contestées » du financement de ces missions ne seront présentées que le 19 novembre, soit tardivement. En prévision des négociations à venir, il s’est opposé par souci « de transparence et de légitimité », à l’idée de tenir des discussions en dehors du Siège des Nations Unies. Son homologue du Bénin a dénoncé la pratique du « Packet deal solution » consistant à prendre en otage des projets de résolution pour en faire une monnaie d’échange dans les négociations sur d’autres textes.
La Cinquième Commission a élu à ses vice-présidences M. Carlos Alejandro Funes, du Salvador; Mme Joanna Fiodorow, de la Pologne; et M. Kodjovi Dosseh, du Togo. M. Ken Siah de Singapour a été élu Rapporteur. Ces personnalités épauleront le Président, M. Janne Taalas, de la Finlande qui, aujourd’hui, a rappelé combien la Commission avait « pour de mauvaises raisons » défrayé la chronique. Il a appelé la Commission à dépasser les intérêts nationaux et égoïstes pour parvenir à des décisions multilatérales qui permettront à l’ONU de faire face à ses défis.
La Commission était saisie d’une note sur l’état d’avancement de la documentation* et de la liste des questions qu’elle devrait examiner**. Elle se réunira, vendredi 4 octobre, à 10 heures, pour examiner le barème des quotes-parts des contributions.
** A/C.5/68/1
ORGANISATION DES TRAVAUX (A/C.5/68/1 ET A/C.5/68/L.1*)
Déclarations
Intervenant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. PETER THOMPSON (Fidji) a jugé important que la Commission ait suffisamment de temps pour examiner toutes les questions inscrites à son ordre du jour. Il a rappelé que cette session sera consacrée à un point particulièrement important, à savoir le projet de budget biennal 2014-2015. Le représentant a d’emblée exprimé la vive préoccupation de son Groupe face aux coupes budgétaires proposées qui pourraient avoir un impact négatif sur la mise en œuvre de mandats dûment approuvés par les organes intergouvernementaux, s’agissant en particulier du pilier « développement ». Il a refusé les explications selon lesquelles les coupes répondraient à une demande des États Membres, comme en témoignerait l’esquisse budgétaire.
Par ailleurs, le représentant s’est dit préoccupé par les retards dans la publication des documents; des rapports très importants n’étant toujours pas disponibles. Il a souligné l’obligation d’assurer la publication à temps et dans les six langues officielles de tous les documents, conformément au règlement intérieur de l’Assemblée générale. Cela, a-t-il insisté, permettrait un travail efficace de la Commission qui prendrait ainsi des décisions informées. Les retards mettent souvent les États Membres et le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) dans une situation difficile.
« Nous avons une responsabilité collective de prendre des décisions bénéfiques pour l’Organisation qui doit mettre en œuvre ses programmes et mandats. »
M. LEON GONZALEZ (CUBA), s’exprimant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a demandé qu’une attention particulière soit accordée au projet de programme biennal 2014-2015. Il a refusé l’idée de tenir des consultations en dehors du Siège des Nations Unies « pour ne pas affecter la transparence et la légitimité des délibérations ». Il a exprimé la préoccupation de la CELAC face aux modalités de financement des missions politiques spéciales, qui « ne seront officiellement présentées que le 19 novembre ». Du point de vue de la CELAC, « la Commission doit accorder tout le temps nécessaire à cette question et éviter qu’elle soit renvoyée à une date ultérieure comme par le passé ».
Au nom du Groupe des États d’Afrique, M. BROUZ COFFI (Côte d’Ivoire) s’est, à son tour, dit vivement préoccupé par la persistance des retards dans la publication des rapports. Illustrant ses propos, il a rappelé que la parution tardive des rapports du Comité des commissaires aux comptes (CCC) a eu une influence négative sur l’élaboration de l’ordre du jour. Il a voulu que le Secrétariat s’explique sur cette situation « grave ». Il a particulièrement regretté que le rapport du CCQAB sur le projet de budget 2014-2015 ne sera disponible, dans les six langues officielles, que le 15 octobre alors qu’il aurait dû l’être il y a six semaines. M. Coffi a noté qu’au delà des questions budgétaires, cette session portera aussi sur les questions de procédure et de processus de mise en œuvre de mandats, la gestion des ressources humaines et les budgets de trois opérations de maintien de la paix. Concernant le barême des contributions et de l’article 19 de la Charte, il a averti que le Groupe des États d’Afrique insistait sur la nécessité de prendre une décison rapide pour permettre à tous les États Membres de participer rapidement aux travaux de l’Assemblée générale.
M. IOANNIS VRAILAS, Union européenne, a insisté sur l’importance qu’il y a à se mettre d’accord sur un budget conforme aux 5,392 milliards convenus en 2012, pendant l’examen des propositions pour le programme biennal 2014-2015. Il a également demandé qu’un effort collectif soit fait pour « examiner ensemble de nouvelles approches pouvant permettre d’économiser davantage ». Les ressources financières des Nations Unies doivent être utilisées de la manière la plus efficace possible, d’autant qu’un financement supplémentaire n’a aucune chance d’être accepté. Il a donc invité l’Organisation à faire preuve de créativité dans la recherche de solutions, pour pouvoir remplir sa mission tout en respectant le budget qui lui a été alloué.
M. ABDALLAH Y. AL-MOUALLIMI (Arabie saoudite) a dit la nécessité d’accorder au Secrétaire général les ressources necessaires à la mise en œuvre des mandats et des programmes qui lui ont été confiés. Il a demandé que les coupes budgétaires prévues n’aient aucune incidence négative sur les mandats de l’ONU. Il a plaidé pour le « bien-être financier » de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Il a appuyé une stricte application des Normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS) et des autres réformes telles que le progiciel de gestion intégré (Umoja). Il a aussi appelé à une application rapide de l’article 19 de la Charte pour permettre à tous les États Membres de participer aux travaux de l’Assemblée générale, notamment ceux dont les retards de contribution au budget de l’ONU sont dus à des raisons independantes de leur volonté.
Alors que la session principale sera consacrée à la réévaluation du budget 2012-2013 et l’élaboration du projet de budget 2014-2015, M. JUN YAMAZAKI (Japon) a indiqué que sa délégation respectera la meilleure discipline budgétaire lorsqu’il s’agira d’examiner des augmentations du budget. Le Japon accordera une grande attention à la gestion des ressources humaines, dont le cadre de mobilité et le régime commun des Nations Unies, compte tenu du grand impact de ces questions sur l’avenir de l’Organisation.
Il accordera aussi une grande attention à la mise en œuvre des Normes IPSAS et du progiciel Umoja. Il a aussi mis l’accent sur le plan-cadre d’équipement et le plan stratégique patrimonial pour l’Office des Nations Unies à Genève. Une même attention, a-t-il prévenu, sera également accordée aux budgets des missions politiques spéciales et des quelques missions de maintien de la paix qui doivent être examinées au cours de cette session. Il a espéré que la Cinquième Commission pourra parvenir à un accord sur toutes les questions, le 13 décembre 2013, conformément au calendrier de ses travaux.
M. JOSEPH M. TORSELLA (États-Unis) a noté une croissance moyenne de 15% entre chaque budget biennal depuis 2000 notamment en raison de l’incapacité de maitriser le nombre et le coût des postes. Il a fustigé un processus budgétaire inadapté et la culture consistant à aborder le budget comme une suggestion temporaire plutôt qu’un ensemble contraignant. Dans un contexte de pression financière mondiale et d’appels pressants à une ONU plus efficace, M. Torsellaa déclaré que chaque centime utilisé par l’ONU doit être bien utilisé et que chaque sous gaspillé privait l’Organisation de la faculté d’apporter une aide précieuse dans une partie du monde. « Le maintien des anciens modes de gestion ne profitera pas à l’Organisation », a-t-il dit en ajoutant que seule une ONU à un coût abordable est une ONU viable. Il a dit que cette tendance à une croissance budgétaire incontrôlée aura tôt ou tard de graves conséquences sur l’Organisation, qui dépend d’États Membres qui connaissent eux-mêmes la stagnation et la baisse de leurs budgets nationaux.
Illustrant les progrès que l’on pouvait faire, il a rappelé que le budget biennal 2012-2013 adopté le 24 décembre 2011 pour un montant de 5,152 milliards de dollars était inférieur au budget précédent, ce qui n’était arrivé que deux fois en 50 ans, même si ce budget a depuis été réévalué à 5,396 milliards. Il a précisé que l’esquisse budgétaire pour 2014-2015 a pu être limitée à 5,392 milliards grâce à des économies structurelles s’attaquant aux postes obsolètes, vacants ou redondants. Et nous avons pris une première initiative pour contrôler l’augmentation des coûts, en gelant les salaires du personnel de l’ONU pour une modeste période de six mois, alors que le personnel de l’administration américaine est dans sa troisième année consécutive de gel des salaires.
Accusant le Secrétariat d’utiliser un vocabulaire « flou » pour camoufler les fluctuations du budget, M. Torsella a averti qu’il est temps « de mettre fin à cette pratique qui consiste à revoir chaque fois le budget à la hausse ». En tant que plus grand contributeur au système des Nations Unies, les États-Unis « n’accepteront plus un modèle de croissance non viable », et exhortent l’Organisation à répondre aux contraintes budgétaires en se serrant la ceinture. Les États-Unis « refusent de demander à leurs contribuables de payer pour nos échecs » et réclament d’emblée une réduction de budget de 4%, a insisté M. Torsella. Le Secrétariat ne restant pas toujours dans les limites du budget alloué, le représentant a souligné que « si nous voulons que le système soit viable, nous ne pouvons terminer cette session sans apporter une réponse efficace au défi de la gestion ».
Le représentant a prévenu que son pays n’acceptera pas de cautionner une croissance non viable. Tout en reconnaissant que de nouvelles missions sont confiées à l’ONU, il a rejeté l’équation automatique « nouvelle mission-nouveau budget », et appelé l’ONU à se montrer capable de faire face aux contraintes financières de notre temps et de maîtriser ses dépenses. Il a fustigé la pratique de l’actualisation des coûts en rappelant que le Secrétaire général s’est engagé le matin de l’adoption du dernier budget biennal à trouver de nouvelles sources d’économies. Dans ce contexte, le représentant américain a reconnu des progrès dans la gestion du budget des missions politiques spéciales qui a diminué de 67 millions, soit 11% si l’on exclut les nouvelles missions du Yémen et du Sahel. Il a appelé à des réductions similaires dans la part du budget ordinaire hors missions politiques spéciales.
Il a prévenu que son pays n’adoptera pas un budget biennal 2014-2015 qui n’aura pas remis en cause le processus budgétaire actuel, notamment la question de l’actualisation des coûts dont le principe n’existe nulle part ailleurs dans le monde. Il a aussi jugé indispensable la mise en place de nouveaux outils permettant de maitriser les coûts de personnel. Les États-Unis proposent de nouveaux mécanismes dont le paiement au coup par coup, tenant compte des réductions des dépenses ou l’élimination de programmes obsolètes pour financer de nouvelles dépenses.
M. DADU (Nigéria) a estimé que la Cinquième Commission peut parvenir à une résolution historique dans les délais impartis. Cela dependra de deux facteurs, a estimé le représentant qui a cité la présentation en temps voulu des rapports et le respect du programme de travail.
M. YVES ERIC AHOUSSOUGBEMEY(Bénin) a appelé à modifier certaines stratégies de négociations au sein de la Cinquième Commission dans un souci de transparence et d’inclusivité. Il faut mettre fin à la pratique du “Packet deal solution” qui consiste à prendre en otage des projets de résolution qui auraient pu être adoptés pour en faire une monnaie d’échange dans les négiocations sur d’autres textes. Il faut négocier de bonne foi dans la transparence et l’inclusivité totale, a insisté le représentant.
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