Assemblée générale: un tiers des fonds seulement pour « l’Arche du retour », le Mémorial permanent à la mémoire des victimes de l’esclavage
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Assemblée générale
Soixante-huitième session
35e séance plénière - matin
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: UN TIERS DES FONDS SEULEMENT POUR « L’ARCHE DU RETOUR »,
LE MÉMORIAL PERMANENT À LA MÉMOIRE DES VICTIMES DE L’ESCLAVAGE
Jusqu’ici, seul un tiers des 4,5 millions de dollars nécessaires à la construction de « L’Arche du retour » a été effectivement versé. « L’Arche du retour », de Rodney Leon, architecte américain d’origine haïtienne, est la gagnante du concours international pour le Mémorial permanent en commémoration des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves. Compte tenu des retards dans le versement des fonds, l’Assemblée générale a encouragé, ce matin, les États Membres « et les autres parties intéressées » à verser des contributions supplémentaires au « Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les partenariats-Mémorial permanent ».
Exposée depuis le 23 septembre dernier dans le couloir des salles de conférence du Siège de l’ONU à New York, la maquette de « L’Arche du retour » représente deux impressionnantes parois verticales de couleur blanche, dont l’une prend la forme de la coque de bateau où git le corps d’un homme. Sur une de ses façades intérieures, l’Arche présente une mappemonde d’où partent de l’Afrique les routes empruntées par les bateaux qui transportaient les esclaves.
« L’Arche du retour », qui aura à peu près 4,5 mètres de long sur 1,8 mètre de large, sera placée sur le côté est de l’esplanade des visiteurs au Siège de l’ONU à New York. Dans la résolution*, présentée par la Jamaïque, qu’elle a adoptée ce matin, l’Assemblée générale note « avec satisfaction » que c’est l’œuvre de Rodney Leon qui a été choisie, après un concours qui a attiré 310 candidats issus de 83 pays différents. L’architecte américain d’origine haïtienne est le concepteur du très célèbre « African Burial Ground National Monument », le Monument national érigé, à Manhattan, sur un site où ont été enterrés, au XVIIe et XVIIIe siècles, quelque 400 esclaves et affranchis africains.
L’œuvre enfin choisie, les fonds continuent à manquer. Avec un don de 260 000 dollars, l’Inde est le plus grand contributeur au « Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les partenariats-Mémorial permanent ». Son représentant s’est inquiété aujourd’hui du fait que sur les 4,5 millions de dollars nécessaires, seul 1,4 million a été versé. Aussi, a-t-il exhorté tous les pays, « en particulier ceux qui ont profité du commerce transatlantique », à contribuer généreusement « pour montrer qu’ils reconnaissent qu’ils ont fait du mal et qu’ils ont le sens du repentir ».
Ce Mémorial doit faire ce grand travail de mémoire pour rappeler qu’au cours de l’histoire de l’humanité, des milliers d’êtres humains ont été traités comme « des choses, des marchandises, taillables et corvéables à merci », a voulu le représentant d’Haïti.
Une fois achevée, a espéré le Président de l’Assemblée générale, M. John Ashe, l’Arche permettra de rendre hommage aux aspirations de l’Assemblée générale, « à savoir la paix, les droits de l’homme, la justice sociale et la dignité de la personne humaine ».
La traite transatlantique a, pendant 400 ans, dépouillé l’Afrique de quelque 15 millions d’hommes, de femmes et d’enfants. Le Mémorial a pour objet de sensibiliser les gens aux dangers du racisme et des préjugés.
L’Assemblée générale poursuivra ses travaux ce vendredi 25 octobre avec un débat sur le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et à la Décennie pour faire reculer le paludisme dans les pays en développement, particulièrement en Afrique.
* A/68/L.7
SUIVI DE LA COMMÉMORATION DU BICENTENAIRE DE L’ABOLITION DE LA TRAITE TR ANSATLANTIQUE DES ESCLAVES
Rapport du Secrétaire général sur le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les partenariats-Mémorial permanent (A/68/135)
Dans ce rapport, le Secrétaire général indique qu’au 30 juin 2013, un montant total de 1 397 043 dollars avait été enregistré au titre des fonds versés au Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour les partenariats–Mémorial permanent, dont 1 220 688 dollars au titre de contributions volontaires des États Membres et 108 562 dollars au titre de dons publics et privés.
La ventilation des contributions reçues figure en annexe au présent rapport.
S’agissant des dépenses imputées sur le Fonds d’affectation spéciale, il précise qu’un montant de 171 000 dollars a été prélevé, en grande partie pour financer une subvention de 91 000 dollars accordée à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en vue de l’organisation du concours international pour la conception du mémorial permanent, et pour des services contractuels de 69 400 dollars.
Le Secrétaire général indique également que l’UNESCO a réalisé la première phase du concours en retenant une première liste de 16 projets sur les 310 propositions reçues du monde entier. En 2013, au cours de la deuxième phase du concours, un jury international indépendant a choisi sept finalistes, avant la sélection du projet gagnant à New York.
Rapport du Secrétaire général sur le Programme d’action éducative sur la traite transatlantique des esclaves et l’esclavage (A/68/291)
Dans ce rapport, le Secrétaire général rend compte des dispositions prises pour poursuivre l’exécution du Programme d’action éducative sur la traite transatlantique des esclaves et l’esclavage, ainsi que des efforts faits pour faire mieux connaître au public du monde entier les activités commémoratives et le projet de mémorial permanent.
Il indique que l’année 2013 était la date anniversaire de divers grands événements relatifs à l’émancipation, ce qui donnait un sens particulier à la commémoration dont le thème, « Libres à jamais: en célébration de l’émancipation » rendait hommage à l’émancipation des esclaves à travers le monde.
Le Secrétaire général passe en revue les différentes activités de commémoration. Il explique notamment que du 18 au 25 mars 2013, le Département de l’information a organisé, en étroite collaboration avec les États membres de la Communauté des Caraïbes et de l’Union africaine, une série d’activités en vue de célébrer la sixième Journée internationale de commémoration des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves.
Afin de mieux faire connaître la célébration à l’échelle internationale, le Département a collaboré avec son réseau de cntres d’information des Nations Unies, lancé une vaste campagne sur les réseaux sociaux et noué de nouveaux partenariats avec les États Membres et les acteurs de la société civile.
Le Secrétaire général indique également que différents partenariats ont été mis sur pied, notamment avec le Mémorial de l’abolition de l’esclavage à Nantes.
Il annonce par ailleurs que la commémoration de 2014 aura pour thème « Victoire sur l’esclavage: Haïti et au-delà ».
Déclarations
M. JOHN ASHE, Président de la soixante-huitième session de l’Assemblée générale, a indiqué que 310 artistes originaires de 83 pays avaient proposé un projet pour le mémorial permanent et que le jury avait retenu la proposition intitulée « L’Arche du retour » du plasticien haïtien Rodney Leon. Une fois achevée, a espéré le Président, l’Arche permettra de rendre hommage aux aspirations de l’Assemblée générale, à savoir la paix, les droits de l’homme, la justice sociale et la dignité de la personne humaine.
M. Ashe a rappelé que l’année 2013 marque le 206e anniversaire de l’abolition de la traite esclavagiste transatlantique. Au nom de l’Assemblée générale, il a nouvelé l’engagement à continuer de renforcer la sensibilisation du public à cette « période noire de notre passé ». Il a salué les différentes initiatives lancées par les États Membres, les agences de l’ONU et la société civile pour « célébrer l’esprit indomptable » des victimes d’une tragédie qui, a-t-il affirmé, continue d’être infligée à de nombreuses personnes aujourd’hui, « bien que sous des apparences plus subtiles », comme les inégalités sociales et économiques, l’iniquité, la haine, le sectarisme, le racisme et les préjugés.
Il a également indiqué que les activités lancées dans le cadre de l’application de la résolution 67/108 permettent d’attirer l’attention sur les contributions oubliées des Africains victimes de l’esclavage à leurs communauté et économie. M. Ashe a dit espérer que cette commémoration des horreurs de l’esclavage et de la traite transatlantique donnera aux États l’élan nécessaire pour lancer des actions concrètes et résolues.
M. ASHWANI KUMAR(Inde) a déclaré que « nous devons prendre toutes les initiatives pour faire en sorte que les générations actuelle et future n’oublient jamais la douleur et la tragédie vécues par les victimes de l’esclavage et du commerce transatlantique des esclaves ». La communauté internationale doit prendre l’engagement de ne jamais accepter la répétition de ces crimes, a ajouté le représentant. L’éducation a un rôle important à jouer, en faisant en sorte que les générations actuelle et future prennent conscience des causes et de l’impact de l’esclavage et du commerce transatlantique des esclaves, a-t-il poursuivi. Une meilleure compréhension de l’histoire donnera une perspective nouvelle des défis actuels, a encore dit M. Kumar qui a salué les différentes activités de sensibilisation et les programmes organisés par le Département de l’information. L’Inde réclame une allocation régulière et adéquate des ressources au DPI.
La construction du Mémorial permanent fera office d’hommage aux millions de victimes de l’esclavage, a rappelé M. Kumar. Avec un don de 260 000 dollars, l’Inde apporte sa contribution au Fonds d’affectation spéciale. Mais, a relevé le représentant, le Fonds n’a enregistré que 1,4 million de dollars de contribution alors que la construction du Mémorial en nécessite 4,5. Aussi, a-t-il exhorté tous les pays, en particulier, ceux qui ont profité du commerce transatlantique, à contribuer généreusement pour montrer qu’ils reconnaissent que le mal a été fait et qu’ils ont le sens du repentir. Le représentant a souhaité que le Mémorial permanent soit construit le plus rapidement possible.
M. TEKEDA ALEMU (Éthiopie), au nom du Groupe des États d’Afrique, a rendu hommage à la Jamaïque et à tous ceux qui se sont engagés en faveur de la réalisation du Mémorial permanent. L’esclavage est le pire des crimes contre l’humanité et l’ampleur et la durée de ce crime, ainsi que la manière dont il a été commis, n’ont aucune comparaison dans l’Histoire. Les Africains ont souffert pendant des siècles de ce crime horrible et, même après son abolition, ses conséquences continuent d’être une source de préjugés, d’exploitation et de racisme aussi bien sur le continent africain qu’ailleurs.
Nous reconnaissons la contribution des esclaves à la genèse du panafricanisme, qui a créé l’élan nécessaire pour secouer le joug du colonialisme et donné ensuite naissance à l’Union africaine, a déclaré M. Alemu.
Il est impératif que nous nous souvenions de ceux qui ont péri ou ont été déracinés. Le souvenir peut être une source d’inspiration pour les générations actuelle et à venir. L’Éthiopie prend note avec satisfaction des résultats du concours et du choix de « L’Arche du retour ». Toutefois, elle note que les fonds reçus pour le projet de mémorial ne représentent qu’un tiers des dépenses prévues. L’Éthiopie invite donc les États à apporter des contributions volontaires et salue les activités commémoratives menées par le Département de l’information.
M. THEODORE STRICKLAND(États-Unis) a déclaré que son pays continue à progresser dans l’élimination de la discrimination et à contribuer au sein de la communauté internationale à la création d’un monde de liberté et d’égalité pour tous. Les États-Unis ont soutenu le projet de l’UNESCO « Briser le silence » et demandent aux gouvernements et aux organisations de la société civile de sensibiliser l’opinion publique à l’histoire de la traite des esclaves et à la contribution « inestimable » des personnes d’ascendance africaine dans chaque domaine de l’activité humaine. Les États-Unis, a-t-il dit, sont fiers que Rodney Leon, un Haïtien-Américain, ait été choisi pour concevoir le Mémorial permanent. N’oublions jamais cette terrible tragédie humaine qu’est l’esclavage et le commerce transatlantique des esclaves. « N’oublions pas non plus le courage moral de ceux qui y ont mis fin », a conclu le représentant.
M. AMIRAM MAGID (Israël) a déclaré que la traite transatlantique des esclaves porte une ombre noire sur notre histoire. La réduction en esclavage des Africains fut cruelle et déshumanisante. Trente millions de personnes ont été arrachées à leur foyer, enlevées à leur village et réduites en esclavage. Beaucoup ont raconté les conditions horribles de leur voyage et de leur esclavage. Les siècles sombres de l’esclavage représentent l’une des agressions les plus durales de l’histoire contre la vie, l’intégrité et la dignité des êtres humains. Et pourtant, même après l’abolition de l’esclavage, les conditions de vie de nombreuses communautés africaines sont restées abominables durant la première moitié du XIXe siècle.
Le peuple juif partage l’histoire des peuples persécutés, a déclaré le représentant. La Bible juive décrit comment le peuple juif est sorti de son esclavage dans l’ancienne Égypte pour devenir une nation sur la terre d’Israël. En 1948, nous avons enfin obtenu notre indépendance et avons pu reconstruire notre États sur les principes de la liberté, de la tolérance et de la compréhension. Le peuple juif s’identifie aux souffrances des peuples d’Afrique et des Caraïbes, et de tous ceux qui sont sous le joug. Israël est fier de sa contribution financière au projet de mémorial permanent et, comme les années précédentes, s’honore d’être coauteur du projet de résolution. Le Mémorial permanent doit inviter chaque nation, chaque dirigeant et chaque citoyen à agir pour éviter qu’un seul être humain soit réduit en esclavage. Il n’y a pas de place dans le monde civilisé pour ceux qui réduisent les autres en esclavage par la haine, le racisme et les préjugés, et alimentent ainsi la persécution, la guerre et la violence. Nous devons être des monuments vivants, a déclaré le représentant. C’est par l’éducation, le souvenir et la vigilance que nous pourrons faire en sorte que les tragédies du passé servent de leçon pour l’avenir.
M. FRITZNER GASPARD (Haïti) a voulu que le Mémorial soit un « véritable ferment d’unité et de grande réconciliation entre les peuples », contribue à lutter contre l’oubli et fasse « ce grand travail de mémoire » pour rappeler qu’au cours de l’histoire de l’humanité, « des milliers d’êtres humains ont été traités comme des choses, des marchandises, taillables et corvéables à merci ». M. Gaspard a évoqué la contribution d’Haïti à la « libération de l’humanité de l’ordre esclavagiste ». Il a indiqué qu’en 1779, à Savannah, des Haïtiens ont combattu aux côtés d’Américains dans leur lutte de libération. En 2007, la ville de Savannah a d’ailleurs érigé un monument en leur mémoire. Le représentant a rappelé qu’en 1804, au cours d’une guerre révolutionnaire « sans précédent », l’ordre colonial et esclavagiste établi sur l’île de Saint-Domingue a été renversé pour donner naissance à la « Première république noire du monde ».
Il a souligné que « l’hospitalité et la nationalité haïtiennes » furent octroyées à tous les Noirs du monde entier qui fuyaient l’ordre esclavagiste et qui arrivèrent sur le territoire haïtien. Le représentant s’est félicité du fait que la commémoration 2014 aura pour thème « Victoire sur l’esclavage: Haïti et au-delà ». Citant l’ancien Sous-Directeur de l’UNESCO, M. Pierre Sane, M. Gaspard a affirmé que l’universalité des droits humains a peut-être été conçue à Paris en 1789, mais l’accouchement a bien eu lieu en Haïti, quelques années plus tard.
M. RODOLFO REYES RODRÍGUEZ(Cuba) a déclaré que Cuba s’enorgueillit de ses origines africaines, ajoutant que l’identité cubaine est le résultat d’un processus de « transculturalisation » de différents groupes ethniques dans les temps difficiles de l’époque coloniale puis néocoloniale. À partir de 1959, a commencé une étape de véritable intégration qui valorise toutes les composantes de Cuba. Nous sommes fondamentalement un mélange d’Africains et d’Hispaniques et nous sommes aussi marqués par des influences asiatiques et des peuples autochtones d’Amérique. La culture et la nationalité cubaines sont sorties enrichies de cette origine africaine. Cuba remercie l’Afrique pour son apport, qu’il s’agisse de la musique ou de la lutte pour l’indépendance et la liberté.
L’exploitation inhumaine à laquelle les peuples de trois continents ont été soumis est terrifiante, a déclaré le représentant. Les pays développés et leur société de consommation, qui sont aujourd’hui responsables de la destruction accélérée de l’environnement, ont été les principaux responsables de la traite transatlantique des esclaves. Ils se sont également enrichis grâce à l’ordre économique injuste qu’ils ont imposé à l’humanité et à des institutions financières créées exclusivement par eux et pour eux. Ces pays ont les moyens techniques et financiers de payer leur dette à l’humanité et Cuba soutient la demande d’une indemnisation présentée par la CARICOM. Elle appuie l’idée que les pays en développement bénéficient d’un traitement spécial dans les relations économiques internationales.
Adoption de la résolution sur le Mémorial permanent et commémoration des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves (A/68/L.7)
La représentante du Brésil a affirmé que le moment est venu pour l’ONU de proclamer une décennie des personnes d’ascendance africaine, et a insisté sur l’importance de l’éducation.
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