En cours au Siège de l'ONU

CD/3362

La Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes entame son débat général après un rendez-vous manqué et un faux départ

03/07/2012
Assemblée généraleCD/3362
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conférence des Nations Unies

sur les armes légères

1re & 2e séances – matin & après-midi                       


LA CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES POUR UN TRAITÉ SUR LE COMMERCE DES ARMES ENTAME SON DÉBAT GÉNÉRAL APRÈS UN RENDEZ-VOUS MANQUÉ ET UN FAUX DÉPART


Rendez-vous manqué hier, faux départ aujourd’hui, ce n’est qu’à 18 heures 30 que la Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes a pu entamer son débat général à l’issue duquel elle prévoit de finaliser son projet de traité. Mais cette « brèche dans la tradition diplomatique » n’a pas entamé l’optimisme du Président de la Conférence, M. Roberto Garcia Moritan de l’Argentine, quant à la capacité des États « à réglementer et non à contrôler » un commerce dont la dimension illicite conduit à la mort quelque 500 000 personnes par an.


Après qu’une solution a été trouvée à « la question » qui a retardé le lancement des travaux, l’Observateur du Saint-Siège a averti que l’arrangement avait gravement compromis l’adhésion de son État au futur traité. 


« Tout le monde ici contribue à l’histoire », a assuré le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, dans la déclaration qu’il a faite ce matin. « C’est important.  C’est impressionnant. C’est attendu depuis longtemps », a-t-il ajouté face à la perspective d’un traité relatif à un commerce qui représente « bien plus » que 1 000 milliards de dollars pas an.  Entre 1990 et 2005, a-t-il souligné, 33 pays africains ont perdu 284 milliards de dollars à cause de conflits alimentés par des transferts d’armes et de munitions dont 95% viennent de l’extérieur. 


Le Secrétaire général a appelé les États « à la coopération, à la souplesse et au bon sens » pour se mettre d’accord sur un document juridiquement contraignant établissant des normes internationales communes pour l’exportation, l’importation et les transferts d’armes classiques.  La communauté internationale dispose déjà du Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre, d’un instrument pour faciliter la coopération dans le traçage des armes et d’un Registre sur les armes classiques.


Mais le Secrétaire général a jugé « honteuse » l’absence d’un traité multilatéral général sur les armes classiques tout en reconnaissant que la tâche est extrêmement complexe car le commerce des armes est au cœur des intérêts nationaux. 


Vous devez, a-t-il dit, vous accorder sur des « critères robustes » pour atténuer le risque que les armes transférées ne soient utilisées pour commettre des violations du droit humanitaire international ou des droits de l’homme, et faire en sorte que le traité couvre tout l’éventail des armes et des activités pour éviter le vide juridique.  Ces propos ont été repris par les représentants de la Norvège, du Japon et de l’Australie qui ont ouvert le débat général. 


C’est ambitieux mais c’est réalisable », a tranché le Secrétaire général. « Ça exige de la souplesse, de la bonne foi et le meilleur de nous-mêmes mais nous ne devons tendre à rien de moins ».


En début de soirée, après qu’une solution a été trouvée au problème qui a retardé le lancement des travaux de la Conférence, l’Observateur du Saint-Siège a averti que l’arrangement avait gravement compromis l’adhésion de son État au futur traité. 


Il a souligné que cette Conférence avait été convoquée sous l’égide de l’Assemblée générale dont le règlement intérieur stipule clairement que le Saint-Siège peut participer pleinement à toute conférence internationale « comme cela a été le cas par le passé ».  À ses yeux, les dispositions prises aujourd’hui sont une « violation flagrante » de ce principe et un « précédent troublant ».


En fin d’après-midi, la Conférence a adopté son règlement intérieur provisoire et son ordre du jour.*  Elle a également élu les pays suivants à ses Vice-Présidences: Australie, Azerbaïdjan, Bélarus, Égypte, Iran, Japon, Kenya, Mexique, Nigéria, Pays-Bas, République de Corée, St Vincent-et-les-Grenadines, Suisse et Ukraine.


Les autres pays suivants siégeront au Comité de vérification des pouvoirs de la Conférence: Chine, Costa Rica, Égypte, États-Unis, Fédération de Russie, Italie, Maldives, Panama et Sénégal.


La Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes poursuivra son débat général jeudi 5 juillet à partir de 10 heures, à l’issue duquel elle devrait entamer des négociations à huis clos sur le projet de traité, avant de fermer ses portes le 27 juillet prochain.


*A/CONF.217/L.2.


Déclarations liminaires


M. ROBERTO GARCIA MORITÁN, Président de la Conférence des Nations Unies pour un traité sur le commerce des armes, a tout d’abord regretté qu’hier, il n’ait pas été possible de respecter la grande tradition de la diplomatie internationale, mais s’est néanmoins dit convaincu qu’au cours de la session, les États pourront relever le défi qui leur a été présenté.  Il a appelé les États à poursuivre les consultations pour régler « les questions de fond » qui ont retardé l’ouverture de la Conférence.


« Nous avons 24 heures de retard, mais ces 24 heures n’ont diminué ni notre enthousiasme, ni notre détermination », a-t-il assuré.  M. Moritán s’est félicité de l’élan unanime des États, y voyant là la manifestation de leur engagement.  Il a également salué la participation de la société civile.


Le Président a ensuite constaté que ces dernières années, il est apparu très clairement que la question du commerce des armes classiques devrait être traitée de manière urgente sur le plan multilatéral.


Chaque minute, un être humain est victime de ces armes alors que 500 000 personnes en meurent chaque année.  Les fémicides en sont un témoignage honteux, tandis que le trafic illicite a atteint des proportions alarmantes, s’est inquiété M. Moritán, pour qui le commerce des armes classiques est un des plus grands fléaux auquel est confrontée l’humanité. 


Ce fléau, a-t-il ajouté, exige des décisions urgentes et un front commun.  Le Président s’est indigné du non-respect des embargos décrétés par le Conseil de sécurité.


Après avoir insisté sur l’importance d’un engagement collectif, M. Moritán a précisé que les efforts engagés dans le cadre des négociations sur le traité visent à réglementer et non à contrôler le commerce des armes classiques.  L’objectif, a-t-il souligné, est de codifier des règles de comportement dans un document juridiquement contraignant.


M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a tout d’abord fait observer que dans ce type de réunion, il n’est pas inhabituel que les États Membres aient des points de vue divergents.  Il a appelé à la sagesse, à la communauté de visions et à l’engagement à travailler ensemble pour notre humanité.  Le monde entier attend de voir comment cette Conférence sortira de ce mois de négociations, a-t-il prévenu en faisant appel à la coopération, à la souplesse et au bon sens pour se mettre d’accord sur un traité juridiquement contraignant.  Il a aussi rendu hommage à la société civile qui a su capter l’imagination et l’énergie de millions de gens.


« Tout le monde ici contribue à l’histoire », a enchaîné le Secrétaire général.  Pour la toute première fois, les États Membres sont réunis pour négocier un traité régissant le commerce international des armes classiques.  « C’est important.  C’est impressionnant.  C’est attendu depuis longtemps », a-t-il dit.


Le Secrétaire général a reconnu que nous avons le Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre (ALPC), un instrument pour faciliter la coopération dans le traçage de ces armes et un Registre des armes classiques.


Mais, a-t-il jugé « honteux », ce que nous n’avons pas, c’est un traité multilatéral général sur les armes classiques.  La faible réglementation des transferts internationaux d’armes alimente les conflits, déstabilise des régions entières et autonomise les réseaux terroristes et criminels.


Affronter la menace des armes classiques ne devrait pas être perçu comme un acte moderne.  La planète est surarmée et la paix sous-financée.  Les dépenses militaires augmentent et représentent « bien plus » que 1 000 milliards de dollars par an. 


En Afrique, entre 1990 et 2005, 33 pays ont perdu quelque 284 milliards de dollars à cause de conflits alimentés par des transferts d’armes et de munitions dont 95% viennent de l’extérieur.  Actuellement, le coût de 60 années de maintien de la paix de l’ONU est moindre que celui de six semaines de dépenses militaires, a indiqué le Secrétaire général.


La mauvaise réglementation du commerce des armes est un obstacle notable à tout ce que nous faisons », dont le moindre n’est pas l’accès humanitaire, a-t-il déploré.  Une série de normes agréées sur l’exportation des armes, conjuguées à des législations nationales strictes, peuvent changer tout et plus encore.  


Nous pourrons, a-t-il indiqué, promouvoir le développement social et économique, appuyer le maintien et la consolidation de la paix, assurer le suivi des sanctions et des embargos sur les armes, protéger des enfants et des civils, et promouvoir l’autonomisation de la femme et le respect de l’état de droit.


M. Ban a convenu: la tâche est extrêmement complexe car le commerce des armes est au cœur des intérêts nationaux.  Les préoccupations sont légitimes et les points de vue sont diversifiés, a-t-il aussi reconnu.  Vous devez, a-t-il dit aux États, vous accorder sur des « critères robustes » pour atténuer le risque que les armes transférées ne soient utilisées pour commettre des violations du droit international humanitaire ou des droits de l’homme.  Vous devez aussi faire en sorte que le traité couvre tout l’éventail des armes et des activités pour éviter le vide juridique.


Notre objectif commun est clair: un traité sur le commerce des armes robuste et juridiquement contraignant qui aurait un véritable impact sur la vie de ces millions de gens qui souffrent des conséquences des conflits, de la répression et de la violence armée. 


C’est ambitieux mais c’est réalisable, a encouragé le Secrétaire général, en ajoutant « ça exige de la souplesse, de la bonne foi et le meilleur de nous, mais nous ne devons tendre à rien de moins ».


Débat général


M. HEIKKI HOLMAS (Norvège) a souligné toute l’importance de deux points au cœur du traité: la portée du texte, s’agissant des catégories d’armes prises en compte, et la question des critères.  Pour ce qui est de la portée du texte, la Norvège estime qu’il est vital de parvenir à un texte qui inclue toutes les armes classiques, militaires ou non.  Il a souligné l’importance d’englober les armes légères et de petit calibre ainsi que leurs munitions.  Il a précisé qu’un traité qui ne s’appliquerait pas aux munitions ne permettrait pas de satisfaire à l’objectif d’un texte robuste.  Concernant les critères, il a affirmé que le traité doit établir clairement que les Etats parties ne sauraient autoriser les transferts d’armes s’il existe un risque substantiel de voir ces armes utilisées de manière à saper la paix ou la stabilité, ou si une telle utilisation conduit à une violation du droit international, qu’il s’agisse du droit humanitaire international ou des droits de l’homme. Le représentant a par ailleurs mis l’accent sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité et la question du recours à la violence armée contre les femmes.


M. JOE NAKANO (Japon) a rappelé que son pays avait coparrainé la résolution de 2006 qui a permis de lancer le processus visant à mettre en place un instrument juridiquement contraignant pour réglementer le transfert  international d’armes classiques.  Le mois que nous allons passer à New York n’est pas une étape de plus, mais un moment historique, a affirmé le représentant.  Pour le Japon, le futur traité doit faire écho à des mots simples mais déterminants: clarté, objectivité, solidité et transparence.  En premier lieu, le traité devra établir les normes les plus élevées possibles au niveau international, des normes qui expriment autant de clarté et d’objectivité que possible, a-t-il poursuivi. 


Ensuite, le Japon souhaite que le traité puisse avoir une portée aussi large que possible s’agissant des types d’armes auxquels il s’applique.  En troisième lieu, le traité doit pouvoir être mis en œuvre au niveau national, a indiqué le représentant.  Il a par ailleurs insisté sur le fait que la remise des rapports nationaux devait être obligatoire et leur contenu public. Enfin, il a souligné l’importance de la coopération internationale et de l’assistance pour faciliter la mise en œuvre du traité, notamment dans le domaine du contrôle des exportations et des importations. Il a conclu son propos en appelant à l’adoption d’un  traité robuste et universel.


M. BOB CARR, Ministre des affaires étrangères de l’Australie, a affirmé que les armes légères et de petit calibre était devenues des armes de destruction massive.  Il a notamment évoqué la situation dans les îles Salomon où, a-t-il expliqué, la prolifération de ce type d’armes avait exacerbé les tensions ethniques et les conflits internes, ce qui avait eu un impact délétère sur le développement économique du pays.  Le Ministre a par ailleurs rapporté que selon Oxfam, les conflits alimentés par l’importation d’armes coûtaient à l’Afrique près de 18 milliards de dollars par an.  Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser l’impact catastrophique de ce commerce irresponsable perdurer, s’est-il exclamé.


Le Ministre a réclamé un traité sur le commerce des armes qui établisse les normes les plus exigeantes en matière d’importation, d’exportation et de transfert d’armes classiques et qui puisse également promouvoir la responsabilité et la transparence.  Le traité doit également être doté de critères clairs pour pouvoir procéder à l’évaluation des exportations d’armes et de dispositifs capables d’être mis en œuvre s’agissant des systèmes de contrôle nationaux. 


M. Carr a ensuite fait observer que la mise en œuvre du traité sera un défi notable pour de nombreux pays et a estimé que « ceux qui ont la capacité de le faire » se doivent de fournir un appui technique ainsi qu’en matière de renforcement des capacités de manière à ce que tous les pays soient en mesure de mettre en œuvre le traité.  Il a ensuite annoncé que l’Australie verserait un million de dollars pour lancer un fonds d’appui multilatéral et aider ainsi les pays en développement à mettre en œuvre le traité.



Historique


Le processus visant à réglementer le commerce des armes a été lancé, avec l’adoption par l’Assemblée générale, le 6 décembre 2006, de la résolution A/RES/61/89 relative à un « instrument global et juridiquement contraignant établissant les normes internationales communes pour l’importation, l’exportation et le transfert d’armes classiques » (TCA).   Conformément à cette résolution, le Secrétaire général a présenté, l’année suivante, le résultat de sa consultation avec les Etats membres sur « la viabilité, le champ d’application et les paramètres généraux » d’un tel instrument.


En 2008, il a chargé un groupe d’experts gouvernementaux d’examiner ce résultat.  Le groupe a rédigé un rapport sur la base duquel, l’Assemblée générale a adopté, fin décembre de la même année, une nouvelle résolution 63/240`portant création d’un groupe de travail, chargé de travailler sur les éléments d’un texte « en vue de leur inclusion dans un traité à venir ». 


Les deux premières sessions du groupe de travail ont conduit à l’adoption d’un rapport intermédiaire, le 17 juillet 2009.  Une résolution 64/48 intitulée « Le traité sur le commerce des armes », a ensuite été adopté le 2 décembre 2009 par l’Assemblée générale.


La résolution stipule que le futur traité devrait permettre de limiter la fourniture d’armes et de munitions dans les zones de conflits et d’instabilité, de préserver la paix, la sécurité et la stabilité régionale, et d’améliorer le respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.  Elle appelait aussi à l’organisation à New York en 2012 d’une conférence des Nations Unies sur le traitésurlecommercedesarmes, précédée de cinq sessions d’un comité préparatoire, échelonnées en 2010 et 2011.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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