Les incidents récents dans le nord du Kosovo témoignent d’une situation extrêmement volatile, déclare le Représentant spécial devant le Conseil
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6670e séance – matin
LES INCIDENTS RÉCENTS DANS LE NORD DU KOSOVO TÉMOIGNENT D’UNE SITUATION EXTRÊMEMENT
VOLATILE, DÉCLARE LE REPRÉSENTANT SPÉCIAL DEVANT LE CONSEIL
Les délégations se félicitent de la nomination du Procureur en chef chargé
d’enquêter sur les allégations de traitement inhumain et de trafic d’organes au Kosovo
Au lendemain des graves incidents qui ont opposé les soldats de la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et les Serbes du Kosovo à Zubin Potok, dans le nord du Kosovo, le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Farid Zarif, a affirmé devant le Conseil de sécurité que « la frustration, la peur et la défiance » constituaient un terreau toujours favorable pour un retour de la violence.
Venu présenter le rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), pour la période allant du 16 juillet au 15 octobre 2011, M. Zarif, qui est aussi le Chef de la MINUK, a détaillé les incidents qui ont eu lieu dans la nuit du 23 au 24 novembre lorsque la KFOR a essayé de démanteler une barricade érigée par des Serbes du Kosovo à Dudin Krš. « Vingt et un soldats ont été blessés dans des affrontements avec les Serbes du Kosovo qui ont attaqué la KFOR avec des pierres et des véhicules », a déploré le Représentant spécial, qui a également indiqué que lors de l’incident qui s’est produit hier à Zubin Potok, les Serbes du Kosovo avaient blessé 23 soldats de la KFOR. « Ce dernier incident marque clairement une escalade dans le niveau des violences et des tensions », a estimé le Représentant spécial qui a cependant précisé que l’incident avait été condamné par les plus hautes autorités du Kosovo et de la Serbie.
Exhortant les parties à s’engager dans un dialogue constructif et à permettre la liberté de mouvement des forces internationales mandatées par le Conseil de sécurité, M. Zarif a affirmé qu’il sera difficile pour la KFOR et la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX), également déployée dans le nord du Kosovo, d’accomplir leurs mandats, faute de progrès dans ce dialogue. « Les avancées enregistrées dans l’édification d’une force de police multiethnique au Kosovo pourraient être menacées », a-t-il aussi averti. Le dialogue entre Pristina et Belgrade, pour lequel l’Union européenne joue un rôle clef, constitue le cadre approprié pour résoudre les questions en suspens, a souligné le Représentant spécial, citant notamment le passage aux postes frontière 1 et 31, qui sont le théâtre d’incidents réguliers depuis juillet dernier. « Ces deux postes frontière restent fermés à la circulation en raison des barrages érigés par les Serbes du Kosovo qui continuent de protester contre la présence, pour l’instant symbolique, des autorités douanières et de police de Pristina », a-t-il précisé.
Le Ministre des affaires étrangères de la Serbie, M. Vuk Jeremić, a regretté que Pristina, plutôt que de s’appuyer sur la sixième phase du dialogue qui s’était déroulée à Bruxelles, le 2 septembre dernier, ait tenté à nouveau d’imposer ses vues sur la question des postes frontière 1 et 31. « C’est ainsi que le 7 septembre, celui qui se prétend Premier Ministre du Kosovo a déclaré qu’il avait l’intention d’assurer le contrôle de l’intégrité territoriale du Kosovo, en nommant des officiers des douanes et de police à ces points de passage », a-t-il rappelé.
C’est une violation des dispositions de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité et de l’Accord en six points du Secrétaire général, qui spécifient très clairement que seuls des officiers internationaux des douanes devront être déployés aux points 1 et 31, a martelé le Ministre serbe des affaires étrangères. Le démantèlement des barrages contribue clairement aux efforts visant à assurer la paix et la stabilité, a-t-il dit, tout en précisant qu’il devrait être réalisé exclusivement à travers des moyens pacifiques.
De son côté, M. Enver Hoxhaj, du Kosovo, a indiqué que la Serbie maintenait des structures de sécurité dans le nord du Kosovo, en violation de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité. « Ces structures illégales sont un obstacle à l’établissement de l’état de droit et tiennent en otage la population », a-t-il affirmé, en ajoutant que la présence de 18 barrages routiers, « que même les forces de la KFOR ne peuvent franchir », menace la sécurité au Kosovo.
Le représentant de la Fédération de Russie a attribué « à des éléments albanais » la responsabilité des récents incidents dans le nord du Kosovo. Il a émis l’espoir que la KFOR, au lieu de tenter de démanteler les barricades serbes, se concentrerait plutôt sur le rétablissement de la sécurité pour tous les habitants du district.
Les membres du Conseil de sécurité ont également rappelé à quel point le dialogue entre les parties était important. Les délégations des États-Unis et du Royaume-Uni se sont ainsi félicitées des progrès enregistrés dans le cadre de ce dialogue, comme la reconnaissance mutuelle des diplômes universitaires et la reprise des relations commerciales, à la suite de la reconnaissance par la Serbie des timbres de douane du Kosovo. Le représentant de la France a exhorté, pour sa part, la Serbie et le Kosovo à concentrer leurs efforts vers une adhésion à l’Union européenne, en s’abstenant de tout acte ou discours susceptibles d’attiser les tensions. Le Conseil doit adresser un signal clair aux parties pour qu’elles mettent fin aux violences et reprennent le dialogue, a souligné le représentant de la Fédération de Russie. Sa délégation, a-t-il indiqué, fera circuler prochainement un projet de déclaration présidentielle à ce sujet.
Enfin, les délégations se sont félicitées de la nomination de M. Clint Williamson comme Procureur en chef auprès de l’Équipe spéciale de la Mission EULEX chargée de faire la lumière sur les allégations de traitement inhumain de personnes et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo, que le Rapporteur spécial du Conseil de l’Europe avait signalées dans son rapport, publié à la fin 2010.
Le Ministre serbe des affaires étrangères a estimé qu’il était indiscutable que la Mission EULEX ne pouvait pleinement opérer en dehors du Kosovo. « La Mission EULEX n’a ni le mandat adéquat ni la compétence –temporelle et territoriale– pour mener à bien une enquête qui soit complète dans son champ d’application », a-t-il précisé, en rappelant également que l’Équipe spéciale de la Mission EULEX n’avait pas la capacité d’amener toutes les parties concernées à coopérer pleinement. « Seule la Mission peut le faire », a-t-il affirmé. Tout en déclarant que son Gouvernement n’était pas opposé au rôle central de la Mission dans les mécanismes d’enquête mis en place, le Ministre a indiqué qu’elle devrait être légitimée par le Conseil et lui faire rapport.
RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ
Rapport du Secrétaire général sur la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (S/2011/675)
Le présent rapport, soumis en application de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, par laquelle le Conseil avait décidé de créer la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), fait le point sur les activités menées par la MINUK et l’évolution de la situation pendant la période allant du 16 juillet au 15 octobre 2011.
Le Secrétaire général rappelle les incidents qui s’étaient produits le 26 juillet à Zubin Potok, à la suite de l’installation de barrages le long des routes menant aux deux postes frontière au nord du Kosovo par les Serbes du Kosovo, empêchant ainsi les déplacements des unités spéciales de la Police régionale. La Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) est intervenue pour aider ces unités à se retirer du nord du Kosovo mais, malheureusement, des coups de feu ont été échangés et un agent de la police spéciale a été tué près de Zubin Potok le 26 juillet, poursuit M. Ban.
Le 27 septembre, des manifestants au poste frontière 1 ont tenté d’enlever le fil barbelé posé par la KFOR pour protéger un point de contrôle des véhicules de la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX) situé sur une route de contournement, empruntée par les Serbes du Kosovo. La KFOR a répliqué avec du gaz lacrymogène et des tirs de balles en caoutchouc, poursuit M. Ban, qui indique qu’au cours des affrontements qui ont suivi, les manifestants ont lancé des bombes artisanales sur les soldats de la KFOR. « Ces événements ont contribué à une détérioration sensible de la situation en matière de sécurité dans le nord du Kosovo, à une polarisation des positions et à un creusement de l’écart entre les populations locales du nord du Kosovo et les institutions de Pristina », écrit le Secrétaire général dans son rapport.
Concernant le dialogue entre Pristina et Belgrade, le Secrétaire général indique que le dialogue facilité par l’Union européenne s’est poursuivi pendant la période considérée, avec quelques interruptions et des résultats variables. Le 2 septembre, la reprise du dialogue a débouché sur un accord sur les timbres de douanes et les documents accompagnant les expéditions de marchandises, poursuit M. Ban, qui relève que cet accord marque la fin d’une longue période d’obstacles aux échanges commerciaux entre les deux parties. « Depuis l’accord du 2 septembre, ces échanges semblent avoir repris pendant le mois de septembre, sauf aux postes frontière 1 et 31 dans le nord du Kosovo », précise-t-il. Le Secrétaire général indique aussi que la situation globale en matière de sécurité a été compromise par la tentative du 25 juillet de la part des autorités du Kosovo de garder le contrôle sur les postes 1 et 31. Bien que la montée des tensions au nord n’ait pas déstabilisé totalement la situation sur le plan de la sécurité au Kosovo au sud d’Ibër/Ibar, le nombre d’incidents violents touchant la population serbe dans cette zone a augmenté à la suite des événements de juillet, fait-il remarquer.
M. Clint Williamson, des États-Unis, avait été nommé, à la fin août, comme Procureur en chef auprès de l’Équipe spéciale chargée de reprendre l’enquête préliminaire lancée par EULEX le 27 janvier 2011 pour faire la lumière sur les allégations de traitement inhumain de personnes et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo, signalées par le Rapporteur spécial du Conseil de l’Europe, M. Dick Marty.
« Belgrade reste d’avis qu’un organe indépendant doté de pouvoirs d’investigation en Albanie et au-delà devrait être créé par le Conseil de sécurité pour mener l’enquête », précise le Secrétaire général.
Les événements survenus récemment dans le nord du Kosovo rappellent avec force que les problèmes sous-jacents qui n’ont pas encore été réglés constituent une menace pour la paix et la stabilité de la région, fait observer le Secrétaire général. « Je suis préoccupé non seulement par la détérioration de la situation en matière de sécurité sur le terrain à la suite de ces événements, mais aussi par la détérioration des relations interethniques dans l’ensemble du Kosovo, la polarisation des positions politiques et l’élargissement du fossé entre les communautés du nord et du sud de l’Ibar », déclare M. Ban. Tant que des situations comme celle qui a eu lieu aux postes frontière 1 et 31 ne sont pas réglées, et tant que les questions relatives à l’état de droit ne sont pas dissociées des positions concernant le statut, les risques de nouvelles tensions demeurent. Le Secrétaire général déplore également qu’au cours de la période à l’examen, peu de progrès ont été accomplis dans le dialogue facilité par l’Union européenne entre Pristina et Belgrade, principalement à cause des événements survenus dans le nord. Bien qu’il soit encourageant qu’un accord ait été conclu sur la question des timbres de douane du Kosovo et que les échanges commerciaux entre le Kosovo et la Serbie aient repris, il est préoccupant que l’impasse actuelle concernant le régime des postes frontière du nord continue à entraver la poursuite régulière du processus de dialogue, note M. Ban. C’est pourquoi, il engage Pristina et Belgrade, ainsi que les communautés locales, à agir avec retenue et patience et à continuer de faire confiance au dialogue. Il espère que les membres du Conseil de sécurité enverront tant à Pristina qu’à Belgrade un message clair leur demandant instamment de réduire les tensions et de prévenir toute recrudescence de la violence dans le nord du Kosovo.
Déclarations
M. FARID ZARIF, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a indiqué que la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) avait consolidé sa présence autour des deux postes frontière 1 et 31 dans le nord du Kosovo et essayé de démanteler les barrages érigés par les Serbes du Kosovo. « Ces deux postes frontière restent fermés à la circulation en raison des barrages érigés par les Serbes du Kosovo qui continuent de protester contre la présence, pour l’instant symbolique, des autorités douanières et policières de Pristina », a précisé le Représentant spécial. Il a ensuite indiqué que la tentative dans la nuit du 23 au 24 novembre de la KFOR de démanteler une barricade à Dudin Krš sur une route de contournement vers Mitrovica avait déclenché un affrontement violent avec les résidents serbes qui ont attaqué la KFOR avec des pierres et des véhicules. Selon la KFOR, 21 de ses soldats ont été blessés, a indiqué M. Zarif. Hier matin, a-t-il dit, les soldats de la KFOR ont enlevé les barrages érigés par les Serbes du Kosovo à Zubin Potok. Dans l’après-midi, la violence a repris, les Serbes du Kosovo ont lancé des cocktails Molotov, blessant ainsi 23 soldats. Quinze manifestants serbes ont reçu des soins pour leurs blessures, a précisé M. Zarif.
« Ces incidents marquent clairement une escalade dans le niveau des violences et des tensions », a affirmé le Représentant spécial, qui a précisé que ces incidents avaient été condamnés par les plus hautes autorités du Kosovo et de la Serbie. La situation dans le nord du Kosovo est étroitement liée à la situation politique en Serbie, où sont prévues des élections au printemps prochain, a-t-il dit. M. Zarif a rappelé que la MINUK avait exhorté les parties à s’engager dans un dialogue constructif, à renoncer à l’usage de la force et à permettre la liberté de mouvement des forces internationales mandatées par le Conseil de sécurité. Il s’est toutefois félicité d’une récente désescalade dans la rhétorique employée par les deux parties, en faisant remarquer que, sans progrès politiques, il sera difficile pour la KFOR et la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX) d’accomplir leurs mandats au nord du Kosovo. Les progrès enregistrés dans l’édification d’une force de police multiethnique au Kosovo pourraient être menacés, a-t-il averti.
La situation dans le nord du Kosovo continue d’être extrêmement volatile, a précisé le Représentant spécial. « La frustration, la peur et la défiance » constituent un terreau favorable pour un retour de la violence, a-t-il souligné. Le dialogue entre Pristina et Belgrade, pour lequel l’Union européenne joue un rôle clef, constitue le cadre approprié pour la recherche d’une « solution européenne » concernant les deux postes frontière litigieux, a souligné le Représentant spécial, avant de rappeler que ce dialogue prévoyait aussi la mise en œuvre des accords précédemment conclus sur le cadastre, l’état civil et la liberté de mouvement.
Déplorant l’augmentation du nombre d’incidents visant les minorités du Kosovo -y compris le meurtre d’un Croate du Kosovo le 2 octobre dernier- par rapport à l’année dernière, M. Zarif a indiqué que ces incidents avaient des conséquences négatives sur la perception par les communautés concernées du niveau de sécurité dont elles bénéficient.
« Cette perception est l’un des éléments clefs entravant le retour des membres des minorités », a indiqué M. Zarif, qui a fait observer que le nombre de ces retours avait récemment diminué. S’il s’est félicité des progrès enregistrés dans la préservation du patrimoine culturel de l’Église orthodoxe serbe, il a noté qu’en ce qui concerne les personnes disparues, peu de progrès ont été réalisés à ce jour. Il a demandé à toutes les personnes qui ont des informations sur le sort et l’emplacement de personne disparue de prendre contact avec le Comité international de la Croix-Rouge. Le Représentant spécial a détaillé les avancées réalisées dans l’enquête menée par la Mission EULEX sur les allégations de traitements inhumains et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo auxquelles faisaient référence la résolution 1782 (2011) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Il a indiqué que M. Clint Williamson, qui est en charge de l’enquête, avait recueilli l’engagement de l’Albanie de coopérer pleinement avec l’enquête. Belgrade est en faveur de la création par le Conseil de sécurité d’un organe indépendant pour enquêter en Albanie, a-t-il ajouté. Avant de conclure, le Représentant spécial a assuré que la situation au Kosovo, loin d’être un « conflit gelé » était « fluide et dynamique » et qu’il existait de réelles chances de surmonter durablement les tensions.
M. VUK JEREMIĆ, Ministre des affaires étrangères de la Serbie, a déclaré que la situation en matière de sécurité « dans notre province sud du Kosovo et de Metohija s’était considérablement aggravée depuis le mois d’octobre. Il a regretté que les avertissements lancés par la Serbie contre les effets adverses d’une action unilatérale par la force sur la stabilité du territoire n’aient pas été entendus par certains acteurs clefs. Le Ministre a estimé qu’en juillet dernier, un optimisme prudent avait permis d’améliorer certains aspects de la situation au Kosovo. La cinquième phase du dialogue entre Belgrade et Pristina, qui avait eu lieu le 2 juillet, avait débouché sur la conclusion d’accords sur la neutralité dans certains domaines importants. Plutôt que de s’appuyer sur cet élan positif, Pristina a préféré tenter, de manière unilatérale, de changer la réalité sur le terrain, a accusé M. Jeremić. Une première fois le 25 juillet, quand les autorités d’origine albanaise du territoire avaient ordonné le déploiement de l’unité « paramilitaire » connue sous l’acronyme de « ROSU », avec pour objectif de s’emparer des points de passage 1 et 31 qui, a-t-il rappelé, sont établis à des fins administratives, et sans consulter, au préalable, les forces internationales présentes sur le terrain. En réaction aux actions de Pristina, indique le rapport du Secrétaire général, les Serbes du Kosovo ont continué de rejeter l’autorité des institutions du Kosovo et dressé des barrages routiers. Grâce à la réponse « rapide et mesurée » de Belgrade, a assuré le Ministre, la situation dans le nord du Kosovo avait pu être contenue, même s’il existe encore des tensions.
C’est dans ce contexte, a-t-il dit, que la sixième phase du dialogue s’était déroulée à Bruxelles, le 2 septembre dernier. Au lieu de s’engager dans un dialogue de bonne foi, le Kosovo a tenté à nouveau d’imposer ses vues sur la question des points 1 et 31, a regretté M. Jeremić. C’est ainsi que le 7 septembre, celui qui se prétend « Premier Ministre du Kosovo » a explicitement déclaré qu’il avait l’intention de « préserver et d’assurer le contrôle de l’intégrité territoriale du Kosovo », notamment en nommant des officiers des douanes et de police qui seraient stationnés à ces points de passage. Un « plan opérationnel de la police du Kosovo » est venu entériner cette position, que le Ministre Jeremić a jugé incompatible avec les dispositions de la résolution 1244 (1999) et avec l’Accord en six points du Secrétaire général, qui spécifie très clairement que seuls des officiers internationaux des douanes devront être déployés aux points 1 et 31. Cela n’a pas empêché les résidents du nord du Kosovo de renforcer les barrages routiers existants et d’en dresser d’autres, tandis que des affrontements occasionnels ont fait des blessés des deux côtés. C’est pourquoi, la Serbie appelle toutes les parties concernées, avec la participation des responsables de la KFOR et de la Mission EULEX, à s’engager dans un dialogue et à rétablir le calme immédiatement. Le démantèlement des barricades contribue clairement aux efforts visant à assurer la paix et la stabilité, a-t-il dit, tout en précisant qu’il devrait être réalisé exclusivement à travers des moyens pacifiques.
Tout en reconnaissant que la situation dans le nord du Kosovo méritait l’attention du Conseil, le Ministre a fait remarquer que la situation dans le sud s’était aussi dégradée. Comme l’indique le rapport, a-t-il déclaré, le nombre d’incidents violents qui se sont produits au sud de la rivière Ibar se sont multipliés après les incidents de juillet. Outre le meurtre brutal d’un Serbe du Kosovo, il a cité des actes de profanation d’une église orthodoxe serbe, des jets de pierres contre des véhicules, des incendies criminels, des cambriolages et des contaminations de puits. De l’avis du Ministre, le rapport du Secrétaire général ne mentionne pas certains incidents, dont celui au cours duquel des membres de la « ROSU » avaient déchiré les papiers de deux Serbes innocents puis les avaient roués de coups. Ceci ne facilite pas le retour des Serbes du Kosovo, a fait observer M. Jeremić, rappelant qu’à ce jour, 96 personnes déplacées y étaient revenues.
Le Ministre serbe des affaires étrangères a ensuite déclaré qu’en dépit d’un rapport du Conseil de l’Europe sur la traite humaine et le trafic illicite d’organes humains au Kosovo, très peu avait été fait pour vérifier ces allégations préoccupantes. Certes, la nomination de M. Clint Williamson à la tête de l’Équipe spéciale d’investigation de la Mission EULEX est une bonne nouvelle, a-t-il reconnu, mais cela reste « insuffisant », en raison d’un mandat trop limité, qui ne lui permet pas de mener son enquête de manière satisfaisante.
Le Ministre serbe des affaires étrangères a en effet estimé qu’il était indiscutable que la Mission EULEX ne pouvait pleinement opérer en dehors du Kosovo. « La Mission EULEX n’a ni le mandat adéquat ni la compétence –temporelle et territoriale– pour mener à bien une enquête qui soit complète dans son champ d’application », a-t-il précisé, en rappelant également que l’Équipe spéciale de la Mission EULEX n’avait pas la capacité d’amener toutes les parties concernées à coopérer pleinement. « Seule la Mission peut le faire », a-t-il affirmé. Tout en déclarant que son gouvernement n’était pas opposé au rôle central de la Mission dans les mécanismes d’enquête mis en place, le Ministre a indiqué qu’elle devrait être légitimée par le Conseil et lui faire rapport.
M. Jeremić a rappelé que la Serbie avait déjà présenté des propositions sur un mécanisme d’enquête et exhorté le Conseil à se prononcer à ce sujet. En outre, a-t-il poursuivi, la mort mystérieuse d’un témoin clef dans un procès important sur des crimes de guerre ne fait que renforcer la perception selon laquelle la Mission EULEX n’est pas capable de garantir la sûreté de ceux qu’elle est censée protéger. Avant de conclure, le Ministre a réaffirmé la primauté du dialogue pour résoudre toutes les questions en suspens entre Serbes et Albanais du Kosovo. Face à l’aggravation de la situation au Kosovo, le Conseil de sécurité doit désormais s’engager de manière plus vigoureuse, a-t-il insisté, en lui demandant de veiller à ce qu’aucune action unilatérale ne soit menée sur le terrain. Si le Conseil ne réussit pas à le faire, cela signifiera qu’il renonce à assumer les responsabilités que lui confie la Charte des Nations Unies, a prévenu M. Jeremić.
M. ENVER HOXHAJ, du Kosovo, a rappelé que le Kosovo œuvrait à la paix et à la stabilité dans les Balkans. Des progrès dans l’édification d’un État de droit au Kosovo ont été accomplis, a-t-il assuré, précisant que l’Assemblée nationale du Kosovo avait adopté 33 lois dans des domaines très divers comme l’entraide judiciaire et le cadastre. « Des résultats concrets ont été obtenus dans la lutte contre la criminalité organisée et la corruption », a poursuivi M. Hoxhaj, soulignant à cet égard la relation constructive qui a été établie avec la Mission « état de droit » menée par l’Union européenne (EULEX). Il a ensuite indiqué que la croissance prévue cette année au Kosovo était de 6%, avant de se féliciter du nombre croissant de pays reconnaissant le Kosovo, comme dernièrement le Gabon, le Koweït et la Côte d’Ivoire. « Il n’y a pas de raison de retarder la reconnaissance de la déclaration de l’indépendance du Kosovo qui, selon la Cour internationale de Justice, ne constitue pas une violation du droit international », a-t-il estimé. La perspective d’un rapprochement avec l’Union européenne est le meilleur moyen d’instaurer une stabilité durable dans la région, a-t-il assuré, en rappelant que le rapport de l’Union européenne du 3 octobre mettait l’accent sur les progrès importants accomplis par le Kosovo dans le domaine politique. « Nous aspirons à des liens constructifs avec l Union européenne », a-t-il déclaré, en espérant que le Kosovo ne soit pas un pays oublié. « J’espère que 2012 sera l’année du Kosovo européen », a-t-il dit.
Concernant la situation dans le nord du Kosovo, M. Hoxhaj a indiqué que le statu quo avait été toléré depuis 1999 en violation de la résolution 1244 du Conseil de sécurité, en faisant remarquer que la Serbie maintenait des structures de sécurité dans cette zone. Ces structures illégales sont un obstacle à l’édification de l’État de droit, a-t-il indiqué, avant de déplorer que le nord du Kosovo soit la seule région européenne à ne pas bénéficier d’élections démocratiques. Soulignant la recrudescence de la criminalité dans le nord du Kosovo, il a déploré que les structures illégales de sécurité mises en place avec l’appui de la Serbie prennent la population en otage.
« Belgrade a refusé toute forme de coopération pour améliorer les conditions de vie de la population serbe sur place », a-t il soutenu, en ajoutant que le Kosovo, à la différence de la Serbie, avait mis en œuvre 90% du Plan Ahtisaari. « La Serbie n’est pas intéressée par cette question », a-t-il affirmé. « La décision du Gouvernement de Kosovo d’instaurer la réciprocité avec la Serbie dans les relations commerciales n’était pas une provocation mais une tentative d assurer l’état de droit », a-t-il ensuite déclaré. La situation dans le nord du Kosovo est grave, a-t-il dit, en faisant observer que 18 barrages routiers avaient été érigés pour empêcher la liberté de mouvement. Même les soldats de la KFOR ne peuvent franchir ces barrages, a-t-il indiqué, convaincu que cet état de fait menace la sécurité au Kosovo. Belgrade prône l’« équilibre de la peur » en installant des structures de sécurité dans le nord du Kosovo qui, a-t-il dit, sont responsables des incidents dont des soldats de la paix ont été récemment victimes. Le Kosovo sera un partenaire constructif sur la voie du dialogue, a assuré son représentant avant de conclure.
« Nous ne nous laisserons pas intimidés », a–t-il poursuivi, ajoutant que le dialogue technique, facilité par l’Union européenne, était un instrument fondamental pour le bon voisinage. « Nous accepterons toute solution qui soit européenne, claire, et prévoit le démantèlement des structures parallèles », a-t-il déclaré, engageant la Serbie à mettre pleinement en œuvre les dispositions du Plan Ahtisaari.
« Pristina est prête au dialogue et à aboutir à un accord sur les questions en suspens. La Serbie, quant à elle, ne doit pas utiliser ce dialogue pour marquer des points politiques dans son rapprochement avec l’Union européenne », a-t-il affirmé, avant de rappeler la détermination du Kosovo d’assurer l’intégration des populations du nord du Kosovo et d’offrir un avenir à tous ses citoyens.
M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a noté qu’il y avait eu peu d’événements positifs au cours de la période couverte par le rapport du Secrétaire général. En dépit d’une évolution positive sur certains dossiers, notamment la coopération démontrée par les dirigeants de la Serbie et du Kosovo sur les personnes disparues, la multiplication d’incidents violents, y compris ceux des derniers jours, ne font que souligner la gravité de la situation sur le terrain, a-t-il estimé. Sa délégation, a indiqué le représentant, continue d’appuyer la création d’un mécanisme qui continuerait de bénéficier de l’appui de toutes parties prenantes. La question du statut du Kosovo ne peut être réglée que par le biais d’un dialogue placé sous l’égide de l’Union européenne et sur la base de la résolution 1244 du Conseil de sécurité, a rappelé M. Puri, qui a invité les deux parties à résoudre par des moyens pacifiques toutes les questions en suspens.
Mme ROSEMARY DICARLO (États-Unis) a noté elle aussi que de nombreux défis continuaient de se poser sur le terrain. En dépit des incidents récents, nous sommes cependant convaincus que le Kosovo et la Serbie sauront régler, par des moyens pacifiques, les questions en suspens. « Notre délégation, a poursuivi la représentante, se rallie à l’appel lancé par le Secrétaire général pour que la KFOR garantisse la liberté de mouvement des populations civiles dans tout le Kosovo, « qui constitue un seul et même espace douanier ». Le Kosovo, a estimé Mme DiCarlo, a le droit légitime de contrôler ses frontières et d’instaurer des services douanes lorsque la Serbie aura reconnu les timbres de douane du Kosovo. Les États-Unis sont préoccupés par les attaques dont ont été victimes les soldats de la KFOR et condamnent la présence de « structures de sécurité serbes » sur le terrain, a-t-elle dit. En dépit des progrès réalisés dans le dialogue entre la Serbie et le Kosovo, facilité par l’Union européenne, nous sommes forcés de constater que les motifs de dissension restent nombreux, même s’il y a lieu de se féliciter de la reconnaissance mutuelle des diplômes universitaires. Estimant que le Gouvernement du Kosovo avait renforcé ses moyens de faciliter le retour des personnes déplacées, la représentante a toutefois noté que leur nombre avait décru au cours des trois derniers mois. Avant de conclure, la déléguée a appuyé la nomination de M. Clint Williamson à la tête de l’Équipe spéciale de l’EULEX chargée d’enquêter sur les allégations concernant un trafic d’organes humains au Kosovo.
M. PHILIP PARHAM (Royaume-Uni) a affirmé que des réformes de fond demeurent nécessaires au Kosovo, en dépit des progrès enregistrés. « L’état de droit et le traitement des minorités doivent être les domaines prioritaires d’action des autorités du Kosovo, en vue d’une éventuelle adhésion à l’Union européenne », a-t-il déclaré. La situation actuelle dans le nord du Kosovo, marquée par le chômage et la criminalité organisée, empêche ses habitants de mener une vie normale, a-t-il dit. Le représentant a ensuite souligné « la responsabilité d’autres acteurs » dans les incidents qui ont opposés récemment la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et les Serbes du Kosovo, avant d’exhorter toutes les parties à renoncer à la violence. « Il ne saurait y avoir d’excuses à la violence et aux entraves apportées à la libre circulation des personnes », a-t-il déclaré, en demandant au Gouvernement de la Serbie de prendre les mesures nécessaires pour y remédier. Le représentant s’est félicité de la nomination de M. Clint Williamson, pour diriger l’Équipe spéciale de la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX) chargée de faire la lumière sur les allégations de traitement inhumain des personnes et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo. « La Mission EULEX a la compétence pour aller de l’avant sur cette question particulière », a assuré le représentant. Soulignant que le dialogue entre Pristina et Belgrade était « essentiel », il s’est félicité des avancées récentes dans des domaines clefs comme la reconnaissance des diplômes. L’adhésion éventuelle de la Serbie à l’Union européenne dépend étroitement de sa position vis-à-vis du Kosovo, a-t-il ajouté. « Le Kosovo doit occuper sa place au sein de l’Union européenne, au même titre que ses pays voisins des Balkans », a estimé le représentant du Royaume-Uni.
M. LI BAODONG (Chine) a demandé aux parties de prendre des mesures d’urgence visant à atténuer les tensions. Il a estimé que la résolution 1244 continuait d’être un cadre privilégié pour le règlement des questions en suspens. Déplorant la recrudescence des violences au nord du Kosovo, le représentant s’est également dit préoccupé par le trafic d’organes humains qui, a-t-il rappelé, constitue une violation du droit international humanitaire. La délégation de la Chine apprécie les activités menées par la MINUK, a indiqué le représentant en saluant le rôle particulièrement important qu’elle continue de jouer dans le maintien de la paix et de la sécurité dans la région.
M. RAFF BUKUB-OLU WOLE ONEMOLA (Nigéria) a déclaré que les incidents d’hier semblaient confirmer les craintes de tensions persistantes entre Serbes et Kosovars. Les parties doivent maintenant s’engager dans la réconciliation en retournant à la table des négociations, a-t-il recommandé. Le représentant a souligné qu’il était essentiel que les présences internationales actuellement déployées au Kosovo renforcent leur coopération et leur coordination afin d’y instaurer la paix et la sécurité. La communauté internationale doit, pour sa part, faire davantage pour soutenir les parties dans le cadre du dialogue engagé sous l’égide de l’Union européenne. Préoccupée par le nombre limité de personnes déplacées de retour au Kosovo, la délégation du Nigéria a demandé que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), la MINUK et la communauté internationale dans son ensemble continuent de promouvoir un climat propice au retour de ces personnes. Il faut également traduire en justice les responsables de crimes liés à la traite humaine et au trafic d’organes, a-t-il insisté. L’Équipe spéciale de la Mission EULEX, chargée de l’enquête doit prendre en compte les vues de toutes les parties prenantes, a-t-il souhaité.
M. GÉRARD ARAUD (France) a rappelé que de nouveaux affrontements au nord du Kosovo ont laissé quelque 25 blessés parmi les soldats de la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR), dont deux par balles. Cette violence exercée contre une mission internationale chargée de garantir la sécurité des populations civiles est inadmissible, a-t-il déclaré, en précisant que les personnels de l’Union européenne et de l’OTAN agissaient dans le cadre d’un mandat des Nations Unies. M. Araud a ensuite estimé que la réponse de la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX) et de la KFOR pendant ces explosions de violence a été adéquate et proportionnée. « Leur intervention, en concertation avec les autorités locales, a permis de faire baisser la tension », a-t-il poursuivi, avant d’appeler à la levée immédiate des barrages au nord du Kosovo et au respect de la liberté de circulation au Kosovo conformément à la résolution 1244. Le représentant a relevé que le retour au calme est d’abord dans l’intérêt des habitants du nord du Kosovo, qui sont les premiers à subir les conséquences de ces entraves à la circulation.
« Ni la communauté internationale, ni les États voisins ne souhaitent voir ce territoire et ses habitants isolés et placés sous la coupe des réseaux criminels, qui sont à l’origine des violences, non par nationalisme, mais parce que le contrôle aux frontières rend plus difficile les trafics dont ils vivent », a-t-il déclaré. Il faudrait encourager les développements positifs que sont la reprise des relations commerciales entre la Serbie et le Kosovo, la présence d’EULEX aux postes frontière 1 et 31, conformément au mandat que les Nations unies lui ont donné en 2008, et la reprise du dialogue facilité par l’Union européenne entre Belgrade et Pristina, le 21 novembre et demain 30 novembre, a-t-il souligné. « Le retour au calme est dans l’intérêt de Belgrade et de Pristina, qui souhaitent se rapprocher de l’Union européenne », a poursuivi M. Araud, qui a estimé que c’est dans le cadre de ce dialogue que doivent être résolus les contentieux entre les parties. Il a ensuite exhorté la Serbie et le Kosovo à poursuivre ce dialogue dans un esprit de responsabilité, à concentrer leurs efforts vers une adhésion à l’Union européenne, en suivant les recommandations contenues dans le dernier rapport de progrès de la Commission européenne et en s’abstenant de tout acte ou discours susceptibles d’attiser les tensions. Saluant la nomination de M. Clint Williamson à la tête de l’Équipe spéciale de la Mission EULEX, chargée d’enquêter sur les allégations de trafics d’organes contenues dans le rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe publié en 2010, il a appelé tous les États de la région à poursuivre leur coopération avec la Mission EULEX. « Nous nous félicitons de la disponibilité qu’ils ont exprimée à cet égard », a-t-il dit, en assurant que la Mission EULEX a les moyens de conduire une enquête crédible, qui doit pouvoir se poursuivre sereinement, sans être instrumentalisée dans le cadre du dialogue.
M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a réaffirmé la position de sa délégation concernant la « proclamation unilatérale de l’indépendance du Kosovo », qu’elle continue de considérer comme nulle et non avenue. Il a déclaré que les actes unilatéraux de Pristina et de la Mission EULEX étaient « inacceptables », et a attribué à des éléments albanais la responsabilité des incidents violents ayant émaillé la situation au cours de ces dernières semaines dans le nord du Kosovo. Pas plus tard qu’hier, a-t-il fait remarquer, les forces de l’OTAN, en menant des attaques « sournoises », se sont emparées d’une barricade qui avait été dressée « par frustration » en réponse aux actions du Kosovo dans la région. L’Ambassadeur Churkin a émis l’espoir qu’à l’avenir, la KFOR, au lieu de tenter de démanteler les barricades serbes, axerait plutôt ses efforts pour rétablir la sécurité pour tous les habitants du district. Il s’est déclaré opposé à la mise en œuvre sélective du mandat de la Mission EULEX qui, a-t-il regretté, a contribué clairement à encourager les actions unilatérales du Kosovo. M. Churkin a ensuite souhaité qu’une enquête approfondie soit menée sur l’incident du 27 septembre dernier, au cours duquel la KFOR a recouru à la force et qui a causé des « pertes parmi la population civile ». Sa délégation demande au Secrétaire général de présenter dans son prochain rapport une analyse détaillée des circonstances dans lesquelles les forces internationales déployées sur le terrain opèrent au Kosovo, ainsi qu’une enquête, placée sous les auspices des Nations Unies, sur les allégations de trafic d’organes. À cet égard, M. Churkin a déploré la protection insuffisante des témoins. Il a également regretté l’absence de sécurité pour permettre aux personnes déplacées de retourner au Kosovo, ainsi que la profanation de lieux de culte orthodoxes. Le Conseil de sécurité doit adresser un signal clair sur la nécessité de mettre fin aux violences et de reprendre le dialogue, a souligné le représentant de la Fédération de Russie, avant d’indiquer que sa délégation fera circuler prochainement un projet de déclaration présidentielle à ce sujet.
M. PETER WITTIG (Allemagne) a indiqué que toute utilisation de la violence contre les membres de la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et de la Mission « état de droit » menée par l’Union européenne (EULEX), qui agissent dans le cadre de mandats des Nations Unies, était inacceptable. Il a demandé la levée des barrages au nord du Kosovo, en saluant l’appel lancé par le Président Tadic pour que cette mesure soit prise. « Les questions en suspens entre Pristina et Belgrade ne pourront être réglées que par des moyens pacifiques », a-t-il rappelé, avant de se réjouir de la reprise du dialogue entre les deux parties qui, a-t-il dit, a permis, entre autres, la reconnaissance mutuelle des diplômes. Le représentant s’est ensuite dit préoccupé par la criminalité organisée au Kosovo, tout en notant les efforts des autorités du Kosovo pour lutter contre ce phénomène. L’Allemagne se félicite de la nomination de M. Clint Williamson à la tête de l’Équipe spéciale de la Mission EULEX chargée d’enquêter sur les allégations de trafics d’organes contenues dans le rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, publié à la fin 2010. « La Mission EULEX est pleinement compétente pour mener cette enquête », a-t-il estimé en conclusion, en précisant qu’il n’était « pas nécessaire de créer un mécanisme complémentaire d’enquête ».
M. DOCTOR MASHABANE (Afrique du Sud) a condamné les récents incidents qui ont opposé dans le nord du Kosovo les forces internationales et les Serbes du Kosovo. Il a ensuite affirmé que la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité demeurait le cadre adéquat pour régler la situation globale au Kosovo, avant d’inviter la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et la Mission « État de droit » menée par l’Union européenne (EULEX) à observer la plus stricte neutralité dans la conduite de leurs missions. Se félicitant de la reprise du dialogue entre Pristina et Belgrade, il a souhaité que les deux parties trouvent un terrain d’entente concernant les postes frontière au nord du Kosovo. Il a souhaité que l’enquête de la Mission EULEX sur les allégations de traitement inhumain de personnes et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo soit menée de manière impartiale.
M. NAWAF SALAM (Liban) s’est félicité de la coordination dont ont fait preuve la MINUK, la Mission EULEX et la KFOR dans l’exécution de leurs mandats respectifs. Préoccupé par la dégradation de la situation sur le terrain, il a déclaré que chacune des questions en suspens pouvait devenir source de tension entre les parties et constituer un obstacle aux négociations. Sa délégation se félicite cependant de la bonne volonté dont ont fait preuve Belgrade et Pristina dans le cadre du dossier des personnes disparues. Même si les progrès ont été lents jusqu’à présent, il a estimé que cela faisait partie des aspects essentiels sur lesquels les deux parties doivent continuer de travailler ensemble.
M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a déploré les incidents violents au cours desquels huit soldats de la KFOR ont été blessés alors qu’ils tentaient de démanteler un barrage routier. C’est pourquoi, il a invité les parties à travailler ensemble en vue de résoudre toutes les questions en suspens. Dans ce contexte, il s’est félicité de la réunion qui se tiendra demain entre les deux parties à Bruxelles. Dans cet « espace de convergence », il sera peut-être possible, a-t-il espéré, de trouver une issue positive aux motifs de divergence, comme cela a déjà été le cas pour la reconnaissance des diplômes universitaires. Le représentant a aussi exprimé ses inquiétudes quant aux allégations de trafic d’organes humains dans la région. Si la preuve de ce crime est établie, il faudrait poursuivre et traduire en justice ses auteurs. Dans ce contexte, l’enquête menée par l’Équipe spéciale de la Mission EULEX devrait contribuer à restaurer la confiance, a souhaité M. Osorio.
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a souligné l’évolution positive dans les relations douanières entre Belgrade et Pristina, notamment avec la reconnaissance par la Serbie des timbres de douane du Kosovo. Elle s’est ensuite dite très préoccupée par les heurts qui ont opposé ces derniers jours la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et les Serbes du Kosovo. « L’esprit de compromis doit guider toutes les parties », a-t-elle souligné, en ajoutant que la résolution 1244 du Conseil de sécurité était le cadre adéquat pour régler, de manière globale, la situation au Kosovo. Concernant les allégations de trafic d’organes contenues dans le rapport de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, la représentante a « pris note » de l’enquête en cours de la Mission « État de droit » de l’Union européenne (EULEX). « Nous devons réaffirmer notre appui au dialogue entre les parties afin qu’elles soient convaincues des bénéfices de ce dialogue », a-t-elle dit en conclusion.
M. ALFRED MOUNGARA MOUSSOTSI (Gabon) a souligné que les tensions frontalières survenues en juillet dernier avaient fortement contribué à détériorer la situation en matière de sécurité dans le nord du Kosovo. Ces événements constituent, a-t-il dit, « un frein dans la poursuite du dialogue politique ». Le représentant a regretté l’incident qui s’était produit hier au cours duquel deux soldats de la KFOR avaient été blessés par balles. M. Moussotsi a invité toutes les parties à « faire preuve de retenue et à rechercher le dialogue pour résoudre les questions d’intérêt commun ». Il a ensuite félicité les organisations internationales qui œuvrent sur le terrain pour garantir la paix et la sécurité au Kosovo, avant de saluer la reprise des discussions entre le Kosovo et la Serbie, le 21 novembre dernier à Bruxelles. Il a souhaité, à cet égard, que la nouvelle session des négociations se poursuive et aboutisse à un accord inclusif, crédible et durable. Le représentant a rappelé que « le règlement de la question du Kosovo incombe au premier chef aux parties elles-mêmes ». Sa délégation, a-t-il indiqué, exhorte Belgrade et Pristina à agir de concert, d’une part, pour instaurer la paix et la stabilité de manière durable et, d’autre part, pour réaliser les perspectives européennes qui s’offrent à elles. La communauté internationale doit, quant à elle, continuer d’apporter un appui financier à la protection du patrimoine culturel et religieux, aux activités du Groupe de travail sur les personnes disparues, ainsi que pour la facilitation du retour de ces disparues.
M. MIRSADA ČOLAKOVIC (Bosnie-Herzégovine) s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation en matière de sécurité dans le nord du Kosovo, qui a elle-même entraîné une détérioration des relations entre les différentes communautés ethniques dans l’ensemble du Kosovo. Compte tenu de ces circonstances, il est nécessaire de maintenir le dialogue entre les parties pour parvenir à une solution mutuellement acceptable sur toutes les questions en suspens au Kosovo, a-t-il souligné. L’état de droit est crucial pour réaliser des progrès sur les questions en suspens et assurer la stabilité dans les Balkans, a-t-il précisé, en mettant l’accent sur le rôle essentiel de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) pour améliorer le dialogue intercommunautaire et promouvoir la confiance entre les parties. À cet égard, le problème des personnes disparues demeure un immense défi pour la réconciliation entre les communautés, a-t-il rappelé, en saluant la reprise des activités du Groupe de travail Belgrade-Pristina sur les personnes disparues. M. Čolaković a noté par ailleurs que le nombre de retours volontaires restait faible, en raison de difficultés économiques et sociales, de difficultés de réinsertion des personnes qui sont retournées au Kosovo et des problèmes de sécurité. La stabilité et la sécurité au Kosovo sont essentielles pour parvenir à une paix durable et à la prospérité dans notre région, a prévenu le représentant.
M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) a condamné les violences de ces derniers jours au Kosovo qui, a-t-il précisé, ont fait des blessés parmi le contingent portugais de la KFOR. Le représentant a lancé un appel aux parties concernées pour faire preuve de retenue. « Le renforcement du dialogue constitue le seul moyen de résoudre les questions en suspens », a assuré le représentant, qui s’est ainsi félicité de la reprise du dialogue entre Pristina et Belgrade. Évoquant le mandat de la MINUK, il a estimé que la Mission devrait assurer la protection des lieux de culte au Kosovo et à la liberté des pratiques confessionnelles, élément déterminant d’une démocratie moderne. La délégation portugaise s’est ensuite félicitée des travaux menés jusqu’à présent par l’Équipe spéciale de la Mission EULEX concernant les allégations de traite humaine et de trafic illicite d’organes au Kosovo. M. Moraes Cabral a prévenu des risques que présente l’arrivée de l’hiver, saison particulièrement rigoureuse au Kosovo.
Reprenant la parole, le représentant de la Serbie a précisé que les seules structures parallèles en place dans le nord du Kosovo ne servaient qu’à assurer l’ordre public. « La question au cœur de nos débats est l’absence de confiance, notamment vis-à-vis des institutions serbes du Kosovo », a-t-il ensuite affirmé, en rappelant qu’avant 1999, les Albanais ne faisaient pas confiance aux institutions de la Serbie. « Aujourd’hui, les Serbes du Kosovo n’ont aucune confiance dans les institutions de Pristina », a-t-il déclaré, en rappelant que le Plan Ahtisaari n’était pas conforme à la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité et n’avait pas obtenu l’appui du Conseil. Il a ajouté que le fait de prélever des organes sur des personnes tuées en période de conflit constituait un crime de guerre et ne relevait pas de la criminalité organisée. « Ces crimes de guerre ne doivent pas être tenus au secret de la communauté internationale », a-t-il insisté avant de conclure.
À son tour, M. HOXHAJ, qui intervenait au nom du Kosovo, a déclaré que la sécurité et la stabilité au Kosovo resterait difficiles à préserver tant que des structures de sécurité parallèles serbes y seront présentes. Il est donc temps pour la Serbie de démanteler ces structures et de résoudre les questions en suspens, comme cela a déjà été le cas des timbres de douane, a-t-il insisté. M. Hoxhaj a estimé que la présence de barricades au Kosovo semblait montrer le peu d’intérêt que la Serbie manifeste pour son intégration éventuelle à l’Union européenne.
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