LA SIXIÈME COMMISSION EXAMINE LA QUESTION DE LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DES FONCTIONNAIRES ET DES EXPERTS EN MISSION DE L’ONU
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Sixième Commission
5e séance - matin
LA SIXIÈME COMMISSION EXAMINE LA QUESTION DE LA RESPONSABILITÉ PÉNALE DES FONCTIONNAIRES ET DES EXPERTS EN MISSION DE L’ONU
Estimant qu’il est encore prématuré d’élaborer un projet de convention sur la question, les délégations explorent les moyens de combler le vide juridique existant
La lutte contre l’impunité du personnel de l’ONU est primordiale, tant du point de vue des victimes que de l’image des Nations Unies à travers le monde, ont reconnu les délégations de la Sixième Commission (chargée des questions juridiques) lors du débat consacré ce matin à la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU. Réitérant leur détermination à appliquer une politique de tolérance zéro à l’égard du personnel de l’ONU coupable d’abus sexuels, elles restent toutefois divisées sur l’adoption d’un éventuel projet de convention.
Dans leurs déclarations, les représentants d’Israël, de la France ou de l’Australie ont tous fait part de leur conviction que l’existence de « vide juridique » en matière de responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU risquait « d’encourager » l’impunité et de profiter aux criminels. Mais de nombreuses délégations, parmi lesquelles la Malaisie, le Nigéria ou l’Égypte, dont les contingents participent activement aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, ont expliqué que leurs législations nationales permettaient de poursuivre les auteurs, civils ou militaires, d’infractions graves commises à l’extérieur de leur pays d’origine. Ces délégations ont, à l’instar du représentant iranien, encouragé les États Membres à « exercer leurs compétences nationales » et à renforcer leur coopération avec les États hôtes, en s’appuyant sur la résolution 62/63, adoptée l’année dernière par l’Assemblée générale. Le représentant du Soudan s’est dit convaincu que les mesures contenues dans cette résolution « pavaient la voie » à un projet de convention sur la question.
Le représentant de la Suisse a cependant estimé que si cette résolution représentait bien une « première étape », certains États ne disposaient pas, au niveau national, de « base juridique » suffisante pour la mettre en œuvre, jugeant que la possibilité de poursuites contre leurs propres ressortissants par ces pays restait elle-même « lacunaire ». Devant ces difficultés, plusieurs délégations ont proposé de remettre à plus tard les discussions sur le projet de convention. Le représentant du Liechtenstein a offert une solution de compromis, en suggérant que la future convention « se concentre uniquement sur la question de la coopération, sans aborder celle des différents systèmes juridiques ».
Certaines délégations ont, à l’instar du Guatemala, fait remarquer que les débats avaient fréquemment mis l’accent sur la question des actes d’exploitation et abus sexuels commis par le personnel de l’ONU, et demandé à la Sixième Commission de ne pas perdre de vue les sanctions à apporter à d’autres types d’infractions comme la corruption, le blanchiment des capitaux ou « le trafic de drogues et de matières précieuses », selon les mots du représentant de la République démocratique du Congo.
Les délégations suivantes ont pris la parole au cours de ce débat: Mexique, Australie, Cuba, France, Kenya, Trinité-et-Tobago, Liechtenstein, Suisse, Soudan, Nigéria, Uruguay, Algérie, République démocratique du Congo, Tunisie, Guatemala, Indonésie, Chine, Israël, Égypte, République islamique d’Iran, Inde, Fédération de Russie, Norvège, Venezuela, Canada et États-Unis.
La Sixième Commission poursuivra l’examen de la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’ONU lundi, 13 octobre à 11 heures. Elle examinera ensuite la question de l’état de droit aux niveaux national et international.
RESPONSABILITÉ PÉNALE DES FONCTIONNAIRES ET DES EXPERTS EN MISSION DES NATIONS UNIES
Déclarations
Mme MARIA TELALIAN (Grèce), Présidente du Comité spécial, a tout d’abord présenté le rapport du Comité en expliquant que ce document contenait quatre chapitres et deux annexes et a rappelé que le Comité spécial avait été saisi du rapport du Groupe d’experts juridiques, rédigé suite aux allégations d’exploitation et d’abus sexuels dans les opérations de maintien de la paix. Le Groupe de travail, a-t-elle poursuivi, a concentré ses discussions sur les questions relatives aux aspects juridiques de la coopération internationale, et plus particulièrement sur les enquêtes dans le pays hôte, les autres États et les Nations Unies et sur les réformes juridiques à mettre en place dans ce domaine.
Le Comité spécial, a-t-elle ajouté, s’est aussi attaché aux questions relatives à la collecte des preuves, la conduite des enquêtes sur le terrain, les enquêtes administratives au niveau de l’ONU, le rôle des experts, y compris les procureurs et avocats militaires, à l’admissibilité des preuves ou encore le transfert des prisonniers. Mme Telalian a par ailleurs souligné qu’elle avait présenté un document de travail sur le renforcement de la coopération internationale dans ce domaine, destiné à identifier les questions spécifiques qui nécessitent une plus grande coopération entre États Membres, propositions dont les recommandations figurent elles-mêmes, a-t-elle indiqué, en annexes du rapport du Comité spécial.
M. ALEJANDRO ALDAY (Mexique), s’exprimant au nom du Groupe de Rio, a déclaré que ce Groupe était favorable à une politique de tolérance zéro à l’égard des abus sexuels du personnel de l’ONU et des experts en mission. Il a également souhaité que l’ONU prenne les mesures nécessaires pour combattre l’impunité. Il est important de penser aux dommages causés aux victimes, ainsi qu’à la réputation de l’Organisation des Nations Unies, a-t-il dit.
M. Alday a souligné que la résolution 62/63 de l’Assemblée générale envoyait un « signal clair » aux États Membres qui estimaient que cette question « complexe » posait de réels problèmes du point de vue des poursuites judiciaires. L’Assemblée générale, a-t-il expliqué, ne doit pas relâcher ses efforts en la matière. M. Alday a par ailleurs rappelé qu’il était essentiel de fournir des informations, notamment des statistiques précises, sur les allégations d’abus sexuels commis par des membres du personnel de l’Organisation des Nations Unies, de manière à mieux les punir et définir des normes de conduite claires à cet égard. Le rapport du Secrétaire général, qui évoque la question des immunités et privilèges, est utile sur ce point, a-t-il déclaré.
M. Alday a indiqué, enfin, que le Groupe de Rio continuait de penser que si la coopération entre États devait être améliorée dans le domaine de la lutte contre l’impunité, d’autres domaines méritaient également une attention soutenue, comme la question des enquêtes sur le terrain, les enquêtes pendant les poursuites pénales et la fourniture de preuves.
M. KERRY O’BRIEN (Australie), s’exprimant également au nom du Canada et de la Nouvelle-Zélande (Groupe CANZ), a déclaré que les discussions en cours sur la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en missionde l’Organisation des Nations Unies étaient conformes à l’idée que l’on se faisait de l’Organisation des Nations Unies et, à l’esprit des principes énoncés par sa Charte. De l’avis du représentant, l’Organisation devrait servir d’exemple en matière de respect du principe de l’état de droit.
Poursuivant son propos, le représentant a estimé que la résolution 62/63, adoptée par l’Assemblée générale le 6 décembre 2007, qui encourageait les États Membres à exercer leur compétence pour les infractions graves commises par leurs ressortissants employés par les Nations Unies, marque une étape importante. Il reste cependant beaucoup à faire, a-t-il dit. C’est pourquoi, sa délégation appelle au renforcement de la coopération entre les États, entre ceux-ci et les Nations Unies, et au sein même des Nations Unies. Le représentant a aussi appelé à veiller à ce que les lacunes juridiques qui existent ne puissent profiter à certains criminels. M. O’Brien a soutenu l’idée d’élaborer une convention internationale qui permettrait aux États de mieux exercer leur juridiction à l’égard de leurs ressortissants présumés responsables de tels actes.
S’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, Mme JUANA ELENA RAMOS RODRÍGUEZ (Cuba) a indiqué que la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU était d’une grande importance pour les pays non alignés, qui contribuent à hauteur de 80% au personnel de maintien de la paix à travers le monde. Ce personnel doit faire preuve d’une attitude qui fasse honneur à la réputation de l’ONU dans les pays où elle est présente, a déclaré Mme Ramos Rodríguez, en faisant part de la volonté du Mouvement des pays non alignés de contribuer, pour autant qu’il soit possible, au travail du Comité spécial en ce sens. Elle s’est félicitée de l’existence, sur le papier, d’une stratégie en matière d’assistance aux victimes d’abus sexuels et a dit espérer qu’elle serait bientôt mise en pratique.
La représentante s’est en outre dite favorable à la mise en œuvre de la résolution 62/63 de l’Assemblée générale afin de combler le vide juridique en matière de responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU; et à une évaluation, en vue d’établir si d’autres mesures devraient être prises dans ce sens par l’Assemblée générale. Elle a indiqué que les pays non alignés considéraient néanmoins qu’il était encore prématuré de discuter de l’éventualité d’un projet de convention sur la question.
M. HUBERT RENIÉ (France), qui s’est exprimé au nom de l’Union européenne, a indiqué qu’il était crucial que toute personne participant à une opération de l’ONU et qui commet une infraction grave voie sa responsabilité légale engagée pour un tel acte. Il en va, a-t-il expliqué, de la réputation et de la crédibilité de l’ONU. Il est important, dès lors, de surmonter les obstacles afin que le statut particulier des fonctionnaires et experts en mission ne soit pas détourné, en particulier dans les situations où l’État hôte n’est pas en mesure d’engager des poursuites, a poursuivi M. Renié, et ce, tout en respectant les principes de l’état de droit, des droits de la défense et des droits de l’homme.
L’Union européenne, a indiqué M. Renié, soutient l’approche retenue jusqu’à présent, qui, a-t-il précisé, prévoit à la fois des mesures à long terme et à court terme. Il a ainsi jugé « significative » la résolution adoptée par l’Assemblée générale en décembre 2007, laquelle encourage les États à établir leur compétence pénale à l’égard de leurs nationaux qui participent à des opérations des Nations Unies. L’Union européenne juge par ailleurs « intéressantes » les propositions sur le renforcement de la coopération, faites par la Présidente du Comité spécial, Mme Maria Telalian. M. Rénié a affirmé que l’Union européenne restait prête à étudier la proposition d’élaborer une convention internationale qui permettrait de recenser clairement les circonstances dans lesquelles les États Membres peuvent exercer leur compétence, ainsi que les catégories de personnels et les types d’infractions qui seraient couverts par cet instrument.
Mme STELLA KERUBO ORINA (Kenya), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé que les États africains figuraient parmi les grands bénéficiaires des opérations de maintien de la paix, et qu’ils accueillaient plusieurs fonctionnaires et experts en mission. Tout en remerciant ces personnels pour leur dévouement, elle a soutenu que leur travail et l’image de l’Organisation ne devraient pas être ternis par les infractions commises par une minorité d’entre eux. Elle a ensuite fait part de l’intérêt de son groupe pour les formations qui sont offertes aux personnels des Nations Unies avant leur déploiement sur le terrain, et a appelé au renforcement de cette approche. La représentante a rappelé que la résolution 62/63 du 6 décembre 2007 constituait une étape importante dans les efforts visant à mettre fin à l’impunité de tels actes, indiquant que le Groupe des États d’Afrique se félicitait des progrès accomplis depuis son adoption.
La représentante a estimé qu’il était possible de combler le vide juridique en la matière et que la résolution de l’Assemblée générale offrait les bases d’une possible extension du champ de compétences des juridictions nationales. Elle a par ailleurs déclaré que son groupe était prêt à discuter des différents aspects de la mise en œuvre de cette résolution et de la coopération internationale concernant la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU.
M. EDEN CHARLES (Trinité-et-Tobago), qui s’exprimait au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a considéré que tous ceux qui commettent des infractions graves tant au niveau national qu’au niveau international, doivent être poursuivis. Il a félicité la Sixième Commission et le Comité spécial pour leurs efforts en vue de mettre en place une politique de tolérance zéro en ce qui concerne les infractions graves commises par des membres du personnel de l’ONU, des experts sur le terrain, ainsi que le personnel des opérations de maintien de la paix. Les auteurs de ces infractions graves doivent être tenus responsables de leurs actes, dans le respect des principes de procédure acceptés de façon universelle, en particulier le respect des droits de la défense. Cela doit permettre de reprendre confiance dans le système de l’ONU, a assuré M. Charles. Rappelant le vide juridique qui existe dans le cas où le pays hôte est dans l’impossibilité de poursuivre un suspect ou si l’État d’origine de cette personne n’étend pas sa compétence juridictionnelle à des infractions graves commises en dehors de ses frontières, M. Charles a invité tous les États à étendre cette compétence aux infractions graves les plus graves commises par leurs ressortissants au service des Nations Unies. De l’avis de M. Charles, il est urgent de pouvoir disposer de règles juridiques communes acceptées par les États Membres quelles que soient leurs législations nationales. C’est pourquoi, la CARICOM soutient l’élaboration d’une convention générale qui traiterait non seulement de l’exploitation sexuelle, mais aussi de toutes les infractions graves perpétrées par le personnel de l’ONU.
Mme CHRISTINE MÖHLER (Liechtenstein) a déclaré que les comportements criminels de membres du personnel de maintien de la paix avaient de graves conséquences non seulement pour les victimes et leurs familles mais aussi pour l’ONU. Elle a souligné l’importance de renforcer la coopération entre les États Membres et l’ONU dans le domaine de l’échange d’informations et en matière d’extradition afin d’empêcher les responsables de ces actes d’échapper à la justice. Elle a invité la Sixième Commission à se concentrer sur la coopération juridique, notant cependant que peu de législations nationales contenaient des dispositions relatives à la coopération avec l’ONU en matière judiciaire. « Alors que nous avons par le passé appuyé l’élaboration d’une convention sur la base du projet de document présenté par le Groupe des experts, nous n’excluons pas qu’une telle convention se concentre uniquement sur la question de la coopération, sans aborder celle des différences juridiques », a-t-elle dit. Elle a noté que même les pays de « common law » pouvaient, dans certains cas, être confrontés à des insuffisances juridictionnelles pour faire face à des infractions graves commises par leurs ressortissants en mission avec l’ONU. C’est pourquoi, elle a estimé que si la Sixième Commission était amenée à élaborer une convention, cet instrument devrait être axé sur la coopération internationale et être assorti d’une loi type définissant la compétence.
M. EMMANUEL BICHET (Suisse) s’est déclaré profondément attaché à la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’Organisation des Nations Unies. Il a soutenu qu’il était du devoir des États Membres des Nations Unies et du Secrétaire général de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir les infractions graves et de s’assurer que celles qui ont été commises ne restent pas impunies. Il a en outre estimé que la résolution de l’Assemblée générale 62/63 du 6 décembre 2007 constituait le premier pas vers la réalisation de cet objectif car elle incitait les États à adapter, si nécessaire, leur législation. Ceci doit permettre à leurs tribunaux, a-t-il précisé, de juger des citoyens ayant commis des infractions graves à l’étranger, alors qu’ils étaient employés par l’ONU, si le pays hôte n’est pas en mesure de les poursuivre. Cette première étape, a t-il dit, demeure néanmoins insuffisante.
Selon M. Bichet, cette insuffisance réside dans le fait que certains États disposent encore d’une « base légale lacunaire pour juger leurs ressortissants ». En outre, les conditions et les circonstances qui permettent aux tribunaux de juger des citoyens ayant commis des infractions graves à l’étranger varient considérablement d’un pays à l’autre. C’est pourquoi la Suisse, a indiqué son représentant, est convaincue que l’élaboration d’une convention internationale est le moyen le plus approprié pour résoudre efficacement et durablement ce problème. Cet instrument, a-t-il poursuivi, aura pour avantage de combler les lacunes constatées en matière juridictionnelle et faciliter la coopération entre États qui est cruciale dans ce domaine.
M. YASIR A. ABDELSALAM (Soudan) a rappelé le rôle joué par les opérations de maintien de la paix à travers le monde, en particulier dans les pays frappés par la guerre. Il a expliqué que pour son pays, même si les « actes isolés » de certains n’entachaient pas la crédibilité du plus grand nombre, il était nécessaire d’agir dans les cas où il existait une « faille » concernant la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’ONU qui commettent des infractions graves. Les mesures déjà mises en œuvre « pavent la voie » à une convention, a estimé le représentant du Soudan, notant que cet instrument pourrait permettre, à terme, de combler d’importantes lacunes en matière de poursuites judiciaires. Le représentant a indiqué que, dans l’hypothèse où une convention sur la question serait élaborée, sa délégation est favorable à l’idée de reconnaître en premier lieu la compétence du pays hôte. L’hypothèse selon laquelle l’État hôte pourrait, dans certains cas, être dans l’incapacité d’exercer sa compétence n’est pas valide, a estimé le représentant du Soudan.
S’agissant de la compétence personnelle, le représentant a fait remarquer qu’il ne faudrait pas non plus établir de distinction entre les différentes catégories d’employés des Nations Unies. Il a souligné aussi qu’il existait d’autres infractions graves que l’exploitation et les abus sexuels, et que la Sixième Commission devrait tenir compte de ces questions pendant les négociations qui pourraient conduire à l’adoption éventuelle d’une convention.
Mme IFEYINWA ANGELA NWORGU (Nigéria) s’est félicitée de l’échange d’informations concernant les mesures prises par les États Membres et l’ONU en matière de responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU, en particulier s’agissant de l’étendue des juridictions nationales sur les infractions les plus graves commises par les ressortissants de ces pays alors qu’ils sont employés par les Nations Unies, et a jugé cet échange essentiel.
La représentante a expliqué que les membres du personnel des Forces armées du Nigéria, qui servent dans les missions de maintien de la paix de l’ONU ou en tant qu’experts en mission, étaient soumis à une « discipline militaire » mise en place dans le cadre d’une loi de 2003 sur les Forces armées nigérianes. Grâce à la consolidation de lois qui remontaient aux années 1960, la législation nationale s’appliquant à ce personnel a un effet extraterritorial qui permet de s’assurer que les forces armées engagées hors du territoire nigérian soient responsables des actes commis par leurs membres, a ajouté Mme Nworgu. Les autorités nigérianes coopèrent aussi, par l’intermédiaire d’accords bilatéraux, avec toutes les juridictions et avec les Nations Unies lorsqu’il s’agit d’enquêter sur les infractions les plus graves. Ces mesures soulignent l’importance que le Nigéria attache à la coopération et à la politique de tolérance zéro en matière de responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU, a conclu Mme Nworgu.
M. GUSTAVO ÁLVAREZ (Uruguay) a souligné que la réponse au problème de la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU n’en était qu’à ses balbutiements et que le Groupe de travail créé par la Sixième Commission avait encore une tâche importante à accomplir pour aboutir à ses objectifs. L’Uruguay, a-t-il déclaré, réaffirme son appui à la politique de tolérance zéro: les actes d’abus sexuels et autres infractions graves commis par les fonctionnaires de l’ONU et experts en mission doivent être sanctionnés pour que la réputation de l’Organisation ne soit pas entachée. Il est important, cependant, de tenir compte des cas particuliers, a estimé le représentant, comme par exemple ceux des forces de police envoyées par l’État d’origine et payées par cet État, auprès duquel le personnel s’engage aux termes d’un contrat. Ces fonctionnaires, a spécifié le délégué, restent liés à l’État d’origine et à ses juridictions, notamment lorsqu’il s’agit des mesures disciplinaires à prendre à leur encontre. Il serait ainsi possible, a souligné le représentant de l’Uruguay, d’incorporer la question des poursuites pénales éventuelles en cas d’abus sexuels dans le contrat signé avec le pays d’origine par l’expert en mission ou le fonctionnaire détaché par ce pays.
Le délégué uruguayen a aussi noté qu’il serait nécessaire d’étudier davantage la question de la compétence personnelle dans le cadre de l’extradition, et a affirmé que s’agissant des enquêtes à mener dans le cas d’infractions graves commises par un fonctionnaire de l’Organisation des Nations Unies. Il serait judicieux de proposer, dans certains cas, la désignation d’un juriste national, qui pourrait informer l’équipe d’enquête sur la législation pertinente en vigueur de l’État concerné.
EL HADJ LAMINE (Algérie) a rappelé les conditions difficiles dans lesquelles travaillent les fonctionnaires des Nations Unies et les experts en mission qui contribuent aux opérations de maintien de la paix et a estimé qu’ils méritaient la gratitude des États Membres. Cependant, a-t-il poursuivi, ceci ne saurait les exempter de leur responsabilité quant à leur conduite vis-à-vis de l’Organisation des Nations Unies et surtout vis-à-vis des populations locales. Il a saisi cette occasion pour réitérer le soutien de son pays au principe de tolérance zéro face à la conduite inappropriée des fonctionnaires et des experts en mission, dans l’exercice des responsabilités qui leur sont assignées.
Le représentant a par ailleurs affirmé qu’il n’y avait pas de vide juridique dans la législation de son pays, et a cité en exemple le Code de procédure pénale algérien, notamment son article 582 qui stipule que « tout fait qualifié de crime, puni par la loi algérienne, commis hors du territoire de la République par un Algérien, peut être poursuivi et jugé en Algérie ». La Sixième Commission se doit de poursuivre, au cours de cette session, l’examen des autres aspects contenus dans le rapport du Groupe de travail afin de pouvoir statuer sur les aspects relatifs, entre autres, à la coopération, l’entraide judiciaire, la recevabilité devant les instances judiciaires nationales des preuves du Bureau des services de contrôle interne de l’ONU et le champ d’application. Ce dernier pourrait être limité aux situations de conflit et postconflit, a suggéré le représentant. Il est ensuite revenu sur la question de la nécessité ou non de conclure une convention internationale sur la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’Organisation des Nations Unies. L’Algérie, a dit son représentant, réitère sa flexibilité sur cet aspect, tout en estimant qu’il serait plus pertinent de porter un intérêt à l’idée d’une convention internationale en matière d’extradition pour les infractions graves commises par les fonctionnaires des Nations Unies et les experts en mission.
M. ZÉNON MUKONGO NGAY (République démocratique du Congo) a souligné combien les abus sexuels dont s’étaient rendus responsables les employés de l’ONU avaient entaché la réputation de l’Organisation, et a indiqué qu’en dépit « d’une certaine rhétorique de la responsabilité et de la punition », l’État hôte était souvent « désarmé » par les accords de siège et dépourvu de toute marge de manœuvre. Les Nations Unies ne pouvant elles-mêmes sévir, les suspects sont souvent renvoyés dans leur pays d’origine, qui hésite souvent, a expliqué M. Ngay, à traduire en justice les auteurs de ces infractions graves, notamment lorsqu’il s’agit de militaires. Il a regretté que malgré la mobilisation suscitée par l’inscription de ce point à l’ordre du jour de l’Assemblée générale, l’on considère comme « prématuré » de s’engager sur la voie d’une convention internationale sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU, option qui, de l’avis de la délégation congolaise, « ne manque pas de mérites », puisqu’elle permettra aux États Membres, si elle est adoptée, d’établir leur compétence sur les infractions commises sur le territoire de l’État hôte, et combler le vide juridique existant dans ce domaine. « Le renvoi aux calendes grecques » d’une telle convention n’est donc pas une option, a affirmé M. Ngay.
S’agissant de la compétence rationae personae et de l’exclusion des forces militaires et de police du champ d’application de cette compétence, le délégué congolais a fait part d’une double interrogation, en se demandant si cette décision ne risquait pas d’une part, de compromettre l’effort de protection des victimes et d’autre part, d’encourager la politique des « deux poids deux mesures » en matière de responsabilité. S’agissant de la compétence rationae materiae, il a souligné que sa délégation estimait, comme d’autres, que son champ d’application ne devrait pas se limiter aux seules infractions liées à l’exploitation sexuelle, en suggérant qu’il faudrait aussi tenir compte d’infractions telles que le trafic de drogue et celui de matières précieuses.
M. HABIB MANSOUR (Tunisie) a déclaré que son pays accordait une grande importance à la nécessité de préserver l’image, la crédibilité et l’intégrité de l’Organisation des Nations Unies. Il a réaffirmé son appui à la politique de tolérance zéro à l’encontre de tous les actes d’abus et d’exploitation sexuels et autres infractions graves qui seraient perpétrés par les fonctionnaires de l’ONU et les experts en mission. À ce sujet, il a estimé que les États Membres avaient un important rôle à jouer pour lutter contre toute impunité éventuelle de leurs nationaux, notamment en étendant leur compétence aux infractions graves commises par leurs ressortissants employés par l’ONU. Il a ensuite déclaré qu’en ce qui concernait son pays, la compétence pénale s’étendait à toute infraction commise par ses nationaux hors de son territoire, y compris dans le cadre de missions de l’ONU.
Le délégué a ensuite souligné la nécessité de l’entraide judiciaire en matière pénale. Dans ce cadre, il a indiqué que l’élaboration d’une convention internationale pour la lutte contre l’impunité des actes considérés demeurait pour la Tunisie une option à long terme. Son pays, a-t-il poursuivi, se prononce en faveur d’un champ de compétence rationae materiae qui ne soit pas restreint aux infractions d’exploitation et d’abus sexuels, mais qui s’étendrait aux infractions contre la vie, la sûreté ou l’intégrité de la personne. S’agissant du champ de compétence rationae personae, la Tunisie estime que celui-ci devrait couvrir le personnel des différents programmes et des institutions spécialisées, à l’exception des observateurs militaires et des unités de police employés par l’ONU dans le cadre des opérations de maintien de la paix en qualité d’experts en mission.
Mme ANA CRISTINA RODRÍGUEZ-PINEDA (Guatemala) a déclaré que, de l’avis de sa délégation, la priorité, en matière de responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU, devrait être donnée à la mise en œuvre de la résolution 62/63 de l’Assemblée générale. Elle a toutefois insisté sur le fait que la stratégie proposée par la Présidente du Comité spécial, en avril 2008, devrait être examinée de manière approfondie par tous les États Membres. La coopération est décisive, a affirmé la représentante du Guatemala, notamment parce qu’elle permet de notifier les différentes parties afin que des mesures diplomatiques et des poursuites judiciaires soient engagées le plus rapidement possible en cas d’infractions graves. Une notification adressée rapidement aux parties permettra d’assurer une meilleure coopération, ainsi qu’un meilleur suivi des plaintes, a-t-elle poursuivi. Elle a noté que dans la mesure où les infractions sont, par nature, commises sur le terrain, il faudrait une meilleure coordination au niveau du Secrétariat et des résultats concrets sur le terrain pour convaincre les populations de la fermeté des sanctions appliquées.
La représentante a souligné également qu’il ne faudrait pas non plus se limiter à l’exploitation et aux abus sexuels mais envisager plutôt un large éventail d’infractions. Ainsi, les délégations ne doivent pas, en concentrant leur attention sur les infractions sexuelles, perdre de vue la sanction à apporter aux autres infractions, a-t-elle insisté. Sa délégation, a-t-elle ajouté, souhaite avoir plus d’informations sur le type de sanctions appliquées contre les intéressés après la levée de l’immunité les concernant.
M. HERY M. SARIPUDIN (Indonésie) a jugé important que les membres du personnel ou experts de l’ONU présumés responsables d’infractions graves soient poursuivis en justice. Il faudrait également que la procédure soit connue de tous afin de préserver l’image de l’Organisation. Les États Membres doivent donc étendre la compétence de leurs tribunaux aux infractions graves commises par leurs ressortissants travaillant pour les missions des Nations Unies comme cadres ou experts. En tant que pays fournisseur de contingents pour les opérations de maintien de la paix, l’Indonésie a toujours souligné l’importance de définir des critères précis sur le comportement des Casques bleus, a indiqué le représentant. Il ne doit pas y avoir de contradiction entre la paix que l’ONU est censée apporter et les abus que commet son personnel. Il est donc essentiel de pratiquer la politique de tolérance zéro, a ajouté M. Natalegawa, qui a aussi souligné l’importance de la formation et de la sensibilisation avant même le déploiement de troupes. À cet égard, il a exprimé son appréciation pour les efforts déployés par le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) et le Département d’appui aux missions. Faisant référence à l’idée d’élaborer une convention internationale sur la question, le représentant a souhaité que le champ d’application d’un tel instrument soit examiné de manière approfondie, notamment en ce qui concerne la catégorie de personnel provenant d’un contingent qui est déjà soumis à d’autres normes.
Mme CHEN PEIJIE (Chine) a déclaré que sa délégation était favorable à l’idée d’établir des sanctions à l’encontre des fonctionnaires de l’Organisation des Nations Unies et des experts en mission ayant commis des infractions graves. De telles mesures sont nécessaires pour protéger l’image, le prestige et la crédibilité des Nations Unies, a-t-elle dit. La Chine estime que, pour assurer le succès de la politique de tolérance zéro, il faudrait établir une coopération effective entre les Nations Unies, les pays de nationalité des personnes impliquées et les États d’accueil. Cette coopération entre ces trois acteurs, a estimé la représentante, devrait d’abord être centrée sur l’échange d’informations et la formation du personnel. La Chine souligne qu’il incombe en premier lieu à l’État hôte d’engager des enquêtes et poursuites judiciaires, avec l’assistance des Nations Unies. La représentante a ajouté qu’une coopération efficace permettrait de donner aux États et non à l’Organisation, le droit de décider, en fonction de leur législation nationale, de la recevabilité des preuves collectées par les structures des Nations Unies chargées des enquêtes.
La représentante a ensuite exposé les dispositions du droit pénal chinois relatives à la compétence nationale pour les infractions graves qui pourraient être commises par des fonctionnaires chinois de l’ONU ou experts en mission, citant à cet égard les articles 7 et 9 du Code de procédure pénale.
M. GIL LIMON (Israël) a noté que le vide juridique et l’incapacité des juridictions nationales étaient effectivement, de l’avis de sa délégation, des points faibles qui contribuaient à l’impunité des infractions graves commises par des fonctionnaires de l’ONU et experts en mission. L’impunité ne pourra être évitée, a-t-il expliqué, en l’absence d’un « processus de règlementation » visant à établir une coopération entre États, entre les États et les Nations Unies, et entre départements et unités des Nations Unies, en matière de procédure pénale. Sa délégation, a-t-il dit, estime que la résolution 62/63 de l’Assemblée générale représente toutefois un pas important, et c’est pourquoi elle appelle les États à étendre leur compétence sur les infractions commises par leurs ressortissants alors qu’ils sont employés par l’ONU.
M. Limon a indiqué que les diverses vues exprimées lors des réunions de la Sixième Commission et du Comité spécial concernant la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission de l’ONU étaient une « bonne base » pour progresser dans l’examen de la question. Il a souligné l’importance que revêtait la notification rapide des Nations unies et des autorités nationales sur les allégations de mauvaise conduite, afin d’accélérer le processus judiciaire, et s’est dit prêt, au nom de sa délégation, à poursuivre la discussion sur les « aspects pratiques et sans ambiguïté » de la coopération sur ce sujet.
Mme NAMIRA NABIL NEGM (Égypte) a soutenu les efforts de l’ONU pour sauvegarder son image et réaffirmé que la politique de tolérance zéro doit être menée dans les cas d’exploitation et d’abus sexuels commis par des membres du personnel des opérations de maintien de la paix. Elle a souligné l’importance de la sensibilisation de ce personnel aux normes de l’ONU en la matière. La représentante égyptienne a aussi mis en garde contre le risque de voir des plaintes déposées aux fins d’obtenir de façon inappropriée une réparation de la part de l’ONU, et a invité à bien étudier ces plaintes avant toute décision. L’Égypte se félicite de la résolution 62/63 de l’Assemblée générale sur la question de l’extension de la compétence juridictionnelle des pays d’origine sur les Casques bleus qui auraient commis de graves infractions alors qu’ils travaillaient pour les Nations Unies, afin de mettre réellement en pratique la politique de tolérance zéro.
Avant de se prononcer sur un nouvel instrument juridique international sur la question, l’Égypte souhaite étudier les éléments de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’ONU, a précisé la représentante. Il faudrait, a-t-elle souhaité, définir de manière précise la catégorie d’experts en mission, à l’exception des experts militaires qui relèvent d’un régime spécial. La représentante a enfin indiqué que les juridictions de son pays ont une large compétence rationae personae et que tout Égyptien ayant commis une infraction grave à l’étranger peut être poursuivi dès qu’il retourne sur le territoire égyptien.
M. ESHAG ALHABIB (République islamique d’Iran) a déclaré qu’il était essentiel pour l’Organisation des Nations Unies de mettre en place un « mécanisme viable » afin de tenir pour responsables les auteurs d’exploitation et abus sexuels ou autres infractions graves. Le représentant a indiqué à la Sixième Commission que les tribunaux iraniens pouvaient poursuivre tout auteur d’une infraction commise hors du territoire iranien, et ce, si l’auteur de l’infraction était appréhendé en Iran ou extradé vers ce pays. Le droit pénal iranien s’applique à tous les ressortissants iraniens, a expliqué le représentant, et les infractions commises par des Iraniens en mission à l’étranger, y compris par ceux qui bénéficient d’immunités, sont passibles de poursuites judiciaires. Le droit pénal iranien permet donc aux autorités compétentes de connaître les infractions graves commises par des Iraniens qui travaillent pour l’ONU, a insisté le représentant, notant qu’il était important de respecter la compétence exclusive de l’État d’origine à l’égard du personnel militaire.
Pour combler le vide juridique en la matière, il est important d’encourager les États Membres à exercer leur compétence nationale dans l’éventualité où ces États ne souhaiteraient pas extrader ces personnes, a indiqué le représentant. Cette question, a-t-il fait remarquer, est plus largement transversale et concerne aussi et de manière plus large, la réforme de l’ONU.
M. NIRUPAM SEN (Inde) s’est aligné sur la déclaration faite par Cuba, au nom du Mouvement des pays non alignés. Il a ensuite souligné que l’Inde attachait une grande importance à cette question et appuyait pleinement la politique de tolérance zéro. « Mon gouvernement est fermement déterminé à punir les auteurs d’infractions graves alors qu’ils étaient employés par l’ONUL », a-t-il déclaré. Le représentant a estimé qu’il était essentiel de s’assurer qu’en aucune circonstance, un fonctionnaire de l’Organisation des Nations Unies ou un de ses experts en mission, n’échappe à la sanction du fait de ses actes. La résolution 62/63 qui avait pour but de combler le vide juridique qui existe en la matière doit être mise en œuvre par les États qui ne l’ont pas encore fait, a-t-il insisté. Par ailleurs, il a encouragé les États à renforcer leur coopération en matière d’enquêtes, comme le prévoyait à juste titre, cette résolution. À cet égard, a-t-il dit, le Code de procédure pénale de l’Inde prévoit que les autorités compétentes établissent une coopération avec leurs homologues étrangers, notamment en matière d’extradition.
Le représentant de l’Inde s’est aussi félicité de ce que les Nations Unies offrent des formations au personnel du maintien de la paix avant son déploiement sur le terrain. Avant de conclure, il a indiqué que sa délégation se réjouissait de l’adoption de la Stratégie pour l’assistance et le soutien aux victimes d’actes d’exploitation et d’abus sexuels commis par des membres du personnel de maintien de la paix.
M. WIRA AHMAD HAMZAH (Malaisie) a indiqué que son pays accordait une grande importance aux privilèges et immunités accordés au personnel de l’ONU et a souligné que, même si ces privilèges et immunités n’étaient pas accordés à la légère, l’immunité en tant que telle restait « fonctionnelle », c’est-à-dire qu’elle concernait les actes commis « dans le cadre de leurs fonctions officielles ». Les crimes sexuels ne relèvent évidemment pas de telles fonctions, a expliqué M. Hamzah, qui a suggéré de prendre comme point de départ pour aboutir à un « mécanisme pratique » le rapport du Groupe d’experts présenté aux délégations. Le champ d’application, les catégories de personnels ou les questions de procédures sont aussi évoqués par le document de travail du Groupe d’experts, a-t-il noté, et peut constituer une base utile pour les délibérations de la Commission.
S’agissant du droit pénal applicable en Malaisie, M. Hamzah a rappelé que dans son pays, la compétence territoriale était généralement appliquée, même si, s’agissant des militaires, une exception à cette compétence existait pour les personnes qui se trouvaient à l’étranger. La Malaisie est prête à coopérer davantage avec les Nations Unies dans l’échange d’informations, conformément à la résolution 62/63. Cette coopération devra néanmoins se faire de manière « informelle », a précisé M. Hamzah, car la législation nationale ne prévoit pas d’assistance mutuelle, ou d’extradition, entre la Malaisie et les organisations internationales.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a estimé que les délégations devraient continuer à explorer les mesures, à long terme, concernant la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’ONU. Ces mesures doivent cependant respecter le statut juridique particulier des personnes concernées, dont l’immunité est inséparable de la fonction, a souligné le représentant. Pour rester efficaces, ces mesures dépendent aussi de la manière dont les Nations Unies avertissent de manière appropriée, et dans des délais rapides, les États concernés, comme l’indique le rapport du Secrétaire général (A/63/331).
Le représentant s’est, lui aussi, interrogé sur la possibilité d’élaborer à ce stade une convention internationale dans le but de combler le vide juridique existant. Il a en outre réitéré la position de sa délégation concernant les experts militaires qui, a-t-il rappelé, ne font pas partie des contingents nationaux d’opérations de maintien de la paix. Cette catégorie, en raison de son régime spécial, a-t-il estimé, doit être exclue du champ d’application d’une éventuelle convention.
M. ASMUND ERIKSEN (Norvège) a rappelé que « les infractions graves ne peuvent rester impunies ». L’expérience montre, a-t-il poursuivi, que l’impunité peut être source de colère, de suspicion et de manque de confiance. Pour s’acquitter avec succès de son mandat, l’Organisation des Nations Unies doit éviter d’être perçue comme étant complaisante. Pour cela, a-t-il déclaré, il est vital d’examiner les solutions proposées concernant l’accès à la justice, notamment pour les victimes d’infractions graves, dans un esprit de confiance.
Le représentant a soutenu que la politique de tolérance zéro était un élément de la politique de gestion de l’Organisation des Nations Unies. Pour assurer le succès de la mise en œuvre de cette politique, il a appelé à l’adoption de mesures à court et à long termes. Sur ce point, le représentant a d’abord estimé que la résolution de l’Assemblée générale laissait encore la possibilité de procéder à des améliorations visant à étendre la compétence juridictionnelle des États sur leurs ressortissants ayant commis des infractions graves, en tant qu’employés des Nations Unies. Le représentant a ajouté que pour atteindre cet objectif, son pays restait convaincu qu’il faudrait renforcer la coopération entre les États Membres et entre ceux-ci et l’ONU. De l’avis de sa délégation, une coopération efficace, axée notamment sur l’échange d’informations, ne réussira que si elle est clairement définie dans un instrument juridique contraignant.
Mme GLENNA CABELLO DE DABOIN (Venezuela) a indiqué que son pays était favorable à la mise en place de mécanismes de sanctions contre ceux qui abusent des personnes vulnérables, comme les réfugiés ou les personnes qui sont dans des camps de déplacés, administrés par les Nations Unies. Elle a jugé qu’il était prématuré de négocier une convention internationale si les obstacles au niveau des législations nationales n’étaient pas analysés dans le détail. Elle s’est dite convaincue que la dynamique insufflée par l’Assemblée générale devrait dès lors, et pour l’heure, être préférée à tout autre processus.
M. KEITH MORRILL (Canada) a fait observer que la définition des infractions graves visées par le document élaboré par le Groupe de travail de la Sixième Commission fait mention de « toutes les infractions graves », y compris le crime de corruption. Rappelant que la plupart des États Membres sont parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption, le Canada encourage ces États à examiner, par analogie, le travail réalisé dans le cadre de cette Convention et les travaux de la Sixième Commission sur la responsabilité des fonctionnaires et des experts en mission de l’ONU.
M. JAMES DONOVAN (États-Unis) s’est félicité des efforts réalisés par l’ONU pour traiter des questions liées à la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’Organisation des Nations Unies. Il a indiqué que son pays avait pris note des mesures exécutées par plusieurs États Membres en matière d’extradition à l’égard des personnes qui se sont rendues coupables d’infractions graves dans le cadre des fonctions qu’elles exerçaient pour l’Organisation.
Documentation
Rapport du Comité spécial sur la question de la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’Organisation des Nations Unies sur les travaux de sa deuxième session, du 7 au 9 puis le 11 avril 2008 (A/63/54)
Ce rapport rappelle que, pendant le débat général, les délégations avaient réaffirmé leur attachement à la politique dite de « tolérance zéro » face aux infractions pénales (notamment l’exploitation et les atteintes sexuelles) commises par les fonctionnaires de l’ONU et les experts en mission, ainsi que la nécessité de faire strictement respecter les règles du droit à la lumière des principes de la justice et du droit international. Les infractions pénales commises par les fonctionnaires de l’ONU portaient préjudice non seulement à la victime, mais aussi à sa famille et à la population du pays hôte tout entière. Ces infractions, ont-elles fait observer, compromettent la confiance et mettent ainsi sérieusement en danger la réputation de l’Organisation en la rendant moins efficace dans l’accomplissement de sa mission.
Les délégations ont appuyé la résolution 62/63 de l’Assemblée générale et approuvé l’insistance qu’elle met sur la compétence que les États doivent établir, s’ils ne l’ont pas déjà fait, à l’égard des actes criminels commis par leurs ressortissants alors qu’ils servent auprès de l’Organisation des Nations Unies. La résolution invite également les États Membres à donner des informations sur la compétence juridictionnelle et sur les mécanismes mis en place pour donner suite aux allégations d’infraction pénale, concourant à mettre au jour la nature et l’ampleur d’éventuelles lacunes de juridiction ou de procédure. Des délégations ont également appuyé l’idée, lancée dans la résolution, d’un stage d’initiation et de formation du personnel avant son déploiement. Les délégations ont également appuyé la Stratégie globale d’assistance aux victimes d’actes d’exploitation et d’abus sexuels commis par des membres du personnel de l’Organisation des Nations Unies ou du personnel apparenté, consacrée dans la résolution 62/214 du 21 décembre 2007, et la résolution 61/291 du 24 juillet 2007 portant amendement du modèle de mémorandum d’accord.
Certaines délégations, évoquant les aspects juridiques et politiques de la coopération internationale entre les États et entre les États et l’Organisation analysés par les experts, ont dit souscrire à la proposition selon laquelle les États élargiraient leur coopération en matière d’échange d’informations, d’extradition, d’exécution des peines et dans d’autres domaines afin de faciliter l’exercice de la compétence pénale, y compris au titre de l’entraide judiciaire. De la même manière, leur coopération avec l’Organisation devrait s’étendre aux échanges d’informations, à l’aide aux procédures (par exemple pour réunir les éléments de preuve), aux notifications sur l’état d’avancement des enquêtes et au renforcement des capacités en matière d’application des lois.
Quelques délégations ont estimé que la procédure suivie par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) pour réunir les éléments de preuve n’était pas assez formalisée pour être admissible dans un procès pénal. Elles ont fait observer que certains États définissent de manière restrictive les autorités habilitées à rassembler ces éléments.
De l’avis de certaines délégations, il serait prématuré d’envisager la négociation d’une convention internationale dans cette matière comme le proposait le Groupe d’experts juridiques et comme le Secrétariat en soutenait l’idée dans sa note. Il faudrait comprendre ce qui fait effectivement obstacle aux enquêtes avant de se lancer dans l’élaboration d’une convention. Il y a eu d’autres recommandations à propos de l’élaboration d’un protocole de coopération entre les États et le Bureau des services de contrôle interne de l’ONU. Il a également été proposé de mettre au point une terminologie commune.
Les délégations ont souligné que certaines autres questions, par exemple le champ d’application ratione personae, la définition des infractions visées et les problèmes de compétence, devraient être examinés de manière approfondie. Elles ont recommandé de prendre soin de coordonner les travaux avec ceux du Comité spécial des opérations de maintien de la paix et de la Cinquième Commission pour éviter les résultats contradictoires et les chevauchements inutiles. Le Comité spécial a recommandé à nouveau que la Sixième Commission crée, à la soixante-troisième session de l’Assemblée générale, un groupe de travail chargé de poursuivre l’examen du rapport du Groupe d’experts juridiques (A/60/980).
Le rapport comporte en annexes le compte rendu officieux des délibérations du Comité spécial sur le rapport du Groupe d’experts juridiques, établi par la Présidente; et le document de travail non officiel sur la coopération internationale rédigé par la Présidente à l’intention du Groupe de travail, et amendements et propositions présentés oralement et par écrit par les délégations.
Rapport du Secrétaire général sur la responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission des Nations Unies (A/63/260)
Le présent rapport a été établi en application du paragraphe 10 de la résolution 62/63 de l’Assemblée générale intitulée « Responsabilité pénale des fonctionnaires et des experts en mission de l’Organisation des Nations Unies ». Il présente les informations communiquées par les gouvernements quant à la possibilité que leur offre leur législation nationale d’établir leur compétence, notamment à l’égard des infractions graves commises par leurs nationaux ayant qualité de fonctionnaires ou experts des Nations Unies en mission. Il s’agit des États suivants: Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Brésil, Canada, Chypre, République tchèque, Estonie, Finlande, Allemagne, Grèce, Irlande, Jordanie, Kenya, République de Corée, Liechtenstein,, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pologne,Qatar, Serbie, Afrique du Sud, Suisse, Tunisie, États-Unis et Yémen.
Le rapport présente, en outre, les renseignements fournis par certains États Membres dans le cadre de la coopération avec l’Organisation des Nations Unies visant à échanger des informations et faciliter les enquêtes et poursuites concernant des nationaux. Ces États sont: Argentine, Australie, Belgique, Brésil, Canada, République tchèque, Estonie, Finlande, Grèce, Jordanie, Kenya, République de Corée, Liechtenstein, Nouvelle-Zélande, Norvège,Pologne,Qatar, Afrique du Sud, Suisse, Tunisie et États-Unis.
Conformément à ses attributions établies par la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, adoptée, le 13 février 1946, par l’Assemblée générale et à laquelle 154 États Membres sont aujourd’hui parties, le Secrétaire général communique, dans ce rapport, les informations fournies par le Secrétariat sur les allégations d’infractions visant des fonctionnaires des Nations Unies et portées à la connaissance des États dont ils ont la nationalité.
Le rapport du Secrétaire général offre enfin une description détaillée des activités récentes menées par le Secrétariat pour faire en sorte que les experts susceptibles d’être envoyés en mission soient informés des normes élevées de conduite auxquelles ils sont censés satisfaire, ainsi que des autres mesures concrètes prises pour renforcer les programmes existants d’initiation aux normes de conduite imposées par les Nations Unies, y compris ceux d’orientation avant et après le déploiement dans le cadre de la mission. Ainsi, conformément à la politique de tolérance zéro que le Secrétaire général s’est engagé à suivre la politique de tolérance zéro, à l’égard du personnel des opérations de maintien de la paix qui se rendrait coupable d’exploitation ou d’abus sexuels, le Département des opérations de maintien de la paix et le Département d’appui aux missions ont arrêté une stratégie comprenant trois volets: mesures de prévention des manquements aux normes de conduite, répression des actes contraires aux normes de conduite des Nations Unies et mesures correctives. Par ailleurs, en vue de l’éradication des manquements aux normes de conduite, y compris l’exploitation et les abus sexuels, une place de tout premier plan est faite à la formation du personnel des opérations de maintien de la paix. Cette formation est d’autant plus importante que les effectifs du personnel des missions, en particulier ceux des Casques bleus, se renouvellent fréquemment.
Au titre des mesures, le rapport explique que comme l’Assemblée générale l’a demandé dans sa résolution 62/247, la Division des investigations du Bureau des services de contrôle interne a entrepris l’élaboration d’un programme complet de formation aux techniques d’enquêtes, qui a pour but de perfectionner en la matière les responsables de programme appelés à prendre part à des enquêtes dans les autres départements et bureaux. Cette formation devrait permettre d’accélérer et de professionnaliser le règlement des affaires, conformément aux principes qui se dégagent de la jurisprudence et aux normes régissant les enquêtes, et compte tenu des impératifs administratifs.
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