LA QUATRIÈME COMMISSION ENTEND LES ARGUMENTS DES REPRÉSENTANTS DE GIBRALTAR
| |||
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York |
Quatrième Commission
6e séance – matin
LA QUATRIÈME COMMISSION ENTEND LES ARGUMENTS DES REPRÉSENTANTS DE GIBRALTAR
Neuf projets de résolution, dont l’un a trait à la question du Sahara occidental, ont été adoptés par les délégations sur des questions de décolonisation
La Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) a adopté ce matin neuf projets de résolution, dont l’un avait trait à la question du Sahara occidental, après avoir poursuivi ses débats au cours desquels se sont exprimés deux représentants de Gibraltar. Ce territoire devrait faire l’objet d’un projet de résolution lors de cette session de la Commission.
Peter Richard Caruana, Chef du gouvernement de Gibraltar, a dénoncé devant l’Assemblée le fait que l’« on veuille imposer à un territoire une forme de souveraineté dont il ne voudrait pas ». Il a défendu le nouveau statut d’autonomie de Gibraltar, approuvé par référendum en 2006, qui a permis d’éliminer selon lui tout vestige colonial dans les institutions de ce territoire. Le Royaume-Uni, a assuré M. Caruana, n’a aux plans exécutif et législatif, aucun pouvoir sur Gibraltar. Pour le Premier Ministre gibraltarien, le statut sous lequel est actuellement placé le territoire est la seule solution pratique et opérante envisageable. « Gibraltar ayant cessé d’être une colonie, les Nations Unies n’ont plus à être saisies d’une quelconque question concernant ce territoire », a estimé Peter Caruana.
Le chef de l’opposition gibraltrienne, Joe Bossano, qui était autorisé à prendre la parole en tant que « pétitionnaire » (représentant d’une organisation impliquée dans la défense des populations d’un territoire non autonome) s’est interrogé sur ce qu’est le statut juridique de Gibraltar au regard du droit international. « S’il nous manque quelque chose qui nous permettrait de cesser d’être considérés comme une colonie avec la Constitution approuvée en 2006, que l’on nous dise ce qu’il nous manque, et nous ferons campagne pour l’obtenir », a-t-il lancé à la Commission.
Les travaux de ce matin ont été l’occasion pour certains intervenants d’évoquer à nouveau la question des Falkland (Malvinas) et celle de Porto Rico. Concernant ce dernier territoire, les délégations du Venezuela et du Nicaragua ont estimé que la population de Porto Rico devait pouvoir décider de l’avenir de la terre sur laquelle ils vivent. Pour la délégation du Nicaragua, il n’y a aucune raison que cette nation demeure un cas à part dans le processus de décolonisation. Le Venezuela a pour sa part appelé l’Assemblée générale à examiner activement et sous tous ses aspects la situation de Porto Rico.
S’agissant des Falkland (Malvinas), plusieurs délégations des pays d’Amérique latine ont exprimé leur solidarité avec l’Argentine. En ce qui concerne le Sahara occidental, tous les intervenants qui se sont exprimés sur la question ont convenu que le processus de négociations directes entre le Maroc et le Front POLISARIO entamé cet été à Manhasset près de New York devait être encouragé et appuyé.
D’autre part, parmi les projets de résolution adoptés en fin de séance et concernant les territoires non autonomes, le texte concernant le Sahara occidental, qui a été adopté par consensus, « appuie fermement la résolution 1754 (2007) par laquelle le Conseil de sécurité a demandé aux parties d’engager des négociations de bonne foi sans conditions préalables » et se félicite des deux premières séries de pourparlers qui se sont tenues en juin et en août en présence de pays voisins sous les auspices des Nations Unies à Manhasset. Le projet de résolution encourage les parties à continuer à faire preuve de volonté politique et d’un esprit de coopération.
Enfin, plusieurs orateurs ont signalé que l’échéance de l’actuelle Décennie internationale de l’élimination du colonialisme 2001-2010 approchait de son terme. Le représentant de l’Inde a mis en garde contre le risque de devoir en décréter une troisième.
La Quatrième Commission poursuivra ses travaux jeudi, 18 octobre, dans la matinée à 10 heures.
Débat général
Mme AURA MAHUAMPI RODRÍGUEZ DE ORTIZ (Venezuela) a déclaré que si des progrès importants avaient été accomplis en matière de décolonisation depuis 40 ans, il n’en demeurait pas moins vrai que des situations coloniales perduraient sur le continent latino-américain: les îles Malvinas et Porto Rico en particulier. Les premières, ainsi que la Géorgie du Sud et les îles Sandwich appartiennent à l’Argentine, a-t-elle affirmé. On ne peut invoquer le droit à l’autodétermination, selon l’oratrice, car il s’agit d’une population implantée par la puissance occupante.
Quant au cas de Porto Rico, a-t-elle expliqué, il continue d’attirer l’attention de la communauté internationale en raison de la situation indéfinie qui y prévaut. La situation est très floue à cause de l’immobilisme du Gouvernement des États-Unis en ce qui concerne des mesures politiques qui faciliteraient le plein exercice du droit à l’autodétermination du peuple portoricain. Le Venezuela appelle l’Assemblée générale à examiner activement sous tous ses aspects la situation de ce territoire.
M. GABRIEL JUAN ONDO MATOGO (Guinée éq uatoriale) a déclaré que sa délégation souhaitait apporter une modeste contribution à la question « épineuse » du Sahara occidental. Historiquement, selon lui, les peuples marocain et du Sahara occidental partagent une histoire et une culture communes, ce qui rend d’autant plus digne d’intérêt la position du Gouvernement de Rabat qu’il a qualifiée d’équilibrée.
M. SIMON NYOWANI (Zimbabwe) a déclaré soutenir le processus de décolonisation du Sahara occidental, question qui est à l’ordre du jour des Nations Unies depuis maintenant trois décennies et qui représente le dernier cas de décolonisation. Il a rappelé le droit du peuple sahraoui à exercer son droit inaliénable à l’autodétermination sans aucune interférence extérieure. Apportant tout son soutien à la résolution 1754 du Conseil de sécurité, M. Nyowani a estimé que les négociations en cours sur la question du Sahara occidental allaient « dans le bon sens ». Il a appelé toutes les parties concernées à participer pleinement, et avec bonne volonté, aux négociations et a prié la Commission de tout mettre en œuvre pour aider à la résolution de ce conflit et à la question des 15 autres territoires non autonomes.
M. RAMESHWAR ORAON (Inde) a déclaré que le colonialisme était anachronique et archaïque. Il a mis en garde contre le fait de devoir décréter une troisième décennie internationale de l’élimination du colonialisme, rappelant que l’on était à la septième année de la présente décennie. Toutefois, on ne peut plaquer des solutions toutes faites à tous les territoires non autonomes, a-t-il noté. Il convient de combler le déficit d’information dans ces territoires, par l’envoi de missions onusiennes et l’organisation de séminaires régionaux. Les missions permettent de récolter des données de première main quant à la situation dans les territoires et de connaître les aspirations des populations, a-t-il souligné. Quant aux séminaires régionaux, ils permettent de mobiliser l’opinion internationale sur la situation prévalant dans ces territoires concernés, a-t-il expliqué.
L’orateur a appelé les puissances administrantes à développer des solutions adaptées aux territoires qu’elles contrôlent. L’exemple de Tokélaou est particulièrement probant à cet égard, selon la délégation indienne. Celle-ci appelle le Comité spécial et l’ONU en général à agir de manière plus dynamique.
À la fin de son intervention, le représentant indien a regretté les commentaires de son homologue pakistanais jeudi dernier au sujet de l’État indien du Jammu-et-Cachemire dont le cas ne relève pas, selon lui, des travaux de la Quatrième Commission. Le Pakistan serait plus avisé, selon lui, d’appliquer à son propre peuple le droit à l’autodétermination et à la démocratie, plutôt que de faire des remarques hors contexte et erronées sur les autres. L’orateur a rappelé que le Jammu-et-Cachemire faisait partie intégrante de l’Union indienne et qu’il avait depuis longtemps un gouvernement démocratiquement élu. L’Inde est d’avis que les questions bilatérales doivent être examinées de manière bilatérale et ne pas être évoquées dans des forums internationaux. Il faut aussi prendre garde à ne pas tenir des propos susceptibles d’être interprétés comme un appui au terrorisme, alors que celui-ci tente sans succès de porter atteinte à des sociétés pluralistes et à la démocratie bien établie.
M. ALBERTO VIRELLA (Espagne) a déclaré que la question de Gibraltar était une « priorité permanente » pour le Gouvernement espagnol et pour ses citoyens. Il a rappelé que les résolutions et les décisions de l’Assemblée générale ont reconnu que la situation coloniale actuelle n’était pas conforme à l’esprit de la Charte des Nations Unies puisque l’intégrité et l’unité territoriale de l’Espagne étaient négligées. Il a affirmé que la solution à cette question passait par le règlement définitif des questions de souveraineté qui y sont liées, citant ici les conclusions du Séminaire régional de décolonisation qui s’est tenu en mai dernier à Grenade.
Il a déploré le fait qu’aucune avancée concrète n’ait eu lieu sur la question de la décolonisation de Gibraltar et a rappelé que son processus de réforme constitutionnelle n’avait pas produit de changements notables. En effet, selon lui, le nouveau décret constitutionnel pour Gibraltar, ainsi que le référendum des citoyens espagnols y résidant, n’a aucune conséquence au plan international car la décolonisation ne peut être que « le fruit d’une négociation bilatérale entre l’Espagne et le Royaume-Uni ». Il s’est dit attaché au processus de négociations lancé de concert avec le Royaume-Uni en 1980. Enfin, il a assuré que son Gouvernement voulait progresser sur cette question, et notamment dans le cadre du Forum du dialogue sur Gibraltar qui, a-t-il espéré, pourrait créer un climat de coopération afin de parvenir au règlement du conflit.
M. ALPHA IBRAHIMA SOW (Guinée) a déclaré au sujet du Sahara occidental que son pays regrettait que les efforts de la communauté internationale n’aient pas encore abouti. La Guinée estime que l’initiative marocaine en faveur d’un statut d’autonomie contribue « heureusement » à mettre un terme à l’impasse actuelle. Nous tenons singulièrement à saluer l’esprit d’ouverture et de compromis dont a fait preuve le Royaume du Maroc, a souligné M. Sow. L’heure n’est plus aux atermoiements, a-t-il ajouté, et toute division dans nos rangs ne pourra qu’entraîner l’altération de la dynamique actuelle et compromettre les espoirs de paix, de stabilité et de démocratie qui se dessinent. Il convient donc d’encourager les parties à multiplier les mesures de confiance.
Par ailleurs, la délégation guinéenne est préoccupée par l’expiration très prochaine de la deuxième Décennie internationale de l’élimination du colonialisme, alors que les objectifs de cette Décennie sont encore loin d’être atteints.
M. MICHEL KAFANDO (Burkina Faso) a déclaré que « l’importante initiative » du Maroc, pour la négociation d’un statut d’autonomie pour la région du Sahara occidental, l’adoption de la résolution 1754 par le Conseil de sécurité, et l’engagement des négociations de Manhasset dans l’État de New York, l’été dernier, étaient autant de signes porteurs d’espoir pour le dénouement du conflit concernant le Sahara occidental. La troisième série de négociations qui est attendue dans les prochains mois participe de cette nouvelle dynamique, a-t-il estimé.
Selon lui, trouver une solution politique juste, durable, et mutuellement acceptable, est possible si toutes les parties concernées par cette question font preuve de volonté. Il a cependant tenu à rappeler le rôle de cette Commission et de la communauté internationale dans la résolution de cette question; nous devons accompagner le processus et encourager les parties à ne plus se départir de cette résolution et à privilégier le dialogue dans un climat apaisé garanti par l’ONU, a-t-il déclaré. En ce qui concerne la résolution à venir de l’Assemblée générale sur la question du Sahara occidental, il a demandé à ce qu’elle soit un signal consensuel fort de la communauté internationale à la région.
M. JAIME HERMIDA CASTILLO (Nicaragua) a déclaré que Porto Rico avait le droit à l’autodétermination car il s’agit d’une nation latino-américaine des Caraïbes, et qu’il n’y avait aucune raison que l’île demeure un cas à part dans le processus de décolonisation. Le Nicaragua est solidaire du patriotique peuple portoricain qu’il salue pour sa lutte courageuse en faveur de son libre choix et de son indépendance.
Tout en faisant part de la solidarité de son pays avec le peuple sahraoui, son représentant a salué les efforts de règlement entrepris par le Royaume du Maroc et par le Front POLISARIO.
Concernant la « juste cause du peuple argentin sur les îles Malvinas », le Nicaragua partage les sentiments et la solidarité du reste de l’Amérique latine envers l’archipel. Il appelle de ses vœux une issue négociée, pacifique et juste.
Nous ne pourrons être satisfaits de l’émancipation humaine tant qu’existent des territoires non autonomes et des puissances administrantes, a conclu la délégation nicaraguayenne.
M. FAYSAL EBRAHIM AL-ZAYANI (Bahreïn) a dénoncé la colonisation, l’hégémonie étrangère et les souffrances engendrées par ces politiques. Il a rappelé que cela était incompatible avec les principes de libertés fondamentales et avec les droits de l’homme, et a réaffirmé son soutien au droit inaliénable de tous les peuples à l’autodétermination. Il a également rappelé l’important rôle joué par les Nations Unies dans le domaine de la décolonisation, notamment à travers le travail du Comité spécial crée en 1961. Selon lui, la communauté internationale doit être fière des réalisations concrètes et des multiples succès de ce Comité, grâce auquel la plupart des peuples colonisés sont devenus membres à part entière des Nations Unies.
Il a estimé qu’il fallait en finir avec la colonisation car la subjugation d’un peuple à une puissance étrangère est un déni des droits fondamentaux de l’homme, une violation de la Charte des Nations Unies et un obstacle à la paix et à la sécurité internationales. L’intervenant a souhaité que cette deuxième Décennie internationale pour la décolonisation atteigne ses objectifs, tout en rappelant que son échéance était proche. En faisant référence au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, il a rappelé que la reconnaissance de ces droits, pour tous les peuples de la communauté internationale, constituait la base même de la justice et de la paix dans le monde.
QUESTION DE GIBRALTAR
Déclarations
M. PETER RICHARD CARUANA, (Premier Ministre de Gibraltar), a dénoncé le fait que le « principe sacré » de la décolonisation par l’autodétermination devienne caduc, pour certains États Membres, dès lors qu’existe un conflit de souveraineté. Or, ces États sont devenus omnipotents au sein du Comité responsable de la décolonisation, à savoir le « Comité des Vingt-Quatre », a estimé M. Caruana, en les accusant de « manipulation ». Le Premier Ministre de Gibraltar a estimé qu’il était absurde de soutenir que la simple existence d’un différend en matière de souveraineté puisse annuler le droit d’un peuple colonial à l’autodétermination; ou que les ambitions territoriales d’un voisin sur un bout de territoire, basées sur des revendications remontant au XVIIIe siècle –1705 précisément, a-t-il dit –puissent soumettre un peuple colonial, en 2007, à une souveraineté dont il ne veut pas. Ce peuple ne devrait pas se voir dénier la sortie d’une situation coloniale, juste pour satisfaire les revendications d’un État voisin. Il n’existe pas de circonstances, quelle que soit l’histoire, qui soient susceptibles de produire un tel résultat à notre époque en vertu de la Charte de l’ONU, estimé M. Caruana.
Gibraltar ne fait plus partie de l’Espagne depuis 303 ans et l’exercice de notre droit à l’autodétermination ne porte pas atteinte à l’intégrité territoriale de l’Espagne, a-t-il déclaré. Nous ne faisons pas sécession de l’Espagne puisque nous n’en faisons pas partie, a-t-il insisté.
Évoquant le référendum de 2006 qui a permis d’éliminer selon lui tout vestige colonial de la Constitution du territoire, il a souligné que ce texte donnait tout pouvoir au peuple de Gibraltar sans pour autant le rendre complètement indépendant, la population ne souhaitant pas avoir un État souverain. Que signifie l’indépendance aujourd’hui? N’y a-t-il pas des pays indépendants qui renoncent à une partie de leur souveraineté au profit d’institutions supranationales comme c’est le cas avec l’Union européenne par exemple? a-t-il ajouté. Pour M. Caruana, le Royaume-Uni a moins de pouvoir sur Gibraltar que l’Union européenne n’en a sur l’Espagne en raison des domaines de souveraineté que ce pays a accepté de déléguer à Bruxelles.
Le Comité spécial a une liste de critères pour retirer des territoires de la liste des territoires non autonomes, a-t-il rappelé, notant que certains territoires, petits, éloignés n’étaient pas viables économiquement. Pour Gibraltar, le statut actuel est la seule solution pratique et opérante, a dit M. Caruana. Selon lui, le Royaume-Uni n’a aucun pouvoir à Gibraltar sur les plans exécutif et législatif. Et même si l’on applique les critères actuels de retrait de la liste des territoires non autonomes de l’ONU, il n’y a aucune raison de ne pas en soustraire Gibraltar. Les Nations Unies ne doivent pas rester saisies de la question de Gibraltar en dehors de la procédure de retrait de la liste, a estimé le Premier Ministre du territoire. Gibraltar a cessé d’être une colonie, et le territoire est gouverné par les représentants de sa population, a-t-il affirmé. C’est la raison pour laquelle celle-ci n’acceptera jamais que son sort soit réglé par des négociations bilatérales entre l’Espagne et le Royaume-Uni dont elle serait exclue, a indiqué M. Caruana. Il s’est félicité de l’existence du nouveau Forum trilatéral pour le dialogue réunissant le Gouvernement de Gibraltar avec ceux de l’Espagne et du Royaume-Uni.
M. JOE BOSSANO, (Chef de l’opposition à Gibraltar), a d’abord rappelé que l’actuelle Constitution du territoire avait été approuvée par référendum en novembre 2006. Ce vote a été considéré par le Royaume-Uni comme un acte effectif d’autodétermination, a-t-il souligné tout en rappelant que l’Espagne ne le considérait pas comme tel. Pour le Gouvernement de Madrid, a-t-il expliqué, il s’agit simplement de la modernisation de la relation de Gibraltar avec la métropole. M. Bossano a expliqué que l’autodétermination signifiait que les ressortissants d’une colonie choisissaient librement l’option de décolonisation qu’ils préféraient, permettant d’apparaître avec un nouveau statut international pour profiter pleinement de leur autonomie. Pour autant, le fait d’avoir une relation plus moderne avec la métropole est-il synonyme de décolonisation? a-t-il demandé. L’Espagne affirme que la nouvelle Constitution maintient le statut de colonie de Gibraltar et qu’elle doit donner son avis sur la question. Avons-nous exercé notre droit à l’autodétermination? a-t-il encore demandé. Si c’est le cas, le Royaume-Uni n’est plus notre puissance administrante et, dans ce cas, Gibraltar doit être retiré de la liste des territoires non autonomes.
Si le Royaume-Uni continue de soumettre des rapports annuels au Comité spécial, c’est qu’il reconnaît que nous n’avons pas atteint notre pleine autonomie, a-t-il dit avant de s’interroger sur la question de savoir pour quelle raison la Quatrième Commission était toujours saisie de la question de Gibraltar. Pour le chef de l’opposition du territoire, le Royaume-Uni doit cesser de chasser avec les chiens tout en continuant de courir avec le lièvre, selon un vieil adage anglais. Si le Royaume-Uni estime que les critères doivent être modernisés, il doit proposer des amendements applicables à tous les territoires inscrits dans la liste des territoires non autonomes. La population a besoin de savoir quelle est sa position en fonction du droit international. S’il nous manque quelque chose pour cesser d’être considérés comme une colonie avec la Constitution actuelle, dites-nous ce qu’il nous manque et nous ferons campagne pour l’obtenir, a-t-il conclu.
Droit de réponse
Le représentant du Royaume-Uni a exercé son droit de réponse. Il s’est félicité de la mise en œuvre des accords trilatéraux réunissant son pays avec l’Espagne et le territoire de Gibraltar. Les effets en sont positifs, à la fois pour la population de Gibraltar et pour le peuple espagnol, sans que, pour autant, ces accords ne remettent en cause les positions respectives de l’Espagne et du Royaume-Uni, a-t-il dit. Le représentant a regretté la démarche « dépassée » du Comité des Vingt-Quatre qui ne tient pas compte du caractère moderne des relations entre le Royaume-Uni et Gibraltar. À l’instar d’autres territoires d’outre-mer dépendant de la Couronne, le territoire est maintenant politiquement mûr et formellement décolonisé, ce que devrait reconnaître le Comité des Vingt-Quatre, a-t-il poursuivi. Gibraltar jouit des droits individuels et collectifs prévus par la Charte des Nations Unies, même si le Royaume-Uni garde ses prérogatives en matière de défense et de représentation au sein de l’Union européenne.
Par ailleurs, le Royaume-Uni ne peut considérer que le peuple de Gibraltar soit privé du droit à l’autodétermination et ne peut accepter son transfert à une souveraineté étrangère, même s’il entretient des relations amicales et cordiales avec l’Espagne, a dit le représentant. Enfin, a-t-il ajouté, la délégation du Royaume-Uni tient à réagir aux propos des délégations du Venezuela, du Nicaragua et de l’Argentine sur les Falkland: le Royaume-Uni n’a aucun doute sur sa souveraineté sur ces îles, et il ne peut y avoir de négociation sur le sort de l’archipel, a dit le représentant.
DÉCISIONS SUR LES PROJETS DE RÉSOLUTION RELATIFS AUX QUESTIONS DE DÉCOLONISATION
Les projets de résolution I, II, III, IV, VI, VII et VIII figurent dans le rapport du Comité spécial (A/62/23, chap. XII).
Aux termes du projet de résolution I intitulé Renseignements relatifs aux territoires non autonomes, communiqué en vertu de l’alinéa e de l’Article 73 de la Charte des Nations Unies, adopté par 134 voix pour et 4 abstentions (France, Israël, Royaume-Uni, et États-Unis), l’Assemblée générale prierait les puissances administrantes concernées de communiquer ou de continuer de communiquer au Secrétaire général les renseignements demandés à l’article 73, ainsi que des renseignements aussi complets que possible sur l’évolution politique et constitutionnelle des territoires en question.
Explication de vote
La représentante du Royaume-Uni, dont la délégation s’est abstenue, a tenu à préciser que son pays ne contestait pas l’objectif principal du texte, qui est le respect d’un article de la Charte des Nations Unies, mais a estimé que la décision de savoir si un territoire était arrivé à un degré d’autonomie suffisant dépendait uniquement de ce territoire et de la puissance administrante.
Aux termes du projet de résolution II intitulé Activités économiques et autres préjudiciables aux intérêts des peuples des territoires non autonomes, adopté par 142 voix pour, 2 contre (Israël, et États-Unis) et 2 abstentions (France, et Royaume-Uni), l’Assemblée générale prierait les puissances administrantes de suivre la situation dans les territoires non autonomes pour s’assurer que toutes les activités économiques menées dans ces territoires visent à en renforcer et en diversifier l’économie, dans l’intérêt de leurs peuples, y compris des populations autochtones, et à en promouvoir la viabilité économique et financière. Elle prierait les puissances administrantes de prendre des mesures législatives et administratives à l’égard de leurs ressortissants et des personnes morales relevant de leur juridiction qui possèdent ou exploitent des entreprises préjudiciables aux intérêts des habitants de ces territoires, afin de mettre fin aux activités de ces entreprises.
Explication de vote
La représentante de l’Argentine a déclaré que cette résolution ne pouvait s’appliquer aux îles Falkland (Malvinas), ni aux îles Sandwich, car elles sont illégalement occupées par le Royaume-Uni. L’autodétermination de ces îles devrait résulter d’un « arrangement négocié », a-t-elle indiqué.
Aux termes du projet de résolution III portant sur l’Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’Organisation des Nations Unies, adopté par 93 voix pour et 55 abstentions, l’Assemblée générale prierait les institutions spécialisées et les autres organismes des Nations Unies, ainsi que les organisations internationales et régionales, d’examiner la situation dans chaque territoire, de façon à prendre des mesures appropriées pour y accélérer les progrès dans les secteurs économiques et sociaux. Elle prierait également les institutions spécialisées et les autres organismes des Nations Unies de fournir des informations sur les problèmes environnementaux auxquels se heurtent les territoires non autonomes, les effets des catastrophes naturelles sur ces territoires, les moyens d’aider ces territoires à lutter contre le trafic de stupéfiants, le blanchiment d’argent et d’autres activités illégales et criminelles, et l’exploitation illégale des ressources marines de ces territoires.
Explications de vote
Le représentant du Portugal, qui s’exprimait au nom de l’Union Européenne (UE), a réaffirmé le soutien des États membres de l’Union européenne aux institutions spécialisées des Nations Unies pour l’assistance qu’elles apportent aux territoires non autonomes, mais a rappelé que le statut de ces institutions devait être « soigneusement respecté ». C’est ce qui explique l’abstention de l’Union européenne sur ce projet de résolution.
La représentante de l’Argentine, qui s’est abstenue, a indiqué que son pays estimait que le projet de texte se devait d’être cohérent avec les précédentes résolutions et décisions.
Le représentant de la Fédération de Russie s’est déclaré en faveur du droit à l’autodétermination des peuples non autonomes, mais a déclaré qu’il s’agissait là d’une question éminemment politique et que ce projet de résolution faisait donc double-emploi avec le Comité spécial de décolonisation et la Quatrième Commission.
Aux termes du projet de résolution A/C.4/62/L.2, et relatif aux Moyens d’étude et de formation offerts par les États Membres aux habitants des territoires non autonomes, adopté sans vote, l’Assemblée générale prierait les États de continuer à offrir des moyens d’étude et de formation aux habitants des territoires qui n’ont pas encore accédé à l’autonomie. Elle prierait également les puissances administrantes de prendre des mesures afin de diffuser largement et régulièrement des renseignements sur ces moyens d’étude et de formation et d’accorder toutes les facilités nécessaires aux étudiants qui voudraient se prévaloir de ces offres.
Aux termes du projet de décision A/C.4/62/L.3,et relatif à laQuestion du Sahara occidental, adopté sans vote, l’Assemblée générale prierait le Comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux de continuer à suivre la situation au Sahara occidental et de lui présenter un rapport sur la question à sa soixante-troisième session. Elle prierait également les parties concernées par cette question de coopérer avec le Comité international de la Croix-Rouge et à s’acquitter de leurs obligations au titre du droit humanitaire, encouragerait les parties à continuer à faire preuve de volonté politique et d’un esprit de coopération, et réaffirmerait son ferme appui à la résolution 1754 par laquelle le Conseil de sécurité a demandé aux parties d’engager des négociations de bonne foi et sans conditions préalables, en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable.
Explication de vote
Le représentant du Portugal, qui s’exprimait au nom de l’Union Européenne s’est félicité du fait que le projet de résolution ait été adopté par consensus et a encouragé les parties concernées à poursuivre leurs efforts sur cette question
Aux termes du projet de résolution IV relatif à la Question de la Nouvelle-Calédonie, adopté sans vote, l’Assemblée générale prierait la puissance administrante de maintenir constamment à l’étude le processus en cours en Nouvelle-Calédonie depuis la signature de l’Accord de Nouméa, et elle prierait le Comité spécial de poursuivre l’examen de la question de ce territoire et de lui faire rapport à ce sujet à sa soixante-troisième session.
Aux termes du projet de résolution VI intitulé Questions des territoires non autonomes d’Anguilla, des Bermudes, de Guam, des îles Caïmans, des îles Turques et Caïques, des îles Vierges américaines, des îles Vierges britanniques, de Montserrat, de Pitcairn, de Sainte-Hélène et des Samoa américaines, adopté sans vote, l’Assemblée générale prierait le Comité spécial de continuer à suivre de près l’évolution de la législation dans le domaine des services financiers internationaux et l’impact de ces services sur l’économie de certains des territoires, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour y protéger l’environnement afin de le préserver de toute dégradation.
Explications de vote
La représentante de l’Argentine a souscrit à la nécessité de mettre fin au colonialisme sous toutes ses formes et manifestations, et elle a reconnu le droit inaliénable à l’autodétermination.
Le représentant du Royaume-Uni a déclaré avoir décidé de ne pas rompre le consensus sur ce projet de résolution, mais a dit regretter que le Comité des Vingt-Quatre conserve sa démarche « dépassée » et refuse de tenir compte des « relations modernes entre le Royaume-Uni et ses territoires d’outre-mer ».
Aux termes du projet de résolution VII relatif à la Diffusion d’informations sur la décolonisation, adopté par 145 voix pour, 3 contre (Israël, Royaume-Uni et États-Unis) et 1 abstention (France), l’Assemblée générale prierait le Secrétaire général de développer davantage l’information sur la décolonisation fournie sur le site Internet de l’Organisation des Nations Unies, en y incluant les déclarations faites et les documents spécialisés présentés lors des séminaires régionaux ainsi que les séries intégrales de rapports du Comité spécial. Elle prierait également le Département de l’information d’appliquer les dispositions pertinentes concernant l’établissement d’un dépliant sur les programmes d’aide mis au service des territoires non autonomes. L’Assemblée prierait également le Département des affaires politiques et le Département de l’information de continuer à utiliser tous les moyens d’information disponibles: publications, radio, télévision et Internet, pour faire connaître l’action de l’Organisation dans le domaine de la décolonisation.
Explications de vote
La représentante de l’Argentine a déclaré que l’interprétation de ce projet de résolution devait tenir compte de la situation spécifique et particulière des îles Falkland (Malvinas). Cette question ne pourra être réglée qu’au travers de négociations bilatérales et en tenant compte de la spécificité de la population des îles en question, a-t-elle déclaré.
Le représentant du Royaume-Uni a déclaré avoir voté contre ce projet de résolution, car il reste d’avis que cette obligation crée un gaspillage inutile des ressources de l’Organisation.
Le représentant de l’Arabie saoudite a demandé quelques précisions et éclaircissements sur le projet de résolution.
Aux termes du projet de résolution VIII relatif à l’Application de la Déclaration sur l’octroi de indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, adopté par 145 voix pour, 3 contre (Israël, Royaume-Uni et États-Unis) et 2 abstentions (Belgique et France), l’Assemblée générale prierait les puissances administrantes de collaborer, sans réserve, avec le Comité spécial en vue d’achever, avant la fin de 2007, l’élaboration d’un programme de travail répondant au cas particulier de chaque territoire non autonome et visant à faciliter l’exécution du mandat du Comité et l’application des résolutions relatives à la décolonisation. Elle prierait instamment tous les États agissant dans le cadre des institutions spécialisées et autres organismes des Nations Unies d’apporter une aide morale et matérielle aux peuples des territoires non autonomes et demanderait aux puissances administrantes, dans le cadre d’arrangements tant bilatéraux que multilatéraux, de renforcer l’économie de ces territoires.
Explications de vote
La représentante de l’Argentine a souhaité rappeler que les missions de visite de l’ONU n’avaient lieu d’être que pour les territoires où peut s’exercer l’autodétermination.
Le représentant du Royaume-Uni a déclaré avoir voté contre ce texte, car sa délégation continue de penser que certains éléments de ce projet de résolution sont « inacceptables ».
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel