En cours au Siège de l'ONU

AG/EF/3181

LES INITIATIVES D’ALLÈGEMENT DE LA DETTE NE RÉPONDENT PAS AUX BESOINS DE CERTAINS PAYS, ESTIMENT DES DÉLÉGATIONS DE LA DEUXIÈME COMMISSION

15/10/2007
Assemblée généraleAG/EF/3181
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Deuxième Commission

7e et 8e séances – matin et après-midi


LES INITIATIVES D’ALLÈGEMENT DE LA DETTE NE RÉPONDENT PAS AUX BESOINS DE CERTAINS PAYS, ESTIMENT DES DÉLÉGATIONS DE LA DEUXIÈME COMMISSION


La réduction de la dette étant équivalente à la diminution calculée de l’APD,

elles notent qu’aucune ressource nouvelle n’a donc été versée au financement du développement


La dette extérieure des pays en développement demeure un des plus importants obstacles à leur croissance économique et sociale, ont argué aujourd’hui à la Commission économique et financière la majorité des délégations qui se sont exprimées au cours de l’examen des questions relatives au système financier international et à la crise de la dette extérieure, et leur impact sur le développement.


Au cours du débat de la journée, qui ouvrait l’ordre du jour consacré par la Deuxième Commission aux questions de politique macroéconomique, plusieurs représentants ont souligné qu’en dépit des récentes initiatives lancées pour l’allégement de la dette, les pays pauvres n’en avaient pas tiré beaucoup de bénéfices.  Les délégations ont en effet jugé que ces initiatives étaient trop lentes, que trop de pays en étaient exclus du fait que les critères d’éligibilité plaçaient la barre trop haut.  Elles ont fait remarquer que ces initiatives ne créaient en fait aucune source nouvelle de financement du développement, étant donné que les sommes dédiées à l’aide publique au développement avaient connu une réduction équivalente au montant des réductions de dette.


Les délégations ont néanmoins reconnu les mesures prises récemment pour alléger le fardeau de la dette, soulignant les mérites de l’Initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE) ainsi que l’Initiative d’allégement de la dette multilatérale, qui a été lancée à Gleneagles, en Écosse, par le G-8, en 2005.  Certaines d’entre elles ont cependant fait valoir que cette amélioration d’ensemble de la situation de la dette au plan mondial cachait les difficultés auxquelles font individuellement face certains pays.  


Il est prématuré de considérer la crise de la dette révolue aussi longtemps que de nombreux pays consacreront plus de ressources au paiement de leurs dettes qu’ils n’en dépensent pour répondre aux besoins fondamentaux de leurs populations, a averti le représentant du Bénin qui s’exprimait au nom du Groupe des États d’Afrique.  À cet égard, la délégation de la Côte d’Ivoire, pays sortant de conflit, a fait remarquer qu’un tiers du budget du pays était consacré au paiement de sa dette extérieure, alors que la Côte d’Ivoire faisait face à d’énormes besoins de reconstruction de ses infrastructures et de réhabilitation de son économie.


Les délégations ont aussi été nombreuses à regretter que certains pays ne puissent bénéficier de la réduction de la dette.  Ainsi, le représentant du Kenya a déploré que la situation d’un pays comme le sien, à revenu intermédiaire, qui n’est pas considéré comme pauvre, mais est pourtant très endetté, ne soit pas prise en compte dans les programmes d’allégement de la dette.  De même, la représentante du Soudan a noté que son pays n’avait pas rempli les critères d’éligibilité de la dette en raison d’exigences et de positions politiques difficiles à tenir.  La dette du Soudan est pourtant équivalente à 55% de son PNB et à 340% de la valeur annuelle de ses exportations, a-t-elle fait remarquer, en notant que cette situation forçait le pays à avoir recours à des facilités d’emprunts à des termes non favorables pour financer ses programmes de développement


La plupart des intervenants ont aussi regretté le manque de démarcation claire entre allégement de la dette et aide publique au développement (APD).  Ainsi, le représentant de la Malaisie a regretté que la diminution de l’APD ait suivi la réduction de la dette depuis l’adoption du Consensus de Monterrey en 2002.  De nombreuses délégations ont partagé ce point de vue, estimant que l’allégement de la dette qui coïncide avec une diminution de l’APD, comme constaté en 2006, ne crée pas de ressources supplémentaires en faveur du développement.  Le représentant des États-Unis, et la représentante du Portugal, qui prenait la parole au nom de l’Union européenne, ont pour leur part insisté sur l’importance d’encourager les politiques d’emprunts responsables et d’insérer les restructurations ou allégements de la dette dans un cadre de viabilité de la dette.


Par ailleurs, la majorité des délégations ont plaidé pour une réforme de l’architecture financière internationale, et principalement des institutions de Bretton Woods.  Elles ont ainsi demandé que les structures de gouvernance du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale changent pour mieux prendre en compte la voix et l’influence nouvelle des pays en développement et émergeant dans leurs processus de prise de décision.  Les riches ne peuvent continuer à déterminer les paramètres de politiques financières, monétaires, économiques et commerciales internationales qui ont tant d’impact sur le sort de millions de personnes dans les pays pauvres, a ainsi lancé le représentant du Pakistan, qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine. 


Outre celles déjà citées, les délégations suivantes ont pris la parole au cours des débats de la journée: Guyana, au nom de la Communauté des Caraïbes; Indonésie, au nom de l’ANASE; Bangladesh; Fédération de Russie; Algérie; Maroc; Inde; Iraq; Venezuela; Éthiopie; Gambie.  M. Manuel Montes, du Bureau du financement pour le développement du Département des affaires économiques et sociales, et M. Raja Khalidi Aja Khalidi, de la Division du financement de la dette et du développement de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), ont présenté les rapports pertinents du Secrétaire général. 


La Deuxième Commission poursuivra ses travaux mercredi, le 17 octobre, à 15 heures, en entamant l’examen des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies.



QUESTIONS DE POLITIQUE MACROÉCONOMIQUE


Présentation de rapports


M. MANUEL MONTES, Chef de la Division des analyses politiques et du développement du Bureau du financement pour le développement, Département des affaires économiques et sociales, a présenté le rapport du Secrétaire général (A/62/119) intitulé « Système financier international et développement ».  Il a expliqué qu’en 2006 l’augmentation des transferts nets de ressources financières des pays en développement vers les pays développés s’est poursuivie, atteignant 662 milliards de dollars.  Il a par ailleurs indiqué que les flux financiers provenant des institutions de Bretton Woods ont été négatifs au cours des dix dernières années.  Selon le rapport, a-t-il ajouté, l’efficacité et la légitimité de ces institutions peuvent seulement être maintenues si leurs décisions reflètent mieux les besoins et les priorités de la majorité des pays qui sont affectés par les politiques et opérations de ces institutions.  Il a rappelé que le 18 septembre 2006, le Fonds monétaire international (FMI) avait adopté une résolution sur la réforme des quotas et de la représentation, afin notamment de mieux refléter le poids économique des États qui en sont membres.  Il a souligné qu’un accord sur ces quotas doit être trouvé avant la réunion de printemps de 2008 des institutions de Bretton Woods mais que peu de progrès avait été réalisé en 2007 pour parvenir à un consensus sur cette question. 


M. Montes a par ailleurs noté que la surveillance était un des outils clefs dont dispose le FMI pour prévenir les crises financières et promouvoir la stabilité macroéconomique.  Toutefois il a estimé que la réforme de la surveillance, actuellement en cours, souffrait de l’insuffisance des actions lancées par le Fonds pour alléger les inégalités financières mondiales.  Il a souligné que la surveillance devait se centrer sur les questions multilatérales et régionales ainsi que sur les corrélations internationales.  Il a jugé que la capacité du Fonds à surveiller les marchés financiers devait être renforcée. 


Présentant le rapport du Secrétaire général sur l’évolution récente de la dette extérieure (A/62/151), M. RAJA KHALIDI, Représentant de la Division du financement de la dette et du développement de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), a souligné que les pays en développement ont pu, ces dernières années, réduire leur dette extérieure à l’égard des créanciers bilatéraux et multilatéraux.  Cette réduction a été possible grâce à l’allégement de la dette des pays à bas revenu et à un environnement extérieur favorable, a-t-il précisé.  Toutefois, a nuancé M. Khalidi, l’avenir demeure incertain.  Les taux d’intérêt à long terme des économies majeures demeurent élevés; et de nombreux pays en développement et pays en transition connaissent encore des comptes déficitaires et une surévaluation de leur taux de change.  Le représentant de la CNUCED a en outre fait observer que bien qu’ils aient augmenté ces dernières années, les flux de capitaux financiers privés ont été compensés par de larges surplus de compte courant et une accumulation sans précédent des réserves, estimées à plus de 2,5 milliards de dollars en 2006.  Ce qui a mené à une situation particulière dans laquelle le monde en développement prête de l’argent aux économies développées, a-t-il ajouté, arguant que cet effet va à l’encontre de la sagesse économique classique qui suggère que les capitaux aillent des pays riches vers les pays pauvres. 


M. Khalidi s’est également inquiété des déséquilibres mondiaux, soulignant que certains pays émergeants semblent vouloir se désengager des institutions financières internationales.  Il a ainsi attiré l’attention sur l’importance de réformer la gouvernance et la structure de ces institutions et regretté qu’aucun progrès n’ait été fait en la matière.  D’autre part, il a attiré l’attention sur la volatilité des fonds fournis par les marchés de capitaux internationaux.  Les pays industrialisés peuvent emprunter de l’argent à l’étranger dans leur propre monnaie, alors que les emprunts internationaux que font les pays en développement se font toujours en monnaie étrangère.  Pour conclure, le représentant de la CNUCED a fait observer que depuis le lancement de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), le processus d’allègement de la dette a été trop lent.  De surcroît, de telles initiatives devraient être élargies aux pays à bas revenu qui ne bénéficient pas de l’initiative PPTE ou de l’Initiative d'allégement de la dette multilatérale.  Il est urgent d’accélérer ce processus et d’augmenter les flux d’aide publique au développement dans le but ultime de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement, a insisté M. Khalidi.  Il a également estimé bon de réexaminer les critères d’éligibilité à l’allègement de la dette.


Questions et réponses


En réponse aux questions des représentants de la République-Unie de Tanzanie et de l’Inde sur l’équilibre à trouver entre dette locale et dette extérieure, M. KHALIDI a affirmé que le rapport tenait compte de l’augmentation de la dette locale.  Il a estimé que s’il existait une bonne stratégie de gestion de la dette publique, la dette locale avait l’avantage d’être plus viable car elle était libellée en monnaie locale.  Il faut trouver le bon dosage entre la dette locale et dette extérieure, a-t-il poursuivi, tout en soulignant qu’il ne suggérait pas de ne plus recourir à l’emprunt et à la dette extérieurs.  Toutefois, il a salué le recours à l’endettement local, qui permet aux pays en développement de maintenir une marge de manœuvre dans leur politique monétaire.  La dette locale n’est pas la panacée, mais les pays en développement peuvent renforcer leur capacité à faire face aux crises extérieures en y ayant recours, a-t-il estimé.  Il a ajouté que l’équilibre entre dette extérieure et dette locale devait être étudié au cas par cas.  Enfin, il a indiqué que le principal risque encouru en cas de dette locale était le décalage des échéances, alors que dans le cas de la dette extérieure un risque dû aux fluctuations de change et aux asymétries d’échéances existait.  Rappelant que de plus en plus de pays avaient recours à la solution qu’il venait d’évoquer, il a déclaré qu’il fallait utiliser cette tendance de façon stabilisante et afin de mettre fin aux problèmes d’endettement.


Débat général


M. ASAD MAJEED KHAN (Pakistan) qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a fait observer que bien que l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés et l’Initiative d'allégement de la dette multilatérale aient permis de libérer des ressources pour le développement, celles-ci restent inadéquates pour aider les pays en développement à réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement.  Il faut des initiatives plus complètes et plus audacieuses, a-t-il souligné.  Surtout, a-t-il ajouté, l’allègement de la dette a été trop lent et n’a pas eu de caractère additionnel, comme cela était prévu.  En outre, cet allégement de dette devrait aussi inclure les pays à faible revenu qui pour le moment ne bénéficient pas des deux initiatives existant à ce jour.  M. Majeed Khan a ainsi plaidé en faveur d’une révision des modalités et d’un réexamen des critères d’éligibilité.  L’allègement de la dette peut libérer des ressources mais ne doit pas supplanter d’autres sources de financement du développement, a-t-il fait remarquer.  Rappelant l’importance de la question de la viabilité de la dette, il a fait observer que la viabilité doit être liée à la capacité du pays à atteindre leurs objectifs nationaux de développement.  Il est essentiel de relier davantage les politiques à la croissance et au développement, a-t-il souligné.  Il a en outre relevé l’importance de reconnaître le caractère individuel de l’endettement pays par pays.  Enfin, il a lancé un appel à la prise de mesures additionnelles pour assurer un endettement soutenable à long terme, par le biais notamment de dons, d’annulation totale de la dette, ou d’allégement et restructuration de la dette pour les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire.  Le représentant pakistanais a à cet égard fait observer que la présence de nouveaux créanciers suscite une saine concurrence qui permettra aux pays en développement d’avoir le choix et d’attirer des fonds pour investir dans des domaines de développement qui jusqu’ici n’avaient pas intéressé les créanciers traditionnels. 


D’autre part, rappelant que les pays en développement sont très vulnérables aux actions et aux initiatives émanant des pays développés, il a relevé la nécessité de renforcer la transparence et de développer des mécanismes régulateurs rigoureux.  Il faut une réforme globale de l’architecture financière internationale, a-t-il ajouté.  Les riches ne peuvent continuer à déterminer les paramètres des politiques financières, monétaires, économiques et commerciales internationales qui ont tant d’impact sur le sort de millions de personnes dans les pays pauvres, a-t-il souligné.  M. Majeed Khan a également insisté sur l’importance de renforcer le pouvoir de vote des pays en développement au sein des institutions de Bretton Woods.  La réforme doit prendre en compte les objectifs pour lesquels le Fonds monétaire international a été créé, à savoir assurer la stabilité financière et offrir des financements à court terme pour les pays qui en ont vraiment besoin, a-t-il souligné.


Mme VANESSA GOMES (Portugal), qui prenait la parole au nom de l’Union européenne, a rappelé que beaucoup restait à faire avant la Conférence de suivi de la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre du Consensus de Monterrey sur le financement du développement, qui aura lieu à Doha, au Qatar, en 2008.  Elle a estimé que, dans ce cadre, le prochain Dialogue de haut niveau sur le financement du développement de l’Assemblée générale et la Réunion de haut niveau de l’ECOSOC avec les institutions de Bretton Woods, étaient essentiels au processus de préparatifs de la rencontre de Doha.  Mme Gomes a déclaré l’attachement de l’Union européenne à la mise en œuvre du Consensus de Monterrey en tant que base du partenariat mondial pour parvenir aux objectifs internationaux de développement et au développement durable.  Elle a estimé que les pays en développement avaient besoin d’une « aide pour le commerce » accrue et plus efficace, et a fait part de l’engagement de l’Union européenne dans ce sens.  L’Union européenne espère, d’ici à la fin de l’année, adopter une stratégie commune sur la question, a dit la représentante.  De plus, elle a estimé que les négociations commerciales du Cycle de Doha avait connu plus de progrès que ce qui était reconnu.  « Nous sommes à une étape où il serait plus coûteux de ne pas parvenir à un accord », a-t-elle estimé.  Elle a affirmé que les politiques commerciales devaient soutenir les politiques nationales et le rôle des petites et moyennes entreprises comme réponse aux défis de la mondialisation.


S’agissant de l’aide publique au développement, Mme Gomes a indiqué que l’Union européenne avait collectivement dépassé la cible visée pour 2005 de 0,39% de PNB consacré à cette assistance, et a fait valoir que les pays membres du bloc européen souhaitaient maintenant parvenir à 0,7% de leur PNB versé à l’APD d’ici à 2015.  La représentante a aussi noté que l’Union européenne portait une grande attention aux sources novatrices de financement afin de mobiliser des fonds de manière prévisible et stable.  Sur la question de la dette, elle a souligné que, depuis 2005, l’Union européenne consacrait des efforts significatifs à son allègement.  Elle a déclaré qu’il fallait éviter les accumulations de dettes non soutenables et a encouragé les emprunts responsables et l’utilisation du Cadre de viabilité de la dette.  Enfin, elle s’est félicitée des consultations du FMI pour traiter de la question des inégalités mondiales et a indiqué que l’Union européenne soutenait les efforts de réforme de gouvernance du FMI et de la Banque mondiale afin d’inclure les pays en développement dans leur processus de décision. 


M. GEORGE TALBOT (Guyana) a déclaré au nom des États membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) que les pays de la CARICOM poursuivent des politiques macroéconomiques prudentes pour relever les défis qui jalonnent leur développement.  Ainsi, la CARICOM a essayé d’accroître sa viabilité économique et sa compétitivité par une plus grande intégration et la mise en place d’un marché économique dans la région des Caraïbes.  C’est un pari ambitieux qui implique l’harmonisation des politiques économiques et la création de nouvelles institutions régionales, a souligné M. Talbot.  Il a fait observer que les incohérences et les déséquilibres de l’économie mondiale entravent les efforts de développement.  Il a ainsi expliqué que les pays de la région doivent faire face notamment au manque de ressources pour assurer la transition depuis les arrangements commerciaux préférentiels; ils doivent aussi faire face au déclin de l’aide publique au développement; à l’exode des cerveaux; à la propagation de la pandémie du VIH/sida; à la vulnérabilité accrue aux changements climatiques et au poids de la dette.  Il s’est dit préoccupé par la position des petits États en développement face à l’économie mondiale et a regretté que si peu de progrès ait été accompli pour assurer un environnement international favorable à la croissance et au développement.  Il a à cet égard fait observer qu’à moins que le Cycle de négociations commerciales de Doha ne soit conclu avec succès, la crédibilité et la viabilité du système commercial international resteraient questionnables. 


S’agissant de la dette, M. Talbot a expliqué que certains pays de la CARICOM ont bénéficié d’une réduction conséquente de leurs dettes, tandis que d’autres n’ont connu que peu d’amélioration du ratio dette/PIB.  Aussi, en raison de la baisse de l’aide publique au développement, beaucoup ont dû recourir à des emprunts pour faire face aux besoins accrus et aux conséquences des catastrophes naturelles, a-t-il regretté.  Le représentant du Guyana a ainsi dit craindre que le fardeau de la dette s’alourdisse et ait des conséquences fâcheuses sur les efforts de développement déployés par les pays de la région des Caraïbes.  Le coût élevé de la dette contribue à l’inflation, va à l’encontre des dépenses qui devraient être faites au profit des structures sociales, et décourage les investissements étrangers, a-t-il fait valoir.  Il est donc impératif que la communauté internationale mette l’accent sur l’examen du fardeau de la dette, notamment pour les petits États à revenu intermédiaire ou à bas revenu.  Le représentant du Guyana a relevé l’importance de pouvoir compter sur un financement stable et prévisible.  Il a ainsi plaidé en faveur de sources novatrices de financement qui soient complémentaires de l’aide publique au développement.


Mme ADIYATWIDI ADIWOSO (Indonésie) a affirmé, au nom de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ANASE), que le Dialogue de haut niveau sur le financement du développement, qui doit se tenir dans quelques jours, devait rassembler l’élan nécessaire pour progresser dans la mise en œuvre du Consensus de Monterrey et dans la recherche de sources novatrices de financement.  Elle a, à ce sujet, rappelé que les pays de l’ANASE, et particulièrement l’Indonésie et les Philippines, avaient initié des projets d’échange de dette en tant que solution durable au problème de l’endettement.  La représentante a souligné que l’ANASE était de plus en plus intégrée à l’économie internationale et faisait des efforts importants pour augmenter sa résilience aux défis externes et renforcer les marchés financiers de sa région.  Elle a fait valoir que l’ANASE avait entamé un processus ambitieux d’intégration qui doit culminer dans la création de la Communauté économique de l’ANASE en 2015.  Elle a notamment expliqué que, dans ce cadre, les biens, services et capitaux pourront circuler librement dans les 10 pays de l’ANASE.  De plus, elle a noté que la région offrait des possibilités non seulement aux grandes entreprises mais aussi aux PME.  L’ANASE reconnaît les différents niveaux de développement existant dans la région et estime que ceux-ci offrent diverses opportunités de développement, a-t-elle ajouté.  Ainsi, elle a souligné que les pays plus développés offraient des opportunités d’affaires à haute valeur ajoutée alors que ceux moins développés fournissaient une main d’œuvre productive et bon marché.  Par ailleurs, elle a fait part des initiatives prises pour réduire la vulnérabilité de la région aux fluctuations de capitaux internationaux, dont les arrangements d’échanges monétaires avec la Chine, le Japon et la République de Corée.  Mme Adiwoso a enfin rappelé que l’ANASE faisait partie de l’Asie, une des régions les plus dynamiques du monde.  Elle a fait remarquer qu’en 2006, le PNB de tous les pays de l’ANASE réunis avait augmenté de 6% et que les investissements étrangers directs y avaient progressé de 17% en 2005, comparés à l’année précédente. 


M. JEAN-MARIE EHOUZOU (Bénin), qui s’exprimait au nom du Groupe africain, a dit qu’il était d’avis que la communauté internationale, et notamment les institutions de Bretton Woods, doivent accorder une priorité absolue à l’élimination de la pauvreté et à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement dans leurs interventions.  Très peu de progrès ont cependant été réalisés dans ces domaines, a-t-il regretté.  Les flux nets de transferts de capitaux des pays en développement vers ceux développés continuent de grimper; l’aide publique au développement en faveur de l’Afrique a connu une baisse, par comparaison à l’année 2005, tandis que la question de la participation des pays en développement dans les processus de prise de décision des institutions financières internationales reste sans issue, a-t-il souligné.  Il a ainsi souhaité qu’une réforme profonde de l’architecture financière internationale intervienne afin de refléter les changements survenus sur la scène internationale.


M. Ehouzou s’est félicité que de nombreuses initiatives, comme celle lancée en faveur des pays pauvres très endettés et celle concernant l’allègement de la dette multilatérale, aient été adoptées ces dernières années.  Des milliards de dollars libérés grâce aux mesures de remises de dette ont permis à certains pays africains d’accroître notablement leurs dépenses de santé, d’éducation, et d’investir dans d’autres services sociaux, permettant ainsi à un nombre important d’enfants d’avoir accès à l’école; et à des milliers d’autres personnes de disposer de médicaments antirétroviraux, a-t-il précisé.  Nous devons poursuivre sur cette voie, car l’annulation de la dette reste une affaire inachevée, a ajouté le représentant béninois, avant de souligner qu’il est prématuré de considérer la crise de la dette révolue aussi longtemps que de nombreux pays continueront de consacrer plus de ressources au paiement de leurs dettes plutôt que pour la satisfaction des besoins fondamentaux de leurs populations.  M. Ehouzou a en outre fait observer que les remises de dettes ne seront pas d’un apport bénéfique aussi longtemps que les pays pauvres auront des difficultés à atteindre la viabilité de la dette.  L’Afrique a besoin de l’annulation totale de ses dettes, afin de disposer de ressources adéquates pouvant lui permettre d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, a-t-il insisté.  L’Afrique a aussi besoin que les engagements pris soient honorés et que l’accroissement de l’APD qui lui a été promis se concrétise.  L’Afrique a besoin d’opportunités de marché afin de tirer le maximum de bénéfice de ses avantages comparatifs, a-t-il conclu.


M. GEORGE PATAKI (États-Unis) a demandé qu’une discussion plus approfondie sur les mesures pertinentes à prendre pour promouvoir et faciliter une gestion saine de la dette publique ait lieu.  Il a estimé que les progrès significatifs réalisés dans l’allègement de la dette en Afrique subsaharienne étaient une raison suffisante de convenir que le mot « crise » n’avait plus sa place dans le libellé des titres de ces délibérations.  Notant que beaucoup restait à faire pour assurer les bénéfices durables de l’Initiative PPTE, il a rappelé que l’Initiative pour l’allègement de la dette multilatérale, lancée à Gleneagles, avait déjà fourni 42 milliards de dollars, en plus des 45 milliards accordés au titre de remise de la dette de manière bilatérale.  Si la crise est passée, les défis demeurent, a-t-il cependant reconnu.  Ainsi, il a estimé qu’il fallait renforcer la capacité des pays en développement à bien gérer la dette et à mener des politiques macro-économiques saines.  Il a souligné que, sans engagement démontré, l’Initiative PPTE mènerait uniquement au gaspillage des ressources et a invité les pays éligibles à faire preuve de volonté politique.  Il a indiqué que les retards de la part des créanciers n’étaient pas forcément dus à un manque de volonté d’allégement de la dette et que sans une gestion responsable de la dette, les pays débiteurs ne pourraient pas réduire la pauvreté.  Le représentant américain a de plus insisté sur l’importance de la transparence, dont devraient faire preuve toutes les parties, et sur celle d’une responsabilisation accrue pour garantir que les investissements ne relancent pas un cycle de dette insoutenable. 


Par ailleurs, il a déclaré qu’en dépit de certains problèmes, les emprunts demeuraient un outil vital du financement du développement et qu’il fallait s’assurer que les marchés de la dette fonctionnaient.  Il a insisté sur l’importance d’alléger ou de restructurer les dettes dans le Cadre de viabilité de la dette, et a affirmé que les débiteurs devaient reconnaître et honorer leurs obligations.  Enfin, il a estimé que le système des Nations Unies pouvait jouer un rôle central en aidant les pays à développer leurs capacités de gestion de la dette, et en travaillant en coopération avec les institutions financières internationales.  Les Nations Unies peuvent aussi exhorter les pays débiteurs à suivre des politiques économiques et de gestion de la dette saines qui ouvriront la voie à des allégements de la dette, a-t-il ajouté.  Il a aussi suggéré que les Nations Unies nourrissent la volonté politique nécessaire pour que les créditeurs offrent aux débiteurs des traitements semblables à ceux du Club de Paris en ce qui concerne l’allègement de la dette. 


M. ABDUL ALIM (Bangladesh) a indiqué que le niveau de la dette extérieure des pays en développement, particulièrement des pays les moins avancés (PMA) reste inquiétant.  Le fardeau de la dette est devenu une entrave au développement, a-t-il souligné, avant de rappeler qu’elle a augmenté de 4% l’année passée pour atteindre 2,85 milliards de dollars en 2006.  Les engagements internationaux du passé n’ont pas eu les effets escomptés, a-t-il fait valoir.  Et les dirigeants des pays endettés se trouvent face à un grand dilemme: comment utiliser les ressources limitées pour le service de la dette sans sacrifier pour autant les secteurs sociaux dont la société a tant besoin?  Le représentant du Bangladesh a ainsi relevé la nécessité d’étendre immédiatement l’Initiative d'allégement de la dette multilatérale à tous les PMA.  Les initiatives récentes ont été lentes et n’ont pas débloqué assez de ressources, a-t-il regretté.  Et l’allègement de la dette n’a pas été un élément additionnel à l’aide publique au développement, contrairement à ce qui avait été promis, a-t-il relevé.  D’autre part, le représentant bangladais a fait observer que les flux financiers nets en provenance des institutions de Bretton Woods sont négatifs et continuent de baisser.  Les transferts nets de ressources vers les PMA ont baissé pour passer de 10,5 milliards de dollars en 1996 à 1,7 milliards en 2006, a-t-il précisé.  Soulignant que ces faits posent la question du rôle que jouent ces institutions ainsi que celle de leur pertinence et de leur efficacité, il a insisté sur la nécessité cruciale de fortifier le mandat le rôle des institutions de Bretton Woods.  Le représentant a également fait observer que les pays en développement sont sérieusement sous-représentés dans ces institutions, avant de plaider en faveur d’un changement dans leur gouvernance.  Il a ainsi fait valoir que doubler le nombre de voix de base accordées aux pays en développement dans les organes directeurs du FMI et de la Banque mondiale n’y affectera pas réellement la distribution du pouvoir.  Un poids spécial devrait y être accordé aux PMA, a-t-il estimé.


Mme TATIANA ZVERERA (Fédération de Russie) a souligné l’importance du rôle que jouent les mécanismes financiers internationaux afin de garantir la stabilité du système financier international, qui est un des éléments clefs pour parvenir aux objectifs de développement.  La représentante a indiqué que la Fédération de Russie contribuait grandement à la stabilisation financière mondiale, notamment en remboursant, avant les délais, sa dette extérieure auprès du FMI et du Club de Paris.  Elle a aussi noté que son pays contribuait à l’allégement du fardeau de la dette des pays moins avancés (PMA) qui ont souffert de chocs extérieurs.  La représentante a reconnu la gravité de l’endettement de certains pays en développement et a affirmé que la Fédération de Russie s’efforcera d’alléger ce fardeau par des mesures prises dans le cadre du Club de Paris, notamment.  Elle a rappelé le grand soutien de son pays à l’Initiative PPTE, qu’elle a qualifié de « source importante de mobilisation de ressources pour le développement ».  Elle a estimé que le soutien de la Fédération de Russie à l’Initiative PPTE avait été crucial puisque son pays avait effacé la dette des pays africains à hauteur de 11,3 milliards de dollars.  Toutefois, elle a indiqué que ces mesures visant à effacer la dette ne pouvaient être efficaces sans effort pour renforcer les politiques de croissance des pays qui en bénéficient.  Sans croissance économique, les dettes effacées sont remplacées par de nouvelles dettes, a-t-elle averti. 


M. NOR-EDDINE BENFREHA (Algérie) a fait observer que la réalisation de l’agenda pour le développement reste tributaire de la mise en place d’un partenariat mondial pour le développement.  Ce partenariat requiert l’amélioration de la surveillance multilatérale qui reste au centre des préventions des crises, a-t-il précisé.  Il a souligné que l’établissement d’un système financier international prévisible et non discriminatoire est plus que jamais une nécessité, et qu’il serait salutaire de prendre en charge les préoccupations de l’ensemble des pays en développement dans le cadre des réformes des institutions financières internationales pour assurer à ces pays une participation équitable aux prises de décisions au sein de ces institutions.  En outre, le représentant de l’Algérie a estimé important de consolider et de promouvoir la concertation entre les Nations Unies et ces institutions, notamment dans le cadre de l’élaboration de stratégies globales à même de favoriser le développement et de prémunir les économies vulnérables des effets induits par les instabilités économiques et financières internationales.


M. Benfreha a fait observer que la croissance économique mondiale reste marquée par le fossé qui se creuse de plus en plus entre les pays développés et les pays à faible revenu.  Le développement inégalitaire entre le Nord et le Sud est accentué par les transferts nets de ressources financières des pays pauvres du Sud vers les pays du Nord, a-t-il souligné.  S’intéressant aux réserves de change qui soulèvent des questionnements quant à leur rationalité, il a expliqué qu’elles sont dictées par l’architecture du système financier international et servent au paiement de la dette.  Elles sont aussi un moyen de se prémunir contre les goulets d’étranglement qui peuvent apparaître après les crises.  L’augmentation de ces réserves de change mérite un examen très approfondi afin d’aider les pays en développement à gérer d’une manière optimale les leurs pour qu’ils servent au mieux leur développement, a-t-il estimé.  Pour conclure, il a fait observer que toutes ces considérations posent avec acuité la nécessité d’une réforme du système financier international pour remédier à ses dysfonctionnements structurels tout en tenant compte du rôle sans cesse croissant joué par les pays en développement dans l’économie mondiale.


Mme ZAKIA EL MIDAOUI (Maroc) a fait observer que les pays en développement se trouvent confrontés à de nouveaux défis survenus à la suite des profondes mutations politiques, économiques, financières et sociales qui ont marqué la scène internationale depuis le début de cette décennie.  Elle a expliqué que les pays en développement ont entrepris des réformes courageuses pour consolider leur système politique démocratique et l’État de droit, et qu’ils ont beaucoup fait pour améliorer la gouvernance et lutter contre la corruption.  Mme El  Midaoui a fait observer que les pays africains, au même titre que les autres pays en développement, ont besoin que la communauté internationale s’intéresse plus à leur stabilité et à leur développement.  Et si elle a salué les mesures prises concernant la dette et l’aide publique au développement, elle a estimé qu’elles restent partielles et insuffisantes.  La dette extérieure constitue un handicap majeur pour tous les efforts de développement économique entrepris par les pays en développement, a-t-elle poursuivi, en ajoutant que cela est d’autant plus vrai que la baisse des revenus des exportations et l’augmentation des taux d’intérêts aggravent la crise d’endettement. 


Mme El Midaoui a ainsi plaidé en faveur de l’allègement de la dette des pays pauvres lourdement endettés et des pays à revenu moyen, arguant que cet allègement pourrait libérer des ressources importantes pour lutter contre la pauvreté et favoriser le développement humain.  En outre, elle a fait observer que le cadre de la viabilité de la dette doit intégrer une évaluation des besoins liés à la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire pour le développement.  À cet égard, la représentante a rappelé que le Maroc fait sien l’appel à veiller à ce que la nécessité d’assurer le service de la dette ne compromette pas l’aptitude à honorer les obligations que les pays ont au titre de la réalisation des droits économiques sociaux et culturels fondamentaux.  La bonne gestion de la dette et la prévention des crises revêtent une importance particulière pour les pays en développement, a-t-elle poursuivi, se félicitant à cet effet de la contribution de la CNUCED qui, par le truchement du Programme du Système de gestion et d’analyse de la dette, fournit aux pays en développement des services de coopération technique et de suivi de leur dette extérieure.  Pour conclure, la représentante du Maroc s’est inquiétée de l’augmentation des transferts de fonds, notamment dus au paiement du service de la dette.  L’accroissement des transferts de ressources financières des pays en développement vers les pays développés pose aux pays en développement des problèmes de coûts d’opportunité dans la mesure où ces ressources auraient pu servir à accroître l’investissement intérieur dans les pays pauvres et leur assurer un taux de croissance plus rapide, a-t-elle souligné.


Mme NADIA M. OSMAN (Soudan) a déclaré que la dette extérieure était l’un des plus importants obstacles au développement social et économique des pays en développement.  Elle a estimé que si le rapport du Secrétaire général notait une amélioration de la situation mondiale en matière de dette, ce constat cachait cependant les problèmes auxquels, individuellement ou collectivement, certains groupes de pays, comme les PMA, font face.  Elle a expliqué que le Soudan faisait face à des défis complexes, avec une dette extérieure de 27,2 milliards de dollars fin 2006, en augmentation de 9 milliards depuis 2000.  La majorité de cette augmentation, soit 6 milliards, est due à une accumulation d’arriérés auprès du Club de Paris et d’autres débiteurs, a-t-elle précisé.  Mme Osman a de plus affirmé que fin 2006, la dette externe soudanaise était équivalente à environ 55% du PNB du pays et s’élevait à 340% du montant de ses exportations.  Elle a souligné que le fardeau de la dette du Soudan menaçait sa croissance et sa stabilité macro-économique, entravait ses efforts d’éradication de la pauvreté, et était un obstacle au respect des obligations qu’a le Soudan aux termes des accords de paix et de ses efforts de reconstruction et de réhabilitation.  La représentante a noté que le problème de la dette forçait son pays à avoir recours à des facilités d’emprunt à des termes non favorables pour financer des programmes essentiels de développement.  La représentante a mis en avant la création d’une unité de la dette externe, au sein de la Banque centrale du Soudan, qui a pour tâche d’améliorer la gouvernance, la transparence et la responsabilisation; et de contribuer au soutien à la gestion macroéconomique du pays.  Malgré des politiques économiques saines et les efforts déployés par mon pays, le Soudan n’a pas bénéficié des initiatives d’allègement de la dette, celles-ci posant des conditions politiques difficiles à tenir, a-t-elle indiqué.  Elle a ainsi lancé un appel urgent pour que les donateurs traitent de cette question, particulièrement en faveur des pays qui ne remplissent pas les critères d’éligibilité à l’allégement de la dette. 


M. RAJA NUSHIRWAN ZAINAL ABIDIN (Malaisie) a fustigé le manque de progrès, l’inertie et la platitude qui caractérisent les efforts de la communauté internationale.  S’il y a certes eu augmentation de l’aide publique au développement (APD) depuis l’adoption du Consensus de Monterrey, a-t-il relevé, on constante cependant que cette augmentation de l’APD est surtout liée à la réduction de la dette.  De surcroît, l’APD a, en 2006, diminué de 5,1% par rapport à son montant de 2005.  Et en tenant compte des nouveaux engagements pris, l’APD atteindra tout au plus 0,36% du PNB des pays industrialisés en 2010, ce qui est bien en dessous de la cible des 0,7%, a-t-il fait observer.  L’inertie et la platitude semblent également marquer les efforts de réforme de l’architecture financière internationale, a  poursuivi M. Zainal Abidin.  Il a regretté qu’en dépit de l’impulsion de réforme donnée aux lendemains de la crise asiatique, le système financier international soit demeuré à ce jour « inchangé et muet ».  Il a ainsi attiré l’attention sur la légitimité, la crédibilité et la pertinence des institutions de Bretton Woods, où la question de la participation des pays en développement se pose de plus en plus de manière aigüe.  Le fait que nombre de pays en développement aient remboursé leurs prêts, alors que d’autres hésitent à souscrire à de nouveaux emprunts, est la manifestation de leur déception face aux comportements brutaux du Fonds monétaire international (FMI), a-t-il souligné.  S’il veut garder sa légitimité et sa crédibilité, le FMI doit retourner à son mandat d’origine et cesser d’être l’instrument des riches, a-t-il averti.  M. Zainal Abidin a souligné que l’augmentation de l’instabilité du système économique international est un obstacle majeur à la croissance économique des pays en développement.  Des politiques macroéconomiques solides leur sont nécessaires pour survivre et prospérer en ces périodes turbulentes, a-t-il souligné.  Faisant allusion aux critiques qui s’élèvent contre l’accumulation de réserves monétaires par les pays en développement, il a fait observer que les activités qui risquent de conduire à des crises systémiques ne viennent pas d’acteurs basés dans les pays en développement, mais bien dans le monde industrialisés.  Pour conclure, il a indiqué que la Malaisie continuera sur la lancée des politiques macroéconomiques qui l’ont si bien servi par le passé.  Les perspectives de croissance semblent être fortes, avec des prévisions allant de 6% à 6,5% pour l’année prochaine, a-t-il précisé, avant d’ajouter que le pays compte poursuivre sa politique d’accumulation de larges réserves financières.


M. Z.D. MUBURI-MUITA (Kenya) a estimé que les questions relatives au système financier international étaient centrales pour trouver des solutions aux problèmes de développement de la plupart des pays en développement.  Il a affirmé que le système financier international était devenu synonyme du FMI et de la Banque mondiale qui jouent un rôle significatif dans la régulation des flux financiers.  Constatant l’augmentation des flux de capitaux des pays en développement vers ceux développés, il a affirmé que cette tendance entravait les perspectives de développement des pays en développement.  Il a déclaré que l’incapacité de traiter de ce genre de tendances démontrait la fragilité du système financier international et son incapacité à trouver les moyens qui permettraient de retenir les ressources et d’encourager le développement dans les pays pauvres.  Par ailleurs, il a regretté qu’une bonne partie de l’augmentation de l’APD depuis 2002 soit en fait fournie sous forme d’allégement de la dette.  Il a rappelé que l’allégement de la dette ne fournissait pas de nouvelles ressources en faveur du développement et ne devait donc pas se substituer à l’APD.  Le représentant du Kenya a déclaré que la réforme de l’architecture financière internationale avait été lente et ne reflétait pas l’influence et le nombre des pays en développement.  Il faut traiter de la question de la représentation des pays en développement dans les processus de prise de décisions du FMI et de la Banque mondiale, a-t-il insisté.  Enfin, tout en saluant les initiatives d’allégement de la dette comme celle prise en faveur des pays pauvres très endettés (Initiative PPTE) ou celle prise à Gleneagles, il a affirmé qu’elles étaient insuffisantes puisque, par exemple, elles ne traitaient pas des pays très endettés mais qui ne sont pas classés dans la liste des pays les plus pauvres, comme le Kenya.  M. Muburi-Muita a déclaré que l’annulation de la dette constituait la véritable solution au problème qui se pose aux pays à revenu intermédiaire.  Une approche fragmentée à la question de la dette ne sera pas efficace à long terme, a-t-il conclu. 


M. SANTOSH BAGRODIA (Inde) a constaté avec inquiétude que l’année 2006 est la dixième année consécutive au terme de laquelle on observe un transfert net de ressources financières des pays en développement vers les pays développés.  Plutôt que promouvoir des transferts de fonds Nord-Sud, allant des pays développés vers les pays pauvres et en développement dans le but de soutenir leurs efforts de développement, l’architecture financière internationale semble au contraire soutenir et encourager les flux financiers Sud-Nord.  Pire encore, a ajouté le représentant indien, ce type de transfert augmente encore jusqu’à atteindre aujourd’hui 0,6 trillions (600 milliards) de dollars.  Ces sommes considérables auraient été plus utiles dans la promotion de l’éradication de la pauvreté dans les pays en développement, a-t-il souligné.  S’agissant des réserves de liquidités des pays en développement, il a fait valoir qu’elles sont constituées à titre de précaution.  Il s’agit d’une conséquence directe des conditions imposées par les institutions de Bretton Woods, a-t-il précisé, avant d’ajouter que ce fait illustre l’incapacité de ces institutions à remplir leur mandat originel et pose la question du rôle qu’elles devraient jouer.  Il a ainsi insisté sur la nécessité de réformer ces institutions et notamment d’y accroître la participation des pays en développement afin de mieux répondre aux besoins des pays concernés par leurs activités.  Il faut mener ces réformes jusqu’à leur terme, a-t-il ajouté.


Bien qu’il y ait une augmentation des flux financiers privés allant en direction des pays en développement, ces flux restent instables, a-t-il poursuivi.  En outre, ces fonds privés ne vont pas vers les secteurs sociaux, a-t-il ajouté.  M. Bagrodia a ainsi relevé la nécessité d’accroître l’aide publique au développement (APD), qui reste en dessous du niveau escompté de 0,7% du PIB des pays riches.  Il a également déploré comme l’a montré le rapport du Secrétaire général, que l’allègement de la dette soit désormais considéré comme une composante significative de l’APD.  Il est ironique que les pays qui ont des arriérés importants et, donc, le plus besoin d’aide, aient le moins bénéficié des mesures d’allègement de la dette, a-t-il fait observer.  En outre, le représentant indien a déploré que les mesures d’allègement de la dette aient été trop lentes.  Il s’est aussi dit d’avis que la viabilité de la dette doit être définie en fonction de la capacité que devraient avoir les pays d’allouer des ressources aux efforts qu’ils déploient pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, plutôt que d’être limitée à des jugements subjectifs sur la bonne gouvernance.  Il a fustigé les effets causés aux pays en développement par les instruments financiers actuels, dont il a qualifié les composantes d’ « ésotériques » et s’est élevé contre la création de nouveaux instruments « exotiques » pour régler la question de la dette.  Le représentant a enfin plaidé en faveur d’une plus grande surveillance du système financier international.


M. FALAH MUSTAFA BAKIR (Iraq) a déclaré que, suite à la chute du régime de Saddam Hussein, l’Iraq s’attachait à reconstruire son économie, ses infrastructures et ses institutions et à établir le cadre de l’état de droit.  Il a indiqué que l’Iraq menait une réforme économique sur plusieurs fronts, dont la réduction des subventions publiques, l’élargissement du secteur privé, la promotion des investissements, la restructuration du secteur financier et le renforcement de l’intégration régionale et internationale.  L’Iraq a aussi donné la priorité à la réforme de son secteur bancaire, a-t-il ajouté.  M. Bakir a rappelé que lors du lancement du Compact international pour l’Iraq, en mai 2007, des créanciers avaient offerts d’alléger la dette du pays, et il a encouragé d’autres pays à faire de même.  Il a aussi demandé une révision des dédommagements que le pays doit verser au Koweït, ces réparations constituant un lourd fardeau au moment où l’Iraq passe à travers une période de transition économique et démocratique.  Il a souligné que la sécurité demeurait le plus grand obstacle à la mise en œuvre des politiques et des programmes gouvernementaux.  Il a noté que le Gouvernement régional du Kurdistan mettait en place une vision claire pour la région, ceci dans le cadre d’une vision fédérale de l’Iraq, et que cette région connaissait, depuis la chute de Saddam Hussein, une croissance économique sans précédent.  Il a estimé que cette croissance était le résultat d’un véritable engagement envers le secteur privé et d’une augmentation des investissements étrangers.  Il a aussi fait valoir que la région du Kurdistan avait adopté une loi pour garantir que ses ressources naturelles soient utilisées pour le bien de la population.  Les revenus des réserves de pétrole et de gaz du pays serviront de base à notre économie et fourniront le soutien financier nécessaire à la reconstruction des infrastructures, a-t-il précisé.  M. Bakir a enfin noté que l’éducation était une autre priorité du pays car les méthodes d’enseignement et les établissements actuels étaient dépassés. 


Mme AURA MAHUAMPI RODRIGUEZ DE ORTIZ (Venezuela) a plaidé en faveur du renforcement des travaux de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), agence multilatérale au sein de laquelle les pays en développement ont réaffirmé l’importance de préserver des espaces politiques face aux règles du commerce international et aux déséquilibres de l’architecture financière internationale.  Elle a aussi témoigné du soutien de sa délégation à toute mesure destinée à mettre en œuvre les engagements souscrits à Doha ou à Monterrey.  Mme Rodriguez de Ortiz a également insisté sur l’importance d’accroître la participation des pays en développement sur la scène commerciale internationale.  Les pays développés, en raison de leur poids considérable sur les marchés internationaux, ont un rôle important à jouer à cet égard, a-t-elle estimé.


La situation mondiale actuelle montre que le système financier international doit permettre une mobilisation cohérente de toutes sortes de sources de financement, comme la mobilisation de ressources intérieures, l’aide publique au développement (APD), et l’allègement de la dette, ainsi qu’un système commercial international ouvert, prévisible et équitable, a souligné la représentante du Venezuela.  Le poids de la dette extérieure persiste et a une incidence négative sur le développement des pays du Sud, a-t-elle rappelé.  Et cela ne sert à rien d’octroyer des ressources à ces pays si elles ne servent qu’à financer la dette, a-t-il estimé.  En outre, l’APD ne devrait pas être soumise à des critères et des conditionnalités définis par les pays industrialisés et les institutions financières internationales, a-t-elle ajouté, arguant que ces conditions contreviennent au droit des peuples à décider pour eux-mêmes de leurs activités et de l’orientation de leur économie.  Mme Rodriguez de Ortiz s’est également inquiétée de ce que les dernières initiatives en matière d’allègement de la dette aient été limitées aux pays à faible revenu, excluant ainsi les pays à revenu intermédiaire.  Pour conclure, elle a expliqué que le Venezuela a développé une politique financière « du Sud pour le Sud », qui est exemple des nouvelles stratégies mises en œuvre par les pays en développement pour assurer entre eux un financement intrarégional et réduire la dépendance et la vulnérabilité aux conditionnalités imposées par les marchés de capitaux internationaux.  Elle s’est à cet égard réjouie que les autorités financières de sept pays latino-américains (Argentine, Bolivie, Brésil, Équateur, Paraguay, Uruguay et Venezuela) aient, la semaine dernière, annoncé la consolidation de la Banque du Sud dont la création sera concrétisée en novembre prochain à Caracas.


M. ROLAND TÉTIALI TOH (Côte d’Ivoire) a affirmé que les progrès économiques réalisés dans le monde ne devaient pas occulter la persistance des effets néfastes de la dette qui entrave la mise en œuvre des politiques de développement.  Il a fait valoir que son pays s’attelait à la normalisation de sa situation économique et financière dans cette période déterminante de consolidation du processus de paix et de réconciliation.  Il a expliqué que cette normalisation s’était traduite par l’élaboration d’un cadre macroéconomique garantissant la viabilité de l’action gouvernementale, ce cadre étant soutenu par un Programme d’assistance d’urgence post conflit négocié avec le FMI en août dernier.  Ce programme, a-t-il poursuivi, vise à créer les conditions nécessaires pour être éligible à la Facilité pour la réduction de la pauvreté, puis l’Initiative PPTE.  Il a aussi fait remarquer que la Côte d’Ivoire avait trouvé un accord sur le traitement des arriérés dus à la Banque mondiale et à la Banque africaine de développement, en procédant aux paiements anticipés des échéances de juillet et août 2007.  Toutes ces actions fortes achèvent de convaincre de la bonne disposition de nos autorités à faire face à leurs engagements internationaux, malgré le contexte socio-économique difficile, a-t-il argué.  Par ailleurs, M. Tétiali Toh a souhaité que ses partenaires au développement songent à alléger le fardeau de la dette de la Côte d’Ivoire.  Concernant l’Initiative PPTE, il a estimé que certaines de ses conditions d’éligibilité étaient inappropriées et ne tenaient pas compte des spécificités de certains pays.  Il a déclaré que, pour la Côte d’Ivoire, ravagée par 5 ans de conflits et disposant de moyens limités, le service de la dette constituait une charge lourde à porter de trop, étant donné qu’il absorbe un tiers du budget du pays.  Il a regretté que cette situation entrave gravement les efforts déployés par le Gouvernement dans la mise en œuvre de son programme de sortie de crise qui nécessite des moyens considérables.


M. GENET TESHOME (Éthiopie) a estimé que l’allégement de la dette ne devait pas se substituer à d’autres sources de financement et a souhaité que les nouvelles aides soient octroyées sous forme de dons, afin d’empêcher une nouvelle crise de remboursement de la dette extérieure.  Il a insisté sur la nécessité d’augmenter le volume de l’assistance et d’en améliorer la coordination et la prévisibilité.  Il a souligné qu’il fallait accorder une attention particulière aux pratiques de prêts responsables et à l’aide aux pays afin qu’ils gèrent leurs emprunts sainement et évitent d’encourir des dettes non soutenables.  Le représentant a mis en avant la situation de son propre pays, faisant remarquer que l’Éthiopie avait bénéficié de l’allégement de la dette au titre des initiatives PPTE, et était l’un des 18 pays ayant atteint le point d’achèvement.  Il a fait valoir que son pays était aussi éligible à l’Initiative d’allégement de la dette multilatérale.  En conséquence de ces annulations de dettes bilatérales et multilatérales, a-t-il précisé, la dette éthiopienne est passée de 6 milliards, en juin 2006, à 2,3 milliards en juillet 2007.  Il a indiqué que cette situation avait permis au Gouvernement de l’Ethiopie de financer des secteurs sociaux prioritaires.  S’agissant de la lutte contre la pauvreté, il a expliqué que son pays mettait en œuvre la deuxième phase de sa stratégie de réduction de la pauvreté, mais a regretté que celle-ci soit graduelle et difficile en raison du manque de ressources. 


M. Teshome a d’autre part déploré, qu’en dépit de l’annulation et de l’allégement de la dette, l’APD consacrée à l’Éthiopie soit beaucoup moins importante que celle octroyée à d’autres pays à bas revenu, y compris en Afrique subsaharienne.  Il a affirmé qu’il était urgent d’augmenter l’APD en faveur de son pays, qui lui-même s’employait à mobiliser les ressources internes.  Enfin, il a mis en avant la croissance de l’Éthiopie, qui se situe à un taux de 6,7%, au dessus de la moyenne de 5,8% des pays d’Afrique subsaharienne.  Il a soutenu que ce taux avait été atteint par le biais de politiques macroéconomiques sûres et d’interventions novatrices dans les domaines de l’éducation, du développement, de l’infrastructure, de l’agriculture et de la sécurité alimentaire.  Il a appelé les institutions financières internationales à intensifier leurs engagements pour fournir des conseils, une assistance technique et un soutien financier à leurs membres.


M. HABIB T. B. JARRA (Gambie) a fait observer qu’une des irrégularités du XXIème siècle réside dans son architecture financière internationale, qui est un système qu’il a qualifié de « non démocratique ».  Il a déploré que la participation et l’influence des pays en développement restent extrêmement marginales dans cette structure, et ce, en dépit des implications significatives qu’ont les décisions qui y sont prises sur la croissance et le développement des pays en développement.  Il a ainsi plaidé en faveur d’une réforme inclusive du système financier international et notamment du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale.  S’intéressant ensuite au problème de la dette, il a fait observer que de nombreux pays ont une dette qui excède leur PIB, avant de souligner les obstacles que de telles dettes posent à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Dans les pays du Sud, la dette extérieure empêche le développement durable, la sécurité, et la stabilité politique et économique, a-t-il insisté.  Le poids et la dynamique de la dette montrent que les emprunts ne contribuent pas à financer le développement, a-t-il ajouté, avant de faire observer qu’il s’agit d’un mécanisme qui se perpétue et aggrave la pauvreté.


En dépit des améliorations relatives constatées dans la structure de la dette des pays en développement, leur dette extérieure totale a augmenté en termes nominaux, a poursuivi M. Jarra.  Il a en outre fait remarquer que l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés et l’Initiative d’allègement de la dette multilatérale se révèlent clairement incapables d’assurer la réalisation des OMD.  La campagne pour l’annulation de la dette doit continuer et doit être appuyée, a-t-il insisté.  Et les membres de la communauté internationale, tout comme les partenaires au développement, doivent reconnaître leurs responsabilités face à la « dette illégitime » de nombreux pays en développement.  Le représentant de la Gambie a également estimé que l’échange de dettes contre des avoirs ne constitue pas une solution, ces avoirs étant utilisés pour soutenir des programmes de privatisation et modifiant les structures nationales en faveur des compagnies transnationales.  Il a en outre fait observer que la coopération Sud-Sud en la matière, caractérisée par l’achat des dettes entre pays en développement, n’est pas non plus une solution idéale, car elle ne fait que transférer le fardeau de la dette d’un pays du Sud vers un autre.  M. Jarra a ainsi exhorté la communauté internationale à considérer d’autres mesures d’allègement de la dette, comme par exemple l’annulation totale de la dette des pays très endettés ou l’allègement de la dette des pays à revenu moyen et bas.


*  ***  *


À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.