LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL OUVRE SON DÉBAT CONSACRÉ AUX AFFAIRES HUMANITAIRES
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Conseil économique et social
Session de fond de 2006 – après-midi
LE CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL OUVRE SON DÉBAT CONSACRÉ AUX AFFAIRES HUMANITAIRES
(Publié tel que reçu)
GENÈVE, 13 juillet (Service d’information des Nations Unies) -- Le Conseil économique et social a entamé cet après-midi, en présence de M. Jan Egeland, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, son débat consacré aux affaires humanitaires. La réunion était présidée par M. Prasad Kariyawasam, Vice-Président du Conseil.
M. Egeland a fait valoir les progrès considérables enregistrés en matière de coordination de l'aide sur le terrain, notamment par le biais d'une collaboration étroite fondée sur le système de la direction groupée. Cette méthode des groupes exige une évaluation plus rigoureuse des besoins, un renforcement des capacités de réaction immédiate, ainsi qu'une amélioration générale de la gestion des activités, a-t-il souligné. M. Egeland a en outre insisté sur l'importance que revêt le respect des principes humanitaires et déploré que trop d'États membres où les populations connaissant des souffrances terribles refusent encore tout accès de la communauté internationale à leur territoire.
S'exprimant au nom de M. Bill Clinton, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le tsunami, M. Eric Swarch, Envoyé spécial adjoint, a souligné l'importance de bénéficier d'une aide suffisante pour faire face aux conséquences des catastrophes naturelles, ainsi que sur la nécessité de procéder à des évaluations complètes des besoins.
Dans le cadre du débat qui a suivi, plusieurs intervenants ont souligné que l'aide humanitaire internationale se doit de respecter plusieurs principes, notamment en matière de neutralité, d'indépendance et d'impartialité. L'intérêt du système de direction groupée de l'action humanitaire a été souligné par plusieurs représentants. Nombre d'entre eux ont en outre salué le lancement du Fonds central de réponse d'urgence. Comme l'a montré la gestion des suites du tremblement de terre au Pakistan, les militaires peuvent jouer un rôle important dans l'aide d'urgence, a-t-il été souligné. Il a aussi été affirmé à de nombreuses reprises qu'il convenait de renforcer les capacités de réaction locale aux crises humanitaires. Plusieurs intervenants ont en outre souligné l'urgence qu'il y a à prévenir et à punir les actes de violence sexuelle commis à l'encontre des femmes dans les situations humanitaires.
Des représentants des États suivants ont fait des déclarations: États-Unis, Afrique du Sud (au nom du Groupe des 77 et de la Chine), Finlande (au nom de l'Union européenne), Fédération de Russie, France, Canada, Australie, Pakistan, Japon, Norvège, Tanzanie et Chine. Des représentants de l'Ordre militaire souverain de Malte, de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et de l'Organisation mondiale de la santé se sont également exprimés.
Le Conseil poursuivra, lundi 17 juillet à 10 heures, l'examen des questions relatives aux affaires humanitaires dans le cadre d'une réunion-débat sur le thème de la violence à motivation sexiste dans les situations d'urgence humanitaire.
Débat consacré aux affaires humanitaires
Introduction et documentation
M. PRASAD KARIYAWASAM, Vice-Président du Conseil économique et social, a souhaité insister sur l'importance que revêt l'assistance humanitaire pour les gouvernements et les populations qu'ils représentent. Il s'est dit convaincu que les activités humanitaires menées par les Nations Unies ont donné d'excellents résultats et atteint les populations qui en avaient besoin. Les prochains jours offrent l'occasion d'évaluer les événements survenus l'année dernière, de discuter de l'avancée des réformes en matière d'assistance humanitaire et d'identifier les défis, a-t-il déclaré. M. Kariyawasam a par ailleurs jugé essentiel que soit adopté le projet de résolution soumis au Conseil concernant ces questions.
M. JAN EGELAND, Coordonnateur de l'action humanitaire des Nations Unies, a fait valoir certains progrès accomplis ces derniers mois en matière de coordination de l'aide humanitaire. Le rapport complet du Secrétaire général sur le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence fournie par les organismes des Nations Unies met en exergue la manière dont les Nations Unies ont abordé certains défis en matière d'aide humanitaire. Les progrès sont considérables, notamment en matière de coordination de l'aide sur le terrain, a fait valoir M. Egeland. Il a expliqué que les Nations Unies collaborent étroitement avec leurs partenaires sur le terrain, dans le cadre de l'adoption de la méthode des groupes. Neuf de ces groupes ont été créés afin de coordonner l'action humanitaire, notamment dans les domaines de l'approvisionnement en eau et de la santé d'urgence. L'action dans le cadre de la méthode des groupes est dirigée par des institutions et organisations engagées sur le terrain, de manière à ce que les ressources et l'expertise nécessaires soient mobilisées et utilisées à bon escient. Il est encore trop tôt pour proclamer le succès de cette approche, même si ses premiers résultats suggèrent une meilleure efficacité des activités, a indiqué M. Egeland. Au Pakistan, suite au tremblement de terre qui a frappé ce pays l'an dernier, l'adoption de la méthode des groupes a permis de structurer une situation extrêmement compliquée, a-t-il précisé. La manière dont on fonctionne avec les groupes d'agents humanitaires exige une évaluation plus rigoureuse des besoins, un renforcement des capacités de réaction immédiate ainsi qu'une amélioration générale de la gestion des activités, a souligné M. Egeland. L'approche de l'action humanitaire doit être davantage axée les ressources locales, a-t-il par ailleurs affirmé. Les institutions et acteurs locaux doivent être soutenus et les Nations Unies doivent coordonner leur action avec les organisations non gouvernementales et les sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a-t-il insisté. Les réformes devront être progressives, a ajouté M. Egeland.
Le Coordonnateur de l'action humanitaire des Nations Unies a par ailleurs insisté sur l'importance que revêt le respect des principes humanitaires. Le respect de la vie humaine, l'impartialité, l'indépendance et la neutralité sont les principes qui doivent guider l'action humanitaire, a-t-il rappelé. M. Egeland a déploré que trop d'États Membres dont les populations connaissent des souffrances terribles refusent encore tout accès de la communauté internationale à leur territoire. Il a par ailleurs dénoncé la prévalence des violences commises à l'encontre des femmes et des enfants lors des crises humanitaires. Les Nations Unies ont d'ailleurs reconnu leur propre complicité dans certaines exactions et pris des mesures pour prévenir et sanctionner ces violences, a-t-il souligné. Après avoir insisté sur la nécessité d'une meilleure gestion des flux financiers de l'aide humanitaire, M. Egeland a affirmé que le même niveau de professionnalisme qui prévaut dans l'aide au développement doit s'appliquer à l'action humanitaire. La première étape à cet égard consiste à adopter une terminologie normalisée, à harmoniser les indicateurs statistiques et à unifier les objectifs, a-t-il indiqué.
Le rapport du Secrétaire général sur le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence fournie par les organismes des Nations Unies (A/61/85–E/2006/81) examine quelques-unes des grandes améliorations apportées aux activités humanitaires, s'attache aux propositions techniques visant à renforcer les lignes d'action à tous les niveaux et souligne d'autres sujets de préoccupation tels que la violence à motivation sexiste et les situations d'urgence chroniquement sous-financées. Le Secrétaire général note que l'année écoulée a été caractérisée à la fois par des catastrophes naturelles d'une ampleur exceptionnelle et par des tendances inquiétantes dans des situations d'urgence complexes. Si les niveaux actuels de vulnérabilité de certains pays ne sont pas contrôlés, ils provoqueront des déplacements croissants de personnes, feront obstacle au développement et prolongeront les cycles de pauvreté. Si le nombre de morts dans les conflits armés a diminué au cours des 20 dernières années (les guerres dans les années 90 ont été trois fois moins meurtrières que celles des années 70), le nombre de morts au combat ne donne pas une image fidèle du véritable coût humain des conflits, qui entraînent notamment des morts civiles dues à des maladies évitables et à la faim. Il faut donc une conception plus globale de l'aide humanitaire faisant appel aux efforts conjoints des fournisseurs de secours et des acteurs du développement pour mener d'emblée des activités de subsistance, et pas seulement des activités de secours.
Le Secrétaire général fait une série de recommandations s'agissant notamment de la nécessité d'investir dans la préparation, le relèvement rapide et à la réduction des risques dans le cadre des interventions humanitaires; d'améliorer la coordination et la mise en œuvre des efforts visant à recenser et renforcer les capacités locales, nationales et régionales d'intervention, en commençant par les pays menacés par des crises humanitaires; de reconnaître le rôle du Coordonnateur des secours d'urgence et des coordonnateurs humanitaires pour obtenir que les organisations humanitaires compétentes du système des Nations Unies aient accès aux populations qui ont besoin d'une aide humanitaire.
Le Conseil est également saisi du rapport du Secrétaire général sur le renforcement des secours d'urgence, du relèvement, de la reconstruction et de la prévention au lendemain de la catastrophe du raz-de-marée dans l'océan Indien (A/60/86–E/2005/77), qui rend compte des leçons tirées des efforts d'aide humanitaire et met en évidence les principales considérations découlant des efforts de relèvement en cours dans les pays touchés. Il présente les succès enregistrés et les difficultés rencontrées dans le cadre de l'intervention en réaction à l'événement et des efforts de relèvement, et aborde plusieurs thèmes communs à toutes les opérations d'intervention et de relèvement, tels que la prise en main et la direction des opérations par les pays concernés, les dispositifs d'intervention en cas de catastrophe, la coordination des activités menées durant les phases de secours et de relèvement, la mobilisation des ressources, la participation de la société civile et la réduction des risques.
M. ERIC SWARCH, Envoyé spécial adjoint du Secrétaire général pour les pays affectés par le tsunami (s'exprimant au nom de M. Bill Clinton, l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour les pays affectés par le tsunami, actuellement en Afrique, a déclaré qu'un bilan des opérations menées suite au raz-de-marée de décembre 2005 a été effectué et il importe de tirer des enseignements pour l'avenir, a-t-il indiqué. Il ne faudrait pas oublier les progrès qui ont été réalisés ces derniers mois, s'agissant notamment de la reconstruction de maisons et du retour du tourisme dans les régions touchées par le tsunami, a souligné M. Swarch. Faisant référence au rapport du Secrétaire général, qui stipule qu'il faut renforcer l'assistance humanitaire et éviter les séquelles dommageables suite au tsunami, il a insisté sur l'importance de bénéficier d'une aide suffisante pour pallier ces séquelles, ainsi que sur l'importance de disposer d'une évaluation appropriée, statistiques à l'appui. Il faut conjuguer les efforts de chacun et veiller à assurer la promotion du respect des droits de l'homme, pour être certains que l'aide fournie aux populations touchées n'exacerbe pas les disparités au sein des différents groupes, a-t-il en outre souligné.
Débat
MME G.J. MTSHALI (Afrique du Sud, au nom du Groupe des 77) a dit que les catastrophes naturelles ont des conséquences à très long terme pour les populations touchées, ce qui justifie pleinement une aide humanitaire internationale concertée. Cette aide doit se fonder sur les principes intangibles de la neutralité, de l'humanité, de l'impartialité et de l'indépendance. Les États sont quant à eux appelés à jouer un rôle essentiel dans l'organisation et la coordination de l'aide humanitaire, a-t-elle rappelé. Les acteurs de la société civile doivent eux aussi assumer un rôle important, notamment là où les États sont incapables d'accéder aux populations victimes, a-t-elle ajouté, insistant sur la nécessité de susciter un environnement propice à la participation des organisations non gouvernementales et communautaires. Il convient d'évaluer les capacités d'action humanitaire existantes et de faciliter le cas échéant les transferts de technologies en direction des pays en voie de développement touchés, a-t-elle poursuivi. La représentante a par ailleurs salué l'adoption de la méthode des groupes. La nouveauté de ce système implique que les États l'évaluent et déterminent s'il améliore effectivement la coordination et l'efficacité de l'action humanitaire, a-t-elle affirmé. À cet égard, il appartient aux Nations Unies d'informer plus complètement les États membres des leçons apprises et des meilleures pratiques mises à jour suite à la conduite des projets pilotes. Enfin, le Groupe des 77 estime qu'il faut accorder davantage d'attention au renforcement des mécanismes financiers de l'action humanitaire et à l'instauration de financements durables, a indiqué la représentante de l'Afrique du Sud.
MME ULLA-MAIJA FINSKAS (Finlande, au nom de l'Union européenne) a salué l'occasion qu'offre l'ECOSOC de réunir la communauté humanitaire et de réfléchir aux enseignements tirés, tout comme aux défis futurs. Le nombre et l'envergure des situations d'urgence humanitaire constituent des défis majeurs pour l'ensemble des acteurs de la communauté de l'humanitaire, a-t-elle poursuivi. Il reste encore beaucoup à faire, notamment pour combler certaines lacunes dont pâtissent encore les interventions humanitaires. Certaines restent chroniquement sous-financées, a-t-elle souligné. Mme Finskas a préconisé de renforcer la coordination du système d'aide humanitaire des Nations Unies et de veiller à respecter et faire respecter le droit international humanitaire, les droits de l'homme, les droits des réfugiées, tout comme la sécurité des travailleurs humanitaires. Le renforcement des coordonnateurs résidents est un élément clé de cette réforme, a-t-elle ajouté. À cet égard, elle s'est montrée favorable à l'amélioration des pratiques de recrutement de ces personnes et a préconisé d'étoffer leurs mandats. Elle a également reconnu que les organisations non gouvernementales, qui dans bien des cas sont les premières à réagir, jouent un rôle important dans les situations humanitaires.
En ce qui concerne les réfugiés, les situations deviennent de plus en plus complexes et s'inscrivent dans la durée, a fait observer Mme Finskas. Pour le renforcement des capacités d'intervention, a-t-elle par ailleurs déclaré, la rapidité d'intervention reste essentielle. Elle s'est à cet égard réjouie des efforts déployés en la matière. Elle a souligné que les capacités locales sont essentielles pour sauver des vies et qu'il incombe au gouvernement concerné de créer un environnement propice aux efforts de secours. Il est en outre indispensable de renforcer le rôle dirigeant des Nations Unies dans la réduction des risques de catastrophes. Il vaut mieux prévenir que guérir, a insisté la représentante. Elle a souligné que les acteurs de l'humanitaire doivent rendre des comptes aux populations et a plaidé en faveur d'une transparence totale dans la manière dont les fonds sont dépensés. Elle s'est enfin dite préoccupée par la violence à l'égard des femmes dans les situations d'urgence humanitaire. Les réponses à cet égard ont été jusqu'ici inadéquates et des mesures urgentes doivent être prises pour lutter contre de telles situations de violence, a souligné Mme Finskas.
M. TERRY MILLER (États-Unis) a indiqué que son Gouvernement était pleinement attaché au principe d'une aide humanitaire non seulement efficace et bien ciblée mais surtout opportune: l'aide, si elle arrive trop tard, ne servant en effet plus à rien. L'ECOSOC doit viser une rationalisation de l'aide humanitaire dispensée par les institutions des Nations Unies. Il convient d'une manière générale d'élaborer des stratégies opportunes tirant parti des points forts des différentes institutions des Nations Unies. Il faut notamment parvenir à déterminer avec précision le moment du passage du stade de l'aide d'urgence à celui d'aide au développement. Les États-Unis ne sont à cet égard pas favorables à la création d'un lien entre aide d'urgence et objectifs de développement. L'aide au développement, qui répond à une logique différente, doit être clairement distinguée de l'aide d'urgence. Quant au système de la direction groupée , aussi bien conçu soit-il, il doit être librement adopté par les États. Les États-Unis exigent par ailleurs que tous les partenaires internationaux de l'action humanitaire adoptent un code de conduite relatif à la lutte contre les violences sexistes.
Les États-Unis prennent bonne note de la demande du Secrétaire général visant à ce que les donateurs mettent sur pied des financements souples, a indiqué le représentant. Le principe du financement pluriannuel est problématique, a-t-il ajouté, saluant cependant les améliorations enregistrées dans le système de traçage financier des contributions des États. Les États-Unis s'efforcent de leur côté de communiquer systématiquement des informations de cette nature, qui permettent de mieux planifier et coordonner l'aide humanitaire. Enfin, le représentant a observé que la communauté internationale a dû ces dernières années faire face à des défis humanitaires particulièrement graves qui rendent nécessaire l'adoption d'une réforme permettant d'améliorer l'efficacité et la rapidité du système d'aide humanitaire.
M. NIKOLAY CHULKOV (Fédération de Russie) a souhaité mettre en évidence les principes de l'action humanitaire que sont l'humanité, la neutralité et l'indépendance. Aucun de ces principes ne doit avoir de prévalence sur les autres, a précisé le représentant. Il a préconisé de renforcer les capacités des gouvernements et notamment des pays en développement qui sont les plus exposés aux catastrophes naturelles. Il a également insisté sur la nécessité de définir des priorités lors de la mise au point des différentes stratégies nécessaires. Dans ce cadre, les gouvernements doivent pouvoir avoir leur mot à dire. L'aide doit être adéquate et suffisante, a ajouté le représentant.
Le représentant russe a par ailleurs préconisé d'établir une distinction claire entre les tâches du Bureau de coordination de l'aide humanitaire (BCAH), celles du Secrétariat et celles du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD); le BCAH doit rester chargé de la coordination mais ne doit pas devenir une sorte d'agence internationale dans le domaine humanitaire. Il est difficile de nier qu'il y a eu des interventions incluant des forces militaires qui ont permis de combattre des catastrophes avec succès, a ensuite fait observer le représentant. Mais si on répète de manière massive ce genre d'expérience, on risque de saper le principe d'indépendance de l'humanitaire auprès des populations locales et de déformer le rôle même des Nations Unies, a-t-il estimé. Les missions doivent être intégrées de manière plus coordonnée et plus complète et l'élément humanitaire ne doit pas se soumettre à d'autres considérations qui ne relèvent pas de l'humanitaire, a-t-il conclu.
M. JEAN-MAURICE RIPERT (France) a rappelé l'appui de la France au Bureau de coordination de l'aide humanitaire (BCAH) dans la coordination des secours en cas d'urgence. Le BCAH doit être mis en mesure d'exercer sa mission avec efficacité, a-t-il déclaré. Dans le même temps, il doit limiter son intervention à ce qui relève clairement de l'humanitaire, afin que soit préservé l'espace humanitaire indispensable à la sécurité du personnel et à l'accès aux populations. La France considère aussi comme intéressante la désignation d'institutions chefs de file dans les différents secteurs d'intervention, ce qui facilite notamment l'identification des interlocuteurs. Il faut cependant que ce processus respecte la diversité des acteurs humanitaires et de leurs mandats, en s'appuyant dessous pour en tirer le meilleur parti. C'est pourquoi la France n'approuve pas la transformation du Fonds central de réponse d'urgence en un fonds humanitaire global et souhaite que son fonctionnement soit évalué à la fin 2006.
Le représentant de la France a rappelé que la réforme en cours du dispositif humanitaire des Nations Unies s'inscrit dans le processus plus général du renforcement de l'organisation engagé depuis 2005. Il a également rappelé que le Sommet mondial de septembre 2005 avait décidé de doubler les moyens du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et de créer un Conseil des droits de l'homme: la France espère que, grâce à ce dispositif, les droits de l'homme deviendront un pilier à part entière de l'action des Nations Unies. L'Organisation, de par son mandat global et sa composition universelle, dispose de la légitimité pour exercer une tutelle sur les stratégies internationales de prévention, de gestion et de sortie de crises. Il faut évidemment renforcer les moyens à sa disposition pour remplir ce mandat ambitieux et complexe, a déclaré le représentant français.
MME CATHERINE BRAGG (Canada) a fait observer qu'il convient d'afficher un optimisme prudent à l'égard de la direction que prennent l'ONU et l'action humanitaire mondiale. Elle s'est réjouie du progrès qu'a constitué la création d'un Fonds central de réponse d'urgence - mesure formidable pour financer les aides humanitaires élargies et qui permet d'améliorer la gestion du financement. Elle a également salué l'esprit de collaboration qui semble prévaloir entre les institutions et souligné le rôle déterminant que jouent les organisations non gouvernementales. Tous les partenaires doivent maintenant renforcer leur aide; il faut fixer des priorités et lancer des campagnes de sensibilisation, a-t-elle indiqué. Elle a mis en évidence un certain nombre de domaines-clés auxquels une attention particulière devrait être accordée, à savoir, le renforcement des capacités d'évaluation des besoins humanitaires; la réception de contributions reflétant les besoins; l'amélioration des mécanismes de coordination de l'emploi des actifs militaires disponibles lors des catastrophes naturelles - l'ONU devrait s'efforcer, à cet égard, de mieux déterminer les lacunes de la réponse civile qui peuvent être comblées grâce aux moyens techniques de la défense militaire et civile- et l'évaluation plus systématique des capacités d'intervention nationales et régionales, de manière à renforcer l'état de préparation face aux crises. Il faut être davantage au fait de ces capacités et mettre au point une réponse internationale qui s'appuie sur elles, a-t-elle préconisé.
Enfin, il convient d'accorder plus d'attention à la surveillance et à la déclaration des violations perpétrées contre les civils, a déclaré la représentante du Canada, qui a souhaité que soient lancées des initiatives supplémentaires dans ce domaine, notamment celles ayant trait aux enfants, aux personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, à la violence sexuelle et à la sécurité des travailleurs humanitaires. Nous avons une occasion exceptionnelle, avec la volonté politique et les ressources disponibles, d'améliorer concrètement le fonctionnement du système humanitaire ainsi que la qualité de l'aide et de la protection fournies, a conclu la représentante.
MME KEREN DAVIES (Australie) a déclaré que la communauté internationale est actuellement confrontée à une série de crises très complexes qui rendent nécessaire une amélioration plus efficaces et percutantes les interventions humanitaires. L'Australie se félicite des progrès enregistrés à cet égard du sein du système des Nations Unies; progrès qui ont permis des résultats patents sur le terrain. Les Nations Unies doivent s'employer à la coordination de l'action humanitaire, assurer des cadres de travail, dispenser des formations et donner aux coordonnateurs les moyens matériels de mener à bien leurs missions. Un partenariat plus efficace doit être instauré entre les différents acteurs humanitaires, surtout au stade de la conception de l'approche humanitaire groupée. Les financements doivent être consolidés et la création du Fonds central de réponse d'urgence est un pas intéressant à cet égard, a dit la représentante, relevant qu'il faudra évaluer les besoins et fixer des priorités. La gestion des risques et la préparation aux catastrophes exigent l'adoption d'une approche intégrée aux niveaux national et régional. Les communautés locales doivent être renforcées et il ne faut pas hésiter à faire appel aux forces militaires, le cas échéant. La représentante a aussi jugé indéniable le fait que l'action humanitaire jette les bases du développement ultérieur.
M. MANSOOR AHMAD KHAN (Pakistan) a fait observer que l'année 2005 a connu des catastrophes naturelles d'une ampleur sans précédent. Il s'est réjoui de la création du Fonds central de réponse d'urgence - un joyau permettant de mieux réagir aux nouvelles situations d'urgence humanitaire sous-financées. La catastrophe qui a touché le Pakistan en octobre 2005 a constitué un énorme défi autant pour le Pakistan que pour les Nations Unies; il s'est agi d'une course contre la montre. À cet égard, le représentant a souhaité remercier tous les acteurs humanitaires et tous les gouvernements donateurs qui ont aidé son pays. Les réponses aux urgences humanitaires doivent continuer de se baser sur les principes de l'humanité, de l'impartialité et de la neutralité, a souligné le représentant. Le leadership du gouvernement reste essentiel, a-t-il souligné. Il a, à ce titre, mis en évidence qu'en dépit de ressources limitées, le Gouvernement de son pays a réussi à mettre sur pied des mécanismes de coordination stratégiques qui ont permis d'organiser l'aide humanitaire. Élaborer des stratégies de réduction des risques reste un élément crucial, a poursuivi le représentant, insistant sur la nécessité de renforcer les capacités humanitaires existantes. Les catastrophes peuvent toucher n'importe quel pays; aussi, faut-il redoubler d'efforts pour se préparer et renforcer les capacités d'intervention d'urgence.
M. SHIGERU ENDO (Japon) a dit que son pays saluait la réforme en cours visant à améliorer l'aide aux populations victimes de catastrophes. Les fonds et programmes des Nations Unies spécialisés dans l'action humanitaire doivent se renforcer mutuellement. Dégager des synergies et combler les lacunes, tels sont les objectifs du débat actuel autour de la réforme du système, a rappelé le représentant. La clé de la réussite réside dans la pleine participation de toutes les parties concernées, dans le cadre d'un dialogue ouvert. Le Coordonnateur pour les secours d'urgence disposera d'une grande latitude en matière de dépenses, il devra donner des explications sur la manière dont il tire parti du Fonds central de réponse d'urgence d'information. Le système de coordination groupée requiert une coopération parfaite, a poursuivi le représentant.
Le Japon estime que l'action des organisations non gouvernementales est cruciale en matière humanitaire. Toute l'attention voulue doit être accordée à la coordination des relations avec ces organisations. Il faut également insister sur la prévention, la préparation des populations et la réaction en cas de catastrophes naturelles. Les capacités des États à cet égard sont insuffisantes. Les communautés locales doivent être à la base de toute l'action de secours et de redressement, a conclu le représentant du Japon.
Pour M. FREDRIK ARTHUR (Norvège), la communauté internationale doit accorder une attention croissante aux régions à risques. Les stratégies de réduction des risques devraient être un point systématiquement inscrit à l'ordre du jour du Conseil économique et social. Il faut modifier les comportements et établir un partenariat plus étroit entre le système des Nations Unies, les organisations non gouvernementales et la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, a-t-il poursuivi. Il a également salué la création du Fonds central de réponse d'urgence, soulignant qu'il permet de renforcer et de consolider l'ensemble du système humanitaire. Il a permis un partenariat plus efficace et contribué à faire intervenir davantage de pays, de gouvernements locaux et d'acteurs privés dans le domaine de l'humanitaire. Le système de la direction groupée est un autre élément de la réforme humanitaire, a-t-il rappelé; il s'agit là d'un moyen précieux de faire intervenir toutes les parties de l'action humanitaire de manière à rendre les organisations plus opérationnelles.
S'agissant des actes de violence sexiste, le représentant norvégien a fait observer que les civils sont de plus en plus pris pour cibles dans les crises humanitaires et que, bien que les femmes et les fillettes soient les plus touchées, les actes de violence sexuelle et sexiste touchent également les garçons. Il faut faire en sorte que ceux qui les commettent assument la responsabilité de leurs actes, et les victimes doivent pouvoir se faire entendre. La communauté internationale peut également faire davantage, comme prendre des mesures de toute urgence afin que la dimension sexospécifique soit prise en compte dans toute l'action humanitaire, a affirmé le représentant norvégien. Le besoin se fait tout autant sentir de prévention que de préparation, de protection que d'action punitive, a conclu le représentant.
M. MATERN LUMBANGA (Tanzanie) a souligné que son pays était vulnérable aux catastrophes naturelles et qu'il était confronté à une insécurité alimentaire calamiteuse. Une équipe d'information sur la sécurité alimentaire, qui est composée de représentants d'agences gouvernementales, d'institutions des Nations Unies et d'organisations non gouvernementales, se réunit régulièrement et coordonne des évaluations des régions touchées. C'est grâce à cet instrument que la Tanzanie a pu gérer la crise alimentaire causée par une sécheresse prolongée en 2005 et 2006. La Tanzanie a aussi institué une politique de gestion des catastrophes qui vise à en prévenir et atténuer les effets, ainsi qu'à assurer un haut niveau de préparation et de développement. Cette politique a été élaborée au terme d'un processus participatif impliquant tous les partenaires concernés, qu'ils soient institutionnels ou issus de la société civile.
Malgré ces mesures, de nombreux défis demeurent. La capacité de mise œuvre est limitée par le manque d'équipement et de moyens techniques ainsi que de personnel qualifié. La Tanzanie appelle ainsi les Nations Unies et leurs partenaires au développement à appuyer ses efforts de renforcement des capacités en matière de gestion des risques. Le représentant a aussi indiqué que son pays regrettait les actes de violence sexuelle commis contre les groupes vulnérables. Il a demandé l'application d'une politique de «tolérance zéro» vis-à-vis de ces comportements ainsi que le lancement de campagnes de sensibilisation des populations. Enfin, il a demandé que soient dégagés des fonds suffisants et stables destinés à garantir l'application des programmes d'aide humanitaire. La Tanzanie est particulièrement inquiète de la diminution des ressources consacrées aux réfugiés, elle qui en accueille plus d'un demi-million sur son territoire.
MME NINGNING YANG (Chine) a fait observer que les catastrophes naturelles sont de plus en plus fréquentes depuis quelques années et que de plus en plus d'organisations sont actives dans le domaine humanitaire. La délégation chinoise a souhaité encourager le BCAH à assurer une coordination d'ensemble des activités humanitaires. Elle a souligné que les gouvernements des pays touchés devraient assumer la plus grande part des efforts de reconstruction, les Nations Unies ayant pour leur part l'obligation de leur venir en aide en les aidant à mettre en place des mesures et à passer d'une situation de secours au développement. Enfin, la représentante a salué le lancement réussi du Fonds central de réponse d'urgence, soulignant que le rôle central de ce Fonds est de fournir les financements initiaux; il ne s'agit nullement de remplacer les mécanismes d'appel des Nations Unies, a précisé la représentante.
MME MARIE-THERESE PICTET ALTHANN (Ordre militaire souverain de Malte) a attiré l'attention sur le lien qui existe entre la première phase des secours humanitaires et les efforts de développement subséquents. L'Ordre a choisi d'agir, par le biais de l'organisation «Malte International», dans le domaine de la fourniture en eau et en nourriture aux populations touchées. Il gère plus de 200 projets dans le monde entier, au bénéfice de plus de sept millions de personnes. L'Ordre a suivi avec intérêt le lancement de la «méthode des groupes». Indépendant et impartial, l'Ordre appuie la concertation et la collaboration entre tous les acteurs de l'action humanitaire et estime utile la création du Fonds central de réponse d'urgence. Il appuie aussi le principe de faire participer les autorités locales au processus de redressement et l'a lui-même appliqué, par exemple, dans le cadre de projets au Kosovo.
M. IBRAHIM OSMAN, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, a indiqué que sa Fédération a été très active tout au long de l'année 2005 et a bénéficié d'une aide très généreuse pour l'accomplissement de ses activités. Il s'est dit également concerné par le passage de l'aide d'urgence à des actions à plus long terme. Il s'agit de renforcer les capacités locales et de préparer les autorités locales à faire face à la crise, a-t-il souligné. Les communautés jouent un rôle de premier plan, a-t-il poursuivi, soulignant qu'une approche communautaire reste donc essentielle. Il a réitéré son appel aux gouvernements pour qu'ils améliorent l'environnement dans lequel travaillent les volontaires. La progression de la violence sexiste devrait être définitivement enrayée, a-t-il en outre souhaité.
M. ALA ALWAN (Organisation mondiale de la santé - OMS) a présenté plusieurs situations de crise dues à des conflits ayant entraîné dans leur sillage une détérioration dramatique des conditions de santé. Les crises sanitaires exigent l'adoption de stratégies de crises et l'OMS a demandé à ce titre aux États de mieux se préparer, en particulier sur les plans financier et logistique. Des progrès ont été accomplis en collaboration avec les organisations non gouvernementales et les institutions des Nations Unies. L'Organisation mondiale de la santé axe son travail d'urgence sur l'aide technique, la mise à jour des normes de soins, l'atténuation des risques ou encore le renforcement des ressources humaines. L'Organisation s'efforce de mieux coordonner son action avec celle de ses partenaires pour améliorer la qualité de l'action d'urgence et favoriser la responsabilisation des acteurs sur le terrain. L'OMS estime que le sous-financement chronique de la santé est un véritable problème et qu'il faudrait à cet égard disposer de fonds stables et prévisibles.
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