CCP/7

APRÈS LA SIERRA LEONE, LA COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX EXAMINE LE CAS DU BURUNDI

13/10/2006
Assemblée généraleCCP/7
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Commission de consolidation de la paix

Troisième session

1ère et 2e séances – matin et après-midi


APRÈS LA SIERRA LEONE, LA COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX EXAMINE LE CAS DU BURUNDI


Les débats portent sur les trois « piliers » de la paix: consolidation de l’état de droit, professionnalisation des services de sécurité et réforme de la justice


La Commission de consolidation de la paix s’est penchée sur le cas du Burundi aujourd’hui, pays où une paix fragile a fini par prévaloir progressivement après une décennie de guerre civile.  Face à l’immensité de la tâche de reconstruction du pays et de la réconciliation de la société burundaise divisée, en particulier par la fracture ethnique entre majorité hutue et minorité tutsie, les intervenants ont insisté sur la nécessité de définir des priorités, tout ne pouvant être fait en même temps.  Il s’agit d’appuyer le processus actuel sur trois « piliers », selon le terme utilisé par la représentante de la Banque africaine de développement: consolider l’état de droit, professionnaliser les services de sécurité, et enfin réformer la justice en renforçant une institution aujourd’hui faible.


En ouverture des débats, auquel participait aussi par visioconférence depuis Bujumbura le Vice-Président burundais, Antoinette Batumubwira, Ministre des relations extérieures et de la coopération internationale du Burundi, a évoqué les crises cycliques qui ont secoué son pays depuis l’indépendance.  Elle a rappelé que la guerre civile, qui a éclaté en 1993, avait fait plus de 300 000 morts et plus de 850 000 personnes déplacées.  Le produit intérieur brut (PIB) a diminué de 20% entre 1993 et 2001 et le revenu par habitant est aujourd’hui de 80 dollars américains contre 210 en 1990.  Malgré la présence de bandes armées, la situation est globalement calme dans le pays, selon elle, après les Accords de paix d’Arusha de 2000 et la trêve conclue, cette année, avec les deux derniers mouvements qui ne s’y étaient pas ralliés.  Elle a assuré que le Gouvernement burundais était convaincu que le dialogue était la seule voie permettant d’avoir une paix et un développement durables. 


Mme Batumubwira a rappelé que depuis plus d’un an, depuis les élections de 2005 en particulier et le référendum sur la nouvelle Constitution, le pays avançait pour « dépasser les monstres de la division ».  Mais, a-t-elle remarqué, « en un an on ne peut pas tout faire », soulignant que son pays avait fait preuve jusque-là d’une volonté politique affirmée.  « Je pense que ces efforts doivent aujourd’hui être appuyés par la Commission de consolidation de la paix », a-t-elle insisté.


Le Représentant spécial du Secrétaire général au Burundi, M. Nureldin Satti, a mis l’accent sur le sous-développement chronique dû à l’instabilité.  Il a souligné que la guerre avait entraîné un désinvestissement dans les campagnes où l’éducation et la santé ne sont plus assurées.  Avec la fin des combats, on assiste à un mouvement de retour avec la réinstallation d’un demi-million de personnes, ce qui ne peut que provoquer des tensions en particulier dans le domaine foncier. Le représentant tanzanien, dont le pays a accueilli 40 000 réfugiés du Burundi, a rappelé que ce pays était un des pays les plus densément peuplés du monde et que la question foncière était un sujet crucial alors que les réfugiés rentrent avec la volonté de récupérer leur terre occupée par d’autres en leur absence.


Avec la démobilisation de 20 000 anciens combattants, la réintégration des anciens belligérants dans les forces de sécurité est un élément très important, a noté par ailleurs M. Satti, l’objectif étant de créer une police nationale professionnelle.  Se pose aussi la question de la collecte des armes légères qui a été entreprise.  Concernant les très graves violations des droits de l’homme commis pendant la guerre civile, elles n’ont pas encore fait l’objet d’enquête.  La question de l’impunité s’explique par les lacunes du système judiciaire et sa faiblesse, ont noté plusieurs intervenants.  Un représentant de la société civile burundaise a expliqué qu’avec le retour des personnes déplacées, bourreaux et victimes se retrouvaient face à face et devaient cohabiter.  Pour lui, il est essentiel que la Commission de consolidation de la paix place la question de la mise sur pied d’une justice digne de ce nom parmi ses priorités.


La question de la place des femmes a aussi été évoquée par la Ministre burundaise des relations extérieures qui a noté que, contrairement à ce qui s’est passé après l’indépendance, les femmes entendaient ne plus être mises à l’écart.  Une participation et une implication complètes des femmes sont des choix cruciaux pour l’instauration d’une paix durable, a renchéri la délégation japonaise.


Concernant l’aide de la communauté internationale, celle-ci est problématique à ce stade.  Norbert Toé, du Département africain du Fonds monétaire international (FMI), s’est inquiété du risque d’une insuffisance de l’aide étrangère.  Son collègue Pedro Alba, représentant de la Banque mondiale au Burundi, au Rwanda, en République démocratique du Congo (RDC) et en République du Congo, a expliqué que le Burundi avait un petit nombre de donateurs, ce qui est d’autant plus préoccupant que deux tiers du budget dépend d’un financement extérieur.  La dernière table ronde des donateurs remonte à deux ans et demi et il est urgent de fixer celle de la prochaine, s’est alarmé M. Toé, qui estime que la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) semble complètement hors d’atteinte, ce qui n’empêche pas, selon lui, d’avancer sur le plan social.


La Commission de consolidation de la paix a un rôle central à jouer, non seulement pour aider le gouvernement, mais aussi pour mobiliser les donateurs, a-t-il estimé.  Mais il faut aussi s’assurer que les dépenses gouvernementales sont efficaces, notamment en direction des pauvres.  Les secteurs sociaux et la fourniture de services publics doivent être améliorés de manière significative.


L’argent est le nerf de la consolidation de la paix et de la reconstruction, a noté de son côté la délégation rwandaise, qui a souligné qu’un État faible et chancelant était impuissant.  Mais pour la représentante du Danemark, la Commission de consolidation de la paix se doit d’être pragmatique et opérationnelle.  Tout ne pouvant pas être fait en même temps, il convient de se concentrer sur un nombre limité de domaines en aidant le gouvernement à identifier ceux qui peuvent menacer la paix, privilégier les fameux trois « piliers », ainsi que la question foncière.  Les besoins sociaux sont certes immenses, a-t-elle dit, mais il est important que la Commission « ne remplisse pas trop son assiette au départ ».


Pour l’orateur de l’Union interparlementaire, le Parlement a un rôle clef comme creuset de la réconciliation car c’est là que les représentants du peuple peuvent s’asseoir ensemble et régler leurs différends.  Il a regretté que les intervenants n’aient pratiquement pas évoqué cet aspect de la question.  Mme Batumubwira a expliqué que ce « dialogue national » avait lieu, de fait, dans divers forums au premier rang desquels le Parlement.


Dans un résumé des débats établi en fin de séance par le Président de la Commission, le Norvégien Johan Lovald, le Burundi a été déclaré éligible pour bénéficier de l’aide du Fonds pour la consolidation de la paix.  Il a été invité à entamer des consultations à ce sujet avec la représentation onusienne à Bujumbura.  La Commission de consolidation de la paix recommande en outre à Bujumbura de mettre au point diverses stratégies et plans avec l’aide des Nations unies pour répondre aux questions critiques évoquées lors du débat.  Enfin, la Commission appelle la communauté internationale à poursuivre son soutien politique et financier en faveur du Burundi.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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