SIXIÈME COMMISSION: L’OBLIGATION D’EXTRADER OU DE POURSUIVRE PERMETTRAIT D’ÉVITER L’IMPUNITÉ DES CRIMINELS
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Sixième Commission
19e séance – matin
SIXIÈME COMMISSION: L’OBLIGATION D’EXTRADER OU DE POURSUIVRE PERMETTRAIT D’ÉVITER L’IMPUNITÉ DES CRIMINELS
Elle achève ainsi son examen du rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa session 2006
Après son examen des chapitres du rapport de la Commission du droit international (CDI) consacrés aux « effets des conflits armés sur les traités » et à « l’obligation d’extrader ou de poursuivre », la Sixième Commission (chargée des questions juridiques) a achevé aujourd’hui ses débats sur les travaux de la CDI.
La Commission du droit international compte sur la Sixième Commission afin de bénéficier des vues et réactions des gouvernements sur les questions relatives aux orientations générales de ses travaux, a assuré M. Guillaume Pambou-Tchivounda, du Gabon, Président de la CDI. Il a appelé en particulier les délégations à faire parvenir à la Commission leurs commentaires écrits sur les projets d’articles relatifs aux «Ressources naturelles partagées », adoptés en première lecture.
Les délégations ont présenté les avantages et les difficultés que soulève « l’obligation d’extrader ou de poursuivre », question étudiée pour la première fois par la CDI. Ce sujet a été jugé à la fois difficile et très important en droit pénal international, ce qu’ont souligné plusieurs représentants, notamment celui de la Thaïlande qui a fait valoir que l’obligation considérée contribuerait à éliminer l’impunité des auteurs de graves crimes internationaux. Rappelant que les États disposent de lois différentes en matière d’extradition, le représentant indonésien a recommandé à la Commission du droit international d’examiner cette question avec une grande prudence.
L’obligation en elle-même résulte du droit des traités et non du droit international coutumier, a précisé le représentant du Royaume-Uni. Le représentant du Chili a proposé que le Rapporteur spécial examine à l’avenir la question de savoir si un État compétent a une priorité pour exercer la poursuite dans le cas où un autre État a la même compétence pour le faire. Selon lui, la priorité devrait être accordée à celui sur le territoire duquel le crime a été commis. Par ailleurs, pour déterminer les catégories de crimes auxquelles l’obligation d’extrader ou de poursuivre pourrait s’appliquer, la Thaïlande a proposé les crimes reconnus par le droit international coutumier, ainsi que les infractions graves relatives aux aéronefs, aux drogues et au terrorisme. Quant à la forme finale que devraient revêtir les travaux de la Commission sur ce point, certaines délégations ont estimé qu’il était prématuré, à ce stade, de se prononcer.
Sur la question des effets des conflits armés sur les traités, le Royaume-Uni a noté que si certains points ont été clarifiés, il subsiste un certain nombre de problèmes. Certains ont souhaité que le champ d’application des projets d’articles soit limité aux traités conclus entre États et que les traités conclus entre organisations internationales en soient exclus. Les avis étaient partagés quant à la question de se limiter aux conflits internationaux ou d’inclure également les conflits internes. Le Royaume-Uni préfère à première vue exclure les conflits internes du champ d’application du projet de texte, tandis que le représentant de l’Algérie, soulignant que ces conflits peuvent affecter indirectement l’application d’un traité, a jugé nécessaire d’inclure des situations d’occupation militaire dans le cadre de la définition.
Une autre question qui préoccupe les États sur le sujet des effets des conflits armés sur les traités est celle du critère de l’intention des parties. Ce critère permet de déterminer l’exception au principe posé par le projet d’articles selon lequel le déclenchement d’un conflit armé n’entraîne pas nécessairement l’extinction des traités, ni la suspension de leur application. Le projet d’article 4 prévoit en effet que « la prédisposition des traités à l’extinction ou à la suspension de leur application en cas de conflit armé est déterminée conformément à l’intention des parties au moment où ils ont été conclus ». L’intention des parties est un critère pertinent pour l’interprétation d’un traité, selon les délégations de l’Inde et du Royaume-Uni, mais elle doit être déterminée à partir du texte du traité.
Concernant la fragmentation du droit international, le Groupe d’étude a présenté, comme le lui avait demandé la Commission du droit international, une version abrégée des conclusions de son étude, lesquelles constituent un guide de directives pratiques à l’intention des États. Plusieurs intervenants ont approuvé le fait que le Groupe d’étude ait pris comme référence la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités. Pour le délégué néo-zélandais, ces travaux contribuent à une meilleure compréhension des liens et de la cohérence du système juridique international. Le représentant de l’Argentine a d’ailleurs estimé que le travail réalisé par le Groupe d’étude avait un caractère de doctrine et que ses conclusions devraient faire l’objet d’une large diffusion.
Outre ceux déjà cités, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Afrique du Sud, Australie, Pologne, République islamique d’Iran, Italie, États-Unis, Malaisie, Roumanie et Sierra Leone.
La Sixième Commission reprendra ses travaux, lundi 6 novembre, à 10 heures.
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-HUITIÈME SESSION
Déclarations
M. DIRE TLADI (Afrique du Sud) a indiqué que le chapitre du rapport de la CDI sur la fragmentation du droit international signale que ce problème est bien réel et qu’il résulte essentiellement de la multiplication des régimes autonomes de droit international. Le rapport de la Commission, a rappelé M. Tladi, a souligné les aspects positifs de ce phénomène, telle la référence au droit international environnemental et au développement durable, mais également les aspects négatifs, les dangers de la fragmentation, tel que le chevauchement de différentes juridictions. Il a signalé que le Groupe d’étude avait exclu de son étude les aspects institutionnels de la fragmentation, mais il a souhaité que cet aspect ne soit pas relégué aux oubliettes.
Passant ensuite aux effets des conflits armés sur les traités, M. Tladi s’est déclaré encouragé par la décision du Rapporteur spécial d’inclure les conflits internes dans la définition des conflits armés. Les conflits armés internes, a-t-il fait remarquer, sont plus fréquents dans le monde contemporain et sont susceptibles d’avoir les mêmes effets que les conflits armés internationaux, ce qui ne revient pas à encourager les parties à se soustraire à leurs obligations internationales en raison des conflits armés. À cet égard, la délégation sud-africaine s’est félicitée des projets d’articles 3 et 4 qui soulignent que l’existence d’un conflit armé n’entraîne pas l’extinction des obligations relatives aux traités
M. EDMUNDO VARGAS CARREÑO (Chili) a remercié la Commission du droit international pour l’excellent travail accompli au cours des cinq dernières années, avant d’aborder plusieurs chapitres du rapport de la CDI. En ce qui concerne la protection diplomatique, il a jugé les articles proposés très appropriés. Il a considéré que le projet de texte n’est pas seulement bon pour sa teneur, mais aussi pour ses omissions délibérées. Il a en effet approuvé la décision du Rapporteur spécial de ne pas soumettre l’exercice de la protection diplomatique à la condition du respect du principe des « mains propres ». Concernant la question des réserves aux traités, M. Vargas Carreño a apprécié que la CDI ait mis l’accent sur le droit des traités. Il a également souscrit à la recommandation de la CDI visant à ce que le Secrétariat organise une réunion avec les experts des droits de l’homme des Nations Unies pour débattre des questions des réserves dans les traités sur les droits de l’homme. Nous pensons en effet que ces traités sont différents des traités « ordinaires », a-t-il ajouté. Il a aussi pensé qu’il serait utile d’obtenir un financement pour assurer une plus grande participation des experts des droits de l’homme.
Passant au chapitre sur les effets des conflits armés sur les traités, le représentant a jugé que le point de départ pour la codification et le développement progressif du droit international est constitué par les règles figurant à la Convention de Vienne sur le droit des traités, mais que ces règles ne sont pas toutefois suffisantes. Si on cherche à offrir une stabilité par rapport au traité, il a lui a paru essentiel de suivre ce projet d’articles. Il a émis cependant des doutes quant à la liste figurant au projet d’article 7 (application des traités dont l’objet et le but impliquent nécessairement qu’ils sont applicables) et préféré qu’on dresse cette liste plutôt dans une annexe. Pour le représentant, un projet comme celui-là devrait renforcer la stabilité des relations internationales en cas de conflit armé. Quant à l’obligation d’extrader ou de poursuivre, M. Vargas Carreño a noté que l’objectif de cette obligation est d’assurer que les personnes coupables de graves crimes internationaux soient poursuivies, en octroyant à l’État où se trouve le criminel l’obligation d’extrader ou de poursuivre. Il a souhaité que la possibilité de renvoyer l’affaire à un tribunal international soit ajoutée au projet. Il a soulevé une question visant à déterminer si l’obligation découle du droit international coutumier, rappelant que cette question est liée à l’exercice de la compétence pénale universelle. Le Rapporteur spécial devrait examiner cette question à l’avenir, ainsi que la question de savoir si un État à une priorité pour exercer la poursuite dans le cas où deux États ou plus ont compétence pour le faire. Selon lui, la priorité devrait être accordée à celui sur le territoire duquel le crime a été commis. Le représentant a enfin approuvé l’étude de la question de la « compétence extraterritoriale » dans le programme de travail à long terme de la CDI.
Mme MATTANEE KAEWPANYA (Thaïlande) a apprécié l’ajout de la question « l’obligation d’extrader ou de poursuivre » au programme de travail de la Commission, la jugeant très importante en droit pénal international. Ce principe permet de ne pas laisser les criminels échapper à la justice, a-t-elle fait valoir. Elle a pensé que la Commission pourrait étudier la possibilité de se baser sur une compétence universelle pour une telle obligation internationale. Cela permettrait ainsi à un État qui n’a pas de compétence pour juger le criminel présumé d’appréhender quand même l’affaire. Concernant la question de savoir à quelles catégories de crimes cette obligation pourrait s’appliquer, elle a proposé les crimes reconnus par le droit international coutumier, ainsi que les infractions relatives aux aéronefs, aux drogues et au terrorisme.
Mme JENNIFER MCIVER (Nouvelle-Zélande) a jugé difficile le sujet de « l’obligation d’extrader ou de poursuivre » et félicité le Rapporteur spécial pour son rapport préliminaire. À ce stade, il est prématuré de se prononcer sur la forme finale que devrait revêtir les travaux de la Commission sur ce point. En ce qui concerne la fragmentation du droit international, elle a apprécié l’adoption des conclusions du Groupe d’étude et estimé que ces travaux contribuent à une meilleure compréhension des liens et de la cohérence du système juridique international. Elle a estimé que ces travaux très utiles sont un bon exemple de travaux non traditionnels que la Commission peut examiner dans le futur. Pour ce qui est du programme de travail à long terme, elle a noté avec intérêt l’ajout de nouveaux sujets, notamment celui de la « protection des personnes en cas de catastrophe » au vu de l’importance croissante des catastrophes naturelles résultant du changement climatique mondial.
La représentante a aussi abordé le chapitre du rapport de la CDI sur les réserves aux traités, notant que le rapport contient des éléments très utiles en particulier sur la question difficile des réserves incompatibles avec l’objet et le but du traité. Elle a approuvé la recommandation d’organiser une réunion des experts des Nations Unies en matière des droits de l’homme. Sur la question des actes unilatéraux, Mme McIver s’est félicitée de l’adoption des principes directeurs qui constituent des conclusions adaptées au sujet. Une des conclusions majeures est que les effets juridiques contraignants produits par les actes unilatéraux ne sont pas limités aux actes unilatéraux stricto sensu. Elle a aussi jugé que ces travaux présentaient un bon équilibre entre deux objectifs principaux: s’assurer que les États sont encouragés à mener leurs relations et résoudre leurs conflits par un dialogue ouvert et productif, d’une part, et s’assurer que les États prennent bien toutes les précautions qui se doivent en formulant des déclarations sur lesquelles d’autres États peuvent se baser, d’autre part.
Mme MIA GOLDSMITH (Australie) a félicité la Commission du droit international pour ses travaux sur les projets de directives applicables aux déclarations unilatérales des États susceptibles de créer des obligations juridiques. Elle a estimé crucial qu’une obligation ne soit contraignante que si elle est le fait d’une autorité habilitée à la faire. S’agissant de la réserve aux traités, Mme Goldsmith a estimé que la production d’un guide de la pratique assorti de commentaires devrait être d’une grande utilité pour les États et les organisations internationales. Elle a noté enfin que, si la Commission n’a pas souhaité amender ou modifier le texte de la Convention de Vienne sur le droit des traités, elle a cependant tenu compte de l’évolution survenue dans le droit international et la pratique internationale depuis la rédaction de ces traités.
M. JOHNY SINAGA (Indonésie), intervenant sur la question de l’obligation d’extrader ou de poursuivre, a souligné que depuis l’adoption des Conventions de Genève sur la protection des victimes des conflits armés, ce principe a été incorporé dans de nombreux traités relatifs aux droits de l’homme et récemment, dans des conventions sur la lutte contre le terrorisme et autres crimes transnationaux. Le plus gros problème, a-t-il convenu, est de savoir si cette obligation doit être limitée aux traités contraignants ou être appliquée aux normes coutumières ou aux principes généraux du droit. Les États ayant des lois différentes en matière d’extradition, le représentant a enjoint la Commission d’examiner cette question avec une grande prudence.
S’agissant des effets des conflits armés sur les traités, la délégation indonésienne a souligné que ces projets d’articles ne sont applicables qu’à des conflits armés internationaux et elle n’est donc pas favorable à l’extension de leur champ d’application aux conflits internes. Évoquant ensuite la question de la responsabilité des organisations internationales, il en a relevé la complexité et invité la CDI à faire montre de la plus grande prudence dans la formulation de règles tenant compte des structures diverses des différentes organisations internationales.
Revenant à la question des ressources naturelles partagées, le représentant indonésien s’est félicité de la décision de la Commission de n’examiner, à ce stade, que les nappes captives non renouvelables et estimé qu’une fois cette étude terminée, elle pourra rédiger des principes relatifs au pétrole et au gaz naturel. Le projet d’articles sur la protection diplomatique, a-t-il continué, assure qu’il s’agit là d’un droit des États et non pas d’une obligation. Il a souligné également que la mondialisation rendait parfois difficile la détermination de la nationalité de personnes morales et il a jugé qu’il était encore trop tôt pour que ce projet d’articles soit adopté sous une forme juridiquement contraignante. Passant ensuite à la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant a jugé que la Commission du droit international avait choisi à juste titre d’imposer à l’exploitant l’obligation d’indemniser. Enfin, pour ce qui est des travaux futurs de la Commission, il a jugé bon que cette dernière se concentre sur les questions dont l’examen est presque achevé.
M. ANDRZEJ MAKAREWICZ (Pologne) a constaté le peu de progrès réalisés dans les travaux portant sur les effets des conflits armés sur les traités. De son avis, le Rapporteur spécial devrait préparer un troisième rapport sur cette question, comme proposé par la Commission. Dans ses observations qu’il a voulues générales, le représentant a tout d’abord abordé la question de l’applicabilité de la Convention de Vienne sur le droit des traités en cas de conflits armés. Il faut d’abord se demander quel régime juridique régit les traités en cas de conflits armés, question qui est subdivisée en quatre problèmes distincts: les conséquences de l’extinction des traités; les conséquences de leur suspension; les obligations découlant des traités qui continuent à s’appliquer et les règles qui s’appliquent quand les parties belligérantes concluent d’autres traités. Pour ce qui est de savoir si la Convention de Vienne sur le droit des traités devrait s’appliquer dans de telles situations, M. Makarewicz a jugé qu’il y a deux raisons pour répondre par l’affirmative. En premier lieu, il a invoqué l’intention des parties, citant l’article 73 de la Convention de Vienne, qui n’exclut pas que celle-ci s’applique. En second lieu, il a fait valoir que la Convention de Vienne est un exemple typique de traité multilatéral, dont l’objet et le but impliquent la continuité de son application. Compte tenu de la possible confusion sur le sujet à la lecture du projet d’articles, le représentant a donc proposé d’ajouter une disposition sur l’applicabilité de la Convention de Vienne. M. Makarewicz a aussi soulevé la question de la possibilité de séparer les dispositions du traité comme moyen d’adapter les traités aux effets des conflits armés.
En ce qui concerne l’obligation d’extrader ou de poursuivre, M. Makarewicz a estimé que le Rapporteur spécial a su identifier les problèmes les plus importants. Il a approuvé la proposition d’étudier systématiquement la pratique des États, avec l’assistance du Secrétariat. Les réponses des gouvernements aux questions posées par la CDI à cet égard sont particulièrement importantes, a-t-il estimé. Quant à la fragmentation du droit international, le représentant a approuvé la classification de la CDI des domaines dans lesquels la fragmentation est la plus visible. Les 42 conclusions de la Commission sur le sujet constituent un travail inédit et représente une œuvre de grande valeur pour les gouvernements, a-t-il conclu.
M. AHMED SARADGI (Inde), abordant la question des effets des conflits armés sur les traités, a estimé qu’on ne pouvait pas séparer de façon stricte le droit des traités et les autres branches de droit international qui peuvent aussi être pertinentes avec ce sujet. Il a souhaité que la portée soit limitée aux traités conclus entre États et ne traite pas des traités conclus entre organisations internationales. Pour les conflits armés, il préfère qu’on se limite aux conflits internes. L’intention des parties est pertinente pour l’interprétation d’un traité, mais elle doit être déterminée à partir du texte du traité et il est peu probable qu’à l’époque de la conclusion du traité, les parties aient envisagé la situation d’un conflit armé. En ce qui concerne le projet d’article 7, qui fournit une liste des traités qui sont censés s’appliquer en cas de conflits armés, le délégué indien a préféré que la CDI ne dresse pas une telle liste car elle risque de ne pas être exhaustive.
Passant à la question « l’obligation d’extrader ou de poursuivre », M. Singh a indiqué attendre avec impatience les rapports à venir sur les projets de règles sur ce concept. L’Inde est partie aux conventions des Nations Unies contre le terrorisme qui prévoient cette obligation, a-t-il expliqué. En vertu de la législation indienne, l’extradition peut être ordonnée sur la base d’un traité bilatéral ou d’une convention multilatérale qui la prévoit. Quant à la question de la fragmentation du droit international, M. Singh a félicité le Groupe d’étude pour avoir soumis un rapport contenant 42 conclusions.
M. HOSSEIN PANAHI AZAR (République islamique d’Iran), s’exprimant sur la question des effets des conflits armés sur les traités, a noté qu’il existait plusieurs conventions et instruments juridiques s’y rapportant et qu’en conséquence, le travail de la CDI en la matière consistait à compléter ces instruments. Il a convenu avec le Rapporteur spécial et la plupart des États que cette question ne s’inscrit pas dans le cadre du droit relatif au recours à la force, mais est liée plutôt au droit des traités, au droit international humanitaire , à la responsabilité des États et à la légitime défense. Il a noté avec appréciation que le Rapporteur spécial s’est intéressé à la question de l’occupation militaire et de ses effets sur les traités, mais a estimé que cette question n’a pas à être couverte par la définition de l’expression « conflits armés ». Le représentant a souligné, faisant référence au projet d’article 4, que l’intention des parties à un traité est fondamentale pour déterminer la validité d’un traité en cas de conflit armé. L’intégrité et la continuité des traités internationaux, a-t-il ajouté enfin, sont les deux principes de base du droit des traités à prendre en considération dans l’examen de cette question.
M. VALERIO ASTRALDI (Italie) a noté que la Commission semblait avoir des difficultés à définir le champ d’application de la question de l’obligation d’extrader ou de poursuivre qui est incorporée dans de nombreux traités et que celle-ci pourrait apporter une contribution utile à ce thème en faisant une étude d’ensemble sur les pratiques relatives à ces traités. Il a félicité la Commission d’avoir établi un ensemble impressionnant de conclusions sur les aspects de fond de la fragmentation du droit international qui expliquent divers points d’une grande difficulté théorique et fournissent des explications utiles aux autorités judiciaires pertinentes.
M. EL HADJ LAMINE (Algérie), abordant la question de la protection diplomatique, s’est félicité que le projet d’article 2 atteste que la protection diplomatique est un droit des États et non pas une obligation. Il a estimé par ailleurs que le projet d’article 19 ne change pas le caractère discrétionnaire du droit de l’État d’exercer sa protection diplomatique, droit reconnu d’ailleurs par la Cour internationale de Justice. Pour ce qui est de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant a souligné que l’adoption des projets de principes par l’Assemblée générale sous forme de résolution permettrait d’ouvrir la voie à une compensation adéquate des victimes. L’Algérie a soutenu l’inscription de la question de la protection de l’environnement dans le projet de principes. Passant ensuite au chapitre du rapport de la CDI sur les effets des conflits armés sur les traités, le représentant a été d’avis que les conflits internes peuvent affecter indirectement l’application d’un traité et qu’il était nécessaire d’inclure dans le cadre la définition des situations d’occupation militaire. Enfin, la délégation algérienne a considéré que l’obligation d’extrader ou de poursuivre offrait aux États le choix d’opter entre deux partis. Il a souligné aussi que la procédure d’extradition devrait être l’objet d’un examen par la Commission et, s’agissant du principe de la compétence universelle, il a partagé le point de vue de la Commission quant à la nécessité d’axer le travail sur l’examen de l’obligation d’extrader ou de poursuivre, et s’est déclaré favorable à la formulation d’un projet d’articles pour traiter ce thème.
Mme ELIZABETH WILCOX (États-Unis) a constaté que le deuxième rapport du Rapporteur spécial sur les effets des conflits armés sur les traités met en lumière des questions qui doivent être analysées plus avant: la portée du projet d’articles, la question de l’intention des parties, et les problèmes qui se posent lorsqu’il s’agit d’établir des catégories de traités pour étudier les effets des conflits armés sur les traités. D’une façon générale, il faut s’efforcer d’adopter une démarche qui préserve une continuité raisonnable des obligations en vertu des traités en cas de conflits armés, tout en tenant compte des nécessités militaires. Dans la plupart des cas, a-t-elle remarqué, les parties à un traité n’ont pas d’intention particulière pour prévoir les obligations qui s’appliquent dans les conflits armés. La représentante a proposé que la Commission identifie des facteurs pour renseigner sur la façon de procéder dans ces cas.
Passant au sujet de l’obligation d’extrader ou de poursuivre, la représentante a reconnu qu’il y a un certain nombre de questions qui doivent être traitées pour décider si les travaux sur cette question seront poursuivis et sous quelle forme. Dans quelle mesure le droit est-il déjà suffisamment développé et codifié sur cette question, s’est-elle aussi interrogée. De son avis, il faudrait se baser sur les obligations existantes en vertu des conventions actuelles. Enfin, abordant la question de la fragmentation du droit international, Mme Wilcox a noté que beaucoup de questions difficiles sont traitées dans l’étude analytique. Les procédures utilisées, a-t-elle noté, semblent poser problème car les gouvernements ont des difficultés à fournir leurs commentaires sur la question. Elle s’est félicitée de la décision de la Commission d’achever cette étude en fonction de ses premiers travaux, plutôt que de développer un ensemble d’articles plus prescriptif ou une déclaration représentative du droit international coutumier.
Mme SARAH WILLIAMS (Royaume-Uni) a abordé la question des effets des conflits armés sur les traités et noté que si certains points ont été clarifiés, il reste un certain nombre de problèmes. En ce qui concerne les traités impliquant les organisations internationales, elle a préféré qu’ils ne soient pas inclus dans l’étude. Par ailleurs, la question de savoir s’il faut inclure dans la définition des conflits armés les conflits internes est importante et difficile à résoudre, a ajouté la représentante. De son avis, les conflits internes peuvent avoir un impact significatif sur les relations entre États régies par les conventions internationales, mais il a préféré à première vue d’exclure ces conflits du champ d’application du projet de texte. Concernant le projet d’article 4, elle est en faveur de conserver le critère de l’intention comme proposé par le Rapporteur spécial.
Mme Williams a ensuite présenté des commentaires préliminaires sur la question « l’obligation d’extrader ou de poursuivre ». Elle a commencé par se demander pourquoi il était nécessaire d’étudier cet aspect du droit pénal international et quel pouvait être le lien entre ce sujet et celui de la « compétence extraterritoriale » proposé par la Commission pour son travail à long terme. Elle a ensuite approuvé la conclusion selon laquelle l’étude ne devrait pas examiner le transfert d’individus aux tribunaux pénaux internationaux. L’obligation en elle-même résulte du droit des traités et non du droit coutumier international, selon le Royaume-Uni. Quant au résultat final de cette question, elle a jugé prématuré de décider à ce stade de sa forme finale. Enfin, sur le chapitre portant sur la fragmentation du droit international, elle s’est félicitée de la conclusion de l’étude analytique et a encouragé la Commission à la publier sur son site Internet. Il a cependant estimé que le sujet ne se prête pas à un document prescriptif.
M. MOHD RADZI HARUN (Malaisie), abordant la question des effets des conflits armés sur les traités, a proposé de limiter le champ d’application du projet d’articles 1 aux traités entre États et convenu que la définition du terme « traité » devrait être si nécessaire conforme à la définition qu’en donne la Convention de Vienne sur le droit des traités. Passant à la question de la définition de l’expression « conflits armés », il a convenu également que la CDI devrait reformuler la définition en déclarant simplement que les projets d’articles s’appliquent aux conflits armés, qu’il y ait eu ou non une déclaration de guerre. Il a noté ensuite que la proposition de changer « ipso facto » par « nécessairement » implique un choix politique de fond et ne constitue pas un simple choix lexicographique. Après avoir passé en revue plusieurs des projets d’articles, M. Harun a rappelé que la codification effective de cette question exige des États qu’ils soumettent des rapports sur leurs pratiques en la matière depuis la Deuxième Guerre mondiale. S’agissant de l’obligation d’extrader ou de poursuivre, la délégation de Malaisie a demandé si cette obligation doit reposer uniquement sur des traités ou si elle relève en revanche du droit international coutumier. Elle a également souligné la distinction conceptuelle entre l’obligation d’extrader ou de poursuivre et le principe de juridiction universelle et, avant de conclure, elle a appuyé la proposition visant à formuler des projets d’articles sur le concept, la structure et le fonctionnement de l’obligation.
M. DIEGO MALPEDE (Argentine) a souligné que pour ce qui est de la question de la fragmentation du droit international, le Groupe d’étude a présenté, comme le lui avait demandé la Commission du droit international, une version abrégée des conclusions de l’étude, lesquelles constituent un guide de directives pratiques à l’intention des États. L’Argentine a apprécié le fait que le Groupe d’étude ait pris comme référence la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités. Elle a trouvé particulièrement intéressante l’étude réalisée sur les régimes autonomes et les conclusions associées. Le représentant argentin a souligné l’examen de la question des relations hiérarchiques entre les normes du droit international relatives à l’Article 103 de la Charte des Nations Unies et d’autres normes du droit international. En conclusion, l’Argentine a estimé que le travail réalisé par le Groupe d’étude avait un caractère de doctrine et que ses conclusions devraient faire l’objet d’une large diffusion pour faciliter la compréhension de la fragmentation du droit international et donner les moyens d’y répondre.
Mme SIMONA SPINARU (Roumanie) s’est félicitée des mesures prises pour codifier la question des ressources naturelles partagées, en particulier du projet d’articles sur leur utilisation équitable et raisonnable, mais s’est inquiétée de la définition insuffisante de termes tels que « approche de précaution » et « dommages significatifs » notamment. Passant à la question de la responsabilité des organisations internationales, elle a souscrit à la déclaration de la Commission européenne en la matière, et souligné qu’elle n’était pas d’avis qu’un État devait indemniser une partie lésée à raison du fait illicite d’une organisation internationale si celle-ci n’est pas en mesure de le faire. Elle a ensuite indiqué que les réserves aux traités relatifs aux droits de l’homme devraient être soumises aux mêmes règles que les réserves aux autres types de traités et souligné que le critère le plus important en matière de validité matérielle d’une réserve est l’intention de l’État à la conclusion du traité. Passant à la question des actes unilatéraux des États, elle s’est félicitée également de la formulation des dix Principes directeurs applicables aux déclarations unilatérales des États susceptibles de créer des obligations juridiques.
Sur la question des effets des conflits armés sur les traités, la représentante de la Roumanie a appuyé la proposition du Rapporteur spécial de transférer cette question à l’examen d’un groupe de travail et estimé que la définition de « traité » devrait refléter la réalité actuelle, à savoir que non seulement les États, mais aussi les organisations internationales, peuvent conclure des traités. Quant à la question sur l’obligation d’extrader ou de poursuivre, la représentante a rappelé qu’en vertu de la législation roumaine, toute personne ayant reçu l’asile politique en Roumanie ne peut être extradée, à quelques exceptions près et seulement si les conventions internationales ratifiées par la Roumanie le permettent. Abordant enfin la question de la fragmentation du droit international, elle a signalé que le document produit par le Groupe d’étude, sans être un texte codifié, est un instrument fascinant qui, a-t-elle espéré, sera utile pour les juristes internationaux.
M. ALLIEU IBRAHIM KANU (Sierra Leone) a exprimé l’appui de son pays aux projets d’articles sur la protection diplomatique mais a noté que le projet d’article 18 ne dit rien de la protection à accorder l’équipage d’un navire ayant des liens avec plusieurs pays. À ce stade, a-t-il estimé, il ne convient pas d’élaborer une convention sur la base de ces projets d’articles. Passant à la question de la responsabilité des organisations internationales, il a appuyé l’utilisation des articles sur la responsabilité de l’État pour rédiger les projets d’articles sur la responsabilité des organisations internationales mais a souligné les différences entre ces deux entités. Il a ensuite appuyé les travaux de la CDI en matière de fragmentation du droit international et l’importance, à cet égard, du travail de codification et de développement progressif du droit international de la Commission.
Soulignant ensuite la complexité de la question des effets des conflits armés sur les traités, le représentant a índiqué que sa délégation ne ferait pas, à ce stade, de commentaires sur ce sujet. Il a continué en rappelant l’intérêt de la Sierra Leone vis-à-vis de la question de l’obligation d’extrader ou de poursuivre et son appui à une approche qui fasse la distinction entre le principe de juridiction universelle et le principe aut dedere aut judicare. En conclusion, la Sierra Leone a proposé trois nouvelles questions à l’examen de la Commission: les conséquences juridiques découlant de l’utilisation d’armées privées dans des conflits internes; les conséquences juridiques découlant de la participation de sociétés multilatérales dans des conflits internes et les conséquences juridiques découlant de la participation des organismes de sécurité dans des conflits internes.
M. GUILLAUME PAMBOU-TCHIVOUNDA (Gabon), Président de la Commission du droit international (CDI), a remercié toutes les délégations qui ont pris la parole sur les différents chapitres du rapport de la Commission. La CDI compte sur la Sixième Commission afin de bénéficier des positions et commentaires exprimés par les gouvernements sur les questions relatives aux orientations générales de ses travaux, a-t-il assuré. Il a appelé en particulier les délégations à faire parvenir à la Commission leurs commentaires écrits sur les projets d’articles relatifs aux « ressources naturelles partagées », adoptés en première lecture, ainsi que sur les diverses questions soulevées au chapitre III du rapport. La Commission prendra sérieusement en considération l’ensemble des observations formulées au cours du débat et qui seront résumées par le Secrétariat. M. Pambou-Tchivounda a enfin exprimé toute sa satisfaction pour les discussions franches et ouvertes qui ont eu lieu, à titre informel, avec les conseillers juridiques qui étaient présents lors de cette session.
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