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AG/J/3304

LA SIXIÈME COMMISSION POURSUIT L’EXAMEN DU RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL

26/10/2006
Assemblée généraleAG/J/3304
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Sixième Commission

11e séance – matin


LA SIXIÈME COMMISSION POURSUIT L’EXAMEN DU RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL


Les délégations expriment des positions divergentes sur les dispositions relatives à la protection diplomatique des personnes morales


Poursuivant l’examen du rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa cinquante-huitième session, les délégations qui se sont exprimées, ce matin, à la Sixième Commission (chargée des questions juridiques) ont salué en particulier la finalisation cette année des travaux de la Commission sur les projets d’articles et de principes, respectivement sur la « protection diplomatique » et sur la « responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international ».


Dans le projet d’articles sur la protection diplomatique, il est prévu que cette protection bénéficie non seulement aux personnes physiques, mais aussi aux personnes morales.  En ce qui concerne les sociétés, le projet d’article 9 prévoit que l’État de nationalité d’une société est celui dans lequel elle a été constituée, en l’assortissant d’une exception pour la société qui n’exerce pas d’activités importantes dans l’État où elle a été constituée, et qui a son siège et son contrôle financier dans un autre État, ce dernier étant alors considéré comme l’État de nationalité.  Pour la délégation russe, le critère de non-cumul établi par cette disposition permet d’éviter des situations où plusieurs États pourraient formuler une demande de protection diplomatique à l’égard d’une même société.  Mais pour la République islamique d’Iran, l’étendue de la protection diplomatique à des sociétés est inutile dans la plupart des cas, du fait de l’existence de traités multilatéraux ou bilatéraux qui réglementent les situations dans lesquelles les sociétés conduisent leurs activités. 


Concernant la question de la responsabilité internationale pour conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, plusieurs représentants ont approuvé le projet de principes élaboré par la CDI et souhaité que l’Assemblée générale l’entérine.  Ce texte est, de l’avis de la délégation de la Pologne, bien équilibré et repose sur de nombreux instruments juridiques existants, sa base étant le principe du « pollueur-payeur ».


Sur un plan plus général, la représentante de l’Espagne a affirmé que le dynamisme du droit international et la nécessité de répondre à de nouvelles réalités exigent de la Commission du droit international qu’elle mette constamment à jour ses travaux et qu’elle inscrive de nouveaux thèmes à son programme de travail.  Dans ce cadre, la délégation russe a souhaité en particulier l’inscription à l’ordre du jour de la Commission de trois nouveaux points, à savoir « La protection des personnes en cas de catastrophe », « L’immunité juridictionnelle des organisations internationales » et « La compétence extraterritoriale ».


Les délégations de la Hongrie, de la République tchèque et du Chili ont également pris la parole.


La Sixième Commission poursuivra l’examen du rapport de la Commission du droit international demain, vendredi 27 octobre à 10 heures.  En présence du Président de la Cour internationale de Justice, elle se prononcera sur le projet de résolution relatif au soixantième anniversaire de la Cour.


RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-HUITIÈME SESSION (A/61/10)


Déclarations


      Mme CONCEPCIÓN ESCOBAR HERNÁNDEZ (Espagne) s’est félicitée de la mise au point du projet d’articles sur la protection diplomatique, question centrale pour le travail de codification et de développement progressif de la Commission du droit international.  Elle a souligné le fait que la protection diplomatique est désormais reconnue comme un droit de l’État et s’est félicitée de la définition de la continuité de nationalité qui permet de prolonger la période entre le préjudice et la réclamation.  Le projet d’articles sur la protection diplomatique, a-t-elle ajouté, constitue un équilibre intéressant entre codification et développement progressif.  Elle a estimé que le travail réalisé sur le projet d’articles permet d’envisager d’adopter une convention en la matière.  S’agissant de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, a dit la représentante, la CDI présente huit projets de principes et demande à l’Assemblée générale de les adopter par le biais d’une résolution, mais ne comprenant pas pourquoi l’on accorderait un traitement normatif différencié à la prévention des dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses et aux préjudices découlant des mêmes activités, elle a souhaité qu’une décision sur la forme de ces projets de principes soit rattachée à d’autres décisions de l’Assemblée générale en matière de responsabilité internationale.  Enfin, elle a exprimé la confiance de sa délégation à l’égard des travaux que la Commission du droit international entreprendrait à l’avenir, soulignant cependant que le dynamisme du droit international et la nécessité de répondre à de nouvelles réalités exigent de la Commission qu’elle mette constamment à jour son travail et qu’elle inscrive de nouveaux thèmes à son programme de travail.


      M. REMIGIUSZ HENCZEL (Pologne) a félicité la Commission du droit international pour ses efforts de codification.  Il a constaté que les deux parties du thème de la responsabilité, dont la deuxième a été terminée cette année, complètent les travaux accomplis dans le cadre de l’examen de la question de la responsabilité pour des conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.  Dès 2001, lorsque la CDI avait achevé la première partie, la Commission avait recommandé l’élaboration d’une convention internationale.  Le représentant a pensé que la forme finale de la deuxième partie ne devrait pas être différente de celle de la première partie.  La Commission a aussi achevé l’examen du point intitulé « Risques découlant de la fragmentation du droit international », a-t-il poursuivi.  L’année dernière, il avait félicité la CDI pour ses travaux sur les deux thèmes « Expulsion des étrangers » et « Les effets des conflits armés sur les traités », mais il a constaté cette année que peu de progrès ont été réalisés.  M. Henczel s’est ensuite prononcé en faveur de l’étude de nouveaux thèmes, comme « L’immunité des représentants des juridictions pénales étrangères » et « La protection des personnes en cas de catastrophe ».  En revanche, il a estimé que la CDI ne devrait pas rouvrir la discussion sur le sujet de « La clause de la nation la plus favorisée ».


Concernant la question de la responsabilité internationale, M. Henczel a approuvé le projet de principes et souhaité que l’Assemblée générale l’entérine en recommandant aux États de les mettre en œuvre.  Ce projet est bien équilibré et repose sur de nombreux instruments juridiques existants.  Il a souhaité que la base soit le principe du « pollueur-payeur » et que tous les dommages soient couverts.  Toutes les procédures nécessaires devraient être disponibles pour les victimes, a-t-il ajouté.  Pour ce qui est de la définition de « dommage significatif » (projet de principe 2 a), il a demandé l’ajout du terme « notamment » à la liste des cinq cas.  Pour ce qui est du projet de principe 3, qui définit les objectifs du projet, le comportement de l’opérateur et de l’État d’origine devraient être pris en considération, selon le représentant.  Passant au projet d’articles sur la protection diplomatique, il a considéré qu’il ne traite pas de questions très importantes.  Les développements actuels en droit international prévoient une certaine obligation pour l’État d’accorder la protection diplomatique à la personne lésée, comme la loi polonaise le prévoit d’ailleurs.  La délégation polonaise estime que l’État de la nationalité a un devoir juridique d’exercer la protection diplomatique sur requête de la personne lésée.  En l’absence d’une telle requête, l’État a un devoir juridique d’exercer la protection diplomatique si le dommage résulte d’une violation grave des normes internationales de jus cogens attribuables à d’autres États.


M. ISTVÁN HORVÁTH (Hongrie) s’est félicité du travail réalisé par la Commission du droit international sur la protection diplomatique et la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, mais a rappelé que la Commission examine depuis des années des questions telles que les réserves aux traités dont plusieurs délégations réclament la finalisation.  Il a pris note de la décision de la Commission d’inscrire cinq nouvelles questions à son programme de travail et estimé que l’inclusion de nouvelles questions doit faire l’objet d’un examen minutieux, compte tenu de la charge de travail de la Commission.  Pour ce qui est de la protection diplomatique, la Hongrie a signalé que la pratique des États a déjà mis en place un régime clairement défini relatif à la protection diplomatique qui fait désormais partie du droit coutumier et des traités internationaux sur la responsabilité de l’État par exemple, et elle a appuyé l’adoption des projets d’articles.  S’agissant de la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses, M. Horvath s’est félicité de cet instrument qui vient compléter les projets d’articles sur la prévention des dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses, ainsi que des progrès réalisés en la matière grâce à des accords bilatéraux.  En conclusion, le représentant a déclaré que la Hongrie accepterait les principes relatifs à la répartition des pertes à la condition que les États concernés prennent les mesures nécessaires pour assurer que les personnes physiques et morales lésées, y compris les États, touchent des indemnités promptes et adéquates.


      M. HOSSEIN PANAHI AZAR (République islamique d’Iran) a noté que les projets d’articles sur la protection diplomatique n’ont pas pour objectif de déterminer les façons dont une personne peut acquérir la nationalité d’un État.  Dans le projet d’article 4, la Commission a posé le principe du droit des États à déterminer qui sont leurs nationaux.  Pour le représentant, les États qui exercent ce droit devraient éviter d’adopter des lois car cela augmente le risque de nationalité multiple ou d’apatridie.  En ce qui concerne le projet d’article 7, la détermination de la nationalité dominante est une question subjective, selon M. Panahi Azar qui a aussi considéré que cet article ne se basait pas sur le droit international coutumier.  Il a poursuivi en expliquant qu’il ne partageait pas l’opinion de la Commission qui prétend que la décision du Tribunal chargé du contentieux Iran/États-Unis constitue une source démontrant l’évolution des règles du droit international dans le domaine de la protection diplomatique.  Le représentant a conclu que l’ajout de cet article controversé empêchera les États les plus intéressés d’approuver l’ensemble du projet de texte.  M. Panahi 

Azar a ensuite considéré que l’étendue de la protection diplomatique à des sociétés est inutile dans la plupart des cas, du fait de l’existence de traités multilatéraux ou bilatéraux qui règlementent les situations dans lesquelles les sociétés conduisent leurs activités.  En ce qui concerne le projet d’article 15, qui prévoit les exceptions à la règle de l’épuisement de ces recours, il a estimé que le retard abusif dans l’administration du recours ne doit pas ipso facto être considéré comme une exception.  La durée des procédures judiciaires peut en effet être allongée pour des raisons inévitables, a-t-il remarqué.


      M. MILAN DUFEK (République tchèque) s’est félicité de l’adoption du projet d’articles sur la protection diplomatique.  Il a jugé l’ensemble satisfaisant et estimé que les commentaires apportaient une contribution précieuse à la codification et au développement progressif du droit international et le projet d’articles lui-même reconnaissait les principes fondamentaux du droit international coutumier.  Il s’est félicité en particulier du projet d’article 8 sur la protection diplomatique des apatrides et des réfugiés qui met en vigueur le principe de non-discrimination à l’égard de ces personnes, et du projet d’article 19 sur l’exercice par un État de la protection diplomatique en tenant compte des vues des personnes lésées.  Ce projet d’articles est important car la protection diplomatique est souvent le seul recours dont disposent les personnes lésées par un fait internationalement illicite.  S’agissant de la forme des futurs projets d’articles, la délégation tchèque a estimé qu’à ce stade, les projets d’articles sur la protection diplomatique ne devraient pas avoir un caractère contraignant mais revêtir la même forme que les articles sur la responsabilité des États pour actes internationalement illicites.  Pour ce qui est des travaux futurs de la Commission, la délégation tchèque a pensé qu’ils devraient porter sur les sujets tels que la jurisprudence et la pratique des États.


M. CLAUDIO TRONCOSO (Chile) s’est félicité du neuvième rapport du Rapporteur spécial sur les actes unilatéraux des États qui portait sur les causes de nullité et d’extinction des actes unilatéraux, ainsi que sur leur définition, leur caractère obligatoire et leur interprétation.  Il a souligné l’étude détaillée qui a donné lieu à des projets de principes dont la CDI a tenu compte pour adopter les « Principes directeurs applicables aux déclarations unilatérales des États susceptibles de créer des obligations juridiques ».  S’agissant de la nullité des actes unilatéraux notamment, le rapport a suivi la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités.  Le rapport, a continué M. Troncoso, considère qu’il existe trois causes de nullité: incompétence du représentant, nullité relative à l’expression d’un consentement et nullité pour contravention au jus cogens.   La délégation argentine s’est félicitée des travaux sur la question complexe des causes de nullité, de modification, de suspension ou d’extinction de l’acte unilatéral.  Elle partage la définition des actes unilatéraux donnée par le Rapporteur spécial, ainsi que son avis sur leur interprétation, et estime nécessaire que les États s’imposent des limites quant à l’exercice de leurs compétences sur le plan international.  Enfin, le délégué argentin a souligné que le texte des principes directeurs constitue une bonne analyse des principes formulés par le Rapporteur spécial et clarifie certaines questions figurant dans le rapport.  En conclusion, M. Troncoso a estimé que la CDI devait continuer à œuvrer à l’élaboration d’un régime applicable à tous les actes unilatéraux, les principes directeurs adoptés par la CDI étant un premier pas dans cette direction.


Mme MARIA V. ZABOLOTSKAYA (Fédération de Russie) a félicité la CDI pour sa session très productive, avec l’achèvement des deux projets d’articles.  Concernant les nouveaux points dont l’étude est envisagée, elle s’est dite favorable en particulier pour l’examen des sujets suivants: « La protection des personnes en cas de catastrophe », « L’immunité juridictionnelle des organisations internationales » et éventuellement « La compétence extraterritoriale ».


Pour ce qui est du projet d’articles sur la protection diplomatique, la représentante a estimé qu’il s’agit d’une combinaison heureuse de codification et de développement progressif du droit international.  La protection diplomatique est un droit de l’État lui-même ou bien est exercée au nom de la personne lésée.  Selon la représentante, la CDI a adopté la bonne approche avec le principe de la continuité de la nationalité des personnes physiques et morales (projets d’articles 5 et 10).  Les limites temporelles de ce principe sont importantes à l’égard de la recevabilité des demandes.  En ce qui concerne les cas de nationalités multiples, relevant que ces cas se multiplient dans un monde globalisé, elle a apprécié que le projet de texte envisage ces possibilités.  Elle s’est félicitée de la rédaction renouvelée du projet d’article 9, selon lequel l’État de nationalité d’une société est celui dans lequel elle a été constituée, principe assorti d’une exception pour la société qui n’exerce pas d’activités importantes dans l’État où elle a été constituée, et qui a son siège et son contrôle financier dans un autre État, ce dernier étant alors considéré comme l’État de nationalité.  Elle a jugé que le critère de non-cumul établi par cette disposition permet d’éviter des situations ou plusieurs États pourraient formuler une demande de protection diplomatique à l’égard d’une même société.  S’agissant du projet d’article 11 a), concernant la protection des actionnaires, elle a averti qu’on pourrait en abuser.  Faisant référence au projet d’article 13, qui vise les autres personnes morales, elle a estimé qu’il ne serait pas opportun de s’abstenir de l’inclure dans la mesure où il n’existe pas de norme habituelle de droit en ce domaine.  L’ensemble des projets d’articles constitue un texte bien équilibré, qui mérite d’être entériné sous la forme d’une convention, a-t-elle conclu. 


Concernant le projet de texte sur la responsabilité internationale, la représentante a estimé qu’il est significatif et son adoption ne doit pas être rattachée au projet sur la responsabilité de l’État.  Compte tenu des diverses pratiques des États en matière de responsabilité, elle a jugé importante la participation des États à ces travaux et a jugé optimale la forme des principes.  La forme même du texte final des projets de principes lui a paru adéquate.  Il est bon que la CDI n’ait pas inclus les préjudices causés à l’environnement au-delà de la compétence juridictionnelle nationale.  Dans les projets de principes, il s’agit exclusivement d’activités non interdites par le droit international.  La représentante a appuyé la commission d’avoir inclus l’obligation ferme de l’opérateur pour le dommage causé.  Le projet de texte final pourrait être adopté par l’Assemblée générale sous la forme d’une déclaration, a-t-elle conclu, mais l’examen de la question pourrait être repoussé à l’année prochaine.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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