SIXIÈME COMMISSION: LES DÉLÉGATIONS EXPRIMENT LEURS VUES SUR LE NOUVEAU THÈME DE LA CDI CONSACRÉ AUX EFFETS DES CONFLITS ARMÉS SUR LES TRAITÉS
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Sixième Commission AG/J/3287
18e séance – matin 1er novembre 2005
SIXIÈME COMMISSION: LES DÉLÉGATIONS EXPRIMENT LEURS VUES SUR LE NOUVEAU THÈME DE LA CDI CONSACRÉ AUX EFFETS DES CONFLITS ARMÉS SUR LES TRAITÉS
La question des « effets des conflits armés sur les traités », nouveau sujet étudié par la Commission du droit international (CDI), a suscité ce matin de nombreux commentaires de la part des délégations de la Sixième Commission (Commission juridique). La principale difficulté que pose l’examen de cette question tient au fait que la CDI ne peut se baser que sur une pratique très rare en la matière.
Les délégations ont commenté les 14 projets d’articles présentés par le Rapporteur spécial, fondés sur le principe selon lequel un conflit armé n’a pas pour conséquence l’extinction ou la suspension des effets du traité entre les parties au conflit. À cet égard, le représentant de la République de Corée a émis des doutes sur la référence à un « conflit armé », considérant que d’autres formes d’hostilités peuvent affecter les traités en vigueur. Il a cité les cas de la guerre déclarée, de l’occupation étrangère, des régimes racistes, ou encore de la lutte contre la domination coloniale. Il a donc proposé d’utiliser plutôt le terme « hostilités » qui figure déjà à l’article 73 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Le représentant portugais a également estimé que la définition de « conflit armé », proposée par la CDI, est trop restrictive.
En revanche, le représentant de la Chine a considéré que la portée des « conflits armés » telle que présentée dans les projets d’articles était trop large. De l’avis de sa délégation, il serait inapproprié, par exemple, qu’une action militaire menée par un État sur son propre territoire contre des groupes rebelles puisse entrer dans le champ d’application des projets d’articles. Pour le représentant de l’Iran, une définition extensive du terme « conflit armé » n’est pas non plus souhaitable, car elle est susceptible de mettre en péril les relations contractuelles. Une telle définition, a-t-il ajouté, va également à l’encontre des efforts de la CDI visant à développer et à renforcer la sécurité des relations de traité entre les États. Le représentant de l’Italie a, quant à lui, proposé de faire une distinction claire entre d’une part, la question des effets des conflits armés dans les relations entre États qui sont parties à un conflit et d’autre part, la question des effets qu’un conflit armé peut avoir à l’égard d’un État tiers par rapport à un conflit armé.
Au titre de la question de la protection diplomatique, également abordée ce matin, le représentant de la Norvège, au nom des pays nordiques, a rappelé que les États ont le droit et non le devoir d’exercer la protection diplomatique. La théorie de la protection diplomatique repose sur l’hypothèse qu’un dommage causé à un ressortissant d’un État constitue un dommage à l’État lui-même. Sur ce thème, les délégations sont revenues sur le projet d’articles adopté en première lecture l’année dernière, et ont exprimé leur position sur la pertinence de l’inclusion de la notion des « mains propres » avec le sujet, répondant ainsi à la question posée par la CDI. Appliquée dans le cadre de la protection diplomatique, on pourrait considérer qu’un État ne pourrait pas assurer sa protection diplomatique à un ressortissant qui aurait commis un fait illicite. Les délégations ont généralement partagé l’avis de la CDI qui estime que cette doctrine n’a pas de rapport assez étroit avec le sujet de la protection diplomatique pour que son insertion dans les projets d’articles soit justifiée. Selon le délégué canadien, la protection diplomatique est un instrument important dans la protection des droits de la personne et il serait nuisible de la rendre dépendante de la conduite d’un État particulier ou d’un individu.
En ce qui concerne le thème de la fragmentation du droit international, une des questions qui se posent à la CDI est la hiérarchie des normes de droit international qu’il convient d’adopter pour régler d’éventuels conflits dans l’application de ces normes. La représentante de la Finlande, qui s’exprimait au nom des pays nordiques, a fait sienne l’approche adoptée par la CDI visant à axer ses travaux sur les aspects fondamentaux de la fragmentation du droit et à choisir la Convention de Vienne sur le droit des traités en tant que cadre général de l’analyse.
Au cours du débat, les représentants des pays suivant ont pris la parole: République islamique d’Iran, Chine, Finlande (au nom des pays nordiques), Norvège (au nom des pays nordiques), Autriche, République de Corée, Pays-Bas, Espagne, Inde, Bélarus, Italie, Portugal, Allemagne, Malaisie et Canada.
La prochaine séance plénière de la Sixième Commission aura lieu demain, mercredi 2 novembre, à 9 heures 30.
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-SEPTI È ME SESSION (A/60/10)
Déclarations
M. HOSSEIN PANAHIAZAR (République islamique d’Iran), s’exprimant sur le sujet des conflits armés sur les traités, s’est félicité de l’approche adoptée par le Rapporteur spécial consistant à présenter des projets d’articles afin de clarifier la position juridique et de promouvoir les relations juridiques entre les États. Néanmoins, ce sujet a un lien étroit avec d’autres domaines du droit international, notamment le droit international humanitaire, le droit à la légitime défense et la responsabilité des États. S’agissant de la définition des conflits armés, le Rapporteur utilise l’expression « conflit » plutôt que celle de « conflit armé international », ce qui élargit la portée de la définition, de manière à ce que les conflits armés internes peuvent être inclus. Néanmoins, des conflits armés internes ne devraient pas avoir d’effet sur les traités conclus entre l’État concerné et un État tiers. Dans le cas où un tel État ne respecte pas ses engagements conformément aux obligations des traités auxquels il est lié, le droit de la responsabilité devrait être engagé. Une définition large du terme « conflit armé » est susceptible de mettre en péril les relations contractuelles et va à l’encontre de la volonté du Rapporteur spécial qui est de développer et de renforcer la sécurité des relations de traité entre les États. Le représentant a exprimé ses préoccupations quant à la nature et l’étendue du conflit armé en tant que condition préalable pour déterminer l’intention des parties à un traité.
La délégation iranienne estime qu’il est inacceptable de considérer comme nul un traité qui est à la base d’un conflit. Le représentant a déclaré que la liste élaborée par le Rapporteur spécial présentant les traités continuant à s’appliquer en temps de conflit armé devrait être précisée. Il est clair que les États usant de leur droit de légitime défense ne devraient pas être placés sur le même pied d’égalité que les États ayant commis un acte illicite. Un acte d’agression ne devrait pas produire d’effets juridiques. Ainsi, le projet d’article 10 n’est pas bien rédigé car il pourrait assister un État à perpétrer un acte illicite.
M. MA XINMIN (Chine) s’est exprimé au sujet des effets des conflits armés sur les traités, de la protection diplomatique et de la fragmentation du droit international. Concernant les effets des conflits armés sur les traités, M. Ma a salué le rapport sur la question de Ian Brownlie, le Rapporteur spécial de la Commission du droit international (CDI), au sein duquel une série de projets d’articles sont présentés. Il a néanmoins jugé que l’approche adoptée par M. Brownlie, qui a limité son étude aux traités entre États, était trop restreinte, suggérant l’inclusion des traités auxquels ont pris part des organisations internationales. Il a par contre estimé que la portée des « conflits armés », telle que présentée dans les projets d’articles, était trop large, stipulant qu’une action militaire menée par un État en son sein contre des groupes rebelles pourrait entrer dans le champ d’application des projets d’articles, ce qui n’est pas approprié, a-t-il signalé.
Le représentant chinois s’est par ailleurs associé à plusieurs observations formulées par le Rapporteur spécial Ian Brownlie, qui estime notamment que le déclenchement d’un conflit ne met pas ipso facto un terme à l’application des traités, et qui souligne l’importance de l’intention des États parties parmi les critères permettant de déterminer si des traités doivent être terminés ou suspendus lors du déclenchement de conflits armés. Il a cependant indiqué que l’intention des États parties lorsqu’ils concluent un traité devait faire l’objet d’un examen complet lorsqu’il s’agit de déterminer si un traité continue ou non d’être valide. Concernant la provision suggérant que l’extinction ou la suspension d’un traité ne devait pas être affectée par la légalité de la conduite des parties au conflit armé, le représentant de la Chine a estimé qu’un État exerçant son droit de légitime défense devrait être autorisé à suspendre l’application d’un traité qui serait en conflit avec ce droit de légitime défense, suggérant que cette question soit examinée de manière approfondie.
Au sujet de la protection diplomatique, M. Ma s’est rallié à la position exprimée par le Rapporteur spécial John Dugard, qui n’a pas jugé nécessaire d’inclure la notion des « mains propres » dans les projets d’articles relatifs à la protection diplomatique. S’agissant de la fragmentation du droit international, le représentant de la Chine a enfin indiqué que l’étude de cette question n’était pas seulement importante d’un point de vue théorique, mais également pratique. L’étude de la règle de la lexspecialis, de la question des régimes autonomes et de la hiérarchie dans le droit international facilitera l’obtention d’un consensus international sur ces questions, normalisera la pratique internationale et contribuera dès lors à établir l’état de droit à travers la communauté internationale, a-t-il conclu.
Mme KIRSTI LINTONEN (Finlande), s’exprimant au nom des pays nordiques, s’est félicitée de l’approche fondamentale adoptée par la CDI sur le sujet de la fragmentation du droit international et l’accent mis sur les aspects de fond de cette fragmentation. Le choix de la Convention de Vienne sur le droit des traités en tant que cadre général de l’analyse est pertinent car la Convention contient de nombreuses ressources permettant de répondre à la question de la fragmentation des traités. Le résultat des travaux de la CDI sera très utile pour les praticiens du droit international, a ajouté la représentante. Se référant aux avis consultatifs de la CIJ portant respectivement sur la légalité des essais nucléaires et les conséquences juridiques de la construction d’un mur dans le territoire palestinien occupé, Mme Lintonen a affirmé que le principe selon lequel la loi spéciale déroge à la règle générale (lex specialis derogat legi generali) ne devrait pas entraîner l’extinction ou le remplacement total du droit international général.
Les pays nordiques accordent une grande importance à la notion d’interdiction de la lex specialis, qui se réfère aux situations dans lesquelles le droit général revêt la nature de jus cogens. La représentante a fait observer qu’il existe une position générale visant à diminuer les régimes intégrés qui équilibrent prudemment les droits et les obligations de plusieurs États. Ainsi, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer appartient à cette catégorie, car elle prévoit sa compatibilité avec d’autres accords. Les pays nordiques acquiescent au principe de « l’omniprésence du droit général ». Le cœur de l’étude sur « l’interprétation des traités à la lumière de toutes les règles pertinentes du droit international applicable dans les relations entre les parties » dispose que le droit général continue de couvrir les aspects du régime de traité non expressément couverts par une convention donnée. La représentante se félicite que la CDI examine un rôle de la coutume et des principes généraux dans l’étude. Enfin, l’étude du jus cogens est d’un intérêt pratique, notamment en raison des problèmes récents liés à la compatibilité des mesures contre-terroristes avec le droit humanitaire.
M. OYVIND HERNES (Norvège), s’exprimant au nom des pays nordiques, a abordé la question de la protection diplomatique. Il a exprimé sa satisfaction quant au résultat atteint par la CDI, appuyant l’ensemble des projets d’articles. Les États ont le droit et non le devoir d’exercer la protection diplomatique, a-t-il admis. Concernant le projet d’article 5, qui fixe le critère de l’exercice de la protection diplomatique en fonction de la continuité de la nationalité, M. Hernes a appuyé la thèse de la CDI qui prévoit qu’un État peut exercer la protection diplomatique par rapport à une personne qui était son ressortissant à l’époque du dommage et est un ressortissant à la date de la présentation officielle de la demande. Le représentant a aussi déclaré apprécier que la Commission du droit international ait prévu une disposition sur la protection diplomatique des apatrides et réfugiés, dans certains cas. À cet égard, les pays nordiques estiment qu’un État peut exercer la protection diplomatique à l’égard de personnes satisfaisant aux critères de lien territorial avec cet État. En ce qui concerne le critère temporel, le représentant a proposé de l’ajuster pour remplacer l’exigence de « résidence habituelle et légale » par celle de « séjour légal ». Enfin, les pays nordiques partagent l’avis de la CDI selon lequel la théorie des « mains propres » ne devrait pas être incluse dans le projet d’articles.
M. KONRAD G. BÜHLER (Autriche) partage l’approche fondamentale adoptée par le Rapporteur spécial concernant la question des effets des conflits armés sur les traités. Néanmoins, le projet d’articles établi par la CDI ne devrait s’appliquer qu’aux conflits armés internationaux. L’inclusion des conflits armés non internationaux dans les dispositions serait contraire à l’objectif de la stabilité et de la sécurité des relations internationales, car il serait difficile à un État tiers partie à un traité de déterminer si un tel conflit existe dans le territoire d’un autre État. Le projet d’article 4 soulève plusieurs questions. En effet, il prévoit que l’intention des parties soit définie par le texte du traité et ne dit rien sur les conséquences juridiques de la suspension ou de la fin d’un traité. Ce projet d’article doit donc être davantage élaboré.
En ce qui concerne la protection diplomatique, la délégation autrichienne estime que la notion des « mains propres » ne devrait pas être incluse dans le projet d’articles. Cette notion n’est pas suffisamment inscrite dans le droit international général pour être établie comme une norme coutumière. Même si le droit international fait de cette notion une règle générale, la question se pose de savoir si elle pourrait tomber sous le coup de la protection diplomatique. En outre, la notion des « mains propres » peut être considérée comme un obstacle à la recevabilité d’une requête. L’Autriche apprécie les travaux du Groupe d’étude sur la question de la fragmentation du droit international. Les discussions ont révélé certains problèmes s’agissant des normes conflictuelles de l’ordre juridique international. S’agissant de l’interprétation des traités, les normes internationales applicables ont un aspect limité. Comme leur but est d’interpréter les dispositions d’un traité, elles ne peuvent ni diminuer la portée de ces dispositions, ni en changer la substance juridique. Ainsi, l’objectif « d’intégration systémique » semble un compromis viable afin de surmonter les problèmes en la matière.
M. KIM SUN-PYO (République de Corée) a estimé que la CDI devrait adopter une approche progressive dans l’étude du nouveau sujet des effets des conflits armés sur les traités, en se concentrant pour l’instant sur les accords entre les États. Inclure les organisations internationales compliquerait trop la question, a-t-il précisé. Ensuite, le représentant a estimé que la définition du concept des conflits armés met en jeu deux branches du droit, le droit des traités et le droit international humanitaire. La CDI s’est basée sur le principe de droit international selon lequel il existe une continuité des traités, mais la délégation coréenne a demandé des clarifications pour vérifier ce principe et se prononcer sur la question. Passant au texte des projets d’articles, le représentant a émis des doutes sur l’opportunité d’utiliser l’expression « conflit armé » dans les premiers articles, considérant que d’autres formes d’hostilités peuvent affecter les traités. Il a cité en exemple le cas de guerre déclarée comme celui de la lutte contre la domination coloniale. Il a donc proposé d’utiliser plutôt le terme « hostilités » déjà utilisé par l’article 73 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. En ce qui concerne le projet d’article 4, qui traite des indices de prédisposition des traités à l’extinction ou la suspension de leur application en cas de conflit armé, le représentant a estimé que l’intention des parties est un critère ambigu et subjectif qui peut ne pas suffire pour déterminer la suspension des traités.
À propos du thème de la protection diplomatique, M. Kim Sun-Pyo a expliqué que la doctrine des « mains propres » signifie, pour sa délégation qu’un État ne peut pas exercer son droit à la protection diplomatique au nom d’un citoyen si celui-ci a commis un fait illicite. Cette théorie repose sur l’hypothèse qu’un dommage causé à un national est un dommage causé à l’État lui-même. Ainsi, a considéré le représentant, l’exercice du droit de protection diplomatique est tiré des droits inhérents de l’État et non des droits du national. À son avis, cette théorie dépasse donc le principe général de bonne foi dans les relations internationales entre États. Il en résulte que priver un État de la faculté d’exercer son droit de protection diplomatique à cause de la faute de son national n’est pas compatible avec le droit international moderne, a-t-il conclu. Il a donc partagé l’avis du Rapporteur spécial de ne pas tenir compte de cette doctrine dans le contexte de la protection diplomatique.
Mme BRECHJE SCHWACHÖFER (Pays-Bas) a abordé le thème des effets des conflits armés sur les traités, se prononçant en faveur de la continuité des obligations en vertu des traités lorsqu’il n’est pas nécessaire de les suspendre ou de les éteindre. Elle a souhaité que le champ des projets d’article s’étende aux traités qui s’appliquent de manière provisoire. Sur la portée des projets d’articles, elle a considéré que les traités qui entrent en vigueur pendant le conflit armé doivent être inclus. Notant que les États sont parfois réticents à admettre qu’ils se trouvent en état de conflit armé, la représentante a jugé qu’il serait utile d’inclure une définition du conflit armé. La définition, selon elle, devrait aussi inclure les conflits non armés. Il faut savoir que les conflits armés internationaux et nationaux sont traités de façon différente en droit, car des normes parfois différentes s’appliquent, a-t-elle aussi noté. Pour Mme Schwachöfer, l’occupation militaire devrait aussi être incluse dans le champ de l’étude, car cette situation peut empêcher un État de s’acquitter de ses obligations. Pour ce qui est du projet d’article 3, qui pose un principe fondamental, elle a appuyé l’idée que la position des États tiers devraient être précisée dans le texte.
En ce qui concerne le thème de la protection diplomatique, la représentante a appuyé les projets d’articles élaborés par la CDI. Elle a souhaité que le texte exclut expressément l’assistance consulaire de son champ d’application. Le terme « ses nationaux » est trop restrictif à son avis, car le projet a pour objectif de s’appliquer de manière plus extensive, afin de couvrir également les cas d’apatrides et de réfugiés. Le projet d’articles devrait, s’agissant de la protection diplomatique des entreprises, tenir compte du droit des sociétés. Elle a cependant fait observer que le projet d’articles exclut la possibilité pour les entreprises d’avoir la double nationalité, alors que beaucoup d’entreprises aux Pays-Bas ont une double nationalité. De l’avis de sa délégation, il n’est pas nécessaire de procéder à la codification en matière de protection diplomatique, dans la mesure où très peu de cas se présentent dans la pratique.
M. LUIS SERRADAS TAVARES (Portugal) a fait observer, en ce qui concerne le chapitre des effets des conflits armés sur les traités, que le projet d’article 2 faisait coexister les termes de « traités » et de « conflit armé ». En outre, le Rapporteur spécial limite le terme de « traité » à un accord entre États, alors qu’une approche plus pragmatique poserait la question de savoir si une définition est réellement nécessaire, a-t-il poursuivi. De même, le représentant a exprimé ses doutes quant à la définition proposée de « conflit armé », qui est, selon lui, trop restrictive. Le Portugal estime en effet que c’est à l’État qui mettra en œuvre les dispositions du futur texte que devrait revenir le soin de déterminer au cas par cas le type d’hostilités susceptibles d’avoir un effet quelconque sur un traité particulier, comme par exemple une guerre entre États, une guerre civile, une opération de maintien de la paix des Nations Unies, le terrorisme international systématique. Le représentant s’est en outre demandé si la question des effets des conflits armés sur les traités devait entrer dans le cadre général du droit des traités ou plutôt dans celui du droit sur l'usage de la force. Il a également exprimé sa préoccupation devant le projet d’article 3 relatif à l’annulation ou la suspension ipso facto, qui s’appuie sur l’idée qu’un conflit armé n’annule pas ou ne suspend pas automatiquement les traités en vigueur entre les parties au conflit. Le Portugal estime au contraire que l’effet traditionnel continue de prévaloir, comme le montre l’exemple de la Seconde guerre mondiale, pendant laquelle la plupart des traités ont été annulés ou suspendus.
M. Tavares s’est ensuite félicité de l’approbation l’an dernier en première lecture des 19 projets d’articles portant sur la protection diplomatique, se déclarant en accord avec l’approche adoptée par le Rapporteur spécial sur la théorie des « mains propres ». Il a enfin salué la décision de la Commission du droit international de présenter l’an prochain une étude consolidée, des directives et des principes pour la fragmentation du droit international.
M. GANESH SINGH (Inde) a abordé la question de la responsabilité des organisations internationales, appréciant les progrès accomplis sur le sujet lors de la dernière session de la CDI. Selon le projet d’articles, un acte ou une omission peuvent entraîner la responsabilité des organisations internationales, a-t-il constaté avec satisfaction. Les règles de nature purement administratives ne devraient pas être concernées par le projet d’article 8 (existence de la violation d’une obligation internationale). Au sujet du projet d’article 15, portant sur l’attribution de la responsabilité d’une organisation internationale pour le comportement d’un État qui se conforme à une décision ou à une recommandation de l’organisation internationale, M. Singh a noté la complexité de cette situation et demandé une étude plus poussée de la question.
S’agissant du chapitre sur les ressources naturelles partagées, M. Singh a jugé inadéquate l’application du principe de l’utilisation équitable établi par la Convention de 1997 sur l’utilisation des cours d’eaux à des fins autres que la navigation, dans le régime sur les eaux souterraines. Il a mis en garde contre la transposition des principes de cette Convention aux eaux souterraines transfrontières. L’Inde a toujours affirmé que la conclusion d’accords spécifiques était la meilleure manière de traiter de cette question. Cela permet aussi aux États intéressés de tenir compte des éléments spécifiques de ces accords dans les négociations pertinentes. Sa délégation suggère que la CDI adopte un ensemble de directives pour la forme finale du projet d’articles. Concernant le thème des effets des conflits armés sur les traités, M. Singh a souhaité que la CDI examine de manière approfondie cette question. Le représentant a indiqué que sa délégation présentera, à la demande du Secrétariat, des observations sur tout le projet d’articles.
Mme LYUDMILA KAMENKOVA (Bélarus) a appuyé l’approche conceptuelle selon laquelle le déclenchement du conflit n’entraîne pas forcément la suspension ou l’extinction du traité. Néanmoins, la représentante a précisé que d’un point de vue pratique, il est parfois impossible de mettre en œuvre le traité. La délégation du Bélarus considère qu’il est judicieux d’utiliser le critère de l’intention des parties pendant la conclusion du traité. Mais ce critère devrait faire l’objet d’un examen plus poussé afin d’être moins subjectif. La CDI devrait tenir compte du principe « pacta sunt servanda ». Les effets des conflits armés sur les traités devraient être les plus faibles possibles, a déclaré la représentante. Il faudrait examiner la possibilité d’inclure, dans la liste des accords internationaux en vigueur en cas de conflits armés, les dispositions pertinentes de la Charte des Nations Unies. Cela en soulignerait l’importance. La pratique et l’opinion des États sont très utiles aux travaux de la Commission. La délégation du Bélarus s’est félicitée des travaux de la Commission sur le thème de la protection diplomatique. Mais la Commission ne devrait pas se centrer sur le seul examen de la circonstance de l’application de la protection diplomatique. Elle devrait également étudier les questions de la répartition de l’indemnisation entre les parties lésées ainsi que les conditions de la mise en œuvre de la protection diplomatique. Il faudrait compléter les normes applicables sur la responsabilité des États en cas d’actes internationalement illicites.
La proposition du Rapporteur spécial est très justifiée car elle vise à exclure du sujet la doctrine des mains propres. Ce projet d’articles n’a en effet rien à voir avec la protection diplomatique. Les États devraient avoir une liberté illimitée pour appliquer un droit discrétionnaire à la protection diplomatique. La question des mains propres ne devrait pas être une condition à l’application de la protection diplomatique. Cette doctrine ne peut en effet être déterminée prima facie. Ensuite, le critère des mains propres est rarement appliqué de façon objective dans les relations entre les États. La protection diplomatique pourrait devenir impossible. La délégation du Bélarus soutient les efforts de la CDI en matière de codification et de développement des normes juridiques sur les actes unilatéraux. Mais les déclarations politiques ne devraient pas être prises en compte. La CDI devrait concentrer ses travaux sur les actes unilatéraux au sens strict.
M. GIUSEPPE NESI (Italie) a noté que la Commission du droit international a adopté dans le projet d’articles sur les effets des conflits armés sur les traités le principe selon lequel un conflit armé n’a pas pour conséquence l’extinction ou la suspension des effets des traités. Il a estimé qu’il faudrait peut-être adopter une attitude plus nuancée à propos de la suspension des effets, puisque l’application de certains traités est souvent difficile en présence d’un conflit armé entre les parties à ces instruments juridiques. Il a aussi proposé de faire une distinction claire entre la question des effets des conflits armés dans les relations entre États qui sont parties au conflit, d’une part, et la question des effets qu’un conflit armé peut avoir à l’égard d’un État tiers, d’autre part. Enfin, M. Nesi a souhaité que la Commission examine de manière approfondie la pratique des États sur les effets entre États qui sont parties à un conflit
M. LUIS SERRADAS TAVARES (Portugal) a fait observer, en ce qui concerne le chapitre des effets des conflits armés sur les traités, que le projet d’article 2 faisait coexister les termes de « traités » et de « conflit armé ». En outre, le Rapporteur spécial limite le terme de « traité » à un accord entre États, alors qu’une approche plus pragmatique poserait la question de savoir si une définition est réellement nécessaire, a-t-il poursuivi. De même, le représentant a exprimé ses doutes quant à la définition proposée de « conflit armé », qui est, selon lui, trop restrictive. Le Portugal estime en effet que c’est à l’État qui mettra en œuvre les dispositions du futur texte que devrait revenir le soin de déterminer au cas par cas le type d’hostilités susceptibles d’avoir un effet quelconque sur un traité particulier, comme par exemple une guerre entre États, une guerre civile, une opération de maintien de la paix des Nations Unies, le terrorisme international systématique. Le représentant s’est en outre demandé si la question des effets des conflits armés sur les traités devait entrer dans le cadre général du droit des traités ou plutôt dans celui du droit sur l'usage de la force. Elle a également exprimé sa préoccupation devant le projet d’article 3 relatif à l’annulation ou la suspension ipso facto, qui s’appuie sur l’idée qu’un conflit armé n’annule pas ou ne suspend pas automatiquement les traités en vigueur entre les parties au conflit. Le Portugal estime au contraire que l’effet traditionnel continue de prévaloir, comme le montre l’exemple de la Seconde guerre mondiale, pendant laquelle la plupart des traités ont été annulés ou suspendus.
M. Tavares s’est ensuite félicité de l’approbation l’an dernier en première lecture des 19 projets d’articles portant sur la protection diplomatique, se déclarant en accord avec l’approche adoptée par le Rapporteur spécial sur la théorie des « mains propres ». Il a enfin salué la décision de la Commission du droit international de présenter l’an prochain une étude consolidée, des directives et des principes pour la fragmentation du droit international.
M. THOMAS FITSCHEN (Allemagne), s’exprimant sur le sujet de la fragmentation du droit international, a déclaré que sa délégation attendait avec impatience les directives pratiques qu’établirait la CDI pour aider les États à régler les questions sur ce sujet. La délégation allemande ne partage pas le point de vue consistant à considérer les effets de la participation de la Communauté européenne à des traités internationaux comme un phénomène « négatif » menant à la fragmentation du droit international. La clause de déconnection ne s’applique que dans les cas où la portée de l’application des dispositions d’un traité coïncide avec celle de la norme communautaire pertinente. Du point de vue d’un État tiers, il est parfois difficile de voir la différence entre un traité appliqué par la Communauté européenne et un traité communautaire. Mais il n’y a aucune raison pour que la Communauté européenne ne puisse pas proposer une telle clause et pour que des États parties s’y opposent.
M. PEH SUAN YONG (Malaisie) a apprécié l’excellent travail de la CDI sur le chapitre relatif aux réserves aux traités. La Malaisie est favorable à la pratique des États qui objectent à une réserve qu’ils considèrent incompatible à l’objet et au but du traité, sans s’opposer à l’entrée en vigueur du traité entre ces États et l’auteur de la réserve. En ce qui concerne l’efficacité des réserves, le représentant est d’avis que si une réserve est incompatible à l’objet et au but du traité, elle doit être considérée comme inefficace, qu’un État y objecte ou non. Commentant ensuite certains projets de directives, il a notamment demandé à la CDI de préciser la distinction entre « réserves spécifiques » et « réserves non spécifiques autorisées par un traité », prévue dans le projet de directive 3.1.4. La Malaisie considère que les projets de directives constituent une étape dans la clarification de la notion de réserve aux traités, mais des discussions plus approfondies sont nécessaire.
Concernant les actes unilatéraux des États, le représentant a noté les divergences d’opinions sur la possibilité d’établir un régime sur ces actes. La Malaisie souhaite que la pratique des États soit examinée avec soin avant de s’engager dans la voie ambitieuse de la codification. Les objectifs d’un acte unilatéral particulier, les circonstances dans lesquelles un tel acte est pris et sa forme doivent être examinés de manière plus approfondie, a estimé M. Yong. Conscient de la difficulté de la tâche qui incombe à la CDI, le représentant a apprécié les efforts qu’elle accomplit pour analyser la pratique des États en la matière. La CDI devrait envisager d’établir en premier lieu un régime pour les actes qui créent des obligations, a-t-il suggéré.
M. JOHN CURRIE (Canada) a déclaré que la notion des « mains propres » ne devrait pas être incluse dans le projet de texte sur la protection diplomatique. Son application en rapport avec l’admissibilité de la protection diplomatique affaiblirait l’application universelle de la protection des droits de la personne. La protection diplomatique est un instrument important dans la protection des droits de la personne et il serait nuisible de la rendre dépendante de la conduite d’un État particulier ou d’un individu. S’agissant de la protection diplomatique en général, le Canada fournit une protection diplomatique à ses citoyens sans égard aux autres nationalités que ces personnes peuvent avoir. Le Canada rejette la notion selon laquelle un État de nationalité ne pourrait pas exercer de protection diplomatique en faveur d’une personne à l’endroit d’un État dont la personne est également un ressortissant. Ainsi, la Canada accueille favorablement le projet d’article 7 sur cette question qui favorise l’exercice de la protection diplomatique lorsque la nationalité d’une personne est prédominante vis-à-vis de l’État qui invoque la protection diplomatique.
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