DEUXIÈME COMMISSION: LES COMMISSIONS RÉGIONALES METTENT EN LUMIÈRE LE RÔLE CHARNIÈRE QU’ELLES JOUENT ENTRE PRIORITÉS NATIONALES ET DÉFIS DE LA MONDIALISATION
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Deuxième Commission
Dialogue interactif - matin
DEUXIÈME COMMISSION: LES COMMISSIONS RÉGIONALES METTENT EN LUMIÈRE LE RÔLE CHARNIÈRE QU’ELLES JOUENT ENTRE PRIORITÉS NATIONALES ET DÉFIS DE LA MONDIALISATION
Inquiétudes quant à la conclusion des négociations commerciales du Cycle de Doha, dont dépendra l’intégration de nombreux pays à la mondialisation
La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a tenu ce matin un dialogue interactif avec les Secrétaires exécutifs des commissions régionales des Nations Unies sur le thème « Mondialisation et interdépendance ». Au cours de ce dialogue, les réformes et les actions menées par les cinq commissions régionales afin d’adapter les systèmes économiques nationaux et régionaux à la mondialisation ont été évoquées et débattues. L’intégration de nombreux pays en développement aux échanges de la mondialisation et leur capacité à en tirer des bénéfices sont suspendues à une bonne conclusion des négociations du Cycle de Doha, ont relevé des délégations et des officiels des commissions régionales des Nations Unies en évoquant notamment la question des subventions agricoles.
Introduisant la discussion de ce matin, Kim Kak-Su, Secrétaire exécutif de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a déploré que les bénéfices de la mondialisation aient été inéquitables selon les régions et les pays, et a ajouté que pour remédier à ces inégalités, il avait fallu adopter des politiques cohérentes et durables intégrant à la fois les grandes orientations prises au niveau mondial et les spécificités régionales. Au cours du dialogue interactif, plusieurs aspects des défis posés par la mondialisation ont été abordés, notamment en ce qui concerne les cadres réglementaires et institutionnels adoptés pour faire face aux différentes questions à résoudre. Parmi elles, les intervenants ont cité les migrations internationales dans un monde globalisé; les risques et les défis posés dans le cadre de la conclusion du Cycle de Doha; l’impact de l’instabilité sur le relèvement des défis de la mondialisation; et enfin, les aspects sociaux et les coûts de la mondialisation.
Le phénomène de la mondialisation a créé des besoins de réglementation dans plusieurs domaines, notamment ceux ayant trait aux secteurs financier, légal et commercial, a indiqué Paolo Garonna, Administrateur chargé de la Commission économique pour l’Europe (CEE), qui parlait du le rôle des cadres réglementaires et institutionnels dans la recherche de solutions aux défis de la mondialisation. Au niveau européen, il a fallu adapter les institutions et procéder à des réformes pour répondre à ces défis, a-t-il indiqué. Il a pris à cet égard l’exemple de la transition opérée et réussie, pour passer, en Europe orientale, de systèmes de production et de distribution planifiés, à des économies de marché, au cours de la décennie écoulée. « La réforme des cadres réglementaires doit être au cœur de la mondialisation afin de réduire les risques, d’améliorer la gouvernance et d’assurer une meilleure répartition des bénéfices de ce phénomène », a indiqué M. Garonna. « Le premier niveau de réformes est le niveau mondial, qui se distingue par l’adoption de cadres normatifs mondiaux comme celui de l’Agenda 21, tandis que le second est le niveau régional, où des normes sont établies sous forme de directives qui doivent ensuite être appliquées au niveau national », a souligné le représentant de la CEE. Le fait d’avoir un cadre réglementaire souple est un avantage dans la gestion de la mondialisation, a-t-il ensuite expliqué, en ajoutant qu’il revenait aux gouvernements de garantir l’existence d’un environnement prospère et propice pouvant faciliter le développement démocratique et économique.
Sur un autre aspect clef de la mondialisation, celui des migrations, le Secrétaire exécutif de la CESAP, Kim Hak-Su, a observé que ce phénomène était lié à l’augmentation des disparités dans les revenus et dans les chances offertes aux individus et aux populations. Il a rappelé qu’au cours des trois dernières décennies, le nombre de migrants avait plus que doublé, atteignant aujourd’hui près de 190 millions par an. Ces mouvements de main-d’œuvre peuvent prendre plusieurs formes, a-t-il déclaré, en notant que les migrations pouvaient être temporaires, permanentes, forcées ou illégales. Certaines formes sont plus visibles dans certaines régions, comme les migrations forcées qu’on observe en Afrique, ou celles à très court terme en Asie, a-t-il précisé, avant de souligner que les migrations avaient des effets positifs et négatifs pour tous les pays. Pour les pays d’origine, les conséquences économiques sont de prime abord positives, notamment grâce aux envois de fonds, qui ont atteint 126 milliards de dollars l’année dernière. Pour les pays de destination, les migrants sont une source de main-d’œuvre extrêmement souple, bien que l’on s’inquiète de leur impact sur le marché national de l’emploi, notamment en ce qui concerne le niveau des salaires et les évolutions du chômage, a-t-il constaté. Outre ces questions économiques, le Secrétaire exécutif de la CESAP a indiqué qu’il fallait aussi prendre en compte les aspects sociaux et juridiques des migrations, dont les problèmes d’intégration ou de traite des êtres humains, auxquels il faut urgemment trouver des réponses collectives.
Abordant la question des risques et défis posés par la conclusion du Cycle de Doha, Luis Machinea, Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a estimé que les principaux donateurs ne s’étaient pas montrés à la hauteur, et ne semblaient même pas être conscients de l’urgence qu’il y a à conclure le Cycle de négociations commerciales de Doha. Le système multilatéral est le meilleur cadre de négociation pour les pays en développement, a-t-il ensuite dit, soulignant que ces pays avaient fait beaucoup de concessions, ce qui devrait encourager les pays développés à se montrer plus généreux et à être plus à l’écoute des pays en développement lors de la phase ministérielle des négociations qui doit avoir lieu à Hong Kong, au mois de décembre prochain, notamment sur les questions concernant l’agriculture et la pêche. S’agissant de l’agriculture, M. Machinea a estimé que la Réunion ministérielle de Hong Kong devait parvenir à un consensus sur la réduction des subventions à la production et à l’exportation, et à la suppression des quotas d’exportation des pays du Sud sur les marchés des pays industrialisés. 70% à 80% des questions encore débattues doivent être résolues de manière à supprimer les distorsions commerciales préjudiciables aux économies en développement, a-t-il ensuite estimé, avant d’observer que les pays en développement étaient cette fois mieux organisés et mieux préparés que lors des précédents cycles de négociations commerciales.
« D’autres facteurs extérieurs ont eu un impact sur les retards d’adaptation à la mondialisation », a estimé pour sa part Mervat Tallawy, Secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), en prenant l’exemple de certains pays comme l’Iraq et la Palestine où l’insécurité et l’instabilité ont provoqué une chute du PIB et une diminution sensible des investissements. « Entre 1990 et 2002, l’instabilité de la région de la CESAO et des pays arabes a entraîné des pertes de l’ordre de 600 milliards de dollars, ces pertes ayant un impact direct sur la baisse des investissements et sur l’augmentation de la vulnérabilité sociale, en particulier dans les cas de la Palestine et de l’Iraq », a indiqué Mme Tallawy, qui a déploré à cet égard que les seuls efforts consentis par la communauté internationale se soient uniquement concentrés sur l’action humanitaire. La CESAO représente 1,6% du PIB mondial, avec ses 648,8 milliards de dollars de revenus, tandis que les économies des pays arabes, représentant 2,1% du PIB mondial, génèrent 864,5 milliards de dollars par an, a souligné Mme Tallawy. Elle a ajouté que la CESAO représentait 2,6% des échanges mondiaux et attirait annuellement 2% des investissements étrangers directs, soit 7,9 milliards de dollars. En dépit de ressources naturelles importantes, a-t-elle poursuivi, ces données nous permettent de constater que sans davantage d’institutionnalisation, il sera difficile d’attirer les investissements qui sont indispensables au développement d’infrastructures dans les domaines des routes, de l’eau, et de l’électricité.
La Secrétaire exécutive adjointe de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), Joséphine Ouedraogo, a quant à elle dressé un constat similaire s’agissant du continent africain, où la mondialisation a engendré des effets pervers au niveau social. Ces effets ont été pris en compte dans la définition des Objectifs du Millénaire pour le développement, a-t-elle indiqué. L’Afrique participe pour moins de 3% au commerce mondial, a-t-elle dit. 68% de ses exportations concernent les matières premières et les trois quarts des investissements étrangers directs en direction de l’Afrique sont concentrés sur les ressources énergétiques. L’Afrique n’a pas su tirer parti des effets positifs de la mondialisation, en particulier en ce qui concerne les transferts de technologie et de savoir-faire, a constaté Mme Ouedraogo en jugeant que l’Afrique n’était pas prête pour entrer dans la mondialisation en raison de la faiblesse de son cadre institutionnel, de son capital humain, et de l’insuffisance de ses infrastructures. Des efforts doivent être déployés sur le continent dans les domaines à forte compétitivité où l’Afrique jouit d’avantages comparatifs, et qui sont les seuls à même de créer des emplois, a-t-elle dit. Elle a recommandé que des investissements clefs soient orientés vers des secteurs qui génèrent le plus possible d’emplois, et notamment vers les secteurs où les femmes ont un fort impact quantifiable, comme celui de l’agriculture.
Au cours de l’échange de vues avec les délégations, le rôle des commissions régionales des Nations Unies dans la définition d’une approche de gouvernance globale orientée vers la prise en compte des défis posés par la mondialisation a été soulevé. Répondant sur ce point aux représentants de la Jamaïque et de la Fédération de Russie, M. Garonna a mis en exergue le double rôle des commissions régionales qui sont d’une part, le phare des Nations Unies dans chaque région et, d’autre part, de véritables acteurs sur la scène régionale. Le représentant du Burkina Faso s’est interrogé sur le potentiel des réformes des réglementations au niveau national à contribuer au relèvement des défis de la mondialisation, alors même que les réformes déjà mises en place par les pays en développement pour attirer les investissements étrangers avaient donné peu de résultats. M. Garonna a indiqué dans sa réponse que les pays devaient prendre des initiatives et mettre de l’ordre chez eux, mais que pour y parvenir ils avaient besoin d’une aide de la région et des institutions internationales.
Revenant sur la question du Cycle de Doha, M. Machinea a répondu au représentant de la Jamaïque que ce que l’on espérait pouvoir y réaliser il y a un an semblait aujourd’hui impossible. Il a affirmé que la dernière proposition des États-Unis de réduire les droits pour les produits agricoles de 75% permettrait peut-être de poursuivre les négociations en 2006. Il en va de la crédibilité de l’OMC, a-t-il déclaré en réponse à une question du représentant du Burkina Faso sur l’impact d’un éventuel échec des négociations du Cycle de Doha, ajoutant qu’en cas de non-accord au niveau multilatéral, les pays poursuivraient probablement la négociation d’accords bilatéraux qui s’avèrent généralement plus coûteux pour tous. Pour faire valoir les intérêts des pays en développement, il faut mieux s’organiser pour faire fléchir les négociations en faveur des pays du Sud, a suggéré Mme Ouedraogo. Elle a indiqué que la CEA aidait notamment les pays pour qu’ils se préparent à ces négociations multilatérales.
La Deuxième Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 27 octobre, à 10 heures.
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