LA SIXIÈME COMMISSION DÉCIDE DE CONSTITUER UN GROUPE DE TRAVAIL EN VUE DE PRÉPARER UNE DÉCLARATION DES NATIONS UNIES SUR LE CLONAGE HUMAIN
Communiqué de presse AG/J/3270 |
Sixième Commission
27e séance – après-midi
LA SIXIÈME COMMISSION DÉCIDE DE CONSTITUER UN GROUPE DE TRAVAIL EN VUE DE PRÉPARER UNE DÉCLARATION DES NATIONS UNIES SUR LE CLONAGE HUMAIN
Elle reprendra ses travaux le 18 février 2005
pour prendre note des conclusions de ce Groupe de travail
Face aux risques de division de la communauté internationale sur la question du clonage humain, la Sixième Commission a décidé cet après-midi, sans vote et sur proposition de son Président, M. Mohamed Bennouna (Maroc), de constituer un groupe de travail chargé de mettre au point le texte d’une déclaration des Nations Unies sur le clonage. Le Groupe de travail se réunira les 14 et 15 février 2005, ainsi que le 18 février au matin, et rendra compte de ses travaux le 18 février après-midi à la Sixième Commission réunie en séance plénière. Le Groupe de travail sera ouvert à tous les États Membres des Nations Unies et aux membres des institutions spécialisées et de l’AIEA, et sera présidé par le Président de la Sixième Commission, les autres membres du Bureau jouant le rôle de facilitateurs.
Pour mettre au point son projet de déclaration, le Groupe de travail s’appuiera sur un texte qui a été présenté par l’Italie sous la forme d’un projet de résolution*. Le texte de l’Italie comprend une « Déclaration des Nations Unies sur le clonage des êtres humains » par laquelle l’Assemblée générale inviterait solennellement les États Membres à interdire toute tentative de créer la vie humaine par le clonage, et toute recherche visant à y parvenir; à veiller à ce que dans les applications des sciences de la vie, la dignité humaine soit respectée en toute circonstance, et en particulier à ce que les femmes ne soient pas exploitées. Il les inviterait également à adopter et à appliquer une législation nationale donnant effet à ces mesures, et à adopter les mesures voulues pour interdire les applications des techniques de génie génétique qui pourraient aller contre la dignité humaine.
Le Directeur de la Division de la codification, M. Vaclav Mikulka, a indiqué que les cinq réunions du Groupe de travail remplaceront celles initialement prévues du Comité spécial chargé d’élaborer une convention et n’auront donc pas d’incidence budgétaire. En revanche, l’incidence budgétaire de la séance officielle de la Sixième Commission qui suivra est estimée à 37 500 dollars.
La Commission a par ailleurs recommandé à l’Assemblée générale, aux termes d’un projet de résolution** adopté sans vote, de demander à tous les États qui ne sont pas encore parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale d’envisager de le ratifier ou d’y adhérer sans retard, ainsi que de devenir parties sans retard à l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale. Le représentant des États-Unis a réaffirmé l’opposition de son pays à la Cour.
Enfin, le représentant de la Fédération de Russie a indiqué que les discussions sur le projet de convention pour la répression des actes de terrorisme nucléaire permettent d’envisager l’adoption du texte de la convention dans les jours qui viennent. Cependant, a-t-il expliqué, s’il existe un consensus sur le texte, il reste aussi différentes possibilités pour la forme de son adoption. La délégation russe a donc l’intention de mener des consultations sur cette question et de présenter un projet de résolution directement à l’Assemblée générale.
Lors de sa réunion du 18 février, la Sixième Commission devrait également prendre note de son programme de travail provisoire pour la 60ème session de l’Assemblée générale, tel que mis au point par le Bureau, et conclure ses travaux.
* (A/C.6/59/L.26)
** (A/C.6/59/L.25 et cor.1)
COUR PÉNALE INTERNATIONALE
Adoption d’un projet de résolution
Aux termes d’un projet de résolution sur la question (A/C.6/59/L.25), adopté sans vote tel qu’amendé oralement, l’Assemblée générale demanderait à tous les États qui ne sont pas encore parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale d’envisager de le ratifier ou d’y adhérer sans retard, et demanderait à tous les États d’envisager de devenir parties sans retard à l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale internationale. Elle approuverait les décisions prises telle que celle de clore les divers fonds d’affectation spéciale qu’administrait le Secrétaire général aux fins de la création de la Cour pénale internationale et des activités subséquentes. Aux termes du paragraphe 2 de l’article 4 de l’Accord, elle rappellerait que la Cour peut assister et participer aux travaux de l’Assemblée générale des Nations Unies en qualité d’observateur, et déciderait d’inscrire à l’ordre du jour provisoire de sa prochaine session le point intitulé « Rapport de la Cour pénale internationale ».
Explications de position
Le représentant des États-Unis a rappelé que pour des raisons bien connues de tous, son pays ne pouvait se joindre au consensus concernant la résolution. L’opposition des États-Unis au Statut de Rome reste claire et inchangée, a-t-il déclaré. Les États-Unis continuent d’être préoccupés par le risque de poursuites motivées par ces considérations politiques. Ils estiment que rien ne permet de contrebalancer les pouvoirs de la Cour, dont les jugements définitifs ne peuvent être réexaminés par une autorité politique dans le sens de la clémence. En outre, a estimé le représentant des États-Unis, le Statut de Rome n’offre pas assez de marge de contrôle au Conseil de sécurité. Il a notamment mentionné le fait que l’Assemblée des États parties à la Cour est compétente pour définir le crime d’agression alors que la Charte des Nations Unies donne mandat au Conseil sur cette question.
La Cour est un organe indépendant qui ne fait pas patrie du système des Nations Unies, a réaffirmé le représentant, précisant que les États parties au Statut de la Cour ne doivent pas être confondus avec les États Membres de l’Organisation. Il a donc estimé que l’Accord sur les relations entre l’Organisation et la Cour, approuvé par l’Assemblée générale, n’engage pas les États qui ne sont pas parties au Statut de Rome à l’égard des implications financières des activités de la Cour et a réclamé le remboursement complet de toutes les dépenses engagées par les Nations Unies. Il a réaffirmé que le refus des États-Unis d’adhérer à la Cour a pour fondement le respect par son pays de l’état de droit, et non de son opposition à la Cour. Les États-Unis, a-t-il rappelé, restent engagés en faveur d’une responsabilité internationale pour les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l’humanité. Le représentant s’est enfin dit déçu par l’échec du Conseil de sécurité à reconduire les résolutions 1422 et 1487 demandant à la Cour de renoncer à poursuivre les membres du personnel d’États qui ne sont pas parties au Statut de Rome au titre d’agissements commis du fait de leur participation à des missions des Nations Unies. Les États-Unis continueront à respecter les droits des États à devenir parties au Statut de Rome, a-t-il assuré. Ils continueront également à demander que leur décision de ne pas y adhérer soit, elle aussi respectée, a conclu le représentant.
Le représentant du Canada a considéré que le projet de résolution sur la Cour pénale internationale rappelle que celle-ci a un rôle à jouer dans l’évolution du droit international, mais s’est dit troublé par ceux qui sapent la CPI. Le Canada respecte le droit des États à ne pas devenir partie au Statut de Rome, a-t-il expliqué, mais considère que les États non parties doivent pour leur part respecter ceux qui le sont et qui cherchent à s’assurer que la Cour est un instrument impartial et efficace. Nous sommes tous d’accord pour mettre fin à l’impunité, a-t-il souligné.
Informations de base sur le clonage
La question d’une « convention internationale contre le clonage des êtres humains à des fins de reproduction » a continué d’opposer des conceptions philosophiquement opposées reflétées par les deux projets de résolution concurrents présentés, l’un par le Costa Rica au nom d’une soixantaine d’États, l’autre par la Belgique au nom d’une vingtaine de pays.
Le projet présenté par le Costa Rica, soutenu notamment par les États-Unis préconise l’interdiction totale du clonage humain, et non pas seulement du clonage humain « à des fins de reproduction ». Il demande donc qu’un Comité spécial mette au point d’urgence un « projet de convention internationale contre le clonage humain » sans toutefois interdire les techniques de clonage destinées à produire des molécules d’ADN, des organes, des plantes, des tissus, des cellules autres que celles d’embryons humains ou des animaux autres que des êtres humains.
Lors des débats, ses partisans ont jugé inacceptable la création délibérée d’embryons humains destinés à être ensuite détruits aux fins de l’expérimentation scientifique, comme cela se fait dans le clonage thérapeutique. Pour eux, les embryons humains ne peuvent pas être traités comme des objets car il n’existe pas de différence substantielle entre l’embryon, le fœtus et l’être humain né, mais uniquement des différences de degrés de développement. Se défendant de s’opposer à la recherche scientifique, les tenants de cette position affirment que le clonage expérimental n’est pas non plus nécessaire car la recherche sur les cellules souches adultes qui, elle, ne pose aucun problème éthique, a déjà fait ses preuves. Ils ajoutent que ces manipulations constituent des affronts à la dignité humaine et à la dignité des femmes qui seront exploitées pour produire et fournir des ovocytes. Enfin, ils estiment que les techniques appliquées au clonage reproductif et au clonage thérapeutique sont essentiellement les mêmes et qu’en autorisant le second, on aggraverait les risques de déviance vers le clonage reproductif. Ils veulent enfin qu’une interdiction totale soit adoptée sans attendre au niveau mondial car la recherche progresse très rapidement.
Le projet défendu par la Belgique propose, quant à lui, que la future convention n’interdise que le clonage humain à des fins de reproduction, mais totalement et sans possibilité de réserve. Quant aux « autres formes de clonage d’êtres humains », le texte laisse aux États le choix entre l’interdiction totale, un moratoire ou une autorisation moyennant une réglementation stricte, destinée à éviter que les résultats obtenus en matière de clonage thérapeutique ne soient utilisées pour faire progresser le clonage reproductif.
Les tenants de cette option reprochent d’abord à leurs opposants de vouloir imposer au reste du monde un point de vue unique, alors qu’eux-mêmes offrent un choix qu’ils estiment plus adapté à la diversité des conceptions philosophiques et religieuses à travers le monde. Certains des pays qui soutiennent le projet, comme l’Allemagne, interdisent d’ailleurs eux-mêmes toute forme de clonage humain, y compris à des fins thérapeutiques. Ces États insistent sur les sérieux espoirs que les techniques de clonage thérapeutique font naître pour le traitement de nombreuses maladies actuellement incurables, en particulier des affections neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer. Ils font valoir qu’on ne peut à ce stade exclure l’utilisation de cellules souches d’origine embryonnaire au profit des cellules souches adultes ou ombilicales, sans s’être assurés qu’elles n’offrent pas de possibilités supplémentaires ou une efficacité plus grande. Préoccupés eux aussi des risques de déviance vers le clonage reproductif, ils estiment qu’il faut adopter au plus vite une convention internationale qui l’interdise totalement, et pensent qu’un texte limité à l’interdiction du clonage reproductif pourrait être très rapidement adopté, tant cette prohibition fait l’objet d’un consensus. En revanche, certains États, comme le Royaume-Uni, ont clairement fait savoir que si un Comité spécial devait se réunir afin d’élaborer une convention portant sur une interdiction stricte de toutes les formes de clonage humain, ils ne participeraient pas à ses travaux et n’adhéreraient pas au traité ainsi mis au point.
L’an dernier déjà, la Sixième Commission s’était retrouvée dans une impasse, confrontée à deux projets de résolution concurrents, similaires à ceux présentés en 2004 et d’ailleurs déjà présentés par la Belgique d’une part, et le Costa Rica de l’autre. Inscrite à l’ordre du jour de la Sixième Commission depuis 2001, la question d’une convention internationale contre le clonage d’êtres humains à des fins de reproduction n’aurait pas même dû être examinée au cours de la présente session. Sur proposition de la République islamique d’Iran, et par 80 voix pour, 79 voix contre et 15 abstentions, la Sixième Commission avait en effet décidé, le 6 décembre 2003, de reporter à 2005 l’examen des propositions pertinentes. Mais, le 9 décembre 2003, l’Assemblée générale a finalement décidé d’inscrire le point à l’ordre du jour de la Sixième Commission pendant la 59ème session, suite à un compromis de dernière minute entre la motion votée à la Sixième Commission et un projet de résolution présenté par le Costa Rica tendant à obtenir la réunion, en 2004, du Comité spécial sur la question du clonage, afin d’établir d’urgence le projet de texte d’une convention.
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