AG/J/3264

SIXIÈME COMMISSION: LA MONDIALISATION PÈSE SUR LES DÉBATS CONCERNANT LA PROTECTION DIPLOMATIQUE ET LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE

02/11/2004
Communiqué de presse
AG/J/3264


Sixième Commission

18e séance – matin


SIXIÈME COMMISSION: LA MONDIALISATION PÈSE SUR LES DÉBATS CONCERNANT LA PROTECTION DIPLOMATIQUE ET LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE


Si le caractère discrétionnaire de la protection diplomatique a été largement réaffirmé ce matin devant la Sixième Commission (Commission juridique), les délégations se sont toutefois interrogées sur le sens de la notion d’État de nationalité dans le contexte de la mondialisation.  Abondant dans le sens du Rapporteur Spécial de la Commission du droit international chargé de la question, le représentant de l’Allemagne a estimé que l’on ne pouvait exiger de l’État qui souhaite exercer sa protection diplomatique qu’il prouve l’existence d’un lien effectif entre lui et son ressortissant.  Les circonstances qui avaient amené la Cour internationale de Justice à exiger un lien effectif dans l’affaire Nottebohm étaient exceptionnelles et l’on ne saurait conférer à cette exigence un caractère général, au risque, dans le monde actuel, d’exclure de la protection diplomatique de leur État d’accueil des millions de personnes qui y résident habituellement sans en posséder la nationalité.  


La mondialisation crée d’autres problèmes au regard de la nationalité et donc de la protection diplomatique qui s’y rattache.  Si, comme l’a rappelé le représentant de la République islamique d’Iran, il appartient à chaque État de déterminer souverainement les conditions d’attribution de la nationalité, les États ne devraient pas adopter de lois qui augmentent les risques de nationalités multiples ou au contraire d’apatridie.  En matière de nationalités multiples, le problème est d’autant plus grave qu’il n’existe pas dans le droit international de critères permettant de définir objectivement la notion de nationalité prépondérante mentionnée dans le projet d’article 7.  À cet égard, on ne saurait retenir des critères tels que le pays dans lequel on a fait des études ou encore celui de la domiciliation des comptes bancaires, dans un monde où il est fréquent de naître dans un pays, d´étudier dans un autre et de travailler dans un troisième, a-t-il relevé.  Concernant les apatrides, ou encore les réfugiés, le représentant de l’Inde a estimé qu’il n’était pas souhaitable de leur offrir à ce stade la protection diplomatique, s’appuyant ainsi sur des conceptions opposées à celles développées lundi par le représentant de la Norvège, qui voyait dans le projet d’article 8 un moyen pour les États d’apporter une protection à des catégories de personnes particulièrement vulnérables.  Le représentant de la République de Corée a pour sa part souhaité que les projets relatifs à la protection diplomatique ne viennent pas perturber des mécanismes existants de règlement de différends pouvant être saisis soit par des États, soit par des entités non étatiques ou des individus, comme les organes établis par les instruments des droits de l’homme.  De tels mécanismes relèvent selon lui d’une lex specialis (loi spéciale) ayant priorité sur la protection diplomatique.


Cet argument du représentant de la République de Corée concernait aussi les conditions de l’exercice de la protection diplomatique en faveur des personnes morales.  Dans ce domaine, les représentants ont soutenu le principe selon lequel c’est l’État de nationalité de la société et non de la nationalité de ses actionnaires qui doit exercer la protection diplomatique au bénéfice de la société ayant subi des préjudices.  Ils n’ont toutefois pu éviter la question de la détermination de la nationalité de la société.  À cet égard, tout en jugeant  judicieuse la solution retenue qui cumule les critères du lieu de constitution et de lieu du siège social, le représentant de la France s’est demandé ce qu’il adviendrait si ces lieux étaient situés dans plusieurs pays.  Le représentant de l’Espagne a, quant à lui, fait observer que la notion de lieu de constitution prête à confusion dans plusieurs pays.  Pour sa part, le représentant de l’Iran a estimé que les dispositions du projet d’article 13 qui visent à étendre le régime juridique de protection diplomatique initialement prévu pour des sociétés à d’autres personnes morales va nettement au-delà de ce qui est admissible dans le cadre du développement progressif du droit international.


Quelques délégations se sont également exprimées sur la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, rappelant là aussi le poids de la mondialisation sur le droit international.  Le représentant de l’Allemagne a ainsi rappelé que la diffusion rapide de la technologie implique des risques nouveaux et notamment des dommages écologiques transfrontières importants, avant d’émettre des doutes sur la viabilité du système retenu par la CDI, qui tente de trouver une troisième voie entre la pure responsabilité des États et celles reposant surtout sur les parties privées.  Le représentant a considéré que les systèmes en vigueur qui autorisent des recours en responsabilité directe en matière civile, semblent plus conformes au principe « pollueur-payeur ».  Tout en se prononçant pour une responsabilité principale de l’exploitant, le représentant de l’Inde a demandé que les projets de principe de la CDI tiennent compte des instruments internationaux qui reconnaissent des besoins spécifiques aux pays en développement en matière de transferts de technologies, ainsi que leur droit d’appliquer des normes différentes de celles des pays développés, y compris en matière de protection de l’environnement.


Lors du débat, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Canada, Allemagne, Brésil, Inde, Japon, République islamique d’Iran, Royaume-Uni, Guatemala, France, Slovénie, Autriche, Espagne, Gabon, Mexique et République de Corée.


La Sixième Commission poursuivra demain, mercredi 2 novembre, à 9 h 30, l’examen des chapitres du rapport de la CDI relatifs à la protection diplomatique et à la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.



RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-SIXIÈME SESSION


Déclarations


Mme COLLEEN SWORDS (Canada), se référant au projet d’article 8 du texte sur la protection diplomatique, a déclaré que le développement progressif du droit international était nécessaire pour répondre aux questions d’apatridie et de nationalité.  Elle a considéré que le titre du projet de texte élaboré par la Commission du droit international, à savoir « protection diplomatique », doit être maintenu, faisant remarquer que c’est la formulation consacrée dans toutes les langues officielles des Nations Unies.  Dans les commentaires des projets d’articles, a-t-elle noté, il ressort que la portée des dispositions inclut les fonctions consulaires prévues par la Convention de Vienne sur les relations consulaires.  L’article 36 de ladite Convention en effet fait obligation aux États de notifier à un ressortissant son droit de consulter son consulat, a expliqué la représentante.  Le Canada attache une importance particulière à ces dispositions qui doivent être comprises de la même manière par tous les États.  Concernant le projet d’article 7 sur les multiples nationalités, qui prévoient la notion de « nationalité prédominante », elle a aussi examiné cette question au regard de la Convention de Vienne, indiquant que l’article 36 se fonde sur la notion de nationalité étrangère.  La Commission souhaite-t-elle que la notion de nationalité prédominante soit appliquée aux situations où une obligation prévue par un traité se fonde sur la notion de nationalité étrangère? s’est-t-elle interrogé.  Le Canada apporte une aide consulaire à tous les citoyens canadiens, quelles que soient leurs autres nationalités.  Mais, a relevé la représentante, d’autres États ne se sentent pas tenus de fournir à leurs ressortissants un accès consulaire, même si ces derniers sont titulaires d’une autre nationalité.  En concluant, Mme Swords a invité à plus de clarté quant à la détermination de la portée des projets d’articles.


M. THOMAS LAUFER (Allemagne) s’est félicité de l’adoption des projets d’articles sur la protection diplomatique, estimant qu’ils constituent un ensemble bien équilibré qui répond à la majorité des préoccupations exprimées par les États Membres au cours de ces dernières années.  Nous avons devant nous un texte qui peut d’ores et déjà être considéré comme une loi type, nonobstant la question encore non résolue d’une adoption ultérieure sous forme de convention, a-t-il ajouté.  Le représentant a rappelé qua la protection diplomatique est étroitement liée à la responsabilité des États dans la mesure où les deux concepts supposent un acte internationalement illicite de la part d’un État.  Il a soutenu la position exprimée dans le projet d’article 2 selon laquelle l’exercice de la protection diplomatique est un droit de l’État, mais non une obligation.  Même si au plan national, il peut exister une obligation constitutionnelle pour l’État d’exercer sa protection diplomatique, il reste une large marge de manœuvre à sa discrétion, a-t-il observé, rappelant que la Cour constitutionnelle allemande l’a récemment confirmé.  Au plan international, il faut faire la distinction entre la protection diplomatique et les autres concepts de droit international qui traitent de la protection des individus, et en particulier du régime des droits de l’homme, lequel impose des obligations claires aux États, a précisé M. Laufer.


Le représentant s’est également dit satisfait de la manière dont le projet d’article 4 définit l’État de nationalité au regard des personnes physiques et notamment du fait qu’elle n’a pas retenu la nécessité d’un « lien réel » comme l’avait fait la Cour internationale de Justice dans l’arrêt Nottebohm.  Dans le contexte actuel de la mondialisation, exiger un tel critère de manière général pourrait potentiellement exclure des millions de personnes qui ne possèdent pas la nationalité de leur État d’accueil de la protection diplomatique de ce dernier, a estimé M. Laufer.  L’Allemagne souscrit en outre aux règles adoptées par la CDI concernant la nationalité des personnes morales, notant que celles-ci accordent la priorité aux droits de l’État de nationalité de la société et non à celui des actionnaires, sauf exception.  Toutefois, le représentant a estimé que les exceptions mentionnées au projet d’article 11 restent trop rigides.  M. Laufer a également souhaité une approche plus souple en ce qui concerne l’exigence de nationalité continue.  Il a enfin estimé qu’en ce qui concerne les agents des organisations internationales, la protection fonctionnelle de l’organisation et la protection diplomatique de l’État de nationalité de l’agent devraient pouvoir s’exercer de manière parallèle, car elles dérivent de concepts séparés.  En cas de conflit, les revendications pourraient peut-être être évitées en appliquant le critère du préjudice le plus élevé, a-t-il suggéré.


Par ailleurs, le représentant s’est félicité de l’adoption par la CDI de huit projets de principes en matière de responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.  Il s’agit là d’un pas important en cette ère de mondialisation car la diffusion rapide de la technologie implique des risques nouveaux et notamment des dommages écologiques transfrontières importants comme on le constate de plus en plus, a-t-il noté.  La CDI a choisi une troisième voie entre la pure responsabilité des États et la responsabilité des parties privées, a-t-il constaté.  Il a toutefois émis des doutes sur la viabilité du compromis ainsi choisi, y voyant deux sérieux inconvénients.  Un tel système aboutirait à l’adoption de conventions qui, contrairement à celles qui existent actuellement, ne seraient pas exécutoires automatiquement, ce qui réduirait leur applicabilité immédiate.  En outre, davantage de souplesse implique moins de certitude juridique, ce qui risque d’aboutir à des coûts supérieurs, particulièrement dans les domaines économiques, a estimé le représentant.  Celui-ci a donc jugé préalable, malgré leurs difficultés propres, les systèmes actuels qui autorisent des recours en responsabilité directe en matière civile.  Une telle approche serait plus conforme au principe « pollueur-payeur », a estimé le représentant.


M. Laufer a estimé qu’il est prématuré à ce stade d’élaborer une convention générale sur la responsabilité, du fait de l’hétérogénéité des risques.  Il faudrait plutôt une convention-cadre qui pourrait servir de référence pour le développement du droit dans ce domaine.  Selon le représentant, une telle convention-cadre devrait comprendre les principes de réponse rapide tendant à limiter les dommages provoqués par un accident environnemental, des systèmes de sécurité financière reposant notamment sur des assurances obligatoires ou la création de fonds, et la mise en place d’une protection judiciaire effective.  Ces éléments sont bien reflétés dans les projets de principes 5 à 7, a estimé le représentant.


M. SYDNEY LEON ROMEIRO (Brésil) a indiqué que la protection diplomatique est un droit de l’État et non un droit de l’homme, même si dans certains cas elle peut être exercée pour respecter les droits de l’homme.  Il s’est félicité de la proposition de la Commission sur l’épuisement des recours internes, appréciant que la nationalité soit le critère central.  Un certain nombre de questions compliquées comme celle-ci doivent être examinées de plus près par la CDI, a-t-il souhaité.  Sur la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, il a noté que des mesures préventives sont insuffisantes et que les lois des États pour la responsabilité des entreprises ne donnent pas une direction suffisante pour les dommages transfrontières.  Il s’est déclaré en accord avec le principe selon lequel l’exploitant qui a le contrôle des opérations doit avoir la responsabilité fondamentale du dommage, suivant le principe du « pollueur-payeur ».


M. BIKRAM KESARI DEO (Inde) a estimé que les projets d’articles sur la protection diplomatique constituent un progrès considérable dans le développement du droit international car ils couvrent l’ensemble de la protection diplomatique qui a beaucoup évoluée au fil des années.  Le droit d’un État à protéger ses ressortissants ayant subi un préjudice du fait d’un acte illicite d’un autre État est reconnu comme un des éléments fondamentaux du droit international, a estimé le représentant, qui a rappelé que l’État exerce cette protection comme bon lui semble.  Pour l’Inde, étendre la protection diplomatique aux apatrides et réfugiés n’est pas souhaitable pour l’instant.  Le projet d’article 8, qui envisage cette solution, est susceptible d’une interprétation plus large par l’État de résidence habituelle de l’apatride, alors que la motion de résidence légale et habituelle relève purement du droit national, a estimé le représentant.  En outre, le terme de réfugié n’est pas limité à la définition de la Convention de 1951, a-t-il ajouté, jugeant difficile d’accepter une définition autre que celle qui a été universellement acceptée dans la Convention de 1951.


Le représentant a félicité la CDI pour l’adoption de ses projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontières découlant d’activités dangereuses et a estimé que le champ d’application de l’étude et le mécanisme qui enclenche la responsabilité devraient être les mêmes que dans le domaine de la prévention.  Il a estimé que la responsabilité fondamentale devait reposer sur l’exploitant.  La CDI a fait des progrès importants en adoptant un projet de texte souple grâce aux efforts du Rapporteur spécial visant à établir des principes et non des obligations, a estimé M. Deo.  Certains des principes n’ont qu’un aspect sectoriel et non pas été acceptés par tous les États, a observé le représentant, qui s’est dit inquiet des tentatives visant à incorporer de nouveaux éléments tels que les dommages causés à l’environnement, alors que la pratique générale des États n’appuie pas cette solution, pas plus que l’idée d’indemniser les dommages transfrontières à l’environnement en tant que tel. 


Le besoin des pays en développement en matière de transferts de technologies est reconnu dans divers instruments internationaux, a observé le représentant, qui a rappelé que plusieurs de ces textes reconnaissent aussi l’application de normes différentes pour les pays développés et les pays en développement en matière de protection de l’environnement.  Ce facteur d’équilibre promeut le développement durable, a estimé le représentant, qui a demandé que les dispositions des projets de principes qui porteraient préjudice aux intérêts des pays en développement devraient être traitées de manière appropriée par la CDI, afin de rendre les projets de principes plus largement acceptables.


M. TAKEO AKIBA (Japon) a loué les efforts de la CDI qui a achevé les projets d’articles sur la protection diplomatique.  Il était difficile de trouver un tableau complet et cohérent du sujet, a-t-il fait remarquer.  De l’avis de sa délégation, la CDI a pris la bonne voie en choisissant de ne pas élargir la portée de la protection diplomatique, excluant ainsi la protection fonctionnelle des organisations internationales.  Pour ce qui est de la protection des investissements étrangers, il a considéré que la protection diplomatique et les engagements bilatéraux doivent être clairement distincts.  Les accords de partenariat du Japon, par exemple, disposent que la protection diplomatique ne peut pas être invoquée quand l’arbitrage pour les investissements est déclenché au titre de ces accords.  M. Akiba a estimé par ailleurs que le nouveau libellé de l’article 18, sur les dispositions spéciales des traités, est préférable car il utilise des termes plus généraux.  Le débat à la CDI a considérablement amélioré la rédaction des projets, a estimé le représentant.  Celui-ci a toutefois espéré que la codification ne modifiera pas de façon majeure le droit international.


Sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Akiba a apprécié les travaux de la CDI.  Ce sujet a des effets sur de nombreux domaines de droit international, a-t-il noté, comme le transport maritime et la production d’électricité.  Il a relevé qu’il existe de nombreuses conventions régissant ces activités et que la tâche du rapporteur spécial est donc énorme.  Il a estimé que celui-ci a choisi la bonne voie, en soulignant au départ certains principes généraux.  Il était prévu que la discussion susciterait beaucoup de débats, a noté M. Akiba, et il était prudent que la CDI fonde ses travaux sur ses propres projets d’articles sur la prévention de dommages transfrontières.  La définition des termes peut encore être améliorée, a estimé le représentant.  Les articles qui placent une responsabilité indue sur les États au lendemain d’un dommage risquent d’être inutiles, a-t-il poursuivi.  Enfin, le délégué a conclu en indiquant que le Japon n’a encore aucun avis sur la forme finale de ces travaux, car il est trop tôt pour la déterminer.


M. MOSTAFA DOLATYAR (République islamique d’Iran) a soutenu la position du projet d’articles selon laquelle la protection diplomatique reste un droit discrétionnaire de l’État qui, en l’exerçant, protège en fait ses propres droits plutôt que ceux de ses ressortissants et considère le préjudice causé à son national comme un préjudice causé à lui-même.  Certes, des lois nationales peuvent contraindre un État à appliquer la protection diplomatique à ses ressortissants, mais il n’existe pas d’obligation de ce type au plan international, a affirmé le représentant.  De même, comme les commentaires sur le projet d’article 6 le précisent, il appartient certes aux États de déterminer qui sont ses ressortissants, mais l’État ne devrait pas adopter des lois qui accroissent les risques de nationalité double ou multiple, ou encore le risque d’apatridie.  M. Dolatyar a en revanche estimé que la CDI n’a pas fourni d’exemple probant de la pratique des États à l’appui de son article 5 (2) offrant la possibilité à un État d’exercer sa protection diplomatique au profit d’un ressortissant qui possède sa nationalité au moment du dépôt de la plainte mais ne l’avait pas au moment où elle a subi le préjudice.  Il a estimé que la disposition ne répond pas à la préoccupation exprimée par certains États face au risque de « forum shopping » en matière de nationalité.  Il a enfin estimé que la question de la nationalité prédominante mentionnée au projet d’article 7 est hautement subjective et qu’il n’existe pas de critère dans le droit international pour déterminer la prédominance d’une nationalité sur une autre, et a rejeté l’idée que la domiciliation des comptes bancaires ou le lieu des études puisse être pris en compte dans un monde où des millions de personnes naissent dans un pays, sont éduqués dans un autre et travaillent dans un troisième.


M. Dolatyar a estimé que les dispositions du projet d’article 13 qui prétendent étendre le régime juridique de protection diplomatique initialement prévu pour des sociétés à d’autres personnes morales va nettement au-delà de ce qui est admissible dans le cadre du développement progressif du droit international.  Il s’est dit préoccupé de l’ampleur des exceptions prévues à l’obligation d’épuisement des voies de recours internes avant de solliciter la protection diplomatique, telles que mentionnées dans le projet d’article 16.  Il s’est enfin félicité de la décision de la CDI d’étudier à nouveau l’an prochain la possibilité d’une relation entre la protection diplomatique et la théorie des « mains propres (clean hands) », en estimant que l’État de nationalité ne devrait pas se voir privé de son droit d’exercer sa protection si les charges retenues contre son national ne sont pas liées à la requête au sujet de laquelle celui-ci demande la protection.


M. MICHAEL WOOD (Royaume-Uni) a regretté que cette année le rapport de la CDI ait été publié plus tard que d’habitude, ce qui n’a pas permis de tenir des consultations avec les gouvernements avant le débat à la Sixième Commission.  En ce qui concerne le thème de la protection diplomatique, il a noté son lien étroit avec le sujet de la responsabilité des États, ce qui signifie que les projets d’articles doivent être lus dans le contexte des articles relatifs à la responsabilité.  Le représentant a apprécié que la CDI rejette la proposition selon laquelle les États devraient avoir le devoir, au niveau international, d’exercer la protection diplomatique.  Il est ainsi clair que l’exercice de la protection diplomatique est un droit et non un devoir, a-t-il ajouté.  Sur le sujet de la nationalité, M. Wood a considéré qu’il soulève des questions plus difficiles et exige un examen plus avant, considérant que l’équilibre décrit par le Président de la CDI n’est pas encore atteint.  En ce qui concerne les recours internes, le représentant est d’avis, comme le dit la Commission, que la doctrine des « mains propres » ne doit pas s’appliquer.


Abordant ensuite la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Wood a trouvé impressionnant le travail accompli par la CDI.  Le but principal doit être d’élaborer un ensemble de principes généraux, à son avis, mais le projet ne semble pas être de nature à développer le droit international au sens traditionnel.  S’agissant de la forme que doivent prendre les projets, il a émis un avis favorable à la proposition de la Commission, à savoir qu’un ensemble de principes soit adopté sous une forme non contraignante.  Sur le fond, il a estimé que la relation entre les projets de principes et les articles sur la responsabilité des États de 2001 mérite davantage de réflexion.  M. Wood apprécierait notamment plus de précisions sur la façon dont des doubles réclamations peuvent être évitées.  Il a aussi souhaité qu’on fasse référence plus explicitement à la règle lex specialis, correspondant à l’article 55 de la responsabilité des États.  Sur le projet fondé sur le principe du pollueur-payeur, il a noté que celui-ci a été développé depuis la Conférence de Rio.  C’est une matière difficile et mouvante, à ses yeux, qui mérite que sa délégation présente des commentaires par écrit.  En concluant, sur les nouveaux sujets à l’ordre du jour de la CDI, le délégué a estimé que la portée de la question « expulsion des étrangers » n’est pas très claire.


M. ROBERTO LAVALLE-VALDES (Guatemala) s’est notamment demandé où se trouvent les principes généraux sur lesquels prétend reposer le projet d’article 6.  Concernant les critères du projet d’article 9 pour déterminer la nationalité d’une société, il a estimé qu’il faudrait donner une certaine valeur au critère du lien authentique ainsi qu’au lieu où se déroulent les activités de la société.  Le représentant a estimé que les projets d’articles 9, 10 et 13, mais aussi les projets d’articles 11 et 12 devraient s’appliquer aux actionnaires d’une société à responsabilité limitée.


M. RONNY ABRAHAM (France) a déploré une dégradation dans les conditions de publication du rapport de la CDI, qu’il a jugée trop tardive et ne permettant pas de prendre la mesure des changements intervenus sans recourir à des documents annexes publiés exclusivement en anglais.  La perpétuation d’un tel état de faits risquerait d’affaiblir considérablement l’intérêt des débats à la Sixième Commission alors même qu’on réfléchit utilement sur la revitalisation des travaux de celle-ci, a affirmé le représentant.  M. Abraham s’est également inquiété des projets de la CDI visant à ajouter deux ou trois nouveaux thèmes d’études à ses travaux.  Sans préjuger de leur pertinence, il a estimé que la Commission devrait surtout mettre l’accent sur ceux des thèmes qui sont susceptibles de conduire à une forme conventionnelle de codification ou à l’adoption de directives utiles à l’interprétation des comportements étatiques.  Il a ainsi rappelé ses doutes sur l’intérêt d’étudier la fragmentation du droit international, exercice qui risque de rester purement académique, tout en renouvelant son intérêt pour la question des actes unilatéraux des États, mais sous une forme différente de celle présentée par le Rapporteur spécial, qualifiée de compilation descriptive qui ne saurait, à elle seule, constituer un véritable répertoire de la pratique sur la base de laquelle il serait possible de codifier le droit relatif aux actes unilatéraux.


Mme META BOLE (Slovénie) a soutenu le développement du droit international dans le domaine de la responsabilité des États et s’est félicitée de la reprise des travaux sur ce thème.  Le rapport analyse très bien les observations des États sur la répartition des pertes à son avis.  La représentante a noté que la CDI a adopté les projets de principes sur cette question et s’est déclarée favorable à la forme d’un projet de texte final, comme celui sur la prévention des dommages transfrontières.  Cela permettrait de renforcer le développement de régimes spécifiques dans les accords internationaux, régionaux ou bilatéraux, et assurerait des mesures de réparation rapide.  Sur la question des relations entre régime international et régime national de responsabilité, elle a estimé que le système proposé est suffisamment souple.  Enfin, en ce qui concerne le projet de principe 4 sur l’indemnisation adéquate que doit fournir l’exploitant, elle l’a jugé conforme à la Déclaration de Rio et au principe du « pollueur-payeur ».


M. HANS WINKLER (Autriche) a formulé des remarques préliminaires sur les articles 17 et 18 du projet de texte sur la protection diplomatique.  Le projet d’article 17, qui porte sur les « actions ou procédures autres que la protection diplomatique », utilise un langage qui pose des problèmes.  En effet, a-t-il relevé, du fait que le projet d’article ne se restreint pas à la réparation de dommage indirect, il inclut les mesures envisagées sous les régimes de la responsabilité des États pour réparer les dommages directs, ce qui comprend les contre-mesures.  Le représentant s’est demandé dans quelle mesure cette conséquence est prévue par le texte, notant que le commentaire réduit la portée de la disposition aux procédures visant à réparer les dommages aux individus.  Sur la relation entre protection diplomatique et d’autres « actions ou procédures », il a considéré qu’il n’existe pas une indépendance totale entre les deux.  Le projet d’article 18 intitulé « dispositions conventionnelles spéciales » soulève, selon le représentant, d’autres questions.  Il a demandé notamment pourquoi cet article est rédigé selon une formule différente (« les présents articles ne s’appliquent pas… ») par rapport au projet d’article 17 (« les présents articles sont sans préjudice …») et a souhaité qu’il soit remanié pour se conformer à la formule de « clause sans préjudice ».


Sur la question de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Winkler a noté que la difficulté en matière de dommage environnemental est principalement de démontrer que certaines activités ont causé un dommage.  Cependant, a-t-il noté, selon le projet de principe 4, aucune preuve de faute n’est exigée.  Cette disposition est destinée à alléger le fardeau de la preuve pour la victime, mais, de l’avis du représentant, cet objectif n’est que partiellement atteint.  En effet, a-t-il relevé, seule la preuve de la faute est évitée, mais pas la preuve du lien de causalité entre faute et dommage.  M. Winkler s’est dit peu convaincu par le commentaire à ce sujet.  Sur la question du financement de la réparation, il a cité une approche triple, qui vise le pollueur, l’État et les fonds communs.  L’État n’est cité que comme payeur exceptionnel, comme en cas de pollution nucléaire, et le représentant s’est demandé si le devoir créé par le projet de principe 4 (indemnisation prompte et adéquate) ne devrait pas être restreint à de tels cas exceptionnels.  Quant au projet de principe 5 (mesures d’intervention), il a considéré qu’il est en dehors du cœur des projets de principes et devrait donc se limiter uniquement à la nécessité de notification.  Sur le projet de principe 6 (recours internes et internationaux), on ne voit pas clairement qui a le droit de présenter une réclamation en cas de dommage écologique.  Est-ce que des ONG pourraient le faire? s’est interrogé le représentant.  Enfin, l’inclusion d’une disposition sur le règlement pacifique des différends serait appropriée, même si le projet de texte final ne se transforme pas en convention.  Sa délégation n’appuie pas l’idée d’adopter une convention pour ces projets de principes, mais plutôt une directive pour les États, a-t-il conclu.


M. JULIO GONZALEZ-CAMPOS (Espagne) a déclaré que son pays n’était pas satisfait de la définition de la protection diplomatique donnée au projet d’article 1er qui ne détermine pas, selon lui, le contenu essentiel de la protection diplomatique mais dérive vers les mesures que l’État peut adopter dans le cadre d’un règlement de différends internationaux.  La pratique internationale montre que l’essentiel de la protection diplomatique réside dans le fait qu’un État présente à un autre une réclamation officielle concernant un préjudice subi par un de ses ressortissants, a affirmé le représentant.  La définition de la protection diplomatique devrait donc mentionner le caractère officiel de cette réclamation, par laquelle l’État prend à son compte le préjudice subi par son ressortissant.  Or, la rédaction actuelle du projet d’article 1er ne fait pas assez la différence entre la protection diplomatique et d’autres formes de protection comme la protection consulaire, laquelle ne peut pas exiger l’épuisement des voies de recours internes, a estimé le représentant.  Une telle distinction existe non seulement dans la réalité mais aussi dans les arrêts de la CIJ, comme dans l’affaire Legrand, a-t-il fait remarquer.  Il a donc demandé une définition plus précise insistant sur l’aspect formel de la démarche de l’État.  Le représentant a par ailleurs jugé trop brefs les commentaires sur le projet d’article 3 sur le lien de la nationalité entre l’État et l’individu.  


M. Gonzalez-Campos a estimé que les dispositions des projets d’articles concernant les personnes morales sont satisfaisantes.  Mais il a remarqué qu’en ce qui concerne le critère du lieu de  constitution de la société comme moyen de détermination de la nationalité de celle-ci, il ne faudrait pas oublier que dans nombre de systèmes juridiques nationaux, ce critère peut introduire des confusions.  Il a donc suggéré qu’on ne s’éloigne pas des termes utilisés par la CIJ dans l’arrêt Barcelona Traction et qu’on prenne aussi comme critère celui du lieu du siège de l’administration effective de la société.  Il a jugé satisfaisantes les dispositions concernant la protection des actionnaires de société mais il a jugé mal venus les commentaires citant à l’appui de la solution retenue les opinions dissidentes des juges dans la même affaire.


M. RUSSEL MBA (Gabon) a estimé que la protection diplomatique constitue de nos jours un des plus grands principes découlant de l’Article 2 de la Charte de l’ONU sur l’absence de recours à la force.  S’agissant du champ de la protection diplomatique (projet d’article 1er), il l’a estimé satisfaisant mais a relevé un besoin d’élargissement aux fins d’harmonisation avec le projet d’article 8 qui énonce un autre critère d’application de la protection diplomatique (situation des apatrides et réfugiés).  Abordant le chapitre 2 du projet de texte, le représentant a considéré qu’il faut laisser aux États le pouvoir discrétionnaire d’attribuer la nationalité, rappelant notamment la Convention de La Haye de 1930.  Le projet d’article 4 n’a pas non plus établi une distinction nette entre nationalité d’attribution et nationalité d’acquisition, de l’avis du délégué.  En ce qui concerne les projets d’articles 6 et 7, portant sur les cas de nationalités multiples, M. Mba a noté que l’acte international illicite devrait être considéré comme portant préjudice aux deux États d’origine, ce qui n’est pas le cas des ces dispositions qui sont fondées sur la « nationalité prépondérante ».  La solution est problématique à ses yeux, car le concept de nationalité devrait demeurer une considération de droit et non de fait et car on pourrait arriver à remettre en question le principe de souveraineté des États.  Il faudrait préciser, a-t-il estimé, la notion de prépondérance en la définissant par rapport à des éléments de fait.  Concernant le projet d’article 8 (apatrides et réfugiés), M. Mba a rappelé les Conventions de New York (1954) et de Genève (1961), qui ne traitent pas de la protection diplomatique de ces personnes.  Il semblerait même que ces instruments écartent ces personnes du champ de la protection diplomatique, a-t-il remarqué.  C’est donc une évolution importante du droit international que le projet de texte de la CDI veut apporter, que sa délégation appuie.  Évoquant la question controversée de la protection des actionnaires, le représentant a soutenu les articles y relatifs.  Enfin, s’agissant de la règle d’épuisement des recours internes, M. Mba s’est déclaré sceptique quant aux exceptions énoncées au projet d’article 16, car l’administration de la justice varie dans l’espace.  Il faudrait  apprécier ce critère selon la notion de « bon père de famille », a-t-il conclu.


M. ARTURO DAGER (Mexique) a félicité la CDI pour l’adoption de projets d’articles sur la protection diplomatique et a estimé que le résultat actuel reflète la pratique des États en la matière.  Il a estimé que les commentaires constituent un guide concis et un remarquable outil pour examiner différents aspects du droit international liés à la protection diplomatique.  La pratique des États selon laquelle, aux termes de la doctrine des « mains propres » le plaignant devait ne pas avoir commis d’acte illicite, n’est pas homogène, a estimé le représentant.  Il est donc bon que la CDI ait décidé de poursuivre l’examen de la question lors de sa prochaine session, a-t-il ajouté.  Il a rappelé que les plaignants devaient au préalable avoir épuisé les voies de recours interne, mais ne devaient pas être obligés de contacter le pouvoir exécutif du pays pour tenter d’obtenir une réparation gracieuse du préjudice subi.  Il a ainsi affirmé que, dans le cas de ressortissants mexicains condamnés à la peine de mort, les moyens de grâce exécutive ne sont pas un moyen approprié de réparation.  Il appartient, a-t-il estimé, à l’État de nationalité des ressortissants membres de l’équipage d’un navire d’exercer la protection diplomatique en leur nom, et l’État de pavillon de l’État ne saurait donc exercer une telle  protection diplomatique.


M. CHOI SUK-INN (République de Corée) a déclaré souscrire au principe du projet d’article 9 sur la protection diplomatique qui dispose que l’État de nationalité d’une société peut exercer sa protection au regard d’un préjudice subi par cette société.  Il a estimé très important de disposer de lignes directrices précises permettant de définir la nationalité de la société afin d’éviter toute confusion.  Concernant les critères de détermination de la nationalité de la société, le représentant a déclaré que sa délégation ne s’oppose pas à l’inclusion dans les dispositions de la notion du lieu de constitution de la société.  En revanche, le critère de territoire du siège social ou de la direction ou encore des liens similaires exige, selon lui, des éclaircissements supplémentaires.  M. Choi a proposé que la CDI combine les projets d’articles 17 et 18 sur les actions ou procédures autres que la protection diplomatique et les dispositions conventionnelles diverses.  Les projets relatifs à la protection diplomatique ne doivent pas viser à nuire aux mécanismes existants de règlement des différends qui concernent non seulement des États mais aussi des entités non étatiques ou des individus, que ce soit dans le cadre de régimes internationaux de droits de l’homme ou de traités concernant la protection des investissements, a déclaré le représentant.  Il n’y a donc pas de raison de traiter de ces problèmes dans deux articles séparés puisque ces autres moyens de règlement des différends également ouverts à des individus ou entités non étatiques constituent une lex specialis (règle spéciale) ayant priorité sur la protection diplomatique.


Concernant le projet d’article 19, le représentant a maintenu que c’est à l’État du pavillon que doit revenir la protection des membres de l’équipage, et non à l’État de nationalité de ces derniers, comme viennent l’illustrer tant les dispositions du droit de la mer que divers jugements ou sentences arbitrales.  La protection de l’État du pavillon ne peut être considérée comme de la protection diplomatique, a estimé le représentant.  En combinant deux notions différentes, le droit traditionnel du droit du pavillon et la notion de protection diplomatique, le projet d’article 19 stipule une règle inconnue, a affirmé le représentant.  Pour lui, l’exercice de la protection diplomatique par l’État de nationalité des membres de l’équipage d’un navire ayant subi un préjudice ne fait pas partie du droit international coutumier ni de la lex ferenda (selon la loi proposée).  Cet article doit donc être écarté, et la CDI doit s’en tenir au droit international actuel, qui donne à l’État de pavillon la charge de veiller à la protection des membres de l’équipage, a conclu M. Choi.


Informations de base


Protection diplomatique (Chapitre 4 du rapport de la CDI (A/59/10))


C’est en 1996 que la CDI a retenu la protection diplomatique comme thème de travail et en 2002 qu’elle a examiné le premier rapport du rapporteur spécial.  Après avoir examiné, lors de sa session de 2004, le cinquième rapport du Rapporteur spécial (A/CN.4/538), qui traitait de l’articulation entre la protection diplomatique et la protection fonctionnelle exercée par les organisations internationales, de la protection diplomatique et des droits de l’homme et de la protection diplomatique par rapport à la protection de l’équipage d’un navire par l’État du pavillon, la Commission a adopté en première lecture une série de 19 projets d’articles, ainsi que les commentaires y relatifs. 


Telle que définie dans l’article premier du projet d’articles, la protection diplomatique « consiste dans le recours à une action diplomatique ou à d’autres moyens de règlement pacifique par un État qui prend fait et cause, en son nom propre, pour l’une des personnes ayant sa nationalité à raison d’un préjudice subi par cette dernière découlant d’un fait internationalement illicite d’un autre État. »


Dans ses commentaires, la Commission rappelle que le droit d’exercer la protection diplomatique appartient à l’État et qu’en l’exerçant, celui-ci prend fait et cause, en son nom propre, pour son national lésé par le fait internationalement illicite d’un autre État, que ce national soit une personne physique ou morale, en partant du principe que le préjudice est causé à l’État lui-même.  Il existe donc un lien étroit entre la protection diplomatique et le thème de la responsabilité des États, traité par la Commission dans le cadre d’une autre étude.  Les articles traités dans le cadre de la protection diplomatique ne concernent que les règles secondaires, c’est-à-dire celles qui ont trait aux circonstances dans lesquelles la protection diplomatique peut être exercée et les conditions qui doivent être réunies pour qu’elle puisse l’être. 


Par ailleurs, la Commission rappelle que la protection diplomatique doit être exercée par des moyens licites et pacifiques.  L’emploi de la force, prohibé par le paragraphe 4 de l’Article 2 de la Charte des Nations Unies, est interdit dans l’exercice de la protection diplomatique, est-il rappelé dans les commentaires.  Enfin, la Commission rappelle que  les articles adoptés traitent uniquement de l’exercice de la protection diplomatique par un État, et non de la protection accordée par les organisations internationales à leurs agents, et s’entend surtout de la protection des nationaux qui ne se livrent pas à des activités internationales officielles pour le compte de l’État.  En effet, les diplomates et les consuls sont protégés par d’autres règles et instruments de droit international, notamment la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques et la Convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires.

La Commission invite enfin les gouvernements à présenter leurs remarques et observations sur tous les aspects du projet d’articles, ainsi que sur les commentaires  adoptés.


Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international (Chapitre 7 du rapport de la CDI (A/59/10))


Le thème de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international (responsabilité internationale en cas de perte causée par un dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses) constitue le second volet d’une étude de la CDI commencée en 1980.  Le premier volet, consacré  à la prévention de dommages transfrontières résultant d’activités dangereuses, a abouti à l’adoption en 2001 d’un projet composé d’un préambule et de 19 articles par la CDI, qui a ensuite recommandé à l’Assemblée générale d’élaborer une convention sur cette base.


Lors de sa session de 2004, la CDI a examiné le deuxième rapport du Rapporteur spécial et a adopté en première lecture un ensemble de huit projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses.  Elle a ensuite décidé de transmettre les projets de principes aux gouvernements pour commentaires et observations, en leur demandant de faire parvenir ceux-ci  au Secrétaire général avant le 1er janvier 2006.


Dans ses commentaires, la Commission explique que les projets de principes doivent être placés dans le cadre de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement.  Ils entendent donc contribuer au développement du droit international dans ce domaine, à la fois en offrant une orientation appropriée aux États en ce qui concerne les activités dangereuses non encore couvertes par des arrangements spécifiques bilatéraux, régionaux ou internationaux, et en indiquant les questions dont devraient traiter de tels accords.  Les propositions présentent donc un caractère général et complémentaire.


La CDI rappelle également que le droit international contraint les États à respecter leurs obligations de prévention.  En conséquence,  les projets de principes sont présentés sans préjudice des règles relatives à la responsabilité de l’État et sans incidence sur toute réclamation susceptible d’être présentée en cas de violation de ces obligations de prévention, qui mettent en jeu certaines normes minimales de diligence raisonnable.


La Commission précise que les modèles de responsabilité et d’indemnisation existants montrent que la responsabilité de l’État est une exception, acceptée essentiellement dans le cas des activités extra-atmosphériques.  Il existe donc un consensus pour faire peser au premier chef la responsabilité découlant des activités concernées par le projet sur  l’exploitant, pour dire que cette responsabilité ne dépend pas de la preuve d’une faute, et qu’elle peut être limitée ou soumise à des exceptions.  Le point important est que la responsabilité de la personne qui exerce le contrôle maximum sur l’activité peut également être engagée.  Il existe également un consensus en faveur de la mise en place d’un financement complémentaire quel que soit le mécanisme de prise en charge de la perte, et que ce financement serait particulièrement important si la notion de responsabilité limitée est adoptée.  L’idée de base est d’adopter un mécanisme de prise en charge de la perte qui répartisse la perte sur de nombreux acteurs, y compris l’État.


La Commission constate en outre un large accord sur les éléments fondamentaux applicables au mécanisme de la prise en charge de la perte en cas de dommages découlant d’activités dangereuses.  Ainsi, il est entendu que, dans la plupart des cas, le droit substantiel ou le droit applicable aux demandes d’indemnisation peut mettre en jeu la responsabilité civile ou la responsabilité pénale, voire les deux.


La Commission ne se prononce pas sur la forme que devrait prendre le résultat de l’étude mais estime que les dispositions de fond sont plus susceptibles d’être largement acceptées si elles sont formulées sous forme de projets de principes recommandés.


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