LA SIXIÈME COMMISSION SE FÉLICITE DE L’ADOPTION PAR LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL DES PROJETS D’ARTICLES SUR LA PROTECTION DIPLOMATIQUE
Communiqué de presse AG/J/3263 |
Sixième Commission
17e séance – matin
LA SIXIÈME COMMISSION SE FÉLICITE DE L’ADOPTION PAR LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL DES PROJETS D’ARTICLES SUR LA PROTECTION DIPLOMATIQUE
La Sixième Commission (Commission juridique) a commencé ce matin à examiner le rapport de la Commission du droit international (CDI) sur les travaux de sa cinquante-sixième session. Le rapport a été présenté par le Président de la Commission, M. Teodor Viorel Melescanu (Roumanie), qui a insisté sur les progrès accomplis par la CDI et notamment sur l’adoption en première lecture des projets d’articles sur la protection diplomatique et des projets de principes relatifs à la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international. C’est par ces deux chapitres que la Sixième Commission a entamé ses débats sur le rapport, qui doivent se poursuivre jusqu’au 9 novembre.
Outre une satisfaction générale face à l’adoption du projet d’articles relatif à la protection diplomatique, certaines délégations se sont félicitées des dispositions qui permettent de mieux protéger certaines personnes susceptibles d’en avoir besoin. Ainsi, le représentant de la Norvège s’est félicité du contenu du projet d’article 8 qui devrait permettre à un État d’exercer sa protection diplomatique en faveur de réfugiés et d’apatrides résidant légalement et habituellement dans le pays, tout en admettant qu’une telle disposition tend à s’éloigner de la conception traditionnelle selon laquelle un État ne peut exercer sa protection diplomatique qu’au profit de l’un de ses ressortissants. De même, la disposition du projet d’article 16 qui permettrait à l’État du pavillon d’un navire d’exercer sa protection diplomatique au profit de membres d’équipage d’une nationalité autre que celle du pavillon a-t-elle été jugée opportune par le représentant de l’Italie. Celui-ci a toutefois observé, comme le représentant de la République tchèque, que cette forme de protection est différente de la protection diplomatique proprement dite. Inversement, le représentant de la Chine s’est demandé si ce type de protection bénéficiait vraiment d’une large reconnaissance internationale. Enfin, le représentant des États-Unis a souhaité que le champ couvert par les projets d’articles se limite strictement à la codification du droit international coutumier ou, tout au plus, ne s’en écarte.
La CDI a également été félicitée pour être parvenue à adopter en première lecture ses projets de principes concernant la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités dangereuses qui ne sont pas interdites par le droit international, trois ans seulement après avoir adopté le volet « prévention » de l’étude. Les projets de principes tentent de combler une lacune du droit international en établissant que l’État sous le contrôle et la juridiction duquel a été menée un telle activité, a la responsabilité, même s’il a lui-même respecté ses obligations internationales, de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’une indemnisation rapide et adéquate soit accordée aux victimes de dommages transfrontières, a relevé le représentant des Pays-Bas. Insistant sur cette obligation d’indemnisation rapide des victimes, le représentant s’est prononcé pour l’adoption des dispositions pertinentes sous forme de convention. Cette solution ne semble toutefois pas rallier les autres délégations. La représentante de la Finlande l’a jugée inappropriée et s’est prononcée en faveur d’une adoption des projets de principes par une résolution de l’Assemblée générale de l’ONU, alors que le représentant de l’Argentine se prononçait pour une déclaration, et celui de la Chine pour une déclaration ou l’adoption d’un guide ou d’une loi type, toutes formes de textes non juridiquement contraignants.
Lors du débat, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Pays-Bas, Suède, Norvège (tous deux au nom des pays nordiques, respectivement sur le rapport en général et sur la protection diplomatique), République tchèque, Chine, Argentine, Italie, Nouvelle-Zélande, Finlande (au nom des pays nordiques, concernant la responsabilité internationale) et États-Unis.
La Sixième Commission poursuivra demain, mardi 2 novembre, à 9 h 30, l’examen des chapitres du rapport de la CDI relatifs à la protection diplomatique et à la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international.
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA CINQUANTE-SIXIÈME SESSION (A/59/10)
La Commission du droit international (CDI) a tenu sa cinquante-sixième session à son siège, à l’Office des Nations Unies à Genève, en deux parties, du 3 mai au 4 juin 2004, puis du 5 juillet au 6 août 2004, sous la présidence de M. Teodor Viorel Melescanu (Roumanie).
Les principaux thèmes abordés par la CDI durant ses travaux ont été les suivants: Protection diplomatique; Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international (Responsabilité internationale en cas de pertes liées à un dommage transfrontière résultant d’activités dangereuses); Actes unilatéraux des États; Réserves aux traités; Responsabilité des organisations internationales; Ressources naturelles partagées; et Fragmentation du droit international: difficultés découlant de la diversification et du développement du droit international.
Concernant la «Protection diplomatique», la Commission a examiné le cinquième rapport du Rapporteur spécial, qui traitait de l’articulation entre la protection diplomatique et la protection fonctionnelle exercée par les organisations internationales, de la protection diplomatique et des droits de l’homme et de la protection diplomatique par rapport à la protection de l’équipage d’un navire par l’État du pavillon. Elle a adopté en première lecture un ensemble de 19 projets d’articles et a décidé d’en communiquer le texte aux gouvernements pour observations.
La Commission a adopté à titre provisoire cinq projets de directives relatives aux «Réserves aux traités», qui portent sur l’aggravation de la portée d’une réserve, ainsi que sur la modification et le retrait de déclarations interprétatives. La Commission a également examiné le neuvième rapport du Rapporteur spécial et renvoyé au Comité de rédaction deux projets de directives portant sur la définition des objections aux réserves et sur l’objection à la formulation ou à l’aggravation tardives d’une réserve.
En ce qui concerne la «Responsabilité des organisations internationales», la Commission avait déjà adopté en 2003 trois projets d’articles concernant les principes généraux en la matière. Lors de sa session de 2004, elle a adopté, en les assortissant de commentaires, les quatre projets d’articles contenus dans le deuxième rapport du Rapporteur spécial, qui traitait de l’imputation d’un comportement à une organisation internationale.
La Commission a examiné le deuxième rapport du Rapporteur spécial sur le thème des «Ressources naturelles partagées», qui contenait sept projets d’articles relatifs à la question des eaux souterraines transfrontières, à laquelle se limite pour l’instant le thème. La Commission a également créé un groupe de travail à composition non limitée sur les eaux souterraines transfrontières, présidé par le Rapporteur spécial. Celui-ci envisage de présenter en 2005 son troisième rapport, qui comportera plusieurs projets d’articles sur le droit relatif aux formations aquifères transfrontières. La Commission souhaitera à cet égard connaître les avis des gouvernements sur ce cadre général de travail. Elle apprécierait également de la part des gouvernements des informations détaillées et précises sur les aspects de leur pratique, bilatérale ou régionale, relative d’une part à la répartition des eaux souterraines faisant partie de systèmes aquifères transfrontières; et d’autre part à la gestion des systèmes aquifères transfrontières non renouvelables.
La Commission a examiné le deuxième rapport du Rapporteur spécial sur la «Responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international (responsabilité internationale en cas de perte causée par un dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses)». Elle a créé un groupe de travail chargé d’examiner les propositions du Rapporteur spécial, renvoyé au Comité de rédaction les huit projets de principes soumis par le Groupe de travail et adopté en première lecture un ensemble de projets de principes, assortis de commentaires, sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses. La Commission dit attendre avec intérêt des remarques et observations des gouvernements sur ses propres commentaires relatifs au projet de principes, ainsi que sur tous les aspects du projet de principes relatifs à la répartition des pertes en cas de dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses, adopté en première lecture, et notamment sur la forme définitive du projet.
La Commission a examiné le septième rapport du Rapporteur spécial sur les «Actes unilatéraux des États», qui faisait le point de la pratique des États en rapport avec les actes unilatéraux. Un groupe de travail sur les actes unilatéraux a été reconstitué, qui a axé ses travaux sur l’examen approfondi de certains exemples d’actes unilatéraux.
Le Groupe d’étude de la Commission formé sur le thème de la «Fragmentation du droit international: difficultés découlant de la diversification et du développement du droit international», a examiné un rapport préliminaire sur l’étude intitulée « la fonction et la portée de la règle de lex specialis et la question des régimes autonomes ». Il a également examiné des exposés sur l’étude relative à l’application de traités successifs portant sur la même matière (article 30 de la Convention de Vienne sur le droit des traités); sur l’étude relative à la modification des traités multilatéraux dans les relations entre certaines parties seulement (article 41 de la Convention de Vienne sur le droit des traités) et sur l’étude relative à l’interprétation des traités à la lumière de «toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties» (article 31, alinéa 3, c) de la Convention de Vienne sur le droit des traités). Le Groupe de travail a également examiné l’étude sur la hiérarchie des normes en droit international: jus cogens, obligations ergaomnes, Article 103 de la Charte des Nations Unies, en tant que règles de conflit.
Sur la recommandation de son Groupe de planification chargé d’examiner son programme, ses procédures et ses méthodes de travail, la Commission a inclus dans son programme de travail actuel deux nouveaux sujets: «Expulsion des étrangers» et «Effets des conflits armés sur les traités» et a nommé des rapporteurs spéciaux. Elle a également suivi la recommandation du Groupe tendant à inscrire le sujet «Obligation d’extrader ou de poursuivre (aut dedere aut judicare)» à son programme de travail à long terme, et envisage de l’inscrire à son programme de travail actuel à sa prochaine session.
Enfin, la Commission a poursuivi ses échanges d’informations avec la Cour internationale de Justice, le Comité juridique interaméricain, l’Organisation juridique consultative pour les pays d’Afrique et d’Asie, de même qu’avec le Comité européen de coopération juridique et le Comité des conseillers juridiques sur le droit international public. Les membres de la Commission ont également tenu des réunions informelles avec d’autres organes et associations sur des questions d’intérêt commun, et un séminaire de formation auquel ont participé 24 personnes de nationalités différentes a eu lieu lors de la session.
La Commission a décidé de tenir sa prochaine session à l’Office des Nations Unies à Genève, en deux temps, du 2 mai au 3 juin et du 4 juillet au 5 août 2005.
Présentant le rapport, le Président de la Commission du droit international, M. TEODOR VIOREL MELESCANU (Roumanie), a affirmé que les travaux de la 56ème session de la CDI avaient été productifs. La CDI, a-t-il rappelé, a achevé la première lecture de deux thèmes, a adopté des dispositions sur deux autres. En outre, elle a progressé sur deux questions à l’ordre du jour et est convenue d’ajouter deux points à son programme de travail. Il a par ailleurs rappelé que la CDI traite de plusieurs thèmes complexes en même temps et que ces derniers progressent sur une base annuelle, ce qui suppose une bonne compréhension non seulement du travail de l’année, mais aussi de celui des années précédentes. C’est pour cette raison, a-t-il expliqué, que la CDI encourage les gouvernements non seulement à faire des observations à la Sixième Commission, mais aussi à présenter également des commentaires écrits après avoir eu la possibilité d’examiner plus attentivement le travail accompli. M. Melescanu a également rappelé que le succès de la CDI dans ses efforts de codification dépend pour une large part du soutien qu’elle reçoit de la Sixième Commission.
M. Melescanu a ensuite présenté les chapitres du rapport de la CDI relatifs à la protection diplomatique et à la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, en insistant sur les progrès accomplis. Concernant la protection diplomatique, il a rappelé que les 19 projets d’articles adoptés par la CDI à sa 56ème session ont été transmis par l’intermédiaire du Secrétariat général aux gouvernements afin que ceux-ci présentent des commentaires et observations avant janvier 2006. L’objectif est que la CDI puisse achever la seconde lecture de ces projets d’articles lors de sa 58ème session, dans le courant de la même année, en prenant en compte ces commentaires et observations. Il a également demandé à la Sixième Commission de commenter l’ensemble des articles. Concernant la responsabilité internationale, M. Melescanu a qualifié de remarquables les progrès réalisés lors de la 56ème session de la CDI, puisque celle-ci été en mesure d’adopter en première lecture un ensemble de huit projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses. Là encore, le Président a rappelé que la CDI accueillera avec satisfaction tout commentaire ou toute observation des États sur tous les aspects des projets de principes, et notamment sur la forme finale qu’ils devraient prendre.
Déclarations
M. JOHAN LAMMERS (Pays-Bas) s’est félicité de l’adoption en première lecture du projet d’articles sur la protection diplomatique. Les Pays-Bas présenteront sans aucun doute, comme le suggère la CDI dans son rapport, des commentaires et observations avant janvier 2006, après avoir demandé conseil au Comité consultatif néerlandais sur les questions de droit international, organisme indépendant, a-t-il affirmé. Concernant la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, il s’est félicité que, trois sessions seulement après avoir adopté le premier volet du sujet relatif à la prévention, la CDI ait pu adopter en première lecture le second volet de son étude, relatif aux projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses. Ce succès ne doit pas être sous-estimé dans la mesure où le sujet, et particulièrement l’aspect « responsabilité » a dominé les travaux de la CDI pendant plus de 25 ans d’une façon sans précédent, a déclaré le représentant, qui a rappelé que les débats étaient partis dans toutes les directions. La persévérance des Rapporteurs spéciaux a permis de parvenir à un travail qui, aux yeux des Pays-Bas, est conceptuellement bien établi dans le droit international. La suggestion exprimée par certains membres de la Sixième Commission, de la CDI et dans des milieux universitaires, selon laquelle le sujet était conceptuellement mal conçu, a été finalement réfutée de manière convaincante, a estimé M. Lammers.
Les Pays-Bas appuient le concept de base des projets de principes sur la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables d’une activité non interdite par le droit international, à savoir l’idée selon laquelle la question est également soulevée lorsque l’État sous le contrôle et la juridiction duquel a été menée cette activité a lui-même respecté ses obligations internationales. Il existe une lacune dans le droit international et les projets de principes tentent de la combler en établissant que l’État doit prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’une indemnisation rapide et adéquate soit accordée aux victimes de dommages transfrontières provoquées par des activités dangereuses, a estimé M. Lammers. Tout en reconnaissant qu’il est souhaitable que les États adoptent des régimes spécifiques pour des activités dangereuses spécifiques tant au niveau national qu’international, il a estimé que les délibérations sur ce point ne sont pas complètement épuisées et qu’il faut encore affiner les projets de principes.
Le représentant a estimé que la forme finale des projets de principes ne devrait pas être différente de celle concernant les aspects liés à la prévention, qui ont pris la forme d’un projet de convention. Les Pays-Bas ne soutiennent pas la solution actuelle, qui n’est à ce stade que provisoire, selon laquelle on pourrait différencier la forme finale des deux volets. L’obligation pour les États de prendre des mesures rapides et adaptées d’indemnisation devrait être incorporée aux projets d’articles sur la prévention des dommages transfrontières, a affirmé le représentant. Ces dispositions peuvent être complétées par des guides ayant la forme de principes, mais il doit exister une obligation afin que les victimes des dommages transfrontières soient indemnisées, a affirmé M. Lammers.
M. CARL HENRIK EHRENKRONA (Suède), au nom des pays nordiques, a formulé des observations générales sur les travaux de la CDI. Il a d’abord regretté que le rapport de celle-ci n’ait été disponible que le 15 septembre 2004, pour aborder ensuite les sujets dont la Commission est saisie. Il a estimé que le choix des sujets qui méritent d’être étudiés de plus près relève de la CDI elle-même. Toutefois, il a souhaité que la Commission tienne compte des avis des gouvernements sur les sujets à discuter, comme la proposition des pays nordiques d’éliminer de l’ordre du jour la question des actes unilatéraux des États. Il est essentiel que la CDI reconnaisse dûment la valeur des observations formulées par les délégations au cours du débat, a-t-il demandé. Sur le thème de la fragmentation du droit international, il a espéré que la Commission l’abordera de façon novatrice. À cette occasion, le représentant a indiqué qu’une réunion informelle se tiendra vendredi à la Mission permanente de la Finlande pour discuter de ce sujet avec le Rapporteur spécial. Sur les deux nouveaux sujets que la Commission projette d’étudier, il a constaté que le travail du Rapporteur spécial sur la question de l’expulsion des étrangers n’est pas assez ciblée. Sur le thème de l’obligation d’extrader, le représentant s’est demandé comment la règle traditionnelle aut dedere aut judicare –obligation d’extrader et de poursuivre- est perçue à la lumière des conceptions modernes de juridiction universelle. À un niveau plus général, M. Ehrenkrona a souhaité que la Commission centre ses travaux sur des questions qui répondent à des besoins réels de la communauté internationale. Les sujets qui présentent un intérêt surtout théorique, et qui entraînent des difficultés pour concilier les avis, devraient être évités, a-t-il estimé, exprimant sa préférence pour ceux qui permettent de codifier le droit international. Enfin, il a demandé que la CDI continue à rechercher des moyens de rendre ses sessions plus productives et aussi efficaces que possible.
Protection diplomatique
M. WEGGER CHRISTIAN STROMMEN (Norvège), au nom des pays nordiques, a fait part de sa satisfaction générale face au projet d’articles sur la protection diplomatique, qui répond à la demande des pays nordiques tendant à obtenir des dispositions dépourvues d’ambiguïté permettant de satisfaire les besoins des praticiens du droit. Concernant le projet d’article 5, qui traite de la nécessité d’un lien continu de nationalité jusqu’au moment du dépôt de la plainte par l’État, voire jusqu’au moment du règlement du litige ou du jugement, le représentant a estimé parfois difficile de fixer la date exacte du règlement du différend. Considérant qu’il existe autant d’arguments en faveur des deux solutions, le représentant a souhaité connaître les commentaires d’autres États avant toute discussion plus avancée au sein de la CDI.
Le représentant s’est félicité de l’inclusion d’un article 8 relatif à la protection diplomatique en faveur des réfugiés et apatrides, tout en admettant que cet article tend à s’éloigner de la conception traditionnelle selon laquelle un État ne peut exercer sa protection diplomatique qu’au profit de l’un de ses nationaux. Il a également noté que le terme de “réfugié” tel que mentionné dans le projet d’article n’est pas nécessairement limité aux réfugiés aux termes de la Convention de 1951 et de ses Protocoles. Pour les pays nordiques, un État est fondé à exercer sa protection diplomatique également au nom d’un étranger résidant légalement et habituellement dans le pays et qui, selon l’État, a clairement besoin d’une protection sans pour autant satisfaire formellement aux conditions d’obtention du statut de réfugié.
Le représentant s’est également dit satisfait que la CDI codifie les règles relatives à la protection diplomatique sur la base de l’arrêt de la CIJ la Barcelona Traction. Cet arrêt, rendu en 1970 par la CIJ, fixe un bon équilibre entre les intérêts de la société et ceux des actionnaires, a-t-il estimé. Les projets d’articles, a-t-il également estimé, n’excluent pas la protection exercée par l’État du pavillon et réciproquement. Des dispositions importantes fixées par le droit de la mer sont ainsi préservées, a estimé le représentant, qui a souhaité que les projets d’articles puissent rapidement passer en seconde lecture et soient adoptés sous la forme d’une convention. Ainsi, nous aurons renforcé la clarté juridique et la prévisibilité dans un domaine important du droit international, a estimé M. Strommen.
M. JAN CISEK (République tchèque) s’est félicité de l’adoption en première lecture par la CDI de ses projets d’articles relatifs à la protection diplomatique. Il a noté avec satisfaction que la CDI a décidé de se limiter au concept traditionnel de protection diplomatique selon lequel il appartient à l’État de nationalité du ressortissant d’exercer, à sa discrétion, et en son nom, la protection diplomatique au profit d’une personne physique ou morale lésée par un acte internationalement illicite allégué par un autre État. Concernant les conditions dans lesquelles peut s’exercer la protection diplomatique, le représentant a exprimé sa satisfaction. Les principes fondamentaux des projets d’articles reflètent bien la jurisprudence générale de la Cour internationale de Justice dans son arrêt Barcelona Traction, a estimé M. Cisek. Il a également appuyé la position de la CDI selon laquelle la position exprimée par la CIJ dans l’affaire Nottebohm ne doit pas être interprétée comme une règle générale du droit international applicable à tous les États.
Le représentant a par ailleurs rappelé que la nécessité d’un épuisement préalable des voies de recours internes pour que la protection diplomatique puisse s’exercer et les exceptions à cette règle de base relèvent du droit international coutumier et ont été rappelées par la CIJ dans l’affaire Interhandel. Il a donc déclaré adhérer en principe aux exceptions telles que mentionnées dans le projet d’article 16. Toutefois, la République tchèque n’est pas convaincue de la nécessité d’inclure une disposition séparée concernant les délais excessifs ou des procédures déraisonnablement longues. Enfin, le représentant a estimé que la protection accordée par l’État du pavillon à des équipages de navires d’une autre nationalité que celle de l’État du pavillon ne relève pas de la protection diplomatique mais d’autres procédures en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, comme l’indique le projet d’article 17.
M. Cisek a rappelé que le sixième rapport du Rapporteur spécial sur la protection diplomatique concerne exclusivement la théorie dite des « mains propres » (clean hands), selon laquelle un État ne saurait exercer sa protection diplomatique au profit d’un de ses ressortissants lésés du fait d’un acte internationalement illicite de la part d’un autre État si la lésion est la conséquence d’un acte illicite de ce ressortissant. Selon le représentant, dans le contexte de la protection diplomatique, la théorie des « mains propres » pourrait être invoquée à l’encontre d’un État exerçant sa protection diplomatique seulement en relation avec des actes de cet État, et non en relation avec des actes de son ressortissant. En outre, la République tchèque tend à considérer comme le Rapporteur spécial qu’il n´existe pas d’autorité suffisante pour justifier l’inclusion dans les projets d’articles de dispositions relatives à la doctrine des « mains propres ».
M. GAO FENG (Chine) s’est dit satisfait en général des projets d’articles relatifs à la protection diplomatique, tout en émettant quelques réserves sur les commentaires qui les accompagnent, notamment sur le projet d’article 12 concernant les actionnaires d’une société qui solliciterait la protection diplomatique, et qui n’auraient pas la même nationalité que celle de la société en question. Concernant les conditions justifiant le recours à la protection diplomatique alors que les voies de recours internes ne sont pas épuisées, le représentant s’est demandé qui allait juger de l’existence de ces conditions. Il a déclaré voir favorablement le projet d’article 19 dans la mesure où la possibilité offerte à l’État du pavillon d’exercer sa protection diplomatique au profit des membres d’un équipage relevant d’une autre nationalité n’affecte pas le droit de l’État dont ces personnes sont ressortissantes d’exercer sa propre protection diplomatique. En même temps, et sans s’opposer par principe au développement progressif du droit international, le représentant s’est demandé si ce droit était bien établi dans le droit international.
M. Gao a félicité la CDI pour l’adoption des projets de principes concernant la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, trois ans seulement après avoir adopté le volet « prévention » de l’étude. Les articles sur la prévention constituent un guide utile pour les États dans la prévention des dommages transfrontières. Toutefois, la prévention n’élimine pas complètement le risque de dommages. Dès lors, la compensation pour les victimes des dommages transfrontières constitue un problème grave que la communauté internationale doit résoudre, a-t-il ajouté. Les projets de principes sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses visent à traiter la question dans une perspective générale. Ils sont, dans l’ensemble, équilibrés et contribuent de manière importante à la solution des questions de compensation. Il a déclaré soutenir le principe de compensation rapide et adaptée aux victimes tout en affirmant que la responsabilité principale doit incomber à l’opérateur, que les projets de principes sont par nature complémentaires aux régimes existants et ne devraient pas imposer de changement majeur sur les régimes internes des États. M. Gao a en outre émis des réserves sur l’inclusion dans la définition des dommages causés à l’environnement. Pour la Chine, la notion de dommage causé à l’environnement n’est pas suffisamment fondée sur le droit international. En outre, la notion le responsabilité stricte manque de flexibilité, a estimé le représentant, pour qui les projets de principes devraient prendre en compte l’approche de certains traités et adopter un régime combinant la responsabilité stricte et la responsabilité par défaut. Enfin, M. Gao a estimé que les projets de principes devraient prendre la forme d’une déclaration, de principes directeurs ou de Loi type, et également servir de base à une future convention.
M. EUGENIO CURIA (Argentine) a loué les efforts de la Commission du droit international pour mener à bien la rédaction des neuf projets sur les thèmes de la protection diplomatique et de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international. En 2006, la Commission pourra achever l’examen de ces sujets, a-t-il estimé. En ce qui concerne le projet d’articles sur la protection diplomatique, il a déclaré le soutenir en ce qu’il constitue un plan de protection diplomatique classique qui vise à rendre effective la responsabilité des États pour fait internationalement illicite. La solution sur les apatrides et les réfugiés est adéquate, a-t-il estimé. Sur la règle des « mains propres » relative à la conduite du ressortissant, elle ne constitue pas à ses yeux un autre préalable à l’exercice de l’action. Dans sa synthèse, le représentant a jugé qu’on peut améliorer le texte en deuxième lecture, mais qu’il est déjà acceptable.
Sur le thème de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, M. Curia s’est prononcé en faveur d’une déclaration de l’Assemblée générale qui contiendra les règles générales. Il s’est félicité du contenu des principes, en particulier celui qui prévoit que les victimes des dommages transfrontières ont droit à une réparation prompte et adéquate. Il est utile que ces principes énoncent les obligations des États impliqués. Un autre principe important à ses yeux est celui selon lequel c’est sur l’exploitant que pèse la responsabilité objective. Dans ce domaine, il est évident que les progrès se feront aussi dans les traités sectoriels, a-t-il conclu.
M. IVO BRAGUGLIA (Italie) a apprécié le texte équilibré que la Commission du droit international a pu achever sur le thème de la protection diplomatique. Il a bien accueilli la solution de la Commission qui n’admet la protection des actionnaires à l’égard d’un préjudice à la société que si elle a cessé d’exister ou encore dans une autre hypothèse précise. À son avis, la solution limitée adoptée est conforme au droit international qui, contrairement à la tendance constatée dans la pratique conventionnelle, n’augmente pas les cas de protection des actionnaires pour des préjudices causés aux sociétés respectives. S’agissant de la protection des membres des équipages de navires, M. Braguglia a jugé opportun de permettre l’intervention de l’État du pavillon, même si à un titre différent de celui de la protection diplomatique. Cela permet de ne pas laisser les membres de l’équipage dépourvus en pratique de toute protection, a-t-il noté. Pour le représentant, l’article 17, qui prévoit le recours éventuel à d’autres actions ou procédures, est particulièrement important dans la mesure où il laisse ouverts les recours en matière de protection des droits de l’homme et de protection des investissements.
Sur le sujet de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant a ensuite déclaré que le texte adopté est certes de portée limitée mais toutefois positif. C’est un guide utile dans ce domaine, a-t-il estimé, dans la mesure où il porte à l’attention des États l’exigence d’une couverture plus adéquate des risques inhérents à des activités dangereuses. Il a conclu en indiquant comprendre que la Commission du droit international choisisse de ne pas élaborer un projet de convention générale. Il a aussi souhaité que les principes soient adaptés aux circonstances et développés en détail.
M. JULIAN LUDBROOK (Nouvelle-Zélande) a abordé le sujet de la protection diplomatique, dont l’essence est, selon lui, résiduelle, du fait des développements des traités en matière de droits de l’homme et d’investissements bilatéraux. Sa délégation aurait souhaité une disposition plus protectrice sur les réfugiés et les apatrides, a-t-il indiqué, mais elle a apprécié de façon générale le compromis qui sous-tend certaines formulations dans le texte. Il s’est aussi félicité de la manière dont la Commission a traité de la délicate question de la protection des actionnaires et de l’ajout des dispositions sur l’équipage des navires.
En ce qui concerne le thème de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international, le représentant a déclaré que, si la protection est une question clef, il ne faut pas oublier la détermination de celui qui doit supporter le coût du dommage. M. Ludbrook a par ailleurs relevé que la Commission du droit international a reconnu le besoin d’appliquer un cadre juridique plus cohérent et plus général pour toutes les activités dangereuses. Il a félicité la CDI pour les efforts importants accomplis concernant les questions difficiles dans ce domaine. Notre délégation soutient les projets de principes, a-t-il affirmé. La forme que ces projets devraient prendre doit permettre une acceptation générale, a-t-il poursuivi, en évitant d’exiger une harmonisation des législations nationales sur la responsabilité.
Faisant référence aux principes eux-mêmes, M. Ludbrook a fait part de ses commentaires, notant par exemple que les principes constituent un guide pour le développement du droit international. Il a considéré aussi que ces projets de principes sont cohérents avec ceux des articles sur la responsabilité des États. À ses yeux, le langage utilisé diffère de celui de certains instruments spécifiques aux secteurs concernés en ce qu’il est plus général, mais cela permet le développement du droit international. Dans la région des pays nordiques, le représentant a indiqué que des zones sont à risque du fait de dommages significatifs à l’environnement maritime qui engendre des dommages pour les industries de pêche et de tourisme. Il a considéré essentiel que de tels dommages soient indemnisés. Pour lui, il est aussi important que les projets de principes, comme ils le font, définissent l’environnement de façon large. Pour conclure, le représentant a salué la finalisation des projets de principes par la CDI qui est, à ses yeux, un pas important pour combler le vide dans la superstructure juridique internationale actuelle.
Mme IRMA ERTMAN, Directeur général pour les affaires juridiques au Ministère des affaires étrangères de la Finlande, s’exprimant au nom des pays nordiques, s’est félicitée de l’adoption des projets de principes par la CDI sur le sujet de la responsabilité internationale pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui ne sont pas interdites par le droit international. Elle a notamment apprécié le caractère pragmatique de ces principes, dans le sens où ils sont destinés à assurer davantage une indemnisation plutôt qu’une politique sur l’environnement. La représentante a cité les dispositions qu’elle juge particulièrement importantes et tout d’abord le principe général qui tend à indemniser les victimes de dommages transfrontières. À cet égard, elle a rappelé l’origine du principe qui était contenu dans l’article 22 de la Déclaration de Stockholm de 1972 et dans le principe 13 de la Déclaration de Rio de 1992. Mme Ertman s’est aussi déclarée satisfaite du principe selon lequel la responsabilité est engagée sans avoir à démontrer la faute. Elle a soutenu l’idée selon laquelle les dommages causés à l’environnement doivent être le fondement même d’une action en justice, tout en appuyant l’idée d’établir un régime de la responsabilité sur l’opérateur. S’agissant du titre de la question, la représentante a estimé qu’il n’était pas assez précis pour désigner les principes considérés. Le dommage, a-t-elle poursuivi, ne devrait pas être qualifié de « significatif ». Elle a noté à cet égard que le commentaire ne mentionne pas de conventions qui utiliseraient ce qualificatif. Quant à la forme que devrait prendre l’instrument, Mme Ertman a émis des doutes sur l’utilité d’élaborer une convention et a préféré une résolution de l’Assemblée générale de l’ONU qui adopterait les projets de principes. L’adoption pourrait se faire en même temps que celle de l’instrument sur la prévention des dommages transfrontières découlant d’activités dangereuses, a-t-elle conclu.
M. TODD BUCHWALD (États-Unis) s’est félicité que la CDI ait revu avant de les adopter certains de ses projets d’articles sur la protection diplomatique et, en particulier, les dispositions concernant l’épuisement des voies de recours internes. Les États-Unis avaient fait remarquer l’an dernier les limitations alors imposées n’étaient pas conformes au droit international coutumier, qui oblige les personnes lésées à utiliser toutes les voies de recours effectives, a rappelé le représentant. Les États-Unis considèrent ces changements comme positifs, tout en se disant troublés par les commentaires et par certaines des exceptions mentionnées au projet d’article 16. Les États-Unis se félicitent également que les projets d’articles ne tentent pas de définir les relations entre protection diplomatique et protection fonctionnelle. L’exclusion de toute disposition relative à cette dernière est une bonne chose dans la mesure où le droit de la protection fonctionnelle est relativement peu défini et parce que ce thème excède le champ d’application des projets, a estimé le représentant.
Le représentant a toutefois émis diverses réserves. Il a estimé que le projet de texte actuel devrait se limiter à la codification du droit international coutumier en matière de protection diplomatique ou, au plus, s’en éloigner ou le compléter seulement sur la base de politiques saines s’appuyant sur un large consensus. Un certain nombre de projets d’articles actuellement adoptés ne remplissent pas ces critères, a affirmé le représentant. Il a cité en ce sens les dispositions concernant la règle de nationalité continue qui s’écarte, selon lui, de manière injustifiable du droit international coutumier. Cité dans la décision du tribunal arbitral de l’ALENA dans l’affaire Loewen, le droit international coutumier requiert une nationalité continue depuis le moment où la personne subit le préjudice jusqu’au moment du règlement du différend, a rappelé le représentant. Le représentant a par ailleurs estimé que les dispositions du projet d’article 11 concernant la protection des actionnaires de société ne sont pas conformes au droit international coutumier. Le représentant a donc encouragé la CDI à harmoniser ses projets d’articles avec le droit international coutumier.
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