COMMISSION JURIDIQUE: LE CLIVAGE ENTRE LA RÉALITÉ ET LES OBLIGATIONS QUI DÉCOULENT DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE EST JUGÉ INACCEPTABLE
Communiqué de presse AG/J/3252 |
Sixième Commission
5e séance – après-midi
COMMISSION JURIDIQUE: LE CLIVAGE ENTRE LA RÉALITÉ ET LES OBLIGATIONS QUI DÉCOULENT DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE EST JUGÉ INACCEPTABLE
Les instruments de droit international humanitaire en vigueur sont toujours d’actualité mais leur contenu est trop souvent bafoué et leur mise en œuvre reste le principal défi à relever, a affirmé cet après-midi le représentant de la Suisse devant la Sixième Commission (Commission juridique) qui examinait la question de l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949 relatifs à la protection des victimes des conflits armés. Jugeant « inacceptable » le clivage entre la réalité et les obligations qui découlent du droit humanitaire, le représentant a soutenu qu’aucune raison ne peut justifier les violations du droit humanitaire qui, a-t-il rappelé, est précisément le droit minimal applicable en situation de conflits armés. Comme la plupart des représentants qui ont pris la parole, il a appelé les États qui ne sont pas encore parties aux Protocoles additionnels à y adhérer, ainsi qu’au Statut de Rome de la Cour pénale internationale. La CPI et les autres Tribunaux pénaux internationaux constituent des instruments importants dans la lutte contre l’impunité face aux violations du droit international humanitaire, a ainsi estimé la représentante des Pays-Bas. Plusieurs orateurs ont également insisté sur la nécessité d’intégrer dans le droit interne des États les dispositions des Conventions de Genève et de leurs Protocoles additionnels, afin de poursuivre plus efficacement les auteurs des violations. La majorité des délégations ont par ailleurs rendu hommage aux efforts du Comité international de la Croix-Rouge pour son activité « inlassable » en faveur de la diffusion et de l’application du droit international humanitaire.
Plusieurs délégués ont souligné l’importance de la Convention sur la protection des biens culturels en période de conflit armé, dont on célébrait en 2004 le 50e anniversaire, et se sont félicités de l’entrée en vigueur cette année de son deuxième protocole. De tels biens doivent être protégés non seulement en raison de leur valeur intrinsèque pour l’humanité et les générations futures, mais aussi parce que les attaques contre eux peuvent jouer un rôle de catalyseur de violences à venir, a estimé l’observateur du CICR. Ils ont également regretté que l’outil constitué par la Commission internationale d’établissement des faits prévue par l’article 90 du Protocole I n’ait jamais été utilisé.
Par ailleurs, des représentants ont demandé que la quatrième Convention de Genève soit appliquée dans le Territoire palestinien occupé, ce qui a amené le représentant d’Israël à exercer son droit de réponse.
Lors du débat, les représentants suivants ont pris la parole: Pays-Bas (au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés), Suisse, Japon, Émirats arabes unis, Cuba, Thaïlande, Chine, Ukraine, Suède (au nom des pays nordiques), République de Corée, Mexique, Algérie, Fédération de Russie et Tunisie, ainsi que les observateurs de la Palestine et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). À la fin du débat, les représentants d’Israël et de la Jordanie, ainsi que l’Observateur de la Palestine ont exercé leur droit de réponse.
La Commission a par ailleurs examiné la question des mesures efficaces visant à renforcer la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires.
Au cours du débat, les délégations ont réaffirmé l’importance des règles de protection diplomatique et consulaire, qualifiées d’« obligation impérative » par le délégué du Burkina Faso, alors que celui du Mali parlait d’une « obligation de résultat » pour les États. De l’avis du représentant de la Norvège, la raison fondamentale qui sous-tend cette protection est la nécessité de protéger les voies de communication entre les États. La plupart des délégations ont regretté l’augmentation des incidents touchant le personnel et les locaux diplomatiques et consulaires au cours des dernières années, comme le récent attentat de Djakarta contre l’ambassade australienne. Beaucoup ont appelé les États non encore parties aux instruments internationaux dans ce domaine à y adhérer.
Outre ceux déjà cités, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Pays-Bas (au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés), Norvège (au nom des pays nordiques), Cuba, Australie et Indonésie.
La Sixième Commission examinera demain matin, jeudi 14 octobre, le point de son ordre du jour relatif à la Cour pénale internationale.
ÉTAT DES PROTOCOLES ADDITIONNELS AUX CONVENTIONS DE GENÈVE DE 1949 RELATIFS À LA PROTECTION DES VICTIMES DES CONFLITS ARMÉS (A/59/31)
Déclarations
Mme CETA NOLAND (Pays-Bas), s’exprimant au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés, a rappelé que les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels sont des instruments d’une importance majeure. Il a invité les États qui ne l’ont pas encore fait à y adhérer, et à ratifier également le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. La Cour, a-t-elle affirmé, constitue un instrument important dans la lutte contre l’impunité face aux violations du droit international humanitaire, dont le respect est essentiel dans un monde déchiré par les conflits armés. Tous ceux qui se trouvent dans une situation de troubles et de violence ont besoin d’une protection adaptée, et les États doivent donc être pleinement conscients de leur responsabilité.
En décembre 2003, à l’occasion de la 28e Conférence internationale de la Fédération de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, l’Union européenne a pris des engagements, outre ceux pris individuellement par ses États membres, pour renforcer la mise en œuvre du droit international humanitaire, a rappelé Mme Noland. La représentante a rendu hommage au « travail inlassable » du CICR en faveur de la mise en œuvre du droit international humanitaire en période de conflit armé et a rappelé que les États ont une obligation spécifique de coopérer avec le CICR. La représentante a en outre félicité la Suisse pour son œuvre de promotion du droit international humanitaire et des Conventions de Genève qui, a-t-elle estimé, va bien au-delà de ce qui est attendu d’un État partie.
Les tribunaux pénaux internationaux ont joué un grand rôle pour développer le droit international humanitaire, notamment en déterminant les paramètres de la responsabilité du commandement ou encore ceux des éléments du droit international humanitaire qui font partie du droit coutumier, a déclaré Mme Noland. Tout aussi importantes aux yeux de la représentante sont les mesures d’application du droit international humanitaire prises au niveau national. Mme Noland a notamment insisté sur la nécessité d’incriminer le génocide et les crimes contre l’humanité, afin qu’il soit possible d’en poursuivre les auteurs dans le cadre du droit interne.
La représentante a par ailleurs déploré que l’outil constitué par la Commission internationale d’établissement des faits prévue par l’article 90 du Protocole I n’ait jamais été utilisé. Étant donné la qualité de ses experts, elle serait pourtant idéalement mieux placée pour faciliter la restauration et le respect du droit international humanitaire en période de conflit armé, a affirmé Mme Noland. Celle-ci a également noté que la Commission était disposée à offrir ses bons offices dans le cadre de conflits armés non internationaux. Mme Noland a enfin affirmé que les États membres de l’Union européenne travaillaient à la ratification de la Convention de 1954 sur la protection des biens culturels en période de conflit armé et de ses Protocoles. Enfin, l’application des Conventions de Genève et de leurs Protocoles additionnels ne constitue pas seulement une obligation juridique, mais aussi une obligation morale. En tant que membres des Nations Unies, nous nous devons de concrétiser les attentes que suscitent ces instruments en matière de protection, a conclu la représentante.
M. JÜRG LAUBER (Suisse) a rappelé le nombre d’États parties aux Conventions de Genève et aux Protocoles additionnels, précisant que 68 États ont reconnu la Commission d´établissement des faits prévue à l’article 90 du Protocole I. Il a invité tous les États qui ne l’ont pas encore fait à devenir parties aux Conventions et Protocoles additionnels, et à reconnaître la compétence la Commission, y compris pour les conflits armés non internationaux. Il a également invité les États à adhérer au deuxième Protocole relatif à la Convention de La Haye de 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflits armé, qui est entré en vigueur le 9 mars 2004. La Suisse, a-t-il rappelé, a ratifié ce Protocole le 9 juillet 2004.
Le droit humanitaire est trop souvent bafoué, a rappelé le représentant, pour qui le clivage entre la réalité et les obligations qui découlent du droit humanitaire est inacceptable. Aucune raison ne peut justifier les violations du droit humanitaire qui est précisément le droit minimal applicable en situation de conflits armés, a rappelé M. Lauber. Nul n’est au-dessus du droit et nul ne doit voir sa protection niée, a affirmé le représentant, pour qui les instruments de droit international humanitaire en vigueur sont toujours d’actualité. Le principal défi auquel nous devons faire face reste leur mise en œuvre, a poursuivi M. Lauber, qui a invité tous les États à renforcer l’efficacité de la mise en œuvre du droit international humanitaire. Dans ce contexte, la Suisse rappelle à tous les États parties aux Conventions et Protocoles additionnels leur obligation de prendre toute mesure législative nécessaire pour incriminer les infractions graves au droit international humanitaire, fixer des sanctions pénales adéquates et appliquer le principe « aut dedicare aut dedere ». Le représentant a rappelé le rôle de la Cour pénale internationale comme outil de renforcement du respect du droit international humanitaire. M. Lauber a par ailleurs rappelé que l’obligation de tout État à faire respecter les règles du droit international humanitaire s’applique aussi à l’engagement et à la supervision d’entreprises privées militaires ou de sécurité actives dans un contexte de conflit armé.
L’Assemblée générale a de nouveau demandé, le 20 juillet 2004, faire respecter la quatrième Convention de Genève dans le territoire palestinien occupé, a rappelé le représentant. La Suisse œuvre actuellement pour mener des consultations et présenter à l’Assemblée générale un rapport sur la question, conformément à la même résolution de l’Assemblée, a déclaré M. Lauber. Le représentant a enfin salué le « travail remarquable » accompli par le CICR et ses délégués lors de conflits armés et dans la diffusion du droit international humanitaire.
M. HIROSHI TAJIMA (Japon) s’est félicité du rapport du Secrétaire général sur l’état des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949, relevant qu’il contient des informations utiles et à jour. Il a indiqué que son pays a adhéré aux Protocoles additionnels et que son gouvernement a pris les mesures nécessaires pour les ratifier. Les instruments requis par cette procédure ont été déposés le 31 août dernier auprès des instances compétentes, a-t-il précisé. Enfin, M. Tajima a réaffirmé que le Japon est déterminée à poursuivre tous ses efforts pour contribuer au développement du droit international humanitaire dans la communauté internationale.
M. SALIM IBRAHIM AL-NAQBI (Émirats arabes unis) a rappelé les scènes de terreur, de destruction, de viols et autres violations graves qui ont affecté ces dernières années les groupes les plus vulnérables de la société, en particulier les enfants et les femmes. Les civils ne sont pas les seules victimes, a-t-il relevé, citant les institutions humanitaires internationales qui ont été la cible d’attaques et qui sont également protégées par le droit international humanitaire. Il a regretté que malgré les recommandations de la Commission d’établissement des faits, certaines de ces mesures ont connu des échecs répétés en matière de prévention des violations et cela a eu des effets négatifs sur la paix et la sécurité internationales et la stabilité dans le monde. Il a insisté sur l’intérêt de mécanismes multilatéraux de mise en œuvre des quatre Conventions de Genève et des Protocoles additionnels. De l’avis de sa délégation, il faudrait adopter une politique non discriminatoire de poursuite des criminels pour assurer l’application de la loi. M. Al-Naqbi a indiqué que les Emirats arabes unis ont modernisé leur système de défense civile. La Croix-Rouge des Émirats a aussi apporté sa contribution, a-t-il ajouté. Il s’est déclaré alarmé par les graves violations des droits de l’homme commises par le Gouvernement israélien contre les Palestiniens et les populations arabes du Golan syrien, en violation des résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale. Il a conclu en soulignant l’importance du renforcement du rôle des Nations Unies, de la Cour internationale de Justice et de la Cour pénale internationale dans la promotion du respect des Conventions de Genève et de ses Protocoles.
Mme JUANA ELENA RAMOS RODRIGUEZ (Cuba) a rappelé que les populations civiles sont de plus en plus les victimes directes des conflits armés, en citant en exemple le sort de la population palestinienne. Il est donc plus que jamais nécessaire d’obtenir une acceptation universelle du droit international humanitaire, a estimé la représentante. Ce n’est qu’en renonçant à la guerre expansionniste et en souscrivant à nouveau à la Charte des Nations Unies et au multilatéralisme que l’on pourra faire mieux respecter le droit international humanitaire, a-t-elle affirmé. La législation nationale cubaine a intégré toutes les garanties nécessaires pour assurer le respect du droit international humanitaire, a affirmé la représentante, qui a ajouté que Cuba dispose d’un Centre d´étude du droit international humanitaire parrainé par la Croix-Rouge cubaine et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et qui contribue à la diffusion et à l’enseignement du droit international humanitaire au sein des forces militaires et de police cubaines et dans différents pays de la région.
M. MUIN BURHAN SHREIM, Observateur de la Palestine, a considéré que les deux Protocoles additionnels permettent de combler certaines lacunes des Conventions de Genève de 1949. Le Protocole I, sur les conflits internationaux, impose aux parties le respect de ses dispositions en toutes circonstances, a-t-il noté. Il a remercié le Secrétaire général pour le rapport présenté et s’est réjoui du nombre d’États qui ont adhéré aux Protocoles additionnels. Il a évoqué les nombreuses résolutions de l’Assemblée générale qui affirment le principe du premier protocole, et d’autres résolutions qui confirment l’application des Conventions de Genève aux civils palestiniens sur les territoires occupés. Il a aussi cité les avis du Comité international de la Croix-Rouge et de la Cour internationale de Justice, indiquant que la quatrième Convention de Genève de 1949 s’applique à ce cas. À ses yeux, il existe un consensus de la communauté internationale pour que cet instrument s’applique aux territoires palestiniens occupés, mais Israël s’entête à ne pas les appliquer, agissant constamment en violation des Conventions de Genève. Ces violations sont commises en toute impunité, a-t-il déclaré.
Le représentant a considéré qu’il s’agit là d’un échec flagrant de la communauté internationale dans la mise en œuvre du droit international humanitaire, qui a permis à Israël de poursuivre l’implantation de colonies de peuplement dans le Territoire palestinien occupé et d’édifier le mur litigieux, empêchant le peuple palestinien d’accéder à l’autodétermination. Israël doit mettre fin à ces pratiques illégales. Garantir le respect du droit international humanitaire dans ce Territoire est un enjeu international, a-t-il souligné, en en rappelant que l’Assemblée générale, par sa résolution 1510, paragraphe 7, en date du 20 juillet 2004, avait demandé à tous les États Membres d’enjoindre à Israël de se conformer aux Conventions de Genève.
M. ITTIPORN BOONPRACONG (Thaïlande) a expliqué qu’en novembre dernier, l’actuel Gouvernement thaïlandais a décidé d’adhérer au Protocole additionnel I. La Thaïlande est actuellement en train de rédiger les dispositions législatives nécessaires à la mise en œuvre de l’ensemble des dispositions du Protocole, en particulier en ce qui concerne les poursuites contre les criminels de guerre, a expliqué le représentant. De même, le Code pénal a d’ores et déjà été amendé afin d’appliquer pleinement la disposition du Protocole I qui interdit l’application de la peine de mort aux mineurs de 18 ans pour des faits liés à un conflit armé, a-t-il ajouté. La participation des États aux conventions internationales est un premier pas essentiel mais les États sont aussi tenus de se doter d’une législation nationale afin de respecter et faire respecter le droit en toute circonstance, a rappelé le représentant. En amendant sa législation, la Thaïlande entend se joindre à la famille des États parties au Protocole I et à montrer à la communauté internationale son fort engagement en faveur du respect du droit international humanitaire, a conclu le représentant.
M. GUAN JIAN (Chine) a rappelé que son gouvernement a toujours reconnu l’importance des Conventions et des Protocoles additionnels relatifs à la protection des victimes dans les conflits armés. Il a souhaité que ces instruments soient mieux appliqués. Dès son adhésion aux Protocoles additionnels, en 1983, la Chine les a toujours respectés, a-t-il précisé. Il a ajouté que le droit pénal chinois contient des dispositions spécifiques sur les atrocités commises par les militaires sur des civils innocents, à titre d’exemple. Une loi de 1997 dispose que la chine doit respecter les traités et accords conclus avec les pays, a-t-il poursuivi, ce qui démontre le respect par la Chine des Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels. Le représentant a expliqué que le personnel des forces armées est formé pour connaître les dispositions du droit international humanitaire, des séminaires étant notamment organisés. Le Gouvernement chinois appuie les travaux du Comité international de la Croix-Rouge de la République populaire de Chine qui définit les statuts de celui-ci. Avec le CICR, a indiqué M. Jian, la Croix-Rouge chinoise a organisé des séminaires pour la diffusion du droit international humanitaire en Chine.
M. OLEKSANDER KUPCHYSHYN (Ukraine) a rappelé que son pays est devenu partie aux Protocoles additionnels en 1990 et a reconnu la compétence de la Commission internationale d’établissement des faits. Les parties aux conflits contemporains cherchent trop souvent non à vaincre leur rival, mais à l’exterminer, et les civils, autrefois des victimes collatérales, sont aujourd’hui les véritables cibles des conflits, a constaté le représentant. C’est pourquoi, il faut respecter pleinement les dispositions des Conventions de Genève et de leurs Protocoles additionnels, a affirmé M. Kupchyshyn, qui a souhaité que ces instruments deviennent universels. Le représentant a souligné la contribution importante du Conseil de sécurité dans la protection des civils en période de conflits armés, et notamment la protection des enfants, et a souligné à cet égard la force exécutoire des résolutions du Conseil. Le représentant a rendu hommage au travail du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans la protection et la diffusion du droit international humanitaire et a rappelé que l’Ukraine a ratifié le 4 juin 2004 un traité qu’elle avait conclu avec le CICR pour l’ouverture d’un bureau en Ukraine.
M. JERZY MAKAROWSKI (Suède), s’exprimant au nom des pays nordiques, a estimé fondamental que les Conventions de Genève et les Protocoles additionnels relatifs à la protection des victimes dans les conflits armés soient appliqués par tous les États et les individus intervenant dans des conflits armés. Il faut parfois développer le droit international humanitaire et les pays nordiques y contribuent, a-t-il expliqué. Pour sauver des vies humaines et réduire les souffrances, nous devons améliorer le respect du droit international humanitaire, a-t-il poursuivi. Convaincu que la Cour pénale internationale jouera un rôle primordial, il a appelé à une adhésion plus grande au Statut de Rome. De l’avis de sa délégation, la Commission internationale d’établissement des faits doit aussi jouer son rôle dans ce domaine. Il a par ailleurs souhaité que la communauté internationale agisse de façon préventive avec des programmes de sensibilisation. Enfin, il a souligné le rôle du CICR et salué le travail accompli par celui-ci. Le représentant a invité tous les États et toutes les entités à respecter le droit international humanitaire, notamment la protection des civils.
M. AHN EUN-JU (République de Corée) a déclaré que son pays a ratifié de nombreux traités touchant au droit humanitaire et au droit de la guerre. Il a également ratifié l’article 90 du Protocole additionnel I au printemps 2004. La République de Corée envisage également d’adhérer à la Convention de 1954 sur la protection des biens culturels en période de conflits armés et à ses deux protocoles, a-t-il ajouté. La représentante a estimé qu’il faut en outre diffuser et faire connaître le droit international humanitaire aux forces armées et de police et au grand public, indiquant qu’à cet égard, son pays a établi un comité national pour sensibiliser le public au droit humanitaire.
M. ALFONSO ASCENCIO (Mexique) a exprimé l’importance qu’accorde son pays aux Conventions de Genève de 1949 et aux Protocoles additionnels relatifs à la protection des victimes dans les conflits armés. Il se félicite qu’on examine tous les deux ans l’état des protocoles additionnels. Passant en revue les activités importantes menées ces dernières années au Mexique pour promouvoir le droit international humanitaire, comme la publication de manuels destinés au personnel de défense. Des cours sur cette matière sont obligatoires pour les membres des forces armées, tant au Mexique qu’à l’étranger, avec notamment l’appui du CICR, a-t-il indiqué. En 2003 comme en 2004, a aussi expliqué M. Ascencio, le Mexique a procédé à une large diffusion des projets de résolution de l’Organisation des États américains concernant la protection des civils dans les conflits armés. Il a aussi mentionné les efforts de son pays au niveau régional, comme une réunion régionale d’experts qui a servi à la préparation de la 28e réunion de la Fédération de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à Genève en 2003. La collaboration entre le Mexique et le CICR qui est très développée depuis plusieurs années, a été renforcée depuis l’ouverture d’un bureau du CICR à Mexico, a indiqué le représentant.
M. ALI HAFRAD (Algérie) a rappelé que son pays est partie à la plupart des instruments du droit international humanitaire et que l’Algérie a notamment ratifié le 9 octobre 2001 la Convention d’Ottawa de 1997 sur les mines antipersonnel, qui, a-t-il estimé, reflète l’une des préoccupations du droit international humanitaire, à savoir la limitation des moyens utilisés en période de conflit armé. Le représentant s’est par ailleurs félicité du rapport du Secrétaire général sur la protection des civils en période de conflit armés, mais a déploré que ce rapport comporte une lacune majeure: la protection de la population civile dans les territoires sous occupation n’y est traitée que de façon incidente, a-t-il estimé. Le représentant a enfin rendu hommage au rôle du CICR.
M. STEPAN KUZMEMKOV (Fédération de Russie) a indiqué que son pays accorde beaucoup d’importance aux Conventions de Genève de 1949 et aux Protocoles additionnels relatifs à la protection des victimes dans les conflits armés. Il a comparé les Conventions à une constitution fondant le droit international humanitaire et les Protocoles additionnels à des lois constitutionnelles. Les frontières de ce droit se sont beaucoup étendues depuis sa création, a-t-il noté. Il a appuyé l’appel du Secrétaire général à tous les pays qui ne sont pas encore parties aux Protocoles additionnels à y participer. Le travail effectué par le CICR est de la plus haute importance, a-t-il souligné, ainsi que celui des sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dans la tâche de diffusion de la connaissance du droit international humanitaire. Il a estimé qu’il faut parler de certaines insuffisances dans les Protocoles additionnels. Le recours des États à la Commission d’établissement des faits, le recours des États à cette Commission devrait permettre de renforcer les principes d’impartialité et d’équité dans les poursuites engagées en matière de crimes de guerre.
M. DANIEL HELLE, Observateur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a encouragé les États à envisager de devenir parties à tous les instruments de protection des victimes en période de conflits armés afin de les rendre universels, et à adopter toute mesure nécessaire pour donner effet au niveau national à ces normes internationales. M. Helle a rappelé que 192 États sont actuellement parties aux Conventions de Genève, 165 au Protocole additionnel I et 156 au Protocole II. Il a noté avec satisfaction que plusieurs autres États ont exprimé leur intention d’adhérer à ces instruments fondamentaux du droit international humanitaire ou ont pris des mesures préliminaires en ce sens.
M. Helle s’est également réjoui de l’état des ratifications au Statut de la Cour pénale internationale, qui contribue à une répression plus efficace des auteurs de violations graves du droit international humanitaire, y compris les crimes de guerre. Il est largement admis que la lutte contre l’impunité sera mieux assurée grâce à un système complet de juridictions nationales et internationales qui se complètent les unes les autres, a affirmé l’Observateur.
Le CICR, par son service consultatif sur le droit international humanitaire, s’engage à aider les autorités nationales à adapter leurs législations nationales aux dispositions des Conventions de Genève de 1949 et Protocoles additionnels, a déclaré M. Helle. Toutefois, l’adoption ou l’adaptation de la législation pénale n’est pas sa seule préoccupation, a poursuivi l’Observateur, qui a mentionné la protection des biens culturels. Ces derniers doivent être protégés non seulement en raison de leur valeur intrinsèque pour l’humanité et les générations futures, mais aussi parce que les attaques contre de tels biens peuvent jouer un rôle de catalyseur de violences à venir, a expliqué M. Helle. L’Observateur a rappelé qu’on célèbre cette année le 50e anniversaire de la Convention de La Haye sur la protection des biens culturels en période de conflits armés et s’est réjoui de l’entrée en vigueur de son deuxième protocole. M. Helle a par ailleurs noté que 68 comités nationaux participent à travers le monde à la compréhension, à la diffusion et au développement du droit international humanitaire. Leur rendant hommage, M. Helle a rappelé que le CICR collabore activement avec eux.
M. SABRI CHAABANI (Tunisie) a remercié le Secrétaire général des Nations Unies pour le rapport présenté, ainsi que la délégation suisse pour son exposé sur les Protocoles additionnels aux Conventions de Genève de 1949. Il a souligné l’importance de l’universalité de ces instruments, qui constituent une part intégrante du droit international humanitaire. Il a demandé à tous les pays de respecter les normes établies par ce droit, notamment le Protocole additionnel I. Le représentant a réitéré que le droit international humanitaire est applicable à la situation des territoires palestiniens occupés et a demandé que soit mis en oeuvre l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice, afin qu’Israël respecte ses engagements en vertu du droit international humanitaire.
Droits de réponse
Le représentant d’Israël, exerçant son droit de réponse, a regretté que certaines délégations utilisent la Sixième Commission à des fins politiques. Le droit international humanitaire est affaibli quand il est utilisé comme arme politique, a-t-il affirmé. Il a jugé absurdes certaines déclarations alors même qu’on assiste à des attentats terroristes qui, non seulement visent des civils, mais utilisent aussi les civils palestiniens, les écoles palestiniennes, les lieux de culte et abusent du rôle des ambulances des services humanitaires. Israël défend sa population mais respecte ses obligations en vertu du droit international humanitaire, a affirmé le représentant, qui a ajouté qu’il est plus difficile de respecter de telles obligations quand les Palestiniens utilisent eux-mêmes les civils. Il est temps de mettre fin à cette idée selon laquelle une seule partie serait responsable, a affirmé le représentant. Il s’agit d’appliquer équitablement le droit international humanitaire à toutes les parties et de tenir compte des situations réelles, et non pas d’invoquer le droit international humanitaire à sa guise, a-t-il conclu.
Le représentant de la Jordanie a reconnu que la Sixième Commission est avant tout un organe technique. Toutefois, quand on parle de l’application du droit international humanitaire, il faut placer cette application dans son contexte et on ne voit pas pourquoi on ne pourrait pas soulever à la Sixième Commission un problème relatif à l’application du droit international humanitaire. Les Conventions de Genève doivent s’appliquer au territoire palestinien occupé, a estimé le représentant, qui s’est félicité de l’intention affichée par Israël de respecter le droit international humanitaire. Mais Israël doit pour cela prendre en compte son statut de puissante occupante du territoire palestinien depuis 1967, a-t-il ajouté. En outre, a déclaré le représentant, certaines obligations découlant du droit international humanitaire doivent être respectées et il faut notamment éviter d’appliquer des sanctions collectives à la population. C’est cette situation qui doit prévaloir en Cisjordanie, a ajouté le représentant, qui a rappelé que tout État a le droit de se défendre contre des attentats terroristes.
Où peut-on examiner le respect par un État de ses engagements et obligations juridiques, si ce n’est à la Sixième Commission? s’est interrogé l’Observateur de la Palestine. Tout en accusant Israël de recourir à des attaques contre la population civile palestinienne, il a fait remarquer que personne ne nie qu’Israël a le droit de prendre des mesures pour protéger sa population civile. Toutefois, Israël doit respecter le droit international humanitaire, a-t-il souligné.
Documentation
Au titre de ce point, la Sixième Commission était saisie d’un rapport du Secrétaire général (A/59/321). Conformément à la résolution 57/14 de l’Assemblée générale en date du 19 novembre 2002, celui-ci présente les renseignements fournis par les États Membres sur les mesures prises en vue de renforcer le corps de règles en vigueur constituant le droit international humanitaire, notamment pour en assurer la diffusion et la pleine application au niveau national. Dix-huit États Membres ainsi que le Comité international de la Croix-Rouge ont transmis des renseignements. Le rapport présente en outre la liste des États parties aux Protocoles additionnels de 1977. Au 2 juin 2004, 162 États étaient parties au Protocole I relatif aux conflits armés internationaux et 157 au Protocole II relatif aux conflits non internationaux. Depuis l’adoption de la résolution 57/14, la République démocratique du Congo, déjà partie au Protocole I, a adhéré au Protocole II le 12 décembre 2002, Tonga a adhéré aux deux Protocoles le 20 janvier 2003 et le Japon a adhéré aux deux Protocoles le 31 août 2004.
EXAMEN DE MESURES EFFICACES VISANT À RENFORCER LA PROTECTION ET LA SÉCURITÉ DES MISSIONS ET DES REPRÉSENTANTS DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES (A/59/125 et Add.1)
Mme CETA NOLAND (Pays-Bas), s’exprimant au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés, a souligné que des relations diplomatiques et consulaires normales facilitent la communication entre les États et bénéficient à leurs citoyens. Assurer la protection diplomatique et consulaire est donc d’une importance primordiale, a-t-elle poursuivi. Regrettant l’augmentation des incidents touchant le personnel et les locaux diplomatiques et consulaires ces dernières années, Mme Noland a appelé les États à appliquer strictement le droit international relatif à ces questions. L’Union européenne réaffirme l’importance de ses obligations dans ce domaine, a-t-elle indiqué, conformément aux résolutions de l’Assemblée générale. Se félicitant du rapport du Secrétaire général, elle a cependant déploré que peu d’États se soient conformés aux procédures de soumission de rapports établies par l’Assemblée générale. Enfin, la représentante s’est réjouie de ce que 32 États supplémentaires participent aux conventions multilatérales relatives à la protection et la sécurité des missions et représentants diplomatiques et consulaires.
M. AASMUND ERIKSEN (Norvège), au nom des pays nordiques, a expliqué que les règles de protection diplomatique et consulaire semblent avoir existé dans toutes les cultures juridiques. De l’avis de sa délégation, il ne fait aucun doute que les États hôtes ont l’obligation de garantir la protection des représentants et des locaux des organisations diplomatiques et consulaires. Il a estimé que la raison fondamentale qui sous-tend cette protection est la nécessité de protéger les voies de communication entre les États. Ce ne sont donc pas les individus en particulier qui doivent être protégés, a-t-il poursuivi, mais il n’en reste pas moins que tout acte de violence perpétré contre un fonctionnaire est condamnable. Il a donc souligné l’importance de la collaboration étroite entre les États. Enfin, le représentant a appelé tous les États non encore parties aux instruments internationaux dans ce domaine à y adhérer. Il s’est félicité de ce que plusieurs pays sont devenus parties à ces instruments depuis l’examen du dernier rapport du Secrétaire général. Quant aux directives mises au point en la matière, elles doivent être respectées, a-t-il conclu.
Mme MERCEDES DE ARMAS GARCIA (Cuba) a exprimé sa préoccupation face à la poursuite des violences contre les missions diplomatiques et consulaires, qu’elle a condamnées. Les États doivent prendre toutes les mesures internes nécessaires pour interdire l’action sur leur territoire de tout individu ou groupe portant atteinte aux biens et personnels des missions diplomatiques et consulaires. Cuba a pris les mesures nécessaires en ce sens, a affirmé la représentante.
M. BEN PAYLE (Australie) s’est dit préoccupé devant les menaces terroristes, citant comme exemple le récent attentat qui a eu lieu à Djakarta contre l’ambassade d’Australie. Il a déploré que des civils indonésiens et des policiers aient péri à cette occasion. Son pays fournit un certain appui pour assister ces personnes, a-t-il expliqué. L’Australie apprécie le déploiement de personnel de sécurité supplémentaire depuis cet attentat, a-t-il indiqué, mais cet événement a montré que les diplomates restent un objectif prioritaire pour les criminels. Il a souhaité que tous les terroristes soient poursuivis en justice, conformément au droit international.
M. SIFANA IBSEN KONE (Burkina Faso) a affirmé que de nombreux diplomates et missions du Burkina Faso à l’étranger ont été l’objet de violences diverses, comme l’indique le rapport du Secrétaire général. Il a rappelé que la protection des missions diplomatiques et consulaires est un principe fondamental du droit international et de la pratique diplomatique. Les représentants doivent donc bénéficier dans les pays d’accueil de la sécurité nécessaire à l’exercice de leurs nobles fonctions, qui contribuent au maintien et au renforcement de la paix, de la sécurité et de la coexistence pacifique entre les États, a affirmé le représentant. Il appartient donc aux pays d’accueil de prendre toute mesure pour assurer la protection des personnels et biens des missions diplomatiques et consulaires. Il s’agit là d’une obligation impérative qui doit être pleinement respectée, a affirmé M. Kone. Le Burkina Faso respecte pleinement ses obligations en la matière et aucun rapport n’a jamais fait état d’atteintes aux biens ou personnes des missions diplomatiques et consulaires au Burkina Faso, a encore affirmé le représentant.
M. JONNY SINAGA (Indonésie) a remercié les délégations qui ont exprimé leurs condoléances après l’attentat de Djakarta, ayant causé la mort de neuf citoyens indonésiens et blessé 102 autres. Les terroristes ont cru pouvoir semer les graines de la discorde entre les peuples d’Indonésie et de l’Australie, a-t-il relevé, mais les liens solides entre ces deux pays ne peuvent pas être affectés par le terrorisme. M. Sinaga a indiqué que l’Indonésie a déjà adhéré à quatre des sept instruments internationaux. En ce qui concerne le règlement des différends, son gouvernement estime que la possibilité de règlement par la négociation devrait être privilégiée au lieu de recourir systématiquement à la procédure judiciaire.
M. DIALLO ALASSANE (Mali) a condamné énergiquement les actes de violences commis contre les personnes et biens des missions diplomatiques et consulaires. Il a réaffirmé l’adhésion de son pays aux Conventions de 1961 et 1963 sur les relations diplomatiques et consulaires et la Convention de 1973 sur la répression des actes menés contre ces missions devraient être pleinement respectées. Les privilèges et immunités constituent une garantie indispensable contre les actes de violences et les États d’accueil doivent prendre toutes les mesures appropriées pour garantir la sécurité physique des diplomates, sous peine de fragiliser les relations de confiance entre les nations, a affirmé le représentant, qui a ajouté qu’il y a avait là une obligation de résultat.
Documentation
La Commission était saisie dans ce cadre d’un rapport du Secrétaire général (A/59/125), présenté dans le cadre de la résolution 57/15 du 19 novembre 2002, par laquelle l’Assemblée générale priait notamment les États de signaler au Secrétaire général les violations graves des devoirs de protection et de sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires, ainsi que des missions et des représentants diplomatiques auprès des organisations intergouvernementales internationales. Onze rapports y sont présentés. Cinq pays ne font état d’aucune violation pendant la période considérée (Émirats arabes unis, Qatar, Liban, Slovénie, Mexique), alors que les autres signalent des violations (Burkina Faso, Allemagne, Koweït, Mali, Côte d’Ivoire, Finlande). En outre, sont rapportées les vues exprimées par deux États, en application du paragraphe 12 de la résolution 57/15.
Les Émirats arabes unis ont réaffirmé l’importance du respect du principe de la réciprocité entre les États Membres, en ce qui concerne le degré de protection offert. Le Mali note quant à lui que tous les États d’accueil doivent, sur demande des missions, mettre gratuitement à la disposition de celles-ci des vigiles de faction auprès des chancelleries et des résidences. Enfin, le rapport dresse l’état de la participation aux conventions internationales sur la protection et la sécurité des missions et des représentants diplomatiques et consulaires au 2 juin 2004. Il apparaît que, depuis le précédent rapport sur la question, 32 États supplémentaires sont devenus parties aux instruments relatifs à cette protection.
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